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REEDUCATION DES
TENDINOPATHIES

Pr MANOU Benjamin

INTRODUCTION
Les tendinopathies englobent toutes les souffrances du tendon, soit au niveau de son
enveloppe : on parle de ténosynovite, soit au niveau du tendon lui même au niveau des
jonctions entre tendon et muscle ou tendon et os : On parle de tendinite.
Il s’agit d’une pathologie essentiellement sportive +++.
Ces lésions surviennent par hyper sollicitation du complexe musculo-tendineux qui se
caractérise par l’inflammation du tendon jusqu’à sa fissuration et même sa rupture.
Les tendinopathies se manifestent essentiellement par la douleur lors de l’exécution d’un
geste. Son diagnostic est aisé mais par contre son traitement essentiellement médical et
kinésithérapique est long qui demande d’expliquer au patient afin de gagner sa confiance et
d’aller jusqu’au bout des ressources thérapeutiques avant de proposer un geste
chirurgical (rare).
La rééducation est complémentaire au traitement médical, les techniques sont variées, elles
visent à calmer la douleur et à améliorer la vascularisation locale.

I- GENERALITES
A- ANATOMIE
Le tendon est une formation anatomique qui est interposé entre le muscle et l’os, il comprend
différents segments :
- le corps du tendon
- la jonction muscle/tendon
- la jonction os/tendon
- les bourses séreuses
Il est riche en eau environ 50 à 70 %. Le tendon n’est pas seulement un simple moyen de
transmission entre le muscle et l’os, mais il présente aussi des propriétés visco-élastiques
(élastine et collagène) qui lui permettent de résister à une traction. Ainsi un tendon est
capable de s’allonger sans dommage d’environ 5% de sa longueur.
Au-delà de cet allongement les lésions irréversibles se produisent et vont aboutir à une
rupture à 8% de son allongement.

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Le volume du tendon peut se développer en fonction de l’entraînement et ceci jusqu'à la fin
de la croissance ; de même, en vieillissant les qualités élastiques et de résistance du tendon
diminuent.

B- PATHOGENIE

La pathogénie des tendinopathies fait appel à deux mécanismes intriqués


1/ Mécanismes intrinsèques
- âge (après 40ans chez le sportif)
- altération de l’état général
- trouble morpho-statique (obésité)
- défaut d’extensibilité musculo-tendineux
- déséquilibre musculaire entre agoniste et antagoniste
- contexte métabolique défavorable ( Hydratation insuffisante, consommation
excessive de protéine),
- caries dentaires

2- Mécanismes extrinsèques
- Matériel inadapté.
- Erreurs techniques
- Surface de jeu
- Erreurs d’entraînement
- Infiltration dans le corps du tendon de corticoïdes
- Consommation de fluoroquinolones.

C – MECANISME DE SURVENUE DES TENDINOPATHIES


Essentiellement 3 mécanismes

1- Les tendinopathies de traction


- Elle survient de manière brutale, sur un mouvement puissant ou de manière
progressive sur des mouvements répétitifs : freinage, saut…)
- Le surmenage peut se produire de 2 manières
 Soit qu’il s’agit d’une activité sportive dont la durée s’est largement
majorée.
 Soit d’une activité sportive dont l’intensité s’est majorée.
- Ces tendinopathies se rencontrent le plus souvent au niveau du genou.

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2- Les tendinopathies par frottement

- Il s’agit des frottements ou des balayages répétés qui débouchent le plus souvent
sur une souffrance de l’enveloppe du tendon (ténosynovite) puis progressivement
aboutir à une fissuration du tendon (tendinite de la coiffe des rotateurs au niveau
de l’épaule)
3- Les tendinopathies par choc direct

Rare, se rencontre dans les sports de contact, les lésions sont variables,
suivant le type de l’agent vulnérant
4- Les sports incriminés

Tennis, cyclisme, course, sport de combat, ski, kayak, haltérophilie, Sport en


équipe (foot, volley, hand, basket), lancement de poids, javelot etc..

II – CLINIQUE

A- La douleur +++
1- Au repos
Elle est au premier plan, bien localisée sur le tendon. C’est une douleur spontanée. Selon la
classification de Blazina on distingue 4 stades
Stade I : douleur de caractéristique mécanique, survenant après l’entraînement mais
disparaissant totalement au repos
Stade II : douleur présente au début de l’entraînement, disparaissant après l’échauffement
pour réapparaître à sa cessation
Stade III : douleur toujours présente pouvant même entraîner une impossibilité d’effectuée
toute activité physique et pouvant gêner la vie quotidienne.
Stade IV : rupture tendineuse

2- A la mobilisation
Elle est déclenchée par un mouvement et la palpitation du tendon qui retrouve souvent un
épaississement du tendon, une encoche ou un nodule.
La recherche de douleurs provoquées spécifiques permet d’identifier la triade tendineuse

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 Douleur à la contraction isométrique


 Douleur à l’étirement passif maximal
 Douleur à la palpation longitudinale, transversale, de la superficie à la
profondeur
La triade tendineuse est typique d’une tendinopathies et affirme le diagnostic à condition de
respecter deux points importants :
La douleur provoquée doit être unilatérale
La douleur est capable d’être récrée et spontanément ressentie par le patient

B- L’examen recherche également :


- Limitation des mouvements.
- Siège des tendinopathies
Au membre inférieur
 Genou :
Tendinite rotulienne (de la rotule au tibia)
Sport en cause: athlétisme, basket, volley, handball, football, ski
Tendinite quadricipitale
Sports en cause: tennis, football, volley, basket, danse, course, ski

 Hanche
Tendinite du fascia-lata
Sport en cause : saut, courses, patinage, foot, crawl, équitation
 Cheville
Tendinite du talon (tendon d’Achille)
Sport en cause: haltérophilie, basket, volley, escrime, patinage

Au membre supérieur
 Tendinite de l’épaule (sus- sous épineux coiffe des rotateurs)
Sport en cause : tennis, hand, golf, lancer, natation
 Tendinite du coude
Epicondylite (tennis-elbow)
Epitrochléite (rare)

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Sport en cause : tennis, golf, kayak, perche
 Poignet : ténosynovites des tendons longs
Sport en cause : tennis, volley, moto, cyclisme, escalade, haltérophilie
C- Imagerie
1- Radiographies standard
Elles sont systématiquement demandées, elles visent à éliminer toute autre affection osseuse
ou articulaire d’origine tumorale, infectieuse, inflammatoire ou dégénérative
2- Echographie, Ténoscanner, IRM peuvent montrer des signes
caractéristiques de remaniements tendineux ou juxta tendineux.

III- TRAITEMENT
A- OBJECTIFS
- Lutter contre la douleur
- Favoriser la cicatrisation tendineuse
- Reprogrammer le complexe musculo- tendineux pour la pratique sportive.
B- MOYENS

1- Médicaux
 Traitement local ou per os : Antalgiques ; AINS
 infiltration locale des corticoïdes

2- physiques
 Physiothérapie

° Cryothérapie
Application locale de froid intense (la T° cutanée doit descendre au dessous de 15°).
Elle repose sur la mise en place 4x/J pendant 30 minutes de cold pack à – 10°

° Électrothérapie antalgique
Les objectifs recherchés par les différentes formes de courants sont :
Effet d'élévation du seuil de sensibilité à la douleur
Effet de « gate-control » Le choix de la fréquence du courant est de 50 à 100 Hz
Effet endorphinique : stimulation de la production d'endorphines et d'enképhalines
par un courant de 3 à 8 Hz et d'une durée supérieure à 20 minutes
La plupart des appareils d'électrothérapie récents délivrent des programmes avec des
courants couvrant ces trois effets. Cette thérapie peut également être proposée comme
traitement de la douleur à domicile, par l'utilisation d'appareils portatifs

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° Ionisation
C’est l’emploi de courants unidirectionnels permettant de ioniser une substance
antalgique ou antiinfammatoire (salicilate de sodium) au regard des tendons
douloureux
° Ultrason
L’ultrasonothérapie est non seulement employée pour ses effets antalgiques et anti-
inflammatoire mais aussi pour ses effets mécaniques par micro massage du tendon.
On effectue un balayage transversal de très faible amplitude pendant 4 à 6 minutes :
émission pulsée 0,5 à 1 Watt/cm 2. Sonde de 3 MHz pour tendon superficiel et 1MHz
pour tendon profond
On complète par un balayage circulaire du muscle : émission continue 1,5 à 2
Watt/cm2. Sonde de 1MHz à visée décontracturante.
° Ondes de choc
Ce sont des ondes sont capables de détruire des calcifications tendineuses.
Le mécanisme d’action des ondes de choc repose essentiellement sur le fait que les
percussions provoquent des microtraumatismes et des lésions tissulaires à l’origine de
phénomènes de cicatrisations.
On distingue deux types d’appareils :
- les appareils délivrant des ondes de choc extracorporelles dites ESWEST
(extracorporeal shock wave therapy)
- les appareils délivrant des ondes de choc radiales dites RSWT (radial
shock wave therapy)
Les caractéristiques de ces ondes de choc sont
- leur profondeur d’action
- l’énergie transportée (mj/surface en mm2
- leur intensité (1 à 4 bars)
- la fréquence des impulsions (1 à 15 Hz)
- le nombre de coups portés (1000 à 2000) par séance
Les indications en traumatologie du sport sont :
- tendinopathies
- tendinites nodulaires
- les calcifications intra tendineuses
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- les pathologies musculaires (contractures et séquelles de déchirure)
Le protocole de traitement est de 1 à 10 voir 15 séances.
 orthèses souples

Les contentions associées au repos sportif visent à soulager le tendon mais aussi avoir
des objectifs avec l’évolution de la tendinopathie.
* En phase algique :
L’objectif consiste à soustraire totalement le tendon aux sollicitations
mécaniques néfastes en le mettant en position raccourcie pendant 10 jours ;
On emploie soit une contention collée inextensible renouvelée tous les 2 à 3 jours,
soit plus volontiers une orthèse en plastique thermo formable.
* Dans un deuxième temps
Le but des contentions est de soulager en partie les contraintes
auxquelles le tendon est soumis. L’emploi de contentions souples permet une reprise
normale des activités quotidienne puis sportive
*A long terme
L’emploi de contentions élastiques collées et de contentions circulaires
fait partie des mesures prophylactiques chez un sujet exposé

3- Mécanisation du tendon
Elle fait appel à des techniques sollicitant progressivement le tendon en torsion, et en
traction.
a) Massage local
Il s’agit du massage transverse profond (MTP).
Appelé aussi les frictions de cyriax.
Elle s’adresse au plan musculo-tendineux
La manœuvre est appliquée à travers la peau sur le tendon à l’aide de l’index renforcé par le
médius et en prenant appui sur les tissus avec le talon de la main.
La friction est perpendiculaire aux fibres sur 2à3 cm de balayage.
Elle doit être régulière dans son rythme d’exécution mais aussi dans la progression de
l ‘appui pendant toute la séance le plus souvent entre 10 et 20 minutes pour obtenir une
indolence locale.
C’est une technique qui demande un thérapeute entraîné car difficile à réaliser.
Les séances sont trihebdomadaires.

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Dans le même esprit on peut utiliser des techniques de crochetage dont le but est de pouvoir
effectuer un massage plus large et plus précis au niveau de la zone douloureuse.
On effectue des étirements passifs de manière progressive.

b) Travail musculaire excentrique

▪ Techniques de STANISH
En dehors du classique traitement d’étirement des plans postérieurs et surtout antérieurs avec
technique de contracter-rélacher une technique originale a été développée par l’équipe de
STANISH et plus récemment celle de H Alfredson. Ces auteurs ont insisté sur le rôle
négatif d’un traitement des tendinopathies basé sur le repos et l’immobilisation du tendon
qui aboutissent à un déconditionnement neurophysiologique et biomécanique du couple
muscle – tendon.
Il s’agit d’un protocole en excentrique effectué en chaîne fermé c’est à dire un renforcement
musculaire excentrique à vitesse et résistance progressivement croissante. Ce protocole est
encadré par une équipe médicale ou paramédicale, du fait de la possibilité d’aggravation des
lésions.
Elle demande rigueur et discipline du sportif.
L’activité sportive iatrogène est interdite pendant la durée du traitement.
Pour avoir une activité trophique bénéfique sur le tendon, ce travail doit être prolongé dans
le temps.
▪ Protocole de STANISH
On début le travail excentrique quand l’étirement passif du complexe musculo-
tendineux est devenu indolore. Il demande 3 séries de 10 répétitions qui s’effectuent à
résistance progressivement croissante.
La survenue de douleur en fin de 3eme série est souhaitable pour STANISH (no
pain, no gain).
La séance est précédée de 10 minutes d’échauffement et d’étirement léger de
massage et se termine par des étirements plus marqués et une séance de cryothérapie.
Délai de récupération : 4 à 6 semaines suffisent en général pour des lésions minimes, mais en
cas de lésion grave (rupture) il faut 3 à 6 mois d’arrêt d’activité sportive.

4- traitement chirurgical (rare)


En cas de douleur persistante et malgré un traitement médical kinésithérapique bien
conduit

5- prévention

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Elle repose sur
- La correction des troubles morpho-statique (maigrir).
- Amélioration de la résistance à l’étirement du complexe musculo tendineux ( par
exercice d’étirement progressif et renforcement musculaire excentrique).
- Diminution de la sollicitation en étirement du complexe musculo tendineux en
modifiant le geste technique ou grâce à l’utilisation d’orthèse.

6- Conseils diététiques
La place des erreurs alimentaires dans la survenue des pathologies tendineuses est reconnue
et il convient de corriger systématiquement ces déséquilibres devant toute tendinopathies.
La notion d’équilibre nutritionnel repose sur trois règles simples :
* Première règle
L’équilibre nutritionnel qualitatif est assuré lorsque l’apport en glucides, protides et
lipides répond à la formule de Creff : 421 GPL, c’est-à-dire
- 4 portions de glucides (1 portion de sucres lents, 1 portion de sucres rapides,
2portions de crudités, légumes)
- 2 portions de protides (1 portion de viande, poisson ou œuf, 1 portion de lait
et produits laitiers)
- 1 portion de lipides (1/2 portion de lipides animaux, ½ portions de lipides
végétaux)
Ces règles de base sont modulées selon l’intensité de l’entraînement et le type
d’effort)
* Deuxième règle
L’équilibre nutritionnel quantitatif est assuré quand l’apport calorique alimentaire
compense les dépenses énergétiques
Chez un sédentaire la dépense énergétique est de l’ordre de 2000 à 2800 kcal/j, celle
des sportifs peut varier de 3000 à 9000kcal/j selon le type de sport et la période
d’entraînement
En mode de d’entraînement normal, il faut répartir les prises alimentaires dans la
journée pour réaliser un apport énergétique régulier et permettre une meilleure
assimilation : ex (petit déjeuner : 20%, collation du matin : 5%, déjeuner : 35%,
goûter : 5 à 10%, dîner : 30%)

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Le régime préconisé lors d’une compétition doit être la suite des règles diététiques
habituelles mais avec quelques variantes :
- Les jours précédents la compétition : dans les 8 jours qui précèdent la
compétition, la méthode consiste à augmenter la part glucidique de la ration
alimentaire qui passe ainsi de 55% à 70%.
- Règle des 3 heures : le dernier repas avant la compétition doit être achevé 3
heures avant le début de l’épreuve
- Ration d’attente : elle vise à compenser les effets du stress et faciliter l’effort
à venir.
* Troisième règle
L’équilibre hydrique est assuré lorsque les apports compensent les pertes par voies
pulmonaire, digestive, urinaire et sudorale
- Dans la vie quotidienne
Boire 1,5 litre d’eau de robinet, d’eau de source ou d’eau faiblement minéralisée, par
jour en dehors des repas
- Dans la pratique sportive
= avant le début de l’effort : boire ¼ à ½ litre d’eau + 20 à 30g/l de
sucre toutes les heures
= pendant l’effort : boire 150 à 250 ml d’eau + 30 à 80g/l de sucre + 0,5
à 1 g/l de sel + 0,5g/l de magnésium + vitamines, toutes les 15 à 20 minutes
= après l’arrêt de l’effort : boire 250 à 500 ml d’eau bicarbonatée
sodique et de l’eau de source à volonté.

C- Indication
- tendinite épaule
 infiltration du corticoïde, antalgique
 MTP
 Travail musculaire excentrique
 Etirement progressif
 prévention
- tendinite du genou
 médical
 MTP
 Technique de STANISH
 Prévention orthèse simple
- Epicondylite : tennis-elbow

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 médical
 MTP
 Technique de STANISH
 orthèse simple
- Tendon d’achille.
 médical
 MTP
 STANISH
 orthèse
 talonnette de 1 cm à porter pendant plusieurs mois
 Chaussure spéciale avec pied en léger appui pendant 6 semaines.

Conclusion
La prise en charge des lésions tendineuses du sportif doit lui permettre de récupérer
une mobilité et une motricité compatible avec la reprise de son activité.
Le traitement de la douleur est essentiellement médical et physique et kinésithérapie
par le MTP et surtout la mécanisation du tendon.
Le protocole de renforcement musculaire excentrique doit prendre une place
prépondérante dans le traitement des lésions tendineuses du sportif.

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