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Semestre 5

Parcours économie et gestion


Section 3 – 4

MODULE : HISTOIRE DE LA
PENSÉE ÉCONOMIQUE

Pr. Rachid EZ ZOUAQ

Année universitaire 2022 / 2023


Objectifs du module

A quoi sert l’étude de l’histoire de la pensée


économique ?

« L’historien projette dans l’histoire les intérêts et


l’échelle de valeurs de son temps et c’est d’après
les idées de son temps qu’il entreprend sa
reconstruction ; c’est pour cela justement que
l’histoire se renouvelle et que rien ne change plus
vite que l’immuable passé ».
Gallimard

2
Objectifs du module

A quoi sert l’étude de l’histoire de la pensée


économique ?

« Il serait illusoire d'espérer que l'on comprendra


quoi que ce soit aux phénomènes économiques
[...] sans maîtriser suffisamment les données
historiques. Il est de fait, que les erreurs
fondamentales qu'on commet aujourd'hui en
analyse économique sont plus souvent dues à un
manque d'expérience historique qu'à toute autre
lacune dans la formation des économistes ».
Joseph Schumpeter
3
Objectifs du module

J. Schumpeter se demande pourquoi étudier l’histoire de


la pensée économique et il répond par une très courte
liste de raisons qui lui paraissent suffisantes : « des
avantages pédagogiques, des idées nouvelles et des
éclaircissements sur les démarches de l’esprit humain ».
Sur le plan pédagogique : c’est un module qui doit :
⚫ Vous inciter à faire beaucoup de lectures.

⚫ Vous permettre d’avoir un esprit de synthèse

⚫ Vous permettre d’apprendre à faire des dissertations

⚫ Vous permettre de remonter aux sources (à l’histoire)

pour comprendre l’importance des problèmes et la


validité des méthodes utilisées par les économistes.
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Objectifs du module

 L’étude de l’HPE permet de faire surgir des idées


nouvelles et il est toujours possible de glaner des leçons
utiles pour le présent à partir des différentes explorations
tentées par les auteurs du passé. Personne ne peut
prévoir l’avenir, mais c’est à partir de nos idées sur le
passé qu’on peut construire un avenir.
 Enfin, l’étude de l’histoire de toute science nous
dévoile les démarches de l’esprit humain (comment
les théories qu’on étudie en sciences économiques ont
été formé).

5
Contenu du module

Pré-classiques :
⚫ Mercantilistes
⚫ Physiocrates
Classiques :
⚫ Adam Smith
⚫ David Ricardo
⚫ Thomas Malthus
⚫ Jean-Baptiste Say
⚫ Karl Marx
Néo-classiques / marginalistes
⚫ Jevons
⚫ Walras 6
Quelques références bibliographiques

7
Quel point de départ pour l’HPE ?

⚫ Une approche plus globale de l'histoire de la pensée


économique doit aussi prendre en compte les
premières réflexions sur la vie économique
développées depuis l'Antiquité.
⚫ Au sens strict, une histoire de la théorie économique
qui entend privilégier l'élaboration des concepts, des
instruments d'analyse débute par des auteurs souvent
qualifiés de « pré-classiques ».

8
PREMIÈRE PARTIE :
LES PRÉCLASSIQUES

9
CHAPITRE 1 :
LES MERCANTILISTES

10
ASPECTS INTRODUCTIFS

⚫ Le mercantilisme est à la fois une doctrine et une


politique économique mise en place entre le 16ème et le
18ème siècle (de 1450 à 1750).
⚫ Il s’agit de la pensée économique ou la réflexion des
auteurs européens, ou au moins de la plupart d'entre
eux durant la période de transition entre le féodalisme
et le capitalisme.
⚫ Il s’agit souvent d’hommes politiques ou de grands
marchands dotés d’une influence pratiques.
⚫ Selon ces auteurs, l'État seul incarne l'intérêt national
et il doit le défendre contre les agissements des autres
nations ; d'où des politiques autoritaires et
protectionnistes.
11
Les principales idées développées par les
mercantilistes

⚫ Le souci principal des mercantilistes est de chercher les


moyens pratiques pour enrichir la nation. Ils ont proposé
des « recommandations » susceptibles d’accroitre la
puissance politique de l’Etat à travers le développement de
sa puissance économique.
⚫ L’enrichissement est une fin louable.
⚫ L’économie fonctionne comme un jeu à somme nulle.
⚫ Ce sont les métaux précieux (or et argent) qui expriment
la richesse et la puissance des nations ; pour accroître la
richesse, il faut rapatrier et collecter le maximum de métaux
précieux.
⚫ L’agent économique le plus important c’est le commerçant
et l’activité la plus enrichissante pour la nation est le
commerce, ainsi le Roi (le pouvoir public) doit encourager
le commerce en leur offrant la protection militaire. 12
Les méthodes d’enrichissement

Trois réponses ont été avancées pour permettre


l’enrichissement de la nation :
⚫ La réponse des mercantilistes Espagnoles (le bullionisme)
⚫ La réponse des mercantilistes Anglais (Le
commercialisme)
⚫ La réponse des mercantilistes Français (l'industrialisme)

13
Les méthodes d’enrichissement

Les mercantilistes Espagnoles : le bullionisme

Conseillent de développer plus la colonisation des


régions riches en métaux (le nouveau monde :
l'Amérique) afin de développer les exportations et
réaliser une balance commerciale excédentaire :
commerce inégal.

 La richesse de l'Etat réside dans l'importance de son


stock de métaux précieux et la puissance de son
souverain repose sur une large disponibilité de ces
métaux.
14
Les méthodes d’enrichissement

Les mercantilistes Espagnoles : le bullionisme

Ils recommandent :
⚫ d'interdire la sortie des métaux précieux du royaume

et encouragent leur afflux sur le territoire national.


⚫ d’interdire l'importation des articles manufacturés,
d’encourager la production nationale et d’interdire
l'exportation des produits de l'agriculture et de
l'élevage.
⚫ d’exploiter au maximum les mines de métaux précieux

en conquérant avec force des territoires nouveaux.


Les guerres et les conquêtes des colonies peuvent
apporter des ressources nouvelles. 15
Les méthodes d’enrichissement

Les mercantilistes Français : l’industrialisme (le


Colbertisme)
Préconisent l’intervention de l’Etat en matière de réglementation des
manufactures, de la construction de l’infrastructure, notamment la flotte
commerciale et militaire afin de conquérir d’autres marchés pour
développer les exportations.
 La richesse d'un pays se mesure désormais par le niveau de son
activité productive et commerciale et non par son stock d'or et d'argent
thésaurisé.
 Pour s'enrichir, il faut nécessairement faire venir l'or et l'argent de
l'étranger par des excédents de la balance du commerce.
 L’agriculture, l’industrie et le commerce sont des activités importantes
et interdépendantes.
 L'Etat doit aider les manufactures en intervenant directement dans
l'industrie en protégeant les inventions, en accordant des subventions et
des protections douanières et en créant des monopoles par l'octroi des
privilèges. 16
Les méthodes d’enrichissement

Les mercantilistes Anglais : Le commercialisme


Voient que l’accroissement du stock de métaux nécessite un certain
protectionnisme. Ainsi, il faut limiter les importations (et
n’importer qu’aux prix les plus faibles) et encourager les
exportations. Ce qui permet d'obtenir une balance commerciale
excédentaire.
 Pour atteindre cet objectif il convient donc d'encourager l'activité
des marchands du royaume (le négoce) et favoriser les grandes
compagnies maritimes de commerce.
 Le négoce est encouragé par la sauvegarde des intérêts des
marchands, par une paix civile assurée et par la garantie de la
propriété individuelle.
 L’Etat (le roi) promulgue des textes réglementaires qui
préconisent le monopole du transport (essentiellement maritime) afin
d'assurer le maximum de commerce extérieur aux navires anglais.17
Les méthodes d’enrichissement

Au-delà des spécificités de chacune de ces trois formes


de mercantilismes, les mercantilistes s'accordent sur au
moins deux points :
 Les intérêts des marchands rejoignent ceux du
souverain : l'enrichissement des premiers contribue à
celui des rois.
 L'Etat doit intervenir dans l’économie : le
protectionnisme freine les importations (sauf celles
qu'exige la production nationale) et favorise le
développement d'industries nationales; l'Etat doit
également limiter les exportations des matières
premières nécessaires à la production nationale
subventionner l'exportation des autres produits et
encourager la colonisation.
18
Le fonctionnement du mercantilime

Le fonctionnement du mercantilisme répond à neuf


principes fondamentaux (les neuf règles de Von Hornick),
qui ont été mis en œuvre de manière différente et
individuelle dans chacun des États-nations européens,
selon leurs besoins et leurs particularités.
⚫ L’utilisation de tout le territoire national pour
l’agriculture, l’exploitation minière et l’ industrie .
⚫ Consacrez toutes les matières premières du pays
aux industries nationales , car les produits
manufacturés valent plus que les matières premières au
niveau international.
⚫ Favoriser une population abondante et laborieuse.

⚫ Interdire les exportations de métaux précieux et


maintenir la circulation de la monnaie nationale.
⚫ Empêcher l’importation de marchandises étrangères. 19
Le fonctionnement du mercantilime

⚫ Importez les biens nécessaires en échange d’autres


biens rares et non contre le paiement d’or et d’argent.
⚫ Limiter les importations aux matières premières rares
dans le pays.
⚫ Vendre le surplus de la production manufacturée à
l’étranger, en paiements d’or et d’argent.
⚫ Ne pas autoriser les importations de biens produits et
disponibles dans le pays.

20
Les thèmes abordés par les mercantilistes :

La monnaie est au centre des réflexions mercantilistes :


L'interrogation sur la nature de la monnaie occupe une
place essentielle dans la littérature mercantiliste. Cette
interrogation correspond à plusieurs questions précises,
plus ou moins mises en avant selon l'actualité, mais
traitées dans un même esprit.
On se demandait, en particulier au16ème siècle, comment
expliquer la hausse des prix et pourquoi un
accroissement de la quantité de monnaie était désirable
dans un pays.
On va voire les relations :
⚫ monnaie et prix
⚫ monnaie et richesse
⚫ monnaie, taux d'intérêt et activité économique.
⚫ Monnaie et balance du commerce
⚫ Et puis on va examiner la relation entre population
21
et travail
Les thèmes abordés par les mercantilistes :

1-Monnaie et prix
Dans un rapport intitulé : « paradoxes sur le fait des
monnaies touchant l'enchérissement de toutes choses »
publié en 1566, le Sieur de Malestroit :
⚫ D'abord selon Malestroit, il n'y a pas eu, en réalité, de
hausse des prix. « La Cherté » dont se plaint le pays serait
une illusion ».
⚫ L'inflation selon lui entièrement, imputable à la dépréciation
des monnaies, c’est-à-dire à la baisse du contenu
métallique de l'unité de compte. C'est l'évolution de la
quantité de métal précieux à payer contre des
marchandises, qui constituent à ses yeux, le critère
permettant d'apprécier la hausse des prix.
• Les prix relatifs sont restés constants, puisqu’avec une
même quantité d'or et d'argent on achète une même
quantité de bien, mais avec plus de pièces métalliques.
• Il y a, conclut Malestroit, dépréciation du signe
monétaire, mais il n'y a pas de vie chère, D'où22 le
paradoxe de la monnaie.
Les thèmes abordés par les mercantilistes :

Dans ses « Réponses aux paradoxes du Sieur De Malestroit »


(1568), J. Bodin réfute l’analyse de Malestroit concernant
l’explication de la hausse des prix.
⚫ Il conteste tout d'abord le choix de la marchandise
représentative prise en compte (le velours) qu'il considère
comme un produit de luxe, car déjà très cher et qui a
tendance à connaitre une faible hausse comparativement
aux autres biens.
⚫ Il raisonne ensuite sur un panier de biens représentatif «
les blés », principal bien de consommation courante, et les
terres, principal bien de production, et montre que la
hausse des prix de ces biens essentiels est bien supérieure
à la dépréciation des monnaies.
⚫ L'inflation n'est donc pas seulement « nominale » (inflation
des unités de compte), mais « réelle » (hausse des prix en
termes d'or et d'argent), conclut-il. 23
Les thèmes abordés par les mercantilistes :
Après cette mise au point concernant les hypothèses de départ, J.
Bodin en vient à présenter les causes de la hausse des prix.
⚫ La principale cause (si ce n’est pas la seule d’après ses termes)
c’est l'abondance d'or et d'argent. L'accroissement de l'offre des
métaux précieux comparativement à l'offre des autres biens fait
baisser les prix relatifs de l'or et de l'argent par rapport aux biens.
Ainsi, le niveau général des prix se trouve directement relié à la
quantité d'or et d'argent. Cette explication reliant l'accroissement
des métaux précieux (la masse monétaire) et le niveau général
des prix est considérée par certains auteurs comme l'un des
premiers énoncés de la « théorie quantitative de la monnaie ».
⚫ La 2ème cause de la hausse des prix vient en partie des
monopoles.
⚫ Une 3ème cause susceptible de faire hausser les prix, selon, J.
Bodin est l'exportation qui raréfie les ressources disponibles à
l'intérieur du pays. Mais, d’après lui, seul le blé mérite
véritablement un contrôle des exportations dans le souci d'éviter
toute famine.
24
Les thèmes abordés par les mercantilistes :

2- Monnaie et richesse
⚫ les mercantilistes espagnols et portugais assimilent la monnaie et
la richesse. La raison est simple. L'or et l'argent sont des biens
durables qui ne disparaissent pas après usage, donc faciles à
stocker. La valeur intrinsèque et de l'or et de l'argent et leur
caractère impérissable leur semblent l'essence même de la
richesse.
⚫ D'autres auteurs mercantilistes ont fait remarquer que la monnaie
est richesse, non pas parce que c'est un bien impérissable,
mais parce que c'est un pouvoir d'achat. Parce qu'ils permettent
aux hommes d'acquérir les marchandises dont ils ont besoin.
⚫ A. de Montchrestien, quant à lui, considère que ce qui fait les Etats
riches et opulents, ce sont les « choses nécessaires à la vie et
propres aux vêtements », la monnaie n'est que l'instrument pour
se les procurer.
⚫ Très tôt apparait donc la reconnaissance explicite des trois
fonctions attachées à la monnaie : unité de compte, instrument
d'échange et réserve de valeur. Les deux dernières permettent 25
le rapprochement monnaie/richesse.
Les thèmes abordés par les mercantilistes :

3-monnaie, taux d'intérêt et activité économique.


L'abondance monétaire a pour les mercantilistes un avantage
essentiel : elle permet la baisse du taux d'intérêt. Un taux
d'intérêt bas encourage les affaires et stimule l'activité
économique.
⚫ La prospérité d'une nation exige un taux d'intérêt aussi
bas que possible et des salaires élevés. Un bas taux
d'intérêt facilite le commerce, décourage les oisifs désireux
de jouir de leur fortune acquise et permet la création
d'affaires nouvelles.
⚫ Si l'abondance des hommes permet de maintenir à un bas
niveau les salaires, l'abondance monétaire permet de
maintenir à un bas niveau le taux d'intérêt. De même que le
bas niveau des salaires agit favorablement sur les coûts de
production des manufactures, le bas niveau du taux
d'intérêt permet de financer à cout réduit les
investissements industriels et commerciaux 26
Les thèmes abordés par les mercantilistes :

4- Monnaie et balance du commerce


⚫ d’après les mercantilistes, l'un des moyens permettant

de faire entrer l'or et l'argent dans le royaume est


d'avoir une balance de commerce excédentaire c'est-à-
dire de faire en sorte que la valeur des exportations
dépasse celle des importations. L'excédent de la
balance commerciale doit donc se traduire
automatiquement par l'afflux des métaux précieux.
⚫ Ce sont surtout les mercantilistes commercialistes
anglais qui ont établi une véritable politique du
commerce extérieur. Ils ont d'abord recommandé à
l'Etat de construire une flotte puissante et garantir dès
la sécurité des navires marchands. 27
Les thèmes abordés par les mercantilistes :

5- population et travail
⚫ Les mercantilistes sont populationnistes c'est-à-dire
favorables à l'augmentation de la population d'un pays.
⚫ Selon eux une population nombreuse est un signe tangible
de la puissance de l'Etats = armée nombreuse) et une
ressource essentielle pour l'activité productive.
⚫ Une population nombreuse est donc perçue comme un
facteur de puissance et de prospérité.
⚫ Mais cette population ne doit pas rester inemployée, sinon
elle est une charge et un danger. Car le chômage est
considéré par de nombreux mercantilistes non seulement
comme une perte de production potentielle, mais également
comme la source d'habitude d’oisiveté, de relâchement et
de décadence de la nation. Il faut donc obliger les gens à
travailler. 28
Les thèmes abordés par les mercantilistes :

6- la politique interventionniste de l’Etat :


⚫ Les mercantilistes étaient des interventionnistes, c’est-

à-dire que l’initiative privée devrait se conformer à la


politique économique tracée par l’Etat et s’exercer
dans un cadre bien délimité.
⚫ Ils ont mis sur pied tout un arsenal de mesures,

d’interventions, de restrictions et d’encouragement…,


la concurrence n’était pas encouragée.
⚫ Tout ce qui pouvait limiter le champ et les possibilités

de l’action de l’Etat devait être supprimé.

Protectionnisme maitrise des mers (Cromwell-Act)


29
Critiques adressées à ce courant de pensée :

⚫ La pensée mercantiliste est différemment appréciée


mais généralement elle est peu étudiée et très
critiquée. Le plus grand spécialiste et en même critique
de ce courant de pensée est incontestablement Elie
Heckescher. Son important ouvrage « mercantilism »
demeure l’unique référence importante en la matière.
⚫ Un autre économiste, adversaire de l’interventionnisme
de l’Etat et de la protection, Jacob Viner consacrera à
l’analyse de ce courant de pensée une place importante
dans son monumental traité « pure theory of trade ».
⚫ Ces deux auteurs prolongent ainsi l’appréciation
négative portée sur le mercantilisme par la grande
majorité des économistes libéraux du 19ème et du début
du 20ème siècle.
30
Critiques adressées à ce courant de pensée :

Le mercantilisme a eu de nombreux critiques, qui


l’ont accusé de ne pas comprendre les avantages
du commerce et de l’avantage comparatif . Des
théoriciens comme David Hume dénonçaient
l’impossibilité du mercantilisme de maintenir en
permanence une balance commerciale favorable
(exportations supérieures aux importations) et
l’intérêt excessif pour les métaux précieux comme l’or
et l’argent qui, monopolisés par l’État, perdaient leur
valeur commerciale et devait plutôt être traité comme
n’importe quel autre bien rare.
Enfin, le mercantilisme a été remplacé au XIXe
siècle par les théories du libéralisme et du
laissez-faire
31
CHAPITRE 2 :
LES PHYSIOCRATES

32
Quelques limites du mercantilisme :

⚫ Le commerce entre Etats est un jeu à somme positif


affirme Smith contrairement aux mercantilistes qui pensent
que le commerce entre Etats est un jeu à somme nulle.
⚫ L’objectif c’est d’enrichir l’Etat, peu importe par quel moyen
⚫ Ils négligent les activités de production et ne valorisent que
le commerce
⚫ La richesse est mal partagée : ce sont les marchands qui
profitent de l’accumulation de la richesse.
⚫ Multiplication et abus de la réglementation (pour favoriser
l’enrichissement de la nation).
⚫ En pratiquant une politique protectionniste, l'Espagne s'est
ruinée économiquement, car elle n'a pas pu empêcher la
fuite des métaux précieux.
33
Présentation de l’école :

La physiocratie (étymologiquement : le pouvoir de la nature


ou le gouvernement de la nature) est un courant de pensée
spécifiquement français, très délimitée dans le temps (1750-
1770). C'est la première véritable école de pensée
cohérente et systématique rencontrée en économie dans la
mesure où elle s'est dotée :
⚫ D'un programme de recherche : l'analyse de la
circulation de la richesse ;
⚫ D'un livre de référence exprimant ce programme : le
tableau économique,
⚫ D’un chef de fil F. Quesnay et de nombreux disciples.

Un courant dont la doctrine se fonde sur l’idée d’une


supériorité de la nature - source principale de richesses - et
d’un projet : celui de remettre l’agriculture au centre des
politiques économiques. 34
Le contexte historique de la Physiocratie :

⚫ Située autour de F. Quesnay (1694-1774), l'école


physiocratique dominera la réflexion économique
française pendant une vingtaine année (1756-1776).
⚫ Développée essentiellement en France elle réagit
contre l'immoralisme des mercantilistes et
surtout contre le colbertisme, responsable de
l'abandon de l'agriculture et du retard de son
développement.
⚫ La Physiocratie naît dans une époque où plus des ¾
du revenu national proviennent de l’agriculture mais
où celle-ci connaît cependant les prémices d’un déclin.

35
Le contexte historique de la Physiocratie :

⚫ C’est donc d’abord une réaction contre le déclin de


l’agriculture.
⚫ La physiocratie arrive aussi après plus de deux siècles
de mercantilisme, qui ont vu la multiplication et les
abus de la réglementation.
⚫ Les physiocrates affirment que la richesse provient
uniquement de la terre et que le développement de la
société et le bonheur des hommes ne peuvent se
réaliser que dans « le royaume de l'agriculture ».
Persuadés que la prospérité du royaume repose sur
celle de l'agriculture, ils opposent à l’industrialisme de
M. Colbert.
36
Les grands auteurs de l’école:

⚫ Secte des économistes : François Quesnay, Marquis


de Mirabeau, Dupont de Nemours, Le Mercier de la
Rivière, L'abbé Nicolas Baudeau et Guillaume François
Le Trosne.
⚫ François Quesnay : Fils de paysan, François Quesnay
(1694-1774) devint médecin. Ces deux
caractéristiques expliquent à coup sûr l’attachement
qu’il a pour l’agriculture et sa conception de l’économie
comme un corps, dont la vie est assurée par la
circulation des richesses. De fait, quand il commence à
s’intéresser à l’économie, vers l’âge de 60 ans, il
propose une représentation de l’économie dite du «
circuit », où tout est à l‘image du fonctionnement du
corps humain. 37
Les grands auteurs de l’école:

François Quesnay : Issu d'une famille modeste, son


père est un petit propriétaire terrien. Il a onze frères et
sœurs. À 11 ans, il ne sait toujours pas lire. Il va alors
apprendre avec son jardinier, ce qui va développer chez
lui un goût pour la médecine et l'« administration
rurale ». Dès 1711, il apprend le latin et le grec avec le
curé de son village. À 13 ans, il se retrouve orphelin de
père et décide de se consacrer à la chirurgie. Il étudie
la médecine.
Chirurgien, médecin, philosophe et démographe,
Quesnay ne commença à s’intéresser vraiment à
l’économie qu’à l'âge de 60 ans.

38
Les grands auteurs de l’école:

L'œuvre de F. Quesnay, le fondateur de l'école est


abondant. Elle comprend
- Fermiers (1756),
- Impôts (1757),
- Grains (1757),
- Hommes (1757).
- Le Tableau économique publié par Quesnay, en 1758
constitue incontestablement l'œuvre majeure des
physiocrates.

39
Les idées principales des physiocrates :

Il y a trois principes fondamentaux : L'ordre naturel, le


libéralisme économique et la primauté de l'agriculture.
a- L’ordre naturel :
les physiocrates énoncent que la société est régie par
un ordre providentiel et essentiel, voulu par Dieu pour
le bonheur des hommes. Cet ordre naturel exprime les
conditions de réalisation d’un monde ordonné et
heureux. Cet ordre naturel contient des lois
fondamentales et immuables de toute société.
Dupont de Nemours écrira que « les lois naturelles sont
irrévocables, elles tiennent à l’essence des hommes et
des choses ».

40
Les idées principales des physiocrates :

⚫ Ces lois, qui doivent être enseignées aux hommes,


légitimes tout d’abord la propriété privé (en
particulier celle de la terre)
⚫ La liberté du commerce et d’industrie est nécessaire
puisqu’elle conduit à la rationalité c’est-à-dire à un
meilleur ordre possible. L’ordre naturel se réalisera si
on laisse faire les hommes.
⚫ La 3ème loi est l’autorité qui permet le respect de la
propriété et de la liberté. C’est au souverain, au
«despote éclairé » connaissant les lois naturelles que
revient le devoir d'assurer la réalisation de cet ordre
naturel.
41
Les idées principales des physiocrates :

b- Le libéralisme économique :
Le libéralisme des physiocrates est étroitement lié à
l'ordre naturel. Puisque l'ordre naturel est rationnel et
bienfaisant, toute intervention de l'Etat est donc jugée
superflue voire inutile. Le libéralisme économique des
physiocrates part de l'idée selon laquelle les individus
doivent pouvoir exercer librement leur activité
économique comme agriculteurs, commerçants ou
manufacturiers sans entraves ni interdictions.

42
Les idées principales des physiocrates :

Leur devise est « laisser faire, laisser passer », car la


libre circulation des biens, et le libre choix des citoyens
de dépenser leurs revenus, stimulent la production et
accroît la richesse du royaume.
Le rôle de l’Etat a clairement été définie par Quesnay
dans son article « Grains » de 1757 : « Il suffit au
gouvernement de veiller à l'accroissement des revenus
des biens du royaume, de ne point gêner l'industrie de
laisser aux citoyens la facilité et le choix de leurs
dépenses ».

43
Les idées principales des physiocrates :

c- La primauté de l'agriculture :
L'agriculture est, la seule activité capable de fournir à
l'homme plus de richesse que n'en ont représenté les
semences et le travail d’agriculteur. « Tout vient de la
terre ». Elle est la seule productive puisqu'elle multiplie la
matière (on plante un grain de blé et on récolte un épi) et
dégage un surplus -le produit net- qui est l'expression de
la richesse même. « La terre est l'unique source de
richesses et...C'est l'agriculture qui les multiplie », dira
Quesnay.

44
Les idées principales des physiocrates :

Dupont de Nemours écrit : « Que le souverain et la


nation ne perdent jamais de vue que la terre est
l’unique source de richesse et que c’est l’agriculture
qui les multiplie. »
Et le Mercier de la Rivière : « L’industrie n’est pas plus
créatrice de la valeur qu’elle n’est créatrice de la hauteur
et de la longueur d’un mur. ».
Les physiocrates avancent un autre argument pour
justifier la productivité de l'agriculture, qui est celui du «
don gratuit de la nature ».

45
Le concept du tableau économique :

⚫ Le Tableau Economique est la première représentation


schématique du circuit économique. Il va permettre de
révéler le fonctionnement d'une économie qui respecte
l'ordre naturel. La première version du Tableau
Economique est éditée en 1758.
⚫ Quesnay explique le circuit économique à travers un
exemple tiré de son article "Analyse de la formule
arithmétique du Tableau Economique de la distribution
des dépenses annuelles d'une Nation agricole", publié
en 1766 dans le Journal de l'agriculture, du commerce
et des finances.

46
Le concept du tableau économique :

a- Les principaux concepts du TE.


⚫ La richesse : elle est définie par Le Mercier de La

Rivière comme « la masse des valeurs qu'on peut


consommer au gré de ses désirs sans altérer le
principe qui les reproduit sans cesse ». Cette définition
a conduit les physiocrates à distinguer entre le produit
brut et le produit net. Le produit brut regroupe la
récolte et l'ensemble des dépenses engagées dans le
processus productif, alors que le produit net est la
partie des recettes qui vient en surplus des frais
engagés dans la production. Le produit net est
l'expression même de la richesse.
47
Le concept du tableau économique :

⚫ les « richesses véritables » ou « vraies richesses »


ou encore « richesses réelles ou naturelles » sont
celles tirées directement de la nature. Il s'agit des
fruits de la terre, des matières premières, des produits
du sol ou du sous-sol, etc.
⚫ les « richesses stériles », sont celles produites dans
les autres activités industrielles et commerciales. Elles
résultent des transformations des richesses réelles et
ne sont réalisables qu'en raison du fait que
l'agriculture dégage un surplus.

48
Le concept du tableau économique :

La production : Elle est conçue comme le supplément


d'output obtenu par rapport aux inputs utilisés ; il n'y a
pour les physiocrates qu'une seule activité qui puisse
engendrer un tel excédent : c'est l'agriculture. Cette
production est le résultat de l'association de trois
facteurs de production : la terre (la nature), le travail et
le capital.
La productivité : Ce n'est pas la terre qui est, à
proprement parler productive, mais le travail appliqué à
la terre. Le travail sera donc qualifié de « productif » s'il
s'exerce dans l'agriculture. Le travail qui transforme et
déplace les produits de la nature est « stérile »; il ne
crée pas de la « matière »c'est-à-dire de la richesse
49
Le concept du tableau économique :

b- La théorie de la production
La théorie de la production développée par Quesnay est
une véritable analyse socioéconomique qui fait appel à
des concepts originaux : avances, reprises, produit net,
que l'on considère comme les véritables sources de la
croissance de la production et de l'amélioration du
niveau de vie de la nation.
 Les avances : Pour produire, il faut au préalable «
avancer » des ressources matérielles nécessaires à la
réalisation du processus de production. Il distingue trois
catégories d'avances : les avances foncières, les avances
primitives et les avances annuelles.
50
Le concept du tableau économique :

⚫ Les avances foncières représentent les dépenses initiales


que font les propriétaires fonciers pour préparer et aménager
la terre afin de la rendre apte à la production agricole
(travaux de bonification, de défrichement, d'assainissement,
d'irrigation, de clôture, etc.) C'est la classe des propriétaires
fonciers qui doit, donc, réunir les conditions rendant possible
l'activité agricole. Elles ne sont pas prises en compte au sein
du tableau économique.
⚫ Les avances primitives : Réalisées par la classe productive,
elles se composent de moyens de production durables
(équipement agricole, bétail...). Les avances primitives
peuvent être assimilées au capital fixe des classiques. Ce
capital fixe subit une usure progressive, et il faut donc
prévoir son amortissement, que Quesnay appellera « intérêts
des avances primitives ». 51
Le concept du tableau économique :

⚫ Les avances annuelles. Assumées par la classe


productive, les avances annuelles représentent les
dépenses en biens qui disparaissent dans le processus
de production. Elles correspondent aux matières
premières nécessaires à la production (semences,
engrais) et aux subsistances nécessaires au travail des
fermiers et des ouvriers agricoles (salaire de la main
d'ouvre et dépenses de consommation des
agriculteurs).
La classification des avances opérée par Quesnay
constitue l'une des premières typologies des éléments
constituant le capital productif et préfigure la distinction
entre le capital fixe et le capital circulant

52
Le concept du tableau économique :

 Les reprises : Pour que le processus de production


puisse continuer, il faudrait chaque année prélever sur
la récolte une fraction du produit global pour renouveler
les avances annuelles et entretenir les avances
primitives. C'est ce que Quesnay appellera les «
reprises ». « Elles sont constituées par l'ensemble des
éléments distraits de la reproduction pour reconstituer
la fécondité du sol, sa faculté de production ».
Intervenant ex-post, les reprises couvrent à la fois le
renouvellement des avances annuelles (ou capital
circulant) et l'amortissement des avances primitives (ou
capital fixe), que Quesnay baptisera « intérêts des
avances primitives ».
53
Le concept du tableau économique :

 Le produit net : Le produit net est l'excédent que produit


l'agriculture. Il résulte de la différence entre la production
totale et les dépenses totales engagées dans la production.
Autrement dit, ces dépenses totales ou coûts de production
représentent les « reprises ». En écriture comptable le produit
net peut être présenté sous la forme suivante :
Production totale - (reprises des AA + intérêts des AP)
= produit net
Il représente trois caractéristiques essentielles :
⚫ C’est une création ou régénération de substance (grains de
blé).
⚫ Il se renouvelle périodiquement, et, il est versé (en argent)
aux propriétaires fonciers.
⚫ Il est à l'origine de tous les revenus du royaume.
54
Le concept du tableau économique :

c- La théorie de la circulation
 La stratification sociale : A la théorie de
production correspond une division de la société en trois
classes qui représentent des agents entre lesquels
circule le produit net. Trois classes sociales doivent être
distinguées : « la classe productive, la classe des
propriétaires et la classe stérile ».

55
Le concept du tableau économique :

⚫La classe des propriétaires fonciers : comprend le


souverain, les possesseurs de terres et les décimateurs
(ceux qui avaient le droit de lever la dîme dans les
paroisses). Cette classe subsiste par le revenu ou le
produit net de la culture, qui lui est payé annuellement
par la classe productive. Pour les physiocrates la classe
des propriétaires fonciers représente la classe
fondamentale en raison du rôle essentiel qu'elle remplit :
- Elle est le promoteur de la richesse nationale par sa
réalisation des avances foncières c'est à dire ses
investissements initiaux dans l'exploitation de la terre.
- Elle est à l'origine de la circulation du produit net que
lui paie les fermiers. Elle anime toute l'activité
économique par la circulation de son revenu. 56
Le concept du tableau économique :

⚫ La classe productive est « celle qui fait naître par la


culture du territoire, les richesses annuelles de la
nation, qui fait les avances des dépenses des travaux
de l'agriculture, et qui paye annuellement les revenus
des propriétaires des terres ». Cette classe comprend
les fermiers et les autres agents (ouvriers agricoles,
métayers) dont l'activité s'exerce dans l'agriculture.
⚫ La classe stérile est « composée de tous les citoyens
occupés à d'autres services et à d'autres travaux que
ceux de l'agriculture, et dont les dépenses sont payées
par la clase productive et par la classe des
propriétaires qui eux-mêmes tirent leurs revenus de la
classe productive. ». 57
Le concept du tableau économique :

 Présentation du Tableau Economique

⚫ Le circuit économique décrit par Quesnay dans le


Tableau économique, qui fait abstraction du
commerce extérieur, présente la circulation du
produit net dans une économie stationnaire. Il est
représenté comme un jeu d’interactions entre trois
classes : la classe des propriétaires, la classe
productive et la classe stérile.

58
Le concept du tableau économique :

⚫ Le TE décrit le fonctionnement d'un système


stationnaire : les recettes des agriculteurs, une fois
payé le revenu, permettent tout juste de
reconstituer les avances pour pouvoir démarrer une
nouvelle production l'année suivante. Il se présente
comme un schéma de reproduction simple où la
production se reproduit à l'identique d'année en
année. Quesnay ne prétend nullement que cet état
stationnaire correspond à la réalité. Son modèle est
théorique et a été construit à des fins
essentiellement pédagogiques.

59
Le concept du tableau économique :

Reproduction totale : 5 milliards

Avances annuelles de la Revenu des propriétaires Avances de la classe


classe productive fonciers stérile

2 milliards 2 milliards 1 milliard

1 milliard

Somme qui sert à payer la Total : 2 milliards dont


rente et les intérêts des 1 milliard la moitié est retenue
AP par cette classe pour
les avances de l’année
1 milliard suivante

Dépenses des avances


2 milliards
annuelles 60
Le concept du tableau économique :

⚫ Pour Quesnay, le mécanisme de fonctionnement du


tableau économique se présente comme suit :
1- la production annuelle atteint de façon permanente
5 MM / an.
2- pour produire ces 5 MM de produits, il faut un
capital d’exploitation de 2 MM. Ainsi en début de
période d’exploitation le capital circulant de la classe
productive est de 2MM.
3- le capital fixe est représenté par un investissement
de 10MM amortissable sur 10 ans. D’où 1 MM
d’amortissement tous les ans.

61
Le concept du tableau économique :

62
Les limites du modèle de Quesnay :

Le tableau économique construit par Quesnay synthétise


une véritable théorie du fonctionnement du « royaume
agricole ».
Il fournit le premier raisonnement macroéconomique
général portant sur des flux réels et monétaires. Ce
raisonnement préfigure les analyses systémiques de
l'économie (c'est-à-dire d'organisation de la société) qui
vont se développer, par la suite, et connaître un intérêt
considérable : les « schémas de reproduction » de Marx,
le modèle de l'équilibre générale de Walras, les systèmes
de comptabilité nationale d'après-guerre, le tableau
d'entrées-sorties ou matrice « input output » de W.
Leontief s'inspirent directement du tableau économique.
63
Les limites du modèle de Quesnay :

Il reste que, si le modèle de Quesnay constitue une


construction intellectuelle considérable, a cependant des limites
et pose de nombreux problèmes d'interprétation.
⚫ Il n'y a aucun revenu affecté à la rémunération du
travail des fermiers et aux avances qu'ils engagent
dans la production. En effet la classe productive qui
travaille la terre, engage des dépenses sous forme d'avances
et réalise un surplus, ne perçoit aucun revenu. Dans le
tableau économique, n'apparaît ni revenu rémunérant le
travail des fermiers, ni profit correspondant aux avances
primitives ou annuelles utilisées dans la production.
⚫ Ceux qui cultivent la terre et qui font les avances (les
fermiers) ne sont pas ceux qui récupèrent le revenu
(les propriétaires fonciers). A ce sujet, le tableau
économique fait apparaître clairement « un surproduit non
compensée (le produit net) c'est-à-dire approprié par une
classe qui ne fournit rien en échange ». Le revenu que
perçoit les propriétaires est en réalité une rente foncière et
non pas un profit, ce qui n'est du tout la même chose. 64
Les limites du modèle de Quesnay :

⚫ La conception du capital est imprécise et


lacunaire :
 Quesnay incorpore dans les avances annuelles non

seulement la masse des salaires (ou capital variable)


et les matières premières mais aussi les subsistances
des travailleurs et le fourrage des animaux ce qui rend
difficile la distinction entre consommation
intermédiaire et consommation finale.
 Quesnay confond aussi la notion d'amortissement

du capital fixe (avances primitives) et celle de


l'intérêt alors que les deux concepts traduisent des
réalités bien différentes.

65
Les limites du modèle de Quesnay :

 Si Quesnay fait sans ambages la distinction entre


capital fixe et capital circulant dans le secteur
agricole, il confond les deux dans le secteur
manufacturier où travaille la classe stérile.
 Alors que Quesnay a beaucoup insisté sur l'importance
du capital fixe dans l'agriculture et son indispensable
reconstitution à l'aide des intérêts des avances
primitives, il n'y prête aucune attention lors de la
description des activités économique de la classe stérile.
L'autoconsommation de cette classe étant nulle, il faut
supposer la transformation des matières premières
qu'elle effectue s'opère sans capital fixe, ce qui
constitue une autre faiblesse incontestable du Tableau.
66
Les limites du modèle de Quesnay :

 Les avances annuelles et primitives qui correspondent


respectivement au capital circulant et au capital fixe
doivent être reconstituées à l'identique ce qui
traduit une reproduction économique simple et partant
exclut toute accumulation initiale (foncière et primitive)
permettant la croissance économique. De plus le TE est
fondé sur l'hypothèse que le produit net est
intégralement dépensé et exclut donc toute
thésaurisation ce qui rend impossible toute création des
conditions permettant la croissance du produit net. En
effet, l'épargne étant conçue comme une « fuite » du
circuit économique, comme une dépense non réalisée
Dés lors la conception du capital ne peut-être que
limitée : Stratégique pour la production, on ne sait ni
comment il naît ni comment il croit.
67
Les limites du modèle de Quesnay :

⚫ Au niveau de la stratification sociale, Quesnay ne


distingue pas entre employeurs (les fermiers) et les
salariés (les ouvriers agricoles) puisqu'il les range dans
la même classe, la classe productive. La typologie des
classes qu'il propose est liée à la nature de l'activité
économique et non à la place qu'occupe chaque classe
dans la production. Elle est fondée sur la conception de
la production et non sur la distinction des facteurs de
production que sont le capital et le travail. Il s'agit
d'une classification sociale fonctionnelle et non
distinctive.

68
Les limites du modèle de Quesnay :

⚫ L’école des physiocrates dont le règne fut limité dans le


temps et surtout dans l’espace, représente un intérêt
bien plus grand que celui qui lui est accordée dans la
plupart des ouvrages d’histoire de la pensée
économique , qui semble avoir gêné la plupart des
économistes, elle a permis à l’économie politique de
dépasser le stade de l’observation empirique dans
lequel l’avaient enfermée les auteurs mercantilistes
pour entrer dans celui de l’analyse de l’origine des
phénomènes économiques.

69
Les limites du modèle de Quesnay :

⚫ Avec les physiocrates, la science économique est née


véritablement, elle se développera avec Smith et
Ricardo avant de faire l’objet de successive remises en
cause.

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