Vous êtes sur la page 1sur 6

Faculté des sciences juridiques économiques et sociales 2020-2021

Université Hassan 2. Casablanca

Corrigés cas pratiques

Droit social

(Professeur MONJID)

Cas pratique 1. La modification du contrat de travail

Qualification juridique des faits.

Leila est une salariée. Son employeur a décidé de modifier ses horaires de travail à l’exemple
de ses collègues afin d’augmenter la rentabilité et la compétitivité de son entreprise. Leila ne
souhaite pas se conformer à la décision de son employeur en considérant que ce dernier n’a
pas le droit de toucher à l’un des éléments de son contrat de travail.

Question de droit.

La salariée Leila a-t-elle le droit de refuser de se conformer à la décision de son employeur de


modifier ses conditions de travail ?

Majeure.

Le contrat de travail peut être modifié soit à l’initiative de l’employeur soit à la demande du
salarié. Le salarié peut demander une modification de son contrat de travail. Pour réaliser
cette modification, l’employeur doit l’accepter. Sauf dans certains cas où la modification se
présente comme une obligation pour ce dernier ainsi le cas de l’état de santé du salarié suite à
un accident de travail ou une maladie professionnelle ou encore le cas d’une salariée enceinte.
En réalité, la modification du contrat de travail est souvent de l’initiative de l’employeur. Ce
dernier peut-il modifier unilatéralement le contrat de travail ? Pour répondre à cette question,
il faut distinguer deux situations. D’une part, lorsque la modification entre dans le champ du
pouvoir de direction de l’employeur, c’est-à-dire ne concerne que des éléments non
substantiels, des conditions de travail (horaires par exemple). Dans ce cas, il a le pouvoir de
modifier unilatéralement le contrat. Le refus par un salarié d’un simple changement de ses
conditions de travail constitue un manquement à ses obligations contractuelles (faute).
D’autre part, lorsque la modification touche un élément substantiel et essentiel du contrat :
rémunération, qualification, durée du travail... Dans quel cas, il faut l’acceptation du salarié en
vertu du principe de la force obligatoire du contrat. Si le salarié refuse, l’employeur doit soit
renoncer à la modification, soit engager une procédure de licenciement. Le juge va examiner
le motif du licenciement, lequel sera le motif qui justifiait la proposition de modification. Si le
motif est valable, le licenciement sera légitime. Dans le cas contraire, le licenciement sera
abusif puisque le salarié n’a commis aucune faute et l’employeur n’a pas de raison valable
pour demander la modification du contrat de travail.

Mineure.

En l’espèce, Ali l’employeur de Leila a décidé de diviser les salariés en deux groupes, chacun
travaille un jour déterminé suite à un jour férié. Cette décision ne touche aucun élément
essentiel du travail. Elle rentre dans le pouvoir de direction de l’employeur. Il est le plus à
même en tant que chef d’entreprise de juger des mesures nécessaires pour augmenter la
rentabilité et réussir ses projets. Cette décision constitue par conséquent un simple
changement des conditions de travail que la salariée Leila ne peut pas refuser sinon elle
commet une faute grave qui peut valablement justifier un licenciement puisque la salariée
aura manqué à ses obligations contractuelles.

Solution.

Leila doit se soumettre à la volonté de son employeur car elle risque dans le cas contraire un
licenciement pour faute grave.
Cas pratique 2 : Le licenciement

Qualification juridique des faits.

Samira est une salariée qui travaille en tant que coiffeuse-esthéticienne dans l’entreprise
Beauté. Son employeur ayant pris connaissance de l’ouverture d’un centre concurrent de soins
et coiffure par sa salariée, souhaiterait la licencier pour faute étant donné que Samira a violé
l’une de ses obligations découlant de son contrat de travail.

Question de droit.

L’employeur Ahmed, peut-il licencier Samira pour faute et doit-il suivre une procédure
spécifique à cet effet ?

Majeure.

Dans un contrat de travail, l’employeur et le salarié ont des obligations. L’employeur a


plusieurs obligations dont les principales sont le versement du salaire et la fourniture d’une
prestation de travail au salarié. Le salarié quant à lui a plusieurs obligations. Il a une
obligation d’information conformément à l’article 22 : « en cas de changement du lieu de
résidence, le salarié doit informer l’employeur de sa nouvelle adresse soit en main propre,
soit par lettre recommandée avec accusé de réception ». Aussi, il a l’obligation de
conservation des moyens et des choses en vertu de l’article 20 du Code du travail. Il doit par
ailleurs exécuter son travail avec loyauté et de bonne foi. Enfin, Il a l’obligation de non-
concurrence vis-à-vis de son employeur. En effet, il est interdit au salarié d’exercer une
activité professionnelle concurrente tout au long du contrat. Cette obligation se distingue du
cas où le contrat contient une clause de non-concurrence qui interdit au salarié d’exercer une
activité professionnelle concurrente après la rupture du contrat. La violation de l’obligation de
non concurrence constitue une faute grave justifiant le licenciement et donnant à l’employeur
le droit de demander réparation du préjudice subi.
Le licenciement est l’acte par lequel l’employeur rompt unilatéralement le contrat de travail et
congédie un ou plusieurs salariés. Il doit être justifié par un motif valable. Selon l’article 35
du code du travail, « est interdit le licenciement d’un salarié sans motif valable sauf si celui-ci
est lié à son aptitude ou à sa conduite…ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de
l’entreprise… ». A partir de cette disposition, on peut distinguer deux catégories de
licenciement : d’une part, le licenciement pour motif personnel et d’autre part le licenciement
pour motifs technologiques, structurels ou économiques.

Le licenciement pour motif personnel est tout licenciement décidé par l’employeur pour une
raison liée à la personne du salarié que ce soit son comportement ou autre (insuffisance
professionnelle, inaptitude…). Par conséquent, le licenciement pour motif personnel n’est pas
nécessairement fondé sur une faute du salarié. S’il est fondé sur une faute, il s’agit d’un
licenciement disciplinaire puisque l’employeur va sanctionner une faute commise par le
salarié peu importe la gravité de celle-ci. S’il est fondé sur un motif autre que la faute mais lié
à la personne du salarié, il ne s’agira pas d’un licenciement disciplinaire.
Le licenciement disciplinaire est tout licenciement décidé par l’employeur pour sanctionner le
comportement fautif du salarié. Cette faute peut revêtir des degrés différents. Elle peut être
grave ou non grave mais justifiant le licenciement. La distinction a une influence sur la
procédure de licenciement et sur les conséquences du licenciement. La faute simple (légère)
est une faute qui ne présente pas une gravité importante mais peut donner lieu à un
licenciement. Selon l’article 37 et 38 du Code du travail, l’employeur doit d’abord sanctionner
les fautes non graves par une sanction moins sévère que le licenciement (avertissement,
blâme, mise à pied, mutation…). Le licenciement ne doit être que l’ultime remède au
comportement fautif du salarié. Selon l’article 38 « l’employeur applique les sanctions
disciplinaires graduellement. Lorsque les sanctions disciplinaires sont épuisées dans l’année,
l’employeur peut procéder au licenciement du salarié. Dans ce cas le licenciement est
considéré comme justifié ».

Le Code du travail n’a pas défini la faute grave, mais il a donné dans son article 39 une liste
non limitative (indicative) des comportements pouvant constituer une faute grave. Ainsi par
exemple, la divulgation d’un secret professionnel, le vol, l’abus de confiance, l’ivresse
publique, la consommation de stupéfiants, l’agression corporelle, l’insulte grave, détérioration
grave des équipements, le refus délibéré d’exécuter son travail…Cependant de manière
générale la faute grave est la faute qui rend impossible la poursuite du contrat de travail et le
maintien du salarié dans l’entreprise.
Lorsque le salarié a commis une faute grave, l’employeur est exonéré de donner un préavis.
Selon l’article 61, en cas de faute grave, le salarié peut être licencié sans préavis ni indemnité
ni versement de dommages-intérêts.

Pour pouvoir prononcer un licenciement pour faute grave, l’employeur doit respecter la
procédure disciplinaire prévue par les articles 62 à 64 du code du travail.
Le Code du travail dans son article 62 alinéa premier prévoit l’obligation pour l’employeur
d’auditionner le salarié avant de prendre sa décision de sanction. Le législateur permet au
salarié menacé d’une sanction disciplinaire de se défendre et d’exposer ses arguments lors
d’un entretien préalable avec son employeur. Cet entretien doit se faire dans un délai ne
dépassant pas huit jours à compter de la date de constatation de l’acte qui est imputé au
salarié. Ce dernier peut choisir un délégué des salariés ou un représentant syndical pour se
faire assister. Au terme de l’entretien, un procès-verbal est dressé par l’administration de
l’entreprise et signé par les deux parties. Le salarié reçoit une copie de ce dernier. Pour aider
le salarié dans sa défense, le législateur permet au salarié de choisir un délégué des salariés ou
un représentant syndical pour se faire assister.

L’article 63 alinéa premier du Code du travail impose à l’employeur une forme spécifique
pour informer le salarié de la décision de sanction. La lettre de licenciement doit être remise
en mains propres contre reçu ou par lettre recommandée avec accusé de réception dans un
délai de 48h suivant la date à laquelle la décision a été prise (article 63).

Mineure.
En l’espèce, Samira qui est une salariée qui travaille en tant que coiffeuse-esthéticienne a
monté son propre centre d’esthétique dans lequel elle travaille durant son temps libre. Or,
l’une des obligations qui lui incombe durant toute la relation de travail est celle de ne pas
concurrencer son employeur. Peu importe qu’elle travaille dans son centre uniquement lors de
son temps libre. L’obligation de non-concurrence lui interdit tout acte de concurrence à
l’égard de son employeur tout au long du contrat de travail. Le non-respect de cette obligation
peut être qualifié d’un manquement aux obligations contractuelles donc il s’agit bien d’une
faute grave qui justifie valablement un licenciement disciplinaire.

Solution.
Ali peut tout à fait procéder au licenciement disciplinaire de Samira pour faute grave sans
préavis, ni indemnité, ni versement des dommages et intérêts. Il doit néanmoins respecter la
procédure disciplinaire telle qu’elle est décrite. A défaut, le licenciement pourra être considéré
comme abusif.

Vous aimerez peut-être aussi