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Linhardt Dominique. Le procès fait au Procès de civilisation. A propos d'une récente controverse allemande autour de la
théorie du processus de civilisation de Norbert Elias. In: Politix, vol. 14, n°55, Troisième trimestre 2001. Analyses politiques
allemandes. pp. 151-181;
doi : https://doi.org/10.3406/polix.2001.1177
https://www.persee.fr/doc/polix_0295-2319_2001_num_14_55_1177
Abstract
The Civilizing process on trial. Notes on a recent german controversy about Norbert Elias' civilization
theory
Dominique Linhardt
After its "re-discovery" in the 70's and its ensuing "canonisation" during the following decade, the work
of Norbert Elias has been exposed since the late 80's to an increasing level of criticism. In Germany,
these critiques lead to a controversy that focused on Hans Peter Duerr's refutation of the theory of the
civilizing process. Beyond the "matter of facts" and the empirical lacks asserted by the anthropologist in
the four volumes of his Myth of the civilizing process, the author aims to unveil, under the apparent
scientific make-up of Elias' theory, its nature of a "political myth" that allowed - and, according to him,
still allows - the false assertion of the superiority of the western world over the "others", the "non
occidental" cultures. The paper suggests, instead of taking position in favour of the ones or the others,
to make use of the study of the controversy for a better understanding of the theoretical and normative
implications of the theory of the civilizing process by showing how Elias achieves articulating both: the
claim to formulate a "science of the human" and the will to participate to the fulfilment of a better
society.
Le procès fait au Procès de civilisation
Dominique LlNHARDT
* Je remercie F. Jobard pour ses lectures successives des différentes versions de ce texte.
1. Duerr (H.P.), Nacktheit und Scham. Der Mythos vom Zivilisationsprozess, Francfort /Main,
Suhrkamp, 1988 (traduction française : Nudité et pudeur. Le mythe du processus de civilisation,
Paris, Editions de la Maison des sciences de l'homme, 1998).
2. Les deux tomes de Über den Prozess der Zivilisation. Soziogenetische und psychogenetische
Untersuchungen, publiés en 1939, ont été traduits en français à partir de la réédition allemande
de 1969. On peut regretter le choix editorial consistant à faire des deux volumes d'un ouvrage
unique deux livres séparés et publiés à deux ans d'intervalle (La civilisation des mœurs en 1973 et
La dynamique de l'Occident en 1975, tous deux chez Calmann-Lévy). Ce faisant, l'unité profonde
de l'entreprise d'Elias a été rendue plus difficile à percevoir. Cette difficulté a été renforcée par
le fait qu'en 1974 parut dans la même collection (« Archives des sciences sociales ») La société de
cour. Pour restituer son unité à l'ouvrage, nous parlerons ici du Procès ou du Processus de
civilisation. L'édition de référence est celle des éditions Suhrkamp de 1976. On citera : PZ I =
tome 1, « Wandlungen des Verhaltens in den weltlichen Oberschichten des Abendlandes » = La
civilisation des mœurs ; PZ II = tome 2, « Wandlungen der Gesellschaft. Entwurf zu einer Theorie
der Zivilisation » = La dynamique de l'Occident.
3. Duerr (H. P.), Intimität. Der Mythos vom Zivilisationsprozess, Francfort/Main, Suhrkamp, 1990,
Obszönität und Gewalt. Der Mythos vom Zivilisationsprozess, Francfort /Main, Suhrkamp, 1993, Der
erotische Leib. Der Mythos vom Zivilisationsprozess, Francfort /Main, Suhrkamp, 1997. On se
référera aux quatre volumes sous les dénominations Duerr I, Duerr II, Duerr III et Duerr IV.
Dans le quatrième tome Duerr annonce un cinquième. Seul le premier (Nacktheit und Scham...,
op. cit.) a donc été traduit en français.
4. Duerr III, p. 13 (souligné dans le texte).
5. Macho (T.), « Jäger und Sammler in der Wissenschaft. Notizen zu Hans Peter Duerrs "Der
Mythos vom Zivilisationsprozess" », Der Freitag, 6 août 1993.
6. Ainsi, par exemple, U. Greiner qui compare le « duel » entre Duerr et Elias à « une partie
d'échecs disputée sur deux échiquiers différents » : si Duerr présente effectivement un vaste
ensemble de données historiques et ethnologiques, il ne fournirait en revanche aucune prise
Le procès fait au Procès de civilisation 153
pouvant rendre ce tableau intelligible d'un point de vue théorique, ce qui, de fait, disqualifierait
ses arguments contre Elias (Greiner (U.), « Nackt sind wir alle : Über den sinnlosen Kampf des
Ethnologen Hans Peter Duerr gegen den Soziologen Norbert Elias », Die Zeit, 20 mai 1988).
7. Duerr I, p. 7 ; Duerr, III, p. 10.
8. On la désigne communément par « controverse Elias-Duerr ». Mais la contribution directe
d'Elias se résume à une page dans l'hebdomadaire Die Zeit (« Was ich unter Zivilisation
verstehe : Antwort auf Hans Peter Duerr », Die Zeit, 17 juin 1988). La controverse va bien au-
delà. On y trouve un grand nombre de contributions qui, la plupart du temps, prennent
directement position en faveur de l'un des « protagonistes ». Peu nombreux sont ceux qui ont
cherché, sans forcément prendre position de manière tranchée, à tirer des enseignements de la
controverse.
154 Politix n° 55
9. Cf. Taschwer (K.), « Wie Norbert Elias trotzdem zu einem soziologischen Klassiker wurde
Amsterdams Sociologisch Tijdschrift, 20, 1994.
10. Cf. PZ I, p. 74-78, PZ II, p. 378-379.
11. PZI,p. 224.
Le procès fait au Procès de civilisation 155
Ne A
niveau de civilisation
espace-temps
détermination empirique d'un niveau de civilisation rapporté à un lieu et à un
moment historique
mouvement global du processus de civilisation
12. PZ II, p. 318, 454. Cette posture est explicitement assumée, par exemple, par J. Goudsblom
lorsqu'il traite de la domestication du feu comme d'un processus de civilisation. Cf. Goudsblom
(J.), « The Domestication of Fire as a Civilizing Process », Theory, Culture and Society, 4, 1987,
p. 457-476.
156 Politix n° 55
Bien que variées, les critiques de ce modèle vont toutes dans le même
sens13 : est-il possible de construire une échelle ordinale unique à l'aune de
laquelle l'ensemble des sociétés passées et présentes pourrait être
hiérarchisé ? La critique la plus précoce est venue des anthropologues qui
ont mis en doute la dichotomie entre sociétés « simples » et intégrées d'un
côté et sociétés complexes et différenciées de l'autre qui sous-tend, selon eux,
une opposition entre « primitifs » et « civilisés » qui, bien que niée par Elias,
n'en serait pas moins tacitement acceptée14. Même si l'on remplace cette
dichotomie stricte par des formes d'expression graduelles plus adaptées à
l'approche éliasienne caractérisée par l'attention portée à la continuité des
processus, l'argument a été maintenu : pour procéder à l'évaluation du
niveau de civilisation, on serait immanquablement conduit à choisir comme
référant ce qui apparaît aux yeux du sociologue comme le plus « naturel », à
savoir la société de type « moderne ». Cet argument ouvre évidemment la
voie à la dénonciation de l'eurocentrisme15 et, si l'on associe à l'idée d'une
échelle graduée des niveaux de civilisation celle d'un développement
historique par stades correspondant à un mouvement « normal »
d'ascension vers des niveaux de civilisation plus élevés, à la critique de
l'évolu tionnisme et de la téléologie16. De même, ce sont les anthropologues
qui ont mis en question la thèse éliasienne d'une corrélation forte entre le
degré de civilisation observé dans les comportements singuliers et
l'existence d'un centre politique. Comment peut-on, dans ce cadre, rendre
compte de la forte autocontrainte qu'on peut constater dans des sociétés
13. Nous excluons ici les nombreuses critiques qui portent soit sur des erreurs factuelles ou
d'interprétation de données historiques, ainsi que celles qui pointent des lacunes, des aspects
non pris en compte par la théorie du processus de civilisation dans la mesure où celles-ci ne
constituent pas une mise en cause fondamentale, mais ouvrent la voie à un vaste programme de
recherches empiriques qu'Elias évidemment n'aurait pu seul mener à son terme.
14. Cf. Kellner (R.), « Norbert Elias und die Ethnologie - Über die Probleme der Ethnologie mit
der Zivilisationstheorie », Angewandte Sozialforschung, 19, 1995 ; Köstlin (K.), « Die "historische
Methode" der Volkskunde und der "Prozess der Zivilisation" des Norbert Elias », in
Harmening (D.), Wimmer (E.), dir., Volkskultur - Geschichte - Region. Festschrift für Wolfgang
Brückner zum 60. Geburtstag, Würzburg, Königshausen und Neumann, 1990.
15. Par exemple Blök (A.), « Primitief en geciviliseerd », Sociologische Gids, 29, 1982, cité par
Kellner (R.), «Norbert Elias und die Ethnologie...», art. cité. A. Blok avait défendu cet
argument au colloque « Zivilisationsprozesse und Zivilisationstheorien » qui s'est tenu à
Amsterdam les 17 et 18 décembre 1982 en présence de Norbert Elias. La discussion échauffée a
conduit à la mise en cause morale de Norbert Elias, par une accusation de « racisme ». L'épisode
est d'autant plus remarquable que Blok, dans les années qui avaient précédé, avait été l'un des
plus fervents adeptes et défenseurs d'Elias (cf. Wilterdink (N.), « Die Zivilisationstheorie im
Kreuzfeuer der Diskussion », in Gleichmann (P.), Goudsblom (].), Körte (H.), dir., Macht und
Zivilisation. Materialien zu Norbert Elias' Zivilisationstheorie 2, Frankfort /Main, Suhrkamp, 1984).
16. Cf. Anders (K), « Fortgeschrittener Humanismus oder humanistischer Fortschritt ? », in
Treibel (A.), Kuzmics (H.), Blomert (R.), dir., Zivilisationstheorie in der Bilanz. Beiträge zum 100.
Geburtstag von Norbert Elias, Opladen, Leske und Buderich, 2000.
Le procès fait au Procès de civilisation 157
«sans Etat», telles que celle des Inuits17 ou des Bochimans Djuka du
Surinam18 ?
Un second volet de la critique prend, lui, appui sur l'histoire du XXe siècle.
Deux arguments ont été avancés. Le plus évident consiste à invoquer - à
l'encontre de l'idée d'une baisse tendancielle de la violence défendue par
Elias - le constat que notre siècle a été de loin le plus sanglant et le plus
empli d'horreurs : les guerres mondiales, les exterminations de masse, la
menace de la guerre nucléaire, l'Holocauste, surtout, servent dans cette
optique comme les contre-exemples à la thèse d'un mouvement vers un
niveau de civilisation plus élevé19. Un autre argument concerne l'apparent
relâchement des contraintes qui pèsent sur les rapports interpersonnels, ce
que l'on a appelé l'avènement d'une « société permissive », plus « libre » et
moins attachée à des formes codifiées du convenable. On pense à cet égard à
la libération des mœurs de l'après-68, mais la « fin de siècle » et les « années
folles » ont également été mises à contribution.
Chacune de ces critiques a donné lieu à des amendements de la théorie.
Ainsi pour désamorcer les critiques de l'eurocentrisme et de 1'« étato-
centrisme », il suffirait de reconnaître, aux côtés de l'Etat de type occidental,
d'autres configurations d'interdépendance propres aux petites sociétés
tribales non européennes conduisant à des phénomènes d'autocontrôlé aussi
forts que ceux observables dans les sociétés occidentales20. De même cette
reconnaissance conduit-elle à concevoir non pas un seul, mais une pluralité
des processus de civilisation. A l'encontre de l'argument de la barbarie du
XXe siècle, a été affirmé la nécessité de thématiser plus clairement l'idée
selon laquelle on trouverait, à côté des processus de civilisation, des
processus de « décivilisation », dont les totalitarismes et les guerres du
XXe siècle seraient les exemples les plus évidents21. Enfin, pour rendre
17. Rasing (W.), « Over conflictregulering bij de nomadische Inuit », Sociologische Gids, 29, 1882,
cité par Kellner (R.), « Norbert Elias und die Ethnologie. . . », art. cité.
18. Thoden van Velzen (H. U. E.), « The Djuka Civilization », Netherlands Journal of Sociology, 20,
1984.
19. Cf. Dinges (M.), « Gewalt und Zivilisationsprozess », traverses, 1, 1995 ; Wieviorka (M.), « Sur
la question de la violence », Tumultes, 15, Norbert Elias : pour une sociologie non-normative.
20. Dans le cas des Djuka, analysé par Thoden van Velzen, l'argument est que le polissement
des mœurs ne dépend pas de la sociogenèse d'un Etat, mais de celle d'un système matrimonial
uxorilocal : lors d'un mariage, l'époux rejoint le village de son épouse, tout en gardant des
contacts fréquents avec les villages de sa mère et de son père. A cela s'ajoute la pratique de la
polygamie. Le mari est par conséquent en perpétuel déplacement entre plusieurs villages, sans
attaches fixes et dépendant de l'opinion que ses hôtes se font de lui. Pour se faire accepter dans
chaque lieu, il doit exercer des talents diplomatiques considérables. Cette nécessité, considérée
sur le temps long, serait le facteur décisif du façonnement des comportements et, par
conséquent, de la civilisation Djuka.
21. Cf. Mennell (S.), « L'envers de la médaille : les processus de décivilisation », in Garrigou
(A.), Lacroix (B.), dir., Norbert Elias. La politique et l'histoire, Paris, La Découverte, 1997.
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Civilisation Décivilisation
Europe des XVe au XVIIIe
Formalisation Allemagne nazie
siècles
Informalisation Sociétés permissives Barbarie « ordinaire »
22. Cf. Wouters (C), Informalisierung : Norbert Elias Zivilisationstheorie und Zivilisationsprozess im
20. Jahrhundert, Opladen, Westdeutscher Verlag, 1999. L'argument de l'informatisation a été
avancé par ce même auteur dès 1979 (Wouters (C), « Informalisierung und der Prozess der
Zivilisation », in Gleichmann (P.), Goudsblom (].), Körte (H.), dir., Materialien zu Norbert Elias'
Zivilisationstheorie, Frankfort /Main, Suhrkamp, 1979).
23. Ce nouvel « état » de la théorie, dans la mesure où Elias est un fondateur d'école, ne peux
plus être considéré comme la propriété exclusive de ce dernier. Cependant, même s'il n'en a pas
été l'auteur des amendements, il les a tous repris à son compte. Ceci apparaît le plus clairement
dans Studien über die Deutschen. Machtkämpfe und Habitusentwicklung im 19. und 20. Jahrhundert,
Francfort/Main, Suhrkamp, 1989.
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Nc niveau de civilisation
Nf niveau de formalisation/informalisation
Eß espace-temps
• détermination empirique d'un niveau de civilisation rapporté à un lieu et à un
moment historique
© détermination empirique de niveaux de civilisation « discordants » au regard du
modèle initial
—► reconnaissance de la pluralité des processus de civilisation et de décivilisation
-> reconnaissance des processus de formalisation/ informalisation
24. Schröter (M.), « Scham im Zivilisationsprozess : Zur Diskussion mit Hans Peter Duerr
Körte (H.), Gesellschaftliche Prozesse und individuelle Praxis, Francfort/Main, Suhrkamp, 1991.
160 Politix n° 55
25. Schröter (M.), « Scham im Zivilisationsprozess : Zur Diskussion mit Hans Peter Duerr », in
Erfahrungen mit Norbert Elias. Gesammelte Aufsätze, Francfort /Main, Suhrkamp, 1997, p. 109, n° 39.
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26. Duerr (H. P.), M Dieu - ni mètre. Anarchistische Bemerkungen zur Bewusstseins- und
Erkenntnistheorie, Francfort /Main, Suhrkamp, 1974.
27. Duerr I, p. 12 ; Duerr II, p. 14-17, 261, 269 ; Duerr III, p. 15-16.
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Peu de commentateurs ont pris note du fait que Duerr ne se contente pas de
l'apparent empirisme consistant à fournir une casuistique des expressions
des affects et au constat que la théorie d'Elias ne permet pas de rendre
compte de la diversité des cas. La critique « théorique » est en un sens
intégrée au dispositif critique. Les deux mille cinq cents pages de faits divers
conduisent bien à faire un « point » : les différences de l'expression des
affects ne devraient pas être approchées quantitativement en établissant une
échelle du plus au moins, mais qualitativement en distinguant les modalités
variables selon lesquelles des caractéristiques universelles s'expriment. La
démonstration en est faite par une opération massive d'alignement de cas
qui, chacun pris individuellement, ne saurait mettre en cause la théorie.
C'est la masse qui produit l'effet qualitatif voulu car il lui permet de faire
valoir, à l'encontre d'Elias pour qui la civilisation désigne un processus à
l'intérieur de l'histoire de l'humanité, que « l'être-civilisé » et « l'être-
homme » ne sont qu'une seule et même chose, que civilisation et
humanisation sont des phénomènes parfaitement synchrones, toute forme
de vie humaine étant une manière particulière d'être civilisé28.
30. C'est ainsi, du moins, que l'on peut entendre les critiques selon lesquelles la thèse de
l'universalité de certaines catégories d'affects sous-entendrait leur caractère inné (Elias (N.),
« Was ich unter Zivilisation verstehe... », art. cité ; Wouters (C), « Duerr and Elias. Scham und
Gewalt in Zivilisationsprozessen », Zeitschrift für Sexualforschung, 7, 1994 ; Baumgart (R.),
Eichner (V.), Norbert Elias. Zur Einführung, Hambourg, Junius, 1991, p. 92). Cette critique peut
déboucher sur une dénonciation du génétisme (Krause (B.), « Scham und Selbstverständnis in
mittelalterlicher Literatur », in Kintzinger (M.), dir., Das andere Wahrnehmen, Cologne, Weimar,
Vienne, Böhlau, 1991, p. 194, cité par Duerr III, p. 15).
31. Ainsi J. Georg-Lauer demande-t-elle « comment ont peut attribuer une essence à l'humain
alors qu'on ne dispose que de matériaux sur certains humains historiques » et d'ajouter qu'il
s'agit là d'une « thèse métaphysico-philosophique douteuse » (Georg-Lauer (J.), « Nackte
Scham : Hans Peter Duerrs Buch über den Zivilisationsprozess », Neue Zürcher Zeitung, 5 mai
1988).
32. Göbel (A.), « Entzivilisierte Zivilisation : Über Duerrs neueste Attacke auf Norbert Elias »,
Symptome, 13, 1995, p. 58.
33. Elias (N.), « Was ich unter Zivilisation verstehe... », art. cité ; Gsell (M.), « Von Hirschkäfern
und Maikäfern : Hans Peter Duerrs Angriff auf den "Prozeß der Zivilisation" », Die
Wochenzeitung, 18 mars 1994 ; dans un même esprit P. Burke lui reproche de considérer que
toutes les cultures sont identiques : Burke (P.), « Keine Alternative ? Zur Elias-Duerr-Debatte »,
Psychologie heute, décembre 1991, p. 65.
34. Greiner (U.), « Nackt sind wir alle. . . », art. cité.
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35. Duerr II, p. 14-18, Duerr III, p. 15-20, Duerr IV, p. 356-359.
36. Duerr III, p. 20.
37. Duerr II, p. 17.
38. Matthes (J.), « The Operation called "Vergleichen" », in Matthes (].), dir., Zwischen den
Kulturen ? Die Sozialwissenschaften vor dem Problem des Kulturvergleichs, Soziale Welt, 8, 1992, p. 81.
39. Duerr II, p. 18.
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40. Schloßberger (M.), « Rezeptionsschwierigkeiten. Hans Peter Duerrs Kritik an Norbert Elias'
historischer Anthropologie », Leviathan, 28, p. 109-121, 2000.
41. Ibid., p. 112 (l'auteur ne produit pas la référence).
42. PZ I, p. 218.
43. La filiation avec Freud a souvent été souligné - y compris par Elias lui-même (PZ I, p. 324
[n°77]).
44. Cf. Elias (N.), Engagement und Distanzier ung, Francfort /Main, Suhrkamp, 1983, p. 77
(Traduction française : Engagement et distanciation. Contributions à la sociologie de la connaissance,
Paris, Fayard, 1993).
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45. Il s'agit là de la définition la plus restreinte que l'on peut trouver sous sa plume. Cf. Elias
(N.), « Zivilisation », in Schäfer (B.), dir., Grundbegriffe der Soziologie, Opladen, Leske und
Budrich, 1986.
46. Par exemple, PZ I, p. 183-185.
47. PZ I, p. 163.
Le procès fait au Procès de civilisation 167
réponse est, une fois de plus, empreinte de logicisme : affirmer que « les
individus dans les sociétés "prémodernes" n'auraient pas "intériorisé" les
normes - dire, par exemple, qu'ils n'auraient pas honte parce qu'ils ont
commis quelque chose, mais parce que cela s'est su - revient à contester le fait
même que les personnes ont les normes au regard desquelles ils pourraient
avoir honte de ce qu'ils ont fait50. » En considérant, comme le fait Schröter,
que les personnes n'intériorisent pas les normes, on s'interdit la possibilité
même d'expliquer l'existence de la honte. Lorsqu'on a honte de ce que l'on a
fait, on a d'abord honte devant soi. Les normes auxquelles on a contrevenu
doivent donc être d'une manière ou d'une autre « faites siennes » pour
ressentir une honte.
53. Rappelons que les processus de civilisation ne sont, dans l'esprit d'Elias, jamais terminés de
telle sorte qu'il n'existe aucun stade final de l'Etat civilisé, mais seulement une gradation du
plus au moins civilisé. Ceci le conduit, avec quelque ironie, à plaider pour une approche
« développementaliste » des Etats développés car tous les Etats sont en réalité continuellement
« en voie de développement » (Elias (N.), « Processes of State Formation and Nation Building »,
Transactions of the 7th World Congress of Sociology 1970, vol. 3, Sofia, International Sociological
Association, 1972 ).
54. Selon l'expression de Goudsblom (J.), « Das Unbehagen an der "Theorie vom Prozess der
Zivilisation" », Angewandte Sozialforschung, 19, 1995.
55. Par exemple, Marx (C), « Staat und Zivilisation. Zu Hans Peter Duerrs an Norbert Elias »,
Saeculum, 47, 1996 ; Ludwig-Mayerhofer (W.), « Disziplin oder Distinktion ? Zur Interpretation
der Theorie des Zivilisationsprozesses von Norbert Elias », Kölner Zeitschrift für Soziologie und
Sozialforschung, 50, 1998 ; Hinz (M.), « Zur Affektgeladenheit und zum Bedeutungswandel des
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Zivilisationsbegriffs : Norbert Elias, Wilhelm. E. Mühlmann und Hans Peter Duerr », in Treibel
(A.), Kuzmics (H.), Blomert (R.), Zivilisationstheorie in der Bilanz..., op. cit.
56. Willke (H.), Ironie des Staates. Grundlinien einer Staatstheorie polyzentrischer Gesellschaft,
Francfort/Main, Suhrkamp, 1992, p. 55.
57. Cf. aussi Haselbach (D.), « "Monopolmechanismus" und Macht. Der Staat in Norbert Elias'
Evolutionslehre », in Rehberg (K.-S.), Norbert Elias und die Menschenwissenschaften. Studien zur
Entstehung und Wirkungsgeschichte seines Werkes, Francfort/Main, 1996 ; Van Krieken (R.), « The
Barbarism of Civilization: Cultural Genocide and the "Stolen Generations" », The British Journal
of Sociology, 50, 1999.
58. Ibid., p. 28.
Le procès fait au Procès de civilisation 171
62. Marx (C), « Staat und Zivilisation. Zu Hans Peter Duerrs an Norbert Elias », art. cité.
63. A propos de la notion d'« anthropogogie », cf. Sloterdijk (P.), Die Verachtung der Massen.
Versuch über die Kulturkämpfe in der modernen Gesellschaft, Francfort/Main, Suhrkamp, 2000.
64. Cf. Willke, Ironie des Staates..., op. cit.
Le procès fait au Procès de civilisation 173
65. Cf. les références produites par Schwerhoff (G.), « Zivilisationsprozess und
Geschichtswissenschaft... », art. cité, p. 595, n° 99.
66. Käsler (D.), « Norbert Elias - Ein europäischer Soziologe für das 21. Jahrhundert », in
Rehberg (K.-S.), dir., Norbert Elias und die Menschenwissenschaften, op. cit. Certains travaux
cependant parviennent remarquablement à réinscrire Elias dans son temps (par exemple,
Garrigou (A.), Lacroix (B.), « Norbert Elias : le travail d'une œuvre » et Lacroix (B.), « Portrait
sociologique de l'auteur », in Garrigou (A.), Lacroix (B.), dir., Norbert Elias. La politique et
l'histoire, op. cit. ; Rehberg (K.-S.), « Form und Prozess. Zu den katalysatorischen
Wirkungschancen einer Soziologie aus dem Exil : Norbert Elias », in Gleichmann (P.),
Goudblom (J.), Körte (H.), Materialien zu Norbert Elias' Zivilisationstheorie, op. cit. ; également
certaines contributions dans Rehberg (K.-S.), dir., Norbert Elias und die Menschenwissenschaften,
op. cit.).
67. Sur cet aspect assez méconnu de la biographie d'Elias, cf. Hackeschmidt (J.), Von Kurt
Blumenfeld zu Norbert Elias oder die Erfindung der jüdischen Nation, Hambourg, Europäische
Verlagsanstalt, 1997.
68. Il suffit pour s'en convaincre de se référer au portrait autobiographique : Elias (N.), Über sich
selbst, Francfort /Main, Suhrkamp, 1990 (traduction française : Norbert Elias par lui-même, Paris,
Fayard, 1991).
174 Politix n° 55
69. Elias (N.), « Was ich unter Zivilisation verstehe. . . », art. cité.
70. Duerr II, p. 13 ; Duerr III, p. 12-14 ; Cf. également Duerr (H. P.), « Der Zivilisationsprozess :
Ein Mythos ? », Psychologie heute, avril 1988.
71. Roeck (B.), Lebenswelt und Kultur des Bürgertums in der frühen Neuzeit, Munich, Oldenbourg,
1991, p. 103 ; également Rehberg (K.-S.), « Mythenjäger unter sich. Zur Elias-Duerr-Debatte »,
Psychologie heute, décembre 1991 ; Rühle (E.), « Versuchte Entzauberung eines Mythos »,
Esslinger Zeitung, 1er juin 1989.
72. Par exemple Anders (K.), « Fortgeschrittener Humanismus oder humanistischer
Fortschritt ? », art. cité.
73. Cf. Klages (H.), Geschichte der Soziologie (Grundfragen der Soziologie 3), Munich, Beck, 1969 qui
classe la théorie d'Elias parmi les « néo-évolutionnismes de type continental ».
Le procès fait au Procès de civilisation 175
74. Elias (N.), « Was ich unter Zivilisation verstehe. . . », art. cité.
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75. « "We have not learnt to control nature and ourselves enough" : An interview with Norbert
Elias by Aafke Steenhuis », De Groene Amsterdammer, 16 mai 1984.
76. PZ II, p. 346.
77. Elias (N.), « Die Genese des Sports als soziologisches Problem », in Elias (N.), Dunning (E.),
Sport im Zivilisationsprozess, Münster, Lit, 1984, p. 33 (traduction française : Sport et civilisation : la
violence maîtrisée, Paris, Fayard, 1994).
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Un livre inclus dans son objet : Le Procès de civilisation comme élément du procès
de civilisation
80. Cf. Elias (N.), Über die Einsamkeit der Sterbenden in unseren Tagen, Francfort/Main, Suhrkamp,
1982 (traduction française : La solitude des mourants, Paris, Bourgois, 1987).
81. Cf. Elias (N.), Studien über die Deutschen, op. cit.
Le procès fait au Procès de civilisation 179
84. Elias (N.), Studien über die Deutschen, op. cit., p. 45-46.
Le procès fait au Procès de civilisation 181
85. Pour une introduction aux études de la « science en train de se faire », nous renvoyons à
Latour (B.), La science en action, Paris, Gallimard, 1995.