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chondrales et les marges articulaires. Les érosions de surfaces et les géodes sous-
chondrales peuvent résulter tout autant d’une agression par un pannus synovial
inflammatoire que d’abrasions et fragmentations induites par des contraintes mécaniques.
Les lésions de surface sont donc aspécifiques. Par contre, l’érosion marginale est une
lésion dont la spécificité est quasi absolue, constituant la signature d’une pathologie
synoviale agressive.
I - EROSIONS MARGINALES
Elles sont la conséquence d’une stimulation de la résorption osseuse, induite par le
pannus synovial. Elles surviennent préférentiellement dans les marges articulaires, parce qu’il
s’agit de segments osseux qui ont comme caractéristiques d’être de topographie intra-
articulaire et de ne pas être protégés par un recouvrement cartilagineux, c’est-à-dire qu’il
s’agit de « surfaces nues » [Martel et coll 65]. Des érosions marginales sont surtout
visualisées dans les petites articulations. Pour les mains et les pieds, les plus interprétables
portent sur le versant radial des têtes métacarpiennes et phalangiennes et interne des têtes
métatarsiennes car, dans les projections radiologiques habituelles, ces surfaces présentent des
contours régulièrement convexes, à l’inverse du versant cubital ou externe, qui sont
d’interprétation plus délicate en raison de la présence d’une encoche physiologique et
d’irrégularités résultant de l’insertion des capsules articulaires.
Les érosions des bases phalangiennes sont plus petites que celles
des têtes métacarpiennes, phalangiennes ou métatarsiennes (extension
des érosions marginales inflammatoires), parce que l’insertion capsulaire
y est plus proche de la surface articulaire. Dans le cadre de la maladie
rhumatoïde, les érosions marginales méritent d’être systématiquement
recherchées aux avant-pieds car elles y surviennent habituellement plus
précocement que les lésions des mains [Brook et Corbett 77] et que les arthropathies des
avant-pieds sont souvent cliniquement muettes. Le cliché de face des avant-pieds est donc un
cliché d’un rendement diagnostique particulièrement performant.
II - DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
Quelques situations rares sont susceptibles d’entraîner des anomalies pouvant mimer
les érosions marginales inflammatoires :
• l’algodystrophie, dans les cas extrêmes, peut raréfier l’os trabéculaire et les marges
osseuses au point de les rendre indistincts. Dans ce cas cependant, l’os n’est pas
réellement érodé car les contours osseux réapparaissent quand la raréfaction régresse.
• dans l’hyperparathyroïdie, des érosions marginales peuvent survenir par résorption sous-
périostée dans les sites d’insertion capsulaire ou au voisinage de dépôts calciques juxta-
articulaires dans le cadre d’ostéodystrophies rénales.
• des remaniements post-traumatiques peuvent s’accompagner de petites résorptions
osseuses, en particulier au décours d’entorses digitales ou dans des sites de tendinopathies
d’insertion, des coiffes des rotateurs des épaules par exemple.
L’aspect des lésions permet une certaine estimation de leur évolutivité. En cas de
lésions actives, en plus d’une tuméfaction des tissus mous et d’une raréfaction osseuse
locorégionale hétérogène de type dystrophique, les érosions ont typiquement des contours
flous, mal délimitables, avec des travées osseuses mises à nu. En revanche, en cas de lésions
éteintes, le contour des érosions marginales redevient plus net et peut se recorticaliser.
IV - EROSIONS EXPANSIVES
Certaines pathologies synoviales sont caractérisées par des accumulations
métaboliques ou des proliférations tissulaires à tendance expansive. Cette situation se
rencontre par exemple en cas de synovite villonodulaire pigmentée, d’amyloïdose ou de
goutte tophacée. Dans ces cas, le processus synovial peut, à travers des érosions marginales,
s’étendre plus ou moins profondément dans l’os et y augmenter de volume. Ces expansions
intra-osseuses peuvent, dans la goutte en particulier, déterminer un soulèvement du contour
cortical dominant l’érosion sous-jacente, avec refoulement du rebord osseux « en surplomb ».
Une telle situation peut se rencontrer également en cas de polyarthrite rhumatoïde peu
inflammatoire, chez des sujets relativement peu handicapés et qui poursuivent leurs activités
physiques (on a parlé de « polyarthrite robuste »). Ces expansions intra-osseuses, quand elles
sont massives, peuvent poser le diagnostic différentiel avec des tumeurs osseuses proprement
dites. En cas de goutte par exemple, les érosions expansives peuvent déterminer des
amputations phalangiennes complètes.
EN RESUME
Références
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rheumatoid arthritis. Radiology 1965, 84 : 204-214.
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