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Avant d’engager une dépense d’équipement il l’entrepreneur soit mesurer quel sera

le montant réel de cette dépense. A priori c’est simple, il suffit de connaître le coût
d’achat du matériel. En réalité c’est plus compliqué parce que le capital a un coût
d’usage et que l’acquisition de l’équipement passe souvent par l’endettement, il y a
donc aussi un coût d’accès au capital.
- Le coût d’usage du capital est fonction du prix du bien d’équipement et des
dépenses qu’il faudra engager pour l’utiliser (amortissement, bien entendu, mais
aussi dépenses liées).
- Le coût d’accès au capital dépend du financement envisagé (autofinancement,
obligations ou emprunts, actions) et le taux d’intérêt réel (taux nominal diminué du
taux d’inflation) des obligations est un assez bon indicateur du coût d’accès au
capital.

Le coût d’accès au capital dépend donc du mode de financement et celui-ci peut


être interne ou externe.
- Il y a financement interne lorsque l’entreprise utilise ses ressources (son épargne
brute qui est équivalente à son revenu disponible brut) pour la FBCF.
- Il y a financement externe lorsque l’entreprise cherche un financement extérieur,
soit en s’adressant aux banques et dans ce cas il s’agit d’un financement intermédié
soit en émettant des titres financiers (actions ou obligations) et c’est un financement
de marché.

Il ne faut pas oublier que le problème du financement pour une entreprise ne se


réduit pas à l’achat de capital fixe (FBCF) : l’entreprise doit financer l’ensemble de
son activité. Si les recettes des ventes ne suffisent pas, elle sera aussi obligée
d’emprunter.

1) Le financement interne

Lorsqu’il y a autofinancement, l’entreprise finance l’investissement à partir du


bénéfice net réalisé pendant la période précédente ou de fonds propres accumulés
grace aux bénéfices des années antérieures. Cette accumulation et cette utilisation
en FBCF ne sont acceptées par les actionnaires que dans la mesure ou l’absence de
distribution des bénéfices (pas de dividendes versés si les bénéfices ne sont pas
distribués) est compensée par une augmentation de la valeur boursière des actions.
La perspective de faire une plus-value lors de la vente de l’action compense la
disparition du dividende.
Les grandes entreprise d’aujourd’hui sont souvent confrontées à des difficultés
lorsque les "gestionnaires" souhaitent investir alors que les propriétaires
(actionnaires institutionnels du type fonds de pension) cherche un rendement
financier immédiat.
Si les actionnaires réclament des dividendes élevés (règle des 15% utilisée par de
nombreux fonds de pension) il devient très difficile d’accumuler pour investir.

Les données fournies par les comptes nationaux peuvent masquer cette contrainte
puisque le taux d’autofinancement est mesuré par le rapport de l’épargne brute à la
formation brute de capital fixe. En France par exemple le taux d’autofinancement
apparaît très élevé. Mais l’épargne brute n’est pas ce que les comptables
d’entreprise appellent capacité d’autofinancement.
L’épargne brute c’est l’excédent brut d’exploitation diminué de toutes les dépenses
correspondant à une distribution de revenu y compris les dividendes, alors que la
capacité d’autofinancement des comptables contient les dividendes. La capacité
d’autofinancement souvent appelée marge brute d’autofinancement mesure
l’aptitude de l’entreprise à financer son développement. L’existence d’une capacité
d’autofinancement élevée ne garantit pas que l’investissement sera élevé. L’usage
de cette capacité relève de la stratégie de l’entreprise et cette dernière ne se résume
pas à l’achat d’équipements nouveaux. La capacité d’autofinancement peut par
exemple être utilisée pour faire des placements spéculatifs. Cela veut dire qu’il ne
faut pas confondre la capacité d’autofinancement et l’autofinancement.

Ainsi le taux de marge et le taux d’épargne commande la capacité des entreprises à


financer leurs investissements.

Le taux de marge et le taux d’épargne des sociétés non financières(en % de la


VAB)
Source : INSEE Comptes de la Nation pour 2011 - comptes des sociétés non
financières (juin 2012)

Le taux d’épargne et le taux de marge ont des évolutions comparables, parce que le
taux de marge conditionne le taux d’épargne... qui lui même conditionne la FBCF.
La lecture du graphique précédent dmande qualques précautions en raison des
échelles adoptées sur chacun des axes. La courbe représentative du taux d’épargne
est au dessus de celle qui représente le taux de marge, il ne faut pourtant pas en
déduire que la marge (l’EBE) est plus grande que l’épargne même si le
dénominateur des rapports est le même (la valeur ajoutée). L’axe du taux de marge
est gradué de 23% à 35% alors que l’axe du taux d’épargne est gradué de 6% à
18%. L’intérêt de ce graphique est de montrer que les deux évolutions peuvent
diverger parfois. C’est le cas en particulier pour la période 1998 - 2004 pendant
laquelle la stabilisation du taux de marge (autour de 32%) s’accompagne d’une
nette diminution du taux d’épargne qui passe de 18% à 14%. Cela implique que les
versements aux prêteurs ou aux propriétaires ont augmenté sensiblement. Un
examen détaillé des comptes des sociétés non financières montre que ce sont les
versements de dividendes qui ont connu une forte augmentation. Ainsi le résultat
d’exploitation disponible pour l’investissement a été réduit par l’augmentation de la
part revenant aux propriétaires des sociétés non financières.

Le taux d’investissement devrait suivre l’évolution du taux de marge et plus encore


du taux d’épargne, or on constate qu’il y a des écarts importants : le taux
d’investissement diminue alors que le taux de marge et/ou le taux d’épargne
augmente ou est stable, et inversement. Cela confirme le rôle joué par le
financement externe. Il faut cependant prendre en compte les modifications
possibles du comportement des entreprises : les entreprises consacrent une part
croissante de la valeur ajoutée aux investissements immatériels (recherche-
développement, formation en particulier) et elles utilisent leur épargne pour
financer des investissements directs à l’étranger. De ce fait le taux d’investissement
sous-estime très fortement l’effort d’investissement.

Taux de marge et le taux d’investissement des sociétés non financières (en % de la


VAB)

Taux d’épargne et taux d’investissement des sociétés non financières en % de la


VAB)

Source : INSEE Comptes de la Nation pour 2011 (juin 2012)

Taux d’autofinancement (EB / FBCF en %) et taux d’investissement en % de la


VAB
Source : INSEE Comptes de la Nation pour 2008 (juin 2009)

Taux d’épargne, d’investissement et d’autofinancement des sociétés non


financières

Source : Rapport économique, social et financier Tome I - Perspectives


économiques 2009-2010 et évolution des finances publiques

2) Le financement externe

Si la FBCF n’est pas autofinancée elle est financée par l’endettement.

Taux d’autofinancement et taux d’endettement net des entreprises


Source : INSEE et Banque de France

Les entreprises qui n’ont pas assez d’épargne pour financer leurs investissements
(c’est la situation normale, on l’a vu) ont un besoin de financement.
Elles s’adressent alors aux banques et aux autres institutions financières ou au
marchés financiers.
Cela conduit à distinguer
- le financement intermédié lorsqu’elles s’adressent à une banque
- le financement de marché lorsqu’elles émettent des titres financiers (actions ou
obligations).

Cependant, émettre des actions et émettre des obligations n’a pas les mêmes
implications pour l’entreprise. Une émission d’action c’est une augmentation de
capital, une émission d’obligations c’est un emprunt. On peut donc regrouper
l’emprunt bancaire et l’emprunt obligataire dans une même forme de financement :
l’endettement. Alors que dans le cas d’une augmentation du capital il n’y a pas
d’endettement au sens strict puisqu’il n’y a rien à rembourser (tant que l’entreprise
existe).

L’endettement quelque soit sa forme (bancaire ou obligataire) a un coût


parfaitement connu : le taux d’intérêt pratiqué par les banques ou celui qui
estattaché à l’obligation. Normalement l’emprunt obligataire est plus avantageux
puisqu’il n’y a pas d’intermédiaire, c’est un financement direct alors que les
banques demandent une rémunération pour le service d’intermédiation qu’elles
remplissent. Du point de vue de la banque la capacité d’emprunt et le taux d’intérêt
qui sera pratiqué pour une entreprise sont déterminés par le poids de ses emprunts
actuels par rapport à son chiffre d’affaire et à ses bénéfices, mais aussi par son
potentiel de croissance. La crédibilité (la notoriété) de l’entreprise joue également
un grand rôle dans sa capacité à emprunter.
L’augmentation de capital ne coûte rien (il faut quand même payer les frais
d’émission) a priori donc pas d’intérêt à servir, il faudra cependant éventuellement
payer des dividendes (le dividende est la part du bénéfice qui est attachée à chaque
action, il est versé sous deux conditions : le bénéfice existe, et il est distribué). Il
faut aussi tenir compte du risque de perte de contrôle puisque le capital est moins
contrôlé après l’émission qu’avant.
On peut donc considérer que l’émission d’action joue le même rôle que
l’autofinancement à partir des profits. Il y a cependant une différence importante
parce qu’une augmentation du capital c’est un appel public au financement par
émission d’actions cela peut avoir pour conséquence l’entrée de nouveaux
actionnaires dans le capital de l’entreprise et/ou une redistribution des pouvoirs
entre les principaux actionnaires. L’augmentation de capital peut donc être la
source de conflits et d’une révision des stratégies de la firme. Pour les sociétés à
capital essentiellement familial, l’augmentation de capital est à la fois une
opportunité et un danger. Ainsi, le coût d’accès au capital dans le cas d’une
émission d’action (augmentation de capital) peut être estimé par le montant des
dividendes qu’il faudra verser chaque année. En rapportant ces versements au
capital procuré par l’émission d’actions on obtient l’équivalent d’un taux de
rémunération des actions. Celui-ci ne peut pas être durablement inférieur au taux de
rendement des obligations car sinon il n’y aurait pas de candidat aux souscription
d’actions.

En résumé, le coût d’accès au capital est lié au taux d’intérêt des obligations. La
référence habituelle est celle des obligations d’État à 10 ans. Les banques ne
peuvent pas pratiquer des taux très éloignés de cette référence si elles ne veulent
pas perdre les grandes entreprises, les dividendes versés ne peuvent pas non plus
devenir nettement inférieurs à cette référence car il faut bien motiver l’actionnaire.
Dans une économie monétaire les calculs économiques ne se font pas avec les
valeurs nominales mais avec les valeurs réelles. Le taux d’intérêt, comme les
autres déterminants des revenus doit être apprécié après correction du
mouvement des prix.

Au total il faut considérer que le taux d’intérêt réel (taux nominal diminué du
taux d’inflation) des obligations est un assez bon indicateur du coût d’accès au
capital.

La décision d’investissement intervient dans une chronique, c’est un moment de la


vie de l’entreprise. Celle-ci est généralement déjà endettée et elle doit mesurer son
taux d’endettement. C’est le rapport de l’endettement obligataire et
bancaire EN aux fonds propres FP , donc EN / FP.

Il y a forcément une relation entre le niveau du taux d’intérêt et le choix du mode


de financement : normalement un taux élevé doit encourager l’autofinancement.

Taux d’intérêt réel long terme (obligation d’État à 10 ans) et taux


d’autofinancement des sociétés non financières
Source : comptes nationaux pour le taux d’autofinancement, Banque de France et
OCDE pour le taux d’intérêt réel.

Cela implique que la structure de financement de l’entreprise se déforme dans le


temps. Le coût de l’endettement est proportionnel au taux d’endettement (plus une
entreprise est endettée plus ses frais financiers sont élevés) mais il dépend aussi des
conditions des taux d’intérêt nominaux au moment de l’emprunt et de l’inflation
constatée pendant la période. Comme les taux d’intérêt des emprunts antérieurs
sont différents (ils ont été réalisés à des dates différentes), il faut calculer un taux
d’intérêt apparent en faisant le rapport des frais financiers payés actuellement à
l’endettement actuel, FF / EN.

Pour ce taux d’intérêt apparent comme pour les autres taux d’intérêt la charge réelle
représentée par les remboursement dépend de l’évolution du niveau général des
prix.

Il faut donc retenir le taux d’intérêt réel apparent soit pour l’année n avec P pour
l’indice des prix :

taux d’intérêt réel apparent l’année n = [EN (n) / FP(n) ] [100 / P(n)] .

Une forte inflation allège les charges financières, la désinflation pénalise au


contraire les entreprises endettées. En situation de faible inflation et de stock
d’endettement important pour des taux nominaux d’intérêt élevés, les
entreprises doivent d’abord améliorer leur structure financière avant de
former du capital fixe. Elles doivent se désendetter.

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