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COMMENTAIRE D’UN EXTRAIT DE MEDEE

Linda HONSOVA, 2nd14

Médée (1635) est une tragédie en cinq actes de Pierre Corneille dans laquelle il
raconte le parcours d’une magicienne Médée et son histoire d’amour entre Jason et Médée
avec une fin tragique provoquée par la colère et la jalousie de Médée. L’extrait à étudier est
la 6ème scène de l’acte V et décrit le dénouement de la pièce dans lequel Médée apparait au
balcon et se confronte avec Jason avant de s’enfuir. On peut donc se demander par quels
moyens l’auteur rend le dénouement de Médée tragique à travers ce passage. Dans un
premier plan, nous étudierons la confrontation de Médée et Jason et dans un deuxième plan,
nous analyserons des éléments tragiques présents dans la scène.

L’extrait propose une confrontation de Médée et Jason. Tout d’abord, l’auteur nous
donne l’image d’une discussion entre Médée et Jason. On voit deux éléments clés se
répétant au cours de toute la scène : l’utilisation des questions rhétoriques (« Lâche, ton
désespoir encore en délibère ? », « Pense encore échapper à mon bras irrité ? », « que peut
contre moi ta débile vaillance ? », « que sert de t’emporter à ces vaines furies ? »).
L’utilisation des questions rhétoriques sert dans ce cas à mettre l’accent sur la violence entre
Médée et Jason. Les questions rhétoriques en général font réfléchir l’auditeur, dans le cas de
deux partenaires en dispute, l’un fait réfléchir l’autre sur ce qu’il a fait et le fait se sentir
coupable. Le deuxième élément clé est l’utilisation de l’impératif (« Lâche », « lève les
yeux », « reconnais », « réjouis-t’en », « va posséder », « va cajoler », « va lui conter », « ne
combats point », « épargne », « vois », « suis-moi », « trouve », « souviens-toi », « songe »).
L’impératif assiste à souligner la violence entre Médée et Jason. Assez fréquente est
également l’utilisation des apostrophes : Médée qualifie ironiquement Jason « bienheureux
amant », « heureux père et mari » et « cher époux » pour souligner son amertume et le fait
que c’est elle qui s’est fait tromper alors que Jason continue sa vie heureuse. Au contraire,
elle le qualifie de « perfide » et « parjure ». Les insultes accentuent la haine de Médée
envers Jason. Jason qualifie Médée de « horreur de la nature » et « exécrable tigresse » pour
mettre l’accent sur sa cruauté.
L’extrait nous propose également l’image de la dominance de Médée. L’auteur
appuie sur la supériorité de Médée à l’aide de sa position sur la scène. Dans la première
partie de la scène, elle se trouve en haut sur un balcon et dans la deuxième partie, elle est en
l’air dans un char tiré par deux dragons. Dans les deux parties, elle se trouve plus haut que
Jason ce qui correspond à sa dominance. Sa supériorité est également soulignée par de
nombreux impératifs utilisés dans les répliques de Médée (« lâche », « lève les yeux », va
posséder », « réjouis-t’en » etc.). Ensuite, Médée se compare à Jason à l’aide de l’utilisation
des pronoms possessifs (« mon » pour Médée, « ton » pour Jason) qui s’opposent : « mon
art » x « ta force », « mon secours » x « tes exploits guerriers », « moi » x « ta débile
vaillance ». Cette réplique s’achève par une périphrase : « ce qu’ils ont de lauriers » ce qui
correspond aux victoires de Jason. A l’aide de l’utilisation des pronoms possessifs, Médée
prétend avoir tout le mérite dans les victoires et les succès de Jason. Elle dit que sans elle,
sans sa magie et sans son aide, il n’aurait jamais pu atteindre le succès, et que c’est elle qui
lui assurait toutes ses victoires. Médée méprise Jason et ses capacités également à l’aide
d’une hyperbole : « ta débile vaillance ». Une autre comparaison de Médée et Jason est
relevée à l’aide d’une antithèse : « heureux père et mari, ma fuite et leur tombeau ». Jason
est contrairement à Médée parent et mari ce dont Médée rêve et elle considère la situation
de Jason comme le bonheur. Le bonheur de Jason s’oppose au malheur de Médée (son
obligation de fuir et la mort de ses enfants causée par l’amour envers Jason qui a prédominé
l’amour maternelle).

Dans cet extrait, de nombreux éléments tragiques sont présents. Le premier élément
est la violence qui est accentuée par le champ lexical de la brutalité : « poignard »,
« chasser », « noyer », « sang », « tombeau », « brutalité », « peine », « cruautés »,
« souffrir », « bourreaux », « barbaries », « guerrier », « supplice ». Les répétitions « va lui,
va lui » et « sus, sus » assistent à graduer la violence présente dans la scène. Un autre moyen
par lequel l’auteur fait ressortir la violence est la gradation sous la forme du parallélisme :
« brisons la porte, enfonçons la maison ». Les verbes utilisés dans ce passage font partie du
champ lexical de la violence et de la brutalité. Un autre élément important par lequel
l’auteur insiste sur la brutalité de la scène est l’impératif qui crée l’atmosphère de la
confrontation de Médée et Jason : « Lâche », « lève les yeux », « reconnais », « va
posséder », « épargne », « suis-moi », « souviens-toi » etc.
Le deuxième élément tragique présent dans cette scène est la mort. Cet élément dans
cet extrait est représenté par de plusieurs métonymies : les expressions « ce poignard » et
« bras irrité » désignent Médée qui, par l’amour pour Jason, a tué ses propres enfants. La
métonymie « ta tête » représente la mort de Médée que Jason lui prédit et la personnification
de ce mot est créée à l’aide du verbe « répondra ». L’utilisation du verbe répondre
correspond au fait que la mort de Médée sera la punition pour ce que Jason qualifie de
« barbaries » (le meurtre de ses propres enfants et de Creuse). La mort est dans la pièce
représentée également par un euphémisme : « chasser leurs âmes » - Médée parle du
meurtre de ses enfants. On souligne le thème de la mort à l’aide d’une antithèse : le verbe
« noyer » et opposé au nom « flammes ». Les deux mots sont liés à la mort et ont un rapport
avec le destin tragique des victimes de Médée jalouse et vindicative.

On a donc vu par quels moyens l’auteur rend le dénouement de Médée tragique à


travers ce passage. L’extrait propose un dialogue entre Médée et Jason qui ressemble plutôt
à une dispute. Dans les répliques sont présents deux éléments tragiques importants : la
violence liée à la haine graduante qu’ils ressentent l’un envers l’autre et à l’amertume de
Médée trompée par son mari Jason ; et la mort liée au destin des personnages de la pièce
(Médée, Jason et les victimes de la vengeance de Médée). La même problématique est
traitée dans le 9ème chapitre de la 2ème partie du roman Bel-ami écrit en 1885 par Guy de
Maupassant. Les deux œuvres décrivent un amour impossible et non-réciproque qui
surpasse l’amour maternelle. Cet amour devient une obsession et une femme amoureuse
trompée par son amant tue ses enfants pour se venger. La vengeance de la femme mène au
destin tragique d’elle-même.

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