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BIP N°87

Septembre 1999

ASPECTS JURIDIQUES D’UNE OPERATION DE FUSION


SELON LE NOUVEAU DROIT DES SOCIETES

Introduction

CHAPITRE PRELIMINAIRE : PREALABLES A LA FUSION

1. Rapprochement
2. Protocole d’accord
3. La fusion à l’essai

CHAPITRE I : PREALABLES A LA FUSION

1. Conditions financières de la fusion


1.1. Evaluation des sociétés fusionnantes
1.2. Détermination de la parité d’échange
1.3. Création d’un compte « prime de fusion »
1.4. Existence de participations entre les sociétés fusionnantes
1.4.1. Cas où la société absorbante détient une participation dans la société
absorbée
a) Fusion- renonciation
b) Fusion allotissement
1.4.2. Cas où la société absorbée détient une participation dans la société
absorbante :
1.4.3. Cas où les sociétés absorbées et absorbantes détiennent des participations
réciproques
1.5. Négociation des rompus
1.6. Evaluation des apports

2. Le projet de fusion
2.1. Etablissement du projet de fusion
2.2. Contenu du projet de fusion

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2.3. Publicité du projet de fusion
2.4. Délai

CHAPITRE II : EXECUTION DE LA FUSION

1. Intervention du commissaire aux comptes


2. Rapport du conseil d’administration
3. Information des actionnaires
4. Les assemblées
5. Publicités

CHAPITRE III : LES EFFETS DE LA FUSION

1. Date d’effet de la fusion


1.1. Principe
1.2. Clause de rétroactivité
2. Effets à l’égard des associés
3. Effets à l’égard des dirigeants
4. Effets à l’égard des créanciers
4.1. Principe de la transmission universelle du patrimoine
4.2. Application du principe
4.2.1. Pour les créanciers non obligataires
4.2.2. Pour les créanciers obligataires
a) Cas des obligations de la société absorbée
b) Obligataires de la société absorbante
4.2.3. Pour les bailleurs
4.2.4. L’application aux parties à des contrats conclus intuitu personae
4.2.5. Pour les salariés

Conclusion

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Introduction

L’un des aspects les plus marquants de la mondialisation est le phénomène de


concentration des entreprises, concentrations qui sont offertes par divers moyens
juridiques.

En effet, les procédés de restructuration des sociétés, indépendamment de leur forme ou de leur
taille, sont multiples. Certains procédés résultent des techniques sociétaires (fusion, scission et
prise de participation), d’autres font appel à des techniques contractuelles, principalement
l’accord d’entreprise qui intervient lorsqu’une société accepte de passer sous le contrôle d’une
autre sans que celle- ci prenne dans un premier temps, une participation majoritaire dans la
première.

Parmi les procédés de restructuration, nous avons noté qu’il en existe un qui n’épargne
aucune économie et qui traduit bien ce phénomène de mondialisation, il s’agit de la fusion
entre sociétés.

La fusion est l’opération par laquelle une société en annexe une autre, l’annexante et
l’annexée ne faisant plus qu’une seule et même société. La fusion peut résulter :

- soit de l’absorption d’une société par une autre société ;


- soit de la participation d’une société à la constitution d’une société nouvelle.

La pratique marocaine montre que la fusion absorption est plus fréquemment utilisée que
la fusion par création d’une société nouvelle. Cela tient essentiellement à des
considérations fiscales notamment dues à la taxation des plus-values réalisées sur une
assiette plus élargie dans le cas d’une fusion création.

Ainsi, la fusion, plus qu’une alliance constitue une véritable union de deux sociétés (ou
plus), avec confusion de patrimoine comme nous le verrons lors de nos développements.

Techniquement, la fusion provoque une augmentation de capital – chez l’annexante – et


une dissolution – chez l’annexée – ; les associés de cette dernière deviennent donc
associés de la première.

La fusion est le résultat de choix stratégiques. En effet, la fusion peut avoir lieu entre
sociétés appartenant à un même secteur d’activités ou à des secteurs d’activités
complémentaires (recherche d’une diversification).

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Il y a autant de forme de fusion qu’il y a de stratégies industrielles ou financières. A s’en


tenir aux principales, on retiendra :

- La fusion expansion : c’est ici la recherche d’une grande dimension qui justifie
l’opération. Ainsi en fusionnant, la société change de calibre, elle devient moins
fragile, moins vulnérable à une offre publique d’achat (OPA) car plus chère à
conquérir. Elle gagne aussi en indépendance et permet une libre circulation des
flux financiers ; elle diminue la part des frais non productifs et améliore sa
rentabilité.
- La fusion concentration : c’est le moyen de s’assurer de la fidélité des clients et
des fournisseurs, la docilité des concurrents.
- La fusion compression : c’est le souci, au sein d’un groupe déjà constitué, de
modifier l’agencement des filiales et des sous filiales.

La fusion peut s’opérer entre différents types de sociétés. Le principe est le même quelle
que soit la nature des sociétés impliquées. C’est pourquoi nous aborderons le régime
général de la fusion quel que soit la forme de la société (chapitre 1). Mais nous
n’étudierons que les modalités de la réalisation et ses conséquences, d’une fusion entre
sociétés anonymes, afin de ne pas nous éloigner de notre champ d’investigation (chapitre
2 et 3).

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CHAPITRE PRELIMINAIRE
PREALABLES A LA FUSION

La décision de se développer par croissance externe et a fortiori par fusion, doit répondre
à une logique stratégique solide. C’est pourquoi avant toute décision de fusion, il est
nécessaire d’accorder une attention particulière aux étapes suivantes, préalables à la
réussite de cette opération.

1. Rapprochement

Il n’est pas d’union sans séduction et la période antérieure au projet de fusion est placé
sous ce signe ; qu’il s’agisse de la reprise d’une entreprise en difficulté ou de
l’acquisition d’une entreprise prospère, la fusion ne se conçoit pas sans étape, qu’elle
qu’en soit la durée. Le futur absorbant doit être convaincu de l’utilité stratégique d’une
telle annexion, d’où des études commerciales, de production, financières, juridiques, pour
mieux connaître la promise. Et du côté de l’absorbée, on est moins attentif à la santé de
l’autre et aux rémunérations attendues. Des marieurs existent – conseils en
rapprochement, départements spécialisés des banques, pouvoirs publics – qui feront se
rencontrer les intéressés.

2. Protocole d’accord

Une fois l’étape du rapprochement franchie, de véritables négociations sont entamées.


C’est à ce stade que l’on évoque la possibilité d’une fusion, la parité d’échange, les
incidences sociales, le sort des dirigeants, la date de l’opération. Lorsque les pourparlers
sont suffisamment avancés, des lettres d’intention sont parfois échangées, un protocole
d’accord peut être rédigé. Ce protocole constate seulement l’accord des sociétés
concernées sur le principe et le sens de la fusion (qui sera l’absorbée, qui sera
l’absorbante) et sur certaines des modalités de celle-ci, ainsi que leur détermination
d’aller plus avant et de passer à l’étape suivante, savoir celle du projet de fusion.

Toutefois, un protocole d’accord n’équivaut pas à un projet de fusion et un désistement


relatif à l’opération projetée reste possible. Cependant, les négociateurs devront veiller à
ne pas tomber dans le cas d’une rupture abusive de pourparlers, rupture qui pourrait
engager la responsabilité civile (délictuelle) au profit de la société qui la subit.

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3. La fusion à l’essai

Cette double étape du rapprochement et du protocole est tantôt abrégée, tantôt allongée.
Elle est abrégée lorsque la fusion concerne les sociétés d’un même groupe.

Elle peut être aussi allongée lorsque l’absorbante souhaite en savoir plus sur l’absorbée
Dans ce cas, des procédés juridiques, tels que les accords de coopération en matière de
production, de recherche ou de commercialisation sont expérimentés.

En France, avant de franchir l’étape de la fusion à proprement parlée, le fonds de


commerce de la future absorbée peut être mis en location gérance au profit de
l’absorbante. ce procédé présente l’avantage de mieux percevoir les défauts et les qualités
de la première. A l’issue de ce contrat, les parties renoncent à leur désir de rapprochement
ou décident au contraire d’aller plus avant. Nous arrivons alors au projet de fusion.

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CHAPITRE I

PREPARATION A LA FUSION

Les fusions nécessitent l’étude des conditions, notamment financières de l’opération (1),
qui seront figées définitivement dans un document ayant seul, valeur juridique pour
constater l’opération envisagée : le projet de fusion (2).

1. Conditions financières de la fusion

L’obstacle essentiel à surmonter pour arriver à un accord sur la fusion à réaliser, est le
poids relatif de chaque actionnaire ou associé des sociétés préexistantes, dans la société
qui bénéficie de ces apports, d’où tout l’intérêt de l’évaluation des sociétés participant à la
fusion.

1.1. Evaluation des sociétés fusionnantes

La loi ne réglemente pas les modalités de détermination des conditions financières de


l’opération mais exige que les méthodes d’évaluation qui seront retenues par les
dirigeants et dont les explications figureront dans le rapport du conseil d’administration,
du directoire ou du (ou des) gérant(s) soient justifiées.

La détermination des conditions financières suppose en pratique le respect des méthodes


traditionnelles pour l’évaluation des biens apportés à leur valeur vénale ainsi que
l’évaluation des titres à attribuer en rémunération des apports.

Les méthodes d’évaluation des sociétés sont extrêmement variées. Le choix de l’une ou
de l’autre de ces méthodes est, en outre, susceptible d’influer gravement sur les droits des
associés ou actionnaires des sociétés en cause. Des directives doivent donc être suivies,
pour éviter que la fusion ou la scission ne soit effectuée au détriment d’une partie des
associés ou actionnaires. Dans ce cas , l’évaluation ne sert pas de base à la négociation
d’un prix contrairement au cas d’une acquisition classique.

Elle permet de déterminer le rapport d’échange des titres, ainsi que les valeurs d’apport. Il
convient donc d’évaluer séparément les éléments constitutifs de chacune des entreprises
parties à la fusion.

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Mais la pratique a montré que l’on ne peut procéder à l’évaluation d’une entreprise sans
un diagnostic préalable qui permet de comprendre le présent et le passé de l’entreprise
pour connaître son avenir. Il permet de réunir une part importante des informations
nécessaires à l’évaluation et d’éviter les erreurs d’appréciation.

1.2. Détermination de la parité d’échange

Le rapport d’échange peut se définir comme le nombre d’actions ou parts de la société


bénéficiaire des apports auxquels donneront droit une ou plusieurs actions ou parts
sociales de la société apporteuse. Il constitue la base financière sur laquelle l’opération
sera réalisée. Sa détermination doit être pesée avec soin afin que les actionnaires et
associés des sociétés qui disparaissent, retrouvent, au sein de la société dans laquelle ils
sont transférés, des droits sociaux potentiellement équivalents à ceux qu’ils perdent.

Pour déterminer la parité d’échange, la valeur globale des sociétés est divisée par le
nombre d’actions ou de parts composant leur capital respectif de telle sorte que soit
déterminée une valeur unitaire de chaque titre.

La comparaison de ces valeurs unitaires donne une parité théorique d’échange des titres
permettant de fixer un rapport d’échange qui déterminera le nombre des actions ou parts
nouvelles émises par la société absorbante ou nouvelle, en vue de leur attribution aux
actionnaires ou associés de la société absorbée (article 224 alinéa 3).
Exemple

La société A au capital de 4.200.000 DH divisé en 16.800 actions de


250 DH a absorbé la société B au capital de 1.400.000 DH divisé en
14.000 actions de 100 DH.

Par hypothèse, les différentes estimations ont abouti au résultat


suivant :

Valeur de l’action de la société « A » : 600 DH


«B»: 120 DH

Le rapport théorique d’échange est de : 600/120 = 5/1 soit 5


actions de la société « B » pour 1 action de la société « A ».

La société « A » devra créer 14.000 actions : 5 = 2.800 actions


nouvelles.

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1.3. Création d’un compte « prime de fusion »

Chaque fois que la valeur réelle des actions ou parts de la société absorbante excède leur
montant nominal, la différence entre la valeur des biens reçus en apport et le montant de
l’augmentation du capital de la société absorbante doivent être portés au passif du bilan au
compte "Prime de Fusion".
Exemple

En reprenant l’exemple ci-dessus, la société « A » qui doit créer


2.800 actions nouvelles à la valeur nominale de 250 DH, ceci
conduit à :

• une augmentation du capital de :

250 DH x 2.800 actions nouvelles = 700.000 DH

• la valeur d’apport de la société « B » est de :

120 DH x 14.000 actions = 1.680.000 DH

La prime de fusion est de :

1.680.000 - 700.000 = 980.000 DH

1.4. Existence de participations entre les sociétés fusionnantes

La situation décrite ci-dessus paraît aisée mais la pratique a montré qu’il est fréquent que
l’une des sociétés qui envisagent leur fusion, ait une participation dans l’autre. Il s’agit le
plus souvent de la société absorbante. Mais l’inverse peut se présenter comme nous
l'étudierons ci-après.

1.4.1. Cas où la société absorbante détient une participation dans la société absorbée

Dans ce cas la société absorbante a une double qualité : d’une part, elle reçoit l’apport de
la société absorbée, apport qu’elle doit rémunérer par une attribution de parts ou d’actions
nouvelles; mais d’autre part, en tant que membre de la société absorbée, elle a vocation à
recevoir une fraction des parts ou actions nouvelles qu’elle doit émettre.

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Deux hypothèses peuvent alors être envisagées :

a) Fusion- renonciation

La société absorbante se borne à créer des droits sociaux nécessaires à la rémunération


des associés de la société absorbée autres qu’elle même.

Ce procédé est dit "fusion renonciation", car la société absorbante renonce à émettre des
actions ou des parts qui devraient lui revenir.

La plus-value nette correspondant à la participation de la société absorbante dans la


société absorbée constitue alors une prime de fusion complémentaire.
Exemple

Partant de l’exemple précité, on considère par hypothèse que la


société « A » détient 4000 actions de la société « B ». dans ce cas,
les nouvelles actions que la société absorbante émettra seront de
l’ordre de :

(14.000 actions – 4.000 actions) : 5 = 2.000 actions

• soit une augmentation de capital de :

250 DH x 2.000 actions = 500.000 DH

• la prime de fusion s’élevant à :

(120 DH x 10.000 actions) – 500.000 DH = 700.000 DH

Le montant de 700.000 DH représente la différence entre le valeur


réelle de l’apport et la valeur nominale de l’augmentation de capital.

La prime de fusion complémentaire correspondant à la participation


de la société absorbante dans la société absorbée s’élève à :

(120 DH x 4.000 actions) – (100 DH x 4.000 actions) = 80.000 DH

La somme de 80.000 DH correspond à la valeur pour laquelle les


actions de la société « B » (absorbée) figurait à l’actif de la société
« A » (absorbante).
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b) Fusion allotissement

Dans le cas où la société absorbante détient une participation dans la société absorbée, les
deux parties pourraient aussi convenir du système suivant : attribution à la société
absorbante de la fraction du patrimoine de l’absorbée qui correspond aux droits de
l’absorbante, le surplus seul faisant l’objet d’un véritable apport-fusion.

Le droit fiscal marocain analyse la fusion allotissement en une liquidation partielle de


société suivie d’une fusion.

Dans cette conception, le profit réalisé par la société absorbée (différence entre la valeur
réelle et la valeur comptable de son actif net) n’a que partiellement le caractère d’un profit
de fusion ; à concurrence de l’actif alloti, il s’agit d’un profit de liquidation.

1.4.2. Cas où la société absorbée détient une participation dans la société absorbante :

Nous raisonnerons à partir d’un cas.

Soit une société « A » absorbante au capital de 4.000.000 DH divisé


en 40.000 actions de 100 DH dont la valeur réelle est de 200 DH et
une société « B » au capital de 2.000.000 DH divisé en 10.000
actions de 200 DH valant 400 DH. Dans le portefeuille de la société
« B » figurent 4.000 actions de la société « A » évaluées à 800.000
DH. Le rapport d’échange est le suivant :

2/1 soit 2 actions « A » pour 1 action « B ».

La société « A » va donc créer 10.000 actions x 2 = 20.000 actions


nouvelles qui seront attribuées aux actionnaires de la société « B »
dans une augmentation de capital de :

100 DH x 20.000 = 2.000.000 DH

La prime de fusion s’élève à :

(200 DH x 20.000 actions) – (100 DH x 20.000 actions) =


2.000.000 DH

Mais comme la société « A » ne peut pas détenir ses propres


actions, elle doit supprimer de son actif les 4.000 actions « A » qui
lui ont été apportées par la société « B » pour une valeur de 800.000

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DH. A cet effet, elle réduit immédiatement son capital de 100 DH x
4.000 actions = 400.000 DH, soit la valeur nominale et impute sur
la prime de fusion la différence entre la valeur d’apport et la valeur
nominale des actions annulées, soit :

800.000 DH – 400.000 DH = 400.000 DH

En définitive le capital social est seulement augmenté de :

2.000.000 DH – 400.000 DH = 1.600.000 DH

La prime de fusion s’élève à :

2.000.000 DH – 400.000 DH = 1.600.000 DH

1.4.3. Cas où les sociétés absorbées et absorbantes détiennent des participations


réciproques

Dans ce cas, on applique cumulativement les procédés indiqués ci-dessus ; c’est-à-dire


une fusion renonciation et une réduction de capital pour éviter que la société absorbante
ne devienne propriétaire de ses propres actions.

Soit une société « A » au capital de 4.000.000 DH divisé en 40.000


actions de 100 DH. Dans le portefeuille de la société « A » figurent
5.000 actions de 200 DH de la société « B » achetées à
1.250.000DH.

La société « B » a un capital de 3.000.000 DH divisé en 15.000


actions de 200 DH. Cette société détient 5.000 actions de la société
« A ».

La société « A » doit absorber la société « B ».

Par hypothèse, l’actif net de la société « A » après déduction du


passif réel, mai sans tenir compte de la valeur de sa participation
dans la société « B » est estimé à 6.000.000 DH.

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Par ailleurs, l’actif net de la société « B » après déduction du passif


mais sans tenir compte de la valeur de sa participation dans la
société « A » a été estimé à 5.000.000 DH.

En désignant par « a » la valeur unitaire des actions de la société


« A » et par « b » celle de la société « B », l’actif net de chacune des
sociétés après réévaluation de sa participation dans l’autre s’établit
à:

« A » = 6.000.000 DH + 5.000b = 40.000a


« B » = 5.000.000 DH + 5.000a = 15.000b

Soit :

40a = 6.000 + 5b
15b = 5.000 + 5a

a = 6.000/40 + 5b/40
a = 150 + b/8

15b = 5.000 + 5 (150 +b/8) = 5.750 + 5b/8


120b = 46.000 + 5b
115b = 46.000
b = 46.000/115 = 400 DH

40a = 6.000 + (5 x 400)


40a = 6.000 + 2.000
40a = 8.000
a =8.000/40 = 200 DH

Le rapport d’échange s’établit comme suit :

Actions « A » = 200
Actions « B » = 400

Soit deux actions A pour une action B.

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La société « A » doit donc créer 30.000 actions nouvelles au titre de
la fusion soit 15.000 x 2 dont 10.000 devraient lui revenir
puisqu’elle détient 5.000 actions de la société « B ».

Elle renonce à ses 10.000 actions et se borne à créer 20.000 actions


nouvelles qui seront attribuées aux actionnaires de la société « B »
autres qu’elle même.

La société « A » reçoit donc un apport global porté à l’actif pour


une valeur de 6.000.000 DH.

La contrepartie est :

• Annulation des titres B pour leur valeur d’acquisition


1.250.000DH
• Augmentation de capital de 100 DH x 20.000 = 2.000.000 DH
• Prime de fusion 2.750.000 DH

1.5. Négociation des rompus

Il est très rare que le rapport d’échange des titres à l’occasion d’une fusion permette
d’attribuer un nombre entier d’actions ou de parts nouvelles par chaque action ou part
ancienne.

Le plus fréquemment, il faudra détenir plusieurs actions ou parts pour prétendre à un


nombre entier de droits sociaux nouveaux ; par exemple le rapport d’échange peut être de
1 action nouvelle pour 2 actions anciennes ou 2 pour 3.

Pour les actionnaires ou associés qui ne possèdent pas le nombre de titres prescrit pour
obtenir les actions ou parts nouvelles, il y a obligation d’acheter ou de céder des droits
formant rompus.

La valeur mathématique de chaque droit est égale à la fraction de la valeur de l’action ou


part sociales.

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le :
Si 2 actions ou parts d’une société « A » absorbée donnent droit à 3 actions nouvelles ou
parts nouvelles d’une société absorbante « B » d’une valeur unitaire de 120 DH, chaque
droit vaut théoriquement 180 DH (120 x 3/2).

Chaque fois que le rapport d’échange ne correspond pas à une partie arithmétique simple,
les techniques suivantes peuvent être envisagées pour éviter la négociation de nombreux
"rompus" :

1. Renonciation par un actionnaire de la société absorbée à exercer son droit sur quelques
titres.
2. Achat par la société de ses propres actions suivies d’une réduction de capital pour
annuler les titres.
3. Versement d’une soulte.

1.6. Evaluation des apports

Les valeurs d’apport fixées dans le contrat de fusion sont en général fondées sur des
valeurs comptables.

En revanche, l’évaluation des titres sociaux précédant le calcul de la parité d’échange


tient compte de leur valeur économique.

L’évaluation des apports à effectuer doit se faire suivant une analyse sérieuse fondée sur
des solutions d’évaluation actuellement admises.

2. Le projet de fusion

2.1. Etablissement du projet de fusion

Avant toute formalité, il appartient au conseil d’administration, ou au directoire ou au(x)


gérant(s) de chacune des sociétés participant à l’opération envisagée d’arrêter le projet de
fusion.

2.2. Contenu du projet de fusion

Le projet de fusion doit contenir les indications suivantes :

1. La forme, la dénomination ou la raison sociale et le siège social de toutes les sociétés


participantes à l’opération.

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2. Les motifs, buts et conditions de la fusion.

3. La désignation et l’évaluation de l’actif et du passif dont la transmission aux sociétés


absorbantes ou nouvelles est prévue.

4. Les modalités de remise des parts ou actions et la date à partir de laquelle ces
parts ou actions donnent droit aux bénéfices ainsi que toute modalité particulière
relative à ce droit et à la date à partir de laquelle les opérations de la société absorbée
seront, du point de vue comptable, considérées comme accomplies par la ou les sociétés
bénéficiaires des apports.

5. Les dates auxquelles ont été arrêtés les comptes des sociétés intéressées utilisés pour
établir les conditions de l’opération.

6. Le rapport d’échange des droits, et le cas échéant, le montant de la soulte.

7. Le montant prévu de la prime de fusion.

8. Les droits accordés aux associés ayant des droits spéciaux et aux porteurs de titres
autres que des actions et, le cas échéant, tous avantages particuliers.

2.3. Publicité du projet de fusion

Une fois établi et signé, le projet de fusion doit être déposé au greffe du Tribunal du lieu
du siège des différentes sociétés participant à la fusion.

Le projet de fusion fait également l’objet d’un avis inséré dans un journal d’annonces
légales, par chacune des sociétés participant à l’opération. Cet avis contient exactement
les mêmes dispositions que précitées.

Si une au moins de ces sociétés fait publiquement appel à l’épargne, un avis doit être
inséré au Bulletin Officiel

2.4. Délais

Le dépôt au greffe et la publicité doivent avoir lieu au mo ins trente jours avant la date de
la première assemblée générale extraordinaire appelée à statuer sur l’opération

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CHAPITRE II

EXECUTION DE LA FUSION

1. Intervention du commissaire aux comptes

Les commissaires aux comptes doivent avoir communication du projet de fusion au


moins 45 jours avant la date de l’assemblée générale appelée à se prononcer sur ledit
projet.

En outre, ils peuvent obtenir auprès de chaque société communication de tous les
documents utiles et procéder à toutes vérifications nécessaires.

Si la loi rend obligatoire l’intervention des commissaires aux comptes, elle reste
incomplète sur la désignation des commissaires aux comptes dont elle ne précise pas s’il
s’agit de tous les commissaires aux comptes des sociétés fusionnées ou s’il s’agit des
commissaires aux comptes nommés spécifiquement à l’occasion de la fusion, à l’instar
des commissaires à la fusion français.

En revanche, la loi définit la mission du commissaire aux comptes à l'occasion de


l'exécution de la fusion comme suit :

i vérification que les valeurs relatives attribuées aux actions des sociétés
participant à l’opération sont pertinentes et que le rapport d’échange est
équitable ;
i vérification notamment si le montant de l’actif net apporté par les
sociétés absorbées est au moins égal au montant de l’augmentation de
capital de la société absorbante ou au montant du capital de la société
nouvelle issue de la fusion.

Ces vérifications doivent être ensuite portée dans un rapport qui indique la ou les
méthodes suivies pour la détermination du rapport d’échange proposé, si elles sont
adéquates en l’espèce, et les difficultés particulières à l’évaluation s’il en existe,
l’appréciation de la pertinence des valeurs relatives attribuées aux actions et de l’équité du
rapport d’échange.

La loi ne précise pas si doivent être établis autant de rapports que de sociétés
participantes.
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Par ailleurs, l’assemblée générale extraordinaire de la société absorbante statue sur


l’approbation des apports en nature sur la base, en principe, d'un rapport spécial établi par
le commissaire aux comptes.

2. Rapport du conseil d’administration

Le conseil d’administration, ou le directoire de chacune des sociétés établit un rapport


écrit qui est mis à la disposition des actionnaires. Cette disposition ne concerne que les
sociétés anonymes qui participent à la fusion.

Ce rapport explique et justifie le projet de manière détaillée, du point de vue juridique et


économique notamment, en ce qui concerne le rapport d’échange des actions et les
méthodes d’évaluation utilisées qui doivent être concordantes pour les sociétés
concernées ainsi que, le cas échéant, les difficultés particulières d’évaluation.

3. Information des actionnaires

Toute société anonyme participant à une opération de fusion doit mettre à la disposition
des actionnaires au siège social, trente jours au moins avant la date de l’assemblée
générale appelée à se prononcer sur le projet, les documents suivants :

1. Le projet de fusion ;

2. Les rapports du conseil d'administration (ou du directoire) et du commissaire aux


comptes ;

3. Les états de synthèses approuvés ainsi que les rapports de gestion des trois derniers
exercices des sociétés participant à l’opération ;

4. Un état comptable, établi selon les mêmes méthodes et la même présentation que le
dernier bilan annuel, arrêté à une date qui, si les derniers états de synthèse se rapportent à
un exercice dont la fin est antérieure de plus de six mois à la date du projet de fusion, doit
être antérieure de moins de trois mois à la date de ce projet.

Tout actionnaire peut obtenir sur simple demande et sans frais, copie totale ou partielle,
communication des documents susvisés.

On notera que la loi ne distingue pas suivant qu’une société absorbée est ou non une
filiale à 100% de la société absorbante. Le droit français, prévoit au contraire une

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procédure simplifiée éliminant notamment l’obligation d’établir un rapport du conseil
d’administration.

4. Tenue des assemblées générales extraordinaires

La fusion est décidée par chacune des sociétés intéressées, dans les conditions requises
pour la modification des statuts. La règle est logique : pour l’une l’absorbée, la fusion
emporte dissolution, pour l’autre, l’absorbante, le capital de la société est augmenté. Or,
aussi bien pour l’annexée que l’annexante, la dissolution et l’augmentation de capital sont
des décisions de nature extraordinaire, comme l’est la modification des statuts. A cet
effet, la résolution, pour être adoptée, exige la réunion d’une majorité qualifiée : deux
tiers dans une société anonyme et trois quarts dans les SARL.

Le schéma se complique lorsque la société absorbée a émis des obligations. De fait,


l’assemblée des obligataires est alors appelée à délibérer sur la proposition de fusion, sauf
faculté pour les dirigeants de ne pas consulter les obligataires et de leur offrir le
remboursement immédiat de leurs titres. En cas de consultation, si l’assemblée des
obligataires refuse la proposition de fusion, les dirigeants peuvent passer outre, ce qui
ouvre le droit pour l’assemblée des obligataires de faire opposition à la fusion. Du côté,
de l’absorbante, la situation est plus simple dans la mesure où le projet de fusion n’a pas à
lui être soumis ; leur seule défense est l’opposition ; elle exige que l’assemblée des
obligataires ait donné mandat en ce sens au représentant de la masse.

La fusion est soumise, le cas échéant, dans chacune des sociétés qui participent à
l’opération, à la ratification des assemblées spéciales d’actionnaires.

5. Publicités

Les deux sociétés en cause étaient immatriculées au registre de commerce, aussi bien
doivent-elles procéder à des inscriptions modificatives afin d’informer les tiers, pour l’une
de sa dissolution et pour l’autre de son augmentation de capital. Faute d’inscription
modificative, la fusion est inopposable aux tiers, c’est-à-dire qu’elle ne produit aucun
effet à leur égard et les créanciers de la société absorbée peuvent prétendre que celle-ci
n’a pas été dissoute, ils ne supportent pas la concurrence des créanciers de l’absorbante
sur les biens de l’absorbée.

Nous invitons le lecteur à se rendre à la fin de cette étude où nous avons dresser un
tableau chronologique des formalités à accomplir lors de la fusion

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CHAPITRE III

EFFETS DE LA FUSION

1. Date d’effet de la fusion

Déterminer la date de la fusion équivaut à rechercher le point de fusion, le moment où


s’accomplit l’union entre les sociétés concernées, où se confondent leurs actifs et leurs
passifs, leurs salariés, leurs associés et leurs dirigeants. A cette recherche correspond un
principe (1.1.), que la pratique a doté d’un tempérament : la clause de rétroactivité (1.2.).

1.1. Principe

Le principe s’exprime différemment selon que l’on s’adresse aux associés ou aux tiers.

a) Pour les associés, ceux de l’absorbante comme ceux de l’absorbée, la date de la fusion
est celle de la dernière des assemblées ayant approuvé la fusion. Si l’assemblée de
l’absorbée a statué le 15 juin et l’absorbante le 17 juin, par exemple, la fusion sera
datée du 17 juin. Dès cette date les actionnaires de l’absorbée, par exemple, seront
devenu ceux de l’absorbante, ils pourront donc réclamer que lesdites actions soient
inscrites à leur compte.

b) Pour les tiers, les créanciers de la société absorbée notamment, la date de la fusion est
celle des inscriptions modificatives au registre de commerce. Tant que ces inscriptions
ne sont pas intervenues, ils peuvent ignorer la disparition de leur débitrice et
demander, le cas échéant, sa mise en redressement ou en liquidation judiciaire. Un fois
cette formalité accomplie, toute assignation dirigée contre la société absorbée serait
nulle.

Le principe exposé, il n’est pas rare que le contrat peut prévoir que l’opération prendra
effet à une autre date, laquelle ne doit être ni postérieure à la date de clôture de l’exercice
en cours de la ou des sociétés bénéficiaires ni antérieure à la date de clôture du dernier
exercice clos de la ou des sociétés qui transmettent leur patrimoine. Il s’agit de la lause de
rétroactivité.

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4.2. Clause de rétroactivité

On entend par « clause de rétroactivité » la stipulation par laquelle les parties à la fusion
entendent reporter les effets de celle-ci à une date antérieure à celle de son approbation,
par exemple à la date d’arrêté des comptes sur le fondement desquels les évaluations ont
eu lieu.

Ainsi, pour des sociétés clôturant leur exercice le 31 décembre 1997 et ayant fusionné le
15 octobre 1998, une clause de rétroactivité aura été insérée dans le projet de fusion
reportant au 1er janvier 1998 la date de celle-ci. En conséquence, les opérations tant
passives (dettes) qu’actives (créances), effectuées par l’absorbée entre le 1er janvier et le
15 octobre 1998 seront réputées avoir été accomplies par l’absorbante. L’intérêt de la
clause est évident : grâce à ce point fixe, les partenaires peuvent entrer en négociation et
établir sur des bases stables les conditions financières de la fusion. A défaut d’une telle
stipulation, les parties seraient condamnées à revoir constamment les bases de la fusion
pour prendre en considération les événements, heureux et malheureux, survenus chez lune
comme chez l’autre société depuis la date du dernier bilan.

Une telle clause est licite. Elle est consacrée par l’article 225 alinéa 2 de la loi relative aux
sociétés anonymes, qui dispose que « le contrat ou traité de fusion, peut prévoir « une
autre date, laquelle ne doit être ni postérieure à la date de clôture de l’exercice en cours de
la ou des sociétés bénéficiaires ni antérieure à la date de clôture du dernier exercice clos
de la ou des sociétés qui transmettent leur patrimoine. »

2. Effets à l’égard des associés

La fusion entraîne l’acquisition, par les associés des sociétés qui disparaissent, de la qualité
d’associés des sociétés bénéficiaires dans les conditions déterminées par la contrat de fusion. Les
actionnaires de la société absorbée troquent leurs titres contre ceux de la société absorbante selon
les parités d’échange.

Quant aux actionnaires préexistants de la société absorbante, leur nombre croit, d’où des
incidences éventuelles sur l’équilibre des forces. Notons toutefois, que cette entrée de
nouveau associés n’est pas soumise à la procédure d’agrément, la solution étant
commandée par la nature de la transmission universelle de la fusion.

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3. Effets à l’égard des dirigeants

La société absorbée étant dissoute, ses dirigeants perdent ipso facto cette qualité. Telle est
la règle. Cependant, une assemblée ordinaire de la société issue de la fusion décide
souvent d’ajouter des sièges autour de la table du conseil d’administration et de désigner
les ex-administrateurs de l’absorbée ou seulement certains d’entre eux.

Rappelons que les nouvelles dispositions relatives aux sociétés anonymes permettent, en
cas de fusion, le dépassement du plafond du nombre d’administrateurs.

Ainsi, le législateur marocain a tenu compte du caractère exceptionnel de l'opération de


fusion et a défini en conséquence un nombre possible d'administrateurs
exceptionnellement supérieur au maximum légal permanent.

La limite maximale de douze administrateurs ou de quinze dans le cas des sociétés cotées
peut être donc dépassée jusqu'à concurrence du nombre total des administrateurs en
fonction depuis plus de six mois dans les sociétés fusionnées sans pourtant que ce nombre
total puisse dépasser le plafond légal ci-après.

Trois hypothèses doivent être distinguées pour la détermination des nombres maximum
d'administrateurs au conseil d'administration des sociétés fusionnées :

i Si la fusion est réalisée entre sociétés anonymes non inscrites à la cote


officielle : dans le conseil d'administration de ces société fusionnées, le
nombre maximal d'administrateurs est de vingt-quatre.

i Si la fusion est réalisée entre sociétés dont les actions sont admises à la cote
officielle : le nombre maximal d'administrateurs est fixé à trente.

i Si la fusion est réalisée entre une société dont les actions sont inscrites à la
cote officielle et une société dont les actions ne sont pas inscrites à la cote
officielle : le nombre maximal d'administrateurs est fixé à vingt sept.

Il faut souligner que la loi 17-95 n'accorde aux sociétés fusionnées la possibilité d'avoir
un conseil d'administration élargi que pour une période temporaire (le législateur n’a pas
précisé de délai). La société devra rétablir progressivement son régime normal, car :

Il ne pourra être procédé à aucune nomination de nouveaux administrateurs, ni au


remplacement des administrateurs décédés, révoqués ou démissionnaires, tant que le
nombre des administrateurs n'aura pas été réduit à douze (quinze si les actions de la
société issue de la fusion sont inscrites à la cote de la bourse des valeurs) ;

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Cependant, si une nouvelle nomination d’administrateurs est exclue tant que le nombre
d’administrateur n’a pas rejoint le maximum légal, il n'en demeure pas moins vrai que le
renouvellement du mandat, reste possible.

Par ailleurs, dans le cas d'une nouvelle fusion, cette interdiction de procéder à de
nouvelles nominations au conseil d'administration ne s’applique pas. Cette disposition a
pour but d'encourager les restructurations et en particulier les fusions successives.

Dans ce cas de figure, on déterminera le nouveau nombre maximum d'administrateurs en


se basant, au jour de la réalisation de la fusion, sur le nombre d’administrateurs en
fonction depuis plus de six mois dans les sociétés intéressées, avec application éventuelle
du plafond de vingt-quatre, vingt-sept ou trente administrateurs.

2. Par exception à la règle générale qui gouverne les autres administrateurs, il est prévu
par la loi que si le président est révoqué ou démissionnaire (en sa qualité de président)
alors que le conseil comprend plus de douze ou quinze membres, le conseil a la faculté de
coopter un nouvel administrateur en vue de le désigner comme président, s’il n’a pu en
désigner un parmi les administrateurs en fonction.

4. Effets à l’égard des créanciers

Un fois l’opération de fusion réalisée la situation financière de l’absorbante change : ses


actifs augmentent, mais son passif aussi, d’où l’inquiétude éventuelle de ses créanciers.
Ce souci est aussi ressenti par les créanciers de l’absorbée qui, de leur côté, assistent à la
dissolution de leur débiteur. Le droit assure la sauvegarde des uns et des autres, en posant
un principe (4.1) et en réglant son application (4.2).

4.1. Principe de la transmission universelle du patrimoine

La fusion opère transmission universelle du patrimoine de la société absorbée à la société


absorbante. Dès l’instant de la fusion, les créanciers de l’absorbée – clients, fournisseurs,
sous-traitant, Trésor public, caisse nationale de sécurité sociale, organisme de retraite et
de prévoyance sociale, … – ont un autre débiteur : la société absorbante. C’est
l’automatisme prévu par l’article 224 de la loi n° 17/95. Ce principe est également valable
à l’égard des débiteurs de la société absorbée, qui ont désormais affaire à un nouveau
créancier.

La transmission universelle du patrimoine opère comme une véritable dévolution de


patrimoine. Elle est automatique et n’implique pas l’information individuelle des
créanciers (ou des débiteurs) puisque le projet de fusion a été publié et que toutes les

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formalités relatives à cette opération ont été régulièrement accomplies dans les délais
légaux.

La transmission du patrimoine ne se réduit pas à une addition de cessions de créances et


de dettes et les formalités applicables aux dites cessions, lorsqu’elles sont effectuées
séparément, ne sont pas applicables.

Y a-t-il également transmission de garanties ? En principe les garanties suivent le sort de


la dette et ne disparaissent pas du fait de la fusion, laquelle ne réalise pas une novation.

Ainsi, comme nous l’avons soulevé ci-dessus, les opérations de fusion ont pour
caractéristique la transmission des éléments d’actif et de passif composant le patrimoine
d’une société (société absorbée) au profit d’une ou plusieurs autres sociétés qui le
recueillent en tout ou partie.

Le traité de fusion détermine les modalités de prise en charge du passif et de l’actif de la


société absorbée par les sociétés absorbantes ou nouvelles.

4.1.1.Transmission de l’actif

Le fait que la fusion emporte de plein droit, transfert de l’intégralité de l’actif des sociétés
absorbantes ou créées pour la circonstance a une conséquence pratique considérable. Les
biens ou les droits composant cet actif sont transmis de plein droit et il n’y a pas lieu de
respecter les règles spécifiques (précisées dans le DOC) relatives à la cession des biens ou
droits. Ainsi les créances qui se trouveraient dans l’actif des sociétés absorbées se
transmettent de plein droit à la société absorbante ou aux sociétés nouvelles.

4.1.2. Transmission du passif

La transmission du passif propre des sociétés absorbées est une conséquence inéluctable
de la transmission universelle opérée par la fusion. Ainsi, la charge d’une obligation de
non concurrence, d’obligations souscrites vis-à-vis des organismes de prévoyance
sociale….., seront transmis de plein droit de la société absorbée à la société absorbante.

4.2. Application du principe

4.2.1. Pour les créanciers non obligataires

La société absorbante est débitrice des créanciers non obligataires de la société absorbée
aux lieu et place de celle-ci, sans que cette substitution emporte novation à leur égard ce
qui signifie en principe que la créance est reprise sans aucune modification concernant
notamment ses garanties, ses modalités de remboursement, le taux d’intérêt convenu …..

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Rappelons seulement que la loi a instauré un droit d'opposition au profit des créanciers
des sociétés participant à une opération de fusion .

Le droit d’opposition ne peut s’exercer au profit d’un créancier non obligataire de l’une
des sociétés participant à l’opération de fusion que si:

i sa créance est antérieure à la publicité donnée au projet de fusion ;


i l’opposition est formée dans le délai de 30 jours à compter de la dernière
insertion au journal d’annonces légales ;
i l’opposition est portée devant le Tribunal du siège de la société débitrice.

L’opposition formée par un créancier n’a pas pour effet d’interdire la poursuite des
opérations.

Lorsqu’il estime l’opposition fondée, le Tribunal ordonne soit :

i le remboursement de la créance soit,


i la constitution de garanties au profit du créancier par la société absorbante
si elle en offre et si elles sont jugées suffisantes.

A défaut de remboursement par la société ou de constitutions par celle-ci des garanties


ordonnées, la fusion est inopposable au créancier opposant.

4.2.2. Pour les créanciers obligataires

Le mécanisme est plus compliqué, car les solutions varient en fonction de la nature des
obligations et du rôle de – absorbée ou absorbante – de la société qui a émis les
obligations.

On retiendra que les obligataires de la société de la société absorbée connaissent du projet


de fusion, à moins que la société émettrice ne leur offre le remboursement des titres sur
simple demande de leur part. si la voie de la consultation est préférée à celle du
remboursement, le risque existe d’un refus du projet de fusion par les obligataires ; si tel
est le cas, la société peut passer outre, mais le représentant des obligataires a alors la
possibilité de faire opposition au projet ; le conflit est tranché par le tribunal de commerce
qui, appréciant le danger que représente la fusion pour les obligataires, rejette l’opposition
ou exige la constitution de garanties ou encore impose le remboursement des obligations.

Les obligataires de la société absorbante ne sont pas consultés, mais leur assemblée
générale peut donner mandat aux représentants de la masse de former opposition à la
fusion, opposition qui obéit au régime qui vient d’être décrit.

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a) Cas des obligations de la société absorbée

La société absorbée qui a émis un emprunt obligataire peut décider de :

• soumettre le projet de fusion à l’assemblée générale des obligataires ;


• ne pas consulter les obligataires mais leur proposer de les rembourser (article 236).

ë Consultation des obligataires :

Deux cas doivent être distingués selon le vote des obligataires :

1. Les obligataires approuvent la fusion : ils deviennent alors créanciers obligataires de


la société absorbante ou nouvelle.

2. Les obligataires rejettent le projet ou si l’assemblée des obligataires de la société


absorbée n’a pas délibéré valablement faute de quorum requis, le conseil d’administration
ou le directoire peut passer outre (article 241).

Cependant une procédure est alors applicable : la décision du conseil d’administration ou


du directoire de passer outre au refus des obligataires est publiée dans le journal
d’annonces légales dans lequel a été inséré l’avis de convocation de l’assemblée ou au
Bulletin Officiel si la société fait publiquement appel à l’épargne.

L’assemblée des obligataires peut donner mandat aux représentants de la masse de former
opposition à l’opération dans les conditions précédemment évoquées.

ë Non consultation des obligataires

Lorsque la société débitrice s’est abstenue de consulter l’assemblée générale des


obligataires, elle doit offrir à ces derniers le remboursement de leurs titres sur simple
demande de leur part (article 236).

L’offre de remboursement doit être publiée au Bulletin Officiel et à deux reprises dans
deux journaux d’annonces légales du lieu du siège social. Le délai entre les deux
insertions est de 10 jours au moins (soit cinq insertions obligatoires).

En outre, les titulaires d’obligations nominatives sont informés de l’offre (de


remboursement) par lettre recommandée.

Si toutes les obligations sont nominatives, la publicité prévue ci-dessus est facultative
(article 236 alinéa 3).

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En cas de fusion, les obligataires disposent d’un délai de trois mois à compter de la
dernière formalité de publicité ou de l’envoi de la lettre prévue ci-dessus pour demander
le remboursement de leurs titres. Tout obligataire qui n’a pas demandé son
remboursement dans le délai ci-dessus prévu conserve sa qualité dans la société
absorbante aux conditions fixées par le contrat de fusion (article 236 alinéa 5).

b) Obligataires de la société absorbante

Il n’est pas obligatoire de soumettre le projet de fusion aux assemblées d’obligataires de


la société absorbante (article 238).

Toutefois, l’assemblée générale ordinaire des obligataires peut donner mandat aux
représentants de la masse de former opposition à la fusion ou à la scission, dans les
conditions et sous les effets prévus à l’article 239 précité.

4.2.3. Pour les bailleurs

Pour les bailleurs de la société absorbante, rien ne change puisque l’absorbante ne


disparaissant pas, c’est toujours le même locataire qui occupe les locaux. Quant au
bailleur de la société absorbée, il ne peut que constater la transmission du bail au bénéfice
de l’absorbante; il a seulement la faculté de demander au tribunal des garanties
supplémentaires. Il est recommandé toutefois de signifier la fusion au bailleur (cf. modèle
de courrier en annexe)

4.2.4. L’application aux parties à des contrats conclus intuitu personae

Qu’advient-il des contrats conclu en considération de la personne ? Citons par exemple


les contrats d’exploitation de logiciel ou les contrats de distribution sélective. La loi
relative aux sociétés anonymes est muette à ce propos. Il faut donc se reporter aux
dispositions du droit commun des contrats. Ainsi, l’article 195 du Dahir des obligations et
des contrats dispose que « le cessionnaire n’est saisi à l’égard du débiteur et des tiers que
par la signification du transport faite au débiteur, ou par l’acceptation du transport faite
par ce dernier dans un acte ayant date certaine. » en conséquence la loi prévoit que la
société absorbante ne peut se substituer au lieu et place de la société en sa qualité de
créancière que si le débiteur reçoit une signification du transport de la créance (i.e. lettre
recommandée avec accusé de réception).

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4.2.5. Pour les salariés

Individuellement, et comme en cas de transformation, les salariés ne sont pas affectés par
la fusion ; l’article…. .du DOC prévoit le maintient des contrats de travail et donc le
maintien de l’ancienneté acquise au service de l’absorbée. Cela n’interdit pas à la société
absorbante de procéder ultérieurement aux compressions d’effectif jugées nécessaires du
fait de la fusion. Elle supporte alors la charge des indemnités à allouer aux salariés.

S’agissant des délégués du personnel, de la société absorbée, leur mandat cesse au jour de
la fusion. Cependant, les effectifs de l’absorbante augmentant du fait de la fusion, il y
aura lieu de désigner des représentant supplémentaires, d’où la nécessité de tenir de
nouvelles élections et la faculté pour certains des représentants du personnel de
l’absorbée, à l’image des dirigeants d’être réélu.

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Tableau chronologique des opérations de fusions

Date Durée Texte de


(au plus min. Evénement
référence
tard) (jours)
J- 52 Variable Pourparlers, puis signature du protocole de fusion Non applicable
par le président du conseil d’administration ou du
directoire
J-50 Variable Arrêté des termes et rédaction du projet de fusion Articles 227
par le conseil d’administration alinéa 1 et 226
alinéa 1.
J- 48 Variable Signature du projet de fusion par le président après Non applicable
autorisation du conseil d’administration de chaque
société

J- 46 45 Communication du projet de fusion aux 233 alinéa 1


commissaires aux comptes de chaque société par le
conseil d’administration
J-46 Communication du projet de fusion au Conseil
Déontologique des valeurs mobilières
J- 32 Variable Etablissement d’un rapport écrit afférent au projet Article 232
de fusion alinéa 1
• Par le conseil d’administration de chaque
société Article 233
• Par les commissaires aux comptes de chaque alinéas 3 et 5
société
J-30 30 Dépôt du projet de fusion au greffe de Casablanca Article 226
et Rabat alinéa 2
J- 31 30 Insertion d’un avis relatif au projet de fusion dans Article 226
un journal d’annonces légales et au Bulletin alinéa 2
officiel
30 Ouverture du délai d’opposition des créanciers au 239 alinéa 2, 238
projet de fusion ( 30 jours à compter de la dernière alinéa 2, 240
insertion de l’avis mentionné ci dessus alinéa 3
30 Mise à disposition des actionnaires par le conseil Article 234
d’administration de chaque société, au siège social alinéa 1
des documents suivants :
• Projet de fusion
• Rapport du conseil d’administration ou du
directoire
• Rapport des commissaires aux comptes
• Etats de synthèse approuvés et rapports de
gestion des trois derniers exercices

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• Le cas échéant, état comptable arrêté à une date
antérieure de moins trois mois à la date du
projet de fusion
J- 16 15 Insertion dans un journal d’annonces légales et au Articles 122 et
Bulletin officiel de l’avis de convocation de l’AGE 123
à l’effet de se prononcer sur le projet de fusion.
J 0 Réunion de l’AGE et approbation du projet de Articles 231
fusion (dans la société bénéficiaire des apports, alinéa 1 et 235.
approbation des apports et des avantages
particuliers.
J+ 31 30 Dépôt du PV de l’AGE, contenant la décision Articles 14 et 37
d’approbation du projet de fusion aux greffes de
Rabat et Casablanca
30 Insertion dans un journal d’annonces légales et au Article 37
Bulletin officiel d’un avis mentionnant :
• La dissolution de la société absorbée
• L’augmentation de capital de la société
bénéficiaire des apports.
Demande d’inscription modificative au registre du
commerce se traduisant par :
• Radiation de la société absorbée
• Modification des statuts de la société
bénéficiaire des apports

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