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Exploration des protéines plasmatiques

Les protéines représentent la plus grande partie des matières solides du plasma. En dehors du fibrinogène, ce
sont toutes des protéines globulaires.
Leurs propriétés sont très variables : transporteurs, anticorps, enzymes, agents de pression oncotique…

Sauf exception, toutes les protéines sériques sont synthétisées par le foie (Exception = immunoglobulines)

Lors du dosage des protéines plasmatiques, il faut prendre soin de différencier les protéines toujours présentes
dans le plasma et celles d’origine cellulaire qui n’y apparaissent que transitoirement.

I. PRINCIPALES PROTÉINES PLASMATIQUES


1.1 Sérumalbumine
 Principale protéine plasmatique 55 à 60 % en concentration massique.
40 à 50 g/L
0.5 à 0.7 mol / L

 Structure C’est la seule holoprotéine du plasma


PM = 69 kDa, soit à peu près à la taille minimale des substances non filtrés.
564 acides aminés organisés en 1 seule chaîne peptidique.

 Rôles
1/ Composante majeure de la pression oncotique

2/ Transporteur non spécifique :


-Bilirubine
-Acides gras
-Hormones thyroïdiennes
-Médicaments
-…

 Variations pathologiques
1/ Hyperalbuminémie :
Elle n’est rencontrée que dans les syndromes transitoires d’hémoconcentration (déshydratation par
pertes d’eau). Elle est donc détectable par mesure de l’hématocrite.

2/ Hypoalbuninémie :
Elle est provoquée par des défauts de synthèse ou par des déperditions d’origine diverse.
- Défaut de synthèse :
Carence nutritionnelles : Régime mal contrôlé, Kwashiorkor, Malabsorption
Atteintes hépatiques graves : Cirrhose, ictères graves…
Synthèses anormalement élevées d’autres protéines : Phénomène de compétition
Syndromes inflammatoires

- Déperdition (cause la plus fréquente en Europe)


Pertes rénales : Syndrome néphrotique
Pertes digestives : Infections bactériennes
Pertes cutanées : Brûlures

1.2 Glycoprotéines
1.2.1. Protéines de transport : La transferrine
 Caractéristiques Faible MM
Taux normal = 1.5 à 3 g / L
Transporte le fer sérique

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 Variations pathologiques
1/ Transferrinémie basse :
- syndrome néphrotique à relier à faible MM
- intoxication éthylique chronique
2/ Transferrinémie haute :
carence en fer

Remarque : il existe d’autres protéines de transport mais qui ne sont généralement pas dosées dans l’exploration
classique des protéines plasmatiques. (exemple de la céruléoplasmine et de la transcortine)

1.2.2. Antiprotéases
On classe dans ce groupe une famille de protéines ayant des propriétés inhibitrices vis-à-vis des protéases
circulant dans le plasma. Celles-ci sont très nombreuses : trypsine, chymotripsine, plasmine, thrombine,
élastase…..

α 1 anti protéase ou α antitrypsine


Rappel : protéases à serine =
Caractéristiques Serine dans la poche catalytique, site
Inhibe la trypsine, mais aussi d’autres protéases à serine actif.

Durant l’état inflammatoire, beaucoup d’enzymes notamment La serine participe activement à la


lysosomiales sont relâchées dans le plasma. catalyse
L’ α 1 anti protéase limite leurs effets potentiellement néfastes.

Taux et variations
Taux 2 à 4 g / L
Hausse banale dans état inflammatoire
Baisse, intéressante dans les pathologies pulmonaires ou hépatiques, acquises ou génétiques.
(broncho-pneumopathies, emphysèmes, cirrhoses infantiles, …)

α2 macroglobuline
Rappel : pont diS
Caractéristiques Participe à l’établissement de la
750 kDa ! ! ! structure III
Plusieurs sous unités reliées entre elles par pont diS
Rôle similaire à l’ α 1 anti protéase hydrolysé par β 2 mercaptoéthanol
(ou autre réducteur)
Taux et variations
2 à 2.35 g / L
Augmentation dans syndrome néphrotique (les synthèses hépatiques augmentent pour compenser la
perte de serumalbumine, mais l’α2 macroglobuline est partiellement retenue du fait de sa taille trop
importante, d’où une augmentation).
Augmentation en cas d’inflammation aiguë.

1.2.3. Immunoglobulines
Voir cours d’immunologie les concernant.

1.2.4. Microglobulines
On trouve en zone α1 et β2 de l’électrophorèse, des protéines de faible poids moléculaire dont la β2-
microglobuline.
Cette dernière appartient au CMHI. Après son relargage des membranes, pour des raisons inconnues, la protéine
est facilement filtrée au niveau du glomérule du fait de sa petite taille et elle est ensuite entièrement réabsorbée
au niveau tubulaire.
Le taux urinaire, normalement très faible, augmente donc en cas de tubulopathies et son dosage urinaire est utile
dans la surveillance des greffes rénales.
Dans le plasma son élévation est observée en cas d’insuffisance rénale et dans divers cancers.
1.3 Les marqueurs d’une pathologie cellulaire

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1.3.1. Protéines de l’inflammation
= ensemble des protéines plasmatiques dont le taux augmente fortement dans un état inflammatoire.
Cette augmentation est non spécifique et on appelle ces protéines, les protéines de la phase aigüe.
Leur élévation est due à une augmentation de synthèse hépatique médiée par l’interleukine 1 qui n’a pas
de retentissement sur la protéinémie totale.

Protéine de l’inflammation MM (kDa)) Valeurs usuelles (g/L) Délai d’apparition (h)


CRP 120 <0.006 2–4
SAA (sérum amyloide A) 12 <0.01 4–6
ORO 40 0.6 à 1.2 24 - 48
HAP 86 0.5 à 1.5 Id
FBN 340 2.5 à 3.5 Id
α 1 antitrypsine 54 2à4 Id
CER (céruléoplasmine) 132 0.2 à 0.4 Id

 Protéine C réactive = CRP


Caractéristiques
Glycoprotéine de poids moléculaire 120 000 Da, formée par l’union de 5 sous unités identiques.
Cette protéine porte son nom en raison de sa capacité à précipiter au contact du polysaccharide C du
pneumocoque. (Cette protéine appartient à ce que l’on appelle maintenant les PRR pour Pattern Recognition
Receptor ce qui signifie qu’elle reconnaît des motifs communs à plusieurs types cellulaires et donc à plusieurs
pathogènes, ce qui est très efficace pour l’immunité innée).
La CRP peut être présente sous 2 formes : pentamérique (forme prédominante dans le plasma) ou monomérique
(préférentiellement dans les tissus).

Rôles
La CRP joue un rôle important dans la médiation de la phagocytose. Elle peut opsoniser les débris nucléaires tels
que la chromatine, les histones, mais aussi la paroi des bactéries pathogène et les membranes des cellules
endommagées ou en apoptose. Elle peut alors activer le système du complément et/ou interagir avec des cellules
phagocytaires pour provoquer la lyse des bactéries ou des cellules. La CRP monomérique est capable d’activer le
complément de manière plus efficace que la CRP sous forme pentamérique.
C’est un marqueur très précoce de l’inflammation.
Du fait de sa demi-vie courte (19 h dans le plasma), la CRP est un témoin précoce de l’efficacité thérapeutique.

Variations pathologiques
On observe des augmentations :
- Dans les états inflammatoires
- Dans les infections néonatales
- Dans la surveillance postopératoire, où la CRP augmente systématiquement avec pic à 2 ou 3 jours. Si
élévation continue à s’élever au 4ème jour, possibilité d’une complication infectieuse.

 Orosomucosoïde = glycoprotéine acide alpha 1 Rappel :


Il s’agit d’une glycoprotéine très riche en acide sialique. Acide sialique = acide N-
40 kDa faible MM acétylneuraminique (NANA)
0.6 à 1.2 g / L Dérivé acide d’un ose.
Constituant des glycoprotéines et
Elle s’élève fortement dans les états inflammatoires en particulier
des glycolipides en particulier des
Au cours du rhumatisme articulaire aiguë membranes des cellules eucaryotes.

 Haptoglobine
Caractéristiques
Il s’agit d’une glycoprotéine constituée de 4 chaines polypeptidiques (α 2β2).
Elle est capable de fixer l’hémoglobine et le complexe Hb-Hp a la particularité d’avoir une activité enzymatique,
peroxydase. Cette activité est mise à profit pour la détection du sang sur les bandelettes urinaires ou dans les
matières fécales.

Variations pathologiques
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- baisse voir effondrement dans hémolyse, très utile dans hémolyse discrète.
- Hausse dans état inflammatoire, intérêt surtout dans évolution de l’état inflammatoire

1.3.2. Les marqueurs tumoraux


Voir poly correspondants

1.3.3. Les marqueurs non enzymatiques de la souffrance cardiaque


Voir AT correspondante.

II. EXPLORATION DES PROTÉINES PLASMATIQUES


L’exploration des protéines plasmatiques comprend
- Le dosage des protéines totales par la méthode classique du biuret. Le taux normal est de 60 à 80 g.L -1
- Le dosage éventuel de protéines particulières par des méthodes immunologiques.
- Le profil protéique
- L’électrophorèse des protéines (vue en première année et en immuno-hémato)
- L’immunoélectrophorèse ou l’immunofixation

Les techniques analytiques permettent donc le dosage de nombreuses protéines sériques ; cependant, le dosage
isolé d’une protéine est difficile à corréler à une pathologie précise. C’est pourquoi l’analyse des profils protéiques
a été introduite.

2.1. Le profil protéique à ses débuts


C’est la représentation graphique des dosages de plusieurs protéines, exprimés en g.L -1, ou en pourcentage de la
normale en fonction de l’âge et du sexe du sujet.
Le profil élargi comprenait à son origine 8 à 10 protéines, parmi lesquelles les plus classiques sont : IgM, IgG, IgA,
C3 (composant du complément), α1 glycoprotéine, orosomucoïde, haptoglobine, transferrine, Albumine.
En ordonnée, les concentrations sont indiquées en pourcentage de la valeur normale.

Le rectangle représente la dispersion physiologique


pour chacune des protéines.

Suite au dosage de chacune des protéines, on place


la concentration trouvée sur ce graphique.

Généralement le profil protéique s’accompagne


toujours d’une électrophorèse des protéines pour
ne pas méconnaître une éventuelle gammapathie monoclonale.

2.1.1. Intérêt du profil protéique :


Cet examen permet de mettre en évidence des syndromes particuliers lorsque l'examen clinique est peu
évocateur (fièvre prolongée inexpliquée, vitesse de sédimentation accélérée inexpliquée, altération de l'état
général sans cause évidente, algies diffuses).
Au stade initial de l’élaboration du diagnostic, le profil protéique doit pouvoir appréhender un maximum de
situations pathologiques et c’est pour cela qu’à son origine il comportait généralement 8 à 10 protéines.
Par la suite, lors du suivi évolutif sous traitement, un profil protéique ciblé, restreint à 3 ou 4 protéines peut être
envisagé.

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Quel est l’intérêt de doser plusieurs protéines simultanément ?
La concentration d’une protéine prise isolément n’a pas toujours de signification physiologique. En effet des
mécanismes exerçant des effets contraires sur la concentration d’une protéine coexistent souvent chez un
malade.

protéine Mécanisme 1 Mécanisme 2 Concentration résultante


transferrine Inflammation ↓ Carence martiale ↑ normale
ferritine Inflammation ↑ Carence en fer ↓ normale
CRP Inflammation ↑ Hypercatabolisme ↓ normale

2.1.2. Principales causes de variation des protéines du profil protéique


Les principales causes de variations pathologiques des protéines concernées par le profil protéique sont résumées
dans le tableau ci-dessous :

protéine augmentation diminution


IgM Monoclonale : Waldenström Artériosclérose
Polyclonale avec syndrome inflammatoire : Certains cancers
infection splénectomie
Polyclonale sans syndrome inflammatoire :
virose, hépatite.
IgG Monoclonale : myélome à IgG Myélome à IgA
Polyclonale : infection bactérienne, virale, Certains cancers
parasitaire,

IgA Monoclonale : myélome à IgA Déficit congénital


Polyclonale avec syndrome inflammatoire : Myélome à IgG
infections des muqueuses,
spondylarthropathies
Polyclonale sans syndrome inflammatoire :
tabagisme, éthylisme, diabète

Immunoglobuline GAM Avec syndrome inflammatoire : Fuite protéique


Infection Hodgkin Hémopathies malignes
Sans syndrome inflammatoire :
SIDA

Complément C3 Inflammation Déficit congénital


Hyperconsommation :
Infections…
Orosomucoïde Inflammation Insuffisance hépatocellulaire
Fuites protéiques (glomérulaire)
Fuites protéiques digestives
Haptoglobine Inflammation Insuffisance hépatocellulaire
Hémolyse intra-vasculaire

Transferrine Carence en fer Inflammation


Insuffisance hépatocellulaire
Fuites protéiques (glomérulaires ou
digestives)

Albumine hémoconcentration Inflammation


Insuffisance hépatocellulaire
Fuites protéiques (glomérulaires ou
digestives)

2.2. Les profils protéiques actuellement

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L’arrêté du 5 novembre 2003, mis en application au 29/01/2004, a fait disparaître les profils de la Nomenclature
des Actes de Biologie Médicale, et a imposé des règles limitant à 2 ou 3 dans certains cas (dosages simultanés
d’IgG, IgA et IgM) le nombre de protéines sériques pouvant être cumulées. Tout en respectant ces contraintes,
quelques profils ciblés ont été proposés.
Les profils protéiques ciblés sont composés d’un nombre restreint de protéines et explorent un domaine
physiopathologique précis :

o le profil inflammatoire (CRP, orosomucoïde)


Il affirme ou élimine l’existence d’un syndrome inflammatoire et permet de suivre l’évolution
spontanée ou sous traitement. L’association retenue comprend une protéine à cinétique rapide (CRP)
et une protéine à cinétique lente (orosomucoïde).

o le profil immunitaire (IgM, IgG, IgA)


Il reflète l’immunité humorale ;

o le profil nutritionnel (préalbumine, albumine et orosomucoïde)


Il sert à dépister des états de dénutrition infra-clinique ou à suivre une réalimentation. La dénutrition
est un état fréquemment observé dans les âges extrêmes de la vie (prématurés, vieillards), chez les
malades hospitalisés et chez les brûlés. La préalbumine ou transthyrétine, dont la demi-vie est de 2
jours, est sensible à tout changement nutritionnel et diminue rapidement en cas de dénutrition. Sa
diminution est proportionnelle à l’importance de l’atteinte. L’albumine, dont la demi-vie est de 19
jours, diminue tardivement et reflète la chronicité et la sévérité de l’atteinte. L’orosomucoïde permet
de mettre en évidence une inflammation susceptible d’entraîner, en dehors de toute dénutrition, une
diminution de la préalbumine et de l’albumine.
En effet, deux formes de malnutrition doivent être distinguées :
• la dénutrition « exogène », qui est une forme pure de malnutrition sans pathologie
inflammatoire, causée par un défaut d’apport alimentaire exogène (carence d’apport chez les
personnes âgées, malabsorption, anorexie mentale) ; dans cette situation, l’organisme s’adapte
en diminuant la synthèse hépatique des protéines nutritionnelles : albumine, transferrine,
préalbumine, Retinol Binding Protein (RBP), somatomédine C ou IGF 1 ;
• la dénutrition « endogène », mécanisme connu dans les cancers, en chirurgie, en cas de brûlures
étendues, dans les infections et maladies inflammatoires chroniques, dans lesquelles malnutrition
et inflammation sont associées ; dans ce cas, l’augmentation des protéines de l’inflammation
(protéine C réactive, orosomucoïde…), stimulées par les cytokines (Il6, TNF-α) se fait au détriment
des protéines nutritionnelles (albumine, préalbumine, IGF-1).

o le profil hémolytique (haptoglobine associée à l’orosomucoïde, protéine de l’inflammation)


Il sert à explorer les états d’hémolyse intravasculaire et/ou intratissulaire. En l’absence d’inflammation,
le diagnostic d’hémolyse est posé lorsque l’haptoglobine est inférieure à 50 % de sa valeur médiane.
Dans un contexte inflammatoire, le taux d’haptoglobine peut être « faussement » normal (au lieu
d’être abaissé) ; dans ce cas, l’hémolyse peut être affirmée lorsque l’écart entre l’haptoglobine et
l’orosomucoïde, exprimées en pourcentages par rapport à la médiane, obéit à la règle suivante :
HPT % < (ORO % × 1,3) – 150.

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