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CHAPITRE 4 : FUSIONS ET ACQUISITIONS, ALLIANCES ET

PARTENARIATS, DES FMN


Introduction
En ce début de 21e siècle, l’actualité du développement des firmes multinationales, au-delà
des stratégies classiques d’internationalisation, fait constater une récurrence de nouveaux
modes de développements stratégiques. En effet, les médias spécialisés relaient fréquemment
les opérations de fusions, acquisitions, alliances et partenariats, à l’international. Ces
stratégies participent principalement de la poursuite de trois modes d’expansion à savoir, la
croissance interne, la croissance externe, et la collaboration, mais peuvent aussi concerner
d’autres orientations productives et commerciales, telles que la consolidation d’une position
concurrentielle ou la constitution d’un avantage spécifique. Eu égard à l’importance de ces
processus dans les choix stratégiques des FMN, le présent chapitre se donne donc pour
objectifs, de présenter ces différentes modalités « modernes » de développement stratégiques
des FMN, tant en ce qui concerne leur description que leur source de réussite, d’une part,
avant de proposer des modèles de choix de stratégies optimales d’autre part.

SECTION 1 : LES MODALITES DE DEVELOPPEMENT STRATEGIQUE DES FMN

En fonction de sa vision d’expansion, la FMN choisit des modalités de développement


stratégiques qui se rapportent à des méthodes permettant de conduire une orientation
stratégique. Trois modalités sont généralement expérimentées par les FMN telles, que
schématisée ci-dessous.

1
1.1 LA CROISSANCE INTERNE DES FMN

La croissance interne – ou croissance organique – consiste à développer des stratégies à


partir des propres capacités de l’organisation. Elle permet d'exploiter un domaine connu et
une expérience déjà acquise1. Elle maintient l'identité de l'entreprise et préserve son
indépendance. Pour beaucoup d’organisations, la croissance interne constitue la principale
modalité de développement stratégique. Ce choix peut s’expliquer par quatre raisons :

● L’apprentissage. Conduire une nouvelle stratégie au moyen des capacités internes d’une
organisation permet d’accroître les savoirs-faire et les connaissances. L’implication directe
dans un nouveau marché ou une nouvelle technologie facilite bien mieux l’acquisition et
l’internalisation des connaissances que ne le ferait par exemple une alliance.

● L’étalement de l’investissement. L’acquisition d’une entreprise nécessite un investissement


immédiat. À l’inverse, la croissance interne permet d’étaler les coûts sur la totalité de la durée
du développement stratégique. Cet étalement de la dépense permet éventuellement de
renoncer à une stratégie ou de l’infléchir si jamais le contexte évolue.

● Pas de contrainte de disponibilité. La croissance externe postule la disponibilité d’une cible


potentielle avec laquelle il est possible de se rapprocher, ce qui est parfois problématique. Il
existe ainsi très peu d’opportunités d’acquisitions pour les entreprises étrangères souhaitant
s’implanter au Japon. La croissance interne permet d’éviter cette contrainte.

● L’indépendance stratégique. L’indépendance permise par la croissance interne signifie que


l’organisation n’est pas soumise aux mêmes compromis que ceux qui seraient rendus
nécessaires par la conclusion d’une alliance ou d’un partenariat : l’alliance avec un concurrent
étranger implique ainsi généralement des clauses de non-intervention sur son marché
domestique.

Certaines organisations développent une véritable culture d’intrapreneuriat, parfois appelé


également entrepreneuriat interne. L’intrapreneuriat consiste pour une organisation à
permettre à ses membres de développer de nouvelles activités en interne, comme ils

1
Pour le développement de sa liseuse électronique Kindle, Amazon s’est ainsi principalement appuyé sur ses
ressources et compétences internes, notamment sur sa filiale Lab126 et sur son expertise dans la vente de
livres sur Internet. Pour Amazon, cette modalité de diversification a été préférable à un partenariat avec un
fabricant d’électronique grand public tel que Sony ou au rachat d’un constructeur spécialisé tel que l’entreprise
française Bookeen.

2
pourraient le faire en tant qu’entrepreneurs en externe. Cela peut déboucher sur des
innovations radicales, tout en utilisant principalement les propres capacités de l’organisation.
C’est notamment ce qui a permis le développement de plusieurs services de Google

Cependant, une organisation ne peut pas toujours s’appuyer sur ses capacités existantes pour
conduire des évolutions radicales en termes d’innovation, de diversification et
d’internationalisation. Par ailleurs plusieurs, cette modalité fait observer inconvénients
importants tels que la difficulté d'atteindre la taille critique et la longueur des délais
d'apprentissage. Ainsi, les organisations doivent parfois mobiliser des ressources et
compétences externes pour déployer leurs stratégies.

1.2 LES FUSIONS ET LES ACQUISITIONS


Une acquisition correspond au rachat d’une organisation par une autre organisation. Dans le
cadre des FMN, cette opération peut avoir lieu entre deux entreprises de nationalité
différentes, entre deux FMN concurrentes ou non, ou encore entre une FMN et la filiale d’une
autre. La fusion quant à elle, consiste en la décision mutuellement consentie par des
organisations de partager leur possession. D’après Rouet (2000) La fusion consiste au fait que
deux ou plusieurs sociétés se dissolvent pour former une nouvelle société qui reprend la
totalité de leurs patrimoines (Rouet, 2000).

Les fusions et acquisitions impliquent généralement des capitaux important et d’âpres luttes
de pouvoir. Elles peuvent constituer des moyens rapides de conduire certaines orientations
stratégiques. Toutefois, l’actualité récente montre que ces modalités peuvent conduire à des
échecs spectaculaires2, d’où la nécessité d’en avoir bonne compréhension.

1.2.1. Les types de fusions et acquisitions

1.2.1.1. Les fusions

Plusieurs types de fusions et d’acquisitions peuvent être mises en œuvre par les FMN. En ce
qui concerne les fusions, l’on peut distinguer les fusions-absorption de la fusion par création
d’une nouvelle entreprise.

Dans le cas d’une fusion absorption, une société absorbante Y reçoit les actifs d'une société
absorbée X qui disparaît. Les actionnaires des sociétés absorbées reçoivent des actions de la

2
L’acquisition par la Royal Bank of Scotland de son concurrent néerlandais ABN AMRO a ainsi entraîné un
désastre commercial et financier qui s’est traduit par la nationalisation de la banque par le gouvernement
britannique en 2009.

3
société absorbante. Dans le cas d’une fusion par création d’une entreprise nouvelle, une
nouvelle entité est créée suite à la disparition des deux sociétés initiales (sociétés X et Y).
Dans le cadre de la fusion, les actifs et les passifs de X et Y sont transférés à la société
nouvellement créée.

1.2.1.2. Les acquisitions

Selon Rousseau (1990), l'acquisition suppose la volonté d’une entreprise de s'assurer le


droit d'exercer un contrôle sur une autre entreprise, qu'il s'agisse, par l’acquisition totale ou
partielle du capital de cette dernière. C'est donc une opération de contrôle d'une société cible
par l'achat ou l'échange d'actions.

Plusieurs typologies peuvent être évoquées quant à la distinction des acquisitions. Du


point de vue de la stratégie d’expansion des firmes, l’on peut distinguer l'acquisition pour
fins de croissance verticale, l'acquisition pour fins de croissance horizontale et les
acquisitions conglomérales.

L’acquisition pour croissance verticale consiste à acquérir des entreprises situées à


des stades différents de la production afin d'augmenter son pouvoir de marché. De manière
classique ces acquisitions visent à contrôler l'accès aux matières premières (en amont) et/ou
aux circuits de distribution (en aval). En amont, l'entreprise acquéreuse a comme cibles divers
fournisseurs. C'est le cas de GDF qui a intégré progressivement la chaîne gazière en rachetant
des sociétés d'exploitation et de production de gaz comme TCIN. En aval, l'entreprise
acquéreuse intègre des distributeurs et des canaux de distribution. C'est l'option prise par le
groupe Walt Disney qui a racheté la chaîne de télévision ABC afin d'augmenter la diffusion
des émissions Disney sur ABC. Cette stratégie tend généralement à accroître l’avantage ou la
position d’une entreprise sur le marché, mais aussi à exclure les concurrents ainsi qu’à
dissuader ainsi les potentiels entrants.

L’acquisition à des fins de croissance horizontale, consiste pour une entreprise à


acquérir un concurrent qui offre les mêmes produits ou services donc un concurrent direct qui
se situe souvent sur le même marché géographique de l'entreprise acquéreuse. L'objectif est
d'augmenter ou contrôler la part de marché, réaliser des économies d'échelle, ou déployer une
stratégie de niche (spécialisation ou autre). Par exemple, les fusions Peugeot-Citroën ou
encore Daimler-Chrysler. Les acquisitions et fusions visant une croissance horizontale
constitue la modalité de prises de contrôle la plus répandue dans le monde (Meier et Schier,
2003). Cependant, ce type d'acquisitions est soumis à de multiples exigences réglementaires.

4
Les gouvernements et les organismes de contrôle exigent le respect de certaines nonnes pour
éviter les monopoles et les pratiques non compétitives dont peuvent être victimes les petites
entreprises et les consommateurs.

Enfin, les acquisitions à des fins de croissance conglomérale ou encore de


diversification non -reliée ou de convergence lorsque les acquisitions concernent des
entreprises ayant des centres de gravité différents. Autrement dit, l'activité de l'entreprise
acquéreuse n'a aucun lien avec la ou les entreprises acquises dans le cadre du conglomérat.

Les acquisitions peuvent globalement être « amicales » ou « hostiles ». Dans le cadre


des acquisitions amicales, les deux parties s’entendent sur les termes du rachat, et la direction
de la cible recommande à ses actionnaires d’accepter l’offre. A contrario, dans le cadre des
acquisitions hostiles, l’acquéreur propose un prix aux actionnaires de l’entreprise cible contre
l’avis de ses dirigeants (offre publique d’achat)3.

Dans le cas des firmes cotées en bourse, les fusions et les acquisitions peuvent s’opérer
par ramassage en bourse, c’est-à-dire par achat des titres de propriétés (actions) sur les
marchés financiers. Il est également possible de procéder à une acquisition par achat de bloc
d’actions de gré à gré, entre l’acquéreur et la cible. L’acquéreur peut enfin émettre une offre
publique sur la cible, consistant à proposer aux actionnaires de la cible de racheter leurs
actions, sans limite de quantité, à un prix fixé et pendant une période donnée. Cette offre peut
être amicale ou hostile. Lorsque l’offre prévoit un paiement des titres en numéraire (en euros,
en dollars…) ; on parle d’offre publique d’achat (OPA). Le paiement peut aussi être réalisé
en actions de l’acquéreur (en « papier »), et l’acquisition donnera lieu dans ce cas à une offre
publique d’échange (OPE). Il est également possible que l’acquéreur décide de laisser le
choix aux actionnaires de la cible entre numéraire et actions, dans le cadre d’une offre mixte.

1.2.2. Les motivations des fusions et des acquisitions

Trois grands types de motivations sont généralement évoquées pour justifier les fusions et
acquisitions. Il s’agit des motivations stratégiques, des motivations financières et les
motivations managériales.

En ce qui concerne les motivations stratégiques, elles se rapportent globalement à


l’amélioration de la situation de la firme sur le marché. De manière spécifique, les
motivations stratégiques peuvent se traduire par :
3
Le choix des actionnaires est alors décisif. La direction de Cadbury a ainsi initialement rejeté l’offre hostile de
Kraft en cherchant un acheteur plus amical, Hershey.

5
- L’extension : les fusions et acquisitions peuvent être utilisées pour étendre le périmètre
d’une organisation en termes de géographie, d’offres ou de marchés . Elles permettent
notamment une internationalisation très rapide4.
- La consolidation : Les fusions et acquisitions peuvent être utilisées pour consolider la
position d’une organisation au sein de son industrie. En effet, rassembler deux concurrents
peut ainsi avoir des effets bénéfiques en terme de pouvoir de négociation, notamment sur
la fixation des prix5, et d’efficience productive6.
- Les capacités. Les fusions et acquisitions permettent d’accroître les capacités d’une
organisation. Ainsi, plutôt que de concevoir des nouvelles technologies en interne,
certaines entreprises de technologie telle que CISCO préfèrent souvent racheter les
entreprises qui les ont déjà élaborées afin de les incorporer dans leur propre portefeuille de
ressources et compétences. Il peut aussi s’agir d’accroître ses capacités suivant une
logique de convergence industrielle, à l’exemple de l’opérateur téléphonique AT&T qui
a racheté le constructeur informatique NCR.

Pour ce qui est des motivations financières aux fusions et acquisitions, elles convergent
globalement vers une volonté d’optimisation de l’utilisation des ressources financières. Trois
principaux motifs se dégagent dans ce cadre.

- L’efficience financière. Il est souvent efficient de rassembler une entreprise détenant des
excédents de trésorerie et une entreprise fortement endettée. La seconde pourra ainsi
réduire ses frais financiers et lever plus facilement des fonds, alors que la première pourra
généralement réaliser la fusion ou l’acquisition à bon compte.
- L’optimisation fiscale. Il existe parfois des avantages fiscaux à rassembler deux
entreprises. Si l’une d’elles est implantée dans un pays où la fiscalité est réduite, l’autre
aura intérêt à lui transférer ses bénéfices. Une entreprise très profitable peut aussi chercher

4
A l’image du rachat du constructeur automobile Volvo par le Chinois Geely en 2010.
5
Accroître le pouvoir de négociation en réduisant la concurrence, ce qui peut permettre à
l’entreprise résultant de la fusion d’augmenter ses prix
6
la consolidation de deux concurrents peut se traduire par une meilleure efficience, grâce à la
réduction de capacités devenues excédentaires ou au partage de certaines ressources, par
exemple les frais de fonctionnement du siège ou les réseaux de distribution. le surcroît de
volume de production permet de bénéficier d’économies d’échelle et d’obtenir des coûts
d’approvisionnement plus faibles.
6
à racheter une autre entreprise qui a accumulé des pertes, afin de réduire son niveau de
taxation. Bien entendu, ces pratiques sont encadrées par la loi.
- La vente par appartements. Certaines entreprises ont une valeur inférieure à celle des
actifs qu’elles détiennent. Une autre entreprise peut donc chercher à les racheter, afin de
revendre leurs différentes activités pour un prix total supérieur au coût d’achat initial.
Cette pratique – parfois surnommée « dépeçage » –apparaît souvent comme un symbole
de l’opportunisme financier, mais si les activités sont cédées à une entreprise qui saura
mieux les utiliser, cela peut se traduire par un gain économique réel.

Enfin, les motivations managériales des fusions et acquisitions sont globalement celle qui à
assoir une position plus avantageuse au management de la firme, notamment dans ces
rapports avec l’actionnariat. Il peut ainsi s’agir d’ambition personnelle (rémunération,
médiatisation, consolidation d’un réseau de fidèle).

1.3. LES ALLIANCES ET LES PARTENARIATS

La collaboration entre deux organisations peut prendre deux formes : les alliances et les
partenariats. Les alliances et partenariats varient considérablement en termes de forme et de
complexité. Chacune des 500 plus grosses entreprises mondiales participe ainsi en moyenne à
60 alliances ou partenariats. Ces modalités de développement stratégique connaissent une
popularité croissante car les organisations ne sont pas toujours capables de faire face à la
complexité de l’environnement global à partir de leurs seules ressources et compétences
internes. Pour autant, environ la moitié des opérations d’alliances et de partenariats échouent.

L’approche collaborative, plutôt que de se limiter à l’avantage concurrentiel d’une seule


entreprise, incite à réfléchir en termes de succès collectif du réseau de partenaires ou d’alliés.
On parle ainsi de stratégie collective pour décrire comment le réseau d’alliances ou de
partenariats dont une organisation fait partie affronte d’autres réseaux équivalents.

1.3.1. La typologie des alliances et des partenariats.

7
De manière générale, il est possible de distinguer les types de collaborations selon leur
nature (alliances ou partenariats) et selon la forme qu’elles prennent (licences, franchises,
coentreprises, consortiums, etc.).

Suivant leur nature, la collaboration diffère selon que les organisations impliquées sont ou
non concurrentes. Dans le premier cas on parle d’alliance et dans le second de partenariat.

Une alliance est une collaboration entre deux organisations concurrentes. Des concurrents
peuvent être tentés de collaborer pour plusieurs raisons, qui mènent à identifier deux grands
types d’alliances : les alliances complémentaires (qui reposent sur la combinaison des chaînes
de valeur) et les alliances supplémentaires (qui reposent sur l’obtention d’une masse critique)

- Les alliances complémentaires correspondent à la situation dans laquelle deux


concurrents ou plus décident de collaborer afin de bénéficier de leurs ressources et
compétences respectives. L’alliance complémentaire consiste donc à échanger des pôles
d’excellence et à assurer un apprentissage commun en s’appuyant sur l’expertise de
chacun. Un cas particulier concerne des alliés qui ne sont pas présents sur les mêmes
zones géographiques d’origine et qui coopèrent afin de profiter de leurs implantations
réciproques7.
- Les alliances supplémentaires consistent à cumuler les forces de plusieurs firmes de
manière à atteindre une visibilité et une crédibilité permettant de renforcer les chances de
succès d’un projet. Elles concernent des organisations qui souhaitent additionner leurs
ressources et compétences afin de dépasser un seuil de rentabilité ou une taille critique 8.
Les alliances supplémentaires sont aussi utilisées pour imposer des normes industrielles,
notamment dans l’électronique grand public. Étant donné qu’un standard qui rassemble
plusieurs concurrents est plus à même de connaître le succès. 9
7
On peut citer notamment les multiples accords conclus entre les grandes compagnies aériennes (SkyTeam, One

World ou Star Alliance), qui mettent en commun leurs réseaux de correspondances et d’escales, en général

développés sur des zones géographiques distinctes.


8
On peut citer le consortium européen Airbus : chacun de ses membres serait capable de concevoir, produire et

commercialiser un avion sans recourir à une alliance, mais en participant au projet commun, il s’assure une

progression plus rapide le long de la courbe d’expérience, un pouvoir de négociation supérieur auprès des

fournisseurs, et des débouchés plus larges auprès des compagnies aériennes

9
On peut citer l’alliance entre Sony, Apple, Hitachi, LG, Sharp, TDK, Samsung, Mitsubishi,
Panasonic, Philips, Thomson et Sun pour imposer le DVD Blu-ray en 2005, face au standard
8
Une alliance – et a fortiori une alliance supplémentaire – doit recevoir l’aval des autorités de
la concurrence, faute de quoi elle risque d’être assimilée à une entente.

Les partenariats

Si une alliance est une collaboration entre concurrents, à l’inverse, un partenariat est une
collaboration entre des organisations qui ne sont pas concurrentes. Deux cas de figure peuvent
se présenter :

- Les partenariats d’impartition désignent les collaborations entre des organisations qui
entretiennent des relations de client/fournisseur. Le fournisseur s’assure ainsi un débouché
commercial et le client peut obtenir une offre adaptée à ses besoins. La participation de
certaines compagnies aériennes à la conception des avions de ligne relève des partenariats
d’impartition, à l’image de Singapore Airlines qui s’est associée à Airbus sur le projet de
l’A380. De même, le constructeur de microprocesseurs Intel finance les deux tiers des
campagnes publicitaires des fabricants de micro-ordinateurs qui utilisent son slogan «
Intel Inside ».
- Les partenariats symbiotiques sont des collaborations entre des organisations qui non
seulement ne sont pas concurrentes (c’est la définition d’un partenariat), mais en plus
n’entretiennent aucune relation de client/fournisseur. Si les causes de ces accords peuvent
être multiples, il s’agit généralement d’exploiter conjointement une clientèle ou une
ressource 10.

concurrent HD-DVD proposé – jusqu’à son abandon en février 2008 – par Toshiba,
Microsoft, Intel, Sanyo, NEC et Acer.

10
On peut évoquer le partenariat historique entre Disney, McDonald’s et Nestlé : les enfants
poussaient leurs parents à manger chez McDonald’s ou à acheter des produits Nestlé pour
retrouver les personnages des films Disney, ou réciproquement ils insistaient pour aller au
cinéma voir le film dont leur restaurant ou leurs céréales faisaient la promotion. Ce partenariat
a été rompu par Disney en 2006, le groupe ne souhaitant plus que son image soit associée à
celle de McDonald’s, accusé de contribuer à l’augmentation de l’obésité chez les enfants.

9
La forme de la collaboration

En ce qui concerne la différenciation suivant la forme, les processus de collaboration entre les
FMN peuvent relever d’organisation impliquant de prises de participations croisées telles que
les coentreprises et les consortiums, ou non, telle que les franchises et les accords de licence
ou de sous-traitance.

Les coentreprises – ou joint-ventures – correspondent à la situation dans laquelle les firmes


restent indépendantes mais possèdent une structure juridique commune créée pour exploiter
un marché.Cette solution a notamment été privilégiée dans les collaborations entre des
entreprises occidentales et leurs homologues chinoises. Les Occidentaux apportent des
technologies, de l’expertise managériale et des financements, alors que les Chinois fournissent
la main d’œuvre et l’accès aux marchés locaux.

Les consortiums impliquent généralement deux organisations ou plus dans une forme de
coentreprise focalisée sur un projet particulier. Cela inclut notamment les grands projets
d’ingénierie ou de génie civil comme Eurotunnel, Airbus ou Arianespace. Il est également
possible d’établir des consortiums entre des organisations du secteur public, par exemple dans
les infrastructures de transport (gestion partagée de certaines lignes du RER parisien entre la
RATP et la SNCF).

10
La franchise est un contrat par lequel une firme appelée « franchiseur » s’engage à fournir
à une seconde firme firme dite « franchisée », une marque, un savoir-faire et une assistance
permanente, en contrepartie d’une rémunération. Il s’agit donc d’un modèle de
développement en réseau où le franchisé souhaite exploiter le concept développé par le
franchiseur moyennant un prix11.

L’accord de licence supposent un contrat dans lequel le droit de fabriquer ou ditribuer un


produit breveté est accordé à une firme ou un individu en échange du versement d’une
commission. Dans le cas de la sous-traitance, une entreprise délègue un service ou une partie
d’un processus à un prestataire externe.

SECTION 2 : CONDUITE DES PROCESSUS DE CROISSANCE EXTERNE DES


FMN

Les processus de développement stratégique des FMN diffèrent selon qu’il s’agisse d’une
approche d’une approche capitalistique ou d’une approche collaborative.

2.1. Les étapes des processus de fusion et acquisition

Les processus capitalistiques, à savoir les fusions et les acquisitions, sont en majorité des
processus longs et supposent généralement trois (03) principales étapes : le choix de la cible,
l’évaluation de la cible, et l’intégration des entreprises.

2.1.1. Le choix de la cible

Cette étape consiste à sélectionner une entreprise compatible, avec laquelle il pourrait être
avantageux de fusionner, ou alors dont l’acquisition pourrait être bénéfique. Ce choix s’opère
suivant deux critères de compatibilité que sont la compatibilité stratégique et la compatibilité
organisationnelle.

La compatibilité stratégique est la faculté des entreprises mises en commun à se renforcer


mutuellement dans la poursuite de leur objet social. La question centrale ici est de savoir, dans
quelle mesure l’opération d’acquisition ou de fusion renforce-t-elle la stratégie des
organisations impliquées? La réponse à cette question est à fournir à la lumière des
motivations stratégiques que sont l’extension, la consolidation et la capacité.

11
L’exemple de franchise le plus connu est probablement celui de McDonald’s, dont 75 % des
restaurants sont en franchise.

11
La compatibilité organisationnelle est quant à elle un indicateur du niveau d’adéquation des
pratiques managériales des firmes dont les capitaux sont mis en commun. Il est ici question de
s’assurer que les pratiques de management, les cultures et les caractéristiques des salariés des
deux organisations sont-elles compatibles ? Les fusions et acquisitions internationales sont
particulièrement sensibles aux incompatibilités organisationnelles, du fait des différences
linguistiques et culturelles et de fortes divergences peuvent provoquer de considérables
problèmes d’intégration. C’est la raison pour laquelle certaines fusions se traduisent souvent
par relative indépendance entre les firmes en termes de management, afin de préserver les
spécificités culturelles et d’éviter les conflits12.

En règle générale, et particulièrement dans le cas des acquisitions, on observe que lorsque la
compatibilité organisationnelle est médiocre, l’acheteur tend à réduire la performance de la
cible, même si la compatibilité stratégique est bonne.

2.1.2. L’évaluation de la cible

Cette étape consiste à négocier au mieux la valeur de la cible. En effet, une offre trop faible
sera rejetée et entamera la crédibilité de l’entreprise ayant fait l’offre. Aussi, une offre trop
élevée est susceptible ne pas être rentabilisée. Les méthodes d’évaluation incluent des
techniques d’analyse financières telles que le délai de retour sur investissement,
l’actualisation des flux de trésorerie et l’analyse de la valeur actionnariale. Pour l’acquisition
de sociétés cotées en Bourse, l’un des indicateurs est le cours de l’action de l’entreprise cible.
Cependant, les acquéreurs paient généralement un prix supérieur au cours, offrant ainsi une
prime de contrôle, correspondant au montant additionnel dont l’acquéreur doit s’acquitter
pour obtenir le contrôle total13. Toutefois, les acquisitions à des cours trop élevés peuvent
conduire à la malédiction du vainqueur qui est une situation où pour l’emporter, l’acheteur
paie tellement que le coût de l’acquisition n’est jamais rentabilisé. Ces effets négatifs de prix
excessifs peuvent être accentués si l’acquéreur tente de compenser sa dépense en supprimant
certains investissements indispensables afin d’améliorer sa rentabilité à court terme,
entraînant ainsi un cercle vicieux de la surévaluation. Cette spirale tend à anéantir les actifs

12
Renaul
t-Nissan et Air France-KLM sont de bons exemples de ce type d’approche
13
Selon l’état des marchés financiers, cette prime peut représenter un surcoût d’au moins 30 % par rapport au
cours de Bourse. Lorsque la cible résiste à une première offre – ou lorsqu’une bataille boursière s’engage avec
un autre acquéreur –, les prix peuvent rapidement s’envoler bien au-delà de la véritable valeur économique de la
cible. En 2007, suite à la surenchère de son concurrent Garmin, le fabricant de terminaux GPS TomTom a ainsi
acheté son fournisseur de données cartographiques Tele Atlas un milliard d’euros de plus qu’il n’aurait dû, ce
qui a gravement entamé sa rentabilité.

12
qui constituaient l’intérêt stratégique de l’acquisition. Il est donc important pour l’acquéreur
de rester très lucide et discipliné.

2.1.3. L’intégration de la cible

Le succès d’une fusion ou d’une acquisition dépendra fortement de la réussite de l’intégration


entre les deux organisations. L’intégration est souvent problématique du fait d’une
insuffisante compatibilité organisationnelle et une mauvaise intégration peut faire échouer une
opération de fusion ou d’acquisition. Le choix du type d’intégration dépend de deux critères
essentiels: L’interdépendance stratégique qui se rapporte à une situation où les stratégies des
deux entreprises sont fortement dépendantes l’une de l’autre et qui suppose donc une
intégration forte. Le, qui s’observe dans le cas d’une cible qui a une culture spécifique qu’il
est préférable de préserver besoin d’autonomie organisationnelle ou qui est
géographiquement très distante. Dans cette configuration, le caractère très distinctif de la cible
est valorisé par l’acquéreur au lieu de risquer de détruire ce particularise par une intégration
trop maladroite.

Ces deux critères permettent d’identifier quatre types d’intégrations :

- L’absorption : préférable lorsque l’interdépendance stratégique est forte et que le besoin


d’autonomie organisationnelle est faible. L’absorption implique un alignement rapide des
stratégies de la cible avec celles de l’acquéreur et les changements correspondants dans sa
culture et ses systèmes.
- La préservation est appropriée lorsque l’interdépendance stratégique est limitée et que le
besoin d’autonomie organisationnelle est fort. La préservation permet aux stratégies
établies, aux cultures et aux systèmes de se maintenir, les changements étant confinés au
strict minimum, notamment les règles d’information financière nécessaires au contrôle des
activités.
- La symbiose est indiquée lorsque l’interdépendance stratégique est forte et que le besoin
d’autonomie organisationnelle est élevé, comme c’est notamment le cas dans des
entreprises de services qui dépendent de la compétence et de la créativité de leurs
membres. La symbiose implique que la cible et l’acquéreur apprennent l’un de l’autre et
partagent leurs qualités
- La holding est une situation dans laquelle l’interdépendance stratégique et le besoin
d’autonomie organisationnelle sont faibles. Le besoin d’intégration est donc très limité et

13
on peut supposer que la cible n’est détenue que temporairement, avant d’être revendue à
un autre acheteur. Dans cette situation, mieux vaut laisser la cible autonome.

2.2. Les étapes des processus collaboratifs

Par nature les processus de collaboration impliquent une démarche de négociation et de


consensus systématique entre les alliés ou les partenaires. Deux exigences sont à cet effet
indispensables. La coévolution qui impose de concevoir une alliance ou un partenariat non pas
comme un événement ponctuel mais comme un processus de long terme au sein duquel les
partenaires, les stratégies et les contextes changent au cours du temps. La confiance rciproque
entre les alliés et les partenaires, étant donné la nature évolutive des alliances et partenariats et
le contrôle limité entre les organisations. Ces deux exigences fondent cinq principales étapes
au processus collaboratif :

- L’approche qui est la phase où les managers mettent en évidences les intérêts communs
et la compatibilité possible des potentielles alliés et partenaires ;
- La négociation où les futurs alliés doivent négocier avec soin leurs rôles mutuels.
Lorsque la relation implique la création d’une entité commune – notamment une

14
coentreprise – l’apport de chacun doit être précisé. L’obtention d’un contrat clair et
équitable implique là encore que les managers investissent beaucoup de leur temps. Une
négociation trop précipitée peut entamer la confiance réciproque et le besoin de
coévolution implique que le contrat soit suffisamment flexible pour permettre des
aménagements.
- Le démarrage. L’étape suivante est le démarrage, qui nécessite souvent l’allocation
de considérables ressources humaines et matérielles. La confiance est capital à ce
stade. En premier lieu, le démarrage effectif de la relation constitue un test pour la
validité du contrat, ce qui peut impliquer de nombreux ajustements informels. En
second lieu, des individus n’ayant pas participé à la négociation doivent désormais
travailler ensemble, alors qu’ils ont souvent une compréhension
- La maintenance : du fait de la coévolution, la maintenance de collaboration consiste pour
chaque partenaire à gérer le processus de manière à s’adapter aux circonstances internes et
externes, sans toutefois devenir une menace pour les ressources de l’autre partenaire. En
effet, étant donné que les alliés travaillent en relation étroite, ils apprennent à maîtriser
leurs compétences respectives, ce qui peut créer une forme de compétition, celui qui
apprend le plus vite de l’autre devenant le plus puissant. Le partenaire ayant gagné cette
concurrence à la compétence est alors en position de renégocier les termes du contrat,
voire de rompre la collaboration.
- L’arrêt : toute collaboration finit toujours par s’arrêter. Cet arrêt peut se passer à l’amiable
et très souvent prévu par le contrat initial, notamment en cas d’atteinte des objectifs
communs par les partenaires. L’arrêt peut également survenir suivant une entente, lorsque
les partenaires veulent approfondir leur collaboration suivant un nouvel engagement
mutuel. L’arrêt peut également donner lieu à des rapports plus hostiles et des batailles
judiciaires.

SECTION 3 : LE CHOIX DE LA MODALITE DE DEVELOPPEMENT

La croissance interne, les fusions et acquisitions, ainsi que les alliances et partenariats
présentent toutes des avantages et des inconvénients. Cette section montre comment choisir
une modalité entre acheter, coopérer ou faire soi-même.

Les acquisitions et les alliances présentent un taux d’échec très élevé. Du fait de ces taux
d’échec très élevés, les acquisitions et les collaborations doivent être considérée avec

15
prudence par rapport à la croissance interne. Trois critères permettent de choisir la modalité la
plus adaptée selon les circonstances : l’urgence, l’incertitude, et la capacité.

- l’urgence : une acquisition permet de déployer rapidement une stratégie 14. La


collaboration permet aussi d’ajouter rapidement des ressources ou des compétences
nécessaires à une stratégie, mais elle nécessite généralement plus de temps qu’une
acquisition. La croissance interne est la modalité la plus lente : tout doit être développé à
partir de zéro.
- L’incertitude. Lorsque les marchés et les technologies sont particulièrement incertains,
une alliance ou un partenariat est préférable à une fusion ou à une acquisition, car elle
permet de ne pas subir seul les pertes en cas d’échec et donc d’en limiter son impact sur la
firme, mais aussi donne la possibilité de tester un marcher et d’envisager un engagement
plus fort en cas de succès. L’acquisition offre aussi la possibilité de revente des activités
dont l’intégration ont conduit à un échec, même si le prix sera généralement inférieur à la
somme qui a été déboursée pour les acquérir. À l’inverse, l’échec d’une activité
développée par croissance interne risque de se traduire par sa suppression pure et simple,
sans valeur de revente.
- La capacités. Ce critère peut se décomposer en deux sous-critères que sont le type de
capacités et l’autonomie des capacités. Pour ce qui est du type de capacité, le choix
d’une modalité dépend du caractère tangible ou intangible de la capacité (ressources ou
compétences). Lorsque la capacité recherchée est tangible, tels que des investissements
physiques, les acquisitions sont préférables, car plus aisément contrôlables une fois
l’acquisition réalisée. A l’inverse les acquisitions posent des problèmes lorsque la capacité
recherchée est intangible tels que les marques ou les talents, car leur valorisation est
incertaine. Les acquisitions, peuvent aussi poser des problèmes considérables en termes de
culture. Il est également possible que l’image de l’acquéreur ternisse celle de l’entreprise
qu’il a rachetée. Pour ce type de capacités, la croissance interne est préférable : la culture
de la nouvelle activité sera ainsi généralement cohérente avec celle de l’organisation.
Même les alliances et partenariats peuvent provoquer des chocs culturels qu’il sera
difficile de contrôler.

En ce qui concerne l’autonomie des capacités. Si les capacités convoitées sont fortement
autonomes – c’est-à-dire confinées à une partie spécifique de chacune des organisations –,

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Il aurait certainement fallu des décennies à Tata pour développer des marques équivalentes à
Jaguar et Land Rover (voir l’illustration 10.2)
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on peut privilégier une alliance ou un partenariat. Une coentreprise concernant
uniquement les ressources et compétences recherchées des deux organisations peut être
envisagée, le reste de leurs activités continuant à fonctionner indépendamment. Il serait
coûteux et risqué de racheter la totalité d’une organisation pour obtenir seulement
quelques compétences spécifiques. Dans le cadre d’une croissance interne, les nouvelles
ressources et compétences peuvent être développées sous la forme d’un isolat, de manière
à ne pas impliquer la totalité de l’organisation, avec ses procédures, ses budgets et sa
culture.

Bien entendu, le choix entre les trois modalités de fusion et acquisition, alliance et partenariat
ou croissance interne n’est pas libre de contraintes. Bien souvent, il n’existe pas de cible
pertinente pour un rachat ou de partenaire disponible pour une coopération. Le schéma ci-
dessous permet cependant d’insister sur le fait que les modalités de développement doivent
être systématiquement évaluées afin de limiter la subjectivité du choix.

Tableau : acheter , collaborer ou faire soi-même

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