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Que signifie le parcours : Alchimie

poétique : la boue et l’or ?

Le recueil des Fleurs du Mal est associé au parcours « Alchimie poétique : la boue et l’or ».
Le libellé de ce parcours peut sembler énigmatique... C’est qu’il reprend les termes de
Baudelaire lui-même à propos de sa poésie !
Le titre Les Fleurs du Mal suggère un processus de transformation du mal en fleur, de la
boue en or.
Les six sections des Fleurs du Mal retracent l‘itinéraire de Baudelaire, le cheminement de son
âme qui vit une véritable descente aux enfers.
« Spleen et Idéal », « Tableaux parisiens », « Le Vin », « Fleurs du mal », « Révolte », « La
mort »

Le sonnet « L'ennemi » , extrait de la section « Spleen et idéal » des Fleurs du Mal de


Baudelaire, parle du temps au double sens du terme : à la fois comme durée
(le temps qui passe) et comme état de l'atmosphère (pluie, orage, soleil).

Problématique :

Comment le temps est-il représenté par Baudelaire ?


Le sonnet est construit sur une métaphore filée :

strophe 1 : bilan du passé et du présent


strophe 2 : Les conséquences
strophe 3 : Les questions
strophe 4 : la déploration

Premier quatrain - La jeunesse

1-Le premier quatrain se compose de deux parties complémentaires délimitées par la


ponctuation (vers 1-2 et vers 3-4).

2-Dans le premier quatrain, Baudelaire introduit le thème de la fuite du temps en présentant


sa jeunesse comme derrière lui (emploi du passé simple « ne fut ).

3-Sa jeunesse est associée à un paysage d'été, avec une alternance d’ « orage » v. 1 et de «
soleils v. 2 et il joue avk les sonorités explosives pour renforcé le sentiment d’alternance.

3.5-antithese «ténébreux orage» et «brillant soleils»

Cette alternance est métaphoriquement celle de l'espoir et du désespoir.

4-Le bilan décourageant est souligné par le passé composé « ont fait » (vers 3) et par la
proposition de conséquence« ont fait QUE ». C'est le résultat d'une jeunesse orageuse.

5-La métaphore se poursuit dans l'image du jardin (la vie) dévasté et presque entièrement
dépouillé (bien peu de fruits vermeils)de ses productions comme en automne.

Deuxième quatrain - Bilan négatif de la maturité


6-Le deuxième quatrain s'ouvre sur une constatation résignée qui apparaît comme la
conséquence (« Voilà que », vers 5) sur le plan de la pensée de la première strophe. C'est un
résultat donné en deux étapes successives (« voilà que »... « et que », vers 5 et 6).
6-Il fait apparaître une suite chronologique (l'automne après l'été).

7-L'image du jardin est prolongée et aggravée (dévastation et nécessité de réparation).


L'utilisation de termes concrets (« pelle », « râteaux ») et l'accumulation des images font de
cette strophe une illustration visuelle des désastres du temps. Le lexique de la perte et de la
destruction y est très présent, notamment dans les vers 7 et 8 : « les terres inondées / où
l'eau creuse des trous grands comme des tombeaux ».

8-Ces désastres préfigurent la mort, comme le suggère la comparaison du vers 8 (« comme


des tombeaux ») : la vie et l'inspiration sont ravagées par le temps.

Premier tercet - Espoir d'un renouveau

9-Le premier tercet suggère une hypothèse (alors que le 2eme apparaissez comme une
conséquences) « Et qui sait » qui apparaît comme un élan d'espoir.

10-Cet élan prend appui sur les images de la strophe précédante dans le cycle des saisons,
l'automne, puis l'hiver associé à la mort.

11-Cela fait espérer le renouveau du printemps (« fleurs nouvelles », vers 9).

12-  La mention des « fleurs nouvelles » v.9 peut se comprendre comme une métaphore des
poèmes à venir. Ces poèmes seraient nouveaux au sens où le poète aurait retrouvé
l'inspiration mais aussi par leur modernité.

13-Au vers 10, la perte de l'inspiration apparait à travers l'évocation d'un « sol lavé comme
une grève », dont on ignore s'il restera stérile.

14-Le « mystique aliment » v. 11 dont devraient se nourrir « les fleurs » v. 11 à venir


s'entend comme la nourriture spirituelle qui doit rendre au poète son inspiration.

Deuxième tercet - Démenti catégorique

15-La dernière strophe marque une rupture franche dans la tonalité à travers notamment la
répétition de l'apostrophe pathétique « o douleur ! » au vers 12.

16-Les nombreux monosyllabes, en particulier dans les deux derniers vers, relèvent d'un
registre élégiaque. Le désespoir semble prendre le dessus.

17- La métaphore filée de l'orage disparait au profit d'une allégorie du temps, que l'emploi des
majuscules permet de repérer

18-L'action dévorante et irrémédiable du temps : le temps est assimilé à un monstre : il est


enfin nommé au vers 12 alors qu'il était omniprésent dans la métaphore des saisons puis
désigné par une périphrase (« l'obscur Ennemi », vers 13) qui insiste sur son hostilité et sur
le caractère caché de son action.

19-Le poème se veut universel puisque le pronom personnel « nous » au vers 13 englobe
tous les humains.
20-L'action du temps, exprimée sous forme d'images réalistes et horribles (« mange la vie »,
« ronge le cœur ») est présentée comme l'action d'un parasite dévastateur.

21-Le temps est personnifié et rappelle la désignation traditionnelle du diable. Il se nourrit


(« croît et se fortifie », vers 14) des forces vives de l'être humain et peut être en lui, par la
destruction de l'aliment mystique toute possibilité d'inspiration nouvelle.

22-D’ailleurs, l’on observe une transmutation de l’eau en sang au dernier vers :


« Du sang que nous perdons croît et se fortifie ! » (v. 14).
Ainsi, comme les « fleurs nouvelles » qui puisent leurs racines dans les terres inondées, le poète
trouve dans sa souffrance une inspiration créatrice.

Conclusion
    L'ennemi est révélateur du spleen Baudelairien, de l'angoisse qui étreint le poète, quand il
constate les ravages du temps sur son organisme. Grâce à l'art, il met en forme ce malaise
existentiel, ce qui constitue une manière de l'exorciser.
    L'écriture apparaît alors comme un remède à l'usure du temps et au dégoût de soi
qu'inspire au poète sa dégradation progressive : l'art permet d'opposer la résistance de
l'intelligence à la force corrosive de la nature. Le poète survit alors par sa parole.

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