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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

DEUXIEME PARTIE : ORGANISATION ET SEPARATION


DES POUVOIRS DANS LA BELGIQUE FEDERALE

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

COURS 9

TITRE 1ER : LES INSTITUTIONS FEDERALES

CHAPITRE I - LE POUVOIR LEGISLATIF

Aux termes de l’article 36 de la Constitution, le pouvoir législatif fédéral comprend trois branches : le
Roi, la Chambre des représentants et le Sénat1. L’action conjointe de ces trois branches permets
l’adoption de normes législatives, de lois.

Le Sénat, désormais, a un rôle assez réduit dans la procédure d’adoption des lois car la majorité des lois
est adoptée par la chambre des représentants, au parlement seul, sans intervention du Sénat.

La Constitution prévoit ainsi l’institution d’un parlement bicaméral, c’est-à-dire d’un parlementdivisé
en deux assemblées représentatives, indépendantes l’une de l’autre.

Chambre basse : chambre des représentants directement élus.

Chambre haute : le Sénat. Son rôle est plutôt de permettre aux différentes entités fédérées qui
composent la Belgique fédérale, de participer à la prise de décision au niveau national (un peu à
l’instar du Sénat américain (logique de participation). A l’origine, le fait que des représentants des
communautés et des régions fassent partie du Sénat, cela a été instauré en 1993 et a été accru lors
de la sixième réforme de l’état en 2014. A l’origine, le rôle du Sénat c’est plutôt de jouer le rôle d’une
chambre plus conservatrice qui ferait contrepoids aux excès de la chambre basse. (Avec des
personnes plus âgées, plus riches) modèle de la house of lords

À l’origine, l’existence des secondes chambres s’expliquait principalement par la volonté de créer un
contrepoids à la première chambre, élue directement par les citoyens. La chambre haute devait
permettre à l’aristocratie de se défendre contre les excès dont pourrait se rendre coupable une chambre
populaire disposant d’une légitimité démocratique.

Toutefois l’émergence du fait démocratique ne coïncida pas toujours avec la disparition de la seconde
chambre : soit celle-ci a vu ses pouvoirs se restreindre considérablement ,à l’image de la Chambre des
Lords britannique, soit elle a entamé, comme en Belgique,un processus de démocratisation. Mais, dans
ce cas, cette seconde assemblée perd généralement toute spécificité : elle est composée plus ou moins
de la même manière que la première chambre et se voit reconnaître des attributions le plus souvent
identiques. Le bicaméralisme est alors « indifférencié » et perd pratiquement tout son intérêt.

Si dans les États unitaires, l’utilité du bicaméralisme a, en conséquence, souvent été remise en cause, tel
n’est assurément pas le cas dans les États fédéraux où, comme on l’a vu plus haut, la seconde chambre
permet d’assurer une représentation des États fédérés (États, Cantons, Provinces ou Länder) et de les
faire participer aux décisions de l’État composé à côté de l’autre assemblée représentative de la
collectivité nationale, conformément à la loi de participation inhérente à tout État fédéral. En effet, dans
un État fédéral, il ne suffit pas d’assurer une représentation démocratique de tous les citoyens, encore

1 On n’examinera ici que les règles relatives aux assemblées. En effet, celles qui concernent le Roi seront examinées au chapitre
II. Il y sera seulement fait mention lorsque le Roi intervient directement dans l’exercice du pouvoir législatif.

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faut-il sauvegarder les intérêts de toutes les composantes de l’État, et en particulier des plus petites
d’entre elles dont la voix se fait plus difficilement entendre dans la première chambre. Une seconde
chambre, dont la composition et les attributions sont adaptées aux exigences du fédéralisme, constitue
le moyen idéal pour réaliser cet objectif2.

SECTION 1 : LA COMPOSITION DU PARLEMENT

§ 1er. La composition de la Chambre des représentants

Composition

Suivant l’article 63 de la Constitution, la Chambre des représentants compte 150 membres3,


tous élus directement dans un certain nombre de circonscriptions dans le cadre d’un scrutin de liste
caractérisé par la représentation proportionnelle. La taille des circonscriptions correspond à celle des
provinces, sous la réserve des « modalités spéciales » prévues par la loi dans l’ancienne province du
Brabant « aux fins de garantir les intérêts légitimes des néerlandophones et des francophones » (article
63, § 4, de la Constitution) ; c’est ce qui a permis de prévoir dans le Code électoral la possibilité pour les
électeurs des six communes à facilités autour de la région bilingue de Bruxelles- Capitale, situées en
Brabant flamand, de voter, s’ils le souhaitent, pour des listes se présentant dans la circonscription de
Bruxelles.

= élection au suffrage universel directe. Ces députés sont élus au sein de circonscriptions électorales mais
représentent la nation.

Condition d’éligibilité

L’article 64 de la Constitution énumère limitativement les conditions d’éligibilité pour pouvoir être élu
comme député : il faut être belge, jouir des droits civils et politiques, avoir atteint l’âge de 18 ans et avoir
son domicile en Belgique.

La répartition des sièges entre circonscriptions électorales et le diviseur fédéral


En vue de l’élection des députés, le territoire national est découpé par la loi en plusieurs circonscriptions
électorales, chacune de ces circonscriptions comptant autant de sièges que le chiffre de sa population
contient de fois le diviseur fédéral. Celui-ci correspond au nombre total de citoyens du Royaume
(11.044.712 selon un arrêté royal du 19 novembre 2012) divisé par le nombre de sièges à pourvoir
(150), soit + 73.600.

On attribue ainsi à chaque circonscription autant de sièges que le chiffre de sa population contient de
fois ce nombre de 73.600 : une circonscription de 736.000 habitants reçoit 10 députés. Du fait de
l’existence de restes, cette première opération ne permet pas d’attribuer tous les sièges. On classe
ensuite les arrondissements dans l’ordre décroissant des restes que l’opération précédente a laissés, et
qui représentent les excédents de population non encore représentés. Les sièges restant à attribuer
reviennent aux circonscriptions classées en ordre utile.

Le découpage des circonscriptions électorales est une compétence réservée par la Constitution à la loi,

2 Dans les États fédéraux, une des assemblées (la Chambre des représentants aux États-Unis, le Bundestag en Allemagne ou le
Conseil national en Suisse) est élue au suffrage universel par l’ensemble de la population et est représentative de la volonté
nationale. L’autre assemblée (le Sénat aux États-Unis, le Bundesrat en Allemagne ou le Conseil des États en Suisse) est composée
de membres qui assurent au niveau fédéral une représentation des entités fédérées en tant que telles.
3 Avant la révision constitutionnelle de 1993, leur nombre était de 212

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de telle manière que le Gouvernement ne peut pas à lui seul fixer leurs limites en fonction de ses intérêts.
= (les limites des circonscriptions électorales sont fixées par la Loi pour éviter une manipulation du
gouvernement). N.B. Le gouvernement prend ses décisions de manière non publique, contrairement au
parlement.

Au sein des circonscriptions, l’attribution des sièges se fait selon la clé dite « Dhont »,du nom du
professeur à l’Université de Gand de la seconde moitié du XIX e siècle, juriste et mathématicien, qui
conçut le système. Ce mécanisme est exposé ci-après à l’aide d’un exemple, qui concerne une
circonscription offrant six sièges4.

En premier lieu, on doit déterminer combien de députés font partie de chaque circonscription électorale.
On prend le nombre total des citoyens du royaume, qu’on va diviser par 150 à savoir le nombre de député
à élira. On appelle le résultat de cette opération un diviseur fédéral. Cela donne environ 73 600 citoyens
belges pour avoir un siège à la chambre des représentants.

Avec ce chiffre, on va regarder le nombre de fois que chacun des circonscriptions électorales comprends ce
nombre de 73 600. A Bruxelles, on a environ 1 million 100 milles citoyens, cela veut dire qu’on va regarder
combien de fois il y a 73 600 dans 1,1 million. Cela permet de définir le nombre de siège qui seront attribués
à la circonscription de Bruxelles.

Après cette opération, il va rester des sièges non attribués, puisque la population des circonscriptions
électorales n’est pas un multiple de 73600, donc il y a des restes, donc on attribue les sièges restants aux
circonscriptions qui ont le plus grand reste, de manière successive.

On va donc déterminer le nombre de sièges qui sont à pourvoir pour chaque circonscription électorale le
jour de l’élection.

Pour l’élection, on va avoir plusieurs sièges à pourvoir, et un scrutin de liste, puisque tous les partis vont
présenter plusieurs candidats à l’élection, typiquement ils vont présenter autant de candidats qu’il y a de
siège à pourvoir dans une circonscription électorale.

Ici, la circonscription électorale de Bruxelles capitale a


15 sièges. Chaque parti a donc proposé 15 candidats. Ils
vont par ailleurs présenter des candidats suppléants,
ces suppléants ne sont pas à première vue appelé à
siéger de manière effective au sein de la chambre des
représentants, mais ils vont siéger dans le cas où un
député ne peut plus poursuivre son mandat.

Il convient d’abord d’attribuer les sièges aux différentes listes qui se présentent ausuffrage. Chaque
liste présente au maximum autant de candidats qu’il y a de sièges à pourvoir.

Le vote des électeurs

Les électeurs votent soit en case de tête, soit en case de tête et pour un ou plusieurs candidats d’une
liste, soit pour un ou plusieurs candidats d’une liste. Le panachage des votes parmi plusieurs listes rend
le vote nul.

4Cet exemple est tiré de l’ouvrage de M. UYTTENDAELE, Précis de droit constitutionnel belge, Bruxelles,Bruylant, 2005,
pp. 230 et 231

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Pour l’attribution des sièges par liste, on totalise les suffrages attribués à chaque liste. Il va de soi que, si
une liste reçoit plusieurs suffrages (par exemple pour la case de tête et pour un candidat ou pour trois
candidats), on ne comptabilise qu’un vote pour cette liste.

L’attribution des sièges entre les listes

1. Calcul du chiffre électoral de chaque liste

Le total des voix reçues par chaque liste constitue leur chiffre électoral obtenue par chaque liste qui s’est
présenté à l’élection.
Par exemple, au sein d’une circonscription comptant six sièges, les 550.000 voix de ses électeurs se
répartissent comme suit entre les quatre listes qui se présentent :

- Liste A : 210.000 voix ;


- Liste B : 160.000 voix ;
- Liste C : 120.000 voix ;
- Liste D : 60.000 voix.
2. Vérification du seuil électoral

Seules sont retenues pour l’éventuelle distribution des sièges les listes ayant obtenu au moins 5 % du
total général des votes valablement exprimés dans la circonscription (seuil électoral). Dans notre
exemple, il fallait avoir au moins (550.000 x 5 % =) 27.500 voix, ce qui est le cas pour chacune des
listes candidates. Ici pas de problème en termes de seuil électoral, donc toutes les listes sont éligibles
pour obtenir des sièges après l’élection.

3. Calcul des quotients électoraux

Un tableau est ensuite établi, qui divise successivement les chiffres électoraux des listes ainsi retenues
par 1, 2, 3, 4, etc., pour établir des quotients électoraux (clé Donth)

Liste A Liste B Liste C Liste D

210.000 160.000 120.000 60.000

105.000 80.000 60.000 30.000

70.000 53.333 40.000 20.000

Les six meilleurs quotients attribuent les sièges aux listes concernées : 210.000 (A),160.000 (B), 120.000
(C), 105.000 (A), 80.000 (B) et 70.000 (A). Ce dernier quotient est aussi appelé le diviseur électoral.

4. Résultats

Il en résulte que la liste A reçoit trois sièges, la liste B deux et la liste C un. La liste D n’en obtient aucun.

L’attribution des sièges au sein des listes

1. Calcul du chiffre d’éligibilité

L’étape suivante est l’attribution des sièges au sein de chaque liste.

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Pour cela, au sein de chaque liste, on divise son chiffre électoral (c’est-à-dire le total des votes obtenus
par la liste) par un chiffre calculé en ajoutant le chiffre 1 au nombre de sièges obtenus.

Par exemple, pour la liste A, qui a obtenu trois sièges, on divise son chiffre électoral de 210.000 par
(3+1 =) 4, ce qui donne le chiffre 52.500. Ce dernier chiffre est appelé le chiffre d’éligibilité.

Toujours dans le cadre de notre exemple, imaginons que les 210.000 voix de la liste A sesont répartis
comme suit parmi ses six candidats (résultat le jour de l’élection) :
• Case de tête : 90.000

• Candidat n° 1 : Julien : 47.000

• Candidat n° 2 : Noa : 22.000

• Candidat n° 3 : Sami : 1.000

• Candidat n° 4 : Dominique : 8.000

• Candidat n° 5 : Sarah : 2.000

• Candidat n° 6 : Éric : 40.000.

Effet dévolutif de la case de tête

Les votes en case de tête sont dévolus aux candidats de la liste dans leur ordre de présentation (on
estime que le citoyen marque son accord pour cet ordre, cela permet au parti de faire élire des candidats
peut-être moins connus, ce sont les partis qui décident de l’ordre) et dans les limites de ce dont ils ont
besoin pour atteindre le chiffre d’éligibilité et obtenir donc un siège, ce bien entendu à concurrence du
nombre de sièges obtenus. C’est ce que l’on appelle l’effet dévolutif de la case de tête. Cet effet dévolutif
est réduit de moitié.

Dans notre exemple, (90.000 / 2 =) 45.000 voix exprimés en tête de liste sont dévolues aux candidats de
la liste dans l’ordre de celle-ci.

Chaque candidat doit donc atteindre le chiffre d’éligibilité (fixé à 52.500 dans l’exemple, ainsi qu’il a été
montré ci-avant) avec l’aide, si nécessaire, des voix exprimées en tête de liste, à concurrence de la moitié
de celles-ci.

Cela donne ceci :

• Julien (n° 1) : 47.000 + 5.500 (issus de la case de tête) = 52.500 [il reste (45.000-5.500=) 39.500
de la case de tête] ;

• Noa (n° 2) : 22.000 + 30.500 (case de tête) = 52.500 [il reste (39.500-30.500=) 9.000 dela case de
tête]

• Sami (n° 3) : 1.000 + 9.000 (le solde la case de tête) = 10.000 (il ne reste plus de votes de la case
de tête).

L’ordre des voix obtenus par les candidats de la liste A avec l’aide de l’effet dévolutif dela case de tête
pour moitié s’établit en conséquence comme suit :

1. Julien (n° 1) : 52.500 voix ;

2. Noa (n° 2) : 52.500 voix ;

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3. Éric (n° 6) : 40.000 voix ;

4. Sami (n° 3) : 10.000 voix ;

5. Dominique (n° 4) : 8.000 voix ;

6. Sarah (n° 5) : 2.000 voix.

En conséquence, ce sont Julien, Noa et Éric qui sont les trois premiers classés et qui sont les trois élus de
la liste A.

Un mécanisme comparable est mis en œuvre pour l’élection des suppléants, que chaque liste peut
également présenter et qui, dans l’ordre de leur élection, peuvent remplacer les effectifs en cas
d’incompatibilité (par exemple s’ils deviennent ministres), de démission ou de décès de ceux-ci.

§ 2. La composition du Sénat

Le Sénat a connu une profonde mutation à l’issue de la révision constitutionnelle du6 janvier 2014
(sixième réforme de l’État), afin de le transformer en une réelle « chambre des entités fédérées »,
composée essentiellement de représentants desparlements des communautés et des régions.

Auparavant, il mêlait des élus directs par la population, des élus par les trois parlements des
Communautés, des cooptés, ainsi que des sénateurs de droit qui étaient les enfants du Roi ou, à défaut
d’enfants, les princes et princesses de la branche de la famille royale appelée à régner.

Depuis la réforme du Sénat intervenue en 2014, la seconde chambre compte, selon l’article 67 de la
Constitution, 60 sénateurs, qui se répartissent comme suit :

1°) 50 sont élus par les divers parlements des communautés et des régions (de telle manière qu’ils
exercent un double mandat, l’un au sein de leur Parlement communautaire ou régional et l’autre au
Sénat) :

• 29 sont désignés par le Parlement flamand en son sein ou au sein du groupe linguistique
néerlandais du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale

• 10 sont désignés par le Parlement de la Communauté française en son sein

• 8 sont désignés par le Parlement de la Région wallonne en son sein

• 2 sont désignés par le groupe linguistique français du Parlement de la Région deBruxelles-Capitale


en son sein ;

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• 1 est désigné par le Parlement de la Communauté germanophone, en son sein.

50 sénateurs qui viennent des communautés et des régions

2°) À ces 50 élus, viennent s’ajouter 10 sénateurs cooptés, dont 6 Flamands désignés par les 29 sénateurs
élus par le Parlement flamand et 4 Francophones désignés par les 20 sénateurs élus par les Parlements
de la Communauté française et de la Région wallonne et par le groupe linguistique français du Parlement
de la Région de Bruxelles-Capitale, comme exposé ci-dessus.

Controverse : institution des sénateurs cooptés


L’institution des sénateurs cooptés date de 1921. Le but poursuivi était de faire appel à des
personnalités étrangères au monde politique qui seraient introduites au Parlement uniquement en
raison de leurs qualités personnelles et de leur expérience. Le but est donc de diversifié les expertises,
même par les personnes qui ne sont pas nécessairement populaires. En pratique, l’élection des
sénateurs cooptés n’atteint pas cet objectif. (Il sert souvent à repêcher les non-élus) Les intéressés
sont presque toujours des hommes ou des femmes politiques qui, pour une raison ou pour une autre, ne
se sont pas présentés aux élections ou, pire, n’ont pas été élus à l’occasion de celle-ci et pour qui la
cooptation devient ainsi un « repêchage ».

La présence d’élus bruxellois est assurée par le fait que, outre les deux élus provenant du groupe
linguistique français du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, au moins un des sénateurs élus
par le Parlement flamand doit être domicilié, le jour de l’élection, dans la Région de Bruxelles-Capitale
et au moins trois des sénateurs élus parle Parlement de la Communauté française sont membres du
groupe linguistique français du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale.

Enfin, il a été ajouté, depuis 2014, que le Sénat ne peut pas compter plus de deux tiers de membres du
même genre.

Non-représentation du modèle de l’État fédéral

= caractéristique de l’état fédéral : communautés et régions à côté des citoyens Belges. La chambre basse
permet d’assurer la représentation des citoyens en tant que tels, alors que la chambre haute permet
d’assurer la représentation des collectivités politiques des entités fédérées en tant que telles. Au niveau
de la chambre basse c’est logique que la représentation soit faite sur une base purement
démographique. Au niveau de la chambre haute, la logique est différente, puisqu’il s’agit de représenter
la diversité politiques des entités fédérées.

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Il ressort de ces développements que la composition du Sénat ne correspond pas au modèle de l’État
fédéral. Elle se caractérise en effet par une logique essentiellement proportionnelle marquée par un
ravalement de la petite communauté germanophone et de la Région de Bruxelles-Capitale, qui ne
disposent d’aucune surreprésentation. Les Bruxellois ne doivent en réalité leur représentation – limitée
à la portion congrue – au sein de la seconde chambre qu’à leur appartenance respective aux deux
grandes communautés de ce pays et ne peuvent même pas former un groupe en tant que tel puisqu’ils
sont éparpillés entre des élus du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale (deux seulement), du
Parlement de la Communauté française (trois) et du Parlement flamand (un). Le système ainsi mis en
place aboutit à une représentation proportionnelle pure et simple des populations bruxelloise (soit un
dixième de l’ensemble) et germanophone (dont les 0,6 % correspondent à son unique élu si l’on fait
passer, comme il est d’usage en ce cas, la fraction à l’unité supérieure), c’est-à-direprécisément des plus
petites entités fédérées dont les intérêts auraient dû trouver une protection renforcée au sein du
nouveau Sénat si celui-ci avait été conçu comme une réelle chambre fédérale. À défaut de
surreprésentation de ces entités, le Sénat ne pourra pas prétendre à ce rôle5.

Les plus petites communautés en Belgique : la région germanophone et la région Bruxelles-capitale. Or,
les germanophones ont 1 sénateur et les bruxellois ont au total 6 sénateurs. (10% des sièges sénatoriaux
qui sont occupés par des bruxellois) quelque chose qui correspond au poids démographique de
Bruxelles à l’échelle du pays pas de surreprésentation. Et donc nous ne sommes pas dans une logique
de l’état fédéral qui est d’assurer une représentation propre des entités fédérées. La région de Bruxelles
capitale n’est en plus pas représentée en tant que telles.

Nous avons fortement diminué le rôle du Sénat dans la prise de décision au niveau législatif. C’est devenu
une chambre bien plus faible, et bien moins importante que la chambre des représentants.

SECTION 2 : LES SUBDIVISIONS DE DEUX CHAMBRES

§ 1er. Les groupes linguistiques

Composition

L’existence des groupes linguistiques au sein de chacune des deux chambres du Parlement fédéral est
consacrée par l’article 43 de la Constitution. L’appartenance des parlementaires à un groupe linguistique
est déterminée différemment pour les députés et les sénateurs :

En ce qui concerne les députés, tous ceux qui sont élus dans la région de langue française
appartiennent automatiquement au groupe linguistique français de leur assemblée et tous les
parlementaires élus dans la région de langue néerlandaise appartiennent au groupe linguistique
néerlandais de leur assemblée. Pour les députés élus dans l’arrondissement de Bruxelles, le groupe
linguistique est déterminé par la langue qu’ils ont utilisée pour leur prestation de serment (voy. La
loi du 3 juillet 1971 relative à la répartition des membres des Chambres législatives en groupes
linguistiqueset portant diverses dispositions relatives aux conseils culturels pour la communauté
culturelle française et pour la communauté culturelle néerlandaise).

5 L’étude du droit comparé est symptomatique à cet égard : dans tous les États fédéraux dignes de ce nom, les entités fédérées
sont représentées dans la seconde chambre sur un pied d’égalité, soit absolue (à l’image des États-Unis, de la Suisse ou de
l’Australie), soit relative (comme en Allemagne) par le recours à des techniques de pondération prenant en compte, dans une
certaine mesure, le chiffre de population de ces entités. Le nombre de représentants par entité n’est jamais, en tout cas,
purement et simplement proportionnel à sa population : une telle représentation, qui serait exactement similaire à celle de la
première chambre, serait tout à fait incompatible avec le concept d’une « Chambre des États » censée représenter les entités
fédérées en tant que telles.

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Quant aux députés germanophones élus au suffrage universel direct, ils appartiennent
Ipso facto au groupe linguistique français de la Chambre.

En ce qui concerne les règles relatives au Sénat, on constatera que les règles qui déterminent la
composition de l’assemblée permettent de déterminer l’appartenance de chaque sénateur à un
groupe linguistique déterminé : ils sont tous identifiés, soit par l’assemblée (sénateurs élus par les
Parlements communautaires et régionaux) ou la partie d’assemblée qui les a élus (sénateurs
cooptés). Quant au membre élu par le Parlement de la Communauté germanophone, il est exclu de
la division du Sénat en groupes linguistiques.

Force est de constater que, sur ce plan aussi, la réforme du Sénat de 2014 n’a en rien innové. Le
Constituant s’est en effet contenté, dans la logique des réformes institutionnelles antérieures, de retenir
les deux groupes linguistiques issus de la première réforme de l’État en 1970. Dès lors, les vices affectant
la représentation des différentes entités se retrouve dans les règles de délibération de l’assemblée.
Seule la minorité francophone se trouve protégée, comme telle, par le biais des majorités spéciales,
desquelles les élus bruxellois et l’unique sénateur germanophone sont, étant donné leur taille, exclus. Il
est significatif que la voix du sénateur germanophone – lequeln’appartient à aucun des deux groupes
linguistiques – n’est pas prise en compte pour le calcul des majorités spéciales à l’intérieur des groupes
linguistiques au sein du Sénat. La troisième communauté se voit ainsi exclue du seul système de
protection institué par la Constitution.

Fonctions

Les groupes linguistiques n’ont aucun pouvoir autonome. Leur intervention estpurement procédurale
dans les seuls cas prévus par la Constitution ou la loi. Les principaux cas de figure sont les suivants :

(1) L’adoption des lois à majorité spéciale, c’est-à-dire celles qui nécessitent, outre une majorité
des 2/3 parmi l’ensemble des membres présents de l’assemblée, un quorum majoritaire et un
vote majoritaire dans chaque groupe linguistique (article 4 de la Constitution) ;

(2) La procédure dite de la « sonnette d’alarme » visant à prévenir les atteintes aux bonnes
relations entre les communautés et nécessitant une motion signée par les 3/4 des membres d’un
groupe linguistique (article 54 de la Constitution) ; protection de la minorité francophone au
niveau fédéral.

(3) L’exigence de l’accord d’un tiers de chaque groupe linguistique du Sénat pour que, outre la
majorité de ses membres au total (à savoir au moins 31 sénateurs), un projet de loi adopté par
la Chambre dans des matières institutionnelles importantes (à savoir celles mentionnées à
l’article 78, § 1er, de la Constitution) soit évoqué par lui (article 78, § 2, de la Constitution) ;

(4) Le renvoi d’une proposition de loi pour avis à la section de législation du Conseil d’État,
qui doit intervenir lorsque la majorité d’un groupe linguistique le demande (article 2 des lois sur
le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973) ;

(5) L’adoption des résolutions de la Chambre des représentants annulant une ordonnance de
la Région de Bruxelles-Capitale, dans les cas limités ou une telle possibilité lui est offerte, qui
nécessite une majorité dans chaque groupe linguistique (article 45 de la loi spéciale du 12
janvier 1989 relative aux Institutions bruxelloises). (Jamais été mis en œuvre)

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§ 2. Les groupes politiques

Les groupes politiques sont composés de députés et de sénateurs appartenant à un même parti
politique. (Ils siègent d’ailleurs ensemble à l’assemblée) Reconnus par les règlements des chambres, les
groupes politiques jouent un rôle fondamental dans l’organisation du travail parlementaire. Dans le
fonctionnement au quotidien de l’assemblée, les groupes politiques sont reconnus et ont une série de
privilèges. C’est une manière pour les gens qui partagent les mêmes convictions de se structurer, de
s’assembler, et de rendre plus élevé les débats publics. Cependant, dans le contexte belge, ce qui est
souvent dénoncé c’est le rôle démesuré des partis politiques.

Paradoxe Les partis politiques ne sont, pour leur part, pas reconnus par la Constitution belge. Il n’en
reste pas moins que leur importance pour le bon fonctionnement de la démocratie est indéniable. Il a
notamment été mis en évidence par la Cour européenne des droits de l’homme, dans les termes
suivants6 :

« Α) La démocratie et les partis politiques dans le système de la Convention

[…] 87. La Cour a aussi confirmé à plusieurs reprises le rôle primordial que jouent les partis politiques
dans un régime démocratique en bénéficiant des libertés et droits reconnus par l’article 11 ainsi que par
l’article 10 de la Convention.

Toujours dans l’arrêt Parti communiste unifié de Turquie et autres, elle a indiqué qu’elle attachait du
poids, plus encore qu’au libellé de l’article 11, au fait que les partis politiques représentaient une forme
d’association essentielle au bon fonctionnement de la démocratie (arrêt précité, [...], § 25). Eu égard en
effet au rôle des partis politiques, toute mesure prise à leur encontre affecte à la fois la liberté
d’association et, partant, l’état de la démocratie dans le pays dont il s’agit (ibidem, [...], § 31).

Du fait de leur rôle, les partis politiques, seules formations à même d’accéder au pouvoir, ont en outre la
faculté d’exercer une influence sur l’ensemble du régime de leur pays. Parleurs projets de modèle global
de société qu’ils proposent aux électeurs et par leur capacité de réaliser ces projets une fois arrivés au
pouvoir, les partis politiques se distinguent des autres organisations intervenant dans le domaine
politique.

88. Par ailleurs, la Cour a déjà noté que la protection des opinions et de la liberté de les exprimer au
sens de l’article 10 de la Convention constitue l’un des objectifs de la liberté de réunion et d’association
consacrée par l’article 11. Il en va d’autant plus ainsi dans le cas de partis politiques, eu égard à leur
rôle essentiel pour le maintien du pluralisme etle bon fonctionnement de la démocratie (arrêt Parti
communiste unifié de Turquie et autres précité, [...], §§ 42 et 43).

89. Selon la Cour, il n’est pas de démocratie sans pluralisme. C’est pourquoi la liberté d’expression
consacrée par l’article 10 vaut, sous réserve du paragraphe 2, non seulement pour les ‘informations’ ou
‘idées’ accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles
qui heurtent, choquent ou inquiètent (voir, parmi beaucoup d’autres, les arrêts Handyside c. Royaume-
Uni du 7 décembre 1976, [...], § 49, et Jersild c. Danemark du 23 septembre 1994, [...], § 37). En tant que
leurs activités participent d’un exercice collectif de la liberté d’expression, les partis politiques peuvent
aussi prétendre à la protection de l’article 10 de la Convention (arrêt Parti communiste unifié de Turquie
et autres précité, [...], § 43) ».

6 Cour eur. D.H., Gde Ch., arrêt Refah Partisi (Parti de la prospérité) et autres c. Turquie, 13 février 2003.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

§ 3. Les commissions

Les députés et les sénateurs siègent en groupe plus restreint, qu’on appelle les commissions. Les
commissions sont investies d’une mission essentielle dans la préparation du travail législatif des
séances plénières des chambres, ainsi que du contrôle de l’activité gouvernementale. Il s’agit de
formations restreintes, composées sur la base d’une représentation proportionnelle des différents
groupes politiques de l’assemblée. Chaquecommission a des attributions qui correspondent à ceux d’un
département ministériel (commission de la Justice, de la Défense, de l’Intérieur, des Affaires
économiques, etc.). Elles regroupent, en règle, des parlementaires spécialistes de la matière. L’essentiel
du travail parlementaire a donc lieu en commission.

SECTION 3 : LE STATUT DU PARLEMENTAIRE

§ 1er. Les incompatibilités parlementaires

Les incompatibilités ne doivent pas être confondues avec les conditions d’éligibilité. L’incompatibilité
ne crée pas d’obstacle à l’élection du parlementaire, mais lui interdit d’exercer son mandat tout en
continuant l’activité avec laquelle l’exercice de ce mandat est incompatible. Le parlementaire qui se
trouve dans une situation d’incompatibilité doit dès lors choisir entre sa fonction parlementaire et son
autre activité. La Constitution et les lois spéciales de réforme institutionnelle prévoient les
incompatibilités suivantes :

Cumuler des fonctions : L’interdiction de cumuler les mandats de sénateur et de député ou les
mandats de député ou de sénateur coopté et de membre d’une assemblée régionale ou
communautaire ou du Parlement européen

Ministre : Lorsqu’un membre de l’une des deux chambres est nommé par le Roi en qualité de
ministre et qu’il l’accepte ou s’il devient ministre régional ou communautaire, il cesse
immédiatement de siéger et ne reprend ses fonctions qu’après avoir été démis de ses fonctions de
ministre ;

Rémunéré par le gouvernement : les parlementaires qui sont nommés par le Gouvernement à une
fonction rémunérée ont l’obligation de démissionner. Cette règle vise à assurer l’indépendance du
parlementaire à l’égard du Gouvernement, dans la mesure où celui-ci pourrait être tenté d’assurer
le soutien d’un parlementaire en lui offrant une nomination. Le parlement contrôle le gouvernement,
or, si vous êtes payés par le gouvernement, le gouvernement a un moyen d’action à votre égard

Fonctionnaires : Par ailleurs, et pour la même raison, une loi du 6 août 1931 interdit aux agents de
l’État d’être parlementaires. Cette incompatibilité se fonde sur la volonté d’éviter que l’organe de
contrôle (l’assemblée) ou un des membres de celui-ci soient sujets à des pressions de l’organe
contrôlé (exécutif) qui exerce un pouvoir hiérarchique sur les agents de l’État. D’autres lois
établissent d’autres incompatibilités encore.

§ 2. Les indemnités parlementaires

Avant la révision de 1920, les députés ne touchaient qu’une petite indemnité pour frais de déplacement
et les sénateurs n’avaient droit à aucune indemnité. C’était dans lalogique du système censitaire où seuls
des gens fortunés pouvaient être élus. En 1920, la Constitution a accordé à chaque député une indemnité
de 12.000 francs. Celle-ci a été à plusieurs reprises réajustée et compte, à l’heure actuelle, 7.230,92 euros

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

bruts par mois, sans préjudice de l’indemnité forfaitaire pour frais exposés et d’autres avantages et
indemnités liés à l’exercice de la fonction.

Les sénateurs ont droit, en vertu de l’article 71 de la Constitution, à une indemnité pour les frais qu’ils
ont exposés. En pratique, celle-ci est fixée au même niveau que l’indemnité de député et est soumise au
même régime.

§ 3. Les immunités parlementaires

Avant, les parlementaires n’étaient pas du tout rémunérés. La revendication de rémunération vient de
la gauche pour permettre à tout le monde d’exercer ce type de fonction. Ceci est à prendre en compte
lorsqu’on considère le salaire des parlementaires. Deuxièmement, si on rémunère moins bien les gens,
il y a plus de risques de corruption. Mais si on les rémunère trop bien, on augmente la déconnexion par
rapport à la population.

Les articles 58 et 59 de la Constitution établissent deux règles destinées à garantir l’indépendance du


parlementaire :

1° L’irresponsabilité parlementaire

Il s’agit, tout d’abord, de l’irresponsabilité parlementaire. L’article 58 interdit tout acte de poursuite
judiciaire et de recherche à raison des opinions et des votes émis par un parlementaire dans l’exercice
de ses fonctions. Cela ne vaut que pour les discussions au parlement ! Si un parlementaire tient une
conférence de presse, alors il sera responsable de ses propos.

La Constitution ne vise que les « opinions et votes », mais il faut y assimiler les prises de position
politiques qui font partie de l’activité normale du parlementaire (opinion émise dans une proposition
de loi, au cours d’une séance en commission, dans une question, etc.). Les propos tenus en d’autres
circonstances, notamment dans des meetings, réunions ou congrès politiques, échappent en principe à
cette irresponsabilité.

Ceci confère une protection absolue à la liberté d’expression du parlementaire.

Même si les standards jurisprudentiels de la Cour européenne des droits de l’homme ne vont pas aussi
loin, ces derniers se situent également dans le cadre d’une large protection de cette liberté pour ces
mandataires. Ainsi, par exemple, la Cour européennedes droits de l’homme a-t-elle jugé ce qui suit7 :

« 138. Il ne fait aucun doute que tout propos tenu dans l’enceinte parlementaire appelle un haut degré
de protection. Dans une société démocratique, le Parlement est un lieu unique de débat qui revêt une
importance fondamentale. La règle de l’immunité parlementaire, notamment, atteste ce haut degré de
protection. La Cour a déjà reconnu que le fait que les États accordent généralement une immunité plus
ou moins étendue aux parlementaires constitue une pratique de longue date qui vise les buts légitimes
que sont la protection de la liberté d’expression au Parlement et le maintien de la séparation des
pouvoirs législatif et judiciaire. Sous ses différentes formes, l’immunité parlementaire peut en effet
servir à protéger un régime politique véritablement démocratique, qui est la pierre angulaire du
système de la Convention, dans la mesure notamment où elle tend à protéger l’autonomie du législateur
et l’opposition parlementaire ».

7 Cour eur. D.H., Gde Ch., Karacsony e.a. c. Hongrie, 17 mai 2016

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

2° L’inviolabilité personnelle

L’inviolabilité personnelle (article 59 de la Constitution) résulte de la nécessité de trouver un équilibre


entre, d’une part, l’indépendance des assemblées législatives par rapport aux pouvoirs exécutif et
judiciaire et, d’autre part, la soumission des parlementaires au droit pénal. Il convient également d’éviter
de donner l’impression d’une impunité de fait qui serait reconnue aux parlementaires pour leurs actes
éventuellement délictueux par un régime trop rigide.

Dans le régime actuel, l’inviolabilité personnelle du parlementaire interdit, de manière générale,


pendant la durée de la session, d’arrêter un parlementaire, de le renvoyer ou de le citer devant une
juridiction pénale, sauf en cas de flagrant délit ou moyennant l’autorisation expresse de la
chambre dont il fait partie. Le but de cette disposition est d’éviter qu’au cours de la session
parlementaire, l’activité des députés et sénateurs soit entravée par des poursuites judiciaires
déclenchées, soit par un particulier, soit par le ministère public, éventuellement sur injonction du
Gouvernement. La protection dont bénéficie le parlementaire vise donc à assurer le bon déroulement
des travaux parlementaires. En tant que telle, elle n’est pas, du moins pas directement, axée sur la
protection de la personne du parlementaire.

/!\ dans le cas d’un flagrant délit, le risque arbitraire ou les motifs politiques sont moindres dès lors que la
personne est prise sur le fait accompli ! c’est pour cela que le constituant ne prévoit pas l’intervention de
l’assemblée dans ce cas-là.

Mesures contraignantes

Toujours sous la réserve du cas de flagrant délit, des mesures contraignantes (autresque l’arrestation
ou le renvoi devant une juridiction pénale) ne peuvent être ordonnéesàl’égard d’un parlementaire que
par le Premier Président de la Cour d’appel sur demande du juge compétent. Par mesures
contraignantes, on entend toutes mesures pour lesquelles l’ordre d’un juge est nécessaire et par
lesquelles, sans l’autorisation de l’intéressé, il est porté atteinte à ses droits et libertés personnels. Il
s’agit, notamment, des mandats d’amener, des perquisitions, des saisies, ou des écoutes téléphoniques.

En outre, les perquisitions et les saisies, autorisées par le Premier Président de la Cour d’appel, devront
toujours être accomplies en présence du Président de l’assemblée.

Suspension des poursuites

À tous les stades de l’instruction, le parlementaire concerné peut demander àl’assemblée à laquelle il
appartient de suspendre les poursuites, une telle suspension ne pouvant être ordonnée qu’à la majorité
des 2/3 des suffrages exprimés.

Il résulte de ceci que seuls les actes les plus graves sont protégés par une immunité (à savoir
l’arrestation, la citation ou le renvoi devant une juridiction de jugement). Pour les autres actes, il faut
une décision du Premier Président de la Cour d’appel si la contrainte est exercée. On ne peut s’empêcher
de s’interroger, à cet égard, sur le rôle-clé qui a été confié, par le constituant, au Président de la Cour
d’appel, alors que l’immunité parlementaire vise, en principe, à garantir la fonction parlementaire des
immixtions intempestives du pouvoir judiciaire.

/!\ ces dérogations ne sont d’application QUE temporairement. Une fois son mandat terminé, le
parlementaire sera jugé pour ces actes. Ce n’est pas une protection pour le parlementaire en soi, mais
simplement une protection d’un abus de pouvoir de la part de l’exécutif.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Il existe des restrictions à l’inviolabilité personnelle des parlementaires :

L’inviolabilité personnelle ne dure que le temps de la session parlementaire. Il ne s’agit donc, à


proprement parler, que d’une suspension des poursuites, et non d’une réelle interdiction comme
pour l’irresponsabilité prévue par l’article 58. Cette distinction est cependant atténuée dans la
pratique, compte tenu de l’habitude de ne plus prononcer la clôture de la session parlementaire que
la veille de l’ouverture de la session suivante.

L’article 59 prévoit lui-même une exception : le cas de flagrant délit. Dans cette hypothèse, en effet,
le déclenchement arbitraire de poursuites n’est pas à craindre, et ce serait un privilège injustifié de
soustraire aux poursuites judiciaires une personne dontla culpabilité est manifeste. En pratique, l’on
constate cependant que les autorités judiciaires éprouvent une certaine circonspection à user de
cette possibilité et préfèrent se faire « couvrir » par les Chambres, en sollicitant leur autorisation
avant une arrestation, une citation ou un renvoi devant une juridiction de jugement.

Il arrive exceptionnellement que la Chambre des représentants refuse de lever l’immunité d’un de ses
membres, contre la volonté du parquet.

Ainsi, le 16 mars 2015, le procureur général près la Cour d’appel de Liège a sollicité, auprès de la
Chambre des représentants, la levée de l’immunité parlementaire du député Alain Mathot,
conformément à l’article 59 de la Constitution. Alain Mathot était inculpé du chef de faux en écritures,
d’organisation criminelle, de corruption, de blanchiment, d’abus de biens sociaux, d’escroquerie,
d’infractions relatives aux enchères publiques et de fraude fiscale, pour des faits commis dans le cadre
de lapassation d’un marché public par l’association intercommunale de traitement des
Déchets de la région liégeoise (Intradel). Le marché public portait sur la construction d’un
incinérateur de déchets.

La Commission des poursuites de la Chambre des représentants a rejeté la demande de levée de


l’immunité d’Alain Mathot qui lui était adressée. Le dispositif de la décision de la commission et sa
motivation sont repris ci-après (Doc. Parl., Ch., session 2015-2016, n° 1728/001) :

« Vu la requête du procureur général près la cour d’appel de Liège ; Vu l’article 59, alinéa 1er, de la

Constitution ;

Vu les principes généraux rappelés ci-dessus ;

Considérant que l’immunité parlementaire est destinée à préserver les intérêts et à garantir le
fonctionnement correct de l’institution parlementaire, en l’occurrence, la Chambre des représentants,
et non les intérêts de chaque parlementaire à titre individuel ;

Considérant toutefois qu’il est incontestablement dans l’intérêt de l’institution parlementaire que les
enquêtes judiciaires à charge de parlementaires individuels, en particulier depuis la révision de l’article
59 de la Constitution, puissent se déroulercomme les enquêtes judiciaires à charge de tout autre citoyen,
c’est-à-dire avec les garanties nécessaires en matière d’indépendance et d’impartialité des autorités
judiciaires, de secret de l’instruction, de respect des règles de procédure, d’instruction à charge et à
décharge, d’absence de motifs politiques, etc. ;

Considérant que, eu égard à ce qui précède et après avoir pris connaissance du dossier et entendu le
ministère public et la défense, la commission a constaté, en l’occurrence :

Que le dossier répressif à charge de M. Mathot a été initié à la suite d’une lettreanonyme et constitué

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

sur la base des déclarations d’une seule personne, dont la crédibilité n’a pas été suffisamment
examinée ;

Que l’instruction menée était essentiellement à charge et non à décharge de M. Mathot ;

que le déroulement chronologique de l’instruction, dont on peut relever la longueur, pose certaines
questions concernant en particulier le fait que des devoirs et phases importants de cette instruction
coïncidaient avec des moments revêtant un certainintérêt politique : une perquisition au domicile
de M. Mathot pendant une période de dissolution parlementaire, et, dès lors, pendant
l’établissement des listes électorales pour les élections fédérales de 2010, l’inculpation de M. Mathot
au moment de la formation du gouvernement en 2011 et la rédaction du réquisitoire contre M.
Mathot aumoment de l’établissement des listes électorales pour les élections fédérales de 2014 ; que
ces phases importantes de l’instruction ont souvent coïncidé avec des fuites dans la presse, ce qui
a incité M. Mathot à déposer plusieurs plaintes avec constitution de partie civile du chef de
violation du secret de l’instruction et du secret professionnel, plaintes qui sont d’ailleurs, jusqu’à
présent, restées sans suite ;

Qu’il n’est pas absolument évident si l’article 59 de la Constitution, dans la mesure qu’il prévoit une
procédure spéciale pour les parlementaires faisant l’objet de mesures contraignantes dans le cadre
d’une instruction (en l’espèce, l’examen du trafic téléphonique de l’intéressé), a été violé ou pas.

Considérant que, notamment dans l’intérêt de l’institution parlementaire, il ressort de toutes ces
constatations qu’il est prématuré de soumettre le cas échéant le dossier à l’examen au juge du fond ;

Considérant qu’une non-levée de l’immunité parlementaire ne doit pas nécessairement signifier qu’il
est fait obstacle au cours de la justice : le parquet peut poursuivre son instruction et déposer par la suite
une nouvelle demande de levée de l’immunité parlementaire auprès de la Chambre.

La commission propose, par 5 voix contre 2, de ne pas accéder à la demande de levée del’immunité
parlementaire de M. Alain Mathot ».

Nonobstant la non-levée de l’immunité parlementaire d’Alain Mathot, la procédure pénale s’est


poursuivie, dans cette affaire Intradel, à l’encontre des autres personnes qui étaient inculpées. À la fin
du mois de juin 2019, la presse s’est d’ailleurs fait l’écho de la condamnation par la Cour d’appel de Liège
de plusieurs de ces personnes à des peines de prison et de confiscation de leurs biens, mais aussi de
la volonté du parquetde Liège de renvoyer à nouveau Alain Mathot devant le tribunal correctionnel
dans le cadre du dossier Intradel. L’ancien député, non réélu lors des élections du 26 mai 2019, ne
bénéficie en effet plus de l’immunité parlementaire qui le protégeait jusqu’ici.

SECTION 4 : L’ORGANISATION DU PARLEMENT DANS LE TEMPS


On peut distinguer trois types de périodes d’activité du Parlement. Il s’agit de la législature, des sessions
et des séances.

La législature est la période pour laquelle les chambres sont élues. Cette période est en principe de
cinq ans (article 65 de la Constitution), mais elle peut être abrégée à la suite d’une crise politique, si
le Roi exerce son pouvoir de dissolution.

Au début de chaque législature, les chambres vérifient les pouvoirs de leurs membres, conformément à
l’article 48 de la Constitution. Cette vérification porte sur les conditions d’éligibilité et sur la régularité
de l’opération électorale. Le cas échéant, elles procèdent àun nouveau comptage des bulletins de vote,

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

ainsi qu’à la vérification des calculs électoraux. Ce contrôle par les chambres elles-mêmes de la
régularité de l’élection est voué à être revu, à la suite d’un arrêt de la Cour européenne des droits de
l’homme rendu quant au dispositif similaire en place pour les élections des membres du Parlement
wallon.8

Dans un article paru sur le site internet Justice-en-ligne, Frédéric Bouhon revient sur la portée de
cette jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, de nature à contraindre la
Belgique à revoir son système de contrôle de la validité des élections fédérales, communautaires et
régionales (F. Bouhon, « Les élus qui tranchent les recours des candidats déçus : un système
doublement condamné à Strasbourg », Justice-en- ligne.be, 23 juillet 2020, https://www.justice-en-
ligne.be/Les-elus-qui-tranchent-les- recours).

« 1. En Belgique, ce sont les élus qui, pour l’essentiel, contrôlent le bon déroulement des élections et
qui tranchent les litiges qui surviennent à ce propos : sauf pour ce qui concerne les élections locales,
ce sont les assemblées qui vérifient les pouvoirs des élus. Aucun tribunal, aucun juge, ne peut
intervenir. En d’autres mots, ceux qui viennent d’être élus et aspirent à siéger pendant cinq ans à la
Chambre des représentants ou dans un parlement de région ou de communauté sont amenés à
traiter les plaintes de candidats concurrents, qui pourraient, s’ils obtenaient satisfaction, prendre
leur place.

En réservant à l’assemblée le pouvoir de contrôler sa propre composition et en évitant de le confier


à toute autre instance, notamment judiciaire, le constituant souhaitait – ce qui est en soi louable –
assurer l’indépendance du parlement et garantir la séparation des pouvoirs.

Le mécanisme pose toutefois question en ce qu’il conduit des candidats (et leurs partis)à prendre,
en réponse aux recours introduits, des décisions qui peuvent avoir des effets directs sur leur propre
carrière, sur celles de leurs amis politiques ou sur la constitution d’une coalition majoritaire.

2. À la suite des élections régionales wallonnes de mai 2014, un candidat non élu du PTB, Germain
Mugemangango, avait introduit une réclamation auprès du Parlement wallon. L’intéressé avait
manqué l’obtention d’un siège à quelques voix près et mettait en doute la régularité du scrutin

Le Parlement wallon, exerçant sa compétence de contrôle, lui a toutefois refusé la demande de


recomptage qu’il avait formulée. C’est à la suite de cette affaire que laGrande Chambre de la Cour
européenne des droits de l’homme a prononcé, le 10 juillet 2020, un arrêt par lequel elle juge que
l’application de ce système a engendré la violation de deux droits fondamentaux : le droit à des
élections libres (article 3 du Protocole additionnel à la Convention) et le droit à un recours effectif
(article 13 de la Convention).

3. Avant d’arriver à cette conclusion, la Cour a rappelé que le parlement, en tant que « lieu unique
de débat qui revêt une importance fondamentale », bénéficie d’une autonomie qui mérite protection.
Mais elle ajoute que la volonté de protéger cette autonomie ne peut se faire aux dépens du caractère
véritablement démocratique du régime ou du respect de la prééminence du droit. Or, la Cour
considère que l’organe auquel les réclamations électorales sont confiées l’assemblée plénière du
Parlement wallon, après un premier examen par une commission ad hoc ne présente pas les
garanties suffisantes d’impartialité et n’est pas de nature à protéger le requérant contre une décision
partisane.

8 Cour eur. D.H., Gde Ch., Mugemangango c. Belgique, 10 juillet 2020.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Les juges de Strasbourg considèrent par ailleurs que le pouvoir du Parlement wallon, au moment de
l’examen des réclamations électorales, n’est pas encadré par des règlessuffisamment précises pour
éviter les abus.

Enfin, la Cour estime que les garanties d’une décision équitable, objective et suffisamment motivée
n’ont pas été clairement prévues par le droit et que, dans la pratique, le requérant n’en a pas
suffisamment bénéficié au cours de la procédure menéeen 2014.

4. Qu’est-ce que cela implique pour l’avenir ?

L’arrêt par lequel la Cour européenne des droits de l’homme condamne la Belgique oblige celle-ci à
modifier les règles en vigueur, ce qui pourrait nécessiter la révision de la Constitution et de lois
spéciales qui organisent le fédéralisme belge et donc la mise en œuvre de procédures lourdes et la
réunion de majorités larges.

Respectueuse de la souveraineté des États, la Cour n’impose aucun système particulier, mais elle
indique qu’un recours juridictionnel, soit comme dispositif unique, soit comme moyen de contester
une décision qui pourrait d’abord être prise par une assemblée, serait de nature à remplir les
obligations de la Belgique.

5. On peut regretter que l’État belge n’ait pas revu plus tôt les règles du contentieux électoral. En
effet, il y a dix ans, la Cour européenne des droits de l’homme avait jugé qu’un mécanisme semblable,
mis en œuvre en Roumanie, violait la Convention (arrêt Grosaru c. Roumanie, 2 mars 2010).
L’encouragement donné par de nombreux spécialistes pour réformer le système belge, devenu
archaïque, n’avait cependant pas étéentendu ».

Les sessions sont les périodes d’activité des chambres, pendant lesquelles elles sont
constitutionnellement aptes à tenir leurs séances et exercer leurs attributions. L’article 44 de la
Constitution en prévoit deux types

o La session ordinaire, qui commence, chaque année, le deuxième mardi d’octobre. Le Parlement
se réunit de plein droit ce jour-là sans devoir être convoqué

o Les sessions extraordinaires, qui peuvent être convoquées par le Roi, lorsqu’une session
ordinaire s’est vu abrégée par l’arrivée du terme de la législature, ou, plus souvent, par une
dissolution des chambres. Des élections ont alors lieu, et le Roi al’obligation de convoquer les
nouvelles chambres en session extraordinaire jusqu’au début de la session ordinaire, le
deuxième mardi d’octobre qui suit.

Les séances sont les moments de réunion effective des assemblées. En vertu de l’article 47 de la
Constitution, les séances sont publiques. Sur demande du président ou de dix membres, elles
peuvent siéger à huis-clos, mais, dès la fermeture des portes, elles doivent décider alors, à la
majorité absolue des voix, si la séance continuera ainsi à huis- clos.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

COURS 10

SECTION 5 : LES FONCTIONS DU PARLEMENT


Les fonctions du Parlement consistent, pour l’essentiel, dans une participation à l’exercice de la fonction
législative et dans l’exercice du contrôle politique du Gouvernement.

§ 1er. La fonction législative

Deux grandes questions :


1. Quelle est le domaine d’action du pouvoir législatif fédéral en Belgique ? Quelles sont ses
compétences – quand peut-il agir ?
2. Comment le pouvoir législatif fédéral fait la loi ? quelle est la procédure d’élaboration des lois ?

I. Les matières relevant de la compétence du législateur fédéral

A. Compétence résiduelle
= compétence délimitée de manière négative. Ceci implique que par défaut, c’est le législatif qui est
compétent. Chaque fois que la compétence n’a pas été attribuée à une autre autorité (à l’exécutif, au roi)
c’est le pouvoir législatif qui est compétent (chambres et sénats) (bien sûr, cela concerne uniquement
les compétences fédérales, pas les compétences des communautés ou des régions) Le législateur dispose
d’une compétence résiduelle en droit constitutionnel belge. Par opposition, l’exécutif ne dispose que de
compétences dites d’attribution – le Roi (exécutif) n’est compétent que lorsque la constitution ou des
lois prises en vertu de la constitution lui donne un pouvoir. (Mauvais souvenir liés à des excès de
compétence de l’exécutif durant la période hollandaise, la constitution de 1831 est une constitution
contre l’exécutif)
Le pouvoir législatif fédéral est investi d’une compétence de principe, par défaut en quelque sorte, sans
qu’aucune disposition supérieure ne doive lui attribuer une compétence. C’est ce que l’on qualifie parfois
de la « compétence de la compétence ». En d’autres termes, le pouvoir législatif fédéral a une plénitude
d’attributions, en ce sens qu’il a qualité pour agir dans toutes les matières que la Constitution ou une loi
spéciale de répartition des compétences ne lui a pas soustraites au profit d’un autre pouvoir. Ce sont ses
compétences résiduelles. Le pouvoir législatif national a ainsi une compétence générale dont le contenu
n’est réellement déterminé que de manière négative : il n’est plus compétent lorsque telle ou telle
matière a été expressément attribuée à une autre autorité. En revanche, on verra plus loin que le pouvoir
exécutif ne dispose en principe que de compétences attribuées, dérivant le plus souvent de la loi.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

B. Compétences réservées
= délimitée de manière positive, prévue de manière explicites dans certains cas dans la Constitution. La
constitution identifie également de manière positive des cas dans lequel le pouvoir législatif doit
intervenir.

La Constitution a aussi conféré au pouvoir législatif fédéral plusieurs compétences déterminées, qui
constituent ses compétences réservées. Celles-ci ne peuvent, à ce titre, être déléguées à aucun autre
pouvoir. Le législateur doit en tout cas lui-même régler les éléments essentiels de ces matières et seule
l’exécution de mesures dont les éléments essentiels sont fixés préalablement par le législateur peut être
confiée à une autorité tierce, en principe le Roi (théorie des matières réservées).

Le pouvoir législatif fédéral détient de telles compétences réservées, d’une part, dansdes matières
relatives au statut des gouvernants (telles l’organisation territoriale de l’État, le régime électoral, les
finances publiques, les attributions des pouvoirs de l’État fédéral), et, d’autre part, dans des matières
relatives au statut des gouvernés (tel le mode d’acquisition et de perte de la nationalité belge et les
mesures de nature à restreindre des droits fondamentaux). Le Constituant a réservé la compétence de
régler certaines matières au législateur en vue de garantir que, dans ces matières, la prise de décision
soit le fruit d’une délibération au sein d’une assemblée démocratiquement élue.

Deux exemples :

Art. 12, alinéa 2, de la Constitution « Nul ne peut être poursuivi que dans les cas prévus par la loi, et
dans la forme qu'elle prescrit »

Art. 14 de la Constitution : « Nulle peine ne peut être établie ni appliquée qu'en vertu de la loi »

Art. 170§1 de la Constitution : « Aucun impôt au profit de l'état ne peut être établi que par une loi »

Par exemple, l’article 15 de la Constitution dispose que (on souligne) :

« Le domicile est inviolable ; aucune visite domiciliaire ne peut avoir lieu que dans les cas prévus
par la loi et dans la forme qu'elle prescrit ».

Seul le législateur peut donc définir les conditions dans lesquelles, par exemple, une perquisition
au domicile d’une personne soupçonnée d’avoir commis une infractionpeut intervenir.

Intervention du législateur exigée !

Pourquoi cette « réserve à a loi » par la constitution de certaines matières ?

Différence entre le mode de décision de l’exécutif et du législatif.

- Ces réserves à la loi sont faites en opposition à l’exécutif (le Roi). La première différence se trouve entre
la chambre des représentants et le Conseil des ministres (conseil des ministres est privé, alors que la
chambre des représentants est publique) droit à la publicité des débats.

- Dans le conseil des ministres, c’est la majorité qui décide au sein d’un même parti politique ( pas
d’opposition à la prise de décision), alors qu’à la chambre des représentants, il y a l’opposition qui est
présente afin de délibérer démocratiquement les sujets qui sont discutés à l’assemblée – il y a un
contrepouvoir qui est présent.

Dans les domaines sensibles et où on peut se méfier de l’exécutif, le constituant a voulu que ce soit le

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

législateur qui intervienne. Dans le cas où la compétence est exclusivement réservée par la constitution
au législateur, chaque fois qu’une disposition de la constitution prévoit que la matière doit être réglée
par la loi, dans ces cas-là c’est le législateur qi doit lui-même régler la matière, et à la différence de ce qui
est le cas dans les matières résiduelles, le législateur ne peut pas déléguer davantage que le règlement
d’aspect accessoire ou de détail de la matière à l’exécutif. Lorsqu’il légifère dans les matières résiduelles,
le législateur peut attribuer de manière assez large des compétences à l’exécutif. Il peut fixer un principe
et permettre à l’exécutif de le mettre en œuvre en lui laissant un pouvoir important ; Ce n’est pas le cas
dans le cas des matières réservées.

C’était tout l’enjeu dans le cas de la crise covid, toute la discussion autour du parlement et du
gouvernement dans la lutte contre la pandémie c’était de savoir si c’était normal au regard du
principe de légalité en matière de protection des droits fondamentaux, et là au regard de la
réserve au législateur des droits fondamentaux, est-ce qu’il est normal que le législateur ait
donné des pouvoirs aussi importants aux ministres de l’intérieur ? Cela viole-t-il le principe des
matières réservées ? Jusqu’ici les cour et tribunaux ont admis l’étendue des compétences au
profit de l’exécutif.

« Loi » signifie-t-il que la matière doit-être réglé par le législateur fédéral ?

Difficulté en Belgique ; la Belgique est un état fédéral. Les compétences du législateur fédéral ne
s’envisagent que lorsque nous sommes dans le champ des compétences du législateur fédéral (il y a un
législateur pour les régions et pour les communautés) Une des questions qui se pose, c’est de savoir,
quand la constitution utilise le terme « loi », vise-t-elle le législateur fédéral, ou bien de manière générale
que ce soit fédéral, régional ou communautaire ? Toute une série de disposition qui fait référence à la
loi datent de 1831, et donc la Belgique n’était pas encore un état fédéral, il y avait un seul législateur.

Toutes les références à la « loi » dans la Constitution n’impliquent cependant pas que la matière serait
réservée au législateur fédéral. Seules sont, en effet, réservées à ce législateur fédéral les matières que
la Constitution a réservées à la loi après l'entrée en vigueur de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes
institutionnelles, conformément à l’article 19 de cette loi. Dans les autres cas, la matière est réservée au
législateur, mais le législateur compétent peut être soit le législateur fédéral, soit le législateur
communautaire, soit le législateur régional, selon la matière concernée et ce que prévoient les règles
répartitrices de compétences.

Pourquoi cette distinction ? L’idée c’est de dire qu’avant 1980, lorsque la constitution utilise le
mot « loi », ce qui importe au constituant, c’est que la décision soient prise par un pouvoir
législatif – par une assemblée délibérante regroupant majorité et opposition et qui prenne ses
décisions de manière publique. Avant cela, on ne savait dire si c’était fédéral / communautaire /
régionale. Pour les dispositions avant 1980, la logique est de dire qu’elles étaient neutres au
niveau de la répartition des compétences, elles ne font pas de distinctions. En revanche, après
1980, si on utilise le mot « loi » ça veut dire qu’on veut réserver la compétence au législateur
fédéral. Si ce n’est pas le cas, on doit parler de décret et d’ordonnance

C’est ce qui est prévu, par exemple à l’article 23 de la constitution mentionne « loi, décret,
ordonnance » ici on sait que l’on donne la compétence au fédéral, régions et communautés
selon leurs compétences. A l’inverse, à l’article 160 de la constitution, adoptée en 1993,
« déterminé par la loi. » le constituant ici assoit la compétence de l’état fédéral et du législateur
fédéral. On doit donc toujours vérifier si la disposition a été insérée avant 1980 ou non. Article
29 (utilisation antérieure à 1980 et donc l’utilisation du terme loi n’est pas destiné à établir une
compétence de l’état fédéral, mais simplement une compétence du législatif). Il y a donc une

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

séparation horizontale des pouvoirs entre législatif et exécutif, mais aussi parfois entre fédéral,
région et communautés.

A l’examen, dans un des cas pratiques, une des questions sur un acte parlementaire ou un acte
législatif qui était proposé, décret de la région wallonne qui organisait les lois de recours devant le
conseil d’état. Il fallait identifier plusieurs degrés de légalité et de constitutionalité, un degré possible
était de dire l’article 160 de la constitution établit la compétence de l’état fédéral pour la matière du
conseil d’état (pour l’organisation du conseil d’état) il fallait dire que c’était une disposition de la
constitution qui était postérieure à 1980 (car elle date de 1993) donc cela établissait une
compétence pour l’état fédéral et la région wallonne ne pouvait pas empiéter sur les compétences
de l’état fédéral.

Ça ce sont les cas dans lesquels le législateur fédéral peut agir. Lorsque nous sommes dans le champ
de compétences du fédéral, le législateur doit agir chaque fois que la compétence lui est explicitement
attribué(théorie des matières réservées), soit lorsque la compétence n’a pas été attribuée par la
constitution à une autre autorité (en particulier l’exécutif). Dans ces deux cas, le législateur est
compétent pour agir.

II. Les limites assignées à la loi

Pour avoir une plénitude d’attributions, le pouvoir législatif n’en est pas pour autant souverain. Il doit
respecter certaines limites
Les limites tracées par le droit international et les traités signés par la Belgique. Depuis 1971, la
jurisprudence a, à cet égard, admis le principe de la primauté des traités ayant des effets directs dans
l’ordre juridique belge sur les lois nationales (arrêt Le Ski)
Les limites posées par la Constitution, qui s’impose bien entendu au pouvoir législatif. En pratique
toutefois, compte tenu des limites actuelles des compétences de la Cour constitutionnelle sur
lesquelles on reviendra, l’effectivité de la primauté de la Constitution ne concerne que les règles de
répartition des compétences entre l’État, les communautés et les régions, le titre II de la Constitution,
portant sur les libertés publiques, les articles 170, 172 et 191 de la Constitution et le principe de
loyauté fédérale. Il faut relever toutefois que la Cour constitutionnelle a largement interprété ses
compétences fondées sur le principe d’égalité et de non-discrimination, en manière telle que bon
nombre d’autres principes constitutionnels fondamentaux, comme plusieurs aspects de la
séparation des pouvoirs, se trouvent en pratique inclus dans son champ de compétence.
Les limites de la loi dans le temps, les lois ne pouvant en principe pas rétroagir dans le passé ;
Les limites de la loi dans l’espace, les lois ne pouvant, en principe, s’appliquer qu’à l’intérieur du
territoire national.

III. La procédure d’élaboration de la loi

La confection des lois passe par trois phases : une phase pré parlementaire, une phase parlementaire et
une phase post parlementaire.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

A. Première phase : la phase pré parlementaire

Chacune des trois branches du pouvoir législatif est compétente pour initier la procédure législative
(tant le roi que la chambre des représentants, que le Sénat. Avec cette nuance pour le Sénat ne peut le
faire que dans les domaines dans lequel le Sénat continue de jouer un rôle),
Suivant l’article 75 de la Constitution, l’initiative de l’adoption de la loi appartient à chacune des trois
branches du pouvoir législatif. Lorsque l’initiative émane du Roi, on parle d’un projet de loi. La majeure
partie des lois trouvent leur origine dans des projets de lois, ce qui témoigne du poids prédominant de
l’appareil gouvernemental dans le processus de confection de la loi. Lorsque l’initiative émane d’un ou
plusieurs parlementaires, il s’agit d’une proposition de loi. Généralement, l’initiative sera donc soit
parlementaire, soit gouvernementale. (Le sénat est moins actif)
Plus de projets de lois ou de propositions de lois adoptées ?
En Belgique, la grande majorité des lois qui sont adoptées sont d’initiatives gouvernementales (projets
de lois). C’’est le Roi qui dépose le projet de loi mais en pratique c’est toujours le gouvernement qui agit
et puis qui fait signer par le Roi ses projets. C’est le cas pour deux raison (1) raison de fond = le
gouvernement peut s’appuyer sur une expertise que ne dispose pas le parlementaire à titre individuel.
Donc pour rédiger des textes de bonnes qualités, pour avoir une vue plus détaillée et plus globale de ce
qu’il convient de faire en termes de réforme législative, le gouvernement a des armes dont ne dispose
pas le parlementaire. Le gouvernement est mieux outillé pour préparer la législation. (2) le
gouvernement par définition a la confiance d’une majorité du parlement. Donc il peut s’appuyer et la
discipline des partis joue un rôle ici il est sûr d’être suivi par une majorité au parlement pour soutenir
ses projets. Donc une fois que les arbitrages politiques ont été fait au gouvernement, le projet est déposé
au parlement et aura généralement une majorité des parlementaires qui vont adopter leur projets (sauf
problème politique majeures). En revanche, les parlementaires à titre individuel, sont soit dans
l’opposition (et la majorité ne vote généralement pas les propositions de l’opposition), soit ils sont dans
la majorité mais si c’est une proposition qui est déposée, plutôt qu’un projet de loi, c’est que les autres
partis de la majorité ne sont pas nécessairement d’accord avec la proposition et donc cela ne va pas
passer non plus. C’est assez rare qu’une proposition de loi passe ça arrive mais c’est rare.
Plus de projets de lois ou de propositions de lois déposées ?
En revanche, il y a beaucoup plus de propositions de lois qi sont déposées chaque année au parlement,
que de projets de lois. Pourquoi parce que les propositions de lois sont une manière idéale pour les
parlementaires et pour le groupe politique de se positionner sur différents sujets manière politique
pour un parlementaire de marquer son intéret pour une matière et son positionnement

(a) Procédure initiée par le Roi

Les projets de lois initiés par le gouvernement commencent par une phase pré-parlementaire. Il y a tout
un travail qui se fait avant que le projet de loi n’arrive sur le bureau du parlement.

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Lorsque l’initiative émane du Roi, le dépôt d’un projet de loi est l’aboutissement d’une procédure pré
parlementaire qui comporte nécessairement les étapes suivantes :

(1) L’élaboration d’un avant-projet

L’élaboration d’un avant-projet, selon le cas, par l’administration (qui prépare à la demande de son
ministre un avant-projet de loi), par des cabinets ministériels (conseillers des ministres) voire par des
centres d’études de partis politiques / lobbys (souvent de manière très peur transparente) ou des
cabinets d’avocats (de manière plus ou moins transparent). Il n’y a pas de règle formelle à cet égard-là.

Certains avant-projets de lois doivent faire l’objet d’un avis d’autres autorités ou d’autres commissions
ou être accompagnés d’une analyse d’impact, visant à évaluer les effets potentiels d’un projet de
réglementation « sur l'économie, l'environnement, les aspects sociaux et les administrations,
préalablement à son adoption par l'autorité politique » (loi du 15 décembre 2013 portant des
dispositions diverses concernant la simplification administrative).

(2) Délibération en Conseil des ministres

L’avant-projet fait l’objet d’une délibération en Conseil des ministres du gouvernement fédéral. Le
ministre compétent va amener son texte sur la table des conseils des ministres, avant cela il y aura une
phase des inter cabinets les conseillers des différents ministres du gouvernement fédéral vont se
mettre d’accord sur le projet de textes en discussion. (Travail de négociations politiques)
gouvernement de coalition, les partis politiques qui sont représentés au gouvernement n’ont pas les
mêmes idées, ils doivent se mettre d’accord sur des projets de textes à partir d’idée différentes et ils
doivent s’accorder sur des projets de textes qui seront déposés au parlement au nom du gouvernement.
Négociation politiques en inter cabinet sur le projet, et ensuite le texte est soumis au conseil des
ministres en tant que tel et le conseil des ministres décide d’arrêter en première lecture, un avant-projet
de texte. Cet avant-projet de texte doit aussi souvent être soumis pour avis à toute une série d’autorités
(en matière de justice, l’avis du conseil supérieur de la justice, ou des ordres d’avocats sont sollicités
analyses d’impact)

C’est là une coutume consacrée par les circulaires relatives au fonctionnement du Conseil des ministres.
L’avènement de gouvernements de coalition après la première guerre mondiale a donné à la
délibération en Conseil des ministres une importance politique considérable. Elle confère à chaque
membre du Gouvernement un droit de regard sur l’activité de leurs collègues, qui ne sont pas tous du
même parti. Ceci explique que toute question politiquement importante doit faire l’objet d’une
délibération en Conseil des ministres.

(3) Consultation de la section de législation du Conseil d’État

Tous les avants projets de lois après la première lecture par le conseil des ministres doit être soumis à
la section de législation du Conseil d’état. Elle rend ensuite un avis sur la validité formelle et la qualité
juridique du texte (conformes aux normes supérieures etc.) c’est seulement un avis, il ne nuit pas à
l’autorité qui lui demande.

La consultation de la section de législation du Conseil d’État, conformément à l’article 3 des lois sur le
Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973. L’avis du Conseil d’État contient principalement des
observations concernant la qualité logistique du texte et desobservations sur la compatibilité du projet
avec la Constitution et l’ensemble de la législation et des normes supérieures. En pratique, vu les délais
qui lui sont impartis pour rendre des avis par les auteurs de normes, la section de législation du Conseil
d’État limite généralement son examen aux trois questions suivantes : le respect par l’autorité des

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

formalités préalables (avis de l’inspecteur des finances, négociation ou concertation syndicales,


concertation avec les communautés ou les régions, etc.), la compétence de l’auteur de l’acte et le
fondement légal (c’est-à-dire le respect des normessupérieures). En général, l’avis rendu par la section
de législation n’a aucune force contraignante, mais une grande autorité morale. Le Gouvernement est
libre de suivre l’avis ou de s’en écarter.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi ordinaire de réformes institutionnelles du 9 août 1980, il est un cas
où l’avis de la section de législation a un effet particulier. Dans le cadre de la prévention des conflits de
compétence entre l’État, les Communautés et les Régions, si la section de législation estime que
l’avant-projet de loi qui lui est soumis n’est pas de la compétence du législateur national, la procédure
est bloquée. L’avant- projet est renvoyé à un Comité de concertation, qui groupe le premier ministre, les
présidents des gouvernements des communautés et des régions, ainsi que des membres de ces exécutifs
et du gouvernement. Dans les 40 jours, le Comité de concertation donne,suivant la règle du consensus,
son avis sur l’excès de compétence signalé par le Conseil d’État, et propose, le cas échéant, des
amendements à l’avant-projet de loi, afin de faire cesser l’excès de compétence. La procédure peut alors
suivre son cours9 Dans la majorité des cas, si le texte est renvoyé à un comité de concertation, la
procédure est abandonnée.

En cas d’urgence, le Gouvernement peut demander que l’avis soit limité au point de savoir si l’avant-
projet de loi entre bien dans les compétences du pouvoir législatiffédéral.

(4) Signature du Roi et Dépôt du projet sur le bureau de l’assemblée compétente

L’avant-projet, éventuellement modifié à la suite des observations du Conseil d’État, est ensuite
contresigné par les ministres qui en prennent la responsabilité, et soumis à lasignature du Roi. Il est
ensuite déposé sur le bureau d’une des assemblées. Depuis la dernière réforme de l’État, les projets de
lois sont impérativement déposés sur le bureaude la Chambre des représentants, sauf dans les matières
où le Sénat intervient à égalité avec la Chambre.

Lorsqu’on veut analyser une loi, très important d’aller voir dans l’exposé des motifs cela nous montre
ce que le gouvernement a voulu faire

9 Depuis que cette procédure est en vigueur, il est exceptionnel qu’un projet soit envoyé au Comité de concertation dans les
conditions prévues par la loi. Dans la très grande majorité des cas, l’avis du Conseil d’État concluant à l’incompétence de
l’autorité législative à laquelle un projet était ou devait être soumis a amené les auteurs de ce projet à y renoncer spontanément.

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B. Seconde phase : la phase parlementaire

(1) Le dépôt de propositions de lois

Il y a directement un texte qui est déposé par un parlementaire. Les députés et les sénateurs peuvent
également déposer des propositions de lois sur le bureau de leur assemblée. Le nombre de propositions
de lois déposées chaque année estde loin supérieur à celui des projets de loi, mais peu d’entre elles
deviennent en fin de compte des lois.

Avant d’être discutées, les propositions de loi doivent être prises en considération. Il s’agit là d’un
accord de la part de la majorité de l’assemblée pour que la proposition soit discutée au parlement. (Vote
par l’assemblée, généralement il n’y a pas de problème à ce stade) La portée de cette formalité est assez
malaisée à définir ; il est en tout cas certain que la prise en considération des propositions de loi – votée
à l’unanimité dans la quasi-totalité des cas – ne préjuge pas de l’opinion qui sera émise in fine sur le
texte. Les parlementaires qui votent la prise en considération marquent seulement leur accord pour que
le problème soit discuté.

Dans certains cas, le refus de prise en considération permet d’écarter des propositions qui sont
manifestement contraire à la Constitution ou, exceptionnellement, qui sont relatives à des objets
dont le Parlement refuse de discuter. Tel fut le cas, par exemple, pour des propositions de loi
tendant à l’amnistie des anciens collaborateurs de guerre, par l’extrême droite.

La section de législation du Conseil d’État peut être mais ne doit pas être consultée sur les propositions
de loi, à la demande d’un ministre ou du président de l’assemblée, conformément à l’article 2 des lois
sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973. Celui-ci est tenu de demander l’avis du Conseil

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

d’État lorsque la demande en est faite par un tiers de membres de l’assemblée, ou par la majorité des
membres d’un groupe linguistique.

/!\ le gouvernement demande à des députés de la majorité de déposer une proposition de lois,
plutôt que de passer par un projet de lois, lorsque le gouvernement ne veut pas passer devant le
conseil d’état, il prépare un texte et demande à un parlementaire de la majorité de déposer le
texte sur le bureau de l’assemblée et comme ça la proposition de lois ne passe pas devant le
conseil d’état…. Pas très élégant !car cela contourne une garantie prévue par les citoyens cela
arrive parfois lorsque le gouvernement est pressé.

Proposition de loi pour libéraliser l’IVG mais à laquelle s’opposait l’extrême droite et les chrétiens
démocrates mais ils étaient en minorité. Il y avait des négociations gouvernementales en cours, pas de
gouvernement, et donc la majorité parlementaire voulait faire voter ce texte pour lequel ils avaient une
majorité. Ce qu’on fait les opposants, ils ont demandé un premier avis à la section de législation du
conseil d’état (il faut 1/3 des votes pour demander l’avis) ensuite l’opposition a déposé de nouveaux
amendements à la proposition de lois, et ils ont revoté à 1/3 le renvoi de ces nouveaux amendements
au conseil d’état ils l’ont refait une troisième fois. Ils sont donc parvenus à faire trainer pendant des
mois l’adoption de ce texte pour lequel il y avait une majorité, jusqu’au moment où le CDNV qui en
parallèle était en train de négocier avec les libéraux, les socialistes et les écologistes sa participation au
gouvernement fédéral, jusqu’à ce que le CDNV obtienne de ses partenaires futures une majorité et que
la proposition de loi soit mise de côté.

(2) Le passage en commission

Les projets de lois et les propositions de lois prises en considération sont renvoyés devant la commission
compétente, où se fait l’essentiel du travail parlementaire.

Au cours de la discussion en commission, les parlementaires et le Gouvernement disposent, en vertu de


l’article 76 de la Constitution, du droit d’amender les articles (en proposant des modifications, des
suppressions ou des adjonctions aux articles du texte en projet) et du droit de diviser les articles, afin
d’éviter que, sur certains points, des paquets à prendre ou à laisser ne soient présentés.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Les débats en commission ont lieu, en principe, à huis clos, mais un rapport relatant les discussions,
ainsi que le résultat du vote intervenu au sein de la commission, est rédigé par un membre de la
commission (qualifié de rapporteur), et publié dans les documents parlementaires. Compte tenu du fait
que la commission est composée sur la base d’une représentation proportionnelle par rapport à
l’assemblée, un vote positif en commission pratiquement une promesse d’adoption du texte en séance
plénière.

(Différentes sortes de commission, commission parlementaire, commission de justice, commission de


l’intérieur) les députés vont se pencher sur le texte et proposer des amendements. Le texte pourra
être scindé, retiré, le texte va être scruté par les députés. Tant les députés que le gouvernement auront
un rôle d’amendement du texte en cours de discussion à la commission. Après cela, il y a un vote. Si le
texte est adopté en commission, c’est un peu après un gage qu’il sera adopté par la suite en assemblée
plénière, puisque les commissions sont composées de manière proportionnelle des différents groupes
politiques s’il y a une majorité en commission le texte sera normalement adopté.

(3) La procédure dite de la « sonnette d’alarme »

(Protection de la minorité francophone au membre des parlements) La procédure de la « sonnette


d’alarme » est prévue par l’article 54 de la Constitution. Cet article prévoit que :

« Sauf pour les budgets ainsi que pour les lois qui requièrent une majorité spéciale, une motion motivée,
signée par les trois quarts au moins des membres d’un des groupes linguistiques et introduit après le
dépôt du rapport et avant le vote final en séance publique, peut déclarer que les dispositions d’un projet
ou d’une proposition de loiqu’elle désigne sont de nature à porter gravement atteinte aux relations entre
les Communautés.

Dans ce cas, la procédure parlementaire est suspendue et la motion est déférée au Conseil des ministres
qui, dans les trente jours, donne son avis motivé sur la motion et invite la Chambre saisie à se prononcer
soit sur cet avis, soit sur le projet ou la proposition éventuellement amendés. (Le conseil des ministres
est paritaire francophone / néerlandophone, et donc la protection des minorités est assurée)

Cette procédure ne peut être appliquée qu’une seule fois par les membres d’un groupe linguistique à
l’égard d’un même projet ou d’une même proposition de loi ».

La procédure est introduite par une motion motivée qui doit désigner expressément les dispositions
susceptibles de porter gravement atteinte aux relations entre les communautés. Elle doit être signée par
au moins trois quarts des membres d’un groupe linguistique et déposée entre le dépôt du rapport et
le vote en séance publique. Ces règles visent à éviter toute mesure dilatoire destinée simplement à
paralyser l’action gouvernementale. En outre, elles contraignent les signataires de la motion à préciser
clairement les enjeux du conflit, afin de faciliter l’arbitrage ultérieur du Conseil desministres. L’idée est
d’élever le conflit au niveau gouvernemental.

Le dépôt d’une motion motivée suspend de plein droit la procédure parlementaire. Il ne s’agit donc pas
d’un droit de veto, puisque, après l’intervention du Conseil des ministres, la procédure parlementaire
normale reprend son cours. La suspension de la procédure parlementaire a pour effet de permettre
l’arbitrage du Conseil des ministres, dont la composition paritaire sur le plan linguistique offre une
garantie évidente dans un tel contexte. Dans l’esprit du Constituant, le Gouvernement pouvait soit
démissionner, soit renvoyer un texte amendé, soit, enfin, ne pas modifier le texte initial en justifiant
dans un avis les raisons pour lesquelles il n’aurait pas les effets qui lui prêtaient les signataires de la
motion.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Insérée en 1970 dans la Constitution lors de la première réforme de l’État, la procédure de la sonnette
d’alarme a pour principal effet de consacrer symboliquement l’existence dans l’État d’un rapport de
forces différent de celui qui résulte de la simple répartition arithmétique des voix au sein des chambres.
Apparemment, il s’agit là, à l’instar des majorités spéciales et de la parité au sein du Conseil des
ministres, d’une des premières manifestations du démantèlement de l’État unitaire : la minorité est
investie, en tant que telle, de prérogatives propres qui lui permettent, en toute légitimité, de paralyser,
du moins momentanément, l’expression de la volonté majoritaire.
En pratique, il n’a été fait usage qu’à deux reprises de cette sonnette d’alarme : le 4 juillet 1985, une
motion signée par les 3/4 du groupe linguistique français de la Chambre a été déposée à propos d’un
projet de loi portant intégration de l’Economische Hogeschool Limburg, école supérieure de type long,
au Centre universitaire du Limbourg. Cette motion était motivée par le fait que le projet de loi incriminé
pouvait s’analyser comme « augmentant les charges publiques de manière discriminatoire ». Elle avait
été signée par 70 députés francophones sur 91, dont 5 membres du Gouvernement parmi lesquels deux
vice-premiers ministres. Il faut s’étonner que des ministres se soient ainsi manifestés, alors qu’ils
avaient marqué leur accord sur ce texte,puisqu’il s’agissait en l’espèce d’un projet de loi qui avait fait
l’objet d’une délibération en Conseil des ministres préalablement à son dépôt au parlement. Confronté
à une telle dissension en son sein, le Conseil des ministres résolut le problème sans autre crise, en
décidant de retirer le projet contesté et en s’engageant à déposer un projet de loi global sur les
différentes écoles économiques supérieures.

La sonnette a été à nouveau tirée, plus récemment, le 29 avril 2010, par l’ensemble des députés
francophones, afin de s’opposer à une proposition de loi portant une scission de l’arrondissement de
Bruxelles-Hal-Vilvorde, qui était soutenue par les députés flamands, sans aucune contrepartie, ni
mécanisme de protection de la minorité francophone résidant dans cet arrondissement. C’est
cet incident qui a provoqué la démission du gouvernement de l’époque, et, à la suite de nouvelles
élections, la plus longue crise que la Belgique a connue dans son histoire pour constituer, après plus de
500 jours d’affaires courantes, un gouvernement qui a initié la sixième réforme de l’État.

(4) Le vote en séance plénière

L’article 53 de la Constitution fixe les règles de quorum et de majorité : les chambres ne peuvent
délibérer que si la majorité de leurs membres sont présents ; quant à la majorité requise, il s’agit d’une
majorité absolue des suffrages, ce qui implique que les propositions soumises aux voix doivent, en
principe, recueillir plus de votes positifs que de votes négatifs. En matière législative comme en matière
constitutionnelle, il est tenu compte des abstentions pour déterminer le quorum, mais non pour la
détermination de la majorité (/!\ exception lois spéciales prévu à l’article 4 de la constitution)

Depuis 1971, la Constitution a prévu que certaines lois, dans des matières communautaires notamment,
ne pourraient être adoptées qu’à une majorité spéciale, nécessitant trois conditions définies à l’article 4
de la Constitution :

La réunion de la majorité des membres de chaque groupe linguistique (condition de


Quorum) ;
La majorité des suffrages dans chaque groupe linguistique ;
Une majorité globale des 2/3 des suffrages exprimés à la Chambre et au Sénat.

De telles lois à majorité spéciale sont requises dans différents cas prévus par la Constitution. Par
exemple, pour modifier les limites des quatre régions linguistiques(art. 4), pour créer des territoires
soustraits à la division du Royaume en provinces (art. 5), pour fixer les conditions et les modalités du

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

transfert aux communautés ou aux régions des compétences résiduelles (art. 35), pour créer les organes
des Régions et déterminer leurs compétences (art. 39), pour régler la composition et le fonctionnement
des Parlements des Communautés (art. 115), pour déterminer la composition, la compétence et le
fonctionnement de la Cour constitutionnelle (art. 142).

Depuis 2014, la Constitution prévoit, par ailleurs, une procédure de « seconde lecture » àla Chambre des
représentants, afin de pallier dans une certaine mesure l’effacement du rôle législatif du Sénat. La
seconde lecture vise à réexaminer un « texte adopté en première lecture » par la Chambre après un délai
de réflexion, essentiellement pour contrôler la cohérence et la qualité des articles adoptés en première
lecture.

La question se pose si un texte adopté à la chambre des représentants doit aussi être adopté au Sénat.
Article 77 et 78 de la constitution. Trois grands cas de figure

(1) Une loi pour être adoptée doit être adoptée dans les mêmes termes par le Sénat et la chambre
des représentants (article 77§1) = pied d’égalité = minorité des cas

(2) Une possibilité / droit d’évocation du Sénat. Rôle prédominant joué par la chambre des
représentants mais le Sénat peut demander à voter un texte (article 78§1) (lois sur le conseil
d’état)

(3) Pas d’intervention du Sénat, chambre des représentants est chargée exclusivement du vote de la
loi.

En 93, on a réduit le rôle du Sénat par rapport à la chambre. En 2014 il est devenu ce qu’il est
actuellement rôle très restreint
C. Troisième phase : la phase post parlementaire

Le texte n’est pas encore une loi jusqu’à ce que le roi marque son accord en tant que branche du pouvoir
législatif sur la loi qui a été votée par le parlement = sanction royale. Par sa sanction, le roi marque son
accord en tant que branche du pouvoir législatif avec le projet de loi qui a été voté par le parlement. C’est
un acte qui doit être couvert par le contreseing ministérielle. (Important : le roi n’est pas politiquement
responsable ! tout ce que le Roi fait, cela doit être approuvé par les ministres. Le Roi ne peut pas
s’opposer à la volonté de son gouvernement. Le roi doit le suivre, il ne peut pas y avoir de divergence de
vue. Au 19ème siècle, si le Roi n’était pas d’accord, le gouvernement pouvait démissionner
éventuellement, mais maintenant cela ne se passe plus comme ça. Tout ce que le roi fait, ce sont les
ministres qui en prennent la responsabilité. Si le Roi avait plus de responsabilité et pouvait s’opposer à
son gouvernement, on remettrait en compte la condition et la survie de la monarchie démocratique.

L’article 109 de la Constitution dispose que le Roi sanctionne et promulgue les lois. Ainsi, un projet de
loi adopté par les deux chambres est un acte dépourvu de toute valeur législative tant qu’il n’a pas été
sanctionné par le Roi.

1. La sanction royale

La sanction royale est l’acte par lequel le Roi, agissant en tant que branche dupouvoir législatif, marque
son accord sur un projet ou une proposition de loi adoptéepar les deux chambres (ou la seule

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Chambre des représentants dans l’hypothèse où le Sénat n’est plus compétent). Elle représente, avec
le droit d’initiative, une des deux tâches que le Roi accomplit dans l’exercice de la fonction législative.
La date de la sanction sera également la date de la loi.

La sanction est un acte politique, couvert par la responsabilité ministérielle. La sanction par le Roi du
texte original de la loi est contresignée par le ou les ministres ou secrétaires d’État qui ont contresigné
le projet de loi. Le ministre de la Justice veille, en outre, à ce que la loi soit revêtue du sceau de l’État.

La sanction est-elle automatique ? le roi est-il obligé de donner sa sanction ?

Le Roi a, en théorie, le droit, sous le couvert de la responsabilité ministérielle, de refuser d’apposer sa


sanction. Au 19e siècle, le Roi refusa ainsi, en deux occasions, de sanctionner, avec l’accord de ses
ministres, certaines lois, mais il s’agissait, en l’occurrence, d’anticiper la position que les chambres -
nouvellement élues - auraient prises elles-mêmes. Vu le changement de majorité politique, elles
auraient, en effet, abrogé ces lois dans l’hypothèse où elles auraient été sanctionnées. Ce qui est certain,
c’est que le Roi ne peut pas refuser de sanctionner une loi sans être couvert par un ministre. Cela arrive
très rarement. Comme en règle le gouvernement a une majorité au sein du parlement, il est rare que le
gouvernement donne ensuite son accord pour que le Roi ne donne pas son accord, car ça voudrait dire
que le gouvernement n’est plus en majorité.

Depuis lors, le Roi a toujours sanctionné les lois votées par les deux chambres. En 1990, cependant, le
chef de l’État, se prévalant d’une objection de conscience personnelle, a fait savoir au Premier ministre
qu’il ne pourrait sanctionner la loi dépénalisant partiellement l’interruption volontaire de grossesse.
En agissant de la sorte, le Roi méconnaissait de manière flagrante ses prérogatives constitutionnelles.
En l’espèce, lors de la déclaration gouvernementale, il avait été clairement précisé que le Gouvernement
s’en remettait au Parlement pour régler la délicate question de l’avortement et qu’en conséquence, il ne
ferait pas échec à cette volonté. Il n’appartient évidemment pas Roi de prendre une position qui allait à
l’encontre, d’une part, de la volonté de la majorité exprimée dans chaque chambre et, d’autre part, de
l’engagement pris par le Gouvernement. Ce refus de sanction a entraîné une crise politique marquée
par la constatation de l’impossibilité de régner du Roi pendant une journée. Cependant, il a forcé
les partis chrétiens à sanctionner la loi afin qu’elle passe.

Le refus de sanction est sans doute encore concevable aujourd’hui dans des circonstances
exceptionnelles, mais uniquement, en tout état de cause, sous le couvert de la responsabilité
ministérielle.

2. Promulgation

La promulgation intervient au même moment que la sanction ; elle fait donc également l’objet d’un
contreseing ministériel. Il s’agit de l’acte par lequel le Roi atteste que la loi a été régulièrement votée
par le Parlement et la rend exécutoire. Il ordonne ainsi aux autorités publiques de veiller à son
application, au besoin, par la mise en œuvre de la contrainte. La promulgation est le premier acte
d’exécution de la loi. Le Roi n’agit plus en tant que branche du pouvoir législatif, mais bien en sa qualité
de chef du pouvoir exécutif dont la mission est d’exécuter les lois.

3. Publication

Pour que la loi soit opposable aux citoyens, il ne suffit pas qu’elle soit exécutoire. Elle doit encore être
publiée. La publication, qui intervient après que leministre de la Justice a apposé le sceau de l’État, a lieu
au Moniteur belge en français et en néerlandais. Elle devient obligatoire dix jours après sa publication,
sauf si un autre délai a été fixé par le législateur. Cette publication emporte, dans le chef des citoyens

31
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

uneprésomption irréfragable qu’ils en ont connaissance.

IV. La répartition des compétences législatives entre la Chambre et le Sénat

Pendant longtemps, la Chambre et le Sénat ont été placés sur pied d’égalité lors du processus d’adoption
des lois. Une première réforme a été adoptée en 1993 qui a mis fin à ce bicaméralisme égalitaire entre
les deux assemblées en prévoyant une liste de lois pour lesquelles elles étaient encore appelées à
intervenir à égalité, tandis que, dans tous les autres cas, le Sénat se voyait attribuer le rôle d’une «
chambre de réflexion », pouvant intervenir s’il en manifestait expressément le souhait, la Chambre
disposant cependant du pouvoir du dernier mot.

Depuis la révision constitutionnelle du 6 janvier 2014 (sixième réforme de l’État), le Sénat a perdu
l’essentiel de sa compétence législative puisqu’il n’est plus appelé à se prononcer que pour les
procédures de révision de la Constitution, les lois spéciales et les matières qui doivent
constitutionnellement être réglées par les deux assemblées, ainsi que pour certaines lois ordinaires bien
déterminées qui revêtent un « caractère institutionnel ».

Il convient à cet égard de distinguer les deux catégories suivantes (articles 77 et 78 de la Constitution) :

(1) Les domaines dans lesquels le Sénat intervient à égalité avec la Chambre, comme
auparavant, et qui sont, en substance, les suivants :

• La déclaration de révision de la Constitution et la révision de la Constitution

• Les lois à majorité spéciale

• Les matières qui doivent être réglées par les deux chambres législatives en vertu de la
Constitution. Il s’agit notamment de certaines dispositions constitutionnelles relatives à la
monarchie (assentiment des deux chambres pour lever la déchéance du successeur dutrône qui
se serait marié sans le consentement du Roi, assentiment des deux chambres à la nomination par
le Roi de son successeur, assentiment des deux chambres pour que le Roi devienne chef d’un autre
État, prestation de serment du Roi, désignation d’un Régent à la mort du Roi si son successeur est
mineur, désignation du Régent et du tuteur en cas d’impossibilité de régner, prestation de serment
du Régent, désignation du Régent en cas de vacance du trône) ;

• Les lois relatives aux institutions de la Communauté germanophone et à son financement ;

• Les lois relatives au financement des partis politiques et au contrôle des dépenses électorales ;

• Les lois relatives à l’organisation du Sénat lui-même et au statut de sénateur.

32
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Par ailleurs, par une loi votée à majorité spéciale, il sera possible d’inclure de nouvelles lois dans ce
catalogue de matières bicamérales.

Dans ces matières, la procédure législative reste inchangée par rapport à la situation antérieure à la
réforme du Sénat : les deux chambres se trouvant sur un pied de stricte égalité, les textes sont soumis à
une navette entre elles jusqu’au moment où elles se sont mises d’accord.

(2) Les domaines dans lesquels le Sénat peut encore être appelé à intervenir s’il en manifeste le
souhait après que la Chambre a adopté un projet de loi, et qui sont, en substance, les suivants
:

• Les lois prises en exécution d’une loi à majorité spéciale ;

• Les lois essentielles qui concernent l’organisation de l’État, et plus particulièrement l’organisation
fédérale de celui-ci ;

• Les lois qui devraient être prises, conformément à l’article 169 de la Constitution, pour se
substituer temporairement aux organes des Communautés et des Régions « afin de garantir le
respect des obligations internationales ou supranationales » de la Belgique ;

• Les lois relatives au Conseil d’État et à l’organisation des cours et tribunaux ;

Ici également, il sera possible d’inclure de nouvelles lois dans ce catalogue par une loi votée à majorité
spéciale.

Dans cette hypothèse, le projet provient d’une initiative du Roi ou de la Chambre des représentants, et
le texte doit toujours être voté en premier lieu par la Chambre. Une fois adopté par celle-ci, le projet est
transmis au Sénat, lequel peut, à la demande de la majorité de ses membres, avec au moins un tiers des
membres de chaque groupe linguistique, et dans les 15 jours de la réception du projet, demander à
examiner le texte en question.

Dans cette hypothèse, le Sénat dispose d’un délai de trente jours pour proposer à la Chambre des
représentants des amendements au texte qu’elle a adopté. Dans un tel cas, la Chambre se prononce sur
ces amendements, soit en les adoptant, soit en les rejetant définitivement.

Dans tous les cas de figure des hypothèses ici examinées au 2°, la Chambre des représentants dispose
du pouvoir du dernier mot.

En dehors de ces deux hypothèses, seule la Chambre adopte les lois au niveau parlementaire. Il en va
ainsi par exemple des lois contenant les budgets.

L’article 82 de la Constitution institue une Commission parlementaire de concertation, composée


paritairement de députés et de sénateurs, qui aura la mission de régler les éventuels conflits de
compétence entre les deux assemblées.

33
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

COURS 11

§ 2 . La fonction de contrôle du Parlement

I. Le contrôle politique

Outre son rôle législatif, le Parlement fédéral assume une fonction de contrôle de l’action
gouvernementale. Le contrôle de l’action gouvernementale par le Parlement est lié au principe du
régime parlementaire et de la responsabilité ministérielle. Ce contrôle peut s’effectuer par différents
moyens à la disposition du Parlement. (C’est différent du cas des USA par exemple)

En cette matière, le Sénat a également perdu pratiquement tout pouvoir puisqu’au termede la révision
constitutionnelle de 2014, il ne garde plus que le droit de poser desquestions écrites au Gouvernement,
pour autant qu’elles aient trait à des matières qui relèvent de ses compétences. La révision
constitutionnelle de 1993 avait déjà réservé le pouvoir d’interpeller les ministres à la seule Chambre
des représentants, laquelle est donc depuis cette date en première ligne du contrôle de l’activité
gouvernementale.

Le contrôle parlementaire du Gouvernement s’exerce à plusieurs moments dans le temps et selon


plusieurs techniques et modalités.

A. Le débat sur la déclaration gouvernementale

Une fois le Gouvernement constitué et nommé par le Roi, le Premier ministre rédige la déclaration
gouvernementale. (Présenter le programme du gouvernement en début de législature) Elle fait l’objet
d’une discussion au sein du Conseil des ministres et est lue devant la Chambre des représentants. La
déclaration gouvernementale comprend les grandes lignes de la politique qu’entend mener la nouvelle
équipe, et se clôture par un vote de la Chambre, impliquant la confiance d’une majorité parlementaire
à l’égard du nouveau gouvernement10. Le gouvernement doit recevoir la confiance du parlement à l’issu
de cette déclaration gouvernementale.

B. Les interpellations

L’interpellation est le moyen courant de contrôle de l’activité gouvernementale. Elle permet aux
parlementaires d’engager la responsabilité d’un ou plusieurs ministres ou du Gouvernement dans son
ensemble. Au terme des débats, les parlementaires peuvent déposer des motions appelées ordres du
jour. On peut distinguer trois types d’ordres du jour :
L’ordre du jour pur et simple qui émane habituellement de la majorité. Le vote de cette motion clôt
l’interpellation et équivaut à un vote de confiance ;
L’ordre du jour motivé qui est habituellement déposé par des représentants de l’opposition qui
invitent par là le Gouvernement à agir dans un sens déterminé ou à modifier sa politique ;
L’ordre du jour de méfiance qui vise à retirer la confiance de l’assemblée à un ou plusieurs ministres,
ou encore au Gouvernement dans son ensemble. Son adoption entraîne l’obligation de principe pour
ceux qu’ils concernent à présenter leur démission.

10 Les parlementaires qui votent la confiance au Gouvernement après la lecture de la déclaration gouvernementale enregistrent
à cette occasion la position prise par leur parti. En effet, une fois le programme du gouvernement négocié, les partis convoquent
des congrès de participation. Si une majorité s’y dessine pour appuyer la nouvelle coalition, cette décision sera traduite par les
parlementaires du parti au moment du vote sur la déclaration gouvernementale.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Comme on l’a déjà vu plus haut, une interpellation dirigée contre l’ensemble du Gouvernement qui ne
se solderait que par un vote de méfiance simple, sans proposition de remplacer le Premier ministre mis
en cause, n’implique toutefois plus, depuis 1993, la démission automatique de celui-ci. En effet, le
Gouvernement n’est plus tenu de démissionner que dans l’hypothèse où la Chambre des représentants, à
la majorité absolue de ses membres, adopte une motion de méfiance constructive proposant au Roi la
nomination d’un successeur au Premier ministre. Les mêmes règles sont d’application lorsque cette
proposition est faite, dans les trois jours du rejet d’une motion de confiance. Le Roi doit alors donner
suite à cette proposition (article 96 de la Constitution).

Dans l’hypothèse où la Chambre des représentants adopte une motion de méfiance simple à l’égard du
Gouvernement sans proposer simultanément au Roi la nomination d’un successeur au Premier
ministre, le Roi a le pouvoir de dissoudre les chambres pour sortir de l’impasse politique (article 46 de
la Constitution).

C. Les questions parlementaires (écrites et orales)

Il s’agit d’une technique qui permet un contrôle détaillé et minutieux de l’activité gouvernementale. Les
ministres sont interrogés sur des questions précises qui permettent notamment aux parlementaires de
relayer celles posées par leurs électeurs et de témoigner de l’intérêt qu’ils portent à leurs
préoccupations.

Il peut s’agir de questions orales ou de questions écrites, ces dernières ayant le plus souvent un caractère
technique, à la portée politique en principe réduite, l’objectif étant surtout d’assurer une meilleure
information du Parlement et de la population.

Les réponses des ministres aux questions écrites sont également écrites et ne donnent pas lieu à
discussion ni au vote sur un ordre du jour. Il en va de même pour la réponse orale du ministre aux
questions orales.

En soi, les questions parlementaires ne sont donc pas susceptibles de mettre en cause la responsabilité
du Gouvernement ou de l’un de ses membres et de le contraindre àdémissionner. Si la réponse n’est pas
satisfaisante, il appartient au parlementaire d’interpeller le ministre.

D. L’enquête parlementaire (commission d’enquêtes)

En vertu de l’article 56 de la Constitution, la Chambre des représentants « a le droit d’enquête ». Il s’agit


d’un corollaire logique de la responsabilité politique des ministres devant la Chambre. Pour contrôler
l’activité gouvernementale, la Chambre doit pouvoir s’informer de tous les aspects de la politique du
Gouvernement. Le droit d’enquêteparticipe également de la fonction législative des chambres. Il leur
permet de s’informer afin d’élaborer des législations mieux adaptées à la réalité.

En pratique, ce droit d’enquête s’exerce à l’intervention d’une commission formée au sein de la


Chambre. Dans l’exercice de ce droit d’enquête, la Chambre dispose de tous les pouvoirs d’un juge
d’instruction (sauf celui de délivrer un mandat d’arrêt) et peut entendre, sous serment, des témoins et
des experts. Ces commissions d’enquête viennent en appui aux deux fonctions principales du parlement
(fonction législative et de contrôle). Ces commissions d’enquêtes peuvent mettre en évidence le besoin
de réformer les lois, et inviter ainsi le parlement à exercer sa fonction législative.

35
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Pendant longtemps, les chambres ont peu usé de leur droit d’enquête. Tel n’est plus le
Cas depuis les années 1980. En effet, l’enquête parlementaire a été utilisée afin
D’éclairer les chambres sur les activités de certaines milices privées liées à l’extrême
Droite en 1980, sur les circonstances du drame du Heysel en 1985, sur les carences des
Enquêtes judiciaires à propos des actes de grand banditisme et de terrorisme en 1988,
Ou, dans les années 1990, sur les carences des enquêtes policières et judiciaires dans le
Cadre de l’« affaire Dutroux » et des disparitions d’enfants. Il y a e u de s
re comma nda ti ons de la commiss ion d’e n q uê te e t il y a e u un e va ste
ré fo rme da ns la p olice . (Pol ice in té gré e ) Plus récemment, l’exemple de la
commission d’enquête mise en place dans le cadre de l’« affaire Fortis » au niveau fédéral
ou celle mise en place suite aux attentats commis à Bruxelles et à Zaventem le 22 mars
2016 peuvent aussi être mentionnés. (Tueurs du brabant) Ces enquêtes ont été à l’origine
de vives controverses, notamment parce qu’elles concernaient parfois des enquêtes
judiciaires en cours et mettaient en cause le principe de la séparation des pouvoirs. Elles
ont néanmoins régulièrement permis l’adoption de réformes législatives et réglementaires
importantes visant à remédier aux manquements observés
Comme les séances des assemblées, les commissions d’enquête sont, en principe, publiques. Par
exception, la commission peut prendre la décision de se réunir à huis- clos, notamment pour assurer la
confidentialité de certains témoignages, à la demande des témoins. Elle emporte alors une obligation de
discrétion pour tous ceux qui ont participé à la réunion : pour les non parlementaires, la violation de
cette obligation est constitutive de violation du secret professionnel et peut impliquer des sanctions
pénales ; quant aux parlementaires, ils ne pourront être poursuivis à cet égard, compte tenu de
l’irresponsabilité consacrée par l’article 58 de la Constitution, puisque le parlementaire concerné se
trouvera, par hypothèse, dans l’exercice de ses fonctions. Il n’existe donc pas à proprement parler de
sanction juridique pouvant frapper un parlementaire en cas de non-respect de cette obligation de
discrétion. Tout au plus pourrait-il être exclu de la commission et encore faudrait-il qu’une telle «
sanction » soit prévue dans le règlement de l’assemblée. Dès lors, un témoin qui possède certaines
informations et demande que son témoignage se fasse à huis-clos, ne sera pas assuré que les
informations qu’il livrerait aux membres de la commission sont effectivement couvertes par un secret
absolu. Dans ces circonstances, il sera sans doute moins enclin à révéler ces informations qui pourraient
entraîner des dangers de représailles à sonégard.

Quant à l’issue de la procédure, le rapport de la commission d’enquête ne doit pasnécessairement être


suivi d’un vote. Toutefois, si le rapport met en cause la responsabilité du Gouvernement, rien n’empêche
les parlementaires de prendre desinitiatives pour aboutir à un vote de méfiance. Tel a failli être le cas à
la suite de l’enquête sur le drame du Heysel où la responsabilité du ministre de l’Intérieur était mise
en cause par la commission d’enquête. En fin de compte, la Chambre vota toutefois la confiance au
Gouvernement.

Drame du Heysel : à la suite d’une commission d’enquête concernant cet évènement (tribune qui s’était
effondrée et il y a eu pas mal de morts) responsabilité du ministre de l’Intérieur de l’époque a failli
être mise en cause suite à cette commission d’enquête. Il est parfois difficile pour la chambre des
représentants de ne pas empiéter sur le rôle du pouvoir judiciaire. Par exemple, dans l’affaire Fortis ou
des tueurs du brabant lorsque les députés se posent des questions quant aux défaillances des
différents services (renseignements, urgences etc.) ou sur le rôle des responsables, des magistrats,
potentiellement ces personnes sont aussi susceptibles et parfois font l’objet de poursuites pénales en
parallèle. D’un côté, on a la justice qui ouvre des enquêtes sur certaines personnes, et de l’autre côté il y

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

a des députés qui convoquent ces mêmes personnes et qui leur pose des questions etc. commission
d’enquête doit exercer son rôle de contrôle, mais lorsque ces commissions sont organisées en parallèle
avec des enquêtes pénales qui concernent les mêmes faits, ce n’est pas toujours un équilibre facile à
trouver car il y a des interférences.

II. Le contrôle financier

Historiquement, le contrôle du Parlement sur le Gouvernement et l’administration s’exerçait


essentiellement à travers le vote du budget de l’État et le contrôle des finances publiques. Aujourd’hui,
ce contrôle financier constitue également une prérogative réservée à la seule Chambre des
représentants.
A. Le vote du budget et de la loi des comptes

Le budget est l’acte législatif par lequel la Chambre établit, chaque année, une prévision des recettes et
des dépenses de l’État et accorde au Gouvernement l’autorisation de percevoir ces recettes et de
procéder à ces dépenses. C’est tout à la fois un acte de prévision, d’autorisation et un acte politique par
excellence qui constitue un instrument de contrôle aux mains du Parlement. En effet, c’est par le vote du
budget, précédé d’un large débat, que la Chambre marque sa confiance à l’égard de la politique générale
du Gouvernement, dont le budget est la concrétisation en termes financiers. Sans vote de budget, le
gouvernement ne peut pas agir. Le vote du budget est donc un acte, un instrument de contrôle qui est
important. C’est en voyant le budget prévu par l’état qu’on peut réellement voir les priorités politiques.
Par définition, les arbitrages budgétaires sont le cœur des débats politiques. Si le parlement refuse de
voter le budget, il y a une crise gouvernementale le gouvernement n’a plus la confiance du parlement.

Le projet de budget est élaboré par le pouvoir exécutif et soumis à la Chambre qui l’adopte suivant la
procédure législative ordinaire. En cette matière, le Sénat a perdu toute compétence depuis la révision
constitutionnelle de 1993. A la fin de l’année budgétaire, le parlement vote aussi la loi des comptes, qui
est une loi par laquelle le parlement vote une lois sur les recettes qui ont été perçues et les dépenses
effectuées.

Le budget est soumis à certains principes fondamentaux / constitutionnels :

Le principe d’universalité, selon lequel toutes les recettes et dépenses de l’État doivent être
portées au budget et dans les comptes ; cela interdit le principe des caisses noires. Le gouvernement
ne peut pas avoir à sa disposition une partie des ressources de l’état sans que ça tombe sous le
contrôle du législateur. Dans certains états, il y a ce genre de caisses noires qui ne sont pas contrôlées
(sources de corruption et d’autres pratiques contestables). Ce principe impose que toutes ces
recettes et dépenses soient inscrites dans le budget.

Le principe d’annualité, qui exige que le budget soit voté annuellement et qu’il ne renferme que
les recettes et les dépenses afférentes à l’année budgétaire en question ; douzième provisoires
(budget pour un mois, lorsque le parlement autorise le gouvernement à percevoir des dépenses et
recettes, lorsqu’il y a démission par exemple)

Le principe de spécialité, qui signifie que chaque service est doté d’un budget déterminé, subdivisé
en chapitres et articles distincts qui correspondent à des crédits bien définis, le tout excluant en
principe qu’un article des dépenses du budget soit dépassé ou que des transferts aient lieu ; ce
principe implique que le gouvernement peut effectuer les dépenses prévues pour le ministère
d’intérieur pour cela uniquement, il ne peut pas utiliser cet argent prévu pour l’intérieur pour faire
des dépenses en matière de justice ou en matière d’affaires étrangères.

37
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Le principe de publicité, qui implique qu’un acte aussi important que le budget de l’État soit
débattu publiquement par les chambres et publié au Moniteur belge à l’instar des autres lois.

La Chambre ne se borne pas à adopter le budget. Elle en vérifie aussi l’exécution en votant chaque année
la loi des comptes. Celle-ci clôture les comptes en effectuant une comparaison entre les prévisions de
recettes et de dépenses du budget de l’année écoulée d’une part, et les recettes et dépenses
effectivement réalisées, d’autre part.

B. La Cour des comptes

Dans le contrôle de l’exécution du budget, la Chambre est assistée d’une Cour des comptes dont elle
nomme et révoque les membres. La Cour des Comptes peut, dans ces conditions, être rattachée au
pouvoir législatif. La Cour exerce divers contrôles dans le domaine des finances publiques portant
essentiellement sur la régularité et à la légalité des dépenses (article 180 de la Constitution, loi du 29
octobre 1846 relative à l'organisation de la Cour des comptes et loi du 16 mai 2003 fixant les
dispositionsgénérales applicables aux budgets, au contrôle des subventions et à la comptabilité des
communautés et des régions, ainsi qu'à l'organisation du contrôle de la Cour des comptes).

Parmi ses missions, on peut relever celle-ci : la Cour des comptes communique chaque année à la
Chambre des représentants et aux parlements des entités fédérées un « cahierd’observations » faisant
état d’éventuelles difficultés ou irrégularités dans la gestioncomptable et budgétaire de chaque niveau
de pouvoir. Il appartient alors aux parlementaires d’éventuellement s’en saisir pour interroger, voire
interpeller, leGouvernement concerné et, le cas échéant, mettre en cause sa responsabilité politique
ou celle du ministre dont la gestion serait défectueuse.

La Cour des comptes est chargée d’autres missions par la Constitution et la loi, notamment le jugement
des comptables publics, l’établissement des comptes de l’État et le contrôle, par voie d’avis, de certains
aspects de l’exercice des compétences fiscales par les régions. Son rôle, sur ce dernier point, a été
considérablement accru par la « sixième réforme de l’État » intervenue en 2014, spécialement dans le
cadre de la surveillance du respect de certains principes inscrits dans la nouvelle version de la législation
applicableau financement des entités fédérées. Elle doit notamment éclairer le Gouvernementfédéral et
les gouvernements régionaux sur l’applicabilité technique de l’instaurationdes centimes additionnels
différenciés, des diminutions, réductions et augmentations d’impôt ou des crédits et sur le respect par
les différents législateurs régionaux des principes de progressivité de l’impôt et de l’exclusion de toute
concurrence fiscale déloyale. Il est renvoyé sur ce point au chapitre IV du titre 2, consacré au
financement des communautés et des régions.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

CHAPITRE II - LE POUVOIR EXÉCUTIF


Au niveau fédéral, le pouvoir exécutif appartient, aux termes de l’article 37 de la Constitution, au Roi, et
à lui seulement. Dans la réalité de son fonctionnement, il comprend néanmoins deux branches : le Roi et
le Gouvernement. Ce dernier est assisté d’une administration. Le gouvernement exerce en pratique
le pouvoir exécutif, et peut s’appuyer sur une administration fédérale pour faire tourner les services
publics et pour appuyer l’action gouvernementale.

SECTION 1 : LE ROI

§ 1er. Les titulaires de la fonction royale

Le pouvoir royal peut avoir, en Belgique, pour titulaire un Roi, un Régent ou les ministres réunis en
conseil.

I. Le Roi (Roi Philippe)

Les règles de dévolution du pouvoir royal sont fixées par l’article 85 de la Constitution. La Belgique est,
à cet égard, une monarchie constitutionnelle où la couronne se transmeten principe par hérédité, dans
la descendance directe, naturelle et légitime de Léopold Ier, par ordre de primogéniture :

La descendance doit être naturelle, ce qui signifie que sont exclus les éventuels enfants adoptifs et
leur descendance

Il faut être descendant légitime, ce qui exclut les enfants nés hors mariage (« naturels » au sens que
lui donnait le Code civil avant la réforme de 1987) ; pas très moderne : nous verrons dans le futur si
un roi qui n’a pas de descendant pourrait légitimer un enfant né hors mariage ou bien adopté.

La succession a lieu par ordre de primogéniture, la vocation au trône appartenant par priorité à l’aîné
des enfants d’une même génération.

Par le passé, la couronne était en outre réservée aux héritiers masculins. Ce privilège de masculinité, qui
perpétuait l’ancienne loi salique, a été supprimé en 1991. /!\ pour autant que le roi donne son accord
au mariage de ses enfants, les mariages homosexuels seraient autorisés aux pays bas et en Belgique. (À
l’époque, on avait peur que les biens de la couronne passent entre des mains étrangères, c’était vu
comme dangereux, c’est pour cela qu’on a besoin de l’accord du roi)

Le mariage du Roi est un acte à caractère politique et doit donc être couvert par un ministre. À défaut,
les enfants issus de ce mariage ne sont pas légitimes au sens de l’article 85 de la Constitution.

C’est ce qui explique que, puisque le second mariage du Roi Léopold III avec Liliane
Bales pendant la guerre 1940-1945, le 6 décembre 1941, n’a pas fait l’objet d’un
Contreseing ministériel, les enfants issus de ce mariage n’entrent pas en ligne de compte
Pour la détermination de l’accession au trône. La circonstance selon laquelle le Roi
Léopold III a exprimé le 6 décembre 1941 la volonté que les descendants éventuels de
ce mariage ne bénéficient pas des droits à la succession est théoriquement sans effet
puisque pareille déclaration ne peut en aucune manière primer sur le texte
constitutionnel.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

La Constitution prévoit la déchéance de toute vocation au trône pour le prince qui se serait marié sans
le consentement du Roi. Le prince déchu pourra cependant être relevé de sa déchéance par le Roi,
moyennant l’assentiment des chambres.
Si le Roi n’a pas de descendant au sens indiqué plus haut, c’est, toujours par ordre de primogéniture, son
frère ou sa sœur qui lui succède. Si celui qui devait assurer la succession est décédé ou refuse d’accéder
au trône, ce sont ses descendants, par ordre de primogéniture, qui ont vocation à régner.

À la suite du décès du Roi Baudouin Ier en 1993, le premier héritier dans l’ordre de succession était, à
défaut d’enfant, son frère Albert, lequel lui a donc, normalement, succédé. Après son abdication de
juillet 2013, c’est son fils le prince Philippe, devenu le Roi Philippe, qui lui a succédé de plein droit. La
première héritière du trône à l’heure actuelle est la princesse Elizabeth, la fille aînée du Roi en fonction

À défaut d’héritier présomptif, la Constitution a prévu deux moyens de pourvoir à la succession:

Le Roi peut nommer son successeur, moyennant assentiment des chambres, donné à la majorité
qualifiée des deux tiers des suffrages (article 86) ;

S’il n’y a ni successeur héréditaire, ni successeur nommé, l’article 95 de la Constitution organise le


régime particulier de la vacance du trône (à ne pas confondre avec l’interrègne, qui est la période
séparant le décès ou l’abdication du Roi de la prestation de serment de son successeur) : la
procédure prévoit une régence provisoire et comprend un renouvellement intégral du Parlement
afin de permettre au corps électoral de se prononcer sur la question, grave dans l’esprit du
Constituant, du choix d’une nouvelle dynastie. Le Parlement, siégeant en chambres réunies, désigne
le nouveau Roi11

Pour exercer ses fonctions, le Roi doit avoir atteint l’âge de la majorité, que la Constitution fixe à 18
ans, et prêter, devant les Chambres réunies, le serment prévu à l’article 91 : « Je jure d’observer la
Constitution et les lois du peuple belge, de maintenir l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire
».

Les pouvoirs royaux prennent fin par décès ou par abdication :

Le décès du Roi ouvre une période d’interrègne, de dix jours au maximum, organisée par l’article
90 de la Constitution : les chambres se réunissent, même si elles ont été dissoutes, et, dans l’attente,
les pouvoirs royaux sont exercés par les ministres réunis en conseil. L’interrègne dure jusqu’à la
prestation de serment du nouveau Roi ou d’unRégent.

L’abdication n’est pas prévue par la Constitution et est même contraire à l’esprit de celle-ci.
L’institution monarchique doit, en effet, assurer la permanence et la stabilité de la direction de l’État.
Toutefois, si le Roi refuse de poursuivre l’exercice de ses fonctions, il est évident qu’il ne peut pas y
être contraint. L’histoire constitutionnelle a en outre montré qu’il est des circonstances où
l’abdication est une condition nécessaire pour restaurer le calme dans le pays. Selon la majorité des
auteurs, l’abdication est le seul acte juridique à portée politique du Roi qui ne requiert pas de
contreseing ministériel ; une minorité dans la doctrine considère toutefois que ce contreseing reste
requis dans cette hypothèse.

11Le Parlement statue chambres réunies car la procédure normale de délibération risque, en cas de divergence entre les deux
assemblées, de provoquer une navette qui nuirait au prestige de la future dynastie.

40
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

L’histoire constitutionnelle de la Belgique a connu deux exemples d’abdication : unpremier, lors de


l’abdication en 1951 de Léopold III (suite à la consultation populaire qu’il soit revenu en Belgique),
qui a renoncé à ses pouvoirs constitutionnels au profit du prince Baudouin, à la suite des troubles liés
à la question royale ; un second, plus récemment en 2013, lorsque Albert II a souhaité abdiquer, pour
des raisons d’âge et de santé, au profit de son fils Philippe.

II. Le Régent

a. Les cas de régence


La Constitution prévoit la désignation d’un Régent dans trois hypothèses : en cas de minorité du Roi
(article 92), d’impossibilité de régner (article 93) et de vacances du trône(article 95 ; voy. Plus haut). Le
Régent est, dans tous les cas, élu par le parlement, siégeant en chambres réunies.

1 ) En cas de minorité du Roi ou de vacances du trône, la régence prend fin par laprestation de serment
du nouveau Roi.
2 ) Le régime de l’impossibilité de régner du Roi, prévu par l’article 93 de la Constitution, répond à
l’hypothèse où l’état physique ou mental du Roi l’empêcherait d’exercer ses fonctions12, ce qui explique
que les ministres doivent « faire constater » l’impossibilité de régner et convoquer les chambres, en vue
non seulement de faire pourvoir à la régence, mais également à la tutelle du Roi, c’est-à-dire à
l’administration de sa personne et de ses biens, par les chambres réunies. En pratique, cette disposition
n’a trouvé à s’appliquer qu’à deux reprises dans l’histoire de Belgique et dans des circonstances très
différentes de celles qui avaient été envisagées par le Constituant, ne donnant d’ailleurs pas lieu à une
quelconque tutelle. Avec cette disposition, on a un tête le cas d’un roi qui est devenu fou pendant son
règne (UK), qui est toujours vivant mais qui ne peut pas régner. Constat d’impossibilité de régner par
les ministres (par un médecin, ça c’est l’idée originelle)
Deux cas d’impossibilité de régner en Belgique, le premier cas un régent a été désigné (pendant la
question royale, quand le gouvernement belge quitte la Belgique lors de l’invasion de la Belgique en
Allemagne, mais Léopold III refuse de quitter la Belgique, et donc le conseil des ministres constate
que le Roi est en impossibilité de régner parce qu’ils considèrent qu’il est tombé entre les mains de
l’ennemi. Les ministres ne peuvent cependant pas se réunir à la régence et donc ils ont appliqué la
disposition relative à l’interrègne (conseil des ministres exercent les prérogatives du Roi, en
attendant de convoquer les chambres après la guerre, et à ce moment-là un Régent sera désigné
(Charles) jusqu’au retour du roi en 1950, mais Léopold III va assez vite abdiquer)
Deuxième cas : Beaudouin qui va être déclaré en impossibilité de régner de par ses convictions
personnelles, normalement il aurait fallu convoquer les chambres pour désigner un régent, mais ici
ce n’était pas l’idée puisque c’était juste pour sanctionner la loi, et après ça le roi a repris l’exercice
de ses prérogatives. Le conseil des ministres a appliqué la prérogative de l’interrègne pendant
l’impossibilité de régner pour pouvoir sanctionner la loi, et après cela ils ont déclaré la fin de
l’impossibilité de régner pour le Roi qui a repris l’exercice de ses fonctions

12Dix ans avant la révolution belge, le Roi d’Angleterre Georges III était mort fou et n’était décédé que dix ans après le début
de sa maladie. C’est cet exemple qui a inspiré le Constituant belge lorsqu’il a adopté l’article 93 de la Constitution.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

1. En 1940, le Roi Léopold III ayant décidé, contre l’avis de ses ministres, de rester en Belgique, les
ministres réunis en conseil constatèrent, par un arrêté du 28 mai 1940, l’impossibilité dans laquelle
le Roi, « sous le pouvoir de l’envahisseur », se trouvait de régner. C’est le début de ce qu’on a appelé
la « question royale ». Les circonstances de l’époque allaient justifier les interprétations
audacieuses de la Constitution en cette occasion. Il fut mis fin, en droit, à l’impossibilité de régner
le 20 juillet 1950, mais celle- ci se poursuivit en fait jusqu’à l’abdication du Roi Léopold III, le 16
juillet 1951.

En 1940, les ministres ont constaté l’impossibilité de régner du Roi Léopold III eux- mêmes, au lieu
de la faire constater, ainsi que la Constitution le prévoit. Normalement, ileût en outre fallu, dans le
respect de l’article 93, que les ministres convoquent immédiatement les chambres et que celles-ci
pourvoient à la régence. Les circonstancesde l’époque rendaient évidemment impossible la réunion
du Parlement, et, dès lors, la désignation du Régent. Dans cette situation, les ministres assimilèrent
l’impossibilité derégner au décès du Roi et exercèrent les pouvoirs constitutionnels du Roi, du 28
mai 1940 au 20 septembre 1944, conformément à l’article 90 de la Constitution. L’interrègne, qui
normalement ne devrait pas dépasser dix jours, allait durer quatre ans.

Dès la libération du territoire, le Parlement fut convoqué : le 20 septembre 1944, les chambres
réunies désignèrent le prince Charles en qualité de Régent, considérant quele Roi était toujours
dans l’impossibilité de régner.
Le 19 juillet 1945, une loi fut adoptée, aux termes de laquelle, « lorsqu’il a été fait application de
l’article 93 de la Constitution, le Roi ne reprend l’exercice de ses pouvoirs constitutionnels qu’après
une délibération des Chambres réunies constatant que l’impossibilité de régner a pris fin ».

Le 12 mars 1950, une consultation populaire fit voir qu’une majorité des Belges était en faveur du
retour en Belgique du Roi et de la reprise de ses fonctions.

Le 20 juillet 1950, les Chambres constatèrent la fin de l’impossibilité de régner du Roi Léopold III,
qui rentra au pays le surlendemain. Toutefois, sans retirer la loi du 20 juillet 1950, les Chambres
désignèrent le 10 août suivant le prince Baudouin en qualité de
« Prince royal », considérant en quelque sorte en fait la poursuite de l’impossibilité de régner de
son père.

Le 16 juillet 1951, le Roi Léopold III abdiqua à la suite des violences ayant entouré son retour en
Belgique et, le lendemain, le Prince Baudouin prêta serment en qualité de cinquième Roi des Belges,
mettant fin ainsi à la régence qu’il avait exercée en fait.

2. En 1990, il a été fait application pour la deuxième fois de l’impossibilité de régner du Roi, dans
des circonstances encore plus contestables que celles ayant entouré la
« Question royale », pour résoudre le problème engendré par le refus du Roi Baudouin de
sanctionner le projet de loi relatif à l’interruption volontaire de grossesse. Un arrêté du 3 avril 1990
pris par les ministres réunis en conseil fit état de l’échange de correspondance entre le Roi et le
Premier ministre13 et en déduisit l’impossibilité pour le Roi de régner. Le même jour, le projet de
loi en question fut sanctionné et promulgué par les ministres réunis en conseil sous leur
responsabilité. Le Premier ministre en informa le Roi, qui affirma que la raison de son
impossibilité de régner avait ainsi
« Cessé d’exister ». Cette affirmation est aussi extravagante que révélatrice des circonstances de
cette mini-crise : il est évident qu’un Roi qui se trouve dans l’impossibilité de régner n’a pas à juger

13Le Roi avait invité le Gouvernement et le Parlement « à trouver une solution juridique qui concilie le droit du Roi de ne pas
être forcé d’agir contre sa conscience et la nécessité du bon fonctionnement de la démocratie parlementaire ».

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

du moment où celle-ci prendra fin, ni à marquer à l’avance son accord sur la décision que les
chambres réunies prendraient à ce sujet. Les ministres, réunis en conseil, convoquèrent alors les
chambres réunies, lesquelles constatèrent, le 5 avril, la fin de l’impossibilité de régner.

On peut d’emblée relever une différence par rapport à la situation de 1940. Tout d’abord, à
l’époque, les circonstances constitutives de l’impossibilité de régner étaient extrinsèques à la
volonté du Roi puisqu’en 1940 il se trouvait sous le pouvoir de l’envahisseur et qu’en 1945 il existait
une majorité au Parlement pour s’opposer à son retour. En 1990, en revanche, les circonstances
qui ont justifié le recours au mécanisme
De l’impossibilité de régner trouvaient leur source exclusive dans l’attitude du Roi, de telle sorte
qu’il n’était plus question d’invoquer un cas de force majeure.

En outre, en 1940, le Gouvernement était dans l’impossibilité matérielle de convoquer les chambres
pour pourvoir à la tutelle et surtout à la régence, les parlementairess’étant dispersés du fait de la
guerre. Cette circonstance a justifié l’application analogique de l’article 90 relatif à l’interrègne. En
1990, par contre, rien ne s’opposait à ce que les ministres réunis en conseil convoquent
immédiatement les Chambres commel’exige l’article 93.

Il en résulte que le système ingénieux mis en œuvre par le Gouvernement ne respectait pas
l’économie de la Constitution. Il n’y avait, à l’évidence, aucune impossibilité derégner – le Roi
étant intellectuellement et matériellement apte à exercer ses fonctions – et il n’y avait pas non plus
matière à application par analogie de l’article 90 de laConstitution, puisque rien n’interdisait aux
ministres réunis en conseil de convoquer immédiatement les Chambres réunies. Tel n’est pas le
moindre des paradoxes de lacrise de 1990. Afin de pallier les effets de la méconnaissance par le
Roi de ses obligations constitutionnelles, le Gouvernement a été contraint d’imaginer une solution
qui bien que méconnaissant à son tour la Constitution, présentait au moins le mérite de
sauvegarder la paix institutionnelle. En effet, si les autres solutions (l’abdication du Roi, la
désignation d’un Régent ou la démission du Gouvernement) étaient, quant à elles, conformes au
prescrit constitutionnel, elles auraient plus que probablement été à l’origine d’une des plus graves
crises de notre histoire institutionnelle.

b. Les pouvoirs du Régent

Les pouvoirs du Régent sont les mêmes que ceux du Roi. Toutefois, aucune révision touchant aux articles
de la Constitution relatifs au statut ou aux pouvoirs du Roi ne peut avoir lieu pendant une régence.

c. La régence dans l’histoire de Belgique

Il y eut, au cours de notre histoire institutionnelle, trois régences :


Celle du baron Suret de Chokier, du 24 février 1831, peu après l’adoption de la Constitution, le 7
février 1831, à la prestation de serment de Léopold I er, le 21 juillet 1831
Celle du Prince Charles, de 1944 au 20 juillet 1950, par suite de l’impossibilité derégner de Léopold
III ;
Celle du « Prince royal » : du 11 août 1950 au 16 juillet 1951, le prince Baudouin, fils de Léopold III,
s’est vu attribuer par les Chambres le titre de « Prince royal », période au cours de laquelle il a
exercé les pouvoirs du Roi, Léopold III souhaitant s’écarter temporairement de la vie publique ; ce
régime était en fait une régence.

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III. Les ministres réunis en conseil

Comme on l’a déjà vu, les ministres réunis en conseil exercent, en vertu de l’article 90 de la Constitution,
les pouvoirs constitutionnels du Roi en cas d’interrègne, jusqu’à ce qu’un Roi ou un Régent ait prêté
serment. La même règle a été appliquée par analogie, en cas d’impossibilité de régner.

Les interrègnes sont en principe de très courte durée et les ministres réunis en conseil réduisent leurs
interventions au strict minimum. Le 28 mai 1940, toutefois, après la décision du Roi Léopold III de rester
en Belgique, il n’a pas été possible de pourvoir immédiatement à la régence et les ministres réunis en
conseil ont exercé les pouvoirs du Roi pendant plus de quatre ans.

§ 2. Les principes relatifs à l’exercice de la fonction royale

I. L’inviolabilité de la personne royale

= les ministres ne peuvent pas discuter, mettre en cause la responsabilité politique du roi, c’est
constitutionnellement interdit. Pénalement, le roi est également irresponsable. Irresponsabilité totale
du roi sur le plan pénal. Sur le plan civil, irresponsabilité personnelle également. Même s’il y a un
système qui permet de compenser ce principe (la liste civile).

L’inviolabilité de la personne royale est établie par l’article 88 de la Constitution. Elle se fonde sur l’idée
que le Roi ne peut mal faire (selon l’adage anglais : « King cane do no wrong »).

Cette idée reposait au départ sur l’origine divine du pouvoir. Actuellement, elle repose en partie sur la
considération que le Roi ne peut agir mal parce qu’il ne peut agir seul : selon l’article 106 de la
Constitution, aucun acte du Roi ne peut avoir d'effet, s'il n'est contresigné par un ministre, qui, par cela
seul, s'en rend responsable. Étant inviolable, le Roi est irresponsable : seuls les ministres assument la
responsabilité des actes du Roi. L’irresponsabilité s’applique au domaine de la responsabilité politique,
de la responsabilité pénale et, dans une moindre mesure, de la responsabilité civile :

Sur le plan politique, il appartient aux ministres seuls de répondre des actes du Roi. Aucun compte
ne peut être demandé directement à celui-ci. La personne du Roi ne peut être mêlée aux discussions
parlementaires ;

Sur le plan pénal, le Roi est à l’abri de toute poursuite répressive, quel que soit l’acte délictueux ou
criminel qu’il ait pu commettre, que ce soit dans son activité publique ou dans sa vie privée ;

Sur le plan civil, la portée de l’irresponsabilité est moins absolue : elle empêche seulement que le
Roi soit cité personnellement en justice. Les personnes qui auraient un droit à faire valoir à son
encontre peuvent assigner l’administrateur de la liste civile.
II. L’incapacité pour le Roi d’agir seul : le contreseing ministériel

Cette irresponsabilité est liée à ce contreseing ministériel. Le roi ne peut pas être mis en cause car ce
sont les ministres qui prennent la responsabilité. On peut par contre remettre en cause la responsabilité
des ministres. Ce sont eux qui se rendent responsables des actions du Roi.

Conformément à l’article 106 de la Constitution, tout acte du Roi pouvant avoir une incidence politique
doit être couvert par un ministre. Le Roi n’a donc, seul, aucun pouvoir : toute décision royale est le
produit d’un accord intervenu entre le Roi et le ministre, qui en prend la responsabilité. Le champ
d’application de ce principe est général : il couvre tous les pouvoirs du Roi. Ceux-ci sont ainsi
conditionnés par l’existence d’un contreseing ministériel, à savoir par une intervention active d’un

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ministre. Sans contreseing, le Roi est privé de tout moyen d’action ou d’expression, à l’exception de son
droit d’abdiquer, du moins selon la doctrine dominante.

L’incapacité du Roi d’agir seul, ainsi que son irresponsabilité, l’astreignent à une neutralité absolue. À
l’occasion de la crise du 4 avril 1990, le Roi Baudouin a, publiquement, posé la question suivante : «
serait-il normal que je sois le seul citoyen belge à être forcé d’agir contre sa conscience dans un domaine
essentiel ? La liberté de conscience vaut-elle pour tous sauf pour le Roi ? ». La réponse à cette question
doit être nuancée : le Roi est le seul citoyen belge qui soit privé du droit de faire publiquement état
d’une opinion politique et philosophique. Si, en tant qu’homme privé, il est bien évidemment maître de
ses convictions, il incarne symboliquement, en sa qualité de chef de l’État irresponsable, la Nation
entière et ne peut, en conséquence, prendre parti, à propos d’une question politique ou philosophique,
sans être couvert par ses ministres. L’alternative qui s’offrait à lui était somme toute assez simple : soit
il considérait que la sanction d’une loi est un acte formel qu’il accomplit en tant qu’institution et qui ne
présume en rien de ses opinions personnelles sur le fond de la loi en cause, soit il constatait qu’il ne
pouvait pas, en conscience, sanctionner cette loi et donc qu’il nepouvait pas assumer ses obligations
constitutionnelles. La seule solution cohérente était alors d’abdiquer.

Pour les actes écrits du Roi, la responsabilité des ministres se manifeste par le contreseing. En ce qui
concerne les actes non-écrits du Roi, la responsabilité en est toujours couverte par un ministre : ainsi,
les discours du Roi ne peuvent être prononcés qu’après qu’un ministre ait donné son assentiment.

III. Colloque constitutionnel et prérogatives royales

Par exception à la règle du contreseing, le Roi a le droit d’exposer ses vues personnelles, toujours
secrètement, au cours de ce que l’on appelle le « colloque constitutionnel »,dans le cadre duquel il
noue un dialogue constant avec ses ministres et, en période de crise politique, avec le formateur ou les
hommes politiques qu’il consulte en vue d’arriver à constituer un gouvernement. Les ministres peuvent
cependant décider de suivre ou non les conseils du Roi. Ici le Roi peut faire valoir un point de vue
personnel vis-à-vis des ministres ou des personnes qu’il reçoit, il peut montrer son désaccord, mais ceci
ne peut pas être rendu public et le gouvernement est libre d’écouter ou pas.

Au sein de ce colloque, le Roi a, selon la célèbre formule du constitutionnaliste britannique W. Bagehot,


les prérogatives d’être consulté, d’encourager et d’avertir. C’est ce que l’on entend par les prérogatives
royales. Le droit d’encourager consiste dans le fait de recommander l’adoption de telle ou telle mesure14,
alors que le droit d’avertir consiste à mettre en garde les ministres et de leur signaler son désaccord sur
tel ou tel point.

Le principe du secret du colloque constitutionnel permet de se passer de contreseing ministériel.


Ce secret, qui permet d’assurer le maintien de la neutralité du Roi à l’égard du public, n’est cependant
plus toujours assuré dans la réalité des choses : il est, ainsi, devenu de pratique courante de terminer
les conseils des ministres par des communiqués ou des déclarations du Premier ministre, annonçant
que le Gouvernement s’est mis d’accord sur tel projet d’arrêté royal qui sera soumis à la signature du
souverain.

14 C’est ce que Roi a fait, par exemple, le 24 octobre 1990, lorsqu’il a fait part à ses ministres de ses préoccupations sur la
situation au Rwanda et les a enjoints d’y envoyer des troupes militaires. Une telle attitude a pu choquer autant par le contenu
que par la forme. Or il n’y avait là rien de contestable sur le plan juridique – si ce n’est la divulgation de cette initiative par un
ministre indélicat – car le Roi, pour autant que son initiative ne reçoive aucune publicité, est libre de conseiller le
Gouvernement, celui-ci étant libre à son tour de ne pas tenir compte des conseils ainsi prodigués

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IV. Les moyens d’action du Roi : la liste civile

Afin de pouvoir faire face aux charges de sa fonction, le Roi dispose, à côté des membres du
Gouvernement, de collaborateurs personnels qui forment la Maison du Roi et ne sont pas responsables
devant le Parlement. Le Roi peut en principe les choisir librement et les nomme par un arrêté de maison
portant le contreseing (purement formel), non pas d’un ministre, mais du grand maréchal de la Cour.

Il bénéficie d’autre part, suivant l’article 89 de la Constitution, de moyens financiers contenus dans la
liste civile, fixée par une loi au début de chaque règne, pour la durée de ce dernier. Le montant qui est
ainsi annuellement octroyé au Roi fait par ailleurs l’objet d’une indexation.

SECTION 2 : LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL


Le Gouvernement fédéral se compose de ministres et, depuis 1970, de secrétaires d’État. Le rôle joué
par le gouvernement fédéral est politiquement plus important.

§ 1er. La nomination des membres du Gouvernement

Qui peut être nommé ministre par le Roi ? Modes de formation des gouvernements :

Selon les articles 96 et 104 de la Constitution, les membres du Gouvernement fédéral sont nommés par
le Roi. (Peu de détails à ce niveau dans la constitution) Le pouvoir de nomination qui est ainsi reconnu
au Roi est assorti de plusieurs limites :

Restriction de nationalité : les articles 97 et 98 de la Constitution interdisent de nommer des


étrangers, ainsi que des membres de la famille royale

Restriction de nombre : depuis la réforme constitutionnelle de 1993, le Roi n’est plus libre de
nommer autant de ministres qu’il le souhaite. Le nombre total de ceux-ci ne peut être supérieur à
quinze. Aucune limitation n’est, en revanche, posée en ce qui concerne le nombre de secrétaires
d’État

Parité linguistique : Le Roi doit, en outre, respecter la règle de la parité linguistique entre les
ministres. En vertu de l’article 99, al. 2, de la Constitution, le Conseil des ministres compte autant de
ministres d’expression française que de ministres d’expression néerlandaise. Cette disposition
procède de la considération que le Conseil des ministres est l’arbitre des conflits communautaires
et constitue, dans l’organisation du pouvoir exécutif, une règle de protection de la minorité
francophone, à l’instar des règles relatives aux chambres telles que les groupes linguistiques, la
majorité spéciale et la procédure de la sonnette d’alarme. Le Premier ministre est éventuellement
excepté de la composition paritaire. C’est cette parité qui permet d’avoir un équilibre lorsque les
décisions sont adoptées. (Germanophones sont complètement exclus de cette division paritaire)

Vote de méfiance : dans le cas où l’obligation de nommer un Gouvernement fait suite à un vote de
méfiance de la Chambre des représentants ou du rejet par celle-ci d’une motion de confiance,
proposant la nomination d’un nouveau Premier ministre, le Roi est tenu de suivre cette proposition.

Majorité parlementaire pour avoir le vote de confiance : enfin, la coutume constitutionnelle


apporte au pouvoir de nomination des ministresdes restrictions très importantes. En effet, le
Gouvernement devant jouir de la confiance de la Chambre des représentants, le Roi ne peut nommer
que des personnalités susceptibles d’obtenir l’appui d’une majorité parlementaire.

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En plus des ministres, Le Roi dispose également du pouvoir de nommer des secrétaires d’État mais ceci
n’est pas une obligation.15 Ceux-ci sont des ministres à l’égard des chambres et de l’extérieur, mais des
« sous-ministres » à l’intérieur du Gouvernement. En principe, les règles valables pour les ministres sont
applicables aux secrétaires d’État, sous la réserve notable qu’ils ne font pas partie du Conseil des
ministres. Il en résulte que la règle de la parité linguistique, ne visant que le Conseil des ministres, n’est
pas applicable aux secrétaires d’État, de même que la limitation de leur nombre. Pour le surplus, le
secrétaire d’État est adjoint à un ministre qui a un droit de contrôle sur ses actes et qui peut, le cas
échéant, les réformer.
Procédure de nomination

C’est le moment dans la vie politique Belge ou le Roi a le plus de manœuvre. Si le Roi a encore une
influence dans la vie politique en Belgique, c’est à ce moment-là. Le rôle joué par le Roi à ce moment-là
n’est pas soumis à l’obligation du contreseing ministériel (c’est le premier ministre sortant qui est
chargé de couvrir les décisions, mais pas de responsabilité formelle)

La procédure aboutissant à nommer les membres d’un Gouvernement ne répond pas à des règles
strictes. Sauf dans l’hypothèse où le Premier ministre serait désigné à la suite d’une motion de méfiance
constructive par la Chambre des représentants, on peut identifier les étapes suivantes :

Consultations : le Roi commence par procéder à des consultations. À cette occasion, il reçoit des
personnalités politiques importantes, tels les présidents des assemblées, les dirigeants des grands
partis politiques et des groupes parlementaires, et des personnalités dumonde économique et social.
(Pratique, pas une obligation constitutionnelle)

Informateur : le Roi désigne, ensuite, généralement un informateur qui aura pour mission de
poursuivre les consultations pour le compte du Roi et de voir quelles sont les formules de
gouvernement possibles (cela quand les consultations ne sont pas encore assez mûres, cette phase-
là peut parfois s’éterniser) Quand le Roi nomme certains informateurs, pré-formateurs et
formateurs, cela donne vocation à ces personnes d’intégrer ces personnes au gouvernement.

Pré-formateur : il y a parfois des pré-formateurs quand la procédure est trop longue. (S’il n’y a pas
d’accord qui se dégage lors des premières étapes, il y a une étapes d’informateur plus longs)

Formateur : une fois la mission de l’informateur terminée, ou directement après ses premières
consultations, le Roi désigne un formateur, qui est chargé d’établir un programme de gouvernement
et de constituer une équipe gouvernementale. Ensuite le Roi nomme le premier ministre.

Durant cette phase, c’est le jeu politique et la pratique politique qui organisent cette phase-là. La
contrainte, c’est qu’il faut arriver à un gouvernement qui puisse disposer d’une majorité au sein de la
chambre des représentants. Le Roi nomme premier ministre le formateur, généralement, et ce premier
ministre va identifier les personnes des différents partis qui vont devenir ministres. Politiquement,
chacun des partis de la coalition en fonction de son poids électoral va avoir droit à plus ou moins de
ministres, et à des portefeuilles ministériels plus ou moins importants. En pratique, différents postes
ministérielles correspondent à un nombre de point différents, et on met également dans le pot commun
différentes positions (commissaire européen par exemple), et chaque parti utilise son portefeuille de
point pour avoir les positions disponibles et ensuite les distribuent à leurs partis.

15 LaConstitution évoque le pouvoir de nommer et de révoquer « les » secrétaires d’État, alors qu’elle énonce que le Roi nomme
et révoque « ses » ministres. Cette différence de rédaction est voulue, et les deux textes ont une portée différente : le Roi est
obligé de nommer des ministres, afin de couvrir sa responsabilité. Par contre, il a la faculté, mais non l’obligation, de nommer
des secrétaires d’État.

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La conduite des consultations du Roi, ainsi que la désignation des personnalités chargées de mener les
négociations relatives à la formation du Gouvernement, comptent au nombre des rares actes par
lesquels le Roi exerce réellement une action personnelle sur la vie politique. La nomination des
informateurs, formateurs, ou autres médiateurs est annoncée par un communiqué du palais et ne fait
pas l’objet d’un acte contresigné par un ministre. Il reste que la responsabilité politique de toutes les
initiatives prises parle chef de l’État durant cette période transitoire est assumée par le Premier ministre
démissionnaire.
La nomination proprement dite du Gouvernement peut alors intervenir : le Premier ministre est nommé
par un arrêté royal contresigné par son prédécesseur. C’est ce que l’on appelle un « contreseing de
courtoisie ». Il a pour seul objet d’assurer la régularité juridique de l’acte du Roi, mais il est évident que
le Premier ministre démissionnaire n’assume pas la responsabilité de la politique du futur
gouvernement. On admet d’ailleurs qu’en cas de refus du Premier ministre démissionnaire de contresigner
l’arrêtéde nomination de son successeur, ou en cas de force majeure, le nouveau Premier ministre pourrait
contresigner sa propre nomination. En outre, au cas où un premier ministre est reconduit dans ses fonctions,
un arrêté royal contresigné par un ministre important du Gouvernement démissionnaire refuse la démission
présentée par ce Premier ministre.

Le premier acte du nouveau Premier ministre consiste à contresigner l’arrêté acceptant la démission de
l’ancien Gouvernement ; il contresigne ensuite l’arrêté royal nommant les nouveaux ministres.

Par ailleurs, le Roi tient du pouvoir de nommer et de révoquer les ministres, celui de déterminer leurs
attributions et la répartition des compétences entre les différents ministères. Le pouvoir réservé au Roi
est évidemment formel. La répartition des portefeuilles fait l’objet d’une négociation politique qui
précède la formation du Gouvernement, dans laquelle les présidents de partis jouent un rôle essentiel.

COURS 12

§ 2. La révocation des membres du Gouvernement

Selon les articles 96 et 104 de la Constitution, le Roi a le pouvoir de révoquer - moyennant contreseing
- les ministres et les secrétaires d’État. Pour se maintenir en charge, ceux-ci doivent conserver la
confiance du Roi. Il ne s’agit pas de confiance personnelle, mais d’une confiance d’ordre politique qui
s’apprécie en fonction de la volonté présumée de la nation. Le Roi ne peut retirer sa confiance au
Gouvernement que s’il a la conviction que l’équipe gouvernementale ne jouit plus de la confiance du
pays.

Le chef de l’État a très rarement usé de son pouvoir de révoquer ses ministres. Outre certains exemples
historiques avant la première guerre mondiale, des cas de « révocation déguisée » ont eu lieu en 1977
et en 1980, lorsque certains ministres appartenant respectivement au Rassemblement wallon, dans le
premier cas, et au F.D.F., dans le second cas, ont été révoqués à la suite de dissensions entre ces ministres
et le reste du Gouvernement. Dans les deux cas, la décision a été prise à l’intervention du Premier
ministre et n’a en rien impliqué le Roi.

§ 3. La démission des membres du Gouvernement

I. Les cas de démission


On distingue trois cas dans lesquels le Gouvernement est contraint à la démission :

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Motion de méfiance : lorsqu’il a perdu la confiance de la Chambre des représentants, à la suite du


dépôt d’une motion de méfiance constructive, signée par la majorité absolue de ses membres, ou du
rejet d’une motion de confiance suivie, dans les trois jours, de la proposition par la Chambre au Roi
d’un successeur au Premier ministre. C’est l’application de la règle de la responsabilité ministérielle,
consacrée par les articles 88 et 96 de la Constitution.
Lendemain des élections législatives : en vertu de la coutume constitutionnelle, le Gouvernement
présente toujours sa démission au lendemain des élections législatives, pour laisser au Roi une
entière libertédans le choix des personnalités appelées à former le nouveau gouvernement, et lui
permettre de constituer une équipe répondant au mieux aux vœux de l’électorat, ce qu’il ne pourrait
faire en toute liberté, si l’équipe sortante continuait à exercer ses fonctions.
Nouveau Roi ou Régent : en vertu de la coutume constitutionnelle, lorsqu’un nouveau Roi ou un
Régent prête serment, le Gouvernement offre sa démission afin de laisser au nouveau souverain une
entière liberté dans le choix de ses ministres. Le Roi peut refuser la démission.

En pratique, dans l’immense majorité des cas et hors l’hypothèse d’élections législatives, les démissions
gouvernementales interviennent spontanément, dans des cas où elles ne sont pas obligatoires en vertu
de la Constitution ou de la coutume constitutionnelle.C’est généralement par suite de dissensions au
sein de la coalition que les gouvernements offrent leur démission. Les dissensions de la majorité
(notamment entre partis politiques soutenant le Gouvernement) se répercutent au sein du Conseil des
ministres qui peut s’en trouver paralysé. En effet, le Conseil des ministres délibère dans le respect de la
procédure du consensus, ce qui n’implique qu’aucun de ses membres ne soit opposé à l’une de ses
décisions et qu’en principe, l’on n’y vote pas16. Une fois la décision majoritaire exprimée, chaque
ministre examine s’il peut, en conscience, y souscrire : si tel est le cas, il se soumet et perd le droit de
critiquer, du moins publiquement, la décision ainsi prise ; dans la négative, il doit se démettre et quitter
un Gouvernement dont il n’approuve plus l’orientation politique.

Indépendamment même de l’exigence de parité, la procédure du consensus constitue une garantie pour
les francophones : il suffit en effet que la majeure partie des ministres francophones refuse de souscrire
à une décision pour provoquer une crise et empêcher cette décision de sortir ses effets.

En cas de démission spontanée du Gouvernement, la dissolution des chambres n’est possible qu’à
condition d’obtenir l’assentiment préalable de la Chambre des représentants. (Moitié de ses membres)
À défaut, il faut, pour débloquer la situation, que celle-ci vote une motion de méfiance sans proposer
simultanément la nomination d’un nouveau Premier ministreou rejette une motion de confiance, sans
proposer dans les trois jours la nomination d’un nouveau Premier ministre. Dans ces cas, en effet, le
Roi peut également procéder à la dissolution de la Chambre (article 46 de la Constitution).

Le premier ministre offre sa démission au roi et si le Roi l’accepte officieusement alors il entame
la procédure de formation d’un nouveau gouvernement.

II. La procédure de démission

Dans l’hypothèse du vote d’une motion de méfiance constructive conformément à l’article 96 de la


Constitution, le remplacement du Gouvernement revêt un caractère automatique.

Dans les autres cas, le Gouvernement présente, par la voix du Premier ministre, sa démission au Roi.

16Ceci mérite des nuances. En effet, si en pratique, il semble qu’on ne vote pas au sein du Conseil des ministres, le principe du
vote n’est pas, en soi, interdit. Le caractère collégial des décisions, la solidarité gouvernementale et le principe du secret des
délibérations requièrent simplement que les résultats d’un vote éventuel ne soient pas portés à la connaissance du public et
que le gouvernement en assume collectivement la responsabilité.

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Celui-ci dispose d’une certaine marge d’appréciation et peut, par exemple, tenir sa décision en suspens
ou même refuser cette démission lorsqu’il lui paraît que la crise peut être résolue entre les membres de
la coalition. À défaut, le Roi accepte cette démission officieusement. Cette décision est annoncée par un
communiquédu palais, et ne fait pas l’objet d’un acte contresigné par un ministre. Dans ce communiqué,
le Roi charge le Gouvernement démissionnaire d’expédier les affaires courantes. Il entame ensuite
immédiatement les consultations devant mener à la constitution d’un nouveau Gouvernement.

Lorsqu’une nouvelle équipe a pu être constituée, le Roi nomme un nouveau Premier ministre, sous le
contreseing duquel il accepte ensuite officiellement, par arrêté royal, la démission de l’ancien
Gouvernement. C’est cet arrêté qui met fin aux fonctions du Gouvernement démissionnaire.

III. Les affaires courantes

Pendant qu’un gouvernement est officieusement démissionnaire (car la démission est acceptée
officiellement uniquement lorsqu’un nouveau gouvernement est formé) le gouvernement
continue d’être en place mais il n’a plus les pleins pouvoirs (il est limité à ce qu’on appelle les
affaires courantes) Pourquoi ?

Pendant cette période de transition, nous avons deux impératifs ; d’une part, pendant qu’il n’ y a pas de
gouvernement, on doit quand même avoir quelqu’un qui prends en charge le gouvernement (exemple,
démission de Charles Michel, au mois de mars 2020 le covid a débarqué en Belgique, heureusement que
Michel était quand même en fonction, même si son gouvernement était démissionnaire, il pouvait
continuer assurer la gestion de l’état). D’un autre côté, dans un régime parlementaire, la légitimité du
gouvernement tient dans le fait qu’il a reçu la majorité des membres de la chambre des représentants.
Plus précisément, en cas de désaccord entre la chambre et le gouvernement, la chambre peut voter une
motion de méfiance, et la sanction de cette motion est la démission du gouvernement. Mais si le
gouvernement est déjà démissionnaire, la chambre n’a plus de pouvoir à son égard, la chambre n’a plus
de moyens de le sanctionner le gouvernement fédéral avec lequel elle serait en désaccord. Le contrôle
de la chambre est moins effectif, et donc les pouvoirs du gouvernement sont diminués.

Comme nous l’avons relevé, il s’écoule un certain laps de temps, entre le moment où un Gouvernement
présente sa démission et où le Roi l’accepte officieusement et celui de l’acceptation officielle de cette
démission, pendant lequel le Gouvernement démissionnaire reste en charge pour assurer la continuité
du fonctionnement des institutions. Ce Gouvernement est alors chargé d’expédier les affaires courantes.
Il ne peut, en revanche, prendre de décisions dont la portée excèderait ces « affaires courantes ».
Les contours de la notion d’affaires courantes restent relativement imprécis. On peut cependant en
distinguer trois types :
Les affaires habituelles, qui relèvent de la gestion quotidienne des affaires publiques, sans
incidence politique réelle (routine, pas d’enjeu politiques)
Les affaires en cours, qui constituent le prolongement et l’aboutissement normal de procédures
entamées avant la démission du Gouvernement et qui sont en principe sans incidence politique
nouvelle ; (ici, le gouvernement ne peut plus rien faire vraiment qui engage sa responsabilité
politique, les choix politiques ont déjà été posées, donc si la chambre avait eu un problème elle aurait
posé son désaccord)
Les affaires urgentes, à savoir celles qui, si elles n’étaient pas réglées sur le champ, risqueraient de
causer un préjudice irréparable à la collectivité. L’état d’urgence crée,par hypothèse, une situation
d’exception dont l’effet principal est précisément d’attribuer à l’autorité publique des pouvoirs dont

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

elle n’aurait pas disposé en temps normal. (Exemple Covid, pas de décisions parlementaires, mais
situation urgente où on ne peut pas attendre la formation d’un nouveau gouvernement, ici c’est le
Conseil d’état qui a été saisis de recours en annulation contre les décisions prises par le
gouvernement démissionnaire et qui a annulé certains arrêtés royaux ou démissionnaires en disant
que ça a été trop loin par rapport à ce que peut faire un gouvernement démissionnaire) (toute
personne qui justifie d’un intéret peut introduire un recours en annulation devant le Conseil d’état
contre un acte administratif adopté par le gouvernement, ministre, roi, acte de nature règlementaire
à portée individuelle)

Il faut noter que, lorsque le remplacement du Gouvernement se fait suite au rejet par la Chambre des
représentants d’un vote de confiance ou à l’adoption par la Chambre d’une motion de méfiance, avec,
dans les deux cas, proposition d’un successeur au Premier ministre, s’il existe encore une période
d’affaires courantes – le temps que le Premier ministre s’entoure de ministres et qu’ils prêtent serment
devant le Roi –, celle-ci devrait, en toute hypothèse, être d’une durée très brève.

Voir vidéo mentionné sur les slides

Mode normal par lequel une législature s’achève en Belgique : Article 195

§ 4. La responsabilité ministérielle

Comme on l’a déjà vu plus haut, la responsabilité ministérielle est le corollaire du régime parlementaire.
Il faut distinguer, à cet égard, deux types de responsabilité des ministres : ceux-ci peuvent voir engager
leur responsabilité pénale ou civile, d’une part, et leur responsabilité politique, d’autre part.

I. La responsabilité pénale des ministres

En ce qui concerne la responsabilité pénale, les ministres bénéficient d’un régime d’exception organisé
par l’article 103 de la Constitution et par sa loi d’exécution du 25 juin 1998. Ce régime est fondé sur
un « privilège de juridiction » et se caractérise par la nécessité de l’intervention de la Chambre des
représentants pour les actes les plus importants de la procédure. Ce régime concerne les infractions
commises par les ministres dans l’exercice de leurs fonctions et celles commises en dehors de l’exercice
deleurs fonctions et pour lesquelles ils sont jugés pendant l’exercice de leurs fonctions.

Comme tout citoyen, les ministres sont responsables civilement et pénalement, de leurs actes, mais les
règles particulières de compétence et de procédure sont justifiées par la nécessité d’éviter aux
ministres qu’ils soient les victimes d’actions inspirées par des motifs malveillants, qui pourraient
avoir un caractère politique et partisan et qui mettraient en cause la légitimité de leur pouvoir ou
freinerait leur activité. À nouveau, comme pour la responsabilité pénale des parlementaires, c’est le
principe de la séparation des pouvoirs qui inspire ce régime spécifique.

Sur le plan pénal, les ministres sont jugés par la Cour d’appel dans les conditions suivantes. Les
poursuites ne peuvent être intentées que par le procureur général auprès de cette Cour, mais
l’autorisation de la Chambre des représentants est requise pour la citation du ministre ou de l’ancien
ministre devant la Cour ou pour le règlement de la procédure, c’est-à-dire la saisine de la chambre des
mises en accusation de la Cour d’appel en fin d’instruction, destinée à permettre à cette juridiction
d’instruction de statuer sur l’éventuel renvoi de l’inculpé devant le juge du fond, sur le non-lieu ou sur
toute autre mesure portant sur les mérites de l’instruction.

Hormis le flagrant délit, l’arrestation ou la mise en détention préventive d’un ministre nesont possibles
qu’en vertu de l’autorisation de la Chambre des représentants.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

De même, sur le plan civil, la responsabilité des ministres obéit à un régime d’exception qui, selon
l’article 103, in fine, de la Constitution, doit être mis en œuvre par une loi. Actuellement, aucune loi n’a
été adoptée pour la responsabilité civile résultant d’un fait ne constituant pas une infraction. On admet
en revanche que, pour les suites civiles d’une infraction, c’est la Cour d’appel qui est compétente sur la
base des règles énoncées ci-avant, mais la partie civile ne peut pas agir directement : elle doit se
constituer partie civile devant la Cour après que celle-ci a été saisie par le procureur général.

II. La responsabilité politique des ministres

La responsabilité politique des ministres s’exerce également, en vertu de l’article 101 de la Constitution,
devant la seule Chambre des représentants. Le Sénat garde toutefois certains moyens de pression ; il
peut notamment demander ou requérir la présence des ministres, étant entendu que ceux-ci peuvent
également toujours se présenter spontanément devant cette assemblée.

Les différentes formes de responsabilité – individuelle ou collective – constituent le corollaire des


moyens de contrôle de l’assemblée législative sur le Gouvernement. La responsabilité politique devant
les chambres sanctionne les obligations qu’ont les ministres de défendre la déclaration
gouvernementale et les budgets, de répondre aux questions et aux interpellations parlementaires et de
se soumettre à une procédured’enquête parlementaire. Cette responsabilité est également engagée par
les actes politiques du Roi, qui doivent nécessairement être couverts par un contreseing ministériel. La
responsabilité ministérielle vaut, en outre, également pour ce qui se passe dans les administrations
relevant des ministres concernés, et qui se trouvent sous leur autorité.
Deux types de responsabilité politique peuvent être envisagés, selon qu’elle touche un ministre
individuellement ou le Gouvernement dans son ensemble :

1°) La responsabilité individuelle des ministres implique qu’un ministre puisse voir sa responsabilité
engagée devant la Chambre des représentants à titre individuel, par le vote d’une motion de méfiance.
Dans un tel cas, il est en principe contraint à la démission. Si la responsabilité politique ne suppose pas
forcément – on l’a vu – l’existence d’une faute personnelle dans le chef du ministre mis en cause, sa mise
en œuvre n’a cependant pas le caractère infamant de la sanction pénale.

2°) La responsabilité collective du Gouvernement implique que le Gouvernement puisse voir sa


responsabilité collective engagée devant la Chambre des représentants. Il ne sera cependant pas
formellement tenu de démissionner en cas de rejet d’une motion de confiance ou d’adoption d’une
motion de méfiance sans qu’un successeur au Premier ministre n’ait été désigné. En pratique, on
constate cependant qu’un gouvernement obtient généralement la confiance chaque fois qu’il la sollicite
et que les gouvernements qui démissionnent le font, dans la très grande majorité des cas, de façon
spontanée, sans attendre que leur responsabilité soit formellement engagée devant la Chambre des
représentants.

SECTION 3 : FONCTIONS DU ROI


Il faut distinguer les fonctions que le Roi exerce en tant que chef de l’État, en tant que branche du pouvoir
législatif et en tant que chef du pouvoir exécutif. De manière générale, les pouvoirs du Roi ne sont que
des pouvoirs d’attribution, c’est-à-dire des pouvoirs qui lui sont formellement attribués soit par la
Constitution, soit par des lois particulières prises en vertu de la Constitution. Ceci signifie que, par
opposition aupouvoir législatif qui dispose de la compétence résiduaire, le Roi ne peut agir sans qu’un
texte ne lui ait conféré expressément un titre de compétence.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

§ 1er. La participation à la fonction législative

Le Roi, ainsi que le Gouvernement, participe à la procédure législative, en tant que branche du pouvoir
législatif. Comme on l’a vu plus haut, cela comprend le droit d’initiative, la participation aux débats
parlementaires, le droit d’amendement et la sanction royale.

D’autre part, le Roi et ses ministres peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, lorsque les
chambres se trouvent dans l’impossibilité d’exercer normalement leurs fonctions, exercer seuls la
fonction législative par le biais d’arrêtés-lois. Tel fut le cas durant les deux guerres mondiales.
(Contrairement à un pays comme la France, le Roi ne dispose que de compétences d’attribution, le Roi
ne peut agir que dans les cas où la constitution ou des lois prises en vertu de la constitution, lui donne
le pouvoir d’agir) Quand on se pose la question de qui est compétent pour adopter telle ou telle norme,
le Roi ne pourra être compétent que si la constitution ou une loi lui donne le pouvoir d’agir (on doit
toujours trouver un fondement légal ou constitutionnel à l’arrêté royal)
§ 2. Les fonctions réglementaires

Le Roi dispose d’importantes compétences réglementaires. Les règlements sont, pour rappel, des actes
administratifs qui pourvoient, par des dispositions générales et abstraites, à l’établissement de normes
de conduite pour le présent et pour l’avenir. Les règlements sont en principe subordonnées à la loi. Le
Roi dispose également d’un pouvoir de décision individuelle.

Les distinctions suivantes doivent toutefois être faites concernant le pouvoir règlementaire du Roi :

I. Le pouvoir général d’exécution des lois

Art. 37 constitution : chef du pouvoir exécutif

En premier lieu, l’article 108 de la Constitution confère au Roi un pouvoir général d’exécution des lois,
que l’on appelle aussi le pouvoir réglementaire d’exécution. Aux termes de cette disposition, « le Roi fait
les règlements et arrêtés nécessaires pour l’exécution des lois ». Le rôle du Roi consiste à tirer des
principes contenus dans une loi les conséquences concrètes afin qu’elle puisse être effectivement mise
en œuvre. Il le fait par le biais de règlements ou de décisions individuelles. La constitution donne le
pouvoir au Roi d’exécuter directement une loi. La seule chose qu’il peut faire c’est de dégager de la loi
des conséquences qui en dérivent naturellement (objectifs poursuivis par la loi et les principes générés
à son adoption, adopter les mesures strictement nécessaire à l’application de la loi)

Selon la jurisprudence de la Cour de cassation comme du Conseil d’État, l’article 108 dela Constitution
« permet [au pouvoir exécutif] de dégager du principe de la loi et de son économie générale les
conséquences qui en découlent naturellement d’après l’esprit qui a présidé à sa conception et les fins
qu’elle poursuit, sans en étendre ni en restreindre la portée »17. Le procureur général W.J. Ganshof van
der Meersch a commenté cette jurisprudence dans les termes suivants : « subordonné à la loi, l’arrêté
développe la règlelégale. Il ne peut pas en étendre la portée, ni la compléter ou la modifier. Il ne peut pas
combler les lacunes d’une loi incomplète. Il ne peut pas non plus restreindre la portée de la loi. Cela
équivaudrait à la suspendre en partie ou à dispenser partiellement de son exécution, ce qu’interdit
l’article [108] de la Constitution. Le pouvoir réglementaire, tel qu’il est déterminé par ces dispositions
constitutionnelles consiste à faire des actesnormatifs subalternes »18.

17 Not. Cass., 18 novembre 1924, Pas., 1925, I, p. 25 ; 4 septembre 2001, P.99.1580.N.


18 W.J. Ganshof van der Meersch, conclusions sous Cass., 17 mai 1963, J.T., 1963, p. 589.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Cette compétence permet au Roi de prendre des arrêtés réglementaires en l’absence même de
disposition législative qui l’y habilite de manière expresse, pour autant, cependant, que les règlements
adoptés constituent l’exécution de la loi (et dans cette mesure seulement).

C’est un pouvoir mais également une obligation juridique de prendre les mesures nécessaires à
l’exécution des lois. Le roi peut prendre des mesures règlementaires, individuelles ou poser des actes
matériels.

Cass., 18 novembre 1924, Pas., 1925, I, p. 25 ‘Si le pouvoir exécutif, dans l’accomplissement de la mission
que lui confère l’article 108 de la Constitution ne peut étendre pas plus qu’il ne peut restreindre la portée
de la loi, il lui appartient de dégager du principe de celle-ci et de son économie générale les conséquences
qui en dérivent naturellement d’après l’esprit qui a présidé à sa conception et les fins qu’elle poursuit’

II. Le pouvoir réglementaire d’attribution

Le Roi dispose également d’un pouvoir réglementaire d’attribution : il arrive que lelégislateur attribue
expressément un pouvoir réglementaire au Roi, c’est-à-dire qu’il lui confie le pouvoir d’adopter des
règlements dans les cas et aux conditions qu’il fixe. Selon l’article 105 de la Constitution, des « lois
particulières » portées en vertu de la Constitution peuvent conférer au Roi « d’autres pouvoirs que ceux
que lui attribue formellement la Constitution. Il est donc ici nécessaire qu’une disposition législative
particulière contienne une habilitation expresse au Roi. De très nombreuses loi en contiennent.

L’article 86 de la loi du 17 juin 2016 relative aux marchés publics constitue un exemple de disposition
attribuant un pouvoir réglementaire au Roi. Cet article prévoit que :

« Le Roi fixe les règles générales d'exécution pour les marchés publics, en ce compris lesrègles relatives à
la sous-traitance et au contrôle, pour les marchés à déterminer par Lui, de l'absence de motifs d'exclusion
dans le chef des sous-traitants ainsi que les dispositions relatives à la fin du marché (…) ».

Sur la base notamment de cette habilitation, le Roi a adopté l’arrêté royal du 22 juin 2017 modifiant
l'arrêté royal du 14 janvier 2013 établissant les règles générales d'exécution des marchés publics et des
concessions de travaux publics et fixant la date d'entrée en vigueur de la loi du 16 février 2017 modifiant
la loi du 17 juin 2013 relative à la motivation, à l'information et aux voies de recours en matière de
marchés publics etde certains marchés de travaux, de fournitures et de services.

Pourquoi le législateur ne fixe pas lui-même ce type de règles ? Car parfois le législateur estime qu’il est
préférable que certaines dispositions soient fixées par arrêtés royales plutôt qu’une loi (car arrêté royal
peut être modifié plus facilement qu’une loi, car le Roi peut modifier lui seul)

L’admissibilité de pareilles habilitations au profit du Roi varie selon les matières.

Matières réservées

Ainsi, lorsque la Constitution réserve certaines matières à la loi, le législateur ne peut en principe
autoriser le Roi à prendre des arrêtés d’exécution qu’après avoir réglé lui-même les aspects essentiels
de la matière (théorie des matières réservées). Matières réservées au législateur dans la constitution,
donc le législateur ne peut pas juste attribuer ces matières au Roi. Il doit donc poser les éléments
politiques les plus importants en premier.

Matières non-réservées

Lorsque l’on se situe en dehors de ces matières réservées au législateur par le Constituant, la loi peut

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

contenir des habilitations plus larges mais les choix politiques essentiels doivent normalement avoir été
fixés dans la loi. Dans le passé, la pratique a toutefois révélé des cas où la loi se bornait à énoncer les
matières dans lesquelles le Roi pouvait intervenir, l’ensemble des règles de fond étant alors adoptées
par le pouvoir exécutif ; c’est ce que l’on a appelé les « loi-cadre ». La Cour constitutionnelle admet
d’ailleurs largement que des pouvoirs étendus soient attribués au Roi par le législateur fédéral, du moins
en-dehors des matières réservées à la loi par le Constituant.

La Cour constitutionnelle juge, ainsi, que19 :« Une habilitation législative en faveur du [P]ouvroir exécutif
qui concerne une matière que la Constitution ne réserve pas au législateur n’est pas inconstitutionnelle.
Dans un tel cas, en effet, le législateur fait usage de la liberté que lui laisse le Constituant de disposer dans
une telle matière ».

Les habilitations admises sur la base de l’article 105 de la Constitution permettent donc au Roi de
prendre des dispositions qui, à défaut de pareille habilitation, relèveraient du pouvoir législatif. Le
spectre de pareilles habilitations est en outre fort variable, depuis par exemple celles permettant au Roi
de modifier sur des points de détail telle ou telle disposition législative à faible teneur politique20 jusqu’à
l’adoption d’une véritable règlementation nouvelle. Dans tous ces cas, « c’est dans la loi attributive de
compétence que doit être recherchée la mesure du pouvoir du Roi » 21 et « [d]e telles lois d’habilitation
[...] indiquent en principe toujours l’objectif à atteindre, de sorte que le pouvoir du Roi est défini de
manière rigide et demeure prévisible »22.

Pouvoir spéciaux

En cas de nécessité, le législateur peut même aller plus loin, toujours sur le fondementde l’article 105
de la Constitution, en habilitant largement l’exécutif à régler lui-même telle ou telle matière et en
l’autorisant à modifier, compléter, remplacer ou abroger des dispositions législatives existantes ; c’est
ce que l’on appelle les « pouvoirs spéciaux » puisqu’en ce cas le Roi dispose de pouvoirs plus étendus
que ceux qu’il exerce en vertu du droit commun. La loi de pouvoirs spéciaux détermine les pouvoirs
accordés tant en ce qui concerne les finalités et les objectifs qu’en ce qui concerne les matières dans
lesquelles des mesures peuvent être prises ainsi que leur portée.

La loi du 27 mars 1986 attribuant certains pouvoirs spéciaux au Roi constitue un telexemple de loi
de pouvoirs spéciaux. Elle dispose, en son article 1er, que :« Afin d'assurer le redressement économique
et financier, la diminution des charges publiques, l'assainissement des finances publiques, la promotion
de l'emploi, ainsi quel'équilibre financier, la maîtrise des dépenses et la sauvegarde des régimes de
sécurité sociale, le Roi peut, par arrêtés délibérés en Conseil des Ministres, prendre toutes les mesures
utiles en vue :

(…)

6° de contribuer à la création d'emplois et à la résorption du chômage :

a) Par la suppression, la diminution ou par une autre répartition des cotisationspatronales de sécurité
sociale ; par des mesures spécifiques pour les jeunes et les enseignants ;

19 C. const., n° 107/2013, 18 juillet 2013, B.10.2.


20 Tel est le cas par exemple lorsqu’il s’agit d’adapter un montant figurant dans une loi à l’indice des prix àla consommation
21 M. Leroy, Les règlements et leurs juges, Bruxelles, Bruylant, p. 39.
22 G. Ninane et S. Perin, « La Cour constitutionnelle exerce-t-elle un contrôle à deux vitesses sur les compétences expressément

réservées par la Constitution au législateur ? Questions posées quant aux délégations données au pouvoir exécutif », note sous
C.C., n° 62/2014, 3 avril 2014, Adm. publ., 2015, pp. 61 à 67, spéc. n° 3, p. 63

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

b) Par des mesures visant à adapter les programmes actuels de résorption duchômage ».
L’arrêté royal n° 474 du 28 octobre 1986 portant création d'un régime de contractuels subventionnés
par l'État auprès de certains pouvoirs locaux a été adopté sur la base de cette disposition de la loi. Cet
arrêté royal prévoit la possibilité pour les pouvoirs locauxd’engager des travailleurs précédemment au
chômage dans le secteur non-marchand,en étant subventionnés par l’État. Cet arrêté royal a été
confirmé par une loi du 30 mars1987 portant confirmation des arrêtés royaux pris en exécution de
l'article 1er de la loi du 27 mars 1986 attribuant certains pouvoirs spéciaux au Roi. La compétence dans
ce domaine a, entretemps, été régionalisée.

Conditions afin d’exercer les pouvoirs spéciaux par le Roi

1. Circonstances exceptionnelles qui ne laissent pas de temps pour utiliser les procédures
normales
Afin de rester compatibles avec l’ensemble des règles constitutionnelles qui régissent les rapports entre
les pouvoirs de l’État, les pouvoirs spéciaux ne peuvent être attribués que pour une période limitée ; il
faut en outre que se présentent certaines circonstances de fait, qualifiées généralement de «
circonstances exceptionnelles » ou de « circonstances de crise » et que les pouvoirs spéciaux soient
définis avec précision. Outre les périodes qui ont suivi les deux guerres qu’a connu la Belgique, c’est
en général en période de crise économique ou lorsque des échéances importantes se profilent rendant
difficile le respect des procédures législatives habituelles (par exemple lorsqu’il fut nécessaire,dans les
années 1990, d’assurer le respect des critères de convergence monétaire nécessaires à l’adhésion à
l’euro) qu’il a été recouru à des lois d’habilitation de pouvoirs spéciaux au Roi. Les arrêtés royaux de
pouvoirs spéciaux doivent être délibérés en Conseil des ministres et faire, en toute hypothèse, l’objet
d’un avis préalable de la section de législation du Conseil d’État (article 3bis des lois sur les Conseil
d’État, coordonnéesle 12 janvier 1973). L’octroi des pouvoirs spéciaux au gouvernement ne prive, par
ailleurs, pas le Parlement de ses prérogatives habituelles, notamment sur le plan de l’exercice de la
fonction législative ou celui du contrôle de l’action du gouvernement.
Le Roi peut agir plus vite que le parlement ou le gouvernement
2. Les pouvoirs spéciaux sont octroyés pendant une période limitée la période de crise)
3. L’étendue des pouvoirs attribuée au Roi doit être définie de manière précise et claire
4. Passage devant la législation du Conseil d’état avant d’être adoptées
Art. 3 bis des lois coordonnées sur le conseil d’état

Pouvoirs spéciaux dans les matières réservées :

Contrôle parlementaire après coup . Si les pouvoirs spéciaux sont conférés dans des matières réservées
à la loi par la Constitution, il est exigé en outre que l’habilitation soit explicite et sans équivoque et
que les mesures prises par le Roi soient examinées par le pouvoir législatif dans un délai relativement
court, fixé dans la loi d’habilitation, en vue d’une confirmation, à défaut de quoi les arrêtés pris en vertu
de ces pouvoirs spéciaux doivent être considérés comme abrogés ; ceci vaut aussi pour les dispositions
prises par le Roi sur la base d’une habilitation ordinaire, telle celle qui est exposée ci-avant, lorsqu’elles
concernent une matière réservée par la Constitution au pouvoir législatif.

Actes administratifs

S’ils ne sont pas confirmés par le législateur, les actes adoptés par les pouvoirs spéciaux (même s’ils
peuvent modifier des lois) restent des actes administratifs (tant qu’il n’y a pas de confirmation
législative), ils restent soumis à tous les contrôles qui pèsent sur les actes administratifs (art. 159 de la

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

constitution, recours en annulation au conseil d’état)

Eg. Période de pandémie, difficile pour le législateur d’agir rapidement, on peut donc comprendre que
la législation du conseil d’état ait déjà accepté des pouvoirs spéciaux pour le Roi

Arrêtés de royaux de pouvoirs spéciaux adoptés en vertu d’une loi de pouvoir spéciaux doivent
toujours passer devant la section de législation du Conseil d’état

Lois de pouvoirs spéciaux sont des lois ordinaires tous les avants projets de loi doivent passer
par la section de législation du conseil d’état, et les propositions de lois peuvent passer si le président
le demande, il doit le faire s’il y a une majorité dans un groupe linguistique ou bien un tiers du
parlement

Le législateur peut toujours révoquer les pouvoirs spéciaux, ce ne sont pas des pleins pouvoir qui serait
non contrôlé par le parlement. Les pouvoir spéciaux peuvent s’octroyer tant au niveau fédéral qu’au
niveau des communautés et régions (on parle alors de décrets ou d’ordonnance de pouvoir spéciaux)

En tout état de cause, les arrêtés de pouvoirs spéciaux, même s’ils peuvent modifier, compléter,
remplacer ou abroger des dispositions législatives, restent des dispositions de niveau réglementaire,
soumises en conséquence au contrôle de la section du contentieux administratif du Conseil d’État et des
juridictions ordinaires sur la base de l’exception d’illégalité de l’article 159 de la Constitution. Ce
contrôle est toutefois restreint, compte tenu précisément du caractère spécial des pouvoirs conférés, au
respect de la loi d’habilitation et des normes supérieures de droit, spécialement la Constitution et le
droit international conventionnel directement applicable.

La réponse belge à la pandémie de COVID-19 s’est traduite par l’octroi des pouvoirs spéciaux au Roi,
ainsi qu’aux gouvernements de plusieurs entités fédérées, pour leur permettre d’adopter rapidement
les mesures nécessaires pour gérer la crise et ses conséquences socio-économiques. Au niveau fédéral,
près de cinquante arrêtés de pouvoirs spéciaux ont été adoptés sur la base de ces habilitations. Frédéric
Bouhon, Andy Jousten, Xavier Miny et Emmanuel Slautsky reviennent sur ces habilitations de pouvoirs
spéciaux adoptées dans le contexte de la gestion de la crise sanitaire de 2020, dans un courrier
hebdomadaire du Centre de recherche et d’information socio-politique (« L'État belge face à la pandémie
de Covid-19 : esquisse d'un régime d'exception », Courrier hebdomadaire du CRISP, 2020 (n° 2446), pp.
19-26 – notes de bas de pages omises) :

« Au niveau fédéral, les lois du 27 mars [2020] habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre
la propagation du coronavirus Covid-19 (I) et (II) confèrent des pouvoirs spéciaux au Roi (c’est-à-dire,
en pratique, au gouvernement fédéral) pour une durée de trois mois à partir de l’entrée en vigueur de
ces deux lois (à savoir le 30 mars), dans l’objectif de lui permettre de prendre rapidement les mesures
qui s’imposent dans le cadre de l’épidémie ou de la pandémie de coronavirus et d’en gérer les
conséquences, face à une urgence telle « qu’il s’avère impossible d’attendre l’adoption de l’ensemble
des lois nécessaires par le Parlement ». Ces mesures doivent être adoptées par le biais d’arrêtés royaux
délibérés en Conseil des ministres. Si nécessaire, les mesures prévues par ces arrêtés royaux peuvent
en outre avoir un effet rétroactif, lequel ne peut cependant être antérieur au 1er mars 2020 (cf. infra).

À l’origine de ces deux lois se trouve initialement une proposition de loi unique, déposée à la Chambre
des représentants par des membres des neuf partis qui ont octroyé leur confiance au gouvernement,
ainsi que par Peter De Roover (chef du groupe N-VA). Selon cette proposition, les pouvoirs accordés au
Roi s’inscrivent « dans le cadre de la confiance que le Parlement a accordée au gouvernement afin de lui
permettre d’agir pleinement et avec détermination ». La proposition de loi souligne également que
le «

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Gouvernement s’est (…) engagé à exercer loyalement cette confiance à la lumière de la lutte contre le
coronavirus ». La proposition entend donc organiser l’articulation des pouvoirs entre gouvernement
fédéral et Parlement fédéral en cette période de crise avec, d’un côté, des pouvoirs spéciaux confiés au
gouvernement et, de l’autre, une obligation d’information et de transparence à charge de ce même
gouvernement, destinée à permettre l’exercice effectif d’un contrôle parlementaire. À ce dernier sujet,
les développements de la proposition évoquent une obligation, pour le gouvernement fédéral, de faire
périodiquement rapport à la Chambre des représentants sur la situation de la crise et sur les mesures
prises en vertu de l’habilitation, de même qu’une obligationde communiquer les arrêtés au président de
la Chambre avant leur publication. Ces obligations ne sont toutefois pas formalisées dans le texte de la
loi.

[…] Sur le plan procédural, à la suite de l’avis du Conseil d’État et conformément à l’article 72, 2, alinéa
2, du règlement de la Chambre des représentants, la proposition de loi initiale a été scindée en deux, lors
de son passage en commission, pour distinguer, d’une part, les dispositions qui règlent une matière visée
à l’article 74 de la Constitution et, d’autre part, les dispositions qui règlent une matière visée à l’article
78 de la Constitution. Les premières relèvent en effet de la procédure monocamérale devant la Chambre
des représentants, tandis que les secondes, qui concernent essentiellement l’organisation et les
compétences du Conseil d’État, ressortissent du bicaméralisme optionnel. À cet égard, tout ce qui devait
être ouvert à une intervention potentielle du Sénat a été intégré dans la proposition de loi (I), tandis que
ce qui pouvait être adopté suivant la procédure monocamérale a été intégré dans la proposition de loi
(II). Il en résulte que l’habilitation donnée au Roi est éclatée entre deux lois adoptées par la Chambre
des représentants le même jour, à savoir le 26 mars. Le 27 mars, soit dès le lendemain du vote intervenu
à la Chambre, le Sénat a décidé de ne pas amender le projetde loi (I), qu’il avait préalablement évoqué.
Les deux textes sont finalement sanctionnés et promulgués par le roi Philippe le 27 mars et publiés au
Moniteur belge le 30 mars 2020.

Les deux lois ont en commun l’objectif de confier au Roi une habilitation, les effets des arrêtés royaux
de pouvoirs spéciaux, la limitation dans le temps de l’habilitation ainsi que la date d’entrée en vigueur.
Elles divergent en revanche en ce qui concerne leur procédure législative d’adoption, le contenu des
mesures qu’elles habilitent le Roi àprendre et la procédure d’adoption dérogatoire qu’elles permettent
au Roi de suivre pour l’adoption des arrêtés.

Quant au contenu de l’habilitation, on peut constater que les pouvoirs spéciaux accordés au Roi semblent
bien plus importants que ceux qu’il avait reçus par la loi du 16 octobre 2009 accordant des pouvoirs au
Roi en cas d’épidémie ou de pandémie de grippe. On peut sans doute y voir un signe de la gravité de la
situation actuelle.

L’article 3 de la loi (I) et l’article 5 de la loi (II) énumèrent les mesures que le Roi peut prendre par
arrêté délibéré en Conseil des ministres. Les mesures visées sont
Nombreuses et variées : elles concernent évidemment la protection de la santé publique, mais aussi
notamment le soutien à l’économie et aux ménages touchés par la crise, la protection des travailleurs ou
encore le bon fonctionnement de la justice, en ce compris de la justice administrative. On notera par
exemple que le Roi est habilité à prendre des mesures pour combattre la propagation ultérieure du
coronavirus au sein de la population, y compris sur le plan du maintien de la santé publique et de l’ordre
public, cequi autorise notamment la fermeture des frontières. Il est également habilité à prendre des
mesures destinées à garantir la « capacité logistique et d’accueil nécessaire, y compris la sécurité
d’approvisionnement ou en prévoir davantage », ce qui vise notamment la possibilité d’effectuer des
réquisitions.

Dans un objectif de limitation des pouvoirs spéciaux, la loi (II) impose toutefois en même temps un

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

certain nombre de contraintes quant au contenu des arrêtés (articles 3 et 4). En particulier, il est interdit
au gouvernement de « porter atteinte au pouvoir d’achat des familles et à la protection sociale existante
» ou d’« adapter, abroger, modifier ou remplacer les cotisations de sécurité sociale, les impôts, les taxes
et les droits, notamment la base imposable, le tarif et les opérations imposables ». Malgré les critiques
formulées par la section de législation du Conseil d’État concernant ces dispositions – qui manquent,
selon elle, de précision–, celles-ci sont restées inchangées par rapport au texte de la proposition de loi
initiale.

À l’inverse, le législateur a suivi la section de législation du Conseil d’État et a imposé au Roi une autre
balise matérielle, qui concerne spécifiquement l’exercice de l’habilitation relative au fonctionnement de
la justice judiciaire et administrative, trop large selon elle. Il appartiendra au Roi de respecter les «
principes fondamentaux d’indépendance et d’impartialité du pouvoir judiciaire » et de ne pas porter
atteinte aux « droits de la défense des justiciables ».

Outre ces balises matérielles, l’exercice des pouvoirs spéciaux attribués au Roi est soumis à des balises
procédurales.

Ainsi, si les arrêtés de pouvoirs spéciaux peuvent être adoptés sans que les avis légalement ou
réglementairement requis soient préalablement recueillis, ou après que ces avis ont été recueillis dans
un délai abrégé par rapport au délai légalement ouréglementairement requis, il n’est en revanche pas
porté atteinte aux obligations formelles de concertation, de consultation ou d’association des entités
fédérées qui sont applicables en vertu des règles répartitrices de compétences.

Ces obligations procédurales formalisées s’ajoutent donc à la concertation informelle, précédemment


évoquée, que le gouvernement s’est engagé à mettre en place, pour l’élaboration des arrêtés de pouvoirs
spéciaux, avec les partis politiques qui ont voté en faveur des lois octroyant ces pouvoirs spéciaux, ainsi
qu’à l’association de représentants des entités fédérées aux réunions du Conseil national de sécurité.
En outre, l’obligation de consulter la section de législation du Conseil d’État – qui est normalement
d’application pour les arrêtés royaux de pouvoirs spéciaux selon l’article 3bis des lois sur le Conseil
d’État, coordonnées le 12 janvier 1973 123, même en cas d’urgence – fait l’objet d’un régime dérogatoire
par rapport à ce droit commun applicable à l’obligation de consultation de la section de législation 124.
En effet, comme le précise l’article 4 de la loi (I), la consultation de la section de législation du Conseil
d’État n’est pas requise pour les mesures urgentes visant à combattre la propagation ultérieure du
Covid-19 au sein de la population. Pour tous les autres arrêtés de pouvoirs spéciaux pris en vertu des
lois (I) et (II), l’avis doit être demandé, mais il doit être rendu dans un délai de cinq jours, non
prorogeable.

Comme précédemment mentionné, les arrêtés royaux adoptés sur la base des lois d’habilitation
pourront notamment apporter des modifications à des dispositions législatives, même avec effet
rétroactif (jusqu’au 1er mars 2020 au maximum). L’idée poursuivie par cette possibilité de rétroactivité
est peut-être de confirmer certaines mesures prises antérieurement par le biais d’arrêtés ministériels.
Les arrêtés royaux adoptés sur la base des lois d’habilitation devront être confirmés par une loi dans un
délai d’un an à partir de leur entrée en vigueur, à défaut de quoi ils seront censés n’avoir jamais produit
leurs effets. Les arrêtés de pouvoirs spéciaux acquerront, après cette éventuelle confirmation, force de
loi. D’ordinaire, les débats autour de la confirmation d’arrêtés de pouvoirs spéciaux sont assez formels.
En l’espèce, toutefois, si le gouvernement Wilmès II jouit certes de la confiance de la Chambre des
représentants, il ne peut pas, sur le plan politique, anticiper un soutien sans faille de la majorité des
députés de la Chambre pour les mesures qu’il adoptera, faute que les partis qui lecomposent soient
majoritaires à la Chambre des représentants ».

59
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Une commission parlementaire dédiée a, par ailleurs, été créée au sein de la Chambre des représentants,
pour assurer le suivi de l’utilisation par l’exécutif des habilitations de pouvoirs spéciaux qui lui ont été
octroyés pour répondre à la crise sanitaire du COVID- 19.

Les lois de pouvoirs extraordinaires sont de la même nature que les lois de pouvoirs spéciaux, mais leur
objet et l’étendue de l’habilitation au Roi sont définis de manière beaucoup plus large encore, sans
référence à une matière bien précise. Seul le caractère particulièrement difficile de la situation du pays,
comme dans les périodes qui entourentun état de guerre, a pu justifier qu’il soit recouru à ces procédés
exceptionnels.

III. Le pouvoir réglementaire autonome

Situations dans lesquelles le Roi peut agir sans intervention du législateur.

Il faut relever enfin l’existence d’un pouvoir réglementaire autonome dans le chef duRoi. Dans ce
cas, le pouvoir réglementaire du Roi est direct, en ce sens qu’il s’exerce non pas pour concrétiser des
normes supérieures préétablies, mais bien pour édicter des normes, en vertu d’un pouvoir qu’il puise
à titre exceptionnel directement dans la Constitution. Il dispose d’un tel pouvoir dans deux domaines :
Nomination et Organisation de ses services : en vertu de l’article 107, alinéa 2, de la Constitution,
il a le pouvoir de nommer « aux emplois d’administration générale et de relation extérieure, sauf les
exceptions établies par la loi » ; ce pouvoir de nomination implique le pouvoir d’organiser, par
règlements, les services de l’administration fédérale, en créant des ministères ou d’autres organes,
en déterminant leurs attributions et en fixant le statut des agents de l’État ; (statut administratif et
matériel des fonctionnaires des agents de la fonction publique, créer aussi les services de
l’administration) pouvoir dans lequel le législateur ne peut pas intervenir
Pouvoir de police : Garantir l’ordre public matériel : Il est aussi admis que le Roi, en tant que
titulaire du pouvoir exécutif (article 37 de la Constitution), peut édicter des règlements de nature à
sauvegarder l’ordre et la sécurité publics dans le Royaume, sans qu’il soit besoin d’une habilitation
particulière à cet effet de la part du législateur. Toutefois, le Roi n’exercera ce pouvoir de police qu’à
titre subsidiaire par rapport au pouvoir de police des autorités communales qui ont la responsabilité
principale dans ce domaine ; (pouvoir bien plus contesté) Protection de l’ordre public =
juridiquement, garantir la sécurité, la salubrité (pas de maladies infectieuses qui circulent) et la
tranquillité publique.
Première responsabilité : commune Le législateur fédéral il a confié en première instance au
commune la compétence de garantir l’ordre local au niveau communal. Au niveau des communes
ce sont d’abord les communes qui peuvent prendre des décisions pour assurer le respect de
l’ordre public sur leur territoire (par exemple, règlement sur les heures d’ouverture des bars ou
cafés)
Deuxième niveau de pouvoir : Lorsque la matière dépasse les communes, ce sont les provinces
qui sont compétentes
Troisième pouvoir : si les mesures doivent être traitées au niveau national, alors la loi a donné
un pouvoir au ministre de l’Intérieur. Sur la base de cette loi, le ministre de l’Intérieur est
intervenu pour faire des arrêtés.
Dernier pouvoir : si aucun de ces pouvoirs ne suffit, la doctrine a admis que le droit pouvait de
manière subsidiaire de manière à tous les autres pouvoirs organisés, pouvait aussi prendre des
mesures directement en vertu de la constitution (filet de sécurité, pouvoir reconnu au Roi)

Dans ces matières, la compétence du Roi est en principe exclusive, ce qui signifie que, sauf si d’autres

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

règles constitutionnelles prescrivent le contraire23, le législateur n’est pas habilité à y intervenir.


Lorsque la constitution donne des pouvoirs à une autorité, c’est à cette autorité-là d’exercer ces
pouvoirs. C’est la constitution qui organise les pouvoirs et il faut en respecter les dispositions.

Le Roi peut aussi nommer le magistrat, mais ce n’est pas lui qui décide de nommer qu’il veut. Les
nominations sont objectivées par un concours ou par un examen. (SELOR)

Eg. Le Roi fixe les grandes lignes dans un domaine : la sécurité sociale. C’est le Roi qui gère ces matières,
ce n’est pas la même chose que les pouvoir spéciaux où le roi va modifier une loi existante.

§ 3. Les fonctions d’administration générale

Outre sa participation à la fonction législative et ses fonctions règlementaires, le Roi dispose


d’importants pouvoirs relevant de l’administration générale du pays.

I. Les relations extérieures et la défense nationale

La défense nationale et la conduite de la politique extérieure ont, de tout temps et dans presque tous les
systèmes constitutionnels, figuré en premier ordre parmi les attributions du pouvoir exécutif.

Si la matière de la défense nationale reste de la compétence exclusive de l’autoritécentrale, tel n’est


cependant plus le cas, depuis la réforme de l’État de 1993, en ce qui concerne les relations
internationales : les communautés et les régions sont désormais habilitées à conclure des traités
internationaux dans le domaine de leurs compétences (article 167 de la Constitution). Un mécanisme
d’information de l’autorité centrale a néanmoins été maintenu, afin d’assurer une coordination de la
politique étrangère de la Belgique et de ses composantes. De même, des mécanismes sont institués afin
d’assurer le respect des obligations internationales de la Belgique (notamment vis-à-vis des institutions
européennes), même dans les domaines qui relèvent des compétences régionales ou communautaires
(article 169 de la Constitution).

II. Les relations avec le pouvoir judiciaire

Le Roi a le pouvoir de nommer les magistrats (article 151 de la Constitution).

Cette prérogative, outre qu’elle s’exerce bien entendu avec le contreseing du ministre de la Justice, est
fortement limitée par les procédures de nomination des magistrats, qui ne sont nommés que s’ils ont
réussi un examen d’aptitude ou un concours de recrutement organisé par les commissions francophone
et néerlandophone de nomination et de désignation du Conseil supérieur de la Justice, qui sont exposés
plus bas. Les avocats ayant vingt ans de pratique peuvent également être nommés magistrats sans avoir
passéle concours ou l’examen dont il vient d’être question, à des conditions qui sont aussi précisées par
la suite.

Le Roi dispose, d’autre part, du droit de grâce (article 110 de la Constitution). Ce droit s’exerce à l’égard
de condamnations individuelles, même s’il peut revêtir un caractère collectif en visant simultanément
plusieurs condamnations ou des catégories de condamnations ; il ne supprime que tout ou partie de la
peine, mais pas la condamnation elle-même. L’amnistie au contraire, supprimant les condamnations,
revêt un caractère général et elle ne peut être adoptée que par le pouvoir législatif.

Enfin, selon l’article 40 de la Constitution, les décisions de justice sont exécutées au nom du Roi. Le

23 Parexemple, le statut syndical, dans la fonction publique, doit être fixé par la loi, compte tenu del’importante incidence
de ces règles en ce qui concerne la liberté d’association.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

pouvoir judiciaire rend des décisions en toute indépendance, mais l’exécution de celles-ci appartient au
pouvoir exécutif. La formule exécutoire est un ordre par lequel le Roi ordonne à toutes les autorités de
pourvoir à l’exécution de la décision.

III. L’administration intérieure

Suivant l’article 107 de la Constitution, le Roi dispose d’un pouvoir de nomination « dans l’armée, aux
emplois d’administration générale et de relation extérieure, sauf les exceptions établies par les lois ». Le
droit pour le Roi de nommer les agents de l’administration générale a notamment comme corollaires le
droit d’établir le statut de ces agents, le droit de créer leurs emplois et le droit de fixer les traitements
qui y sont attachés. Ces derniers pouvoirs relèvent du pouvoir règlementaire autonome du Roi
d’organisation de ses services.

L’article 112 de la Constitution consacre, quant à lui, les pouvoirs monétaires du pouvoir exécutif. Il
dispose, en effet, qu’ « Il (le Roi) a le droit de battre monnaie en exécution de la loi ». Le Roi n’intervient
en ce domaine que pour mettre en œuvre les règles adoptées par le pouvoir législatif. C’est la loi en effet
qui fixe le régime monétaire. Cette disposition est largement vidée de sa substance depuis que la
Belgique a adhéré aux dispositions européennes relatives à l’euro.

Outre les pouvoirs qui viennent d’être évoqués, le Roi dispose d’autres prérogatives encore, comme le
pouvoir de dissolution de la Chambre des représentants (article 46 de la Constitution) ou le droit de
conférer des titres de noblesse et les ordres militaires (articles 113 et 114 de la Constitution).

SECTION 4 : L’ADMINISTRATION FÉDÉRALE


Services public fédéraux, environ 45.000 agents fédéraux.

Administration : ensemble de moyens humains et matériels qui vient appuyer l’exercice des missions
du Roi par les gouvernements. L’administration est ouverte à tous les Belges et aux ressortissants
Européens conformément au traité de Maastricht.

L’administration fédérale est structurée en les SPF (services publics fédéraux). On distingue trois
catégories de service public fédéraux

§ 1er. La notion d’administration

Le pouvoir exécutif et, spécialement, le Gouvernement fédéral peut s’appuyer sur un ensemble des
services et d’agents pour assumer sa mission constitutionnelle d’exécution des lois et ses missions
d’administration générale et de gestion des services publics. Ces services et ces agents forment
l’administration fédérale. L’article 10 de la Constitution consacre l’égale admissibilité des Belges aux
emplois publics. On relève cependant que, en vertu du droit de l’Union européenne, seules les fonctions
d’autorité peuvent être réservées aux Belges ; les autres fonctions doivent être ouvertes aux autres
ressortissants européens.

L’administration fédérale belge est structurée en services publics fédéraux (S.P.F.), à l’exception du
ministère de la Défense, qui a conservé une structure distincte. Un S.P.F. est géré par un comité de
direction et se trouve sous l’autorité du ministre compétent. Leministre dispose, en effet, du pouvoir
hiérarchique sur son administration, ainsi qu’on l’expose ci-après plus en détails. C’est ce pouvoir
hiérarchique qui justifie que le ministre puisse assumer devant la Chambre des représentants la
responsabilité politique de l’action de son administration.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

SPF verticaux : Parmi les S.P.F., on distingue les S.P.F. verticaux, qui accomplissent les missions
traditionnelles de l’État fédéral, comme les Finances, la Justice ou l’Intérieur, Affaires étrangères. Ce
sont les grandes administrations qui correspondent aux principales missions de l’état.

S.P.F. horizontaux qui assurent, au profit des S.P.F. verticaux, une activité de soutien ou de
coordination, comme le service « chancellerie et services généraux », ou le service du budget et du
contrôle de gestion. Services publics transversaux. (BOSA, service public qui vient fournir un appui
en matière de gestion de personnel et de RH)

SPF de programmation : À côté de ces deux types de S.P.F. qui ont vocation à être permanents, il y
a aussi les services publics de programmation qui sont mis en place par le Gouvernement fédéral
de manière temporaire (par exemple pour le temps d’une législature) pour répondre à un besoin du
moment, comme l’intégration sociale, la politique des villes ou l’égalité des chances, qu’il espère
rencontrer en l’espace d’une ou deux législatures.

Chacun de ces SPF sont dirigés par un ministre, ensuite il y a un comité de direction, et puis une logique
hiérarchique au sein des différents services fédéraux. Le fait qu’un ministre soit à la tête de chaque SPF
permet au ministre d’assumer la responsabilité de ce qu’il se passe au sein de son administration.
Les agents de l’administration sont engagés par l’État fédéral soit dans les liens d’un régime qualifié de
statutaire, fondé sur l’unilatéralité, soit dans les liens d’un contrat de travail de droit privé. Le statut
désigne, dans ces conditions, l’ensemble des règles,principalement de nature réglementaire, régissant
la situation juridique des agents de l’administration qui ont été engagés par un acte administratif
unilatéral de cette dernière et non par un contrat.

On distingue :

Le statut administratif qui définit les conditions de l’engagement de l’agent (conditions de


recrutement et stage), ses droits et obligations, le déroulement de sa carrière (évaluation,
promotion, mandat pour fonction de « management », positions administratives, terme de la
carrière) et le régime disciplinaire qui lui est applicable

Le statut pécuniaire qui énonce les règles relatives à la fixation et aux modalités de paiement du
traitement de l’agent, lequel n’est pas, comme pour le salarié, juridiquement analysé comme la
contrepartie de ses prestations mais comme une allocation que l’administration verse à l’agent pour
lui permettre de tenir son rang socialétant entendu que ce dernier « lui doit tout son temps »

Le statut syndical qui organise les relations sociales entre l’autorité et les organisations syndicales
représentatives des agents.

On peut aussi rattacher au statut pécuniaire le régime des pensions, qui, pour les agents statutaires de
l’administration, constituent non une prestation de sécurité sociale mais un traitement différé à charge
du Trésor public

§ 2. La situation des agents de l’État

Statut des agents statutaire

Comme précédemment exposé, au niveau fédéral, l’adoption du statut des agents de l’État relève en
règle du pouvoir réglementaire autonome du Roi, conformément à l’article 107 de la Constitution.

Traditionnellement, en droit belge, l’engagement statutaire des agents publics est la règle, et
l’engagement contractuel l’exception. Le régime statutaire est en outre présumé, en l’absence de

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

contrat de travail.

Cette priorité donnée au régime statutaire s’explique par le fait qu’il est mieux adapté qu’un contrat aux
exigences des lois du service public, et en particulier à la loi de la mutabilité et à celle de l’égalité. Il est
en effet, d’une part, plus aisé de modifier unilatéralement un règlement que de négocier avec chacun des
agents concernés une modification de son contrat de travail, même si cette faculté de modification
unilatérale doit être tempérée par l’intervention des organisations syndicales et par le principe de
légitime confiance. D’autre part, la détermination par voie réglementaire du régimejuridique applicable
aux agents publics garantit l’égalité entre ceux-ci en interdisantqu’il y soit dérogé dans des cas
individuels au mépris du principe de la hiérarchie des normes ou de l’adage patere legem quam ipse
fecisti, selon lequel une autorité administrative doit, dans des cas particuliers, respecter la règle
générale qu’elle s’est elle-même fixée. La situation statutaire offre par ailleurs aux agents une plus
grande sécurité de l’emploi, puisqu’il ne peut y être mis fin que dans les cas strictement prévus par le
statut.

Le recrutement contractuel, présumé plus flexible, tend cependant à prendre une place croissante dans
l’administration fédérale.

Le régime juridique classique des fonctionnaires en Belgique, c’est un régime basé sur le statut. A la
différence d’un contrat de travail qui est négocié entre un travailleur individuel et son patron, pour
lequel il faut l’accord des deux partis et qui ne peut pas être modifié unilatéralement par l’une ou l’autre
parti, dans la fonction public on a des règles générales qui sont arrêtés pour toute la fonction publique
par l’autorité de manière unilatérale (il y a autant d’emplois, voici les conditions, voici la procédure,
lorsque la personne est nommée voici les avantages, etc., tout est déjà écrit et rien ne peut être modifié
par la personne acceptant le poste) dans le statut, toutes les règles sont fixées de manière unilatérale
par le roi et par l’autorité et qui s’appliquent à tous les agents de la fonction publique. Les règles peuvent
seulement être modifiées. Ce choix du statut il a été posé en Belgique dès le début du 20ème siècle, il a
des avantages pour l’autorité (modifier les règles, les transférer d’un service à un autre, en fonction des
besoins de l’intéret général et du service), et elle a pour avantage pour les fonctionnaires qu’il n’y a pas
de favoritisme, chacun a les mêmes avantages que les autres personnes qui se trouvent au même niveau
hiérarchique que nous, on est protégés contre l’arbitraire de notre employeur certaine stabilité dans
l’emploi. Avantages pour les deux côtés.

En Belgique, par défaut, s’il n’y a pas de prévisions en sens contraire, on considère que l’autorité engage
dans les liens statutaire le régime de base, par défaut, c’est le statut. Néanmoins, depuis plusieurs
décennies, on a de plus en plus d’agents engagés par l’autorité fédérale dans un cadre de contrat de
travail, pour attirer certains profils et pour leur offrir des conditions plus avantageuses. Aussi, il est très
difficile de bouger un fonctionnaire qui serait complètement incompétent, et très difficile de le virer, on
a vu les statuts comme des « planques » car les fonctionnaires seraient incompétents, c’est injuste
comme raccourci mais il y a une part de vérité. Maintenant, la moitié des agents fédéraux sont engagés
dans un lien de contrat de travail. Mais néanmoins, une bonne partie des agents de l’état fédéral sont
engagés dans le cadre d’un statut dans les liens statutaires.

§ 3. Le pouvoir hiérarchique du ministre sur son administration

En dessous du ministre ill. a un comité de direction, et le ministre du comité de direction exerce un


pouvoir hiérarchique sur l’ensemble des services qui se trouvent en dessous d’eux. Logique pyramidale
chaque échelon, il y a des agents qui exerce à leur tour un pouvoir.

Les ministres du Gouvernement fédéral sont titulaires d’un pouvoir hiérarchique sur leur

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

administration, c’est-à-dire sur les agents des S.P.F. qui se trouvent sous leur autorité. Plus
généralement, les différents agents responsables d’un service de l’administration jouissent d’un pouvoir
hiérarchique vis-à-vis des agents qui leur sont subordonnés. Ce pouvoir hiérarchique existe même en
l’absence de tout texte. Il traduit l’existence d’une administration fédérale structurée selon une logique
pyramidale, dans laquelle chaque agent a un rang et se trouve sous l’autorité des agents ayant un rang
supérieur.

Quatre prérogatives composent le pouvoir hiérarchique, l’une relative à l’organisation générale du


service, les autres concernant la prise proprement dite d’un acte administratif. Ces quatre prérogatives
ont été mises en évidence par la jurisprudence, en particulier celle du Conseil d’État. Le supérieur
hiérarchique exerce ses prérogatives pour des motifs tant de légalité que d’opportunité.

Responsabilité des ministres devant le parlement, le ministre est aussi responsable de ce qu’il se passe
au sein de son administration.

Organisation du service : En exécution de la première de ses prérogatives, le supérieur


hiérarchique peut, dans le respect des règles supérieures, organiser son service : nommer les agents,
exercer sur eux son pouvoir disciplinaire, répartir le travail, déterminer les procédures selon
lesquelles les dossiers seront traités (ordre de priorité, contenu-type des rapports d’instruction…),
attribuer les bureaux, etc. Ce pouvoir peut s’exercer par la prise de décisions individuelles ou de
circulaires-instructions.

Les trois autres prérogatives concernent la prise de décision proprement dite. Elles supposent donc que
le subordonné jouisse d’un pouvoir de décision unilatérale, ce qui, en pratique, n’est pas l’hypothèse la
plus fréquente. Quand il est en investi, ce subordonné tient le plus souvent ce pouvoir de décision d’une
délégation de compétence ; plus occasionnellement, il s’agira d’une attribution directe du législateur
avec maintien du pouvoir hiérarchique (la distinction entre délégation et attribution de compétence est
exposée ci-après). Même si c’est le roi qui est le seul titulaire du pouvoir exécutif fédéral selon la
constitution, il existe des agents qui adoptent des décisions individuelles (cas plus rare décisions
règlementaire) SPF économie peut octroyer des subventions, et les décisions d’octroi ou non à des
entreprises sont prises par des agents de l’administration et pas par arrêté royal. Il existe toute une série
de cas dans lesquels des agents disposent d’un pouvoir décisionnel. Soit parce que le législateur a
attribué un pouvoir de décision unilatéral à un ministre ou à un fonctionnaire, soit parce que le roi a lui-
même délégué une partie de son pouvoir a une ministre ou à un fonctionnaire. (Ou que le ministre a
subdélégué à un fonctionnaire).ces principes de délégation de compétences sont cadrés, car ils dérogent
aux principes selon lequel c’est le Roi qui est titulaire du pouvoir exécutif. Ils impliquent que parfois une
partie du pouvoir exécutif n’est pas à exercer au niveau du roi mais à des échelons inférieurs du pouvoir
exécutif. Lorsque les fonctionnaires ont un pouvoir de décision unilatéral, leurs supérieurs disposent
d’une série de trois prérogatives quant à la manière dont les fonctionnaires peuvent exercer leurs
pouvoir de décision unilatéral.

Imaginez qu’une loi donne à un agent du SPF économie / un conseiller du service, le pouvoir de
décider d’octroyer ou pas des subventions à des entreprises qui sont en difficultés financières.
Ce conseiller va avoir un chef de service (et le ministre tout en haut suivi du comité de direction
qui aura un pouvoir hiérarchique à son égard)

Le pouvoir d’instruction (ou d’injonction)

o Le pouvoir d’instruction ou d’injonction consiste à donner au subordonné des injonctions quant


à la décision à prendre. Il peut s’exercer au cas par cas, voire demanière générale par le biais
d’une circulaire-instruction.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Le chef de service ou le ministre peut dire à l’agent que dans ce cas-ci il faut
octroyer ou non la subvention. Le conseiller doit obéir à l’ordre qui lui est
donné. Le fait de ne pas obéir à son supérieur c’est une faute disciplinaire. Avant
que la décision soit prise par le conseiller, le supérieur hiérarchique lui donne
un ordre quant à la manière de procéder, et le conseiller doit obéir.

Le pouvoir d’annulation

o En vertu de son pouvoir d’annulation, le supérieur hiérarchique peut annuler la décision prise
par son subordonné sans toutefois pouvoir substituer sa propre décision à celle qu’il met à
néant. Il appartiendra au subordonné de prendre une nouvelle décision, lecas échéant en
tenant compte des instructions données par son supérieur hiérarchique. Cette annulation ne
peut intervenir que dans les mêmes conditions que celles prévues par la théorie du retrait des
actes administratifs, théorie sur laquelle on revient dans la suite du cours.

Le conseiller octroie une subvention, et le ministre ou le supérieur hiérarchique


peut annuler la décision du subordonné. Il ne peut pas le faire sous n’importe
quelle condition. Car l’entreprise a reçu une confirmation de subvention, si
l’entreprise reçoit une décision positive, le supérieur ne peut pas venir annuler
cette décision 3 ans après et demander un remboursement (sécurité juridique)
théorie du retrait d’acte administratif , théorie développée par la
jurisprudence du conseil d’état et par lequel il y a des conditions dans lesquels
le supérieur peut retirer une décision. Si la décision est avantageuse, la décision
sera seulement retirée si elle est illégale, irrégulière, et dans les 60 jours (délais
de recours au conseil d’état). Exceptions si l’acte est obtenu par fraude.

Le pouvoir de substitution (a priori et a posteriori).

o La troisième prérogative, le pouvoir de substitution, est plus controversée en Belgique, mais


a néanmoins été consacrée par quelques arrêts du Conseil d’État. Il peut toutd’abord s’agir
d’une substitution a priori, en ce sens qu’avant que le subordonné ait pris une décision, le
supérieur évoque le dossier et décide en lieu et place du subordonné. Il ya aussi la substitution
a posteriori, aussi appelée réformation, qui consiste pour le supérieur hiérarchique à annuler
une décision prise par son subordonné et à lui substituer sa propre décision. Combinant
annulation et substitution, elle ne peut en tout état de cause intervenir que si les conditions
d’exercice du pouvoir d’annulation sont réunies, soit, comme dit ci-dessus, celles de la théorie
du retrait.

A priori : Le pouvoir de substitution c’est à possibilité pour le supérieur du


conseiller au SPF économie, avant que la décision soit prise, il ramène à lui la
compétence dans un cas particulier.

A posteriori : Combinaison d’annulation et de substitution, le supérieur annule


la décision et reprends le dossier, il reprend la compétence.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

COURS 13

§ 4. Attribution et délégation de compétence

= centaines et milliers de décisions qui sont prises chaque année par le pouvoir exécutif. On ne peut pas
tout faire par arrêté royal. On a admis que d’autres personnes exercent une fraction du pouvoir exécutif.
D’autres agents peuvent exercer une partie du pouvoir exécutif, seulement s’ils se sont vus octroyés des
compétences. Cela peut se faire via deux techniques : l’attribution et la délégation de compétences.

Attribution de compétence

= le législateur créée une nouvelle compétence et l’attribuer directement à un ministre ou à un


fonctionnaire.

Les ministres et les agents de l’administration fédérale peuvent poser des actes matériels pour assister
le Roi dans l’exercice du pouvoir exécutif. Ils peuvent, ainsi, préparer ou assurer l’exécution des
décisions qui sont adoptées. Ils peuvent, en outre, se voir attribuer ou, plus souvent, déléguer le pouvoir
d’adopter des décisions administratives. Ils exercent, de la sorte, eux-mêmes une fraction du pouvoir
exécutif au niveau fédéral. On parle, dans ces hypothèses, de déconcentration administrative et, en
l’espèce, de déconcentration interne à l’administration fédérale.

L’attribution de compétence est un procédé consistant pour le Constituant ou le législateur à créer une
compétence et à la confier à une autorité, par exemple le Roi (cf.la notion de pouvoir règlementaire
d’attribution), un ministre ou un agent del’administration. L’attribution de compétence se distingue de
la délégation de compétence en ce que la première suppose la création d’une compétence et ensuite
l’octroi de celle-ci à une autorité, tandis que la délégation de pouvoir suppose une compétence qui est
déjà attribuée, mais dont le titulaire décide d’en confier une partie à une tierce autorité qui va l’exercer
sous son contrôle hiérarchique (par exemple le Roi confie à un ministre une partie du pouvoir, qu’il tient
de l’article 107 de la Constitution, de nommer les fonctionnaires).

Traditionnellement, la section de législation du Conseil d’État estimait inconstitutionnelle


l’attribution d’un pouvoir de décision (du moins, à portée réglementaire) à une autorité qui n’est pas
politiquement responsable devant une assemblée d’élus, comme un fonctionnaire. Dans une thèse plus
restrictive, l’attribution directe par le législateur d’une compétence exécutive à un ministre a même
parfois été contestée.

Un double fondement était souvent invoqué, en combinaison, à l’appui de cette conclusion.

D’une part, les articles 33, 37 et 108 de la Constitution desquels il ressort que le pouvoir exécutif a été
constitutionnellement confié au Roi et non à une tierce autorité. Souvent, la section de législation
résume l’exigence de ces dispositions sous l’appellation de principe de l’unité du pouvoir réglementaire.

D’autre part, les principes constitutionnels d’attribution des pouvoirs, qui impliquent que ceux-ci ne
peuvent en principe être délégués à des personnes dont les activités échappent aux contrôles des
autorités publiques, l’idée étant que le pouvoir exécutif doitêtre exercé par des personnes politiquement
responsables devant une assemblée d’élus, ce qui n’est pas le cas, par exemple, des agents de
l’administration.

Le législateur a octroyé des compétences au ministre de l’Intérieur, sur la base d’une attribution
législative de pouvoirs à son profit. Ces lois-là confient directement le pouvoir au ministre de l’Intérieur.
Même si le principe c’est que c’est inconstitutionnel, en pratique le législateur attribue fréquemment un

67
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

pouvoir, parfois même un pouvoir règlementaire, directement à un ministre. (La question d’attribution
durant la pandémie c’est une question qui est soumise pour le moment à la cour constitutionnelle)

Sur l’avant-projet de la loi pandémie, la section de législation du conseil d’état, a rappelé que l’attribution
de compétences directement au ministre de l’Intérieur n’était pas OK, que cela pouvait être admis
seulement à titre exceptionnel, par exemple lorsque la situation est tellement urgente qu’on n’a même
pas le temps de soumettre un arrêté pour signature au roi, en dehors de ces cas-là, ce n’est pas
constitutionnel. Mais en pratique, cela n’a pas empêché le législateur de procéder de la sorte, même avec
des fonctionnaires.

La section de législation l’a encore rappelé dans le contexte de la pandémie, en limitant de façon
importante les possibilités d’attributions législatives de pouvoirs au profit de ministres (avis n°
68.936/AG du 7 avril 2021 sur un avant-projet de loi ‘relative aux mesures de police administrative
lors d’une situation d’urgence épidémique’, p. 34, notes de bas de page omises) :

« 58. L’article 4, § 1er, alinéa 1er, de l’avant-projet de loi attribue le pouvoir de prendre des mesures
en vertu de l’article 5, § 1er, de l’avant-projet directement au ministre qui a l’Intérieur dans ses
attributions, agissant par arrêté ministériel délibéré en Conseil des ministres.

59. L’article 33 de la Constitution dispose que tous les pouvoirs émanent de la Nation et doivent
être exercés de la manière établie par la Constitution. En vertu des articles 37, 105 et 108 de la
Constitution, le pouvoir réglementaire au niveau fédéral appartient au Roi.

Bien que la Constitution elle-même n’attribue pas de pouvoirs au ministre, le Conseil d’État, section
de législation, estime qu’une délégation d’ordre accessoire ou de détail à un ministre n’est pas
exclue, mais qu’il appartient en principe au Roi et non au législateur d’accorder une telle
délégation. En effet, l’octroi par le législateur d’une délégation directe de tels pouvoirs à un ministre
signifierait que le législateur empiéterait sur une prérogative qui revient au Roi en tant que chef du
pouvoir exécutif fédéral (article 37 de la Constitution). Il n’en demeure pas moins que le Conseil
d’État, section de législation, a néanmoins admis dans le passé, à titre exceptionnel, une telle
délégation accordée par la loi au ministre lorsque l’on se trouve « en présence de motifs objectifs
qui requièrent une intervention urgente du pouvoir exécutif ».

Ces dernières années, la section de législation semble cependant parfois vouloir assouplir cette position
traditionnelle. Elle admet en effet que des attributions de pouvoir interviennent au profit d’autorités
distinctes du Roi, comme des ministres oudes fonctionnaires, pour autant que le pouvoir ainsi attribué
soit d’ampleur limitée et qu’un contrôle gouvernemental continue de s’appliquer sur les décisions
adoptées. Le principe reste cependant celui de l’inconstitutionnalité de telles attributions de pouvoirs.

Délégation de compétence

= confier à un tiers une partie de l’exercice de ses compétences. Pendant un temps, ceci aussi était
considéré comme inconstitutionnel, pour la même raison que celle de l’attribution de compétences. Mais
très vite, on s’est rendu compte que c’était en pratique très difficile à tenir comme position.
(Engorgement de la prise de décision)

La délégation de compétence est pour sa part une technique – on l’a vu – qui consiste pour une autorité
administrative (le délégant) à déléguer une partie de sa compétence (de décision) à une autorité qui lui
est hiérarchiquement subordonnée (le délégataire). Justifiée par des considérations d’efficacité et
d’impossibilité pour une autorité administrative d’exercer elle-même toutes les compétences qui lui ont

68
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

été confiées, la délégation de compétence déroge au principe de l’indisponibilité des compétences


administratives, consacré par l’article 33 de la Constitution, ainsi qu’à celui de l’unité du pouvoir
exécutif. Elle ne peut dès lors intervenir que dans le respect de conditions strictes.

1. Condition d’autorisation : Tout d’abord, le texte, qui a attribué une compétence à l’autorité qui
souhaite en déléguer une partie, doit sinon prévoir expressément cette possibilité de délégation,
du moins l’autoriser implicitement. Une telle autorisation peut cependant découler du nombre
et de la complexité des décisions à prendre.

2. Ensuite, une délégation ne peut pas porter sur l’essentiel de la compétence concernée, nia
fortiori sur l’ensemble de la compétence, mais sur des mesures secondaires ou accessoires. On
ne veut pas que le roi se débarrasse entièrement de sa compétence – il peut en déléguer une
partie mais pas l’essentiel !

3. Troisièmement, la délégation doit être précaire et révocable. Ce n’est pas un droit acquis pour
le délégataire.

4. Quatrièmement, le délégataire doit en règle demeurer soumis au contrôle hiérarchique du


délégant. Celui-ci peut toujours donner injonction quant à la manière dont la décision doit être
gérée.

5. Cinquièmement, l’acte qui opère la délégation doit être rendu opposable aux tiers par
l’accomplissement de formalités de publicité, dont l’étendue dépend du nombre de personnes
qui sont susceptibles d’être concernées par l’exercice de la compétence déléguée. Il s’agit
d’informer les tiers à qui la décision adoptée sur la base d’une délégation de pouvoir doit être
opposée qu’une délégation de pouvoir est intervenue au profit de la personne qui a adopté la
décision. Pour le Roi, les lois sont dans la constitution donc elles sont accessibles. Mais si les
compétences ont été déléguées, ceci doit être rendue public afin que les citoyens prennent
connaissance des personnes en charge de prendre des décisions à leur égard.

La législation est plus souple pour donner un pouvoir à un ministre plutôt qu’un fonctionnaire. Certes
ce ne sont pas les titulaires originels du pouvoir exécutif, mais néanmoins ces ministres sont
responsables devant la chambre des représentants du parlement. Le pouvoir continue d’être exercé par
des personnes qui rendent compte devant le parlement, ce qui n’est pas le cas lorsque le pouvoir est
octroyé à des agents fonctionnaires. En jurisprudence, il est également plus facile d’admettre la
délégation de pouvoirs de décisions individuels plutôt que règlementaire.

En application des principes qui précèdent, il est traditionnellement admis que le Roi peut déléguer une
partie de ses compétences à l’un ou plusieurs de ses ministres et ce, en raison, dit-on traditionnellement,
de la symbiose fonctionnelle qui existe entre le Roi et ses ministres et en raison du fait que ces derniers
sont politiquement responsables devant une assemblée parlementaire. La délégation ne peut toutefois
concerner que desquestions de détail ou secondaires.
En revanche, la section de législation du Conseil d’État n’admet qu’exceptionnellement que le Roi délègue
une de ses compétences à un fonctionnaire et ce, tout particulièrement pour la délégation d’un pouvoir
réglementaire24 :

« [L]es agents de l’administration ne répondent pas politiquement de leurs actes devant les représentants
de la Nation et l’attribution [lire : délégation] de compétences réglementaires qui leur serait faite porte

24Section de législation du Conseil d’État, avis 63.807/2/V du 1er août 2018 sur un projet d’arrêté ministériel de la Région
wallonne ‘relatif à la détermination de la performance énergétique d’un système de fourniture de chaleur externe’, p. 4.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

atteinte à l’unicité du pouvoir réglementaire. Une subdélégation [lire : délégation] à ces autorités n’est donc
en principe pas admissible. Compte tenu toutefois du pouvoir hiérarchique exercé par le ministre sur son
administration, une telle attribution [lire : délégation] ne peut exceptionnellement être admise que si elle
concerne la détermination de mesures de pure administration oude nature essentiellement technique ; ces
mesures doivent être d’une nature telle que leur adoption n’emporte pas d’appréciation politique quant
aux options qu’elles contiennent et qu’elles mettent en œuvre les principes préalablement arrêtés par les
normes de niveau supérieur ».

Les mêmes principes s’appliquent à la délégation à un fonctionnaire du pouvoir de prendre des mesures
individuelles. En pratique, toutefois comme ces mesures sont en principe d’une moins grande ampleur, la
délégation du pouvoir de les arrêter est admise plus souplement, pour autant cependant, précise la section
de législation, que le Roi ou le ministre conserve le pouvoir de réformer les décisions prises par ses
subalternes.
Dérogeant au principe de l’indisponibilité des compétences et de l’unité du pouvoir exécutif, la
délégation de compétence est d’interprétation restrictive. Elle est par ailleursdite impersonnelle, en ce
sens qu’elle intervient non en faveur d’une personne nommément désignée mais du titulaire d’une
fonction déterminée.

Il est traditionnellement enseigné que les subdélégations de compétence sont interdites. La pratique
administrative s’écarte toutefois souvent de cette règle. Par un arrêt du 10 octobre 2006, n° 163.336,
a.s.b.l. Syndicat de la police belge, le Conseil d’État a précisé les conditions auxquelles une subdélégation
peut intervenir. Il faut 1° que l’autorité qui souhaite procéder à une subdélégation y ait été autorisée par
le texte qui lui a confié la compétence en question ; 2° que cette subdélégation soit définie en termes
précis et 3° qu’elle ne porte que sur des points de menus détails. Un arrêt du 28 juin 2002, n° 108.629,
s.a. Sodecom Quévy, a ainsi considéré qu’un ministre ne peut pas subdéléguer un pouvoir
réglementaire à un fonctionnaire. L’affirmation est peut-être trop sévère ;mais il est vrai qu’en
l’espèce, la subdélégation emportait notamment le pouvoir de vider de leur substance les conditions
posées par un arrêté royal. Les trois autres conditions traditionnelles de la délégation de pouvoir
(précarité, droit de contrôle et publicité) devraient en outre, en tout logique, être également applicables
en cas de subdélégation.

Nous avons le pouvoir législatif (les trois branches, le


Sénat dans la minorité des cas) qui peut attribuer des
pouvoirs, des compétences, en principe, au profit du Roi.
C’est la flèche pleine rouge. De la même manière, le
législateur prend une loi, le roi est compétent pour
l’exécuter. Même si c’est en principe inconstitutionnel, il
arrive aussi que le législateur attribue directement des
pouvoirs aux ministre et aux fonctionnaires (flèche en
pointillé rouge, car ce n’est pas le procédé normal).
Ensuite le Roi peut lui-même déléguer une fraction de
son pouvoir à un de ses ministre, et le ministre peut lui-
même éventuellement déléguer une partie de son
pouvoir à un fonctionnaire, dans le respect des règles de
délégation. Le roi peut aussi directement déléguer un
pouvoir à un fonctionnaire.

70
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

RÉVISIONS

Question 1 – Imaginez que le législateur fédéral adopte une loi autorisant la consommation récréative
de cannabis, sans précisez dans quelles conditions un magasin est autorisé à vendre du cannabis à de
telles fin récréative. Quelle serait l’autorité compétente pour fixer de telles règles ?

Le roi ?

o Règle : compétence attribuée ? Quelle est le grand principe qui régit le pouvoir ou les
compétences du Roi ? Compétences d’attribution. Pour que le Roi soit compétent, il faut qu’on
puisse situer une base constitutionnelle ou législative. Quelle serait le fondement de l’action du
roi sur cette fonction-là ? Il s’occupe de l’exécution des lois Article 108. Pouvoir directement
établi par la constitution !

o Champ d’application : comment cette compétence s’applique-t-elle ? Que veut-dire exécuter la


loi ? que peut-on faire dans ce cadre ? Qui a défini ce qu’implique d’exécuter la loi ? Arrêt de la
Cour de cassation –18 novembre 1924.

o Appliquer à notre cas concret : pas d’informations sur les conditions dans lesquels un magasin
peut vendre du cannabis. Fixer ses conditions revient-il à « dégager du principe de celle-ci et de
son économie générale les conséquences qui en dérivent naturellement d’après l’esprit qui a
présidé à sa conception et les fins qu’elle poursuit » ? En d’autres termes, une fois que le
législateur a établi que la consommation de cannabis était autorisée, préciser les conditions de
vente revient-il à compléter la loi, ou bien cela revient-il à déduire des conséquences
naturelles d’un principe établi par le législateur ? réponse à cette question (on pourrait plaider
les deux) : a priori, cela dépasse la stricte exécution de la loi, les choix politiques n’ont pas été
posé au niveau de la législation. Si cela dépasse ce qui relève de l’exécution simple de la loi, il
faudrait que le législateur ré-intervienne pour fixer ses conditions. Par contre, si on argumente
que cela tombe sous le pouvoir d’exécution du Roi car si le législateur autorise la consommation
de cannabis il en autorise nécessairement la vente, cela pourrait passer à l’examen.

Le législateur ? Si on part du principe que fixer les conditions de vente dépasse le pouvoir exécutif
du Roi, alors le législateur devra ré-intervenir pour fixer et poser ses choix politiques quant aux
modalités de vente de cannabis ‘est au législateur de décider dans quel degré de détail il adopte une
loi. Mais c’est dans son intéret de ne pas fixer tous les détails, afin de ne pas devoir modifier les lois
pour des détails. Il est de bonne pratique que le législateur laisse au Roi les conditions de mise en
œuvre d’une loi. Ici la question est : les modalités en causes sont-elles une question de détail ou bien
sont-ils des éléments qui auraient de l’être fixés par le législateur lui-même ?

o On aurait aussi pu argumenter en disant que le législateur, dès lors que ce n’est pas une
responsabilité qui a été attribuée par la constitution à une autre autorité, nous sommes dans le
cas de la compétence résiduelle, le législateur peut toujours intervenir.

Le ministre de la Santé public ? Non, d’une part le ministre de l’Intérieur n’a pas de pouvoir
autonome de l’exécution de la loi, il ne tire pas de la constitution ce pouvoir autonome, et si même
le Roi ne peut pas mettre exécuter ces lois, le ministre non plus, il n’y a pas d’attributions de
compétences.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Question 2 – Le législateur autorise la consommation de cannabis à des fins récréatives et attribue au


Roi la compétence de fixer les conditions de vente du cannabis. Le Roi pourrait-il confier cette
compétence à son ministre plutôt que de fixer lui-même les règles en question ?

La délégation de compétence est possible mais moyennant le respect de certaines conditions

(1) La délégation est-elle autorisée explicitement ou implicitement par le texte ?

(2) Est-ce qu’elle porte sur des mesures accessoires et pas sur l’essentiel de la compétence
Tel que formulé, on dirait que le Roi veut donner tout le pouvoir qui a été confié par la loi à son
ministre de la Santé public. On dirait que l’essentiel de la compétence a été confié au ministre, ce
qui est contraire aux règles qui entourent la délégation de compétences en droit public belge.

(3) Est-ce qu’elle est précaire et irrévocable

(4) Est-ce qu’elle a fait l’objet d’une mesure de publicité permettant de la rendre opposable aux
tiers ?

Question 3 – Le législateur autorise la consommation de cannabis à des fins récréatives et attribue au


président du comité de direction du SPF santé public la compétence de fixer les conditions de vente du
cannabis. Une telle attribution de compétence serait-elle conforme à la constitution ?

Non, cette attribution de compétence du législateur au profit d’un fonctionnaire n’est pas conforme à la
constitution, de principe. Le principe est que le législateur peut uniquement attribuer des compétences
au Roi. En principe, une telle attribution est contraire aux articles 33, 37 et 105 de la constitution. A titre
exceptionnel, la section de législation du conseil d’état a accepté des attributions de compétences au
profit d’autorité tiers (pas le Roi, surtout des ministres) et de manière encore plus exceptionnelle d’un
fonctionnaire non responsable politiquement. Cependant, ici nous ne sommes pas dans un cas de figure
exceptionnel.

Question 3 – Le législateur autorise la consommation de cannabis à des fins récréatives et attribue au


ministre fédéral de la santé public la compétence de fixer les conditions de vente du cannabis. Une telle
attribution de compétence serait-elle conforme à la constitution ?

Même raisonnement qu’au-dessus, mais plus probable car c’est un ministre et donc il est responsable
devant la chambre des représentants du parlement. En pratique, cela arrive souvent donc on pourrait
l’envisager dans cette situation. Ex : urgences : urgence (pandémie), caractères très techniques de la
matière

72
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

COURS 14
CHAPITRE III : LES JURIDICTIONS
(POUVOIR JUDICIAIRE)

On affirme généralement qu’il existe, dans un État, trois pouvoirs, à savoir le pouvoir législatif, le pouvoir
exécutif et le pouvoir judiciaire. En Belgique, cependant, le pouvoir judiciaire, à lui seul, ne comprend
pas l’ensemble des juridictions. Il faut également tenir compte, à côté des juridictions de l’ordre
judiciaire, de l’existence de nombreuses autres juridictions, dont les plus importantes sont le Conseil
d’État et la Cour constitutionnelle.

Les juridictions compétentes en Belgique (source : Questions-Justice.be, http://questions-


justice.be/spip.php?page=schema-interactif-juridictions#)

Le pouvoir judiciaire ne comprend pas l’ensemble des juridictions en Belgique. La Cour


Constitutionnelle et le Conseil d’état peuvent aussi trancher des contestations sur la base du droit. Il
existe également en dessous du conseil d’état une série de juridictions administrative. Il existe d’autre
instances qui ne font pas partie de l’ordre judiciaire mais qui ont un but juridictionnel.

Le système belge conformément à la tradition continentale, il existe des juridictions spécialisées à côté
des juridictions de droits communs pour certains litiges entre l’état et des particuliers.

Article 144 de la constitution établit les perspectives de l’ordre judiciaire et des juridictions. A ce stade,
retenons que les juridictions ne peuvent être crées que par le législateur (Art. 146) seulement établis
par des lois exemples de matières réservées par la constitution au législateur par la constitution.
Pouvoir judiciaire :
Sens organique : on vise les cours et tribunaux qui forment le pouvoir judiciaire en Belgique
Sens fonctionnel : notion de fonction juridictionnelle, l’activité qui consiste pour un organe à
trancher des litiges de manière indépendante et sur la base des règles de droit, la constitution
utilisant la notion de pouvoir judiciaire tantôt dans un sens organique, tantôt dans un sens
fonctionnel

Lorsqu’on parle de juridiction on ne vise pas seulement les cours et tribunaux mais aussi un ensemble
d’autres instances : en premier lieu le conseil d’état, la cour constitutionnelle. La création de juridictions
contentieuses est aussi un des exemples de matière réservées à la loi par la constitution. Il existe au sein
du système belge différentes juridictions suivant une logique pyramidale

Cour de cassation
5 cours d’appel et 5 Cours de travail (une par ressort)
11 Cours d’assises (pénale)
13 tribunaux de premières instances
187 justices de paix
15 tribunaux de police (pénale)

A côté du siège il y a également le parquet, également organisé sous une structure pyramidale :
Parquet au niveau de chaque arrondissement judiciaire (chacun des tribunaux de première
instance)
Un parquet général au niveau de chaque ressort de cour d’appel
1 parquet général près de la Cour de cassation

73
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

1 parquet spécialisé pour les matières sociales


Parquet fédéral en charge des infractions les plus importantes

Dans le cas de l’affaire Dutroux il y a eu beaucoup de réformes judiciaires fusion des polices et
disparition de l’ancienne gendarmerie. Niveau du pouvoir judiciaire on a voulu dépolitiser la
magistrature et c’est passé par la création du conseil supérieur de la justice, qui est rattaché au pouvoir
judiciaire mais qui est indépendant par rapport aux cours et tribunaux (magistrats et non-magistrats).

SECTION 1 : LE POUVOIR JUDICIAIRE : LES COURS ET TRIBUNAUX

§ 1er. L’organisation des cours et tribunaux

L’organisation judiciaire est conçue sous une forme pyramidale, structurée principalement autour de
cinq niveaux : l’ensemble du territoire national, les ressorts de cour d’appel, les provinces, les
arrondissements et les cantons.

Il y a cinq ressorts de cour d’appel, correspondant respectivement aux territoires suivants (article
156 de la Constitution) :

Bruxelles : l’arrondissement administratif de Bruxelles (les « dix-neuf communes » de


l’agglomération bruxelloise) et les provinces du Brabant wallon et du Brabant flamand (composé
des arrondissements judiciaires de Bruxelles, de Louvain et du Brabant wallon)

Liège : les provinces de Liège, de Namur et du Luxembourg (composé des arrondissements


judiciaires de Liège, de Namur, du Luxembourg et d’Eupen)

Mons : la province du Hainaut (composé de l’arrondissement judiciaires portant lemême nom) ;

Anvers : les provinces d’Anvers et du Limbourg (composé des arrondissements judiciaires portant
les mêmes noms) ;

Gand : les provinces de Flandre orientale et de Flandre occidentale (composé des arrondissements

74
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

judiciaires portant les mêmes noms).

Il y a douze arrondissements judiciaires :

L’arrondissement de Bruxelles, qui correspond aux « dix-neuf communes » de l’agglomération


bruxelloise et à une partie de la province du Brabant flamand, à savoir les arrondissements
administratifs de Hal et de Vilvorde

L’arrondissement de Louvain, qui correspond à la province du Brabant flamand sans les


arrondissements administratifs de Hal et de Vilvorde

L’arrondissement d’Eupen, qui correspond au territoire de la région de langue allemande (cantons


d’Eupen et de Saint-Vith)

L’arrondissement de Liège, qui correspond à la province de Liège sans l’arrondissementd’Eupen

Les huit autres arrondissements – de Mons (Hainaut), Namur, Luxembourg, Brabant wallon, Anvers,
Limbourg, Flandre orientale et Flandre occidentale – correspondant aux provinces du même nom.

Il y a enfin 187 cantons.

La Constitution prévoit les cours et tribunaux suivants :

Une Cour de cassation pour toute la Belgique (article 147 de la Constitution). C’est la juridiction
suprême du pouvoir judiciaire. Instituée pour assurer l’unité de la jurisprudence, elle ne connaît pas
du fond des affaires qui lui sont déférées à la suite de pourvois contre des décisions prononcées par
les juridictions inférieures. En d’autres termes, elle ne peut apprécier les éléments de fait jugés par
ces dernières juridictions et elle ne peut casser (c’est-à-dire annuler) les décisions judiciaires que si
elles sont contraires aux règles de droit ; elle les renvoie alors à une juridiction de fond de même
niveau que celle qui a prononcé la décision cassée. Il s’agit de sa compétence principale. Elle dispose
d’autres compétences, notamment de celle de régler les conflits d’attribution entre les juridictions
judiciaires et les juridictions administratives (article 158 de la Constitution).

Cinq cours d’appel et cinq cours du travail, à savoir une par ressort de cour d’appel. Les cours d’appel
reçoivent les appels des jugements du tribunal de première instance et du tribunal de l’entreprise.

Onze cours d’assises, soit une par province et une pour la Région de Bruxelles-Capitale, compétentes
pour statuer sur les infractions criminelles 25 non correctionnalisées, ainsi que pour les délits
politiques et les délits de presse, à l’exception toutefois de ceux inspirés par le racisme et la
xénophobie (article 150 de la Constitution) ; elles comprennent un jury de douze citoyens tirés au
sort, qui décident seuls de la culpabilité des accusés.

Treize tribunaux de première instance, à savoir un par arrondissement judiciaire, sauf dans
l’arrondissement de Bruxelles, où le tribunal est dédoublé en un tribunal francophone et un tribunal
néerlandophone.
Chaque tribunal de première instance est subdivisé en chambres civiles, chambres correctionnelles
(pour le jugement des délits et des crimes correctionnalisés) et chambres de la famille et de la jeunesse

25 Un crime est une infraction pénale punie principalement d’une privation de liberté plus de cinq ans, de plus de 25 euros
d’amende (à majorer des décimes additionnels, c’est-à-dire à multiplier par 8 actuellement) et de plus de 45 heures de peine
de travail

75
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

; en outre, depuis 2007, dans chaque ressort de cour d’appel, il y a un tribunal d’application des peines,
qui siège en principe au sein du tribunal de première instance dont le siège est celui de la cour d’appel.
En principe, il y a également un tribunal du travail et un tribunal de commerce par
arrondissement mais il faut tenir compte de ce qui suit :
1. Chacun de ces deux tribunaux est également dédoublé dans l’arrondissement deBruxelles ;
2. Il n’y a qu’un tribunal du travail et un tribunal de commerce pour les arrondissements de Liège,
de Luxembourg et de Namur ;
3. Il n’y a qu’un tribunal du travail et un tribunal de commerce pour les arrondissements de
Flandre occidentale et de Flandre orientale ;
4. Il n’y a qu’un tribunal du travail et un tribunal de commerce pour les arrondissements d’Anvers
et du Limbourg.
Les justices de paix, une par canton judiciaire, compétentes pour les affaires civiles d’importance
moindre et pour certains contentieux spécifiques (ex. : baux, voisinage, expropriation). Un ou
plusieurs juges de paix peuvent être nommés pour exercer leurs fonctions dans plusieurs cantons ;
en outre, chaque juge de paix titulaire dans un canton est également nommé à titre subsidiaire dans
les autres cantons du même arrondissement
Les tribunaux de police, compétents en matière pénale pour les contraventions 26 et les délits27
contraventionnalisés, ainsi qu’en matière civile pour juger les demandes relativesà la réparation
d’un dommage résultant d’un accident de la circulation ou d’un accident ferroviaire, organisés sur
une base territoriale spécifique liée aux arrondissements (il y en a quinze : Liège ; Eupen ; Arlon ;
Namur ; Mons et Charleroi ; Nivelles ; un francophone à Bruxelles ; un néerlandophone à Bruxelles
; Hal ; Vilvorde ; Anvers ; Hasselt ; Louvain ; Gand ; Bruges).
Les tribunaux de police, les tribunaux de première instance (et leurs sections), du travail et de
commerce, ainsi que les cours d’appel et du travail peuvent être divisés en « divisions »,
correspondant à un territoire plus retreint que leur ressort territorial normal28et ces juridictions
(ou leurs divisions) sont structurées en chambres, composés d’un à trois magistrats.

La Cour de cassation est divisée en trois chambres (civile, pénale et sociale), elles- mêmes
subdivisées en deux sections linguistiques.

Il y a en principe une subdivision du ministère public, que l’on nomme « parquet », par ressort de cour
d’appel et par arrondissement. Au niveau du ressort, il est dirigé par le procureur général à la Cour
d’appel, qui exerce une autorité hiérarchique sur les membres de son parquet (premier avocat général,
avocats généraux et substituts du procureur général) mais aussi sur les procureurs du Roi, lesquels
dirigent le parquet de chaque arrondissement avec l’assistance de ses premiers substituts et
substituts. Leparquet du procureur du Roi exerce ses fonctions auprès du tribunal de première instance
et du tribunal de commerce (ou de sa subdivision) de son arrondissement. Toutefois, dans

26 Une contravention est une infraction pénale punie principalement d’une privation de liberté d’un à huit jours, de 1 à 25 euros
d’amende (à majorer des décimes additionnels, c’est-à-dire à multiplier par 8 actuellement) et de maximum 45 heures de peine
de travail.
27 Un délit est une infraction pénale punie principalement d’une privation de liberté de huit jours à cinq ans, de plus de 25 euros

d’amende (à majorer des décimes additionnels, c’est-à-dire à multiplier par 8 actuellement) et de plus de 45 heures de peine
de travail
28 Par exemple, le Tribunal de première instance de Hainaut est réparti en trois divisions. La première a son siège à Charleroi

et exerce sa juridiction sur le territoire des cantons de Beaumont-Chimay-Merbes-le- Château, de Binche, des cinq cantons de
Charleroi, des cantons de Châtelet, de Fontaine-l'Evêque, de Seneffe et de Thuin. La deuxième a son siège à Mons et exerce sa
juridiction sur le territoire des cantonsde Boussu, de Dour-Colfontaine, d'Enghien-Lens, de La Louvière, des deux cantons de
Mons et du canton de Soignies. La troisième a son siège à Tournai et exerce sa juridiction sur le territoire des cantons d'Ath-
Lessines, de Mouscron-Comines-Warneton, de Péruwelz-Leuze-en-Hainaut et des deux cantons de Tournai.

76
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

l’arrondissement de Bruxelles, il y a deux parquets (et donc deux procureurs du Roi), à savoir un pour
les « dix-neuf communes » de l’agglomération bruxelloise et un pour le territoire correspondant aux
arrondissements administratifs deHal et de Vilvorde.

Viennent s’insérer dans cette structure, en parallèle :

Le parquet fédéral, dirigé par le procureur fédéral et assisté des « magistrats fédéraux »,
compétents notamment pour les recherches et les poursuites concernant les infractions pénales
particulièrement importantes qui leur sont spécialement attribuées par la loi (terrorisme, trafics
d’armes, criminalité organisée, etc.) ;

L’auditorat général (un premier avocat général, des avocats généraux et des substituts généraux),
qui exerce ses compétences auprès de chaque cour du travail ;

L’auditorat du travail (auditeur du travail et substituts), qui exerce ses compétences auprès des
tribunaux du travail.
Enfin, la Cour de cassation est assistée d’un procureur général à la Cour de cassation, assisté d’un
premier avocat général et d’avocats généraux, qui forment ce que l’on appelle le « parquet général »
de la Cour de cassation ou le ministère public à la Cour de cassation. Leurs membres donnent des avis
à la Cour sur les pourvois dont elle est saisie.

Ces explications ne sont fournies ci-avant que dans les grandes lignes. L’organisation judiciaire est en
réalité plus complexe et comprend une série de règles complémentaires ou dérogatoires, portant sur la
division des tribunaux ou des cours, à la mobilité des magistrats, etc. Le détail de cette organisation
dépasse le cadre d’un cours de droit public.

De manière générale, là où le rôle de la magistrature, (celle qui siège dans les différentes juridictions)
de trancher les litiges qui lui sont soumis, pour savoir quel est le juge qui est compétent, il faut savoir
quelle est la matière qui est concernée (domaine économique tribunal de commerce, sécurité social
tribunal du travail, matière civile classique ou en matière pénale tribunal de première instance,
particulier justice de paix ou de police, avec une possibilité d’appel en cour d’appel ou de cassation. Là
où la magistrature est chargé de trancher les litiges qui lui sont soumises, le rôle du parquet en matière
pénale est principalement de poursuivre les infractions, et donc on va dire que le parquet qui est
organisé au niveau de chaque arrondissement judiciaire est dirigé par un procureur du roi, qui est
composé du procureur et du substitut du procureur du roi, il recherche les infractions dans
l’arrondissement dans lequel ils sont rattachés, et les poursuivent devant les cour et tribunaux.

On a le parquet général devant la cour d’appel qui a un rôle similaire mais en appel, en ce qui concerne
l’accusation en degré d’appel.

On a également des parquets spécialisés en matière de droit du travail de sécurité social rôle joué par
l’auditorat, tant au niveau des tribunaux de premières instances qu’au niveau des cour du travail. Le
parquet général près de la Cour de cassation, il a un rôle particulier puisqu’il est dirigé par un procureur
général et est chargé de rendre des avis sur les affaires qui sont soumise à la Cour de cassation.

Le parquet fédéral est compétent pour l’ensemble du territoire belge mais spécialisé sur la recherche et
poursuite des infractions les plus importantes. Outre son rôle en matière pénale, le parquet joue aussi
un rôle en matière civile, un rôle d’avis dans une série de contentieux qui touche à l’ordre public
(contentieux de la jeunesse où le parquet rend fréquemment des avis, en matière de droit de la sécurité
sociale, droit du travail, volet civil important également. Le parquet général près de la Cour de cassation
rend aussi des avis dans toutes les matières soumises à la Cour de cassation donc pas seulement en

77
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

matière pénale mais aussi en matière civile.

Pourquoi on parle de parquet ? car historiquement c’était l’endroit ou dans la salle d’audience on
trouvait le procureur du roi, et l’accusation c’était un sol en parquet et donc c’est pour ça qu’on parle de
parquet pour viser cette fonction-là.

Explication des différentes juridictions – compétences constitutionnelles du pouvoir


judiciaire de la Cour d’assise et de la Cour de cassation

Cour d’assise : Art. 150 de la Constitution

Art. 150 constitution = existence de cours d’assises en Belgique, et établit la compétence des cours
d’assises en Belgique pour tout ce qui est crimes. Il y a trois catégories d’infraction pénales en Belgique :
les contraventions, les délits, les crimes. Les crimes sont passibles en principe de la cour d’assise. Les
délits sont sanctionnés moins lourdement que les crimes, mais relèvent de la compétence du tribunal
correctionnel. Les délits politiques et les délits de presse ils relèvent par principe de la compétence de
la Cour d’assise. Cette compétence spécifique de la cour d’assise pour les crimes et pour les délits
politiques et de presse le constituant de 1831 libéral, bourgeois, influencé par les souvenirs des
poursuites pénales intentées contre les journalistes sous le régime hollandais, voulait protéger les
journalistes et les personnes engagées politiquement contre les abus du pouvoir judiciaire à leur
encontre. Une garantie qui a été imaginée à cette fin c’est de rendre la cour d’assise compétence pour ce
type de délit. Les jugements sont rendus par des jury de citoyens tirés au sort. La Cour d’assise, sa
compétence est fixée par la constitution, mais c’est très lourd d’organiser un procès d’assise il faut
convoquer un jury composé de citoyens, et l’oralité des débats est plus marqué que dans d’autres procès
pénaux (il faut réentendre les témoins devant le jury, il faut réexposer le contenu du dossier devant le
jury, alors que devant les juridictions pénales qui ne font pas appel au jury, le juge prépare davantage
les dossiers, il ne faut pas tout réexpliquer) ca prends du temps et ça coute cher d’organiser un jury
d’assise et donc c’est compliqué. Par ailleurs il y a des critiques de fond qui sont apportés contre le
système du jury en matière pénale, certains observateurs soutiennent qu’il est paradoxal que les
infractions les moins graves soient confiés à des magistrats professionnels et spécialisés avec un bagage
juridique importants, alors que les crimes les plus graves sont tranchés par des personnes qui n’ont
aucun bagage juridique et qui seraient plus manipulables qu’un magistrat.
D’un autre coté les partisans de la Cour d’assise, soutiennent le fait que d’une part les citoyens lorsqu’ils
sont mis en condition de délibérer ensemble, parviennent souvent à des bonnes décisions, et d’autre
part, le fait d’associer directement des citoyens tirés au sort à la justice pénale, c’est une excellente
formation civique et se rendent compte des difficultés liés à la fonction de jugés.
Difficultés logistiques réelles, qui font que depuis des années on cherche à limiter le nombre de procès
d’assise ! Non seulement car ça mène à une impunité (on ne poursuit pas) ou alors le délai de jugement
est trop important. La stratégie développée pour répondre à ces problèmes, ça été de permettre en
modifiant la constitution de renvoyer dans les tribunaux correctionnels certaines catégories
particulières de délit politiques ou de presse, à savoir ceux qui revêtent un caractère raciste ou
xénophobes afin de pouvoir poursuivre ces délits.

Il y a une pratique de correctionnalisation des crimes, le parquet requiert presque automatiquement


pour certains types d’affaires des circonstances atténuantes qui permettent de transformer certaines
infractions qui seraient normalement qualifiés de crime, en délit, ce qui permet de les poursuivre ensuite
devant le tribunal correctionnel au lieu de la cour d’assise.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Par le passé, le législateur cherchait à étendre cette pratique de correctionnalisation des crimes, presque
à vider de sa substance la compétence de la cour d’assise, mais cette loi-là a été sanctionnée et annuler
par la cour constitutionnelle.

Cour de cassation Art. 147 & 158 de la Constitution


Recours
Art. 147 de la constitution = établissement de la Cour de cassation. Disposition renvoi au rôle joué par
la Cour de cassation pour garantir l’uniformité dans l’application et dans l’interprétation du droit en
Belgique. La possibilité d’introduire en recours en cassation contre les décisions rendues en dernier
ressort, soit par la cour d’appel soit par des tribunaux de première instance ou des tribunaux
correctionnels, jugeant en degré d’appel. Là pour ce type de pouvoir en cassation, la Cour de cassation
ne revient pas sur les faits du premier procès mais elle vérifie si le droit, la règle a été correctement
interprétée et appliquée par le juge du fond.

Conflit d’attribution
Deuxième compétence constitutionnelle établie par l’article 158 : compétence de régler les conflits
d’attribution. Cela veut dire que c’est la Cour de cassation qui définit les limites des compétences
respectives, du conseil d’état d’un côté (et des juridictions administratives, contentieux objectif) et du
pouvoir judiciaire d’un autre côté (contentieux subjectifs) compétences assez distinctes mais il y a
des cas dans lesquels la limite entre la juridiction des deux ordres peut être floue !
Par exemple, si une législation octroie à un citoyen le droit à une subvention, si la personne demande
cette subvention mais qu’elle est refusée (décision de refus = acte administratif = recours objectif en
annulation devant le conseil d’état ?? Mais le citoyen a aussi un droit subjectif à obtenir la subvention….
Selon la manière dont le recours est présenté (soit on conteste la décision de refus, soit on cherche à
faire valoir directement notre droit à la subvention) on pourrait aller SOIT devant le conseil d’état,
soit devant un tribunal du pouvoir judiciaire en première instance deux juridictions compétences en
même temps ? cas de conflit positif d’attribution. Pour ce type de conflit d’attribution, c’est la Cour de
cassation qui est chargée de trancher ce type de conflit.

Si c’est bel et bien un droit subjectif qui est cherché, alors le conseil d’état doit se déclarer incompétent
car ce sera la compétence des cours et tribunaux de l’ordre judiciaire. Théorie de l’objet véritable du
recours

§ 2. La nomination des magistrats du siège et du ministère public

Les magistrats sont nommés par le Roi sur présentation du conseil supérieur de la justice. L’accès à ces
fonctions peut s’opérer par deux voies principalement :

Soit par le biais d’une expérience professionnelle de plusieurs années dans des fonctions
judiciaires ou juridiques, et la réussite d’un « examen d’aptitude professionnelle » ;

Soit, pour ceux qui ne pourraient pas exciper d’une expérience professionnelle suffisante, par la
réussite d’un « concours d’aptitude professionnelle » et d’un stage judiciaire. Depuis la loi du 6
juillet 2017 (M.B., 24 juillet 2017), le stage est limité à une durée de deux ans. Le candidat qui a
réussi son stage reçoit un certificat qui lui permetde postuler à un poste vacant au ministère public
ou au siège. Si aucun poste vacant n’existe à la fin de son stage, le candidat qui a réussi son stage est
d’office nommé par le Roi comme « attaché judiciaire » près d’un tribunal ou d’un parquet et sera
chargé, par leMinistre de la justice en fonction des nécessités de service, d’exercer la fonction de
substitut au sein du ministère public ou de juge suppléant au sein du siège.

79
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Dans les deux cas, la nomination doit être précédée d’une présentation motivée des candidats par la
commission de nomination et de désignation du Conseil supérieur de la Justice, dont il sera question ci-
après.

Une troisième voie d’accès à la magistrature est ouverte, qui ne peut porter, par niveau de
juridiction, sur plus de 12 % du nombre total de postes de magistrats : les avocats ayant vingt ans
de pratique ou quinze ans de pratique complétée de cinq ans de fonctions impliquant une bonne
connaissance du droit sont dispensés du concours d’accès au stage et de l’examen d’aptitude et
peuvent se contenter d’un examen oral d’évaluation, à la condition que la commission de nomination
et de désignation du Conseil supérieur de la justice estime la candidature recevable aux trois-quarts
des voix et sanctionne favorablement l’examen oral d’évaluation à la même majorité après avoir
recueilli l’avis du barreau.
La Constitution a également prévu que les fonctions de « chef de corps » (soit les premiers présidents
des cours et les présidents des tribunaux et, au ministère public, les procureurs généraux et les
procureurs du Roi, etc.) fassent l’objet d’une désignation pour un mandat limité dans le temps par le
Roi, sur présentation motivée de la commission de nomination et de désignation du Conseil supérieur
de la Justice.

Enfin, les jurys des Cours d’assises sont désignés par tirage au sort parmi les citoyens.

§ 3. Le statut des magistrats : magistrats assis et magistrats debout

Au sein de la magistrature, on distingue entre la magistrature assise et la magistrature debout.

1. La magistrature assise = les juges (magistrats du siège)

Pas de logique hiérarchique entre magistrats du siège. Elle comprend l’ensemble des juges amenés à
prononcer les jugements et arrêts sur les causes qui leur sont soumises. Ils bénéficient de plusieurs
garanties constitutionnelles de nature à préserver leur indépendance:

L’inamovibilité des juges est consacrée par l’article 152 de la Constitution, ce qui signifie qu’ils ne
peuvent être déplacés, par exemple d’un tribunal à l’autre, que par l’effet d’une nomination nouvelle
et avec leur consentement. (Irrévocables et inamovibles) pour ne pas que ce soit utilisé comme
un moyen de sanction déguisés pour les juges.

Ils sont nommés à vie. Leur discipline est assurée par les tribunaux disciplinaires et les tribunaux
disciplinaires d’appel, qui sont des juridictions installées au sein du pouvoir judiciaire, sous le
contrôle de la Cour de cassation, à l’exclusion de toute compétence de sanction qui serait exercée
par le pouvoir exécutif ou le pouvoir législatif. C’est en ce sens que le statut des magistrats du siège
est un statut d’« irrévocabilité » : ceci ne signifie donc pas que les fautes professionnelles lourdes
des magistrats assis ne pourraient aboutir à leur destitution ou leur révocation ; cela signifie
seulement que ce type de mesure ne peut être prise qu’au sein du pouvoir judiciaire. Protection
des juges et de leur indépendance Objectiver l’accès à la magistrature. Indépendance du juge est
la condition pour l’état de droit.

Selon l’article 154 de la Constitution, les traitements des membres de l’ordre judiciaire sont fixés par
la loi. Ici aussi, la règle a pour but d’éviter que l’exécutif ne puisse faire pression sur les magistrats.

L’article 155 de la Constitution crée un régime d’incompatibilités : il interdit le cumul de la fonction


de juge avec celle d’autres fonctions salariées par le Gouvernement. Cette disposition dérive de la
séparation des pouvoirs et procède également de la volonté d’éviter que des pressions puissent être

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

faites sur un magistrat par des promesses ou menaces relatives au traitement afférent à une activité
accessoire qu’il exercerait.

2. La magistrature debout = le parquet (magistrats du ministère public)

= moins de garanties que pour les magistrats du siège. Les magistrats du ministère public font partie
d’un corps qui est hiérarchisé.

La magistrature debout, aussi appelé le parquet (en raison du lieu qu’il occupait anciennement dans les
salles d’audience) est le représentant de l’intérêt général auprès des cours et tribunaux. Il comprend les
magistrats du ministère public.
Les compétences principales du ministère public sont exercées sur le plan pénal : le parquet est chargé
des recherches d’infractions, de la poursuite de leurs auteurs suspectés devant les tribunaux et,
partiellement, du suivi de l’exécution des peines.Devant les juridictions civiles, le parquet agit par voie
d’action, de réquisition et d’avis lorsque la loi le prévoit, notamment dans les matières ou les affaires qui
mettent en jeu des règles du droit belge touchant à l’ordre public ou aux bonnes mœurs, comme en
matière familiale par exemple. En outre, toutes les affaires relevant de la compétence des juridictions
du travail font l’objet d’un avis, voire parfois d’une instruction préparatoire, de l’auditorat du travail, qui
constitue une branche du parquet.

Trois principes caractérisent l’institution du ministère public : l’unité, l’indivisibilité et l’indépendance.

L’unité du ministère public s’oppose à la multiplicité des juges, qui sont indépendants et n’ont de
compte à rendre à personne, chaque juge statuant comme sa conscience lui ordonne. Le ministère
public, au contraire, est un corps hiérarchisé soumis en fin de compte au ministre de la Justice (en
pratique aux procureurs généraux près les cours d’appel).

L’indivisibilité du ministère public est un corollaire de l’unité du ministère public. Aucune


distinction n’est à faire entre les différents magistrats du ministère public. Ceux- ci se remplacent
valablement au cours d’une même instance et chaque acte qu’ils posent est un acte du ministère
public tout entier.

L’indépendance du ministère public doit être examinée en premier lieu vis-à-vis du pouvoir
exécutif, dans la mesure où le Roi nomme et révoque les officiers du ministère public (article 153 de
la Constitution). Le pouvoir de révocation que la Constitution attribue au Roi laisse supposer une
dépendance hiérarchique stricte du ministère public à l’égard de l’Exécutif. Indépendance collective
par rapport au pouvoir exécutif interdiction pour les autres pouvoirs d’interférer dans des litiges
en cours. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de collaboration, le législateur peut intervenir pour
donner une interprétation à une loi existence. Rôle joué par le conseil supérieur de la justice.

o Indépendance personnelle des juges : cela n’empêche pas qu’il ait certains tempéraments et
certains contrôles exercés sur eux (régime disciplinaire qui s’appliquent au magistrat), mais les
juges sont également tenus de respecter des jugements d’autres juridictions, par exemple
lorsque la Cour de cassation casse deux fois dans une même affaire une décision de cour d’appel,
la troisième cour d’appel saisie dans la même affaire sera tenue d’appliquer la décision de la
cour de cassation. Autre exemple la cour constitutionnelle sous question préjudicielle rends
des arrêts qui s’imposent aux magistrats qui interviennent dans l’affaire en question.

En réalité, une distinction doit être faite entre ce qui concerne les actes écrits, actes de poursuite, et les
réquisitions et avis donnés oralement. Dans ses actes écrits, le ministère public est l’agent du
Gouvernement auprès des juridictions, mais le pouvoir hiérarchique dont celui-ci dispose à l’égard du

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

parquet se limite au pouvoir d’ordonner des poursuites (article 151 de la Constitution), mais non de les
interdire. Lorsque le ministère public intervient oralement à l’audience (par des réquisitoires en
matièrepénale et par des avis en matière civile), il agit comme conseiller du juge et, dans cette fonction,
il est l’organe du pouvoir judiciaire, n’étant alors lié par aucune prescription hiérarchique, par aucune
directive, pas même par les réquisitions écrites qu’il a prises. D’où l’adage de l’ancien droit : « La plume
est serve, mais la parole est libre ».

Les membres du parquet sont soumis à un pouvoir hiérarchique, ils peuvent recevoir des instructions
de la part de leur supérieur, cependant oralement, lors de l’audience, les membres de la magistrature du
parquet sont toujours libres, même de dire ce qu’ils n’ont pas écrit avant !
§ 4. Le Conseil supérieur de la Justice

Le Conseil supérieur de la Justice est chargé par l’article 151 de la Constitution d’assurer diverses
missions en rapport avec la qualité et l’efficacité du pouvoir judiciaire.

Il est composé paritairement de :

a. 22 magistrats (soit deux collèges unilingues de 11 magistrats, au sein desquels doivent figurer
un membre d’une cour ou du ministère public auprès d’une cour, un membre du siège, un
membre du parquet, un membre par ressort de cour d’appel) élus par leurs pairs ;

b. 22 non-magistrats (soit deux collèges unilingues de 11 non-magistrats, au sein desquels doivent


figurer quatre avocats, trois professeurs d’université ou d’une école supérieure et quatre
personnes possédant une expérience utile dans le domaine juridique, économique,
administratif, social ou scientifique) nommés par le Sénat.

Il constitue au sein de chaque collège unilingue deux commissions :

a. La commission des nominations et désignations, composée de quatorze membres (sept


magistrats et sept non-magistrats), chargée de la préparation des examens d’aptitude
professionnelle et des concours d’admission au stage, de la formation continue des magistrats,
de l’organisation des concours et des examens, ainsi que de la présentation des candidats à des
postes dans la magistrature ;

b. la commission d’avis et d’enquête, composée de huit membres (quatre magistrats et quatre


non-magistrats), qui peut émettre des avis et des propositions sur le fonctionnement général de
l’Ordre judiciaire, les projets et propositions de loi relatifs à l’Ordre judiciaire, l’utilisation des
moyens disponibles ; elle émet les profils générauxdes chefs de corps sur la base des critères
fixés par le Conseil supérieur ; elle promeut le contrôle interne et elle reçoit et instruit des
plaintes sur le fonctionnement de l’Ordre judiciaire, qui ne peuvent pas concerner le contenu
d’une décision judiciaire ; cette commission n’a aucune compétence disciplinaire ; elle peut
toutefois signaler des manquements aux autorités disciplinaires compétentes et émettre des
suggestions d’amélioration lorsque des problèmes sont relevés ; elle peut également faire
procéder à des enquêtes particulières ou réaliser des audits.

Les actes, propositions, rapports, directives, programmes et autres actes de ces commissions doivent
être approuvés par le Conseil supérieur dans son ensemble. Celui- ci reçoit des instances judiciaires les
rapports, notamment ceux établis obligatoirement chaque année, sur leur fonctionnement et il établit
annuellement lui-même un rapport sur le fonctionnement général de l’Ordre judiciaire, transmis au
ministre de la Justice, aux assemblées parlementaires fédérales, aux chefs de corps des cours et du
ministère public auprès de ces cours. Le ministre de la Justice peut être entendu à sa demande ou à celle
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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

du Conseil supérieur.
Le Conseil supérieur et chaque Commission se composent paritairement de francophones et de
néerlandophones. Cette parité est également observée dans les équilibres internes de ces entités
(magistrats/non-magistrats, siège/parquet, etc.).

§ 5. Les garanties constitutionnelles relatives à la justice

La Constitution proclame les principes suivants en ce qui concerne l’administration de laJustice :

La première d’entre elles consacre le caractère public de la justice : « Les audiences des tribunaux
sont publiques, à moins que cette publicité ne soit dangereuse pour l’ordre ou les mœurs ; et, dans
ce cas, le tribunal le déclare par un jugement » (article 148 de la Constitution). Pour les délits
politiques et de presse, la garantie est renforcée, puisqu’ici le huis clos ne peut être prononcé qu’à
l’unanimité des juges (article 148 de la Constitution). En outre, tout jugement doit être rendu public
et, en matière pénale, son dispositif doit être prononcé en audience publique (article 149 de la
Constitution)29;

La seconde garantie consiste dans l’obligation pour le juge de motiver son jugement (article 149
de la Constitution). Elle prémunit le justiciable contre l’arbitraire du juge et lui permet de mesurer
ses chances de succès devant le juge d’appel ou de cassation. Inhérente à l’acte juridictionnel, elle
s’applique à toutes les juridictions, qu’elles soient judiciaires, administratives ou disciplinaires ;

Résultant déjà du principe même de la séparation des pouvoirs, l’indépendance de la magistrature


assise est consacrée par l’article 151 de la Constitution. Elle est mise en œuvre par la nomination à
vie des juges, leur irrévocabilité (c’est-à-dire l’impossibilité pour le pouvoir exécutif de prendre des
mesures disciplinaires à l’égard des juges, cette compétence étant réservée aux juridictions elles-
mêmes sous le contrôle de la Cour de cassation), leur inamovibilité (c’est-à-dire l’impossibilité de
modifier l’affectation d’un juge sans son consentement), la compétence du législateur, à l’exclusion
du pouvoir exécutif, pour la fixation du traitement des magistrats et l’objectivation des conditions
de nomination et de promotion des magistrats.

La Justice, comme tout service public, doit en outre assurer la continuité de son fonctionnement, la
gratuité de celui-ci30 et l’égalité des citoyens31 . En cas de faute commise par une juridiction, constatée
par une décision non susceptible d’appel, laresponsabilité de l’État peut en outre être mise en œuvre,
conformément au droit commun de la responsabilité civile (voy. L’arrêt Ancra de la Cour de cassation
du 19 décembre 1991).

§ 6. Les compétences des cours et tribunaux : les notions de droits civils et de

29 La règle de la publicité des débats et des jugements n’est de droit applicable qu’aux juridictions de jugement de l’ordre
judiciaire. À moins d’une disposition légale imposant la publicité, ni les juridictions d’instruction, comme celles statuant en
matière de détention préventive, ni les juridictions administratives n’y sont soumises.
30 La gratuité ne concerne que le service public de la Justice proprement dit. Elle n’est assurée que de manière partielle puisque

des droits de mise au rôle (inscription d’une affaire sur la liste de celles qui sont pendantes devant la juridiction) relativement
modiques sont prévus, outre les frais et honoraires des huissiers, l’indemnité de procédure (due en principe par le perdant
d’un procès au gagnant) et les éventuels frais et honoraires d’expertise ; ces frais, appelés les « dépens », sont mis à la charge
du perdant du procès, en ce compris une estimation forfaitaire des frais et des honoraires de l’avocat de la partie adverse qui,
par hypothèse, a gagné le procès. Des systèmes d’assistance judiciaire et d’aide juridique ont été mis sur pied, le premier pour
les frais de justice (les « dépens »), le second pour les conseils et l’assistance juridique notamment devant les tribunaux ; ce
second aspect peut comprendre l’intervention d’avocats à coûts réduits.
31 L’égalité est garantie principalement par l’égal accès de chacun aux juridictions, consacré notamment par l’article 13 de la

Constitution aux termes duquel « nul ne peut être distrait, contre son gré, du juge que la loi lui assigne », et par le traitement
non-discriminatoire des parties, assuré par le caractère contradictoire de la procédure.

83
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

droits politiques

Les compétences des cours et tribunaux et du pouvoir judiciaire, par opposition aux autres types de
juridictions, sont, en premier lieu, définies par les articles 144 et 145 de la Constitution et par référence
aux notions de de droits civils et de droits politiques.

Selon l’article 144 de la Constitution,

« §1Les contestations qui ont pour objet des droits civils sont exclusivement du ressort des
tribunaux. §2Toutefois, la loi peut, selon les modalités qu’elle détermine, habiliter le Conseil d’État ou
les juridictions administratives fédérales à statuer sur les effets civils de leursdécisions ».

Ce deuxième alinéa a été inséré par une révision constitutionnelle datant de 2014.

L’article 145 précise que « Les contestations qui ont pour objet des droits politiques sont du ressort des
tribunaux, sauf les exceptions établies par la loi ».
Jusqu’à la révision de l’article 144 de la Constitution opérée au début 2014, afin d’apprécier si les
juridictions judiciaires sont compétentes, il fallait donc déterminer si lelitige mettait en cause un droit
subjectif, c’est-à-dire un intérêt juridiquement protégé par la loi par l’ouverture de recours
juridictionnels.

o Ce que font ces deux dispositions c’est réserver aux cours et tribunaux de l’ordre judiciaire en
Belgique par principe des contestations qui portent sur des droits subjectifs. Lorsqu’un litige
nait entre les partis quant à la portée à reconnaitre un droit subjectif (droit reconnu par le droit
objectif, un particulier qui lui permet de se prévaloir en justice d’une chose ou d’une autre)
lorsqu’un contentieux porte sur des droits subjectifs, il relève en règle de la compétence du
pouvoir judiciaire ; Quelle juridictions ? ça dépend de l’objet du litige puisqu’on a vu qu’il
existait des juridiction spécialisées au sein du pouvoir judiciaire, par matière (ça dépend aussi
de savoir si on est en première instance, en cour d’appel ou éventuellement en cassation).
Toutes les contestations qui portent sur un droit subjectif, relève en principe de la compétence
du pouvoir judiciaire.
Si tel était le cas, il fallait examiner quelle était la nature du droit en cause :

Si c’était un droit civil qui était en jeu (on parle alors du contentieux subjectif civil), les juridictions
judiciaires étaient seules compétentes, à l’exclusion de toute autre juridiction

o Droits civils = exclusivement du ressort des tribunaux, du pouvoir judiciaire, sauf ce que prévoit
le deuxième alinéa.

Si la contestation portait sur un droit politique, les juridictions judiciaires étaient également
compétentes, sous réserve de la possibilité reconnue au législateur de déférerla connaissance d’une
telle contestation à des juridictions extrajudiciaires.

o Ressort du pouvoir judiciaire par principe, mais le législateur peut prévoir des exceptions à
cette compétence de principe du pouvoir judiciaire.

Droits civils = compétence exclusive des cours et tribunaux (sauf depuis 2014, indemnités
réparatrices)

Droit historiquement établi par le droit privé, par le code civil et les lois qui peuvent être rattachés au
code civil (droit de propriété, droit réels, droit liés au contrat) compétence exclusive des tribunaux

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

du pouvoir judiciaire ; Ca signifie que si on a un litige contractuel, même qui porte sur l’exécution d’un
contrat, même avec l’état, ou si on a un litige qui concerne la responsabilité civile extracontractuelle,
tous ces litiges-là relèvent exclusivement de la compétence constitutionnelle du pouvoir judiciaire,
même lorsque le litige oppose un particulier à l’état. Cela ça distingue la Belgique comme la France dans
lequel le contentieux de la responsabilité d’un pouvoir public relève de la compétence des juridictions
administratives. Ici

Il est particulièrement difficile de cerner la notion de droit civil. On peut affirmer qu’il s’agit de droits
reconnus à tout individu, belge ou étranger, et qui tendent à assurer son bien propre et privé. Sont ainsi
des droits civils, le droit de propriété, le droit d’exercer une activité professionnelle, ainsi que la plupart
des libertés garanties par la Constitution. Les litiges mettant en jeu la responsabilité de la puissance
publique sont, par exemple, des litiges qui portent sur des droits civils. Ils relèvent donc de la
compétence des cours et tribunaux, sans préjudice de ce qui est indiqué ci-dessous à propos de
l’indemnité réparatrice.

Droit civil = Droit historiquement établi par le droit privé, par le code civil et les lois qui peuvent être
rattachés au code civil (droit de propriété, droit réels, droit liés au contrat) compétence exclusive des
tribunaux du pouvoir judiciaire ; Ca signifie que si on a un litige contractuel, même qui porte sur l’exécution
d’un contrat, même avec l’état, ou si on a un litige qui concerne la responsabilité civile extracontractuelle,
tous ces litiges-là relèvent exclusivement de la compétence constitutionnelle du pouvoir judiciaire, même
lorsque le litige oppose un particulier à l’état. Cela ça distingue la Belgique comme la France dans lequel le
contentieux de la responsabilité d’un pouvoir public relève de la compétence des juridictions
administratives. Ici en Belgique, d’une part depuis un arrêt célèbre le contentieux de la responsabilité des
pouvoirs publics est soumis au droit commun de la responsabilité extracontractuelle, et il relève de la
compétence exclusive des juridictions de l’ordre judiciaire.

NB : On peut introduire un recours en annulation devant le conseil d’état contre un acte administratif. Dans
certains cas, on s’est posé la question de savoir si le fait de demander l’annulation d’un acte administratif
devant le conseil d’état n’était pas pour un individu une manière déguisée de soumettre au conseil d’état
un litige portant en réalité sur un droit subjectif. Exemple ; imaginez que la législation applicable vous
donne le droit à obtenir une subvention si certaines conditions sont réunies ; imaginez que vous êtes
étudiant et la législation (un décret de la communauté Francaise) vous donne le droit d’obtenir une
allocation pour vous aider à faire vos études si vos revenus sont inférieurs à x milliers d’euros par ans et
que vous n’êtes plus domiciliés chez vos parents. La communauté Francaise adopte ce dispositif et ne laisse
pas le choix aux fonctionnaires de donner ou non cette allocation, elle dit que le gouvernement de la C.F,
octroie une allocation étudie aux étudiants qui remplissent les conditions. Si vous êtes dans les conditions,
vous avez droit à obtenir cette allocation. Imagine que vous en faites la demande et que le gouvernement
vous la refuse (acte administratif) vous allez devant le conseil d’état pour demander l’annulation de cet
acte qui serait contraire au décret . Dans un tel cas de figure, le conseil d’état risque de se déclarer
incompétent, car il pourra dire qu’en réalité ce qu’on essaie d’obtenir, c’est de faire valoir notre droit à cette
allocation (sous couvert de l’annulation d’un acte administratif). Or, quand on veut faire valoir un droit
subjectif contre l’administration, en réalité c’est un contentieux qui relève de la compétence exclusive de
principe des cours et tribunaux de l’ordre judiciaire. Théorie de l’objet véritable du recours, qui fait que
parfois des recours en annulation contre un acte administratif devant le conseil d’état peuvent être jugés
irrecevables car en réalité la personne a cherché à faire valoir un droit subjectif, qui relève de la compétence
de l’ordre judiciaire.

Droits politiques = compétence de principes au pouvoir judiciaire

Les droits politiques, quant à eux, sont ceux qui permettent aux citoyens de participer à l’exercice de la

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

puissance publique ou de réclamer le bénéfice de certains services que celle-ci fournit. On citera, à titre
d’exemples, le droit d’élire ou d’être élu, le droit d’accéder à un emploi public et le droit de bénéficier
des allocations de chômage.

Depuis l’ajout, en 2014, d’un alinéa 2 à l’article 144 de la Constitution, il faut raisonner comme suit :

En principe, le contentieux subjectif civil demeure de la compétence exclusive des juridictions


judiciaires (par exemple en droit familial, en droit commercial, en droit des biens, etc.).
Toutefois, la loi peut confier les suites civiles d’un arrêt du Conseil d’État ou d’une autre juridiction
administrative fédérale à ces juridictions (qui ne relèvent, donc, pas de l’ordre judiciaire). C’est ce
que le législateur a fait en ce qui concerne les arrêts d’annulation du Conseil d’État, qui peut lui-
même allouer une indemnité réparatrice à charge de l’autorité qui a commis, par hypothèse,
l’illégalité, à la condition que celle-ci soit à l’origine du préjudice invoqué. La loi permet cependant
aux intéressés, comme auparavant, de demander une indemnisation devant les juridictions
judiciaires. Mais, dès le moment où un recours en indemnité a été introduit (soit devant le Conseil
d’État, soit devant les tribunaux judiciaires), il n’est plus possible, par exemple en cas d’échec, de
recourir à l’autre voie (voy. L’article 11bis des lois sur le Conseil d’État, coordonnéesle 12 janvier
1973).

Cet alinéa a été introduit car dans la situation originelle, cela voulait dire que si un individu, un particulier
contestait la légalité d’un acte administratif devant le conseil d’état avec succès et obtenait l’annulation de
cet acte administratif, s’il avait subi un dommage du fait de l’acte administratif irrégulier annulé par le
conseil d‘état pour obtenir réparation de son dommage, il devait ensuite ou en parallèle introduire une
action devant les juridiction de l’ordre judiciaire.

Exemple :imaginez que vous posiez votre candidature à un emploi dans la fonction publique, vous n’êtes
pas nommés, on nomme quelqu’un d’autre, mais vous n’êtes pas d’accord avec la décision, vous considérer
que l’autorité à mal motivé son refus, vous allez au conseil d’état et vous attaquez la décision de nomination
de votre concurrent à l’emploi auquel vous avez posé votre candidature, vous obtenez gain de cause 2-3
ans après, le conseil d’état annule la décision de nomination de votre concurrent, mais vous entre temps
vous n’avez pas eu de boulot durant deux trois années, vous avez subi un dommage du fait de la décision
illégale de l’autorité qui a été annulé par le conseil d’état. Avant en 2014, vous deviez nécessairement aller
devant les tribunaux d’ordre judiciaire et devant un tribunal de première instance plus en particulier pour
obtenir éventuellement réparation du dommage subi par l’état. Parce que la responsabilité extra
contractuelle de l’état, elle est soumise au droit commun de la responsabilité, c’est-à-dire au code civil en
Belgique, depuis un arrêt (calandrai des années 20 ??), d’une part, et d’autre part l’article 144 prévoit que
tous les contentieux qui ont pour objet du droit civil (notamment les contentieux de la responsabilité), c’est
exclusivement du ressort des tribunaux. Vous devez introduire deux procédures (1) une en annulation
devant le conseil d’état, et (2) une en réparation de votre dommage devant le tribunal de première instance.

En 2014 on a dit bon ce n’est quand même pas idéal comme situation de devoir entamer deux procédures,
et donc on a modifié la constitution pour permettre au conseil d’état, au législateur de donner au conseil
d’état la compétence d’octroyer une indemnité pour réparer le dommage subit par un particulier, qui a
obtenu l’annulation d’un acte administratif au conseil d’état, ce qu’on appelle l’indemnité réparatrice. Pour
le reste, tous les contentieux qui ont trait au droit civil restent du ressort des cours et tribunaux de l’ordre
judiciaire.

Autre conséquence : tout le contentieux contractuel même de l’exécution des contrats (même passés avec
l’administration) c’est une compétence qui relève du pouvoir judiciaire, donc si vous n’êtes pas d’accord
quant à la matière dont l’état (votre co-contractant) exécute ses obligations contractuelles, ce n’est pas le

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

conseil d’état ou une autre juridiction administrative qui doit être saisie, c’est un contentieux qui va devant
le pouvoir judicaire. Tous les contentieux entre particuliers relèvent de la compétence du pouvoir judiciaire.

S’agissant du contentieux des droits politiques, rien n’a été modifié par rapport à ce qui est exposé
ci-avant.

En ce qui concerne les droits politiques (un droit par lequel le citoyen participe à l’exercice de la
puissance public, ou bénéficie de certains services qui sont fournis par le pouvoir public = droit de vote,
droit d’être élu, d’élire, d’accéder à un emploi public, droit à la sécurité sociale, droit qui relèvent de la
participation à l’exercice à la puissance public ou qui permettent d’obtenir les bénéfices de certains
services publics) les contentieux liés à ces droits politiques sont par principe soumis aux cours et
tribunaux de l’ordre judiciaire, mais la loi peut prévoir des exceptions. La loi peut créer des juridictions
administratives qui vont venir se prononcer sur les contentieux liés au droit politique.

Juridiction créer par le législateur pour connaitre des contestations liées au droit politique en Belgique,
qui ne sont donc pas soumises au droit judicaire : conseil du contentieux des étrangers pour les litiges
liés au droit d’asile. Compétence de principe = juridiction de l’ordre judiciaire, par exemple les tribunaux
du travail connaissent des litiges en sécurité sociale, mais avec possibilité pour le législateur de
soustraire certains contentieux au pouvoir judiciaire.

SECTION 2 : LE CONSEIL D’ÉTAT

Conseil d’état = il connait des contentieux objectifs, c’est à dire des procès qui sont faits à des actes
administratifs mais qui n’ont pas trait à des contestations qui portent sur des droits subjectifs.

§ 1er. L’institution

Le Conseil d’État a été créé par la loi du 23 décembre 1946, mais son existence n’a été consacrée par la
Constitution qu’en 1993, à l’article 160. (Article p osté rie ur à 1980 et don c ma tiè re rése rvée
a u législa te ur fé dé ra l p a r la constitution et pa s à n’imp orte que lé gisla te ur)

Le Conseil d’État est composé de quarante-quatre membres nommés à vie, à savoir un premier
président, un président, quatorze présidents de chambre et vingt-huit conseillers d'État. Les garanties
d’indépendance et d’impartialité applicables aux magistrats de l’ordre judiciaire ont été étendues aux
membres du Conseil d’État. Les conseillers d’État sont nommés par le Roi sur deux listes comprenant
chacune trois candidats et présentées, l’une par le Conseil d’État, l’autre alternativement par la
Chambre des représentants et par le Sénat. Laparité linguistique entre magistrats francophones et
magistrats néerlandophones doit être respectée (voy. Les lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12
janvier 1973).

= 44 conseillers d’état sont nommés sur présentation du conseil d’état . Une liste présentée par le conseil
d’état, et une liste présentée par la chambre des représentants ou le Sénat.

Le Conseil d’État exerce deux missions :

D’une part, il procure aux différents législateurs et exécutifs l’assistance juridique nécessaire dans
l’élaboration des textes normatifs, et,

D’autre part, il assure la protection juridictionnelle de l’administré contre les excès de pouvoir de
l’administration, c’est-à-dire contre les illégalités, que contiendraient les actes administratifs. Cette
double mission se reflète dans son organisation fondée sur l’existence de deux sections : la section

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

de législation et la section du contentieux administratif.

Les membres du Conseil d'État siègent à l'assemblée générale du Conseil d'État et dans une des
chambres de la section du contentieux administratif ou de la section de législation. Il existe des
chambres francophones et des chambres néerlandophones. Chaque chambre est assistée par un ou
plusieurs greffiers, qui sont placés sous la direction du greffier en chef. Les chambres du conseil d’état
rendent des arrêts, la section législation rends des avis !

L’auditorat

Le Conseil d’État comprend également un auditorat. L'auditorat est composé d'un auditeur général,
d'un auditeur général adjoint, de quatorze premiers auditeurs chef de section et de soixante-quatre
premiers auditeurs, auditeurs ou auditeurs adjoints. La carrière de magistrat à l'auditorat commence
par une nomination en qu'auditeur adjointà la suite d’un examen comparatif.
À la section du contentieux administratif, les membres de l'auditorat sont chargés de
l'instruction des affaires. Ils rédigent un rapport sur l'affaire et donnent leur avis en séance
publique à la fin des débats. En outre, ils veillent à l'accomplissement des mesures préalables.
Il prépare et il instruit les dossiers, ensuite il donne un avis sur la manière dont selon lui un
recours en annulation devrait être tranché par le conseil d’état. Cet avis est communiqué aux
partis dans l’affaire et les partis sont invités à réagir.
À la section de législation, les membres de l'auditorat rédigent un rapport relatif aux textes
soumis à l'avis du Conseil d'État. Ils participent aux débats avec voix consultative.

Le Conseil d'État comprend également un bureau de coordination, un greffe et des services


administratifs.

§ 2. La section de législation

= rends des avis sur des avants projets de lois, certaines propositions de lois, projets d’arrêtés
règlementaires (Art. 2 et 3 des lois cordonnées sur le conseil d’état) avis non contraignants qui
portent sur le respect des formes des procédures, conformité des textes par rapport aux normes de rang
supérieur. (Exception pour les règles répartitrices des compétences et le renvoi au comité de
concertation)

Comme on l’a vu plus haut, les ministres du Gouvernement fédéral, de même que les membres des
gouvernements communautaires et régionaux, sont tenus, chacun pour ce qui le concerne, de soumettre
à l’avis motivé de la section de législation, le texte de tous avant-projets de loi, de décret, d’ordonnance
ou de projets d’arrêtés réglementaires(article 3 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier
1973). Ces différentes autorités sont cependant dispensées de solliciter l’avis de la section de législation
dans deux cas : pour les actes qui n’ont aucun contenu normatif, à savoir, s’agissant desprojets d’actes
législatifs, les projets relatifs aux budgets, aux comptes, aux emprunts, aux opérations domaniales et
au contingent de l’armée ; et d’autre part, lorsqu’ellespeuvent invoquer l’urgence, pour autant qu’elle
soit spécialement motivée. Cependant, même dans un tel cas, s’agissant des projets d’actes législatifs, la
section de législation doit être interrogée sur la question de savoir si la norme respecte bien les règles
de répartition de compétences entre l’autorité centrale, les régions et les communautés et, pour les
projets de lois, si les compétences respectives de la Chambre des représentants et du Sénat ont été
respectées.

Les présidents d’assemblée disposent, quant à eux, d’une faculté de saisir la section de législation d’une
proposition de norme législative ; ils y sont tenus lorsqu’un tiers des membres de l’assemblée ou la

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

majorité des membres d’un groupe linguistique le demande (article 2 des lois sur le Conseil d’État,
coordonnées le 12 janvier 1973).

La section de législation du Conseil d’État, lorsqu’elle est saisie pour avis, ne s’immisce pas dans les choix
d’opportunité opérés dans un projet ou dans une proposition, mais elle vérifie uniquement si la
formulation de ce projet ou de cette proposition est correcte du point de vue juridique et si le projet ou
la proposition se concilie avec les normes supérieures dans la hiérarchie des normes. Ainsi, la section
de législation vérifie-t-elle si un projet législatif est conforme à la Constitution, ou si un projet
réglementaire trouve bien un fondement juridique dans la loi, etc. La section de législation du Conseil
d’État examine également la qualité logistique du texte qui lui est soumis, ainsi que, pour les textes
établis à Bruxelles et au niveau fédéral, la concordance entre les versions néerlandaise et française du
projet examiné.
L’avis de la section de législation du Conseil d’État n’est pas un avis contraignant, sous réserve de ce qui
a été précédemment exposé en rapport avec les éventuels excès de compétence affectant un projet de
norme législative. Quand le demandeur d’avis estime qu’il n’est pas possible de se conformer à une
observation précise formulée par la section de législation, il peut passer outre. Il est toutefois
recommandé d’expliquer les raisons de cette décision, par exemple dans l’exposé des motifs, dans le cas
d’un projet législatif. Il importe en outre de garder présent à l’esprit qu’une juridiction, comme par
exemple la Cour constitutionnelle, devant laquelle la norme législative concernée serait attaquée
ultérieurement, prend souvent l’avis de la section de législation en considération.

§ 3. La section du contentieux administratif

Elle connait de plusieurs types de contentieux :

I. Le contentieux de l’annulation – Art. 14 des lois cordonnées sur le conseil d’état

a. Présentation

La section du contentieux administratif du Conseil d’État (anciennement appelée la section


d’administration) est investie de diverses missions juridictionnelles dont la plus importante réside dans
le contentieux de l’annulation. Au contentieux de l’annulation, la section du contentieux administratif
statue par voie d’arrêts sur les recours en annulation pour violation des formes soit substantielles, soit
prescrites à peine de nullité, excès ou détournement de pouvoir, formés contre les actes et règlements
des diverses autorités administratives ainsi que contre certains actes administratifs32 des assemblées
législatives ou de leurs organes, de la Cour des comptes, de la Cour constitutionnelle, du Pouvoir
judiciaire et du Conseil supérieur de la Justice (article 14 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le
12 janvier 1973).

Le recours en annulation ouvre ainsi un contentieux objectif : c’est un procès fait à un acte émanant
d’une autorité administrative en vue de le faire disparaître, en principe de manière rétroactive, de
l’ordonnancement juridique. Le recours en annulation peut être introduit par toute personne privée ou
publique justifiant d’un intérêt à l’annulation de l’acte, dans un délai de 60 jours, à dater, selon les cas,
de la publication, de la notification ou de la prise de connaissance de l’acte incriminé.

Le recours en annulation au Conseil d’État est donc un recours visant les actes administratifs adoptés

32Les actes administratifs ici visés sont ceux relatifs aux marchés publics et aux membres du personnel des institutions
concernées.

89
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

(pour l’essentiel) par des autorités administratives. L’acte administratif attaquable devant le Conseil
d’État peut être défini comme un acte juridique, fruit du pouvoir de décision unilatérale d’une
autorité administrative, par lequel cette autorité arrête une décision, à portée individuelle ou
réglementaire, qui soit affecté l’ordonnancement juridique, soit le modifie en créant ou modifiant un
droit ou une obligation, et qui est obligatoire, en ce sens que son contenu s’impose aux destinataires de
l’acte sans que leur consentement soit requis.
Contentieux d’annulation, ces contours sont définis par l’article 14. Les conditions pour introduire un
recours en annulation, il faut décomposer chaque élément (conditions cumulatives)
(1) Recours doit être porté contre un acte ou un règlement (acte administratif). Acte
administratif = acte adoptée par l’autorité administrative et qui a pour conséquences de modifier
ou d’affecter la situation juridique. Par exemple, un acte adopté par une autorité administrative
qui a pour conséquence de conférer des droits ou d’imposer des obligations à un situation
demande d’un permis d’urbanisme, si on nous l’accorde notre situation juridique est modifiée, et si
on nous la refuse notre situation juridique est affectée. Opposition à un acte purement matériel
posé par l’administration (si l’administration nous demande simplement des informations, ce n’est
pas un acte administratif, car ça ne modifie pas notre situation juridique, sauf si c’est une décision
qui nous oblige à donner des informations). Il y a toute une série d’acte administratifs posés par
l’administration qui ne modifie pas l’ordre juridique, et donc qui ne sont pas attaquables devant le
conseil d’état.
(2) Les actes administratifs doivent être adoptés soit par une autorité administrative soit par des
assemblées législatives ou leurs organes (pour certaines matières particulières)
(3) Arguments spécifiques à faire valoir pour obtenir l’annulation d’un acte administratifs

b. La notion d’autorité administrative

Dans son acception usuelle, l’expression « autorité administrative » est, pour sa part, synonyme
d’administration. Employée au sens de l’article 14 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12
janvier 1973, la notion d’autorité d’administrative ne manque pas d’alimenter le débat juridique depuis
des décennies. Elle a donné lieu à une jurisprudence fournie non seulement du Conseil d’État, mais aussi
de la Cour de cassation, qui est le juge du règlement des conflits d’attribution, conformément à l’article
158 de la Constitution. Statuant au contentieux de l’égalité, la Cour constitutionnelle a également eu à se
prononcer à plusieurs reprises sur la portée de la notion d’autorité administrative au sens de l’article
14 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973.

La Cour de cassation a interprété la notion d’autorité administrative découlant de l’article 14.

En l’état actuel du droit, la question est régie par ce qu’il est convenu d’appeler la jurisprudence
Gimvindus de la Cour de cassation, inaugurée par un arrêt de la Cour du14 février 1997. Par cet arrêt,
la Cour a jugé : (notion définie par la Cour de cassation du fait du rôle qu’elle joue pour trancher les
conflits d’attribution)

Personnes morales de droit public

L’état, les communautés, les régions, les communes, les provinces (collectivités territoriales belges
créées en vertu de la constitution). + les personnes juridiques, entités créées par les collectivités
territoriales pour prendre en charge un service public dans un régime qualifié de droit public (région
de Bruxelles capitale a créé la STIB, personne de droit public créée par le législateur bruxellois, elle a
été créé par une ordonnance, l’ordonnance définit son statut et des règles de droit public s’applique à

90
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

elle), L’ONSS, l’INASTI au niveau fédéral toutes ces collectivités territoriales ou les personnes morales
de droit public créées par ces collectivités, sont par natures des autorités administratives, au sens de
l’article 14 des lois coordonnées sur le conseil d’état. Les actes administratifs qui s’imposent à leur
destinataire et qui modifie leur situation juridique, ces actes peuvent faire l’objet d’un recours en
annulation devant le conseil d’état. Car ce sont (1) des actes administratifs, et (2) adoptés par des
autorités administratives.

« Que les institutions créées ou agréées par les pouvoirs publics fédéraux, les pouvoirs publics des
communautés et régions, des provinces ou des communes, qui sont chargées d’un service public et ne
font pas partie du pouvoir judiciaire ou législatif, constituent enprincipe des autorités administratives,
dans la mesure où leur fonctionnement est déterminé et contrôlé par les pouvoirs publics et qu’elles
peuvent prendre des décisions obligatoires à l’égard de tiers ; Qu’une société anonyme, fût-elle créée
par une autorité administrative et soumise à un contrôle important de la part des pouvoirs publics, qui
nepeut prendre des décisions obligatoires à l’égard de tiers, ne perd pas son caractère de droit privé ;
que le fait qu’une mission d’intérêt général lui est confiée est, à cet égard, dénué de pertinence ».
Cette jurisprudence a depuis lors été confirmée à plusieurs reprises par la Cour de cassation. On relèvera
notamment que par un arrêt du 6 septembre 2002, la Cour a spécialement envisagé le cas d’entités
créées par les particuliers et ensuite reconnuespar les pouvoirs publics. Par ce même arrêt, elle a aussi
explicité la notion de pouvoir de décision unilatérale33 :

Personne morale de droit privé

o Question un peu plus complexe. Imaginez qu’une commune décide de constituer une asbl pour
gérer un club sportif. Et elle créée cette asbl en utilisant une technique de droit privé classique
= loi sur les asbl qui peut être utilisé par n’importe quel citoyen. C’est la commune qui va
financer les activités de l’asbl, et en contrôler le fonctionnement.

o Imaginez l’état fédéral qui crée une société pour exercer une activité économique. Si l’état est
majoritaire dans cette société, c’est lui qui va désigner les membres de l’organe d’administration
de la société et il va financer la société de droit privé qu’il créée.

Toute une série de personnes formellement privées (asbl droit privés, SA de droit privés,
personnes qui répondent à un régime de droit privé, pas créer par la loi, une ordonnance ou un
décret) mais qui sont en réalité créées, contrôlés et financés par les pouvoirs publics car elles
relèvent de l’intérêt général ! les actes posés par toutes ces personnes de droit privés contrôlés
par les pouvoirs publics, sont-ils des autorités administratives au sens de l’article 14 ? OUI, si
elles peuvent prendre des mesures obligatoires unilatérales à l’égard de tiers !

« Que des institutions créées par des personnes privées mais agréées par les pouvoirs publics fédéraux,
les pouvoirs publics des communautés et des régions, des provinces ou des communes, constituent des
autorités administratives au sens de cet article 14 dansla mesure où leur fonctionnement est déterminé
et contrôlé par les pouvoirs publics et où elles peuvent prendre des mesures obligatoires à l’égard
des tiers, plus spécialement en déterminant de manière unilatérale leurs propres obligations à l’égard
des tiers ou en constatant unilatéralement les obligations des tiers ; Que les actes posés par ces
établissements peuvent faire l’objet d’une annulation lorsque ceux-ci exercent une partie de l’autorité
publique ».

Bien que cela ne découle pas expressément de la lettre de ces arrêts de la Cour de cassation, il semble
désormais admis que la définition qu’ils retiennent n’est d’application que lorsque l’entité à qualifier est

33 Cass., 6 septembre 2002, C.01.0382.N, avec les conclusions de l’av. gén. Bresseleers

91
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

une personne morale de droit privé. Une personne morale de droit public serait dès lors toujours une
autorité administrative pour autant bien entendu qu’elle exerce des compétences relevant du pouvoir
exécutif. Elle ne devrait pas répondre en outre aux critères de la définition de la jurisprudence
Gimvindus, et en particulier au critère relatif à la jouissance d’un pouvoir de décision unilatérale.

La notion de personne morale de droit public désigne, d’une part, les personnes publiques territoriales
(ou collectivités territoriales) comme l’État, les régions, les communautés, les commissions
communautaires, les provinces et les communes et, d’autre part, toute autre entité, dotée de la
personnalité juridique, créée (directement ouindirectement) par une personne publique territoriale,
chargée d’accomplir, sous le contrôle de celle-ci, une mission de service public et qui, pour ce faire, est
soumise à un régime juridique ressortissant principalement, voire exclusivement, au droit public.

Cas de l’ULB

Exemple : l’ULB – personne privée ou personne public ? Université LIBRE de Bruxelles = universités
privées. UCL, ULB, Namur, Saint-Louis, universités privées ! ULG = université publique.

Forte influence publique à l’ULB : ULB habilitée par la communauté française à délivrer des
enseignements et des diplômes (valeurs obligatoires). ULB financée en majorité par les pouvoirs publics,
ULB reçoit un financement de la part de la communauté française pour chaque élève. Activités de l’ULB
reconnue et organisée par les pouvoirs publics (système d’habilitation), au sein du conseil
d’administration de l’ULB, il y a un commissaire du gouvernement.

L’ULB n’est pas une autorité administrative par nature, puisque ce n’est pas une personne morale de
droit public. SI on se tourne vers les personnes morales de droit privé, l’ULB répond-elle aux conditions
définies par la Cour de cassation ? elle remplit toutes les conditions, car lorsque l’ULB délivre un
diplôme, ou refuse de délivrer un diplôme, elle agit comme une autorité administrative ! cette décision
est justiciable devant le conseil d’état. Si on veut contester la programmation de notre jury, on devrait
aller devant le contentieux administratif des droits subjectifs et non pas devant le conseil d’état pour
des droits objectifs, car dans ce cadre-là l’ULB n’agit pas comme une autorité administrative. L’ULB est
une autorité administrative uniquement lorsqu’elle adopte des décisions unilatérales. Vous pouvez
avoir des personnes qui n’ont pas été créé par les pouvoirs publics qui sont des autorités administratives
car elles sont agréées, en charge par les pouvoirs publics et que leurs décisions sont contrôlées par les
pouvoirs publics, et qu’en plus elles prennent des décisions unilatérales à l’égard des tiers.

c. Les motifs d’annulation

La compétence d’annulation du contentieux administratif du Conseil d’État lui permet,donc, d’annuler


les actes administratifs adoptés, le plus fréquemment, par des autorités administratives, pour violation
(1) des formes soit substantielles, soit prescrites à peine de nullité, ou (2) pour excès ou (3)
détournement de pouvoir.

1. Formes soit substantielles, soit prescrites à peine de nullités

= c’est le cas où l’autorité administrative a commis une inégalité parce qu’elle n’a pas respecté les
procédures ou les obligations formelles qui s’imposent à elles dans l’adoption d’un acte administratif.
(Par exemple, les actes administratifs qui doivent être motivés dans la forme). = substantielle

= le fait pour l’autorité de devoir entendre quelqu’un avant de prendre une décision punitive de sanction
à son égard (obligation d’audition, etc., obligations procédurales)

92
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Les formes prescrites à peine de nullité sont des formes pour lesquelles un texte prévoit
expressément que leur non-respect entraîne l’illégalité de l’acte. La nullité n’opère pas de manière
automatique ; il est requis que le juge la constate. Il s’agit par exemple de l’article 58 des lois sur
l’emploi des langues en matière administrative, coordonnées le 18 juillet 1966, qui prévoit la nullité
des actes contraires, quant au fond ou quant à la forme, aux dispositions de ces lois.

o Les formes sont dites prescrites à peine de nullité lorsque les textes qui les institue indique que le
non-respect de la forme ou de la procédure en question, se traduit par la nullité de l’acte
administratif adopté, sans respecter la forme ou la procédure en question

o Lois sur l’emploi des langues en matière administratives : il y a des cas dans lequel si vous êtes
francophones et que vous faites une demande auprès de l’état fédéral en français, l’état doit vous
répondre en français. Si l’état prend une décision qui vous concerne en néerlandais ou en français,
la décision est automatiquement nulle ! Car les lois sur l’emploi des langues mentionnent cette
nullité !

Parmi les formes substantielles, on distingue d’une part les formes qui touchent à l’ordre public,
en ce sens qu’elles concernent les fondements mêmes de organisation administrative (par exemple
la délibération en Conseil des ministres ou la consultation de la section de législation du Conseil
d’État) et, d’autre part, les formes qui sont prescrites dans l’intérêt de l’administré ou, du moins,
pas exclusivement dans l’intérêt de l’administration (comme les droits de la défense, la motivation
formelle ou la règle Audi altéra partem). Leur violation entache également la légalité de l’acte
administratif.

o Quand est-ce qu’une forme est substantielle ? les procédures sont dites substantielles
lorsqu’elle n’est pas prescrite dans le seul intéret de l’administration, ou bien lorsqu’elle touche
à l’ordre public.

o L’obligation d’audition d’un fonctionnaire contre qui on entends adopter une sanction si on ne
respecte pas cette procédure, est-ce que c’est une violation d’une forme substantielle ? Oui.
Pourquoi ? Car elle est prescrite dans l’intéret de l’administré, mais aussi car elle touche à l’ordre
public (valeur fondamentale de l’ordre juridique belge = droit à la défense). Ici on doit d’abord dire
qu’on est dans le cas d’une formalité punitive et donc nous sommes dans le champ du respect des
droits de la défense ! première élément de réponse !

o Si à l’examen on nous demande de discuter des conséquences de la validité de l’acte administratif


de tel ou tel forme… il faut voir si le non-respect de cette obligation est susceptible de mener à
l’annulation de l’acte administratif. Si c’est une forme, il faut voir si c’est une formalité
substantielle ou de nullité il faut bien comprendre les définitions

Formes secondaires : Par contraste avec les deux premiers types de formes, les formes dites
secondaires sont celles qui sont prévues dans le seul intérêt de l’administration et qui n’intéressent
pas l’ordre public. Il s’agit par exemple de la consultation du ministre du Budget ou de l’avis de
l’inspecteur des finances. Leur violation n’est pas sanctionnée par la nullité de l’acte mais
politiquement ou disciplinairement. (Implication budgétaires, le fait pour une décision
administrative de passer par l’administration des finances, ce n’est pas une formalité procédurale
qui est prescrite dans l’intéret de l’administré, c’est une forme qui est là pour protéger les intérêts
financiers de l’état, pas des citoyens en tant que tel, et ce n’est pas non plus une formalité qui touche
à l’ordre public donc ce n’est pas une formalité substantielle. Ce n’est pas non plus une forme
prescrite à nullité puisque les textes ne mentionnent pas cette nullité !

93
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

La théorie des formes est examinée de façon plus détaillée dans la partie du cours consacrée à l’action
administrative.

2. Excès de pouvoir

Le terme « excès de pouvoir » est, quant à lui, synonyme d’illégalité, c’est-à-dire, pour un acte
administratif, la violation d’une règle de droit, écrite ou non, posée par une norme située, dans la
hiérarchie des normes, à un degré supérieur à celui de l’acte envisagé.

o Exemple : un marché de public est attribué, et on imagine qu’une commune achète des
ordinateurs, elle a plusieurs offres, elle décide de ne pas retenir une offre car c’est une
entreprise française et qu’elle veut uniquement travailler avec des entreprises belges ici
l’acte est simplement illégal.

3. Détournement de pouvoir

Dans la conception restrictive qui prévaut en Belgique, la notion de « détournement de pouvoir » vise
l’illégalité consistant pour l’administration à exercer une de ses compétences dans l’intention exclusive,
ou du moins principale, soit de nuire à unepersonne, soit d’avantager illégitimement une personne (par
exemple décider d’exproprier la maison d’un adversaire politique dans le but de lui nuire). Dans un tel
cas de figure, l’administration ne poursuit aucun but d’intérêt général.

Toutefois, même en présence d’un détournement de pouvoir au sens strict, le Conseil d’État préfère, le
plus souvent, invoquer une autre cause d’annulation, à savoir principalement l’illégalité des motifs. Le
moyen pris d’un détournement de pouvoir reçoit ainsi, dans la jurisprudence du Conseil d’État, un
caractère subsidiaire par rapportaux autres moyens d’annulation. Ceci permet de réserver l’arme de la
sanction morale qui s’attache à une annulation pour détournement de pouvoir aux cas véritablement
extrêmes. Cela présente en outre l’avantage d’alléger la procédure en dispensant de saisir
l’assemblée générale de la section du contentieux administratif. Lorsqu’une chambre reconnaît qu’il y a
lieu à annulation du chef de détournement de pouvoir, le renvoi à l’assemblée générale est en effet de
droit (article 91 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973).

o On vise le cas où l’autorité administrative utilise ses pouvoirs dans un but qui est étranger à
l’intéret général. Un bourgmestre utilise son pouvoir de police pour ordonner la destruction de
la maison de son principal concurrent politique utilisation de pouvoir dans un but totalement
étranger à l’intéret général. Cas exceptionnels et très rares.

II. Les autres contentieux

Contentieux de la cassation administrative


= il existe contre les décisions rendues par les juridictions administratives en dernier ressort, la
possibilité d’introduire un recours en cassation devant le conseil d’état, qui vise à mettre à néant la
décision de la juridiction administrative dont la décision est contestée => dans ce cas-là l’affaire
revient devant la première juridiction administrative.
= exemple, décisions du conseil du contentieux des étrangers, elles peuvent faire l’objet d’un recours
en cassation devant le conseil d’état. On ne peut pas soulever de nouveaux arguments, on doit
toujours soulever les mêmes.

Le Conseil d’État s’est aussi vu confier d’autres contentieux que le contentieux de l’annulation,
notamment celui des recours en cassation formés contre les décisions contentieuses rendues en dernier

94
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

ressort par les juridictions administratives créées par le législateur. Ce recours peut, ici aussi, s’exercer
pour contravention à la loi ou violation des formes substantielles ou prescrites à peine de nullité (par
exemple les recours dirigés contre les décisions du Conseil du contentieux des étrangers) (article 14, §2,
des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973).

Pour qu’un recours en cassation soit ouvert devant le Conseil d’État, il faut donc que la décision ait été
adoptée par une juridiction administrative. Pour qu’une instance puisse être qualifiée de juridiction
administrative (et non d’organe de l’administration active),il faut que le législateur l’ait ainsi qualifiée
lors de sa création. À défaut de telle qualification expresse, le Conseil d’État prend en compte un
ensemble de critères dans l’exercice de qualification : il vérifie, plus particulièrement, si l’instance en
question est une autorité indépendante et impartiale, adoptant, sur la base du droit, des décisions
motivées et dotées de l’autorité de chose jugée, dans le respect d’une procédure publique et
contradictoire.

Dans son rôle de juge de cassation, le Conseil d’État ne réexamine pas les faits ayant été tranchés par le
juge administratif dont la décision est contestée devant lui. En outre, sauf si le moyen est d’ordre public,
seuls les arguments qui ont été soumis à la juridiction de fond peuvent être invoqués devant le Conseil
d’État en cassation. L’annulation d’une décision d’une juridiction administrative par le Conseil d’État au
contentieux de la cassation conduira le Conseil à renvoyer l’affaire devant la même juridiction, laquelle,
le cas échéant, statuera à nouveau, avec un siège différent de celui qui avait rendu ladécision annulée.
La décision rendue par le Conseil d’État lie le juge de renvoi (article 15 des lois sur le Conseil d’État,
coordonnées le 12 janvier 1973).
Contentieux des carences administratives

Outre son rôle de juge de cassation, le Conseil d’État est également compétent pour censurer les carences
de l’administration. En effet, lorsqu’une autorité administrativeest tenue de statuer et qu’à l’expiration
d’un délai de quatre mois prenant cours à la miseen demeure qui lui est notifiée par un intéressé, il n’est
pas intervenu de décision, le silence de l’autorité est réputé constituer une décision de rejet susceptible
d’un recours en annulation, dans les conditions exposées à la section précédente (article 14, §3, des lois
sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973).

= mettre en demeure l’administration de statuer, et 4 mois après, si l’administration n’a pas statué, les
lois cordonnées sur le conseil d’état considère qu’une décision de refus a été adopté par l’administration,
et cette décision de refus peut être contestée devant le conseil d’état.

Recours en suspension devant le conseil d’état

o Imaginez que votre voisin obtienne un permis d’urbanisme pour construire un imposant
building, avant 1991 on pouvait introduire un recours en annulation et on aurait la décision du
conseil d’état 2-3 ans plus tard. Dans l’intervalle, le permis d’urbanisme restait valable et le
voisin pouvait construire son building ! et donc même si on obtient gain de cause, c’était trop
tard…. Depuis 1991, on peut introduire une demande en suspension, lorsque les moyens sont
sérieux, et qu’il y a urgence, le conseil d’état peut suspendre l’exécution de l’acte administratif !
jusqu’au moment où la décision est prise en annulation. Si le recours en annulation aboutit,
l’acte est annulé (avec effet rétroactif, disparition de l’ordre juridique), et si pas, la suspension
prendra fin.
Depuis 1991, le Conseil d’État s’est vu reconnaître la compétence exclusive d’ordonnerla suspension
de l’exécution d’un acte administratif susceptible d’être annulé. La demande en suspension doit se
fonder sur des moyens sérieux susceptibles de fonder l’annulation de l’acte ou du règlement querellé et
le requérant doit prouver qu’il y a urgence (article 17 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12

95
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

janvier 1973).

Recours pour les demandes d’indemnités

La section du contentieux administratif du Conseil d’État est également compétentepour se prononcer


en équité par voie d’arrêt, et compte tenu de toutes les circonstances d’intérêt public et privé, sur les
demandes d’indemnité relatives à la réparation d’un dommage exceptionnel causé par une autorité
administrative (article 11 des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973). C’est le
contentieux de l’indemnité. Cette compétence ne s’exerce que dans le cas où il n’existe pas d’autre
juridiction compétente et pour autant que la personne intéressée puisse établir la nature exceptionnelle
du dommage dont elle postule l’indemnisation. Seul un nombre très limité de citoyens - et le plus
souvent un seul - doit être visé par la mesure incriminée pour que le Conseil d’État ait vocation à fixer
une indemnité.

Dommage exceptionnel

= décision légale mais dommage exceptionnel (par exemple, si on oblige la vaccination et que
quelques personnes ont des effets secondaires graves).

Outre ce contentieux très particulier de l’indemnité pour dommage exceptionnel, il est possible depuis
2014, pour ceux qui ont obtenu l’annulation d’un acte administratif, de demander une indemnité
réparatrice devant le Conseil d’État en raison de l’illégalité constatée par cette annulation (article 11bis
des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le12 janvier 1973).

Enfin, le Conseil d’État dispose d’autres compétences encore, dans le détail desquels il n’est pas
nécessaire d’entrer dans le cadre du présent enseignement (pouvoir d’injonction, correction d’une
irrégularité de forme en cours de procès, contentieux des élections communales, autres contentieux
particuliers, etc.)

COURS 15

SECTION 3 : LA COUR CONSTITUTIONNELLE

§ 1er. Présentation

= 12 juges. Institution liée à la transformation de la Belgique d’un état unitaire à un état fédéral.

On a vu plus haut que les États fédéraux prévoient généralement l’existence d’une juridiction
constitutionnelle34. Celle-ci est soit insérée parmi les juridictions de droit commun35, soit créée
spécialement, ce qui permet d’avoir des juges spécialisés dans le contrôle de constitutionnalité des lois.
Les dernières décennies ont plutôt vu la création de juridictions constitutionnelles spéciales. Tel fut le
cas en Belgique par l’adoption, en 1980, de l’article 142 actuel de la Constitution, qui a créé la Cour
d’arbitrage, devenue en2007 la Cour constitutionnelle, et a déterminé ses compétences ainsi que les

34 Il est remarquable de constater que, dès 1803, la Cour suprême des États-Unis, la plus haute juridiction de ce nouvel État
fédéral à l’époque, s’est autorisée à contrôler la conformité des lois à la Constitution(arrêt Marbury v/ Madison). Ce contrôle
s’exerce dans le cadre de ses compétences normales d’une manière incidente : la Cour n’annule pas les lois mais elle peut les
déclarer inapplicables au litige
35 Comme aux États-Unis, voy. la note précédente.

96
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

éléments fondamentaux de la saisine de cette Cour.

Les compétences de la Cour constitutionnelle étaient à l’origine assez limitées mais elles ont été
étendues depuis, sans qu’elles s’étendent toutefois au contrôle du respect de l’ensemble de la
Constitution. D’un point de vue chronologique, le contrôle de la Cour a d’abord été limité à la répartition
des compétences entre les différents législateurs de la Belgique fédérale. Dès 1989, il a été étendu au
respect des principes d’égalité et de non- discrimination, notamment dans le domaine de l’enseignement
(articles 10, 11 et 24 de la Constitution). Depuis 2003, il porte sur l’ensemble des dispositions
constitutionnelles relatives aux droits fondamentaux (titre II de la Constitution) et sur les articles 170,
172 et 191 de la Constitution. Depuis 2014, s’est ajouté à ces dispositions (ou normes de référence ou
de contrôle) le contrôle du respect de la loyauté fédérale (article 143, § 1er, de la Constitution). + gardien
des compétences

En tant qu’il est lié au fédéralisme, le phénomène de la création et du développement de juridictions


constitutionnelles s’explique essentiellement des deux manières suivantes :

La répartition des compétences entre l’État fédéral et les entités fédérées et entre ces dernières, tant
sur le plan territorial que sur le plan matériel, aboutit nécessairement à des conflits de compétence,
qu’il faut régler

En outre, l’éparpillement des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire entre les diverses entités a
pour effet que s’instaurent nécessairement des interprétations divergentes dela Constitution, qu’il
convient d’unifier.

Au-delà du contexte des États fédéraux, l’instauration du contrôle juridictionnel des lois peut aussi
s’expliquer par d’autres motifs, comme la méfiance croissante à l’égard de l’abus de majorité des
législateurs, la nécessité de préserver l’État de droit, etc.

En Belgique, la Cour constitutionnelle est donc née pour accompagner la transformation de la Belgique
en État fédéral. Elle s’est néanmoins, au fil du temps, imposée en tant que juridiction constitutionnelle à
part entière, ses missions étant élargies à la protection des droits fondamentaux des citoyens face aux
différents pouvoirs législatifs présents en Belgique.

Lecture combinée des dispositions qui protègent les droits et libertés pour élargir les normes de
contrôle et de référence considérant que pour un législateur de limiter de manière excessive les droits
et libertés d’une catégorie en Belgique, revenait à les discriminer par rapport à d’autres catégories de
belges qui eux ne voyait pas leur droits limités de la même manière = en utilisant les articles 10 et 11 de
la constitution, le principe d’égalité et de non-discrimination qui faisait partie de ces normes de
références , la cour d’arbitrage a inclue en pratique l’ensemble des droits et libertés consacrés par le
droit international ou le droit constitutionnel belge au rang de ces normes de contrôles la cour
d’arbitrage (maintenant constitutionnelle) s’est dirigée en véritable gardienne des droits et libertés

§ 2. La composition et le fonctionnement de la Cour constitutionnelle

La Cour constitutionnelle belge est composée de douze juges, parmi lesquels deux présidents ; elle est
assistée de vingt-quatre référendaires au maximum, de deux greffiers et d’un personnel administratif,
selon une stricte parité linguistique.

Quant aux juges, nommés à vie par le Roi sur une liste double présentée par le Sénat, les deux parités
suivantes sont prévues :

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Une parité linguistique : six juges forment le groupe linguistique français et six juges constituent le
groupe linguistique néerlandais. Ils élisent chacun en leur sein un président

Une parité quant à l’expérience : dans chaque groupe linguistique, il y a trois juges ayant eu une
carrière de cinq ans au moins de haut magistrat à la Cour de cassation ou au Conseil d’État, de
référendaire à la Cour constitutionnelle ou de professeur de droit dans une université belge, et trois
juges ayant été parlementaire pendant au moins cinq ans. ( disposition de la cour constitutionnelles
sont vagues, pouvoir politique, le constituant a estimé qu’il y avait du sens d’avoir des personnes
ayant une sensibilité par rapport au monde politique qui siègent au sein de la cour, mais d’autres
estiment que c’est paradoxal puisqu’ils n’ont pas une expérience ni une qualification de juriste alors
que c’est une des plus hautes juridictions des pays. Vu que le rôle de la Cour a des conséquences
sociétales importantes et que ce n’est pas un travail mécanique d’interprétation du droit, c’est mieux
d’avoir des expertises différentes au sein de la Cour ? le débat est ouvert !) Les juges sont nommés
par le Roi sur proposition du parlement.

§ 3. Les compétences de la Cour constitutionnelle

I. Introduction
L’article 142, alinéa 1er, 1° et 2°, de la Constitution, qui énonce la première catégorie de compétences
de la Cour constitutionnelle, doit être lu en combinaison avec les articles 1er et 26 de la loi spéciale
du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle. Le 3° de l’article 142 de la Constitution attribue à la
Cour le contrôle potentiel de tout articlede la Constitution. Cette extension de compétence n’est pas
subordonnée à une révision constitutionnelle, mais à l’adoption d’une loi à la majorité spéciale.

Les compétences de la Cour constitutionnelle sont actuellement les suivantes :

Le contrôle du respect, par les législateurs nationaux, régionaux et communautaires, de leurs


compétences respectives et de la loyauté fédérale (dépenses électorales sont encadrées légalement)

Le contrôle du respect, par ces mêmes législateurs, du titre II de la Constitution, portant sur les
libertés publiques, et des articles 170, 172 et 191 de la Constitution. Les articles 170 et 172 portent
sur l’égalité et le principe de légalité en matière fiscale et l’article 191 a trait à l’extension aux
étrangers se trouvant sur le territoire de la Belgique de la protection accordée aux personnes et aux
biens. = contrôle de constitutionalité des lois

Art. 19 combiné avec l’article 10 et 11 (à l’époque, il fallait toujours passer par l’article 10 et 11 pour
pouvoir invoquer l’article 19 car il ne faisait pas partie des normes références de la cour d’arbitrage). La
Cour a décidé d’interpréter la liberté de conscience à la lumière de la disposition équivalente dans la
convention européenne des droits de l’homme (article 9) qui garantit la liberté de religion. Au cours des
années 90, la cour d’arbitrage a véritablement étendu le champ des normes de contrôle. En plus d’être
un arbitre (cour d’arbitrage) entre différents niveaux de pouvoir, elle est devenue véritablement
protectrice des droits fondamentaux. Ça été acté dans les années 2000 puisque la cour d’arbitrage va
devenir en 2007 la cour constitutionnelle. Le champ de ces normes de références au regard desquelles
elle peut exercer son contrôle, le législateur spécial va étendre formellement le cham des normes de
contrôle de la cour constitutionnelle. En plus des règles répartitrices de compétences (article 10, 11 et
24) le législateur va confier la garde de l’ensemble du titre II à la cour, (droits et libertés) il a formalisé
ce que la cour constitutionnelle faisait déjà en utilisant les articles 10 et 11, mais ici c’est devenu formel
et plus besoin de passer par les articles 10 et 11, et il va confier les article 170, 172, 191 et lors de la
sixième réforme de l’état,

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Il en résulte que ces compétences de la Cour constitutionnelle se déterminent selon deux critères :

1. Quelles sont les normes supérieures dont elle doit assurer le respect ? En d’autres termes, quelles
sont les normes de référence (ou normes de contrôle) de la Cour ?

2. Quelles sont les normes inférieures que la Cour peut contrôler par rapport à ces normes de
références ? En d’autres termes, quelles sont les normes contrôlées par la Cour ?

II. Les normes de référence

A. Les règles constitutionnelles de répartition des compétences et la loyauté fédérale

Les normes de référence ou de contrôle, c’est-à-dire celles dont la Cour constitutionnelle doit assurer le
respect, sont en premier lieu les règles qui sont établies par la Constitution pour déterminer les
compétences respectives de l’État, des communautés et des régions. Il s’agit bien évidemment des
articles 127 à 133 attributifs de compétences aux communautés et de l’article 134 relatif aux régions,
mais beaucoup d’autres articles de la Constitution peuvent être considérés comme contenant des règles
de compétence. Mentionnons par exemple l’article 162, alinéa 3 (la tutelle sur les institutions
provinciales ou communales), l’article 163 (les groupes linguistiques du Parlement de la Région de
Bruxelles-Capitale) ou les articles 170, 173, 175 et 177 (les impôts et les redevances communautaires
et régionaux et le financement des communautés et des régions).

Il faut y ajouter l’article 143, § 1er, qui n’est pas véritablement une règle de répartition des compétences
mais plutôt une règle de comportement : elle oblige les différentsniveaux de pouvoir (autorité fédérale,
communautés et régions) à respecter la loyauté fédérale, l’équilibre de la construction fédérale belge,
dans l’exercice de leurs compétences respectives.

La Cour constitutionnelle s’assure du respect par les différents niveaux de pouvoirs tant de leurs
compétences matérielles que de leurs compétences territoriales.

B. Les règles de répartition des compétences établies en vertu de la Constitution

La Cour constitutionnelle doit aussi faire respecter les règles qui sont établies en vertu de la
Constitution pour déterminer les compétences respectives de l’État, des communautés et des régions.

Il s’agit essentiellement (mais non exclusivement) des lois du 8 août 1980 de réformes institutionnelles,
du 9 août 1980 de réformes institutionnelles, du 31 décembre 1983 de réformes institutionnelles pour
la Communauté germanophone, du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises et du 16
janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions.

En outre, les règles de répartition des compétences peuvent elles-mêmes renvoyer à d’autres normes.

La Cour constitutionnelle est compétente pour assurer la conformité des lois, des décrets et des
ordonnances non seulement aux règles directement attributives de compétences, mais également à
celles qui visent à limiter ou à moduler l’usage qui peut être fait de ces dernières par le législateur. Par
exemple, selon la Cour constitutionnelle, les conditions de majorité spéciale exigées pour l’adoption de
lois spéciales « font partie intégrante du système de détermination des compétences »36. Toutes ces
dispositions doivent être considérées comme des règles déterminant les compétences respectives de

36 C. arb., 23 mai 1990, n° 18/90, B.16.2 ; C. const., 19 juin 2014, n° 93/2014, B.12.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

l’État, des communautés et des régions. La Cour a également inséré le principe de proportionnalité
parmi ceux dont elle assure le respect.

L’article 30bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle considère enfin, comme
étant également des règles répartitrices de compétences, « la concertation,l’association, la transmission
d’informations, les avis, les avis conformes, les accords, les accords communs et les propositions prévus
par la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, à l’exception des accords de coopération
visés à l’article 92bisde ladite loi, ainsi que par la loi spéciale du 16 janvier 1989 sur le financement des
communautés et régions ou par toute autre loi prise en exécution des articles 39, 127,
§ 1er, 128, § 1er, 129, § 1er, 130, § 1er, 135, 136, 137, 140, 166, 175, 176 et 177 de la
Constitution ».

C. Le titre II et les articles 170, 172 et 191 de la Constitution

Depuis la réforme institutionnelle de 1988-1989, la Cour constitutionnelle était chargée de faire


respecter les articles 10, 11 et 24 de la Constitution, portant sur les principes d’égalité et de non-
discrimination (articles 10 et 11) et sur les règles fondamentales en matière d’enseignement (article
24), soit principalement la liberté active et passive d’enseignement, l’égalité, la neutralité de
l’enseignement organisé par les communautés, les obligations en ce qui concerne les cours de morale
non-confessionnelle et de religion et le principe de légalité.

Depuis 2003, la compétence de la Cour constitutionnelle a été étendue par le législateur spécial au
contrôle du titre II de la Constitution (articles 8 à 32), portant sur les libertés publiques, et au respect
des articles 170, 172 et 191 de la Constitution.

Cette extension de compétence est toutefois assez formelle puisque la Cour constitutionnelle, avant
cette réforme, avait déjà interprété de manière fort large ses compétences fondées sur les principes
d’égalité et de non-discrimination et les articles
10 et 11 de la Constitution, en manière telle que bon nombre d’autres principes constitutionnels
fondamentaux se trouvaient en pratique inclus dans son champ de compétence. Le raisonnement tenu
par la Cour constitutionnelle était le suivant.

La portée des principes d’égalité et de non-discrimination consacrés par les articles 10 et 11 de la


Constitution est, de jurisprudence constante, la suivante37 :

« Les règles constitutionnelles de l’égalité et de la non-discrimination n’excluent pas qu’une différence


de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu’elle repose sur un critère
objectif et qu’elle soit raisonnablement justifiée. L’existence d’une telle justification doit s’apprécier en
tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause ;
le principe d’égalité est violé lorsqu’il est établi qu’il n’existe pas de rapport raisonnable de
proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ».

Dès avant 2003, de nombreux arrêts de la Cour avaient considéré que les articles 10et 11 de la
Constitution étaient susceptibles d’être violés si une catégorie de citoyens était privée, sans justification
admissible, du bénéfice de la protection des droits et libertés résultant d’autres dispositions
constitutionnelles et de dispositions conventionnelles internationales liant la Belgique et rendues
applicables dans l’ordre juridique interne par un acte d’assentiment ; la Cour y avait inclus notamment
la Convention européenne des droits de l’homme.

37 Par exemple, C. const., 19 janvier 2005, n° 17/2005, B.3

100
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Sur la base d’un raisonnement similaire, la Cour constitutionnelle avait aussi accepté, toujours avant
2003, de connaître de plusieurs aspects de la séparation des pouvoirs. Tel était le cas par exemple
lorsqu’elle constatait la violation discriminatoire des garanties juridictionnelles des citoyens ou la
privation non justifiée du droit des citoyens à ce qu’une matière réservée à la loi par la Constitution soit
traitée par le législateur (par exemple en ce qui concerne la légalité des délits et des peines, les règles
en matière fiscale, militaire ou d’enseignement). Certains principes généraux, comme par exemple la
non-rétroactivité, le respect des droits de la défense ou la sécurité juridique, s’étaient également vu
reconnaître un statut quasi constitutionnel en étant ainsi combinés avec les principes d’égalité et de
non-discrimination.

Dès lors, ces dispositions et principes ont été indirectement érigés en normes de référence par la Cour
constitutionnelle.

L’extension des compétences de la Cour, en 2003, lui a permis de contrôler les droits et les libertés
constitutionnels de manière autonome, sans devoir être liés à l’invocation d’un moyen fondé sur les
articles 10 et 11 de la Constitution. Par le biais des articles 10 et 11 de la Constitution et du raisonnement
exposé ci-avant, la Cour constitutionnelle continue cependant d’intégrer indirectement parmi ses
normes de références des dispositions qui n’en font pas formellement partie selon l’article 142 de la
Constitution et la loi spéciale sur la Cour constitutionnelle du 6 janvier 1989.

D. L’extension éventuelle des compétences de la Cour

On a vu plus haut que l’article 142, alinéa 2, 3°, de la Constitution rendait possible, par une loi votée à la
majorité spéciale, l’extension des compétences de la Cour au contrôle du respect par les législateurs
d’autres articles de la Constitution. C’est d’ailleurs sur la base de cette disposition que, par exemple, en
2003, la compétence de la Cour constitutionnelle a été étendue à l’ensemble du titre II et aux articles
170, 172 et 191 de la Constitution (par le biais d’une modification de la loi spéciale du 6 janvier 1989
sur la Cour constitutionnelle). On pourrait donc imaginer que, dans le futur, la compétence de la Cour
constitutionnelle soit étendue à l’ensemble des dispositions de la Constitution, ce qui mettrait fin au
caractère limité du contrôle de constitutionnalité actuellement exercé par la Cour.

III. Les normes contrôlées : les lois, les décrets et les ordonnances

L’article 142, alinéa 2, 1° et 2°, confirmé sur ce point par les articles 1 er, 3 et 26 de la loi spéciale du 6
janvier 1989 permet à la Cour constitutionnelle d’examiner la constitutionnalité des lois, des décrets
des communautés et des décrets et ordonnances des régions. La Cour constitutionnelle adopte une
conception formelle (et non matérielle) de la notion de norme législative, ce qui lui permet de se pencher
sur la constitutionnalité de lois, de décrets et d’ordonnances dont l’objet n’est pas de poser desrègles de
comportement de portée générale et abstraite.

Cette conception formelle de la notion de norme législative a conduit la Cour constitutionnelle à


admettre sa compétence à connaître, par la voie du contentieux préjudiciel, de la conformité aux règles
constitutionnelles ouvertes à son contrôle deslois d’assentiment à des traités internationaux, ce qui
inclut le contrôle du traité lui- même. Toutefois, depuis 2003, les lois, décrets et ordonnances relatifs à
l’assentiment aux traités constituants de l’Union européenne, à la Convention européenne des droits
de l’homme ou à un Protocole à cette Convention ne peuvent plus être soumis au contrôle de la Cour à
titre préjudiciel. De même, la Cour constitutionnelle accepte de connaître de recours en annulation ou
de questions préjudicielles mettant en cause des normes législatives budgétaires, qui n’ont pas non plus

101
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

de portée normative matérielle.

IV. Les autres compétences de la Cour constitutionnelle

A. Le contrôle de l’organisation des consultations populaires régionales

Outre le contrôle de constitutionnalité, la Cour constitutionnelle dispose d’autres compétences encore,


conformément à l’article 142 de la Constitution et à la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour
constitutionnelle. Ainsi, préalablement à l’organisation d’une consultation populaire régionale, la Cour
constitutionnelle doit vérifier, à la demande du ministre-président de la région concernée, si les
conditions auxquelles les consultations sont autorisées par les décrets ou les ordonnances pertinents
sont respectées. À cette occasion, elle vérifie le respect des règles relevant de sa compétence dans le
cadre de ses attributions en matière de contrôle des normes législatives, à savoir les libertés publiques
(titre II de la Constitution), les règles de répartition des compétences entre l’autorité fédérale, les
communautés et les régions, la loyauté fédérale, ainsi que les articles 170, 172 et 191 de la Constitution.

B. Le contrôle des décisions prises en matière de dépenses électorales

La législation électorale limite les dépenses pouvant être exposées notamment par les candidats aux
élections législatives fédérales et interdit certains modes de propagande (par exemple les panneaux ou
affiches publicitaires commerciaux ou encore lacampagne commerciale par téléphone). L’objectif de
cette législation consiste à permettre l’organisation de campagnes aussi loyales et égalitaires que
possible entre les différents candidats et leurs formations politiques (voy. La loi du 4 juillet 1989 relative
à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour l'élection de la Chambre des
représentants, ainsi qu'au financement et à la comptabilité ouverte des partis politiques).

En cas de violation de ces règles, une commission de contrôle composée de dix-sept députés et de quatre
experts extérieurs peut prendre les sanctions suivantes : l’avertissement, la retenue partielle de
l’indemnité parlementaire, la suspension du mandat entre un et six mois et même la déchéance du
mandat.

Un recours est ouvert devant la Cour constitutionnelle contre ces sanctions, qui doit être introduite dans
les trente jours de la notification de la décision de la commission de contrôle, visant à en obtenir
l’annulation. Ce recours n’est recevable que s’il est introduit par celui qui a fait l’objet de la sanction.
Ce recours s’apparente aux recours en annulation devant le Conseil d’État concernant les actes
administratifs : toute violation d’une forme substantielle ou prescrite à peine de nullité, tout excès de
pouvoir, voire tout détournement de pouvoir, peut conduire à l’annulation de la sanction.

§ 4. Les modes de saisies de la Cour constitutionnelle

Il n’est question ci-après que du premier ensemble de compétences de la Courconstitutionnelle, à savoir


celui du contrôle des normes législatives.

I. Le recours en annulation et la demande de suspension

A. Le recours en annulation
Suggéré par la première partie de l’article 142, alinéa 3, de la Constitution, le recours en annulation est

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prévu et organisé par le chapitre premier du titre premier de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour
constitutionnelle. En vertu de son article 2, trois catégories de requérants sont admises à agir devant la
juridiction constitutionnelle, dans un délai, en règle, de six mois à compter de la publication de la
norme attaquée au Moniteur belge :

Le Conseil des ministres ou le Gouvernement d’une communauté ou d’une région, qui n’ont pas à
justifier d’un intérêt

Toute personne physique ou morale justifiant d’un intérêt ;

Les présidents des assemblées législatives à la demande de deux tiers de leurs membres ; les
présidents d’assemblées ne doivent pas non plus justifier d’un intérêt.

B. La demande de suspension

Si un recours en annulation est introduit, le requérant peut demander la suspension dela loi, du décret
ou de l’ordonnance visé par le recours. La suspension ne peut être décidée qu’à l’une des conditions
suivantes, la première contenant deux exigences cumulatives :
Des moyens sérieux doivent être invoqués et l’exécution immédiate de la norme attaquée doit
risquer de causer un préjudice grave difficilement réparable
Le recours invoque des moyens sérieux contre un décret ou une ordonnance qui porte atteinte aux
facilités linguistiques dans les communes à statut linguistique spécial ou au caractère bilingue de la
Région de Bruxelles-Capitale et aux garanties linguistiques offertes aux francophones et aux
néerlandophones dans la même région (la condition du risque de préjudice grave difficilement
réparable n’est ici pas requise)
Le recours est exercé contre une norme identique à une norme déjà annulée par la Cour
constitutionnelle et qui a été adoptée par le même législateur.

II. La question préjudicielle

Comme l’article 142, alinéa 3, in fine, de la Constitution le prévoit, la Cour constitutionnelle peut aussi
être saisie à titre préjudiciel38 par toute juridiction devant laquelle un problème de respect des règles
de compétence, de la loyauté fédérale, du titre II de la Constitution ou des articles 170, 172 et 191 de la
Constitution par un législateur se pose. Il s’agit même d’une obligation pour les juridictions dont les
décisions ne sont plus susceptibles de recours.

§ 5. Les effets des arrêts de la Cour constitutionnelle

I. Le contentieux de l’annulation

Au contentieux de l’annulation, les arrêts accueillant les recours ont l’autorité absolue de la chose jugée
à partir de leur publication au Moniteur belge ; les arrêts de rejet sont obligatoires pour les juridictions
en ce qui concerne les questions de droit tranchées par ces arrêts. L’annulation a un effet rétroactif, ce
qui implique que la norme annulée doit être considérée comme n’ayant jamais existé, sauf si la Cour

38Saisir une institution à titre préjudiciel signifie, comme le mot l’indique, que la juridiction procède àcette saisine avant
de juger.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

indique, par voie de disposition générale, ceux des effets des dispositions annulées qui doivent être
considérées comme définitifs ou maintenus provisoirement pour le délai qu’elle détermine.

Cet effet en principe rétroactif des arrêts de la Cour a rendu nécessaire l’instauration de voies de recours
extraordinaires, la rétractation, un second pourvoi en cassation ou des recours administratifs ou
juridictionnels organisés, lorsqu’une décision judiciaire, pénale ou civile, ou du Conseil d’État se base
sur une norme annulée par la Cour constitutionnelle ou sur un règlement fondé sur une telle norme ; le
délai de recours est fixé à six mois à dater de la publication de l’arrêt d’annulation de la Cour
constitutionnelle.

Si le recours en annulation aboutit, il faut faire comme si la norme législative n’avait jamais existé
elle est mise à néant avec effet rétroactif. Le législateur a prévu pour tempérer les effets de l’annulation
d’une norme administrative (annulation 2 ans et demi après avec effet rétroactif ça peut avoir des effets
négatifs non prévisibles, et donc dangereux pour la sécurité juridique) la Cour peut indiquer les effets
à l’avance Il y a aussi la possibilité de rétractation.
II. Le contentieux de la suspension

Les arrêts ordonnant la suspension des normes entreprises ont effet à dater de leur publication au
Moniteur belge, qui doit intervenir dans les cinq jours du prononcé. La Cour doit alors prononcer son
arrêt sur le recours principal en annulation dans les trois mois du prononcé de l’arrêt de suspension,
sans prorogation possible ; à défaut, la suspension cesse ses effets.

Les rejets de demandes de suspension n’ont d’autre effet que de permettre la poursuite normale de la
procédure d’examen du recours en annulation.

Effet sont suspendus dans l’attente de la décision rendue par la Cour constitutionnelle

III. Le contentieux préjudiciel

Les arrêts rendus en réponse à des questions préjudicielles n’ont qu’un effet relatif : la juridiction qui a
posé la question et toute autre juridiction appelée à statuer dans la même affaire sont tenues, pour la
solution du litige à l’occasion duquel a été posée la question, de se conformer à l’arrêt rendu par la Cour
constitutionnelle.

En outre, les autres juridictions ne sont plus tenues de poser une question préjudicielle lorsque le
problème juridique a été tranché par un arrêt précédent.

Enfin, si la Cour l'estime nécessaire, elle peut indiquer, par voie de disposition générale, ceux des effets
des dispositions ayant fait l’objet d’un constat d'inconstitutionnalité qui doivent être considérés comme
définitifs ou maintenus provisoirement pour le délai qu’elle détermine.

La décision rendue dans un renvoi préjudiciel elle laisse la norme intacte (elle continue d’exister) elle
ne peut juste pas être appliquée dans l’affaire qui a donné lieu à la question préjudicielle. Cependant, la
norme va être fragilisée car un autre juge pourra écarter la norme jugée inconstitutionnelle, sans devoir
poser une question préjudicielle.

Les juridictions suprêmes (conseil d’état, cour de cassation, notamment lorsqu’il n’y a pas de recours
possibles) ont tenu / obligés de poser une question préjudicielle à la cour constitutionnelle si la
demande leur en est faite il y a des exceptions qui sont malheureusement un peu trop utilisée !

Exception : contentieux d’urgence

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

TITRE 2 : LES INSTITUTIONS ET LES COMPETENCES


DESCOMMUNAUTES ET DES REGIONS
Les différentes formes d’État, unitaire, fédéral, régionalisé ou confédéré, ont été examinées plus haut,
dans la partie introductive du cours. Il y est renvoyé, notamment pour la bonne compréhension du
concept de fédéralisme appliqué à la Belgique.

CHAPITRE I : LES COMPETENCES REGIONALES


ET COMMUNAUTAIRES

SECTION 1 : LES COMPETENCES MATERIELLES DES COMMUNAUTES ET DES


REGIONS
Les compétences matérielles des communautés et des régions sont décrites ci-dessous dans leurs
grandes lignes ; elles sont en réalité plus détaillées et font l’objet de réserves partielles au profit de l’État
fédéral, notamment pour assurer le respect de mécanismes instaurés pour protéger les minorités
linguistiques.

Elles doivent encore être complétées par des compétences dites accessoires, en ce qui concerne
notamment les aspects pénaux des décrets et des ordonnances, les organismes d’intérêt public,
l’infrastructure, le statut du personnel, le contrôle des dépenses électorales et les pouvoirs implicites.

Rappel :

Principe d’exclusivité des compétences : pour toute question, il n’y a en principe qu’un seul
législateur qui est compétent en Belgique. Pas de hiérarchie entre normes législatives en Belgique
(lois ne sont pas supérieures au décret ou aux ordonnances, ces différentes normes législatives se
trouvent sur un pied d’égalité, mais lorsqu’à une même question, deux normes législatives de deux
niveaux de pouvoir prétendent s’appliquer en même temps, et contiennent des dispositions qui sont
contradictoires , ces conflits de normes sont réglés par une analyse de savoir quel est le législateur
qui est compétent. Une fois que la compétence d’un niveau de pouvoir est identifiée, cela exclut la
compétence de l’autre niveau de pouvoir. Ce principe d’exclusivité est garant de l’égalité entre
entités fédérées et état fédéral

Compétences des communautés et des régions sont d’attribution, tandis que l’état fédéral dispose
de la compétence résiduelle. Les compétences des communautés et des régions sont uniquement
identifiées de manière explicite par la constitution et par les lois portées en vertu de la constitution
et principalement par la loi spéciale de réforme institutionnelle du 8 aout 1980

La compétence se définit par trois critères :

(1) Matériel : quel est l’objet que l’on entend régler ?

(2) Géographique : où est situé l’objet qui doit être réglé ?

(3) Temporel : à quel moment la compétence doit-être exercé ?

Exemple : matière de l’enseignement avant 1970 (état unitaire) après 1989 = communautés.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Dimension évolutive. Assez facile à comprendre

Identifier l’autorité compétence pour régler une question X, il faut prendre en compte ces trois
critères !

§ 1er. Les compétences matérielles des régions

L’article 39 de la constitution ne dit pas grand-chose sur la compétence matérielle des régions. Il parle
davantage des communautés. Il dit juste que c’est la compétence du législateur d’identifier les
compétences des régions voir la loi spéciale du 8 aout 1980. Bruxelles capitale : loi de janvier 1989
sur les institutions bruxelloises.
Blocs de compétence et exceptions
Les articles 6, 6bis et 7 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles confèrent aux
régions les grands « blocs de compétence » suivants, qui relèvent plutôt des secteurs socio-économiques
au sens large :

• L’aménagement du territoire

• L’environnement et la politique de l’eau

• La rénovation rurale et la conservation de la nature ;

• Le logement, en ce compris les baux concernant les logements d’habitation ;

• La politique agricole et la pêche maritime ;

• L’économie, en ce compris l’accès à la profession et les baux commerciaux ;

• La politique de l’énergie ;

• Pouvoirs subordonnés, en ce compris les provinces, les communes, les districts, les
intercommunales, etc.39 ; les régions peuvent, par des décrets adoptés à la majorité des deux-tiers
supprimer les provinces et les remplacer par des « collectivités supra communales » ; dans la
Région de Bruxelles-Capitale, il n’y a toutefois plus de province depuis de nombreuses années
(voy., plus bas, le chapitre consacré à la décentralisation).

• La politique de l’emploi ;

• Les travaux publics et le transport ;

• Certains aspects de la recherche scientifique ;

• La tutelle sur les provinces et les communes ;

• Le bien-être des animaux

• Certains aspects de la sécurité routière, notamment les limitations de vitesse horsautoroutes et

39 Ces compétences doivent s’exercer dans le respect de règles spécialement énoncées tendant à assurer le respect des
minorités (ex. : l’élection directe du collège des bourgmestre et échevins dans certaines communes à facilités, la nécessité
d’adopter les ordonnances bruxelloises en matière communale sur la base d’une majorité (éventuellement atténuée) dans
chaque groupe linguistique de ce conseil). On relèvera par ailleurs que les centres publics d’aide sociale relèvent des
communautés, faisant partie intégrante de la compétence en matière d’aide sociale (matière personnalisable).

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

les permis de conduire

• La procédure judiciaire d’expropriation dans les matières non fédérales (ex. : en vue de réaliser
un plan d’aménagement du territoire ou de construire une école, ces dernières matières relevant
respectivement des régions et des communautés).

Il ne s’agit là que d’une énumération des attributions principales de compétences, que la loi spéciale du
8 août 1980 de réformes institutionnelles vient souvent assortir d’exceptions. Ainsi, par exemple :

• Si les régions sont compétentes en principe pour la politique de l’énergie (article 6, § 1er, VII,
de cette loi spéciale), cette attribution est assortie de plusieurs exceptions, en ce qui concerne
notamment l’énergie nucléaire (« [l]e cycle du combustible nucléaire », article 6, § 1er, VII, alinéa
2, b), de cette loi spéciale) ou « [l]es grandes infrastructures de stockage, le transport et la
production de l’énergie » (littera c) de la même disposition) ;

• De même, en ce qui concerne le transport (article 6, § 1er, X, de la loi spéciale), le transfert de


principe de cette matière aux régions inclut « l’équipement et l’exploitation des aéroports et des
aérodromes publics » (article 6, § 1er, X, 7°, de la loi spéciale), mais à l’exception de l’aéroport de
Bruxelles-National (même disposition), lequel relève donc de l’autorité fédérale.

Partage assez précis et détaillé de compétences entre régions, état fédéral et même communautés.
Notamment pour l’emploi, la sécurité sociale est fédérale (solidarité interpersonnelle) le droit du travail
reste pour l’état fédéral, pour ne pas que les régions se fassent concurrence les unes par rapport aux
autres. Octroi de grands blocs de compétences aux régions mais avec des exceptions au profit de l’état
fédéral découpage en dentelle

La loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles crée dès lors un découpage « en dentelle
» de compétences de l’État fédéral et des régions dans des matières proches, ce qui donne lieu à de
nombreuses difficultés d’interprétation.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Plus généralement, le partage des compétences opéré entre l’État fédéral et des régions (ou les
communautés) dans des matières proches signifie que ceux-ci doivent souvent agir ensemble ou
coordonner leur action pour pouvoir mener une politique efficace. Telest par exemple le cas dans le cadre
de la « lutte contre le changement climatique » au niveau belge. Le Conseil d’État a eu l’occasion de mettre
en évidence le caractère éclaté des compétences dans cette matière dans l’avis qu’il a rendu sur la
proposition de loi spéciale coordonnant la politique de l'autorité fédérale, des Communautés et des Régions
en matière de changements climatiques et fixant des objectifs généraux à long terme (la proposition de «
loi climat ») (Doc. Parl., Chambre, session 2018-2019, n° 3517/4, p. 6 – notes de bas de page omises)

« Dans l’état actuel du droit constitutionnel, le climat (sa politique) ne constitue pas une matière qui est
expressément attribuée à une ou plusieurs autorités. Il relève – certes pas exclusivement, mais bien en
premier lieu – de la compétence des régions en matière d’environnement (article 6, § 1er, II, de la loi
spéciale du 8 août 1980 “de réformesinstitutionnelles” – nommée ci-après: LSRI). La politique menée dans
d’autres matières régionales, notamment en ce qui concerne l’énergie et la mobilité, concerne également
incontestablement le climat. Dans ces matières, l’autorité fédérale a également conservéun certain nombre
de compétences. La politique climatique englobe ainsi un ensemble de domaines répartis entre l’autorité
fédérale et les régions. La politique des matières qui relèvent de la compétence des communautés peut
également avoir une incidence sur la politique climatique. Par conséquent, dans l’état actuel du droit
constitutionnel, “le climat” ou “la politique en matière de changements climatiques” est une compétence
partagée.

En outre, les régions ne peuvent pas exercer leurs compétences tout à fait librement. D’une manière
générale, les régions ne peuvent en effet mettre en œuvre leurs compétences, spécialement en matière
économique, que dans le respect des principes de la libre circulation des personnes, des biens, de
services et des capitaux, de la liberté de commerce et de l’industrie et du cadre normatif de l’union
économique et de l’unité monétaire. Ce cadre normatif est établi par la loi, en vertu de la loi ou par des
traités internationaux, ou encore en vertu de tels traités ; cette dernière hypothèse vise notamment le
droit de l’Union européenne. Dans toutes ces matières, l’État fédéral est resté compétent. Ces réserves
de compétence au profit de l’État fédéral encadrent l’exercice de l’ensemble des compétences des entités
fédérées, par exemple l’exercice de leurs compétences fiscales ou de leurs compétences
d’environnement. Aux fins de garantir les libertés de circulation, les liberté économiques et l’union
économique et monétaire en Belgique, des matières plus précisément énoncées ont été réservées par le
législateur spécial à l’État fédéral, par exemple :

• Les règles générales en matière de marchés publics, de protection des consommateurs,


d’organisation de l’économie et de plafonds d’aide en matière d’expansion économique ;

• Les normes de produit en matière d’environnement ;

• La politique monétaire ;

• La politique financière et la protection de l’épargne ;

• La politique des prix et des revenus, sauf les aspects spécifiques liées aux matières régionales (ex.
: le prix du transport urbain) ou communautaires ;

• Le droit de la concurrence et les pratiques du commerce ;

• Le droit commercial et le droit des sociétés ;

• La propriété industrielle et intellectuelle ;

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

• Le droit du travail et la sécurité sociale, sauf les aspects de la sécurité sociale qui ont été
expressément transférés aux communautés ou à la Commission communautaire commune ;

• etc.40.

Article 138 de la constitution

La description qui vient d’être effectuée des compétences régionales doit encore être complétée sur un
point. En effet, la Région wallonne et la Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-
Capitale exercent les compétences suivantes de la Communauté française, par suite des transferts de
compétences intervenus au profit de ces entités conformément à l’article 138 de la Constitution :

• Les aspects d’infrastructure de l’éducation physique, des sports et de la vie en plein air ;

• La promotion sociale

• La reconversion et le recyclage professionnels (appelés plus couramment la formation


professionnelle) ;

• Le transport scolaire ;

• La politique de santé, sauf quelques exceptions

• L’aide aux personnes, sauf quelques exceptions

• Les prestations familiales (ceci ne concerne que la Région wallonne puisque, dans la région
bilingue de Bruxelles-Capitale, c’est la Commission communautaire commune qui est
compétente).

(La communauté française à transférer ces compétences au profit de la région wallonne d’une part, et à
la commission communautaire française à Bruxelles).

Ces transferts de compétence ont pu être réalisés, conformément à l’article 138 de la Constitution, par
des décrets de la Communauté française adopté à la majorité des deux- tiers au sein de son Parlement
et par des décrets de la Région wallonne et de la Commission communautaire française adoptés à la
majorité absolue au sein, respectivement, de son Parlement et de son groupe linguistique.

Ces mécanismes de transfert a permis de refinancer quelque peu la Communauté française puisque
l’ensemble des montants budgétaires affectés à l’origine aux matières transférées n’a pas été transféré
de la Communauté à la Région wallonne et à la Commission communautaire française.

Jean-Claude Scholsem décrit la ratio legis de l’article 138 de la Constitution et destransferts de compétences
opérés sur son fondement de la manière suivante (« Les compétences fiscales et financières des
collectivités de l’espace Wallonie – Bruxelles », C.P.D.K., 2008, pp. 278-279) :

« En 1993, les francophones prennent une tout autre direction. […] D’autre part, un nouvel article, l’actuel
article 138, est inséré dans la Constitution, répondant exactement aux aspirations qui se sont exprimées
au sud du pays. Désormais, la Communauté française pourra transférer l’exercice de compétences d’une
part à laRégion wallonne, qui ne les exercera que dans la région de langue française, et d’autre part à la

40Voy. l’article 6, § 1er, VI, in fine, de la loi spéciale du 8 août 1980. Ce texte apporte encore des nuances à ces réserves de
compétences au profit de l’État.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Commission communautaire française. Cet accord trilatéral s’opère par décret. La Région wallonne
présente dès lors un double visage selon qu’elle agit comme région, pour les régions de langue française et
de langue allemande, ou comme exerçant les compétences communautaires transférées, dans la seule
région de langue française. La Commission communautaire française cumulera son statut d’origine d’entité
décentralisée de la Communauté française avec un nouveau rôle d’entité fédérée à part entière exerçant à
Bruxelles les compétences transférées de la Communauté française.

Il y a de nombreuses manières d’expliquer et de justifier ce tournant de 1993. On peut parler de victoire


des thèses régionalistes, de respect du principe de subsidiarité, de volonté, du moins en ce qui concerne la
Région wallonne de créer des synergies plus intenses entre des matières régionales et communautaires
proches. Le revers de lamédaille existe aussi. Il y a fragmentation supplémentaire des institutions, création
de nouvelles lignes de partage des compétences (entre les compétences dont l’exercice est ou n’est pas
transféré). Ces inconvénients auraient dû être palliés par une coopération accrue entre institutions
francophones, ce qui n’a pas toujours été le cas, loin de là.

Mais il est évident que le but principal de ce que certains ont appelé la « défusion » n’était autre que
financier. Transférant l’exercice de certaines compétences, la Communauté française ne va pas
parallèlement transférer l’ensemble des moyens y afférents. L’économie ainsi réalisée sera réinvestie par
la Communauté française dans ses tâches essentielles, notamment l’enseignement et la culture. L’aide
implicite viendra des deux « bénéficiaires » de ces transferts selon une clé à définir entre eux. Le mécanisme
paraît fort ingénieux. Il connait cependant même sur le plan financier, d’importantes limites. En premier
lieu, l’aide indirecte de la Région wallonne à la Communauté française ne pose pas trop de problème. Cette
région dispose d’un assez large budget, peut le cas échéant réduire certaines dépenses régionales et dispose
en tout cas du droit de taxer. Il en va tout différemment de la Commission communautaire française. Celle-
ci se substitue à Bruxelles à la Communauté française et n’y dispose pas du droit d’accroître son budget par
des taxes et impôts. Comment la COCOF va-t-elle en quelque sorte suivre l’effort de solidarité intra-
francophone ? »
Du côté francophone, la volonté dominante c’et de travailler à partir d’une Belgique organisée en région,
et non pas en communauté, et donc la constitution a permis aux francophones de dépouiller petit à petit les
compétences de la communauté française ? En pratique, la communauté française n’exerce pas de pouvoir
fiscal (elle ne passe pas par l’impôt), elle ne peut pas étendre son budget pour investir davantage, enveloppe
budgétaire limitée, cette enveloppe n’est pas suffisante (enseignement, culture, etc.). Communauté
française = institution structurellement pauvre. Une manière de l’enrichir c’est de transférer certaines
compétences aux régions sans transférer l’ensemble de son budget : elle fait moins mais il lui reste + de
budget (but de l’article 138)
Du côté flamand, la communauté flamande et la région ont fusionnés, et donc les politiques
communautaires peuvent aussi être financés à partir des régions, et les régions peuvent elle lever l’impôt !
Article 135Bis de la Constitution
En principe, sans préjudice de la mise en œuvre de l’article 138 de la Constitution, les régions ne peuvent
se voir attribuer par la loi spéciale des compétencescommunautaires. Il résulte toutefois de la révision
constitutionnelle intervenue dans le cadre de la sixième réforme de l’État que la Région de Bruxelles-
Capitale peut recevoir des compétences culturelles relevant normalement des communautés (article
135bis de la Constitution). Tel est le cas en ce qui concerne les infrastructures sportives communales,
certains aspects de la formation professionnelle et les matières biculturelles d’intérêt régional.
La région de Bruxelles capitale s’est vue octroyé, lors de la sixième réforme de l’état, certaines compétences
culturelles d’intéret régional, certains aspects sportifs communaux, matières en lien avec la formation
professionnelle.

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Conclusion : Bloc de compétence des régions : Article 6 de la loi spéciale du 8 aout 1980. Mais il y a
des spécificités :

Du côté flamand, ces compétences sont en fait exercées par la communauté flamande (pas de région
flamande)
La région wallonne a des compétences en plus de l’article 6 de la loi spéciale du 8 aout 1980, qui lui
ont été attribuées par la communauté française, et qui font partie des matières personnalisables
qui relèvent normalement des compétences des communautés (et des compétences en moins
octroyées à la communauté germanophone)
La région de Bruxelles-capitale a des compétences en plus qui lui ont été donnée par le législateur
spécial, en application de l’article 135bis
Article 139 de la constitution prévoit que la région wallonne peut confier des compétences
régionales à la communauté germanophone sur son territoire (urbanisme, etc.)

Caractère asymétrique du fédéralisme belge ! Mais à chaque fois ill. a une raison…

§ 2. Les compétences matérielles des communautés

Les compétences des communautés sont en partie définies par la constitution (ce qui n’est pas le cas
pour les régions) et en partie par la loi spéciale du 8 août 80.

Bloc de compétences des communautés : article 127 à 130 de la Constitution

La Constitution, en ses articles 127 à 130, confère directement aux communautés les compétences
suivantes:

• Les matières culturelles (sur le territoire de la région bilingue de Bruxelles-Capitale, il faut


toutefois tenir compte de qui est exposé ci-avant en rapport avec l’article 135bis de la
Constitution)

• L’enseignement, sous quelques réserves liées essentiellement au maintien du caractère fédéral de


la sécurité sociale ;

• Les matières personnalisables (article 128)

• La coopération entre les communautés et la coopération internationale dans ces trois matières,
en ce compris la conclusion de traités

• L’emploi des langues dans les matières administratives, l’enseignement et les matières sociales
(cette compétence n’est accordée à la Communauté germanophone qu’en ce qui concerne l’emploi
des langues dans l’enseignement). (Article 129)

Les articles 4 et 5 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles : explication


en détail des compétences

Le contenu des matières culturelles et personnalisables est détaillé par les articles 4 et 5 de la loi spéciale
du 8 août 1980. L’article 6bis y ajoute des aspects de la recherche scientifique. Citons parmi les matières
culturelles la défense et l’illustration de la langue, les musées, les beaux-arts, la radio et la télévision, les
sports ou encore les loisirs et, parmi les matières personnalisables, des aspects de la politique de santé
et d’aide aux personnes, notamment la politique familiale, l’aide sociale, la protection de la jeunesse,
l’aide juridique de première ligne, les missions des maisons de justice, etc.

Les prestations familiales (à savoir non seulement les allocations familiales au sensstrict, mais aussi les
111
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

allocations de naissance, les primes d’adoption, les suppléments d’allocations, les prestations familiales
garanties, etc.) ont été transférées de l’État fédéral aux communautés (puis, s’agissant de la Wallonie, à
la Région wallonne, à l’exception de la région linguistique germanophone) et à la Commission
communautaire commune (pour Bruxelles) dans le cadre de la sixième réforme de l’État. C’est un
premier pan complet de la sécurité sociale qui échappe ainsi à l’autorité fédérale. Les communautés
française et flamande ne peuvent, même via des institutions uniescommunautaires, régler les allocations
familiales sur le territoire de la région bilingue de Bruxelles-Capitale. Seule la Commission
communautaire commune est compétente.

Les compétences communautaires en matière de politique de santé ont également été accrues dans le
cadre de la sixième réforme de l’État, en ce compris sur des aspects touchant dans une certaine mesure
à l’assurance maladie-invalidité au sens large, comme par exemple des parties de la politique
hospitalière. Il s’agit donc également d’untransfert partiel de la sécurité sociale aux communautés.

On a par ailleurs vu que la Communauté française a transféré certaines de ses compétences dans les
matières personnalisables à la Région wallonne et à la Commission communautaire française de la
Région de Bruxelles-Capitale et que, à l’inverse, la Communauté germanophone a reçu des compétences
de la Région wallonne,comme en matière de monuments et sites.

Article 5 : liste des matières personnalisables (politique de santé, etc.). Grande discussion par la
pandémie ; la manière dont les compétences en matière de santé (7 ministres de la santé) est-elle
suffisamment claire et efficace ? ne devrait-on pas modifier le système ?

1.8. Médecine préventive = c’est sur la base de cette compétence que les communautés sont
responsables des systèmes de trading, testing, etc.

Par contre, remboursement c’est l’état fédéral, donc plusieurs acteurs doivent se mettre d’accord afin
de valider une politique.

Le cas de la communauté germanophone

En outre, conformément à l’article 139 de la Constitution, la Région wallonne a transféré à la


Communauté germanophone ses compétences en matière de protection des monuments et des sites
et d’emploi, ainsi qu’en matière d’énergie, de logement et d’aménagement du territoire

Cas pratique à l’examen d’une question qui attrait à la répartition des compétences, on doit pouvoir
manipuler et lire les textes des codes pour répondre aux questions.
§ 3. Les compétences matérielles des Commissions communautaires au sein de
laRégion de Bruxelles-Capitale

Comment les compétences communautaires sont-elles exercées à Bruxelles dans les cas où les
communautés française et flamande ne sont pas compétentes ? (Voir compétences territoriales pour
comprendre) Qu’est ce qui se passe quand on a affaire à des institutions bilingues, multilingues, ou qui
fonctionnent dans d’autres langues que le français ou le néerlandais ? Que fait-on quand on doit prendre
des mesures qui s’adressent non pas à des institutions, mais à des individus ? (Contrôle du respect de
l’obligation scolaire) vaccination.= médecine préventive (compétences des communautés) ou le testing,
règles qui s’appliquent aux individus et non pas par des institutions (quarantaine s’adresse aux
individus, non pas aux institutions) la question qui se pose c’est de savoir qui est compétent à Bruxelles,
lorsque ce sont des individus qui sont concernés par des matières communautaires, ou des institutions
qui ne sont pas unilingue francophone ou néerlandophone ?
Pour les matières culturelles ou enseignement, c’est l’état fédéral qui est compétent à chaque

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SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

fois que la communauté française ou flamande ne l’est pas


Dans les matières personnalisables, c’est la COCOM .

I. Les compétences réglementaires de la Commission communautaire


française et de la Commission communautaire flamande

Le régime juridique des Commissions communautaires au sein de la Région de Bruxelles-Capitale est


défini par la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises. Les Commissions
communautaires française et flamande exercent, par la voie réglementaire, les compétences suivantes :

1°) Elles peuvent, sous la tutelle de leur communauté, adopter des règlements tendant à développer les
intérêts communautaires des Bruxellois respectivement francophones et néerlandophones.

2°) Elles ont, chacune respectivement pour le public souhaitant s’adresser à elle dans un cadre unilingue,
les mêmes compétences que les autres pouvoirs organisateurs pour les matières culturelles,
d’enseignement et personnalisables (ex. : créer un théâtre, un établissement d’enseignement, une
crèche).

3°) Elles peuvent recevoir des compétences par un décret de la communauté à laquelle elles sont liées.
Il s’agit de compétences déléguées.

II. Les compétences décrétales de la Commission communautaire française


(COCOF)

Outre les compétences réglementaires que la Communauté française peut déléguer à la Commission
communautaire française, cette communauté peut transférer, avec l’accord de cette commission, la
compétence (législative) de régler des matières communautaires.
On a vu plus haut qu’il a été fait usage de cette possibilité prévue par l’article 138 de la Constitution.
La Commission communautaire française exerce ces compétences par la voie décrétale.
C’est également par décret que la Commission communautaire française reçoit les compétences
transférées.

La région wallonne n’est compétente que pour le sud, or la communauté française est également
compétente à Bruxelles à l’égard des institutions francophones. Lorsque la communauté française a
transféré une partie de ses compétences dans les affaires personnalisables à la région wallonne, cela ne
valait que pour le sud du pays. A Bruxelles, il fallait une autre instance pour réceptionner ces
compétences là (une instance francophone) création de la COCOF. = entité dont les organes sont les
ministres francophones du gouvernement bruxellois, et les députés francophones du parlement
bruxellois. A Bruxelles, la COCOF exerce des compétences décrétales de la communauté française dans
les matières qui lui ont été transférées et donc elle adopte des normes législatives dans les matières qui
lui ont été transférer par la communauté française.

III. Les compétences de la Commission communautaire commune (COCOM)

La Commission communautaire commune, qui regroupe les deux commissions communautaires, exerce
deux types de compétences :
1°) Elle règle, par la voie d’ordonnances, les matières bicommunautaires personnalisables à Bruxelles
(voy. Ci-après, au titre des compétences territoriales, l’explication de cette particularité), en ce

113
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

compris les allocations familiales (les « prestations familiales » selon la formule officielle, qui vont au-
delà des allocationsfamiliales au sens strict). Il s’agit d’une compétence législative.

2°) Elle agit sur un plan seulement réglementaire en qualité de pouvoir organisateur pour les matières
culturelles, d’enseignement et personnalisables qui sont d’intérêt commun pour les deux communautés
à Bruxelles.

C’est la COCOM qui a mis en place la campagne de vaccination à Bruxelles, qui a pris des règles
en matière de vaccination.

En résumé à Bruxelles, nous avons :

La région de Bruxelles capitale (le gouvernement est composé de ministres francophones et


néerlandophone, le parlement de députés néerlandophones et francophones les députés siègent
séparément dans certains cas, et les ministres prennent séparément des décisions dans certains cas
(entre néerlandophone et francophone)

Lorsque les ministres francophones décident séparément ou que les députés francophones siègent
séparément , ils forment l’assemblée et le collège de la commission communautaire française (cette
COCOF exerce les compétences de la communauté française qui lui ont été transférées en même temps
qu’elles ont été transférées à la région wallonne)

Par ailleurs, en ce qui concerne l’exercice des compétences communautaires à Bruxelles, la communauté
française est compétente pour les institutions unilingues francophone (communauté flamande pour
institutions unilingue néerlandophone) tout ce qui est en dehors c’est soit l’état fédéral (culturel ou
enseignement) ou bien la COCOM en matière personnalisables

Attention, pas de pouvoir décrétale en ce qui concerne la commission communautaire flamande, la


communauté flamande n’a pas transféré une partie de son pouvoir législatif à la VGC ! c’est une entité
qui a un statut distinct de la COCOF, puisque la COCOF est une entité fédérée, elle a des compétences
législatives propres – pas la commission communautaire néerlandaise.

§ 4. Les compétences accessoires des communautés et des régions

Les communautés et les régions, en ce compris la Commission communautaire française et la


Commission communautaire commune, disposent de plusieurs compétences revêtant un caractère
accessoire par rapport à leurs compétences principales.

C’est ainsi par exemple qu’elles peuvent, dans le champ de leurs compétencesmatérielles principales,
créer des organismes d’intérêt public (ex. : la RTBF créée par la Communauté française, le Forem créé
par la Région wallonne en matière de formation etd’emploi, etc.), procéder à des expropriations, fixer le
statut de leur personnel, etc.

Elles peuvent aussi prévoir des sanctions pénales en cas de violation des règles contenues dans leurs
décrets ou ordonnances. Par exemple, les décrets et ordonnances en matière d’urbanisme prévoient des
sanctions pénales pour ceux qui bâtissent un immeuble sans disposer de permis d’urbanisme.

Afin d’assurer une effectivité à cette compétence pénale, les mécanismes suivants ont été ajoutés, en
2014, aux prérogatives des entités fédérées :

Le ministre compétent d’un gouvernement de région ou de communauté peut, via le Ministre fédéral
de la Justice, ordonner des poursuites à charge des personnes suspectées d’avoir contrevenu à des

114
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

décrets ou des ordonnances ;

Les gouvernements de région ou de communauté participent avec le Ministre fédéral de la Justice à


l’élaboration des directives contraignantes de politique criminelle, de la « note-cadre Sécurité
intégrale » et du « Plan national de Sécurité », qui étaient des outilsantérieurement élaborés au seul
niveau fédéral;

Ils participent, lorsque leurs matières sont concernées, aux réunions du Collège des procureurs
généraux, en ce compris pour l’établissement des priorités des directives de politique criminelle en
général.

§ 5. Les compétences internationales des communautés et des régions et les


restrictions à ces compétences

Si c’est toujours le Roi qui dirige les relations internationales, le pouvoir de conclure les traités
appartient à l’autorité compétente du pouvoir exécutif selon la répartition interne des matières entre
l’État, les communautés et les régions (article 167 de laConstitution). C’est ainsi, par exemple, que les
communautés peuvent conclure des traités en matière d’enseignement ou que les régions peuvent le
faire en matière d’environnement, dans certaines limites. Une concertation est mise sur pied pour les
matières mixtes.

Il importe de noter qu’il s’agit d’une prérogative du pouvoir exécutif, soit le Roi au niveau fédéral ou les
gouvernements communautaires ou régionaux au niveau des entités fédérées. Ce sont ces autorités qui
ratifient les traités41. Compte tenu notamment de ce que les compétences résiduelles et de ce que les
principaux aspects des relations internationales appartiennent toujours à l’autorité fédérale, la plupart
des traités relèvent de la compétence du Roi.

Conformément à l’article 81 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, les


gouvernements communautaires et régionaux doivent informer préalablement le Roi de leur intention
d’entamer des négociations ou d’accomplir tout acte en vue de la conclusion d’un traité. Une procédure
est alors instaurée pour permettre à l’autorité fédérale de vérifier s’il n’existe pas selon elle des
objections à un pareil traité. Ces objections doivent être motivées en fonction de critères liés
essentiellement à la cohérence de la politique internationale du pays et au respect de ses obligations
internationales. Cette procédure peut même aboutir à la suspension de traités signés par une
communauté ou une région.

Par ailleurs, pour rappel, une procédure spécifique, définie par un accord de coopération du 8 mars 1994,
est prévue pour la conclusion des traités qui relèvent à la fois de la compétence de l’État fédéral et des
entités fédérées (traités mixtes).

Conformément à l’article 169 de la Constitution, dans certaines conditions, les autorités fédérales
peuvent se substituer temporairement aux pouvoirs communautaires et régionaux dans l’exercice de
leurs compétences internationales, mais seulement dans le but de garantir le respect des obligations
internationales ou supranationales.
Ces règles trouvent une part d’explication dans le fait que, sur le plan international, les États ne forment

41 Il ne faut pas confondre la ratification, acte par lequel le pouvoir exécutif manifeste son accord à être lié par un traité, avec
l’assentiment, acte par lequel c’est le pouvoir législatif qui délivre cet accord, sous la forme d’une loi. La ratification produit
principalement des effets en droit international ; l’assentiment produit des effets en droit interne.

115
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

qu’une entité inséparable et qu’en principe les parties d’État ne sont pas reconnues par la communauté
internationale : il convenait donc d’éviter que la responsabilité internationale de la Belgique fût engagée
en raison de l’attitude d’une entité fédérée.

Ces règles consacrent dès lors la prééminence de l’autorité fédérale dans la conduite des relations
internationales du pays, y compris en ce qui concerne la conclusion des traités.

Les traités doivent faire l’objet d’un assentiment parlementaire, émanant de l’assemblée compétente
selon la matière traitée : lorsqu’il s’agit d’un traité signé par un gouvernement d’une région, c’est le
parlement de cette région qui adoptera le décret d’assentiment. À défaut d’assentiment, les traités ne
peuvent sortir leurs effets en droit interne.

Outre le prolongement international des compétences internes que consacre ce pouvoir reconnu aux
communautés et aux régions de conclure des traités, on retiendra que les régions sont compétentes en
matière de commerce extérieur et qu’une partie de la coopération au développement aurait dû,
conformément à l’article 6ter de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, être
transférée aux communautés et aux régions en 2004, dans la mesure où elles portent sur les
compétences de ces entités. Ce transfert n’est toutefois pas intervenu, ce qui n’empêche pas les
communautés et les régions de développer déjà des politiques de coopération au développement dans
le cadre des compétences matérielles qui leur sont attribuées par la Constitution ou la loi spéciale.

SECTION 2 : LES COMPETENCES TERRITORIALES DES COMMUNAUTES ET DES


REGIONS
§ 1er. Les compétences territoriales des régions

Conformément à l’article 2 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, la Région


wallonne exerce ses compétences sur le territoire des régions de langue française et de langue
allemande, qui correspondent au total aux cinq provinces wallonnes. Toutefois, s'agissant des matières
transférées de la Communauté française à la Région wallonne, les compétences de cette dernière ne sont
exercées que sur le territoire de la région de langue française, à l'exclusion donc de celui de la région de
langue allemande (c’est la Communauté germanophone qui exerce ces compétences pour ce territoire).

La Région flamande est compétente pour la région de langue néerlandaise, c’est-à-dire sur les cinq
provinces flamandes. La Région de Bruxelles-Capitale est compétente sur le territoire de la région
bilingue de Bruxelles-Capitale qui correspond aux dix-neuf communes de l’agglomérationbruxelloise
(article 2 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux Institutionsbruxelloises).

116
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Lorsque la région wallonne exerce les


compétences qui lui ont été attribuée par la
communauté française, elle ne les exerce
pas pour les communes néerlandophones
qui se trouvent ici.
Quand la communauté flamande exerce les
compétences de la région flamande, elle ne
les exerce pas à Bruxelles mais seulement
sur la région flamande !

§ 2. Les compétences territoriales des communautés

Conformément à l’article 3 de la loi du 31 décembre 1983 de réformes institutionnelles pour la


Communauté germanophone, la Communauté germanophone est compétente sur le territoire de la
région de langue allemande, composée de communes situées dans la province de Liège.

En ce qui concerne les deux autres communautés, la situation est plus complexe (articles127, §2, et 128,
§2, de la Constitution) :

1°) En règle générale, la Communauté flamande a une aire de compétence identique à celle de la Région
flamande (c’est-à-dire la région de langue néerlandaise), à laquelle il faut ajouter les institutions, et non
les personnes, situées dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale relevant exclusivement de cette
communauté (les institutions unies communautaires flamandes à Bruxelles ; ex. : les écoles, les crèches,
les radios locales,les théâtres flamands). La situation est parallèle pour la Communauté française qui
exerce ses compétences sur la région de langue française (c’est-à-dire le territoire de la Région wallonne,
sauf la région de langue allemande relevant de la Communauté germanophone), mais auquel il faut
ajouter les institutions dites uni communautaires francophones de la Région de Bruxelles-Capitale. Les
communautés ne peuvent toutefois exercer leurs compétences relatives aux prestations familiales à
Bruxelles, même à l’égard des institutions unilingues actives dans cette matière : dans cette région, seule
la Commission communautaire commune est compétente en matière d’allocations familiales.

2°) En matière d’emploi des langues, les communautés ne sont pas compétentes à Bruxelles ni dans les
communes à statut linguistique spécial, dites « à facilités » (la périphérie bruxelloise, Fourons, Comines,
etc.)(article 129, §2, de la Constitution). Dans ces territoires, l’État fédéral est resté compétent en vertu
de sa compétence résiduelle. De même, en région de langue allemande, c’est l’État fédéral qui exerce les
compétences en matière d’emploi des langues dans les matières administratives et sociales, domaines
dans lesquels la Communauté germanophone n’est pas compétente.
77Elle est en revanche compétente en matière d’emploi des langues dans l’enseignement.

3°) Il existe d’autres compétences résiduelles à Bruxelles, par suite de la situation particulière décrite

117
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

ci-dessus. Ces compétences concernant le secteur dit bicommunautaire, c’est-à-dire ne relevant


d’aucune communauté (comme les personnes) ou des deux communautés (comme les hôpitaux et des
institutions culturelles communes ; ex. : le Palais des Beaux-Arts, le théâtre royal de la Monnaie) sont
réglées de la manière suivante :

- Les matières bicommunautaires personnalisables (ex. : les hôpitaux, les CPAS) sont exercées par la
Commission communautaire commune de la Région de Bruxelles- Capitale. Cette compétence lui a été
attribuée par l’article 63 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux Institutions bruxelloises ;

- Les matières bicommunautaires culturelles (ex. : le Musée des Beaux-Arts, le musée du


Cinquantenaire) restent exercées par l’État fédéral, en vertu de sa compétence résiduelle : cette
compétence n’a pas été attribuée, à ce jour, à une autre autorité. Depuis 2014, l’article 135bis de la
Constitution prévoit cependant que les matières bicommunautaires culturelles peuvent être attribuées
par le législateur spécial à la Région de Bruxelles-Capitale, ce qui fut fait en ce qui concerne trois d’entre
elles (article 4bis de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises) :

a) Les infrastructures sportives communales ;

b) Certains aspects de la formation professionnelle ;

c) Les matières biculturelles d’intérêt régional.

La communauté flamande est compétente sur le territoire des provinces flamandes, + sur les institutions
néerlandophones bruxelloises, distinction entre

Matières culturelles : la communauté flamande est compétente à Bruxelles uniquement vis-à-vis des
institutions dont les activités sont exclusivement en néerlandais (une école néerlandophone par
exemple)

Matières personnalisables : compétente toujours pour les institutions, dont l’organisation est
uniquement en néerlandais

118
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

La communauté française est compétente sur le territoire de la région linguistique de langue française,
et de même pour les institutions dont les activités ou organisations sont uniquement en français.

Communauté germanophone compétente pour les communes qui forment les régions linguistiques de
langue allemande

Cela vaut même en cas de transfert, lorsque la communauté flamande agit pour les compétences de la
région, elle n’est pas compétente à Bruxelles !

COURS 16
CHAPITRE II : LES ORGANES DES
COMMUNAUTESET DES
REGIONS

Ici, on quitte la répartition horizontale des pouvoirs (entre l’état fédéral, les régions et les
communautés). Maintenant on regarde le rôle à l’intérieur de chaque institution / organe des
communautés et des régions.

SECTION 1 : L’AUTONOMIE CONSTITUTIVE DES COMMUNAUTES ET DES REGIONS

Autonomie constitutive
Où trouver les compétences des régions et des communautés : constitution + la loi spéciale
Quelles sont les textes qui organisent les institutions des organes des communautés et des régions ?
constitution + loi spéciale du 8 aout 80, et la loi du 12 janvier 89 pour la région de Bruxelles capitale et la
commission communautaire. Néanmoins, depuis 1993, les lois qui régissent les communautés et régions ne
se trouvent plus seulement dans les lois fédérales. Car en 1993, le législateur spécial a commencé à
reconnaitre aux communautés et aux régions (BX plus tard) une certaine autonomie constitutive ! A partir
de 1993, le législateur spécial a identifié une série de règles qui pouvaient être modifiés par les régions et
communautés elles-mêmes en ce qui concerne leur organisation. Possibilité pour les régions et
communauté de choisir pour elles même certains aspects de leur fonctionnement institutionnel. =>
autonomie constitutive = faculté pour une région ou une communauté de déterminer pour elle-même les
règles relatives à leurs organisations. (Étendue plus grande au fil des réformes ultérieures de l’état, après
1993).

Pour connaitre les règles , cela ne suffit plus de simplement aller voir dans la constitution ou la loi
spéciale, il faut voir si les régions ou les communautés ont fait usage de leur autonomie constitutive pour
modifier ces règles !

Autonomie pas absolue !

Jusqu’aux réformes de 1993, l’organisation et le fonctionnement des organes communautaires et


régionaux étaient fixés par la Constitution ou, en vertu de celle-ci, par les lois spéciales ou ordinaires de
réformes institutionnelles, sous la réserve de quelques exceptions très limitées.

Il revient toujours au Constituant et au législateur fédéral de déterminer ces règles, mais les révisions
institutionnelles de 1993 et 2013-2014, et les modifications des lois spéciales de réformes
institutionnelles qu’elles ont impliquées, ont créé quelques espaces d’autonomie constitutive au profit
des entités fédérées, ce qui signifie que ces entités peuvent désormais définir elles-mêmes certaines des
règles régissant leur organisation et leur fonctionnement. En synthèse, cette autonomie constitutive des

119
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

entités fédérées est, à l’heure actuelle, cantonnée à des matières relatives à l’élection, àla composition
et au fonctionnement de leurs parlements et gouvernements. Plus précisément, l’autonomie constitutive
des entités fédérées belges peut s’exercer selon les modalités et dans les limites suivantes :

1°) Des décrets ou des ordonnances peuvent notamment régler les aspects suivants (loi spéciale de
réformes institutionnelles du 8 août 1980) :

La périodicité et la date des élections visant à former les parlements des communautés et des régions
(s’il était fait usage de cette compétence, les élections fédérales et les élections communautaires ou
régionales n’auraient plus lieu le même jour) ;

La fixation des circonscriptions électorales et de leur chef-lieu pour l’élection des parlements, mais
sans qu’elles puissent dépasser le territoire d’une région ; la fixation d’autres règles relatives aux
élections régionales ;

La modification de certains aspects du régime d’incompatibilités des parlementaires, voire la


création, en ce qui les concerne, de nouvelles incompatibilités, complétant celles qui sont déjà
prévues par la loi, pouvant inclure notamment l’incompatibilité entre les mandats de parlementaire
et de ministre sur le modèle en vigueur déjà au niveau fédéral ;

L’augmentation ou la diminution du nombre de parlementaires, mais en sauvegardant de manière


proportionnelle la représentation garantie aux Bruxellois dans chaque Parlement de communauté ;
cet aspect de l’autonomie constitutive n’est pas reconnu au parlement de la Région de Bruxelles-
Capitale, ce qui fige l’équilibre à 72 sièges francophones et 17 sièges flamands. (Limite pour
Bruxelles-capitale)

La fixation de règles complémentaires de composition des parlements des communautés et des


régions

L’instauration d’une circonscription unique sur l’ensemble de leur territoire pour le nombre de
sièges qu’ils déterminent ;

L’adaptation du mécanisme de présentation des candidats aux élections

Le système de désignation des élus, ce qui autoriserait la modification du système Dhont


actuellement en vigueur

La modification du nombre de membres des gouvernements communautaires et régionaux ;

La fixation, dans certaines limites, de l’indemnité accordée aux parlementaires

La définition du statut des membres des gouvernements communautaires et régionaux

L’organisation concrète de certains aspects du travail des parlements (la périodicité des sessions,
l’élection et les fonctions du bureau et du greffier, le caractère public ou secret des séances, les règles
du contrôle politique du gouvernement)

certains aspects du fonctionnement des gouvernements (ex. : la règle du consensus en leur sein pour
l’adoption des décisions, le nombre maximal de ministres (à la Région de Bruxelles-Capitale, il faut
toutefois maintenir l’égalité entre le nombre de ministres de chaque groupe linguistique et,
s’agissant des secrétaires d’État, dont le Parlement peut également modifier le nombre, un tiers au
moins doit relever du groupe néerlandais), la technique de la motion de méfiance constructive, le
remplacement des ministres démissionnaires, le principe de l’expédition des affaires courantes) ;

120
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Majorité spéciale

2°) Les décrets et les ordonnances mettant en œuvre l’autonomie constitutive des entités fédérées
doivent être adoptés à la majorité des 2/3 des suffrages exprimés, la majorité des parlementaires
étant présente (article 35, §3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles). Au
Parlement bruxellois, il faut en outre la majorité dans chaque groupe linguistique (article 28 de la
loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises).

À ce jour, des décrets faisant usage de ces possibilités d’autonomie constitutive ont été adoptés
notamment pour créer, comme sur le plan fédéral, une incompatibilité entre les qualités de ministre et
de membre du Parlement flamand, du Parlement de la Région wallonne et du Parlement de la
Communauté française, pour instituer un régime de congé politique en Communauté et en Région
flamandes, pour augmenter le nombre de ministres de la Région wallonne et de la Communauté
française et pour élargir au niveau des provinces le ressort territorial des circonscriptions électorales
pour l’élection desmembres non bruxellois du Parlement flamand.

Sur une série de point, les régions et communautés peuvent modifier des règles qui se trouvent dans la loi
spéciale ! autonomie constitutive = plan politique et de la théorie de l’état, c’est un pas en avant vers le
fédéralisme belge possibilité in fine pour les régions et communautés de se doter de leur propre
constitution. Plus cette autonomie est étendue plus ces communautés et régions peuvent se doter de leur
propre constitution.

SECTION 2 : LE POUVOIR LEGISLATIF DES COMMUNAUTES ET DES REGIONS

Combien de branches au pouvoir législatif au niveau fédéral ? 3 branches (Le roi, La chambre des
représentants, le Sénat)

Au niveau des communautés et des régions, il y a uniquement deux branches. Le roi ne joue pas de rôle
(le rôle du roi est joué par le gouvernement pour la plupart des entités fédérées, ou par le collège ou
collège réunie pour la COCOF ou la COCOM)

1. Première branche : gouvernement (Bruxelles : COCOF = collège, COCOM =collège réuni)


2. Parlement communautaire / régional (Bruxelles : COCOF = assemblée, COCOM = assemblée
réunie)

Pouvoir législatif qui lui aussi comme au niveau fédéral, voit sa compétence délimitée à la fois de
manière positive et de manière négative. Une série de cas dans lequel le pouvoir législatif doit lui-même
fixer les éléments essentiels d’une matière : chaque fois que la constitution prévoit l’intervention du
décret ou de l’ordonnance spécifiquement, ou bien pour les normes ou dispositions constitutionnelles
antérieures à 1980, chaque fois que la matière est réservée au pouvoir législatif et qu’on se trouve dans
la sphère des compétences des communautés ou des régions législateur communautaire ou régionale
qui doit intervenir (théorie des matières réservées, rappel ! ) à l’intérieur des compétences des régions
et communautés, chaque fois qu’un pouvoir n’a pas été attribué explicitement au gouvernement ou au
collège, législateur régional ou communautaire qui est compétent !

§ 1er. Les organes du pouvoir législatif des communautés et des régions

Ce pouvoir législatif adopte des décrets ou des ordonnances, ils ont la même force que la loi, il n’y a pas
d’inégalité entre les lois des décrets et des ordonnances, ce qui permet d’éviter de trancher certaines
contradictions qui se mettraient entre les décrets / lois / ordonnances => règle répartitrice des

121
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

compétences !

Au sein de chaque entité fédérée belge, le pouvoir législatif se compose de deux branches : l’assemblée
délibérative, représentative de la population qui l’a élue,directement ou indirectement (le Parlement, le
Groupe linguistique ou l’Assemblée réunie), et l’organe par ailleurs titulaire du pouvoir exécutif (le
Gouvernement communautaire ou régional, le Collège ou le Collège réuni). Ceci correspond, mutatis
mutandis, au système en place au niveau fédéral, où le pouvoir législatif est détenu par, d’une part, la
Chambre des représentants et le Sénat et, d’autre part, le Roi, lui aussi titulaire par ailleurs du pouvoir
exécutif.

L’assemblée de chaque entité fédérée est l’organe au sein duquel se délibèrent les décrets ou les
ordonnances et où s’exerce le contrôle politique des gouvernements communautaires et régionaux ou
de leurs membres. Le gouvernement présente les projets de décret ou d’ordonnance et, lorsqu’ils sont
votés par l’assemblée, il les sanctionne. Le vote des décrets ou des ordonnances au sein de l’assemblée
se fait, en règle, à la majorité absolue des voix exprimées, avec un quorum de la moitié des membres de
l’assemblée.

Il ne sera question ci-dessous que des assemblées des entités fédérées. Les gouvernements seront
examinés plus bas, au titre du pouvoir exécutif des communautéset des régions.

Malgré l’existence d’une Région flamande, dotée de la personnalité juridique, on a vuplus haut qu’il
n’existe pas de Parlement régional flamand puisque les compétences de cette région sont exercées par
les organes de la Communauté flamande, soit son Parlement pour ses compétences décrétales.
Toutefois, lorsque ce Parlement délibère dans les matières régionales, ses membres bruxellois ne
participent ni aux débats ni aux votes.

On verra ci-dessous que les parlements régionaux, le Parlement de la Communautégermanophone et le


Parlement flamand résultent d’élections directes. Ces élections sont organisées tous les cinq ans au
suffrage universel dans l’entité territoriale concernée, en principe à la même date que celle de l’élection
des députés belges au Parlement européen.

Aucune dissolution anticipée des assemblées régionales et communautaires n’est possible. Les
parlements sont donc des « parlements de législature ».
Au niveau des régions

I. Le Parlement de la Région wallonne

Le Parlement de la Région wallonne se compose de 75 membres élus directement au


suffrage universel, élus pour une durée de 5 ans.
/!\ pas de possibilité de dissolution anticipée du parlement ! le gouvernement ne peut pas
dissoudre de manière anticipée le parlement wallon, même en cas de blocage politique, ils
siègent pour 5 ans, on ne peut pas appeler à des élections anticipées

II. Le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et les assemblées à


caractère communautaire créées en son sein

Le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale se compose de 89 membres élus directement au


suffrage universel, soit 72 francophones et 17 flamands. (Ce nombre ne peut pas être modifié par la
région de Bruxelles capitale, la répartition est déterminée par la loi spéciale et n’évolue pas en fonction
des élections). Les membres du parlement de la région de BX sont élus directement par la population

122
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

bruxelloise. Pourquoi 89 députés et pas moins ? et pourquoi cette répartition ? Les deux sont liés. Une
des caractéristiques de la sociologie bruxelloise, c’est que même si c’est une région bilingue, la
proportion de néerlandophone à Bruxelles n’est pas très importante (10%). Les 90% ne sont pas
nécessairement francophone puisque Bruxelles est une ville multiculturelle. Si on appliquait une clé
purement démographique, la représentation néerlandophone au niveau du parlement bruxellois serait
assez congrue, il y en aurait très peu, ça mettrait en difficulté le fonctionnement de la région de Bruxelles
capitales. Solution qui a été trouvé = garantir qu’au sein du parlement BX il y ait toujours un minimum
de députés néerlandophones pour faire le boulot parlementaire du coté NL mais aussi pour avoir une
certaine diversité dans les courants politiques représentés du coté NL Dans le même temps, on ne
pouvait pas avoir une surreprésentation trop grande du coté NL sachant qu’ils représentent 10% de la
population. Lorsqu’on vote aux régionales, on doit choisir pour qui on vote (pour les francophones
ou néerlandophone, on doit choisir de voter soit pour les listes néerlandophones soit francophones)

En son sein sont créés deux groupes linguistiques, français et flamand, qui regroupent les élus
respectifs de chaque rôle. Ils forment l’organe délibératif de la Commission communautaire française et
de la Commission communautaire flamande.

Par dérogation aux règles ordinaires de quorum et de majorité applicables à l’adoption des ordonnances
de la Région de Bruxelles-Capitale, les ordonnances bruxelloises en matière communale ou provinciale
doivent être adoptées à une double majorité, à savoirune majorité au sein de chaque groupe linguistique
qui compose le Parlement ; en cas deblocage, une majorité d’un tiers dans chaque groupe linguistique
suffit, à la condition bien entendu qu’une majorité dans l’ensemble de l’assemblée se dégage (article 28
de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises).

Conformément à la même disposition, des règles analogues de quorum et de majorité s’appliquent à la


mise en œuvre par la Région de Bruxelles-Capitale de son autonomie constitutive, aux ordonnances
conjointes et aux règles d’organisation des consultations populaires régionales. Toutefois, dans ces
matières, la possibilité de réduire la proportion de votes dans chaque groupe linguistique est écartée et
il faut donc bien la majorité dans chacun de ces groupes.

Depuis 2021, le règlement du Parlement bruxellois prévoit l’existence de commissions délibératives


entre parlementaires et citoyens tirés au sort au sein des assemblées bruxelloises. La première
commission de ce type s’est penchée sur la place de la « 5G » à Bruxelles.

Les 72 francophones forment à eux seules une assemblée, ils se réunissent séparément, et ils forment
alors l’assemblée de la COCOF ! Cette entité s’est vue transférée par la communauté française une partie
de ses compétences en matière personnalisables. Son organe législatif, c’est l’assemblée de la COCOF,
qui est formé des 72 députés francophones du parlement de la région de Bruxelles capitale.

III. L’Assemblée de la Commission communautaire française de la Région


de Bruxelles-Capitale (COCOF)

COCOF a reçu des compétences la communauté française (art. 138 constitution) compétentes
uniquement pour des institutions unilingues francophones (matières personnalisables)

Seule la Commission communautaire française s’est vu accorder un pouvoir décrétale, parcontraste avec
la Commission communautaire flamande, et ce pour accepter le transfert

123
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

De compétences de la Communauté française opéré à son profit conformément à l’article


138 de la Constitution et pour exercer ces compétences. Son organe délibératif, dénommé « l’Assemblée
», se compose du groupe linguistique français de la Région de Bruxelles-Capitale. Sa composition est
indiquée ci-avant. Cette assemblée s’identifie elle- même, en marge des textes légaux, comme le «
Parlement francophone bruxellois ».

La Commission communautaire flamande ne peut constitutionnellement recevoiraucune compétence


législative comparable, dès lors que l’article 138 de la Constitution ne lui est pas applicable.

Les 72 francophones et les 17 néerlandophones du parlement de la région Bruxelles capitale, si on les


remet ensemble, ils forment également l’assemblée réunie de la COCOM (en même temps que de former
le parlement de la région Bruxelles capitale, dédoublement fonctionnel)

IV. L’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune de la


Région de Bruxelles-Capitale

Compétentes uniquement des institutions qui ne sont pas unilingues francophones (matières
personnalisables) exemple, maison de repos, qui sont des institutions, si elles sont uniquement en
français, elles relèvent de la COCOF, si elles fonctionnent dans les deux langues, elles relèvent de la
COCOM)

Vaccination COVID (médecine préventive, compétences communautaires, de types personnalisables à


Bruxelles, concernant les citoyens) règles à prendre en la matière, règles qui s’adressent directement
aux citoyens COCOM qui est compétente, car on n’est pas dans un cas d’institution. Mais si les règles
concernaient les écoles, alors on parlerait d’institutions.

Organe législatif de la COCOM ! Les deux groupes linguistiques du Parlement de la Région de Bruxelles-
Capitale créent un autre organe lorsqu’ils siègent ensemble : il s’agit de l’Assemblée réunie de la
Commission communautaire commune qui peut notamment adopter des ordonnances dans les matières
bicommunautaires personnalisables.

On voit que cette Assemblée réunie connaît la même composition que le Parlement régional bruxellois,
mais il s’agit d’un organe d’une entité juridique autonome : le Parlement régional agit pour la Région
dans les matières régionales ; l’Assemblée réunie agit pour la Commission communautaire commune
dans les matières bicommunautairespersonnalisables. En outre, par dérogation à ce qui est le cas pour
les autres assemblées des entités fédérées et, en particulier de ce qui est le cas pour la Région de
Bruxelles- Capitale, les ordonnances de la Commission communautaire commune sont adoptées à une
double majorité, au sein de chaque groupe linguistique composant l’Assemblée réunie ; en cas de
blocage, une majorité de 33 % dans chaque groupe linguistique suffit cependant, à la condition bien
entendu qu’une majorité dans l’ensemble de l’Assemblée se dégage.

Pour beaucoup d’observateurs, ils devraient être possible de fusionner la COCOM et la région de
Bruxelles capitale, d’autant que leurs organes sont les mêmes, ce serait simple de fusionner les deux, il
y a néanmoins des différences, au niveau de l’assemblée réunie, la règle de décision au niveau de la
COCOM pour l’adoption es ordonnances de la COCOM c’est qu’il faut une majorité dans chaque groupe
linguistique pour que des ordonnances de la COCOM puissent être adoptés (pas le cas en règle au niveau
de la région de BX capital) à la COCOM, les flamands sont + protégés, puisque y’a pas d’ordonnance

124
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

qui peut être adoptée sans une majorité de leur groupe linguistique.

Formellement, on ne vote pas pour les membres de la COCOF et de la COCOM, on vote pour les députés
bruxellois, qui sont les mêmes qui vont former l’assemblée de la COCOF ou COCOM.

Les 17 flamands forment aussi la VGC (mais qui n’est pas une entité fédérée, elle n’a pas de pouvoir
législatif !) on n’en parle pas ici car elle n’est pas une entité fédérée du tout en Belgique

Au niveau des communautés :

I. Le Parlement flamand (Vlaams Parlement)

Le Parlement flamand est composé de membres élus directement au suffrage universel. Ils sont 124 au
total :

118 sont élus directement au sein de la Région flamande (les cinq provinces flamandes)

Les 6 autres sont élus par les électeurs bruxellois à l’occasion des élections du Parlement de la
Région de Bruxelles-Capitale : ceux qui ont fait le choix d’élire des candidats flamands de ce
Parlement élisent aussi les six membres bruxellois du Parlement flamand.
II. Le Parlement de la Communauté française

Le Parlement de la Communauté française se compose de 94 membres élus indirectement :

Les 75 membres du Parlement régional wallon sont de plein droit membres de ceParlement ;

19 membres sont élus en son sein par le groupe linguistique français du Parlement de la Région de
Bruxelles-Capitale.
Tous les députés wallons siègent au sein du parlement de la communauté française, contre 19 députés
bruxellois.

III. Le Parlement de la Communauté germanophone

Le Parlement de la Communauté germanophone se compose de 25 membres élus directement au


suffrage universel. D’autres titulaires de fonctions peuvent assister aux séances de ce Parlement avec
voix consultative (voy. L’article 8, § 4, de la loi du 31décembre 1983 de réformes institutionnelles pour
la Communauté germanophone).

Généralement ; le pouvoir législatif et le parlement ont un rôle similaire dans les communautés et
régions par rapport au niveau fédéral (participe au pouvoir législatif, ils contrôlent le gouvernement par
le biais des mécanismes classiques de contrôle parlementaire, ils donnent au gouvernement les moyens
financiers de son action et qui contrôle les données publics) fonction similaire au niveau fédéral

§ 2. Le statut des membres des parlements

Le statut des membres des divers parlements est très comparable à celui desparlementaires fédéraux.

Ils sont soumis à des incompatibilités avec des mandats ministériels fédéraux, avec des fonctions
juridictionnelles et avec certaines hautes fonctions administratives.

En outre, des décrets pris au titre de l’autonomie constitutive ont créé une incompatibilité entre les

125
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

qualités de ministre et de membre du Parlement flamand, du Parlement de la Région wallonne et du


Parlement de la Communauté française au seinde chacune de ces entités fédérées.

Les membres des parlements des communautés et des régions ne peuvent être à la fois membres de ces
parlements et parlementaires fédéraux, sauf bien entendu les cinquante membres des parlements de
communauté et de région qui siègent à ce titre comme sénateurs (vingt-neuf sénateurs désignés en leur
sein par le Parlement de la Communauté flamande ou par le groupe linguistique néerlandais de la Région
de Bruxelles-Capitale, dix par le Parlement de la Communauté française, huit désignés en son sein par
le Parlement de la Région wallonne, deux désignés en son sein par le groupe linguistique français de la
Région de Bruxelles-Capitale et un désigné en son sein par le Parlement de la Communauté
germanophone). Les membres du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale ne peuvent en outre être
ministres de la Communauté française ou de la Communauté flamande, ni membres du Parlement
flamand.
Les membres des parlements des communautés et des régions bénéficient, comme les parlementaires
fédéraux, du régime d’irresponsabilité pénale pour les opinions et les votes émis dans l’exercice de leurs
fonctions, ainsi que de celui de l’inviolabilité personnelle (sauf flagrant délit), c’est-à-dire l’immunité
relative qui peut être levée par leur parlement en cas d’arrestation, de citation ou de renvoi devant la
juridiction compétente (article 120 de la Constitution).

L’affaire « Westphal », du nom de l’ancien député wallon Bernard Westphael, permet d’illustrer les limites
à l’inviolabilité parlementaire en cas de flagrant délit. Cet aspectde l’affaire a notamment été analysé par
Marc Uyttendaele et Marc Verdussen, dans un article dont des extraits sont repris ci-dessous (« Les aspects
constitutionnels de l’affaire Wesphael », Journal des tribunaux, 2014, pp. 401 à 409, notes de bas de pages
omises) :

« Dans la soirée du 31 octobre 2013, Bernard Wesphael, qui loge avec son épouse, Véronique Pirotton, dans
un hôtel d’Ostende, téléphone à la réception pour signaler qu’il a découvert celle-ci inconsciente dans la salle
de bains. Alertés, les services de police arrivent sur-le-champ et constatent le décès de Mme Pirotton. M.
Wesphael est très vite soupçonné de l’avoir assassinée, ce qu’il nie.

À maints égards, les décisions prises dans le cadre de l’affaire Wesphael, tant par les autorités judiciaires
compétentes que par les assemblées parlementaires concernées, sont liées à la Constitution et, plus
particulièrement, aux dispositions constitutionnelles relatives aux immunités parlementaires.

De manière traditionnelle, les immunités parlementaires se déclinent en irresponsabilité, d’une part,


inviolabilité, d’autre part. Il en est ainsi en Belgique comme dans la plupart des États européens. Dans
l’affaire Wesphael, ce sont les règles relatives à l’inviolabilité parlementaire qui ont été mobilisées, puisque
les infractions qui lui sont reprochées, à les supposer établies, ont été commises dans le cadre de la vie privée
du parlementaire.

[…]

M. Wesphael a été privé de sa liberté le 31 octobre 2013, à 23 h 05, et placé sous mandat d’arrêt par le juge
d’instruction de Bruges le 1er novembre 2013. Aucune autorisation préalable n’a été sollicitée du Parlement
de la Région wallonne et du Parlement de la Communauté française. S’agit-il là d’une entorse à la Constitution
?

L’article 59, alinéa 1er, de la Constitution prévoit que, pendant la durée d’une session parlementaire, aucun
parlementaire ne peut être ni arrêté, ni renvoyé devant une juridiction pénale qu’avec l’autorisation de
l’assemblée dont il fait partie. Il s’agit de ce qu’on appelle communément la « levée de l’immunité

126
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

parlementaire ». À l’obligation de solliciter la levée de l’immunité parlementaire, il y a une exception, prévue


par le même
Article 59, alinéa 1er : le flagrant délit. Cette exception se retrouve dans de nombreuses Constitutions

européennes.[…]

Si l’on veut bien ne pas se départir de la dimension constitutionnelle de la notion de flagrant délit, on peut
affirmer qu’il y a flagrant délit lorsque la personne suspectée soit est surprise en train de commettre
l’infraction, soit est découverte juste après la commission de l’infraction, mais, dans ce cas, à la condition que
soient constatés des indices démontrant sa participation à l’infraction. Cette dernière condition doit être
mise en relation avec la justification de l’exception constitutionnelle de flagrant délit. Pourquoi un
parlementaire ne peut-il être arrêté qu’avec l’autorisation de sonassemblée ? Il s’agit d’éviter qu’il fasse
l’objet de poursuites arbitraires de la part des autorités judiciaires, ce qui serait un affront au principe de la
séparation des pouvoirs, mais aussi, et surtout, à la démocratie parlementaire. L’exception de flagrant délit
se comprend par rapport à cela : dès le moment où la participation du parlementaire à la commission de
l’infraction est évidente, il n’y a plus lieu de craindre un risque d’arbitraire de la part des autorités judiciaires
et l’obligation de solliciter la levée de l’immunité parlementaire ne s’impose plus. Dans ce cas, « sa
responsabilité est avérée, car évidente, et on ne peut soupçonner l’éventualité d’une machination dans le but
de discréditer le parlementaire ». On le voit, c’est le fondement même de l’inviolabilité parlementaire qui, en
droit constitutionnel, « suppose que la notion de flagrant délit soitlimitée au cas où l’évidence de l’infraction
se juxtapose à son immédiateté ».

Dans le cadre de l’arrestation de M. Wesphael, il est permis de douter qu’au moment où ce dernier a fait
l’objet d’un mandat d’arrêt, les autorités judiciaires avaient suffisamment d’indices permettant de
démontrer avec certitude qu’il était pénalement impliqué dans le décès de son épouse. D’une part, l’intéressé
niait — et nie toujours — toute implication directe. D’autre part, à ce moment-là, l’autopsie et les examens
toxicologiques n’avaient pas encore été réalisés.
Dans un cas comme celui-là, l’enjeu du débat — le respect de la séparation des pouvoirs et de la démocratie
parlementaire — doit inciter tout organe judiciaire à faire preuve de la plus grande circonspection. Si le
moindre doute subsiste sur la responsabilité pénale du parlementaire, la prudence requiert du ministère
public qu’il adresse à l’assemblée parlementaire compétente une demande de levée d’immunité ».

Débat sur la question du flagrant délit, n’aurait-il pas fallu demander l’autorisation préalable du
parlement de la communauté française, du parlement wallon avant de l’arrêter et de le renvoyer devant
la cour d’assise ? (Règle de l’immunité parlementaire qui protège l’institution, l’idée est de garantir qu’il
n’y ait pas de poursuites arbitraires contre le député, mais aussi que l’organisation parlementaire ne
soit pas troublée de manière trop importante par la procédure pénale en cours, c’est la raison pour
laquelle chaque parlement doit donner son organisation)

§ 3. Les fonctions des parlements de communauté et de région

I. La fonction législative

Il y a quelque audace à utiliser l’expression de « fonction législative » ou de « pouvoirlégislatif » à


propos des communautés et des régions. En toute rigueur, l’article 36 de la Constitution ne confère ce
pouvoir qu’au Roi et aux deux assemblées fédérales. On s’autorise toutefois l’usage de cette expression
pour les décrets et les ordonnances en raison du statut juridique de ces normes, qui ont force de loi ou
qui ont en tout cas la capacité d’abroger, modifier, compléter ou remplacer des lois.

127
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

A. Les organes du pouvoir législatif des communautés et des régions

De même que le pouvoir législatif fédéral s’accomplit par les deux chambres et le Roi, par ailleurs
titulaire du pouvoir exécutif fédéral, de même les assemblées et l’organe de leur pouvoir exécutif ont-t-
ils reçu la compétence d’adopter les normes à caractère législatif des communautés et des régions. Ces
organes sont plus précisément les suivants :

Pour les trois communautés et les trois régions : leur Parlement et leur Gouvernement

Pour la Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale : son Assemblée et


son Collège

Pour la Commission communautaire commune de la Région de Bruxelles-Capitale : son Assemblée


réunie et son Collège réuni.

Les normes à caractère législatif des communautés et des régions

Les trois communautés, les régions wallonne et flamande et la Commission communautaire française
adoptent des décrets ayant force de loi et se situant donc au niveau de celle-ci dans la hiérarchie des
normes (article 19, §2, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles). Elles peuvent
modifier, abroger, remplacer ou compléter la législation existante, en respectant bien entendu la
répartition matérielle etterritoriale des compétences.

Les chambres législatives fédérales peuvent théoriquement être amenées à exercer un certain contrôle,
limité, sur le processus législatif en vigueur au sein des parlements de communauté. Un dispositif de
protection des minorités idéologiques et philosophique a en effet été instauré, appelé « sonnette
d’alarme communautaire », qui permet à unquart des membres d’un parlement de communauté de «
déclarer que les dispositions d’un projet ou d’une proposition de décret qu’elle désigne [...] contiennent
unediscrimination pour des raisons idéologiques et philosophiques ». Une pareille motion suspend la
procédure parlementaire et saisit les chambres fédérales qui, après qu’il a été statué sur la recevabilité
de la motion, statuent quant au fond. L’examen des dispositionsdésignées par la motion ne peut être
repris par le parlement communautaire concerné qu’après que chacune des chambres législatives
fédérales a déclaré la motion non fondée (articles 4 à 6 de la loi du 3 juillet 1971 relative à la répartition
des membres des Chambres législatives en groupes linguistiques et portant diverses dispositions
relatives aux conseils culturels pour la communauté culturelle française et pour la communauté
culturelle néerlandaise).

La Région de Bruxelles-Capitale et sa Commission communautaire commune adoptent des ordonnances.


À la différence des décrets, aucun texte ne leur confère une « force de loi », mais, comme les décrets, ils
peuvent modifier, abroger, remplacer ou compléter la loi (article 7 de la loi spéciale du 12 janvier 1989
relative aux institutions bruxelloises).

Ces ordonnances sont également soumises à des contrôles que ne connaissent ni les décrets ni les lois :

1°) Dans les domaines de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme et des transports, le Roi, par
arrêté délibéré en Conseil des ministres, et la Chambre des représentants, par une motion votée par une
majorité au sein de chacun des deux groupes linguistiques, peuvent respectivement suspendre et
annuler les ordonnances lorsque la fonction de capitale et le rôle international de Bruxelles sont en
cause ; un comité de coopération est constitué pour favoriser la concertation (article 45 de la loi spéciale
du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises).

128
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

2°) Les juridictions peuvent refuser l’application d’une ordonnance si elle est contraire à la Constitution
et à la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises ; ils ne peuvent toutefois
contrôler le respect des dispositions constitutionnelles et législatives relevant de la compétence de la
Cour constitutionnelle, soit actuellement le titre II et les articles 170, 172 et 191 de la Constitution, ainsi
que les règles de répartition de compétence entre l’État, les communautés et les régions et la loyauté
fédérale (article 9 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises).

La doctrine dominante place les ordonnances à un niveau légèrement inférieur à celui de la loi, en raison
précisément de ces contrôles, mais leur reconnaît une valeur quasi législative. Certains auteurs les
placent au niveau des arrêtés royaux de pouvoirs spéciaux, qui, eux aussi, peuvent être contrôlés par les
juridictions quant à leur conformité à la Constitution et à la loi d’habilitation. Ce statut particulier des
ordonnance bruxelloises s’explique par les difficultés politiques qui ont entouré la création de la Région
bruxelloise et les réticences des partis politiques flamands à reconnaître cette région comme une entité
fédérée à part entière, au même titre que la Communauté flamande ou la Région wallonne, notamment.

C. La procédure d’adoption des décrets et des ordonnances

Les décrets et les ordonnances sont adoptés selon une procédure très largement comparable, mutatis
mutandis, à celle qui régit l’élaboration des lois, mais avec une différence essentielle due au
monocaméralisme en vigueur au sein de chaque communauté et de chaque région : une fois voté par le
Parlement, le groupe linguistique ou l’Assemblée réunie, le projet n’est évidemment pas transmis à
l’autre assemblée, mais bien au gouvernement de communauté ou de région ou Collège ou Collège réuni,
qui sanctionne et promulgue.

Les autres différences sont dues aux spécificités institutionnelles des entités fédérées :

- Les projets sont déposés par le Gouvernement, le Collège ou le Collège réuni de Communauté ou
de Région, et non par le Roi ;

- Après l’adoption par l’assemblée délibérative, c’est également ce Gouvernement, ce Collège ou ce


Collège réuni, qui sanctionne et promulgue le décret ou l’ordonnance ;

- Le ministre de la Justice n’appose pas le sceau de l’État.

Pour le surplus, la procédure est comparable en ce qui concerne l’initiative, l’avis de la section de
législation du Conseil d’État, l’étude en commission, l’adoption en séance plénière, la sanction, la
promulgation, la date, la publication au Moniteur belge et l’entréeen vigueur.

II. La fonction constitutive autonome

Dans un certain nombre de domaines, encore limité, les entités fédérées peuvent régler, par des décrets
ou des ordonnances adoptés à la majorité des deux-tiers (à Bruxelles, pour rappel, une majorité dans
chaque groupe linguistique est également exigée), certains aspects de l’organisation et des compétences
de leurs organes. Ces matières ont été exposées plus haut.

Ces espaces d’autonomie constitutive de ces communautés et de ces régions ne peuvent en aucune
manière être assimilés à un pouvoir constituant autonome, qui implique une plénitude de compétence
qui n’est pas accordée aux entités fédérées sur ce plan, ni quantitativement, ni qualitativement.

129
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

III. La fonction de contrôle politique

Les parlements contrôlent l’action des gouvernements communautaires et régionaux dans des
conditions comparables à celles de la mise en œuvre de la responsabilité des ministres fédéraux par la
Chambre des représentants.

Le vote de confiance à l’égard de ces gouvernements lors de leur constitution est remplacé par l’élection
de ces derniers par les parlements eux-mêmes, comme on le verra, en sorte que le vote de confiance
n’est pas nécessaire lors de cette constitution. Ce vote peut toutefois intervenir ultérieurement, pour
permettre notamment au gouvernement de se faire confirmer la confiance d’une majorité. Notons
toutefois qu’à la Région de Bruxelles-Capitale, ce sont les groupes linguistiques qui élisent les membres
de chaque branche linguistique du Gouvernement (ou qui sont impliqués dans cette élection) et qui
mettent en œuvre la responsabilité ministérielle à leur égard 42 ; ces actes lient tant le Parlement que
l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune.

Les motions de méfiance, quant à elles, ne sont recevables que si elles comprennent la présentation d’un
successeur au ministre concerné ; cette technique concourt à la stabilité du pouvoir exécutif, appelée
aussi « le gouvernement de législature ».

Particularité : parlement des régions et communauté ne peuvent forcer le gouvernement à démissionner


que pour autant que la motion de méfiance soit constructive, dans un autre cas, le gouvernement n’est
pas obligé de démissionner ! motion de méfiance doit être constructive pour pouvoir aboutir au niveau
des parlements des communautés et des régions

IV. La fonction budgétaire, comptable et de vote de l’impôt

Les communautés et les régions disposent de compétences fiscales et leurs dépenses sont régies par les
règles budgétaires et comptables applicables à l’État.

SECTION 3 : LE POUVOIR EXECUTIF DES COMMUNAUTES ET DES REGIONS

I. Les organes du pouvoir exécutif des communautés et des régions

Comme pour leurs pouvoirs législatifs, le régime juridique des organes du pouvoir exécutif des
communautés et des régions est dans une large mesure déterminée, selon les cas, par la loi spéciale du
8 août 1980 de réformes institutionnelles, par la loi du 31 décembre 1983 de réformes institutionnelles
pour la Communauté germanophone et par la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions
bruxelloises.

Élections et non nomination

L’exécution des décrets et des ordonnances est assurée par le gouvernement de chaque communauté
ou de chaque région, élu par chaque parlement et responsable devant lui. Le nombre de ministres,
membres de ces gouvernements, est actuellement fixé par la loi (mais ce nombre peut être modifié par

42Afin d’éviter qu’un parti liberticide comprenant au moins la moitié des membres du Groupe linguistique flamand ne bloque
toute possibilité de nommer les ministres et les secrétaires d’État bruxellois flamands ou la procédure de méfiance constructive,
des mécanismes ont été prévus pour permettre dans ces cas que le groupe linguistique flamand soit étendu à d’autres
personnes, choisies en fonction des équilibres politiques au Parlement flamand, dans lequel le poids de ce parti politique est
censé être moins important

130
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

les entités fédérées, sauf en Région de Bruxelles- Capitale), qui garantit en outre la présence d’un
ministre bruxellois au sein de chacun des gouvernements des communautés française et flamande. À
l’exception du président, les membres des gouvernements des entités fédérées ne prêtent pas serment
entre les mains du Roi. Ils prêtent tous serment entre celles du président du parlement qui les a élus.
Là où les membres du gouvernement fédéral sont nommés par le roi, les membres des parlements
des communautés et régions sont élus par leurs assemblées respectives (NB pour BX, 5 ministres =
1 président, 2 francophones et 2 néerlandophones) les ministres francophones sont élus par les
72 francophones, et les ministres néerlandophones sont élus par les 17 NL. Ministres prêtent
serment entre les mains du président des parlements.

Décisions prises de manière collégiale

Les gouvernements des communautés et des régions délibèrent de manière collégiale, selon la règle
de consensus comparable à celui qui prévaut au sein du Conseil des ministres, sans préjudice des
délégations internes qu’ils organisent.

Ils ne peuvent être invités à démissionner, individuellement ou collectivement, par la suite de l’adoption
d’une motion de méfiance par le parlement que si cette motionprésente un successeur aux personnes
pour lesquelles la motion est présentée. Ce système, dit de la méfiance constructive, vise à encourager
la stabilité gouvernementale, mais n’empêche pas les démissions spontanées.

Les particularités suivantes peuvent être énoncées pour la Région de Bruxelles- Capitale :

Le nombre de membres du Gouvernement est différent de celui des autres gouvernements et sa


composition tient compte des équilibres politico-linguistiques à Bruxelles : outre son président,
actuellement francophone, il a deux ministres et deux secrétaires d’État francophones et deux
ministres et un secrétaire d’État néerlandophones

Les membres du Gouvernement ne sont responsables que devant leur groupe linguistique, sauf le
président, responsable devant le Parlement.

Pour exécuter les règlements unis communautaires des groupes linguistiques, leurs ministres
forment le Collège. Les groupes linguistiques, dénommés alors « assemblées », et les collèges
forment les Commissions communautaires française ou flamande. Ces Commissions ont également
des compétences réglementaires, soit autonomes en qualité de pouvoirs organisateurs, soit
déléguées par les parlements des communautés. Lesmembres bruxellois des gouvernements des
Communautés française et flamande assistent, avec une voix consultative, aux séances du Collège
relevant de leur Communauté et, ensemble, aux séances du Collège réuni.

Majorités différentes au gouvernement bruxellois

Partis politiques au gouvernement bruxellois (parti socialiste, écolos, MR n’est pas au gouvernement
bruxellois, ils sont dans l’opposition, NVA non plus, CDNV pas au gouvernement à Bruxelles, Open VLD
est au gouvernement) coté FR : PS, Défi, Ecolo (libéraux flamands n’y sont pas) Coté FR : Open VLD,
Groen, Parti socialiste flamand

Asymétrie dans chaque groupe linguistique au parlement bruxellois, les négociations se font un
peu séparément, chaque groupe linguistique élit ses ministres qui forment ses gouvernements
= logique un peu spéciale, et les ministres sont responsables uniquement devant LEUR groupe
linguistique

Du coté NL, les libéraux flamands sont au gouvernement, du côté FR les libéraux flamands n’y

131
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

sont pas

Importance d’avoir suffisamment de néerlandophones au sein du parlement bruxellois ! s’il y a


trop peu de députés, risque de blocage politiques serait trop important. Peu de député flamand,
possibilité plus grande que par exemple le vlaams belang et la NVA obtiennent une majorité des
sièges au sein du groupe linguistique flamand, et si c’est le cas, ça veut dire que l’aile flamande
du gouvernement BX pourrait bloquer le fonctionnement des institutions bruxelloise pour
réduire le risque de ce type de blocage, on a étendu le pool des députés flamands pour avoir une
répartition des différentes forces politiques !

II. Le statut des ministres communautaires et régionaux

Le statut des ministres communautaires et régionaux est très comparable à celui des ministres fédéraux.

On a vu plus haut dans quelles conditions s’exerçait leur responsabilité politique.

Le régime de la responsabilité civile et pénale des ministres communautaires et régionaux est, mutatis
mutandis, identique à celui des ministres du Roi. Il n’existe pas d’incompatibilité entre les qualités de
membres de gouvernement d’une communauté et d’une région. Ceci explique que les ministres du
Gouvernement de la Communauté française sont souvent également ministres du Gouvernement wallon
ou du Gouvernement bruxellois (système dit de la « double casquette »).

III. Les fonctions du pouvoir exécutif des communautés et des régions

Le pouvoir exécutif régional et communautaire exerce, de manière générale, les mêmes fonctions, à leur
échelle et, bien entendu, dans les limites des compétences des entités concernées, que le pouvoir
exécutif fédéral à son niveau (promulgation des décrets et ordonnances, exécution de ces derniers,
direction de l’administration, etc.). Il est renvoyé à l’exposé fait sur ce point au sujet du pouvoir exécutif
fédéral.

Il faut toutefois observer que la règle de la collégialité est expressément prévue pour les gouvernements
communautaires et régionaux, ce qui signifie que le pouvoir exécutif est détenu par chacun des
gouvernements agissant en principe de manière collective (délibérant par consensus), sous réserve
de la possibilité de conférer des délégations aux ministres. En pratique, cela n’est pas
fondamentalement différent de ce qui s’observe au niveau fédéral, où, certes, il suffit d’un ministre pour
contresigner les arrêtés royaux mais où les arrêtés royaux les plus importants sont également délibérés
en Conseil des ministres – parfois la loi habilitant le Roi à exécuter une loi l’exige d’ailleurs expressément
– et où des subdélégations sont également accordées, sur des points de détail en principe, aux ministres.

Compétences similaires à ceux du roi au niveau fédéral :


Pouvoir d’attribution (législateur communautaires ou régionaux peuvent leur attribuer des
pouvoirs)
Pouvoir d’exécution : la loi spéciale charge les gouvernements des communautés ou régions +
collège d’exécuter leurs lois
Pouvoir d’organisation de leurs services

132
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

- Exécutif fédéral agit dans la sphère de compétence de l’état fédéral, tandis que les gouvernements
ici agissent dans la sphère de compétences des communautés et des régions.
- Attention : : les régions et les communautés peuvent aussi attribuer leurs pouvoirs spéciaux à leurs
gouvernement respectifs. Laisse les gouvernements des communautés ou des régions de modifier
des normes législatives (même pouvoir qu’au niveau fédéral, mais nous sommes dans le champ de
compétences des communautés et des régions)
- NB : la VGC peut agir pour soutenir des initiatives culturelles ou dans la sphère de compétences
communautaires (financer, organisation) et elles peuvent en organiser elle-même, mais elles le
font en tant que pouvoir subordonnée de la communauté française ou de la communauté flamande,
les deux commissions communautaires peuvent faire cela, mais la COCOF peut en plus adopter des
normes législatives alors que la VGC ne peut pas. (Elle n’adopte pas des décrets ou ordonnance
mais elle peut adopter des règlements ou des décisions individuelles

Qui peut adopter des normes législatives à Bruxelles ?


Législateur fédéral
Communauté flamande
Communauté française
Parlement de la région de Bruxelles capitale
COCOF
COCOM

Du côté flamand, c’est plus simple :


La communauté flamande exerce les compétences de la région ((1) état fédéral (2) communauté
flamande)
Coté wallon : région wallonne (compétences régionales + ce qui est personnalisables) +
communauté française (écoles et culture) + état fédéral
Communauté germanophone : communauté germanophone (avec des compétences régionales) +
un peu la région wallonne + état fédéral
Bruxelles : tout le monde est un petit peu compétent… niveau de complexité qui est beaucoup trop
important. Premièrement c’est difficilement intelligible, mais c’est également intenable en termes
de politique publique ;

Qui est compétent en matière d’emploi à Bruxelles ?


Formations professionnelles : communauté française (COCOM, COCOF, Communauté flamande)
Mise à l’emploi = région Bruxelles capitale
Sécurité sociale = état fédéral
Enseignement : communauté française, communauté flamande, + l’état fédéral
Du côté flamand : il n’y a pas ces difficultés, car la communauté exerce les compétences des régions

SECTION 4 : LES CONSULTATIONS POPULAIRES REGIONALES


À l’exclusion des matières relatives aux finances ou au budget ou des matières qui sont réglées à une
majorité des deux tiers des suffrages exprimés (par exemple toutes les matières relevant de l’autonomie
constitutive), les matières exclusivement attribuées aux organes régionaux peuvent faire l’objet d’une

133
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

consultation populaire dans la région concernée, conformément à l’article 39bis de la Constitution.

Ce sont les décrets ou l’ordonnance régionaux qui règlent les modalités et l’organisation de la
consultation populaire à la majorité des deux-tiers des suffrages exprimés, à la condition que la majorité
des membres du parlement concerné se trouve réunie. Dans la Région de Bruxelles-Capitale,
l’ordonnance en la matière doit en outre réunir la majorité dans chaque groupe linguistique. Pour
rappel, la Région wallonne a organisé les modalités des consultations populaires pouvant être
organisées sur les matières la concernant par un décret spécial du 19 juillet 2018.

Comme on l’a également déjà exposé, ces consultations sont soumises au contrôle de la Cour
constitutionnelle.

SECTION 5 : LA FUSION DES ORGANES EN FLANDRE


Le Parlement de la Communauté flamande et le Gouvernement flamand, élu en son sein, exercent non
seulement les compétences communautaires mais aussi les compétences régionales décrites plus haut.
Dans ce dernier cas, leurs membres bruxellois ne participent pas aux délibérations. Cette « fusion » des
organes régionaux et communautaires en Flandre a pu être effectuée sur la base de l’article 137 de la
Constitution, mis en œuvre par l’article 1er de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes
institutionnelles.

134
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

L’organisation institutionnelle de la Région de Bruxelles-Capitale

135
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Exercice de révision :

Question 1 : Glyphosate herbicide contesté (effet négatif sur la santé) quel serait le
législateur compétent pour en interdire l’utilisation par les agriculteurs wallons :

a. Communauté française

b. Région wallonne

c. État fédéral

d. Aucune

Première étape de raisonnement à suivre :

Critère matériel : Quel type de compétence est en jeu ? agriculture. Qui est compétent en
matière d’agriculture ? Les régions. Pourquoi ?

o Loi spéciale, art. 6 (un des blocs des compétences des régions = l’agriculture)

o Pourquoi va-t-on directement à la loi spéciale ? Car l’article 39 de la constitution renvoi à la


loi spécial.

Critère territorial : région wallonne

o Comment est défini le territoire de la région wallonne ? Référence à la notion de provinces.


5 provinces wallonne forment le territoire de la région wallonne.

Si on parlait de commercialisation de glyphosate (normes de produits), ce serait probablement la


compétence de l’état fédéral ! Les communautés sont aussi compétences en médecine préventive.

Question 2 : autorité compétente pour définir le programme scolaire minimum devant être
respecté dans les écoles libres subventionnées d’Anvers ?

a. La région flamande

b. L’état fédéral

c. La communauté flamande

d. Aucune de ces possibilités

Critère matériel : Quel type de compétence est en jeu ? enseignement

o Article 127 de la constitution

Critère territorial : communauté flamande

o On se trouve à Anvers, dans la région linguistique néerlandaise (critère de compétences :


régions linguistiques ! ne pas dire « car on est Flandre » à l’examen, ce ne sera pas juste

136
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Question 3 : quelles sont les autorités compétentes pour définir les conditions dans
lesquelles les maisons de repos peuvent ouvrir et accueillir des personnes âgées dans la
région de Bruxelles capitale ?

a. Communauté française

b. État fédéral

c. COCOF

d. COCOM

e. Communauté flamande

f. Région de Bruxelles capitale

Critère matériel : Quel type de compétence est en jeu ? matière personnalisable

o (Liste à l’article 5 de la loi spéciale du 8 août 80) politique à l’aide sociale (troisième âge)

o Qui est compétent dans les matières personnalisables ? les communautés

Critère territorial : Bruxelles-capitale

A Bruxelles, en matière personnalisables, matières communautaires, qui est compétent ?

o Communauté française ? NON, pour une grande partie des matières personnalisables
transfert à la COCOF !

o État fédéral ? NON, pas de rôle à jouer ici

o COCOF ? OUI, car elle a reçu le transfert de la communauté française, elle sera compétente
vis-à-vis des institutions unilingues en français (maisons de repos francophones)

o COCOM ? OUI, sur toutes les institutions qui ne sont pas unilingues

o Communauté flamande ? OUI, pour les maisons de repos unilingues néerlandophones, et


elle n’a pas transférer sa compétence (contrairement à la communauté flamande)

o Région de BX ? NON, ce n’est pas une matière régionale, BX n’a rien. À faire ici

Question 4 : Autorité compétente pour définir les conditions dans lesquelles les écoles
bilingues peuvent-être créées et subventionnées à Bruxelles ?

a. COCOM

b. État fédéral – OUI

c. Communauté française

d. Région de Bruxelles capitale

137
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

e. Communauté flamande

f. Aucune

Critère matériel : Quel type de compétence est en jeu ? enseignement

o Matière communautaire

o École bilingue = elles ne relèvent pas de la communauté française ou flamande car elles ne
sont pas unilingues, cela exclut les compétences de ces deux institutions

o A Bruxelles dans les matières culturelles ou de l’enseignement, tout ce qui ne relève pas soit
de la communauté française ou flamande, cela relève de l’état fédéral (compétence
résiduelle)

Critère territorial : Bruxelles-capitale

COURS 17

CHAPITRE III :
LA CONCERTATION ET LA COOPERATION –LAPREVENTION ET LE
REGLEMENT DES CONFLITS

§ 1er. Les notions de conflits de compétences et de conflits d’intérêts - le Comité de


concertation

Le fédéralisme belge se caractérise par la coexistence de plusieurs niveaux de pouvoirs, chacun


exerçant ses compétences de manière autonome, exclusive et sur un pied d’égalité avec les autres
entités de l’État belge. Différents dispositifs existent, dans ce contexte, pour prévenir les conflits
de compétences et les conflits d’intérêts entre les différents niveaux de pouvoirs en Belgique.
On précise d’abord que les conflits de compétences sont des conflits juridiques, naissant de la
violation des règles de répartition des compétences entre l’État et les entités fédérées ainsi
qu’entre ces dernières. Ces règles figurent dans la Constitution ou dans des lois prises en vertu
de celle-ci. Ces conflits s’examinent donc essentiellement selon des méthodes à caractère
juridique, par la confrontation de la norme en cause à la règle de référence.
Les conflits d’intérêt naissent, pour leur part, de divergences à caractère plutôt politique, portant
sur les incidences que peut avoir un acte ou une norme sur la politique menée par l’État fédéral
ou une entité fédérée. L’appréciation de ce type de conflit relève normalement d’organes
politiques.
On examine ci-après comment ces différents types de conflits sont résolus en droit belge.Ceux-ci
ont cependant en commun l’intervention d’un acteur dénommé le « comité de concertation »
(articles 31 et suivants de la loi ordinaire du 9 août 1980 de réformes institutionnelles).

138
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Le comité de concertation est un organe exclusivement politique, composé de manière à assurer


à la fois la parité linguistique (c’est-à-dire la représentation des deux communautés de population
principales en Belgique) et une parité entre l’État fédéral et les entités fédérées, selon le
mécanisme suivant.
Six membres (trois francophones et trois néerlandophones) représentent le Gouvernement
fédéral et six autres les gouvernements de communauté et de région. Le Gouvernement
communautaire flamand (exerçant également les compétences de la Région flamande) est
représenté par deux membres (néerlandophones), la Communautéfrançaise et la Région wallonne
sont représentées par un membre chacun (deux francophones) et la Région de Bruxelles-Capitale
est représentée par un ministre francophone et un ministre néerlandophone. Lorsque la
Communauté germanophone est en cause, un représentant du Gouvernement germanophone
participe avec voix délibérative au comité de concertation.
Le Comité de concertation délibère selon la procédure du consensus : la décision qu’il rend doit
résulter de la constatation qu’aucun de ses membres ne s’oppose à la résolution à prendre. Aucun
recours n’est prévu en l’absence de consensus.

Distinction

Distinction entre les questions liées à la répartition des compétences et aux intérêts des conflits.
Il faut distinguer deux cas de figure :

(1) Conflit de compétences (question juridique) : Le conflit entre niveaux de pouvoir nait de
difficultés liées au pouvoir de chacun (un niveau de pouvoir à excéder ces pouvoirs, et un autre
niveau de pouvoir s’en plaint) question qui peut être tranché par les organes habilité à dire le
droit
(2) Conflit d’intérêt (type politique) un niveau de pouvoir n’est pas d’accord avec les décisions prises
par un autre niveau de pouvoir, car elles estiment qu’elle lèse leur intéret
• Bruxelles est compétente pour introduire une norme de bruit en matière d’environnement, mais
la décision ne plait pas du tout à la Flandre, car elle entrave le bon fonctionnement de l’aéroport
de Bruxelles national
Les dispositifs utilisés pour résoudre ce type de conflits

§ 2. La prévention et le règlement des conflits de compétences

Composition

Le CODECO regroupe 6 représentants de l’état fédéral (3 ministres francophones, 3 ministres


néerlandophones), et 6 représentants des entités fédérées (2 pour la communauté flamande, 1
pour la communauté française, 1 pour la région wallonne et 2 pour la région de Bruxelles capitale)

Pas de pouvoir décisionnel, c’est un lieu où se négocient des décisions au sein de différents
niveaux de pouvoir harmoniser leurs décisions logique de consensus aucun des
représentants ne doit s’opposer à une décision prise au CODECO pour que celle-ci puisse être
adoptée

Dans le cadre de la lutte contre la pandémie du covid, c’est au sein du CODECO que sont négociées
les mesures qui sont adoptées par l’état fédéral, mais qui sont négociées systématiquement au
sein du CODECO avec les régions et les communautés. Avant automne 2020, ces concertations

139
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

avaient lieu au sein du conseil national du sécurité, à partir de l’automne 2020, c’est plutôt le
CODECO qui a pris le relai comme instance de concertation des mesures. Pourquoi un tel rôle ?
Parce que les mesures qui sont adoptées pour la pandémie, (adoptées par le ministre de l’Intérieur
(autorité fédérale) au titre de sa compétence en matière de protection de l’ordre public),
seulement, quand l’autorité fédérale prends une décision (fermer les écoles), d’autres niveaux de
pouvoir sont fortement impactés, notamment les communautés puisqu’elles sont compétentes en
matière d’enseignement. Cela a un impact fort. (Mesures en transport publics cela impact les
régions). Il y a donc une nécessité de concertation. (Théâtres fermés cela impact la compétence
des communautés en matière culturelle). Pour éviter que des mesures soient prises qui
impacterait d’autres niveau de pouvoir, on convoque une réunion avec les représentants des
entités fédérées.

Il y a certains CODECO ou il y a eu beaucoup de discussions sur l’enseignement, mais


malheureusement ce n’était pas des ministres de l’enseignement présents au CODECO mais les
ministres présidents, ce qui n’est pas toujours logique, car les décisions prises n’étaient pas
forcément celles attendues par les ministres de l’enseignement.

Une fois que le CODECO fait son communiqué de presse, les arrêtés royaux sont préparés et
doivent encore être formellement adoptés par la ministre compétente (ou par le roi maintenant)
et ce sont dans ces arrêtés royaux préalablement négociées au CODECO que l’on retrouvera les
mesures officielles.

I. La prévention des conflits de compétences

La prévention des conflits de compétences est assurée par le Conseil d’État et éventuellement par
le comité de concertation. (CODECO)

Lorsque, selon l’avis de la section de législation du Conseil d’État, un avant-projet ou une


proposition de loi, de décret ou d’ordonnance ou un amendement ou un projet d’amendement à
un pareil texte excède la compétence de l’État, de la communauté ou de la région, cet avant-projet,
cette proposition ou cet amendement est renvoyé au comité de concertation (article 3, §§3 et 4,
des lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973).

Il est à remarquer que le Conseil d’État a toujours la possibilité d’émettre un avis portant sur le
respect des règles de répartition des compétences puisque, même en cas d’urgence, l’avis de la
section de législation est requis sur cette question.

Le comité de concertation donne dans les quarante jours son avis sur la question de savoir s’il y a
bien un excès de compétence. Si tel est le cas, il demande à l’autorité compétente de corriger
l’avant-projet ou de déposer devant l’assemblée saisie les amendements qui déterminent et qui
font cesser cet excès de compétence.

Il convient de rappeler que le comité de concertation ne statue que par consensus. En l’absence
de consensus, il est paralysé et la procédure législative peut se poursuivre.

La section de législation du Conseil d’état va juger si un excès de compétence à lieu ou non, si oui,
le conseil d’état va renvoyer la décision au CODECO et généralement la procédure législative
s’arrête là.

140
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

II. Le règlement des conflits de compétences

Le règlement des conflits de compétences est confié à la Cour constitutionnelle ou au Conseil


d’État.

Lorsque la norme à laquelle un excès de compétence est imputé est un texte à caractère législatif
(il s’agit alors d’une loi, d’un décret, d’une ordonnance), chaque gouvernement (fédéral ou fédéré)
et chaque président d’assemblée à la demande de deux tiers de ses membres, peut saisir, sans
avoir à justifier d’un intérêt, la Cour constitutionnelle pour qu’elle annule le texte incriminé. Ce
recours en annulation est également ouvert à toute personne physique ou morale, de droit privé
ou de droit public (une commune par exemple), qui doit toutefois justifier alors d’un intérêt à agir.
On l’a déjà exposé. Comme précédemment exposé également, la Cour constitutionnelle peut
également être saisie par toute juridiction par la voie préjudicielle, pour se prononcer sur le
respect par un législateur des règles de répartition des compétences.

Lorsque la norme en cause a un caractère réglementaire, c’est le Conseil d’État qui peut, pour
rappel, être saisi d’un recours en annulation par toute personne physique ou morale justifiant
d’un intérêt. Ce recours doit être introduit dans les soixante jours qui suivent la publication de
l’acte en question.

En tout état de cause, l’ensemble des juridictions a la possibilité, et même l’obligation, de ne pas
appliquer un texte réglementaire si celui-ci est contraire à la loi, au décret, à l’ordonnance ou à
toute autre norme supérieure, comme la Constitution ou une convention internationale
directement applicable, et ce selon le mécanisme de l’exception d’illégalité précédemment
examiné et, notamment, conformément à l’article 159 de la Constitution. En conséquence, si un
règlement invoqué devant une juridiction viole une règle de répartition des compétences, cette
juridiction ne l’appliquera pas dansle cas d’espèce.

§ 3. La prévention et le règlement des conflits d’intérêts

Instituer des lieux au sein desquels les intérêts des différents niveaux de pouvoir peuvent être
négociés CODECO, qui sert à aligner les positions des uns et des autres (pas toujours évident,
majorité politiques différentes selon les niveaux de pouvoir, trouver un accord entre tout le
monde n’est pas toujours facile) NVA est dans l’opposition au niveau fédéral, puisqu’au niveau
fédéral on a le PS, le MR. Il existe des lieux ou les représentants du gouvernement négocient.

I. Les conférences interministérielles (prévention)

Le comité de concertation peut instaurer des organes de rencontre entre les ministres des
différents gouvernements. Ces conférences interministérielles permettent aux autorités
représentées de coordonner leur politique et donnent l’occasion de négocierles accords de
coopération.

Une conférence interministérielle de la politique étrangère est obligatoirement constituée, et ce


afin d’assurer la cohérence des relations extérieures de la Belgique, rendues d’autant plus
nécessaires que les communautés et les régions disposent dupouvoir de conclure des traités
dans les limites de leurs compétences matérielles (article 31bis de la loi ordinaire du 9 août 1980
de réformes institutionnelles).

141
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Signalons en outre que le comité de concertation organise en son sein une concertation annuelle
pour la politique fiscale.

II. Les mécanismes de concertation au sens large (prévention)

Les lois organisant les répartitions des compétences entre l’État, les communautés et les régions
prévoient dans les matières particulières qu’elles définissent divers mécanismesde concertation
au sens large. Dans le sens croissant, on peut énumérer les mécanismes suivants :

L’information ;
L’avis préalable, qui ne lie aucune des deux autorités ;
L’association, qui met davantage les autorités concernées sur un pied d’égalité en vue
d’instaurer entre elles un véritable dialogue et qui peut porter sur l’élaboration d’une règle,
sur la décision elle-même ou sur la gestion ou le contrôle d’un service, d’une institution ou
d’un organisme ;
La concertation, qui vise à ce que les décisions prises en certaines matières le soient dans le
respect des points de vue de chacun
L’accord, qui implique en réalité un véritable partage du pouvoir de décision.

Par exemple, aux termes de l’article 6, § 3bis, 2°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes
institutionnelles, « une concertation associant les gouvernements concernés et l’autorité fédérale
concernée a lieu pour […] (2°) le planning, la fonctionnalité et la compatibilité des réseaux
d’autoroute et des voies hydrauliques ».

Le non-respect de ces formalités est assimilé à la violation d’une règle de répartition des
compétences, en manière telle que la Cour constitutionnelle ou le Conseil d’État, selon que l’acte
en cause a un caractère législatif ou réglementaire, sont compétents pour en constater la violation
(article 30bis de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle et article 14bis des
lois sur le Conseil d’État, coordonnées le 12 janvier 1973).

(Cela peut mener à annulation d’une norme législative par la cour constitutionnelle ou d’un
acte administratif par le conseil d’état)

Avec la sixième réforme de l’État, de 2012-2014, qui a accru les compétences communautaires et
régionales dans des matières nécessitant malgré tout le maintien d’une certaine harmonisation
au niveau fédéral, le nombre de cas a augmenté dans lesquels ces mécanismes de concertation au
sens large sont requis.

III. Le recours au Comité de concertation (les conflits d’intérêts)


(règlement)

Le Comité de concertation, dont les traits principaux de la composition sont exposés plus haut,
peut être saisi selon les deux modalités suivantes (article 32 de la loi ordinaire du 9 août 1980 de
réformes institutionnelles) :

1°) Lorsqu’un projet ou une proposition de texte législatif ou un amendement à un pareil texte est
discuté devant une assemblée législative (fédérale, communautaire ou régionale), une autre

142
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

assemblée peut demander que la procédure soit suspendue en vue d’une concertation. La
demande de suspension doit être adoptée par les trois quarts des voix de l’assemblée.

La procédure est suspendue pendant soixante jours, délai pendant lequel les deux assemblées se
concertent en vue de tenter d’obtenir un consensus entre elles.

Si cette concertation n’a pas abouti, le Sénat est saisi du litige et rend dans les trente jours un avis
motivé au Comité de concertation, lequel dispose de trente jours pour prendre une décision selon
la procédure du consensus.

Si la suspension est demandée par une chambre législative fédérale, le Comité de concertation est
saisi directement, sans passer par l’avis du Sénat, qui risque d’être partial, et il dispose de soixante
jours pour prendre sa décision.

2°) Si l’acte en projet a un caractère réglementaire, c’est un gouvernement (fédéral ou fédéré) qui
peut suspendre de la même manière la procédure en saisissant le Comité de concertation. Celui-
ci rend une décision selon la procédure du consensus dans les soixante jours. Cette procédure
s’applique tant aux projets de décisions qu’aux décisions elles-mêmes ; dans ce dernier cas, la
décision ou son exécution est suspendue pendant ledélai.

Dans tous les cas, le Comité de concertation peut demander à la section de législation du Conseil
d’État de donner un avis motivé dans les huit jours sur le point de savoir si ce conflit d’intérêt ne
recèle pas en réalité un conflit de compétences. Si, selon la réponse du Conseil d’État, tel est le
cas, la procédure devant le Comité de concertation est définitivement clôturée. Il convient en effet
alors de mettre en œuvre les procédures de prévention et de règlement des conflits de
compétences.

Exemple : « survol de Bruxelles : la Flandre va introduire une procédure en conflits d’intérêts »


Possibilité pour une entité fédérée de saisir le comité de concertation lorsqu’elle estime
que les décisions prises par un autre niveau de pouvoir sont de nature à léser ces intérêts
Plus précisément, si on a affaire à un acte législatif (projet ou proposition d’acte législatif)
l’assemblée ou le parlement du niveau de pouvoir qui s’estime lésé, peut par une motion
votée. A une majorité de ¾ , voter une motion en conflit d’intéret, ce qui ouvre une période
dans laquelle les niveaux de pouvoir concernés doivent se concerter dans le but de
chercher un accord (si ce n’est pas possible, le Sénat est amené à rendre un avis, et cet avis
du Sénat est ensuite rendu au CODECO, qui lui au consensus doit essayer de trouver une
solution. Pas de consensus = le niveau de pouvoir compétent peut simplement adopter la
norme qu’il avait prévu d’adopter
Si c’est un gouvernement (projet de décisions gouvernemental ou décision d’un
gouvernement), alors le CODECO peut directement être saisis, en tout cas pour les actes
règlementaires
Pas de consensus = à l’issus de 60 jours, la procédure peut reprendre son cours au sein du
niveau de pouvoir compétent

143
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

§ 4. Les accords de coopération, les décrets, les ordonnances et les arrêtés


conjoints

I. Les accords de coopération

Même si, en théorie pure, les communautés et les régions sont autonomes les unes par rapport
aux autres et par rapport à l’autorité fédérale, il y a nécessairement des zones grises qui justifient
que ces niveaux de pouvoir formalisent leur collaboration. Par exemple, les liens entre
l’enseignement, matière communautaire, la politique de l’emploi, partagée entre les niveaux
fédéral et régional, voire communautaire (au niveau de la Communauté germanophone), et la
formation professionnelle, matièrecommunautaire en Flandre et en Communauté germanophone
mais régionale au niveau de la Région wallonne et de la Commission communautaire française,
appellent des synergies, lesquelles sont mises en œuvre par d’assez nombreux accords de
coopération.Ceux-ci peuvent également être nécessités par des proximités géographiques, par
exemple pour assurer une continuité dans l’entretien des cours d’eau passant d’une région à
l’autre.

La technique des accords de coopération vise donc à assurer une bonne coordination dans des
domaines dans lesquels les politiques de l’État fédéral et des entités fédérées disposent de
pouvoirs complémentaires. Les accords de coopération ne peuvent donner lieu à aucun transfert
de compétences entre les collectivités concernées.

D’une manière générale, l’État fédéral, les communautés et les régions peuvent conclure entre eux
de manière facultative ces accords de coopération, à mettre ensuite en œuvre par l’adoption de
mesures législatives ou réglementaires, qui portent sur la création et la gestion conjointes de
services et institutions communs, sur l’exercice conjoint de compétences propres, ou sur le
développement d’initiatives en commun (article 92bis dela loi spéciale du 8 août 1980 de réformes
institutionnelles). Parfois, les accords de coopération ont un effet direct au sein de chaque niveau
de pouvoir et ne nécessitent même pas de mesure de mise en œuvre.

En outre, dans certains domaines spécialement prévus par la loi, ces accords de coopération
doivent obligatoirement être conclus, notamment dans certains aspects dela politique de l’eau,
des transports, des télécommunications, des relations internationales, etc.

Le respect des accords de coopération est théoriquement assuré par des juridictions de
coopération créées spécialement dans chacun de ces accords, et composé d’arbitresdésignés par
chacune des parties. Ces juridictions ne peuvent toutefois que constater les manquements aux
accords et les sanctionner notamment sur le plan financier, mais leurs sentences ne peuvent avoir
pour effet l’annulation d’une norme, même contraire à un accord. (Elles n’ont jamais été créés)

Les accords de coopération obligatoires ne peuvent être confiés qu’à la seule compétence des
juridictions de coopération, tandis que les accords de coopération facultatifs peuvent, quant à eux,
ne pas prévoir de juridictions de coopération et créer un système de recours aux juridictions
ordinaires. En pratique, aucune juridiction de coopération n’a, à ce jour, jamais été mise sur pied.

Avec la sixième réforme de l’État, de 2012-2014, qui a accru les compétences communautaires et
régionales dans des matières nécessitant malgré tout le maintien d’une certaine harmonisation
au niveau fédéral, le nombre de cas a augmenté dans lesquels les accords de coopération sont

144
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

envisagés, de manière obligatoire ou facultativeselon les matières concernées.

= accords qui sont passés entre communautés, régions et état fédéral, par lequel ces entités
fédérées s’accordent quant à la manière de gérer leurs compétences respectives ou pour gérer un
service commun. Ces accords de coopération sont conclus par les exécutifs et doivent faire l’objet
d’un assentiment par les assemblées législatives compétentes des différents niveaux de pouvoir
concernés. Dans certains cas, ces accords sont obligatoires, parfois ils sont facultatifs. (Domaines
politiques où les compétences sont imbriquées)

II. Les décrets, les ordonnances et les arrêtés conjoints

Un nouvel outil normatif est venu s’ajouter, lors de la sixième réforme de l’État, à ceux dont
disposent les communautés et les régions pour organiser leur collaboration : il s’agit des décrets
conjoints et des arrêtés conjoints (article 92bis/1 de la loi spéciale du8 août 1980 de réformes
institutionnelles).

Ils permettent à ces entités fédérées, plutôt que de conclure un accord de coopération, d’adopter
des décrets et des arrêtés d’exécution au contenu identique, et ce au niveau
Respectivement de leurs pouvoirs législatif et exécutif, selon une procédure comparableà celle
en vigueur pour leurs décrets et leurs arrêtés.

Lorsque la Région de Bruxelles-Capitale ou la Commission communautaire commune sont


concernées et qu’elles souhaitent participer à ce mécanisme, ce sont, au niveau législatif, des
ordonnances au contenu identique à celui des décrets d’autres niveaux de pouvoir qui sont
adoptées (articles 28 et 72 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux Institutions
bruxelloises). Il faut alors que la majorité de chaque groupe linguistique du Parlement bruxellois
ou de l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune marque son accord à
l’ordonnance de ce type, sans que la possibilité, par un deuxième vote, de ne recueillir qu’un tiers
des suffrages au sein des groupeslinguistiques ne soit prévue en cas de blocage, contrairement à
ce qui est possible pour l’adoption des ordonnances de la Commission communautaire commune
et certaines ordonnances de la Région de Bruxelles-Capitale.

= adopter en parallèle la même norme législative, en prévoyant l’existence d’un instrument qui
permet à deux niveaux de pouvoirs d’adopter la même norme législative en parallèle
(ordonnances conjoints) ça existe aussi au niveau exécutif.

CHAPITRE IV : LE FINANCEMENT DES COMMUNAUTES


ET DES REGIONS (pas matière d’examen, lire le syllabus)

145
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

TITRE 3 : LA
DECENTRALISATION
= avant, on parlait des composantes de l’état avec un pouvoir législatif, ici on descend d’un niveau,
on parle d’entités en charge de services publiques, qui relèvent de la sphère administrative au
sens large. On va s’intéresser d’une part aux pouvoir locaux (communes et provinces) et puis on
verra tous ces organismes publics qui existent au niveau de l’état fédéral, des régions et des
communautés, et qui ont été chargés de services particuliers (pas pour en adopter le cadre
législatif, mais pour mettre en œuvre, assurer la gestion de services publics dont le régime est
défini par le pouvoir législatif des régions, communautés ou provinces)

Décentralisation territorial = communes et provinces


Décentralisation par services = autres entités

SECTION 1 : LA DECONCENTRATION, LA DECENTRALISATION TERRITORIALE ET LA


DECENTRALISATION PAR SERVICES

Que l’État soit de type plutôt unitaire ou plutôt fédéral, il est de plus en plus rare qu’il se structure
de manière centralisée. L’existence de spécificités locales est prise en compte.

Un unitarisme absolu paraît en effet impossible : le jacobinisme issu de la Révolution française,


résultant notamment de la fiction de l’omnipotence et de l’infaillibilité de laloi, en a montré les
limites. L’État s’organise en manière telle qu’il soit représenté en ses fonctions principales dans
l’ensemble du territoire, en déléguant l’exercice de ces fonctions à des agents subordonnés à l’État,
qui l’y représentent. Ces mécanismes de déconcentration s’accompagnent du maintien d’un lien
hiérarchique entre l’autorité centrale et les agents déconcentrés et de l’unité de la personne
juridique formant l’État. Les différents bureaux de l’administration du S.P.F. Finances ou les
services de la protection civile du S.P.F. Intérieur, répartis dans l’ensemble du pays, constituent
des exemples d’administrations déconcentrées.

L’existence de particularités locales et la nécessité de rapprocher l’exercice du pouvoir du citoyen


expliquent notamment la survivance ou l’apparition d’un deuxième phénomène, lié pour le
surplus bien souvent à des racines historiques de la démocratie : il s’agit de la décentralisation.

Par ce mécanisme, l’État reconnaît l’existence de personnes morales de droit public autonomes,
dotées de compétences propres, mais exercées le plus souvent sous la tutelle de l’État. La
décentralisation a un caractère territorial lorsqu’il est procédé à un découpage géographique du
pays dont les parties correspondent à ces entités juridiques autonomes. Elle opère par service
lorsque c’est une des fonctions de l’État, de la communauté ou de la région qui donne lieu à une
structure autonome, mais alors sur l’ensemble du territoire ; on parle alors aussi de
décentralisation fonctionnelle.

En Belgique, les communes et les provinces constituent traditionnellement les principales


manifestations de la décentralisation territoriale ; elles constituent l’une des bases de notre
démocratie. En témoigne notamment la place des articles relatifs à cet objet dans notre
Constitution : il est caractéristique de constater qu’en 1831, le titre III de la Constitution (« Des
pouvoirs ») se divisait en quatre chapitres, dont les trois premiers étaient consacrés aux pouvoirs

146
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

législatif, exécutif et judiciaire 43, et dont ledernier portait l’intitulé « Des institutions provinciales
ou communales ». LaConstitution coordonnée du 17 février 1994 maintient ce chapitre dans le
titre III consacré aux pouvoirs, mais il s’agit désormais du chapitre VIII, de nouvelles subdivisions
ayant été intercalées à la suite des diverses révisions constitutionnelles.

Les nombreux types d’organismes d’intérêt public (les « parastataux ») mettent, pour leur part,
en œuvre la décentralisation par service, à des degrés d’autonomie variable.

La décentralisation se distingue essentiellement de la déconcentration par l’autonomie reconnue


aux autorités subordonnées, essentiellement sur le plan de leurs structures, mais aussi en ce qui
concerne l’exercice de leurs compétences : elle se manifeste notamment par l’absence de relation
hiérarchique entre l’autorité centrale et l’administration décentralisée. Un important correctif est
cependant apporté à cette autonomie par l’existence d’une tutelle de l’autorité supérieure,
permettant à celle-ci de faire prévaloir l’intérêt général et le respect de la règle de droit. En
pratique, cela signifieque l’autorité supérieure peut s’opposer aux décisions de l’autorité sous
tutelle lorsque la loi ou l’intérêt général l’exige. Le maintien d’une telle tutelle de l’autorité
supérieure sur les communes et les provinces est, en droit belge, une exigence constitutionnelle
(article 162 de la Constitution).

En 1831, les communes et les provinces sont mises sur le même plan par le constituant que le
pouvoir législatif, exécutif et judiciaire, au niveau de l’organisation constitutionnelle. Contexte
dans lequel historiquement, les pouvoirs locaux (communes et provinces) ont joué un rôle
important

SECTION 2 : LA DECENTRALISATION TERRITORIALE

En Belgique, les principales institutions de la décentralisation territoriale sont les communes et


les provinces, mais il convient d’y ajouter les centres publics d’actionsociale (C.P.A.S.), les zones
de police, les districts ou les secteurs, les zones de secours, les agglomérations et les fédérations
de communes et les intercommunales. On examine ci-après le statut des communes des
provinces et, plus brièvement, celui des autres institutions qui viennent d’être citées. Il existe par
ailleurs d’autres établissements communaux encore, comme les fabriques d’église44, les polders
et les wateringues45.Ceux-ci ne sont pas examinés ici.

§ 1er. Décentralisation territoriale et Constitution

I. L’article 162 de la Constitution

Comme indiqué plus haut, c’est la Constitution elle-même qui consacre l’existence des
provinces et des communes. Elle a entendu soustraire leur statut organique à l’emprise du
pouvoir exécutif en disposant, à l’article 162, alinéa premier, que ces institutions sontréglées
par la loi. Il s’agit donc d’une compétence réservée au législateur, par opposition au pouvoir
exécutif.

43 Respectivement « Des Chambres », « Du Roi et des ministres » et « Du pouvoir judiciaire ».


44 Voy. not. le décret impérial du 30 décembre 1809 concernant les fabriques des églises.
45 Voy. not. la loi du 5 juillet 1956 relative aux wateringues et la loi du 3 juin 1957 relative aux polders.

147
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Depuis le transfert aux régions, en 2001, du droit organique des provinces et des communes
(article 6, § 1, VIII, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles), les décrets
des régions wallonne et flamande et les ordonnances de la Région de Bruxelles-Capitale
supplantent la loi fédérale pour la plupart des aspects de la législation applicables aux pouvoirs
locaux. De nombreux décrets et ordonnances ont d’ailleurs été adoptés, qui s’écartent des règles
figurant auparavant dans la « nouvelle loicommunale », qui était jusque-là la législation fédérale
organique des pouvoirs locaux.

Ceci explique que, d’une région à l’autre, des institutions particulières aient été créées ou que
des institutions comparables, dont la dénomination diffère d’ailleurs parfois,soient organisées
différemment. Ce phénomène risque de s’accroître encore davantage à l’avenir, puisque les
régions ont reçu, depuis 2014, le pouvoir de revoir le principe de la division de leur territoire
en provinces et de créer des « collectivités supra communales » (articles 41 et 162 de la
Constitution). Seules les différences essentielles entre les entitésrégionales seront mentionnées
ci-après.

Pouvoir législatif compétent = la Région


On a affaire à une matière réservée = matière réservée, la disposition date de 1831, matière
réservée à la loi (on ne veut pas que ce soit l’exécutif qui fixent les choix essentiels de la
matière des pouvoirs locaux, on veut que ce soit le législateur qui intervienne ) importance
des pouvoirs locaux donné par la constitution
Cette ordonnance doit respecter les principes mentionnés dans l’article

Nonobstant la régionalisation de principe de la matière, la législation applicable aux pouvoirs


locaux doit en toute hypothèse consacrer les principes suivants, conformément à l’article 162
de la Constitution :

1°) l'élection directe des membres des conseils provinciaux et communaux ;

2°) l'attribution aux conseils provinciaux et communaux de tout ce qui est d'intérêt provincial
et communal, sans préjudice de l'approbation de leurs actes, dans les cas et suivant le mode que
le législateur détermine ;

• (Compétence de principe pour toutes les matières qui relèvent de l’intérêt communal,
les communes et les provinces peuvent se saisir de toutes question dont elles jugent
qu’elles ont affaire à l’intéret communal ou provincial. Il y a des pays dans lequel le
niveau local ne peut agir que lorsque le législateur ou le niveau central l’a autorisée
à le faire. Dans le respect de la loi au sens large, les communes et les provinces ont
une compétence importante puisqu’elle n’est pas définie à priori. Chaque fois que la
matière n’a pas été retirée par le législateur a la compétence des communautés ou
des provinces, elles peuvent s’en saisir pour prendre des initiatives en la matière.
Liberté de principe de se saisir de toute question d’intéret.

3°) la décentralisation d'attributions vers les institutions provinciales et communales ;

4°) la publicité des séances des conseils provinciaux et communaux dans les limites établies par
le législateur ;

5°) la publicité des budgets et des comptes ;

148
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

6°) l'intervention de l'autorité de tutelle ou du pouvoir législatif fédéral, pour empêcher que la
loi ne soit violée ou l'intérêt général blessé.

• Important : cela signifie que même si les communes et les provinces disposent de
compétences importantes, le législateur peut aussi confier des missions
additionnelles a communes et aux provinces, MAIS elles restent soumises dans
l’exercice de leur pouvoir, à une tutelle qui est exercée soit par la région, la
communauté ou l’état fédéral ( tutelle = contrôle exercé par un niveau de pouvoir
supérieur sur les décisions des C&P, afin de s’assurer qu’elles restent dans les
limites de la légalité et qu’elles prennent des décisions compatibles avec l’intéret
général)

Les régions peuvent en outre ajouter à cette liste d’autres principes qu’elles considéreraient
comme « essentiels » et qui pourraient ainsi varier de région à région. Par ailleurs, l’article 6, §
1, VIII, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles pose des limites
complémentaires à la compétence des régions enmatière de pouvoirs locaux. Il est renvoyé au
texte de cette disposition.

Les communes et les provinces peuvent agir à des titres différents. L’état fédéral a confié aux
communes des compétences importantes en matière de maintien de l’ordre (le bourgmestre
peut autoriser des manifestations, c’est une compétence que la commune a reçu du niveau
fédéral) en matière d’académie de musique ou de bibliothèque, les communautés ont confié des
responsabilités aux communes.

Deux fondements d’action :


1) Intéret communal ou provincial
2) Compétence confiée par un niveau de pouvoir supérieur
Toujours prévoir un contrôle de tutelle exercé par le niveau supérieur (légalité +
conforme à l’intéret général)

II. Les notions d’intérêt provincial et d’intérêt communal

En vertu de la Constitution et de la législation organique des communes et des provinces, ces


dernières règlent les matières d’intérêt provincial et communal, outre d’autres compétences
qui leur sont spécialement reconnues par la loi, le décret ou l’ordonnance ; demain peut-être,
les collectivités supra communales devront régler les matières d’intérêt supra communal. Cette
manière de reconnaître des compétences à ces entités consacre leur autonomie de principe
puisque, sous la réserve des contrôles de tutelle, ce sont ces autorités subordonnées qui
apprécient souverainement et à leur initiative quels sont les domaines relevant de l’intérêt
provincial ou communal et dans lesquels, partant, elles peuvent agir d’initiative.

Les provinces et les communes disposent donc de nombre d’autres compétences que celles qui
leur sont expressément attribuées par un niveau de pouvoir supérieur.

Il n’en reste pas moins qu’en vertu du principe plus important encore de la souveraineté

149
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

générale du législateur, celui-ci peut, par une opération de disqualification, considérer que telle
ou telle matière ne relève plus de l’intérêt local, mais tombe directement sous l’appréciation du
législateur en cause, fédéral, régional ou communautaire (selon la compétence concernée). En
ce cas, la commune ou la province ne pourront plus s’en saisir librement.

III. La tutelle exercée sur les pouvoirs locaux

En matière d’ordre public, le contrôle exercé par l’état fédéral est plus fort. Lorsque les communes
et les provinces agissent en étant soumise seulement un contrôle de tutelle (les décisions ne peuvent
être censurées que si elles sont illégales ou contraire à l’intéret général) on dit qu’elles agissent
comme entités décentralisées

Lorsqu’elle agit dans de domaines avec un véritable contrôle hiérarchique de la part d’un niveau de
pouvoir supérieur, elles agissent comme entités déconcentrées

Tutelle ou contrôle hiérarchique (deux types de contrôles)

L’article 162 de la Constitution exige – on l’a vu – l'intervention de l'autorité de tutelleou du


pouvoir législatif fédéral vis-à-vis des pouvoirs locaux, pour empêcher que la loi ne soit violée
ou l'intérêt général blessé. La tutelle peut s’exercer sous diverses formes, mais elle doit toujours
être organisée par le législateur. Il convient de se référer aux différentes législations régionales
pour déterminer plus précisément le régime juridique de la tutelle générale applicable aux
collectivités locales belges46.

Tutelle générale
La tutelle générale (ou tutelle répressive) s’applique en principe à tous les actes des autorités
subordonnées et permet à l’autorité supérieure d’annuler ces actes lorsqu’ils sont contraires aux
normes de droit ou à la conception que se fait cette dernière autorité de l’intérêt général ; la
première est appelée parfois la tutelle de légalité, la seconde la tutelle d’opportunité. Ce contrôle
s’opère en vertu de règles de procédure strictes, relatives par exemple aux délais, qui ménagent
le plus souvent la possibilité de suspendre les actes contrôlés avant leur annulation, mais aussi
la possibilité pour la commune ou la province de confirmer ou justifier l’acte en cause.
Possibilité d’annulation après coup d’une décision qui est prise par une commune ou une
province
Tutelle spéciale

D’autres formes de tutelle sont prévues par le législateur, appelées procédés de tutelle spéciale
(ou tutelle préventive), parce qu’ils ne concernent que des actes limitativement énumérés par la
loi, le décret ou l’ordonnance. Ces procédés consistent principalement en l’approbation,
l’autorisation, l’avis et l’avis conforme.

Tutelle coercitive

46Voy. notamment l’ordonnance du 14 mai 1998 organisant la tutelle administrative sur les communes dela Région de
Bruxelles-Capitale ; les articles L3111 et suivants du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation ; et
les articles 326 et suivants du décret flamand du 22 décembre 2017 sur l'administration locale.

150
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Enfin, dans les cas extrêmes, où l’autorité subordonnée viole la loi et qu’elle fait obstruction au
rétablissement de la légalité, l’autorité supérieure peut exercer une tutelle coercitive (ou tutelle
supplétive) par laquelle elle se substitue à l’administration récalcitrante. La mise en œuvre de ce
type de procédé est exceptionnelle.
Exemple de la commune de Schaerbeek qui avait mis en place des guichets séparés
illégaux (francophones et néerlandophones), un commissaire spécial a été envoyé pour
rétablir l’ordre. Exemple de tutelle coercitive, pour rétablir le contrôle qu’exerce le
niveau central sur le niveau local.

La tutelle a – on l’a exposé – été régionalisée. Les régions règlent l’organisation de la tutelle et ce
sont elles qui l’exercent, sous les réserves suivantes :

Lorsque, dans une matière donnée relevant de la compétence de ces niveaux de pouvoirs, une
loi fédérale ou un décret communautaire, organise des formes de contrôles particuliers,
limités à cette matière, c’est l’autorité fédérale ou communautaire qui est compétente pour
tous les aspects de cette tutelle, dite spécifique47.

Les régions doivent, en ce qui concerne respectivement les communes de Fourons et de


Comines-Warneton, respecter des modalités particulières d’exercice de la tutelle, fondées
principalement sur l’intervention obligatoire d’un collège des gouverneurs, formé
paritairement des dix gouverneurs de province du pays ;

Aucune tutelle ne peut être organisée ni exercée par l’État fédéral ou les régions à l’égard des
décisions disciplinaires dans la police locale.

La tutelle (générale, spéciale ou coercitive) (régionalisée ou réservée à l’État fédéral à titre


d’exception), qui trouve sa source dans la législation organique des provinces et des communes,
est appelée tutelle ordinaire, par opposition à la tutelle spécifique. La tutelle ordinaire est, en
d’autres termes, une tutelle résiduaire ou de droit commun.

Tutelle ordinaire (compétence attribuée aux régions) et tutelle spécifique


En règle, c’est la région qui est compétente pour assurer la tutelle sur les pouvoirs locaux, par
exception si une communauté ou l’état fédéral donne des missions à la commune ou à la province,
il peut également organiser le contrôle que lui-même souhaite exercer sur ces missions on
parle alors de tutelle spécifique

IV. Le dédoublement fonctionnel des pouvoirs locaux

Outre les compétences exercées par les organes des entités décentralisées au titre de leurs
compétences autonomes pour ce qui relève de l’intérêt communal ou de l’intérêt provincial, la
Constitution, la loi, le décret ou l’ordonnance peut leur confier des missionsd’intérêt général. Selon
qu’elles exercent telle ou telle compétence, ces autorités agissentdonc en leur qualité d’organe de
l’entité décentralisée ou de l’autorité centrale, selon un régime de dédoublement fonctionnel.

47 Parexemple, le contrôle des bibliothèques communales relève de la tutelle spécifique des communautés : la matière
des bibliothèques publiques relève en effet de la compétence des communautés.De même, le contrôle des zones de
police, s’agissant des aspects de sécurité publique demeurée fédérale, relève de l’autorité fédérale

151
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Les exemples en sont nombreux. La Constitution elle-même confie par son article 164 la rédaction
des actes de l’état civil et la tenue des registres aux communes. Les lois, les décrets et les
ordonnances confient en outre de nombreuses missions à ces autorités. Par exemple, des
fonctions de police sont confiées au gouverneur de province, au bourgmestre et, dans une mesure
plus limitée, au conseil communal et au collège des bourgmestre et échevins, l’organisation
d’enquêtes publiques préalables à des actes adoptés par les autorités centrales de l’État, des
communautés ou des régions sontconfiées aux communes, etc.

Il est à cet égard significatif que les gouverneurs de province soient nommés par les
gouvernements régionaux en dehors des corps provinciaux ; il est vrai que la plupart de leurs
compétences relèvent de leur qualité de commissaire du Gouvernement auprèsdes provinces.
Les bourgmestres sont eux aussi nommés par les gouvernements régionaux, mais dans l’immense
majorité des cas, il s’agit de l’un des membres du conseil communal, représentant de la majorité
politique au sein de celui-ci. En Région wallonne même, le Gouvernement ne nomme plus les
bourgmestres, dont la désignation résulte du pacte de majorité communal (voy. Plus bas).

Point à retenir :

Déconcentration vs décentralisation

Contrôle hiérarchique vs contrôle de tutelle

Décentralisation territoriale vs par services

Différents types de tutelle (générale, spéciale, coécrive)

Tutelle ordinaire vs tutelle spécifique

Dédoublement fonctionnel (compétences propres vs compétences déléguées

152
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

§2. Les institutions communales et leurs principales attributions

I. Les communes

Les communes forment l’un des berceaux de la démocratie en Belgique. Historiquement, c’est par
l’affranchissement des provinces et des communes que s’est forgée progressivement l’aspiration
à se libérer des structures d’ancien régime et des privilèges, ce qui a conduit à l’affirmation
progressive des valeurs de la démocratie et à la reconnaissance des libertés.

Élément de complexité = les régions ont adopté des règles différentes concernant l’organisation
communale pour leur région respective ; Il y a des différences quant à la manière dont les
communes fonctionnent en Flandre, en Wallonie ou en Bruxelles. Il faut aller voir les législations
régionales qui sont pertinentes selon l’endroit où la commune se trouve. Au niveau des sources
formelles pour travailler sur les communes (Art. 162 de la constitution, Art ; 6 de la loi spéciale
qui définit les compétences des régions en matière communale, et puis les textes spéciaux adoptés
par les communes) pas mal de textes différents qui doivent être consultés pour comprendre le
fonctionnement des communes
A. Le conseil communal

1. L’élection du conseil communal

Le conseil communal est élu tous les six ans, le deuxième dimanche d’octobre. Il se compose de 7
à 55 conseillers, selon le nombre de la population. Il est élu au scrutin proportionnel par les Belges
et les étrangers, ressortissants ou non de l’Union européenne, domiciliés dans la commune.

Cette élection est validée par le collège provincial en Région wallonne et une juridiction
administrative siégeant au niveau provincial en Région flamande, intitulée le « Conseil des
contestations électorales », devant laquelle des réclamations peuvent être introduites. Un recours
de pleine juridiction est ouvert contre la décision de ces juridictions auprès de la section du
contentieux administratif du Conseil d’État.

Au sein de la Région de Bruxelles-Capitale, c’est un « collège juridictionnel » désigné par le


Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, qui statue sur la validité des élections communales,
un recours de pleine juridiction étant également ouvert contre ses décisions auprès de la section
du contentieux administratif du Conseil d’État.

Le conseil communal, en Région flamande et en Région de Bruxelles-Capitale, ne peut être dissout


avant la fin de la législature communale. En Région wallonne, si le collège communal démissionne
en cours de mandature et qu’il n’est pas remplacé par l’effet de l’adoption d’un nouveau pacte de
majorité, le Gouvernement peut, en cas d’échec d’une conciliation, faire procéder à de nouvelles
élections.

Le conseil communal est présidé par le bourgmestre ou, si le conseil communal endécide ainsi,
par un membre du Conseil élu par celui-ci en dehors du collège des bourgmestre et échevins. En
Région flamande, le bourgmestre ne préside pas le Conseil et c’est donc nécessairement un
membre du Conseil élu par ce dernier qui le préside.

2. Les principales attributions du conseil communal

153
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Le conseil communal possède au niveau local la plénitude de compétence et peut dèslors


intervenir chaque fois que la loi, le décret ou l’ordonnance n’a pas attribué un objet à la
compétence d’un autre organe de la commune. En outre, « il délibère sur tout autre objet qui lui
est soumis par l’autorité supérieure », soit par l’État, les communautés ou les régions. Dans la
gestion administrative courante, c’est essentiellement dans le cadre de l’intérêt communal que le
Conseil intervient, spécialement dans les domaines suivants :

(1) Compétence de principe pour tout ce qui touche à l’intéret communal

(2) Il nomme le personnel communal et règle sa discipline, tant par l’élaboration des règles
générales que par son exercice.
(3) Il fixe le budget, adopte les comptes et dispose d’un pouvoir fiscal ; aux termes de l’article
170, § 4, de la Constitution, le législateur fédéral peut intervenir pour limiter ce pouvoir
fiscal.

(4) Il établit les règlements d’administration locale (par exemple, les règlements de
distribution de l’eau).

(5) Il exerce le pouvoir de police, notamment par la voie réglementaire. Aux termes de
l’article 135, § 2, de la nouvelle loi communale, dont le texte reprend très largement des
décrets révolutionnaires français, la police communale est conçue dans le but de
sauvegarder la propreté, la salubrité, la sûreté et la tranquillité dans les rues, lieux et
édifices publics. Le décret du 10 vendémiaire an IV sur la police intérieure des communes
fait par ailleurs peser sur chaque commune une responsabilité des délits commis « à force
ouverte ou par violence » sur son territoire, « par des attroupements ou rassemblements
armés ou non armés ». (Les cafés doivent fermer à minuit, on ne peut pas boire sur la voie
publique, etc.)

Le conseil communal détermine la politique de la commune mais le collège des bourgmestre et


échevins (le collège communal en Région wallonne) dispose d’un important pouvoir d’initiative
en la matière, outre les compétences que la loi, le décret ou l’ordonnance lui reconnaît
directement.

Il a en outre d’importantes compétences dans la formation des autres organes communaux ou


para communaux, comme on le verra dans la suite.

Outre le mécanisme de la responsabilité des membres du collège communal mis sur pieden Région
wallonne (voy. Ci-après), le conseil communal dispose d’un droit de regard surles actes du collège
des bourgmestre et échevins.

B. Le collège des bourgmestre et échevins (ou le collège communal en Région


wallonne)

= exécutif de la commune, c’est lui qui prépare et qui met en œuvre les décisions du conseil
communal, il est composé du bourgmestre et des échevins.

1. La composition, l’élection et la nomination du collège

L’exécutif de la commune est le collège des bourgmestre et échevins. En Région wallonne, il est
appelé le « collège communal ».

154
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Il se compose, outre le bourgmestre nommé, de deux à dix échevins élus par le conseil communal
pour six ans, en principe parmi ses membres, ainsi que du président duConseil de l’aide sociale
(voy. Plus bas) ; toutefois, en Région de Bruxelles-Capitale et dans la région de langue allemande,
le président du Conseil de l’aide sociale ne fait pas partie du collège. Ce nombre de deux à dix
échevins dépend du chiffre de la populationde la commune. On verra plus bas que le bourgmestre
est, quant à lui, nommé par le gouvernement régional en Région de Bruxelles-Capitale et en Région
flamande ; en Région wallonne, le système de nomination est en principe lié à celui du pacte de
majorité (voy. Plus bas).

Élection
L’élection des échevins par le conseil communal se fait au scrutin majoritaire, sauf dans les six
communes de la périphérie bruxelloise et dans les communes de Comines- Warne ton et de
Fourons, dans lesquelles les échevins sont élus directement par la population de manière
proportionnelle.

En Région wallonne, l’élection des échevins se fait sur la base de l’adoption, à haute voix, par
le conseil communal d’un pacte de majorité, conclu entre les groupes politiques désirant
constituer entre eux une majorité apte à diriger la commune en principe pendant les six
années de la législature communale.

Le collège, comme sa dénomination le montre, est un organe collégial, ce qui signifie qu’aucun acte
ne peut être pris par un échevin isolément ; ceci n’empêche toutefois pas qu’il y ait un partage de
compétences entre les membres du collège, mais uniquement pour la préparation et l’exécution
des délibérations de celui-ci.

Dans les régions flamandes et de Bruxelles-Capitale, le collège des bourgmestre et échevins


est élu jusqu’à la fin de la législature communale, en sorte qu’une fois nommés ou élus, leurs
membres exercent leurs fonctions jusqu’au terme de leur mandat, sauf bien entendu s’ils
démissionnent spontanément ou qu’ils ne sont plus dans les conditions pour siéger au sein
du conseil communal (parce qu’ils ont quitté la commune par exemple). Dans ces régions, le
conseil communal peut certes interpeller le collège des bourgmestre et échevins, mais ne peut
le faire démissionner. En Région flamande, il est toutefois possible de ne prévoir la désignation
d’échevins que pour une période limitée, à la condition que leur successeur soit désigné dès le
départ ; il en va de même pour le bourgmestre et le président du conseil communal. En
outre, depuis le 1er janvier 2013, les Conseils communaux de la Région flamande peuvent,
à la majorité de leurs membres, constater « l’in gouvernabilité structurelle de la commune »,
ce qui enclenche une procédure de médiation du gouverneur de province, pouvant être suivie,
en cas d’échec de celle-ci, de la désignation d’un nouveau collège des bourgmestre et échevins
par le Conseil.

En Région wallonne en revanche, un système de responsabilité politique du collègecommunal


devant le Conseil a été instauré, qui permet à ce dernier de renverser le collège ou l’un ou
plusieurs de ses membres, en ce compris le bourgmestre, par le vote d’une motion de méfiance
constructive ; il s’agit d’une motion accompagnée, selon le cas,d’un nouveau pacte de majorité
comprenant une nouvelle liste de membres du collège ou du nom de ceux qui remplacent les
membres concernés ; s’agissant du bourgmestre toutefois, ce sera celui qui, en nombre de voix,
arrive juste après celui qui a été désigné automatiquement par le pacte de majorité qui
occupera cette charge. Cette motion est votée à haute voix. Elle ne peut être adoptée dans les

155
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

dix-huit mois du début de la législature communale, ni pendant l’année qui suit une
précédente motion de méfiance, ni encore après le 30 juin de l’année qui précède celle des
élections. Il ne peut y avoir plus d’adoption de plus de deux motions de méfiance par
mandature.

Dans les trois régions, les membres du collège peuvent être suspendus ou révoqués pour
inconduite notoire ou négligence grave. Il existe en outre des incompatibilités entre certaines
fonctions et celles d’échevin.

Les étrangers peuvent être élus membres du collège communal mais ne peuvent devenir
bourgmestres.

2. Les principales attributions du collège des bourgmestre et échevins ou du collège


communal

(a) Les attributions d’intérêt général du collège des bourgmestre et échevins ou ducollège
communal

La tutelle sur les établissements publics communaux (exemple : les C.P.A.S., les fabriques
d’église)

L’exécution des lois, des décrets, des ordonnances et des règlements généraux ou
provinciaux lorsque cette exécution lui est spécialement confiée.

(b) Les attributions d’intérêt communal :

La préparation et l’exécution des délibérations du conseil communal ;

L’administration des services communaux (exemple : les écoles, les musées) ;

L’attribution des permis d’urbanisme, de bâtir et de lotir ;

La police des spectacles qui permet au collège, « dans des circonstances extraordinaires,
[d’]interdire toute représentation pour assurer le maintien de la tranquillité publique »
(article 130 de la nouvelle loi communale) ; il ne convient pas de confondre cette
compétence de police particulière avec celle, à caractère général, du maintien de l’ordre
public dans les salles de spectacle qui, elle, relève des autres autorités de police, notamment
du conseil communal et du bourgmestre.

Selon l’article 129 de la nouvelle loi communale, il « est chargé du soin d’obvier et de
remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par les insensés etles
furieux laissés en liberté ». Cette compétence doit être mise en œuvre dans le respect de la
loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux, qui
n’autorise le traitement forcé d’un malade mental en milieu hospitalier que surdécision
judiciaire 48.

48Précédemment, le bourgmestre pouvait également colloquer les aliénés ; le texte fondant cette compétence a été
abrogé par un arrêté royal du 25 janvier 1991.

156
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

C. Le bourgmestre

= compétent pour adopter des règlements de police à chaque fois que c’est urgent (le conseil
communal lui adopte des règlements de police au long terme. Le bourgmestre devra faire confirmer
son ordonnance de police à la prochaine réunion du conseil communal). Il peut décider de détruire
un bâtiment qui menacerait de s’effondrer. Lors des inondations, ce sont les bourgmestres qui étaient
en charge d’évacuer leurs communes, ou de décider si les maisons étaient encore habitables ou s’il
fallait les détruire. De la même manière lors de la pandémie de covid, avant que le ministre de
l’Intérieur n’intervienne avec le premier arrêté de confinement, les bourgmestres avaient déjà pris
des mesures pour limiter certains rassemblements ou organiser un certain contrôle des voyageurs
etc.

1. Les modes de désignation du bourgmestre

Dans les régions flamandes et de Bruxelles-Capitale, le bourgmestre est nommé par le


gouvernement régional, en principe parmi les élus communaux sur la proposition de la majorité
d’entre eux. Il doit être de nationalité belge.

Toutefois, lorsque les personnes proposées à la nomination en qualité de bourgmestre par la


majorité du conseil communal de l’une des six communes de la périphérie bruxelloise (Linkebeek,
Rhode-Saint-Genèse, Wemmel, Drogenbos, Crainhem et Wezembeek-Oppem) font l’objet d’un
refus de la part du Gouvernement flamand, un système ingénieux de recours a été mis sur pied
devant l’assemblée générale de lasection du contentieux administratif du Conseil d’État, qui siège
à parité entre magistrats flamands et francophones [avec un mécanisme de voix prépondérante
accordée alternativement au (premier) président francophone et au (premier) président flamand
de cette juridiction], au terme duquel, lorsque l’arrêt « infirme » la décision de refus de
nomination, il emporte la nomination définitive de l’intéressé comme bourgmestre, sans donc que
le Gouvernement flamand puisse encore intervenir. Dans le cas inverse, le refus est définitif et le
Gouvernement doit poursuivre la procédure de nomination.

Dans les mêmes régions flamandes et de Bruxelles-Capitale, le mandat du bourgmestre est


inamovible jusqu’à la fin de la durée de validité du conseil communal, soit six ans.

En Région wallonne, une certaine automaticité a été mise sur pied pour la désignation du
bourgmestre, qui tient compte également de la majorité politique négociée au sein du conseil
communal pour la formation du collège. Est en effet élu de plein droit bourgmestre le conseiller
communal de nationalité belge qui a obtenu, lors des élections communales, le plus de voix de
préférence sur la liste ayant elle-même obtenu le plus de voix parmi les groupes politiques qui
sont parties au pacte de majorité. Toutefois, à titre dérogatoire et exceptionnel, en cas de
démission de l’ensemble des membres du collège communal, un nouveau pacte de majorité doit
être conclu dans les trente jours ; dans ce cas, ce pacte désigne le nouveau bourgmestre,
éventuellement en dehors du conseil communal, sans que la règle de l’automaticité exposée ci-
avant ne soit applicable.

Le bourgmestre peut être renversé, avec le collège communal, par l’adoption d’un nouveau pacte
de majorité ou à la suite de l’adoption d’une motion de méfiance le visant personnellement, auquel
cas lui succédera celui qui, sur la même liste, aura obtenu le plus de voix après lui.

157
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Toujours en Région wallonne, si le bourgmestre est empêché, par exemple parce qu’il est
ministre, il peut déléguer ses fonctions à un autre membre du collège communal, quidoit alors
être de nationalité belge.
Dans toutes les régions, le gouvernement peut suspendre ou même révoquer le bourgmestre
pour inconduite notoire ou négligence grave.

2. Les principales attributions du bourgmestre

a) Les attributions d’intérêt général :

Le bourgmestre exécute les lois, les décrets, les ordonnances et les règlements généraux (de
l’État fédéral, des communautés et des régions) et provinciaux.

Il a la responsabilité de la tenue des registres de l’état civil ; il est ainsi qualifié comme étant
l’officier de l’état civil de la commune. Il peut déléguer cette compétence à un échevin.

b) Les attributions d’intérêt communal :

1°) Il assure la présidence du collège et du conseil communal, sauf en Région flamande, où la


présidence du conseil communal est confiée à un conseiller communal spécialement élu par ses
pairs à cet effet ; en Région de Bruxelles-Capitale et en Région wallonne, les conseils
communaux ont la possibilité d’élire un président, qui remplace alors le bourgmestre dans cette
fonction.

2°) Il est chargé de la signature des règlements, des actes et de la correspondancecommunaux,


dont il assure la publicité prescrite par la loi des actes et règlements.

3°) La compétence principale que le bourgmestre tire de la loi touche à ses pouvoirs de police,
qui peuvent être ainsi systématisés :

(I) Il dispose d’un pouvoir réglementaire en cas d’urgence, ainsi délimité par l’article 134,
§ 1er, de la nouvelle loi communale : « En cas d’émeutes, d’attroupements hostiles, d’atteintes
graves portées à la paix publique ou d’autres événements imprévus, lorsque le moindre retard
pourrait occasionner des dangers et des dommages pour les habitants, le bourgmestre peut
faire des ordonnances de police, à charge d’en donner sur-le-champ communication au conseil,
en y joignant les motifs pour lesquels il a cru devoir se dispenser de recourir au conseil. Ces
ordonnances cesseront immédiatement d’avoir effet si elles ne sont pas confirmées par le
conseil à sa plus prochaine réunion ». Comme les circonstances ici visées relèvent presque
toujours de l’urgence, ce pouvoir du bourgmestre est particulièrement important dans la
pratique. Le simple risque d’événements graves suffit, tel que ces événements sont qualifiés par
la loi. Le conseil communal, à qui la communication est faite de l’adoption des règlements du
bourgmestre, n’a aucun pouvoir d’annulation de ces ordonnances ; il ne dispose que du choix
de confirmer ou de ne pas confirmer pour l’avenir.
(II) Le bourgmestre exécute les lois et les règlements de police, en ce compris les mesures
individuelles d’interdiction prises en exécution des lois confiant d’une manière générale aux
autorités communales la propreté, la salubrité, la sûreté et la tranquillité publiques (art. 135, §
2, de la nouvelle loi communale ; voy. Plus haut). C’est en vertu de cette législation que le
bourgmestre peut ordonner la démolition d’un immeuble menaçant ruine ou qu’il peut décréter
l’in habitabilité des immeubles insalubres et des taudis, ou encore en prescrire l’évacuation ; en

158
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

revanche, pour ce qui concerne cette dernière catégorie d’immeubles, comme ils ne portent pas
en eux-mêmes un danger public, il ne peut en prescrire la démolition.

(III) Le bourgmestre peut requérir la police locale, la police fédérale, l’armée, et mêmede
simples particuliers ou des choses (par exemple des véhicules).

Sur les compétences communales en matière de police, il est également renvoyé à l’exposé fait
plus bas sur les zones de police.

Décision de non-nomination dans les communes à facilités suite à la décision de communiquer


uniquement en français : pour les communes concernées, les bourgmestres non nommés
pourraient introduire un recours en annulation contre la décision de non-nomination devant la
section de législation du conseil d’état, et si la section devait annuler le refus de nomination du
gouvernement flamand, ça emportait automatiquement nomination du bourgmestre en
question.

D. Le secrétaire communal, le receveur communal et les chefs de


corps de lapolice locale

1. Le secrétaire communal (le directeur général en Région wallonne)

Le secrétaire communal, dénommé « directeur général » en Région wallonne, premier


fonctionnaire de la commune, est nommé et révoqué par le conseil communal. Il assisteà
toutes les séances des organes communaux, en dresse les procès-verbaux. Il contresigne la
correspondance signée par le bourgmestre et dirige en fait le personnel communal.

2. Le receveur communal (le directeur financier en Région wallonne)

Le receveur communal dénommé « directeur financier » en Région wallonne, est nommé et


révoqué par le conseil communal. Il est chargé d’effectuer les recettes et d’acquitter les
dépenses.

3. Les chefs de corps de la police locale

Les chefs de corps de la police locale sont nommés par le Roi sur une liste de deux personnes
présentées par le conseil communal, à laquelle le bourgmestre peut ajouter une personne. Ils
exercent la hiérarchie sur le corps de police, étant toutefois eux- mêmes subordonnés au
bourgmestre pour l’exécution matérielle des lois et des règlements de police et au procureur
du Roi pour ses fonctions de police judiciaire (voy. Également, plus bas, l’exposé sur les zones
de police).

II. Les organes territoriaux intra communaux (les districts ou les


secteurs)

Afin de modérer les effets centralisateurs excessifs de certaines fusions de communes, l’article 41
de la Constitution autorise la création d’organes territoriaux intra communaux pouvant régler
des matières d’intérêt communal. Ils peuvent être créésdans les communes de plus de 100.000
habitants à l’initiative facultative de leur conseil communal.
Il s’agit des districts, appelés « secteurs » en Région wallonne.

159
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

L’organe représentatif de la population est le conseil de district ou de secteur, dont les membres
sont élus directement le même jour que les élections communales. Il a une compétence
consultative générale pour toutes les matières relatives au district ou au secteur et il peut recevoir
en outre des compétences de décision du conseil communal ; s’il s’agit de compétences
déconcentrées ou des compétences d’exécution émanant d’une autre autorité, celle-ci doit avoir
marqué son accord à cette délégation dans la règle qui confie la compétence à la commune. Le
conseil de district ou de secteur peut aussi être associé à l’exécution des décisions restant de la
compétence du conseil communal, mais nécessitant des mesures relevant de la compétence du
conseil de district.

L’organe d’exécution est le bureau élu par le conseil de district ou de secteur en son sein.Il peut
recevoir en outre des compétences de décision du collège des bourgmestre et échevins ou du
collège communal ; s’il s’agit de compétences déconcentrées ou des compétences d’exécution
émanant d’une autre autorité, celle-ci doit avoir marqué son accord à cette délégation dans la règle
qui confie la compétence à la commune. Le même mécanisme est prévu en ce qui concerne les
compétences du bourgmestre, qui peuvent être déléguées au président du bureau, c’est-à-dire le
premier élu du bureau.

Les compétences en matière de cadre du personnel, de règlement disciplinaire, de budget, de


comptes, de fiscalité et de police ne peuvent pas être déléguées.

Les dispositions relatives aux budgets et aux comptes des communes sont applicables aux districts
et aux secteurs.

Jusqu’à présent, seule la Région flamande a précisé l’organisation et les modes de création des
districts ; la ville d’Anvers a fait usage de la faculté de créer des districts pour la première fois lors
des élections communales du 8 octobre 2000.

III. Les Centres publics d’action sociale (C.P.A.S.)

Il y a un centre public d’action sociale (C.P.A.S.) par commune, dont l’organe principal, le conseil
de l’aide sociale, se compose de neuf à quinze membres selon le chiffre de la population concernée,
élus à la proportionnelle par le conseil communal. Cette élection est validée par la députation
(organe exécutif provincial en Région flamande) ou lecollège provincial agissant en qualité de
juridiction administrative, devant laquelle des réclamations peuvent être introduites ; dans la
région bilingue de Bruxelles-Capitale, c’est le collège juridictionnel qui remplit cet office, comme
il a été exposé plus haut. Un recours de pleine juridiction est ouvert contre la décision de la
députation, du collège provincial ou du collège juridictionnel devant la section du contentieux
administratif du Conseil d’État.

La mission fondamentale des C.P.A.S. est définie par l’article 1er de la loi organique du8 juillet
1976 : « Toute personne a droit à l’aide sociale. Celle-ci a pour but de permettre chacun de mener
une vie conforme à la dignité humaine ». L’article 23, alinéa 3, 2°, dela Constitution a également
consacré le droit à la dignité humaine et le droit à l’aide sociale. Les C.P.A.S. mettent en œuvre
cette mission par diverses modalités d’assistance, dont la principale est l’octroi du revenu
d’intégration. Certains C.P.A.S. ont égalementmis sur pied des hôpitaux publics.

La tutelle sur les C.P.A.S. est exercée par le collège des bourgmestre et échevins ou le collège

160
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

communal, la députation ou le collège provincial, le gouverneur de la province et le gouvernement


de communauté ou, dans la Région de Bruxelles-Capitale, par le Collège de la Commission
communautaire commune.

Rappelons que, dans les régions de langue française et de langue néerlandaise, le président du
conseil de l’aide sociale, est, de droit, membre du collège communal ou du collège des bourgmestre
et échevins.

§ 3. Les zones pluri communales de police

Le territoire national est divisé en zones de police qui regroupent une ou plusieurs communes.
Quand elles en comprennent plusieurs, on les appelle « zones pluri communales de police », dotées
de la personnalité juridique.

Chaque zone dispose d’un corps de police locale, qui remplace l’ancienne police communale. Elle
est dirigée par un chef de corps nommée par le Roi sur la proposition du conseil communal ou du
conseil de police, le bourgmestre ou le collège de police pouvant faire une autre proposition.

Elle remplit les fonctions de police administrative et judiciaire sur son territoire, le cas échéant en
collaboration avec la police fédérale.

Les compétences des organes des zones pluri communales de police sont axées sur l’organisation
et la gestion des services de la police locale et sur la coopération avec la police fédérale et avec les
autorités fédérales chargées de définir la politique en la matière. Pour le surplus, les organes
désignés principalement par les lois provinciale et communale pour assurer le maintien de l’ordre
gardent leurs prérogatives. C’est ainsi que chaque bourgmestre de la zone peut lui donner les
ordres, instructions et directives nécessaires au maintien de l’ordre sur sa commune.

Les compétences du conseil communal en matière d’organisation et de gestion du corps de police


locale, y compris le budget, sont exercées par le conseil de police proportionnellement composé
de conseillers communaux des différentes communes de la zone, outre chacun des bourgmestres.

Les compétences du bourgmestre et du collège des bourgmestre et échevins ou du collège


communal en matière d’organisation et de gestion du corps de police locale sont exercées par le
collège de police constitué des bourgmestres des différentes communes de la zone.

Un conseil zonal de sécurité est installé au sein de chaque zone, au sein duquel est organisée une
concertation entre le bourgmestre, le procureur du Roi, le chef de corps de la police locale et le
directeur coordonnateur administratif de la police fédérale.

§ 4. Les zones de secours

Le territoire national doit être divisé en zones de secours destinées à mettre en œuvre les
compétences communales en matière de sécurité civile. Cette dernière notion est définie comme
suit par la loi du 15 mai 2007 : « l’ensemble des mesures et des moyens civils nécessaires pour
accomplir les missions visées par la présente loi afin de secourir et de protéger en tout temps les
personnes, leurs biens et leur espace de vie ». Elle comprend notamment les services de lutte
contre l’incendie et l’aide médicale urgente.

161
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Au sein de la Région de Bruxelles-Capitale, les fonctions des zones de secours sontexercées par le
Service d’incendie et d’aide médicale urgente (S.I.A.M.U.), organismed'intérêt public créée par la
Région dans le cadre de ses compétences d’agglomération (voy. L’article 5 de la loi spéciale du 12
janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises).

Chaque zone est administrée par un conseil de zone, composé des bourgmestres de chacune des
communes concernées ou de leur représentant, et par un collège de zone, élu à la proportionnelle
par le conseil en son sein, et chargé des fonctions exécutives dela zone. Si la zone de secours est
organisée sous la forme d’une intercommunale, ses structures seront celles applicables à cette
dernière figure juridique.

§ 5. Les fédérations et les agglomérations de communes

En principe, en vertu de la loi du 26 juillet 1971 organisant les agglomérations et les fédérations
de communes, il y a théoriquement cinq agglomérations : Bruxelles, Anvers, Gand, Liège et
Charleroi. En outre, toujours selon cette législation, toute commune peut faire partie d’une
fédération, créée par la loi ou par le Roi selon la situationgéographique de cette fédération.

Dans la pratique, seule l’agglomération bruxelloise a été créée mais, depuis 1989, elle ne
dispose plus d’organes propres : actuellement, ses organes sont ceux de la Région de Bruxelles-
Capitale, soit son Parlement et son Gouvernement, qui jouent respectivement les rôles de
conseil d’agglomération et de collège d’agglomération (article 48 de la loi spéciale du 12 janvier
1989 relative aux institutions bruxelloises).
Ces deux organes de l’Agglomération, dont le rôle peut se comparer, mutatis mutandis, à celui
des conseils communaux et des collèges des bourgmestre et échevins, ne disposent toutefois
que d’un pouvoir réglementaire, comme une sorte de « super-commune ». Ce pouvoir est en
outre limité aux matières suivantes :

La propreté publique (l’enlèvement et le traitement des immondices, le balayage des rues,


places, marchés et parcs publics et le déneigement des voies publiques) ;

Le transport rémunéré des personnes (ex : les taxis) ;

La lutte contre l’incendie

L’aide médicale urgente ;

La distribution d’eau ;

La création d’une voirie d'agglomération par la reprise de voiries communales, ainsi que la
gestion et l’éclairage de celles-ci ;

L’informatique des communes

Les compétences attribuées au gouverneur de province par les lois particulières (ex. : police
et maintien de l’ordre), sauf lorsque ces lois en disposent autrement

Diverses compétences en matière de sécurité (coordination des politiques en la matière,

162
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

observation et enregistrement de la criminalité, plan régional de sécurité et coordination des


politiques de prévention) et de police (tutelle sur les budgets des zones de police,
harmonisation des règlements de police, etc.).

Comme il a été exposé ci-avant, ce sont en principe les organes de la Région de Bruxelles-
Capitale, à savoir respectivement le Parlement et le Gouvernement, qui exercent les
compétences de l’Agglomération.

Toutefois :

(a) Sont exercées par le ministre-président du Gouvernement de la Région de Bruxelles-


Capitale, sauf ce qui est exposé au b), ci-après :

Les compétences que les législations particulières confient au gouverneur de province, par
exemple en matière de police et de maintien de l’ordre ;

La coordination des politiques de sécurité, en ce compris en matière d’observation et


d’enregistrement de la criminalité ;

L’harmonisation des règlements de police ;

(b) Sont exercées par un « haut-fonctionnaire » désigné par le Gouvernement de la Région de


Bruxelles-Capitale sur avis conforme du Gouvernement fédéral, celles des compétences
énumérées au a), ci-avant, exposées ci-après :
Les missions de sécurité civile :
Les plans relatifs aux situations d’urgence ;
Celles des compétences mentionnées au a), ci-avant, que le Gouvernement bruxellois aura
décidé de confier à ce « haut-fonctionnaire » ;

(c) Sont exercés par le Gouvernement régional seul et non par le Parlement régional les
compétences suivantes :

Le plan régional de sécurité ;

La tutelle sur les budgets des zones de police.

Celles de ces compétences d’agglomération qui sont exercées par des autorités politiques de la
Région de Bruxelles-Capitale, à savoir par le Parlement et le Gouvernement régionaux, ne sont
soumises à aucune tutelle. Cela concerne la quasi- totalité des compétences d’agglomération.
Seules les compétences exercées en vertu du point 3, b), ci-avant, qui sont exercées au niveau
administratif, sont soumises à la même tutelle que celle prévue par les lois fédérales qui règlent
ces matières.

§ 6. Les provinces

= compétences provinciales sont exercées à Bruxelles par les institutions de la région. En Flandre
et en Wallonie, il y a des provinces, qu’elles sont les institutions de la province ? Il y en a trois,
comme pour les communes.

Collège provincial

163
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Exécutif provincial

Gouverneur de province

Depuis le premier janvier 1995, il y a en Belgique dix provinces et un territoire


« Extraprovincialisé », correspondant à celui de la Région de Bruxelles-Capitale.

Il est rappelé que les régions wallonne et flamande peuvent, depuis le 1er juillet 2014,
supprimer les provinces et les remplacer par des collectivités supra communales.

Il ne sera question ci-après que des provinces, telles qu’elles subsistent aujourd’hui.

a. Le conseil provincial

Le conseil provincial est l’organe représentatif de la province.

i. L’élection du conseil provincial

Le conseil provincial est élu pour une période de six ans directement par la population en même
temps que les élections communales au scrutin proportionnel. Les droits de vote et d’éligibilité à
l’égard du conseil provincial restent subordonnés à la possession de la nationalité belge.

Le président du conseil provincial est élu par les conseillers provinciaux parmi ses pairs. Il ne fait
pas partie de la députation ou du collège provincial.
Il ne peut y avoir de dissolution anticipée du conseil provincial.

La validité des élections provinciales, en Région wallonne, est appréciée par le conseil provincial
lui-même, à l'instar de ce qui est prévu pour l’élection des assemblées fédérales, régionales et
communautaires. En Région flamande, c’est le Conseil des contestations électorales, juridiction
administrative créée par cette Région, et, sur recours, le Conseil d'État qui apprécient la régularité
des opérations électorales, à l’instar de ce qui est prévu pour les élections communales dans
l'ensemble du pays, s’agissant de la compétence du Conseil d'État.

ii. Les principales attributions du conseil provincial

Le conseil provincial règle toutes les affaires d’intérêt provincial et, dans ce cadre, exerce
notamment les compétences énoncées ci-après :

La nomination et la discipline des agents provinciaux ;

Les budgets et les comptes de la province ;

La création d’établissements publics provinciaux (par exemple des établissements


d’enseignement).

Il dispose d’un pouvoir réglementaire, mais pas sur les objets déjà réglés aux niveaux fédéral,
régional ou communautaire ni sur les objets relevant de l’autonomie communale.

Le conseil provincial est également tenu de délibérer sur tout objet qui lui est soumis par
l’autorité fédérale, la communauté ou la région.

164
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

b. L’exécutif provincial

L’exécutif de la province s’appelle le collège provincial en Région wallonne et la députation en


Région flamande. Dans la suite de l’exposé, ces institutions seront visées de manière générique
par les termes « exécutif provincial ». Les membres des exécutifs provinciaux sont respectivement
des députés provinciaux et des députés.

i. La composition de l’exécutif provincial

L’exécutif provincial se compose de six membres, élus par la majorité du conseil provincial, en
principe parmi les membres de celui-ci. Le gouverneur assiste aux réunions de l’exécutif
provincial, qui en est même le président dans la Région flamande.
En Région wallonne, le collège provincial est élu selon un système de pacte de majorité adopté par
les groupes politiques formant la majorité du conseil provincial, comparableà celui organisé au
niveau communal. Ce pacte de majorité désigne non seulement les membres du collège provincial
mais aussi, parmi ces derniers, le président de ce collège.

Dans la même région, le collège provincial peut être renversé par une motion de méfiance
constructive à l’occasion de l’adoption d’un nouveau pacte de majorité, selon un système parallèle
à celui prévu au sein des communes pour le collège communal.

En Région flamande, les membres de la députation achèvent en principe la législature mais il y est
possible de ne prévoir la désignation de députés que pour une période limitée, à la condition que
leur successeur soit désigné dès le départ. Il y existe aussi un système fondé sur le constat de « l’in
gouvernabilité structurelle » de la province, comparable à celle exposée plus haut en ce qui
concerne les collèges communaux.

ii. Les principales attributions de l’exécutif provincial

L’exécutif provincial occupe une place particulière dans la structure politico- administrative du
pays en ce qu’elle cumule des fonctions normatives, exécutives et juridictionnelles.

1. Les attributions d’intérêt provincial de l’exécutif provincial

L’administration journalière de la province ;

La préparation des budgets et des comptes.

2. Les attributions d’intérêt général de l’exécutif provincial

Des compétences d’avis dans des matières que lui confient des lois, décrets ou des
ordonnances (par exemple, la nomination du bourgmestre en dehors du conseil communal)
;

L’exercice partiel de la tutelle sur les communes ;

La connaissance de recours organisés contre des actes communaux (par exemple : des recours
contre des permis de bâtir) ;

165
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Des fonctions juridictionnelles : la validation des élections communales, des élections des
membres du conseil de l’aide sociale, les secours accordés par les C.P.A.S., le jugement des
comptables communaux, etc.

Il prépare et exécute les décisions du conseil provincial.

c. Le gouverneur de province

i. La nomination du gouverneur

= son rôle c’est d’être un agent central de la communauté au niveau de la province. Le gouverneur
on peut le considérer comme un délégué du niveau central auprès de la province et il a des
responsabilités importantes aussi en matière de protection de l’ordre public. Ce qui explique
pourquoi le gouverneur de la province de liège joue un rôle si important pour les inondations.
Le gouverneur de province est nommé par le gouvernement régional de manière autonome de la
représentation au sein du conseil provincial, sur avis conforme du Conseil des ministres fédéral.
Ceci montre bien le caractère principal de « commissaire du gouvernement » (en réalité de
commissaire des gouvernements) au sein des provinces que revêt la fonction de gouverneur.

ii. Les principales attributions du gouverneur

1. Les attributions d’intérêt général du gouverneur

Il exécute les lois, les décrets, les ordonnances et les règlements généraux (de l’État fédéral,
des communautés et des régions) ;

Il exerce partiellement la tutelle sur les organes provinciaux ;

Il exerce partiellement la tutelle sur les organes communaux ;

Il dispose de compétences importantes dans la matière du maintien de l’ordre :

Il peut disposer de la police ;

Il peut requérir la force armée en cas de rassemblement tumultueux, de sédition ou


d’opposition à l’exécution des lois ;

Il dispose d’un pouvoir réglementaire en matière de police.

2. Les attributions d’intérêt provincial du gouverneur

Les attributions d’intérêt provincial du gouverneur sont limitées principalement à la présidence


de la députation en Région flamande. Il assiste aux réunions du collège provincial en Région
wallonne.

Dans les deux régions, il assiste donc aux réunions du conseil provincial, où il peut demander
d’être entendu.

166
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

d. Les compétences provinciales au sein de la Région de Bruxelles-Capitale

A Bruxelles, les compétences provinciales sont prises en charge par les institutions de la région
de Bruxelles capital.

Il n’existe pas de province pour le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, mais les


compétences normalement dévolues aux provinces pour ce territoire sont exercées par les
organes de cette Région. Les compétences du conseil provincial sont exercées par le Parlement de
la Région de Bruxelles-Capitale ; les compétences de l’exécutif provincial sont exercées par le
Gouvernement de la Région.
Il convient toutefois de réserver les matières communautaires, dans lesquelles les compétences
sont exercées par les organes respectifs de chaque Commission communautaire constituée au sein
de la Région de Bruxelles-Capitale. Ceci ne doit pas être sous-estimé, compte tenu du nombre
important, en fait, de compétences culturelles, d’enseignement et personnalisables, mises en
œuvre au sein des provinces.

Les compétences juridictionnelles de l’exécutif provincial, par exemple en matière électorale


communale, sont exercées par un « collège juridictionnel » spécialement constitué à cet effet, élu
par le Parlement bruxellois.

Comme il n’y a pas de province pour ce territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, iln’y a pas
non plus de gouverneur dans cette Région.

Or, comme il a été observé ci-avant, le rôle du gouverneur dépasse de beaucoup ses fonctions
strictement provinciales : il exécute de nombreuses législations qui lui confient des missions, en
matière notamment de police et de maintien de l’ordre. Afin d’éviter un vide juridique, il fallait
donc dans la Région de Bruxelles-Capitale remplacerle gouverneur par un autre organe.

En principe, les compétences que les législations attribuent au gouverneur, transférées à


l’agglomération bruxelloise, sont exercées par le Ministre-Président de la Région de Bruxelles-
Capitale, en ce compris ses compétences en matière de police et de maintiende l’ordre ; il en va
ainsi sauf lorsque ces législations en disposent autrement.

Dans le cadre de la scission de la province du Brabant, la protection de la minorité flamande au


sein de la Région de Bruxelles-Capitale a été confiée à un vice-gouverneur. Parallèlement, au sein
de la province du Brabant flamand, la protection de la minorité francophone a été confiée à un
gouverneur adjoint.

e. Le collège des gouverneurs de province

La loi dite de pacification du 9 août 1988, adoptée pour tenter de mettre un terme aux importantes
tensions politiques nées du contentieux autour de la nomination de M. José Happart, francophone,
en qualité de bourgmestre de la commune de Fourons, commune « à facilités » située en région
de langue néerlandaise et soumise à la tutelle de la Région flamande, a créé un organe nouveau, le
collège des gouverneurs de province, composé des gouverneurs des dix provinces. Ses
compétences sont limitées à diverses hypothèsesd’exercice de la tutelle spécialement énumérées
par la loi, aux territoires des communes de Fourons et de Comines-Warneton. Il exerce une
compétence d’avis.

167
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Plus-value des provinces n’est pas toujours très claire, c’est quelque chose qui existait lors de l’état
unitaire, entre temps on a créé les régions et les communautés, donc on se pose la question de
savoir si on doit vraiment maintenir ce niveau de pouvoir à côté des communes, des régions et des
communautés.

§ 7. Les intercommunales

Au même titre que les particuliers, l’article 162 de la Constitution autorise les communes à
s’associer avec d’autres communes et toute autre personne de droit public ou de droit privé pour
gérer des matières d’intérêt communal. Lorsque seuls des partenaires publics sont réunis, on
parle d’intercommunale pure ; lorsque des personnes de droit privé sont associées, il est question
d’intercommunales mixtes.

Les organes des intercommunales sont l’assemblée générale, le conseil d’administration et le


collège des commissaires, chargé de la surveillance.

En Région wallonne, la surveillance est organisée par un collège des contrôleurs aux comptes,
composé de membres de l’Institut des réviseurs d’entreprise. Il n’y a pas de collège des
commissaires mais un autre organe constitué au sein du conseil d’administration : le comité de
rémunération.

Dans cette même région, à côté des intercommunales, un décret a encadré les conventions entre
communes et les associations de projet (livre V du Code de la démocratie locale et de la
décentralisation). Ces dernières sont des structures dotées de la personnalité juridique pour
assurer, pour une durée maximale de six ans, la planification, la mise en œuvre et le contrôle d’un
projet communal, le cas échéant avec le concours d’autres personnes de droit public ou privé ;
leur organe est un comité de gestion. La période de six ans dont il vient d’être question peut être
reconduite pour une même période.

Les communes doivent obligatoirement disposer de la majorité des voix au sein des organes des
intercommunales et avoir la présidence des organes de gestion et de contrôle. La matière des
intercommunales a été entièrement régionalisée.

Les intercommunales sont soumises à la tutelle, exercée par les gouvernements régionaux.

§ 8. La communauté métropolitaine de Bruxelles

Depuis 2012, dans le cadre des réformes liées à la scission de la circonscription électorale de
Bruxelles-Hal-Vilvorde, la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles prévoit la
création une « communauté métropolitaine de Bruxelles » en vue d’une concertation en ce qui
concerne les matières régionales qui sont d’importance transrégionale, en particulier la mobilité,
la sécurité routière et les travaux routiers de, vers et autour de Bruxelles.

Les régions sont membres de cette communauté métropolitaine et les représentants de leur
gouvernement y siègeront. Toutes les communes de la Région de Bruxelles-Capitale et des
provinces du Brabant flamand et du Brabant wallon, de même que l’autorité

168
SLAUTSKY Emmanuel Principes généraux de droit constitutionnel et administratif

Fédérale sont membres de droit de la communauté métropolitaine. Les provinces du Brabant


flamand et du Brabant wallon sont libres d’y adhérer.

Les régions doivent conclure un accord de coopération pour fixer les modalités et l'objet de la
concertation au sein de la communauté métropolitaine de Bruxelles. À ce jour, pareil accord n’a
toutefois pas été conclu.

Tout ceci, c’est ce qu’on appelle la décentralisation territoriale : pouvoir locaux, communes,
province

SECTION 3 : LA DECENTRALISATION PAR SERVICES (ou fonctionnelle)

= au niveau tant de l’état fédéral, que des communautés et des régions, les législateurs ont créé
des personnes juridiques distinctes de l’état, de la communauté ou de la région, et les ont chargés
de missions particulières.
Exemple : ONE (au niveau de la communauté française), ONSS, SNCB, BPOST, INAMI (état fédéral)

La décentralisation par services (ou la décentralisation fonctionnelle) résulte de la création, par


la loi, le décret ou l’ordonnance, de personnes juridiques autonomes chargées d’un service public.
Beaucoup d’entre elles sont régies par une loi du 16 mars 1954 relative au contrôle de certains
organismes d’intérêt public. On distinguegénéralement :

1°) les régies personnalisées, placées sous la direction de l’autorité dont elles émanent (ex. : la
Régie des Bâtiments ou l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (A.F.S.C.A.),
gérées toutes deux par le ministre fédéral respectivement compétent ; l’Institut bruxellois pour le
gestion de l’environnement (I.B.G.E.), dirigé par le Ministre bruxellois de l’environnement) ; ce
type d’organisation décentralisée se fait de plus en plus rare, compte tenu d’un mouvement
d’accroissement de l’autonomie de ces services (ex. : la R.T.T., anciennement une régie
personnalisée, a acquis un statut légal d’autonomie sous la dénomination de « Belgacom » -
actuellement Proximus). (SIAMU)

2°) les établissements publics, ayant des organes de direction autonomes, mais placés sous la
tutelle du pouvoir dont ils émanent (ex. : les universités des communautés ; l’Office régional
bruxellois de l’emploi (Actiris), dépendant de la Région de Bruxelles- Capitale ; l’Office national de
l’Emploi (Onem), l’Office national de sécurité sociale (ONSS), relevant tous deux de l’État fédéral
; le Port autonome de Liège, sous la tutelle du Gouvernement wallon, etc.) ; cette formule juridique
permet d’associer par exemple les partenaires sociaux à la gestion de certains services publics,
spécialement dans le domaine de la sécurité sociale (ex. : l’ONSS cité ci-avant), qui composent
alors les organes de gestion sous la tutelle des ministres compétents.

3°) les associations de pouvoirs publics, soit avec d’autres personnes de droit public, soitavec
des personnes de droit privé. Le phénomène des associations de communes, appelées aussi «
intercommunales », relève à la fois de la décentralisation par servicesen raison de leur objet
limité, et de la décentralisation territoriale, en raison des limites géographiques de leur champ
d’action.

4°) les entreprises publiques autonomes, dont l’autonomie élargie est régie par un contrat de
gestion ; par exemple, dans le cadre des compétences fédérales, le Gouvernement fédéral conclut

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pareil contrat de gestion avec Proximus, Intradel (gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire


en Belgique), la S.N.C.B., Bpost, Belgo controlet le Fonds de l’Infrastructure ferroviaire, sur la base
de la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques ; autre
exemple : la Communauté française conclut un contrat de gestion avec la R.T.B.F.

Ces personnes publiques décentralisées peuvent prendre la forme de société commerciale tout en
gardant leur caractère public (ex : les organismes publics de transport et de distribution de gaz et
d’électricité).

Par ailleurs, à côté des organismes issus de la décentralisation par services, il existe également en
droit belge des autorités administratives indépendantes. Il s’agit d’autorités, dotées ou non de la
personnalité juridique, à qui le législateur (en règle) a souhaité reconnaître une marge
d’autonomie incompatible avec la soumission de cette autorité à un contrôle hiérarchique ou de
tutelle et ce, afin principalement de permettre à cette d’autorité d’exercer ses compétences avec
la plus grande objectivité etimpartialité. La Commission de régulation de l’électricité et du gaz
(CREG) ou l’Institut belge des postes et des télécommunications (IBPT) constituent des exemples
de telles autorités.

En principe, les pouvoirs qui peuvent être attribués par le législateur ou délégués par le Roi à des
organismes issus de la décentralisation par services ou, a fortiori, à des autorités administratives
indépendantes sont limités. Pour rappel, en effet, traditionnellement, la section de législation du
Conseil d’État estimait inconstitutionnelle l’attribution d’un pouvoir de décision (du moins, à
portée réglementaire) à une autorité qui n’est pas politiquement responsable devant une
assemblée d’élus. Cette interdiction découle, d’une part, des articles 33, 37 et 108 de la
Constitution, desquels il ressort que le pouvoir exécutif a été constitutionnellement confié au Roi
et non à une tierce autorité (principe de l’unité du pouvoir réglementaire). D’autre part, elle
découle des principes constitutionnels d’attribution des pouvoirs, qui impliquent que ceux-ci ne
peuvent en principe être délégués à des personnes dont les activités échappent aux contrôles des
autorités publiques, l’idée étant que le pouvoir exécutif doit être exercé par des personnes
politiquement responsables devant une assemblée d’élus.

Ces dernières années, la section de législation du Conseil d’État semble cependant vouloir
assouplir cette position traditionnelle, notamment sous l’influence de lajurisprudence de la Cour
constitutionnelle (voy. Par exemple C. const., 18 novembre 2010, n° 130/2010).

Dans la plupart de ses avis récents, la section de législation admet en effet qu’un pouvoir exécutif
limité soit directement attribué par le législateur à une autorité autre que le Roi ou un
Gouvernement. Les avis distinguent généralement selon qu’il s’agit d’une compétence
réglementaire ou d’un pouvoir de décision individuelle.
L’attribution directe d’une parcelle du pouvoir réglementaire est admise à condition 1° que cette
attribution ait une portée limitée, précise et complète et porte sur une matière d’une telle
technicité que cette tierce entité est la mieux placée pour la réglementer et 2° qu’une autorité, qui
est politiquement responsable puisse exercer un contrôle dit suffisant sur l’exercice de cette
compétence réglementaire ; contrôle qui prend en règle la forme du pouvoir d’approuver ou non
la réglementation en question.

En ce qui concerne le pouvoir de décision individuelle, la section de législation est d’avis que « le
caractère suffisant du contrôle doit être apprécié en fonction de l’étendue des pouvoirs qui sont
confiés à l’autorité administrative. Lorsqu’il s’agit d’appliquer à des cas individuels une

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réglementation précise, qui ne laisse que peu de pouvoir discrétionnaire dans le chef de
l’organisme, le pouvoir de contrôle de l’exécutif peut être réduit. Par contre, lorsque l’exercice des
pouvoirs qui sont conférés à cet organisme implique des choix d’opportunité, il s’impose que cette
autorité, qui n’est pas responsable politiquement, soit soumise à un contrôle plus étroit du
Gouvernement »87.

Selon les particularités de chaque espèce, ce contrôle suffisant peut alors prendre des formes
variées, comme la possibilité, pour le destinataire de l’acte, d’introduire un recours administratif
organisé auprès du Gouvernement ou d’un ministre contre les décisions prises en exécution de la
compétence ainsi attribuée directement à une tierce entité, ou l’ouverture au profit du
Gouvernement d’un recours dans l’intérêt de la loi auprès d’une juridiction ou encore la rédaction
d’un rapport d’activités, etc.

Idée de responsabilité politique : contrôle du gouvernement sur les décisions de ces personnes
juridiques (pas dans le cas des autorités administrative indépendantes) être responsable
politiquement devant les élus

Exercice de révision :

Question 1 : dans le cadre de son autonomie constitutive, la communauté flamande peut


décider de supprimer le principe selon lequel 6 élus bruxellois doivent siéger en son sein.
Vrai ou Faux ?

Faux : Comment répondre à cette question si on ne connait pas la réponse de mémoire ?

Quelle est le texte qui va nous permettre de répondre à cette question ?

La loi de réforme institutionnelle du 8 août 80 : disposition qui fait la liste des articles de la loi
qui peut être modifié par les communautés sur la base de leur autonomie constitutive. Dans cette
liste il y a la possibilité pour les communautés de modifier les règles qui s’appliquent aux
parlementaires, mais il y a des limites qui sont prévues, et c’est notamment l’équilibre entre
bruxellois et non-bruxellois au sein du parlement.

Question 2 : Le ministre président de la région wallonne, Elio Di Rupo, pourrait-il décider de


dissoudre anticipativement le parlement wallon ? Oui ou non ?

Non. A la différence des législatures au niveau fédéral,/!\ pas de possibilité de dissolution anticipée
du parlement wallon! (Ni des entités fédérées en général, régions et communautés, cela existe
seulement au niveau fédéral) le gouvernement ne peut pas dissoudre de manière anticipée le
parlement wallon, même en cas de blocage politique, ils siègent pour 5 ans, on ne peut pas appeler
à des élections anticipées. La loi spéciale ne prévoit pas de possibilité de dissolution anticipée.

Question 3 : Par contraste avec ce qui est le cas pour les décrets régionaux, le Roi sanctionne
les ordonnances bruxelloises. Vrai ou faux ?

Faux : Les ordonnances bruxelloises ont des spécificités par rapport aux autres normes des entités
fédérées, mais la sanction par le Roi n’est pas une de ces spécificités. C’est le gouvernement
bruxellois qui sanctionne les ordonnances bruxelloises et ce n’est pas le Roi – il n’y a pas

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d’intervention du Roi dans l’exercice de la fonction législative au niveau des entités fédérées. (Que
ce soit la région de Bruxelles capitale ou les autres entités fédérées)

La manière dont la loi de 80 définit le pouvoir législatif au niveau bruxellois, et si on lit la


disposition on voit qu’il est prévu que c’est le parlement bruxellois, le gouvernement qui exerce le
pouvoir législatif, et le gouvernement sanctionne les ordonnances il faut encore aller voir dans la
loi spéciale.

Question 4 : L’autorité fédérale pourrait confier à la région de Bruxelles-Capitale, par accord


de coopération, la mission de régler l’organisation de l’enseignement bilingue à Bruxelles ?
Oui ou non ?

Non. Un accord de coopération peut être conclu entre différents niveaux de pouvoir pour qu’ils
s’accordent sur la manière de gérer ensemble certains services, ou pour harmoniser, articuler
l’exercice de leur compétences respectives, mais il ne peut jamais induire un transfert de
compétence d’un niveau de pouvoir à un autre ! La constitution et les lois spéciales répartissent les
compétences entre niveaux de pouvoir, un niveau de pouvoir ne peut pas se décharger sur un autre
niveau de pouvoir, de sa compétence par accord de coopération. Ici l’état fédéral est compétent en
matière d’enseignement bilingue à Bruxelles, il ne peut pas conclure un accord avec la région pour
dire à la région qu’ils vont organiser un enseignement bilingue.

Question 5 : La communauté flamande et la communauté française, pourraient-elles confier


à la région de Bruxelles-capitale par accord de coopération la mission de régler
l’organisation d’un enseignement bilingue à Bruxelles ?

Non. Même raisonnement que ci-dessus. Il y a une autorité qui est compétente pour organiser un
enseignement bilingue, et c’est l’état fédéral. Les communautés sont compétentes pour
l’enseignement unilingues, même si elles se mettent ensemble elles ne seront pas compétentes pour
l’enseignement bilingue.

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