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Cours de Psychologie Médicale

A- Généralités

1- Notion de psychologie :
1.1- Définition :

Etymologique la psychologie par définition est la science de l’âme (du grec


“psychè“ qui signifie l’âme et “logos“ discours).

Longtemps restée dans le champ de la philosophie, la psychologie s’est par la


suite libérée des spéculations philosophiques pour s’intéresser moins aux
problèmes des rapports de l’âme et du corps qu’à ceux de la conscience, du
comportement et de l’inconscient.

C’est à partir du XIXème siècle que la psychologie s’est dégagée de la


philosophie, d’abord grâce à la théorie béhavioriste de J.B. Watson comme
science du comportement humain et animal. L’objet de la psychologie est alors
de découvrir des relations entre deux éléments que l’on peut observer : des
éléments de la situation où se trouvent le sujet (le stimulus) et le comportement
qui en résulte (réponse).

Pour Hebb « la psychologie est l’étude des formes plus complexes d’intégration
ou d’organisation du comportement. Ce qui inclut l’étude de processus tels que
l’apprentissage, les émotions et la perception qui participent à l’articulation du
comportement.

Pour P. Daco, « la psychologie est l’étude des phénomènes mentaux quels qu’ils
soient, des faits conscients et inconscients. La psychologie observe tous les
comportements humains, intérieurs et extérieurs et recherche les motifs.

Pour les psychologues soviétiques, la psychologie est une science qui étudie le
psychisme, celui-ci étant compris comme la faculté propre au cerveau de
refléter la réalité objective.

1.2- Domaine d’appartenance de la psychologie :

La psychologie est une science sociale au même titre que l’histoire, la sociologie
ou l’anthropologie. C’est une science dont le but est la compréhension du
comportement et de la pensée des êtres vivants. Elle étudie l’être vivant en tant
Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
Techniques et des Technologies de Bamako (USTTB)
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qu’unité élémentaire, à la différence de la sociologie qui étudie les groupes


sociaux. Il existe deux principaux domaines d’étude de la psychologie qui sont
les comportements psychomoteurs et les fonctions psychologiques (perception,
apprentissage, mémoire, pensée, langage, motivations, émotions).

La psychologie scientifique se fonde sur l’usage de l’outil mathématique. La


description et l’explication scientifique des conduites s’étayent sur un ensemble
de techniques d’étude et de théories.

La psychologie s’intéresse à plusieurs domaines d’intervention, notamment, le


domaine social, du travail, le domaine juridique, développemental, médical, etc.

2- La psychologie médicale :

La psychologie médicale tout comme la psychologie pathologique, est celle


appliquée dans le domaine médical. Cette dernière étudie les mécanismes
impliqués dans la production des pensées et comportements dysfonctionnels, et
diffère de la psychiatrie qui s’intéresse surtout au sujet malade ou troublé. Elle
utilise ses connaissances du sujet sain pour comprendre le fonctionnement du
sujet souffrant.

2.1- Définition :

La psychologie médicale est définie par l’ensemble des problèmes spécifiques


posés par l’exercice de la médecine à savoir la relation soignant- soigné, le
retentissement psychologique dans le cas de maladie à expression somatique et
psychosomatique.

Pour DELAY et PICHOT, (1982) la psychologie médicale « est la psychologie


appliquée aux problèmes posés par la pratique médicale ». Cette définition sous-
entend les problèmes psychologiques qui se posent au médecin dans la pratique
quotidienne de la science médicale.
Pour SIVADON, la psychologie médicale est “l’étude des facteurs émotionnels
pathogènes“.

2.2- Objet d’étude :

La psychologie médicale est en même temps une science et une pratique, qui a
comme objet l’approche des aspects psychologiques personnels et
interpersonnels, en relation avec la maladie, c'est-à-dire cet objet d’étude est

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d’une part la fonction soignante et d’autre part le malade, sa maladie et son


milieu.

Ainsi pour une meilleure compréhension de la psychologie médicale, il existe


plusieurs facteurs psychologiques qui sont essentiels. Ces aspects
psychologiques concernent de nombreux champs de la médecine :

- les facteurs de causalité ou de prédisposition de la maladie, y compris les


facteurs émotionnels pathogènes en particulier des maladies psychosomatiques
(asthme, ulcère etc.), de la pathologie dite « fonctionnelle » (répercussions
somatiques d’un dysfonctionnement psychique).

- Les facteurs relatifs aux réactions et à l’adaptation du malade à la maladie et


aux thérapeutiques (déni, anxiété, dépression etc.), déterminantes pour l’attitude
du patient et l’évolution de la maladie.

- Les facteurs psychologiques de la thérapeutique ou de la psychologie du


malade et du soignant concernant les multiples aspects relationnels : la relation
médecin-malade, les relations du malade et du médecin avec la famille, du
médecin et du malade avec la société (représentations sociales de la santé etc.)

- Les facteurs relatifs à la pratique du médecin, notamment les aspects


particuliers de celle-ci (façons d’examiner, informer, de prescrire, soigner,
d’accompagner) ; la personnalité du médecin est un élément central de sa
pratique.

- Les facteurs psychologiques de la prévention et de la réadaptation se basant


sur une approche médicale globale de l’individu malade intégrant les
composantes biologiques, psychologiques, psychosociales et historiques, par
opposition à une médecine technique d’un organe.

- Les facteurs psychologiques des équipes médicales et des institutions de soins


prenant en compte le pouvoir médical, excessivement sollicité par la société
pour résoudre même des problèmes sortant de son champ de pratique (ex :
enfants surdoués, délinquance etc.).

2.3- Objectifs
Les principaux objectifs de la psychologie médicale sont :

- l’étude de la mentalité de l’homme malade dans différentes conditions


d’existence (milieu ambulatoire et milieu hospitalier)
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- l’étude des particularités de la communication du personnel médical avec le


malade

- l’étude du rôle des facteurs psycho traumatiques dans le déclenchement et le


processus des maladies

- l’étude des moyens psychiques d’action dans un but thérapeutique et


prophylaxique.

2.4- Fondements théoriques et méthodologiques :

a. Fondements théoriques :

La psychologie médicale s’est basée sur les principes théoriques de la


psychologie générale, de la psychobiologie, de la neurobiologie, de l’éthologie,
de la génétique, de la psychophysiologie, etc. Mais, il est à noter que deux
systèmes théoriques ont une importance particulière, notamment :

- la psychanalyse qui a renouvelé la compréhension des maladies


psychosomatiques et qui a surtout permis de réactualiser la relation soignant-
soigné.

- les théories basées sur les ensembles et la communication qui ont permis de
resituer le phénomène de maladie dans un système d’interaction et institutionnel.

b. Méthodes :
La psychologie médicale s’appuie sur différentes méthodes devant être le plus
scientifique possible pour l’approche des données psychologiques. Ces
méthodes en dehors de l’observation et de la méthode des tests qui sont des
méthodes classiques utilisées en psychologie générale sont:

- la méthode expérimentale avec son application physiopathologique et en


thérapie comportementale,

- la méthode clinique dont l’importance est capitale dans l’étude de la relation.

2.5- Les branches :


La psychologie médicale se subdivise en plusieurs branches :

- La psychologie générale de la santé qui étudie d’une part les réactions du


malade dans le milieu et en dehors du milieu hospitalier (ses rapports avec le

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personnel soignant et avec les autres malades) et d’autre part la psychologie du


personnel médical vis-à-vis des malades et vis-à-vis d’eux-mêmes.

- La psychologie spécifique de la santé : c'est-à-dire la psychologie appliquée


aux différentes spécialités médicales.

- La psychoprophylaxie qui étudie les questions de prévention des troubles


psychiques

- La psychothérapie qui étudie l’utilisation planifiée des procédés


psychologiques dans un but thérapeutique

- La psychopathologie qui étudie la mentalité de l’homme à partir de ses


déviations.

2.6- Importance des connaissances psychologiques pour le personnel


soignant :
Les connaissances psychologiques permettent de créer chez le personnel
soignant des dispositions positives nécessaires pour prêter le maximum de
recours aux malades afin de leur préserver contre toute influence néfaste et
d’établir des rapports optimaux avec eux.

L’étude des connaissances psychologiques médicales contribue à la formation


d’un mode de pensée particulier chez ces derniers leur permettant de prendre en
considération non seulement les signes isolés de la maladie mais aussi
d’apercevoir la personnalité entière du malade avec toutes ses particularités. La
maîtrise des connaissances psychologiques permet de juger de façon optimale de
l’état psychique des malades, de l’influence des maladies somatiques sur le
psychisme du malade et des troubles psychiques sur le cours des maladies
somatiques.

Le personnel soignant ainsi imprégné des connaissances psychologiques peut


vite déceler le caractère psychopathologique de la maladie et diriger le malade
vers le spécialiste approprié.

En somme, il faut retenir que le but essentiel de l’enseignement de ce cours est


d’amener le personnel soignant à considérer l’homme dans sa globalité afin de
modifier ses attitudes et comportements vis-à-vis de l’homme malade en tenant
compte des dimensions psychosociales et anthropologiques.

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B. Le malade, sa maladie et son milieu

I- Représentations culturelles, croyances et conceptions de la maladie et


de la santé
1.2- Notions de maladie et de santé :
Toutes les cultures ont des croyances et des représentations de la maladie et de
la santé qui déterminent en grande partie les comportements de santé des usagers
(comportements sains, comportements à risques) et leurs relations avec les
professionnels de la santé. Ces croyances, malgré leurs lacunes et leurs
distorsions, jouent un rôle essentiel, car prédétermineraient l’adoption de styles
de vie sains ou à risques et permettraient aux individus, de croire qu’ils
contrôlent leur état de santé et d’intégrer la maladie, dans leur histoire
personnelle. Ces croyances et représentations qui varient en fonction des
époques et des cultures ont d’abord concerné l’origine des maladies depuis les
temps reculés.
Par exemple en Europe, les discussions sur l’origine des maladies remonteraient
à l’antiquité où s’opposaient déjà deux grands courants :

- Le premier se réfère à une conception ontologique de la maladie, c'est-à-dire


lui conférant une existence autonome. Selon cette conception, la maladie existe
indépendamment de l’organisme qui la supporte et qu’elle vient attaquer de
l’extérieur (conception religieuse de la maladie comme sortilège, envoûtement,
châtiment, etc.). La découverte des microbes par Louis Pasteur vient renforcer
cette conception en lui donnant un caractère scientifique.

- Le deuxième courant considère la maladie comme une réaction de l’organisme


et de l’individu dans leur totalité, à une perturbation de leur équilibre.
Hippocrate et son école ont illustré le mieux cette conception dans l’antiquité.
Dans la pratique médicale, il faut considérer ces deux courants comme
complémentaires.

En Afrique, on observe une très grande variété de pratique et de croyance


concernant la santé et la maladie en fonction des spécificités locales (ethnie,
religion, pays, etc.), qui ont des points communs, comme l’explication
« magique » des maladies et leurs caractères communautaires. Il est fréquent,
chez les peuples africains, d’attribuer la maladie à des esprits malveillants, à une
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intervention divine (ou diabolique), à des forces surnaturelles et aux ancêtres (on
retrouve ces explications dans de nombreuses communautés vivant en Afrique,
en Amazonie et dans le pacifique).
En Afrique, c’est le plus souvent un manque de respect pour les ancêtres qui est
sanctionné par la maladie, le défunt revenant posséder l’un de ses descendants
pour le punir. Mais la maladie peut aussi être attribuée au pouvoir maléfique
d’une personne bien vivante. Dans ce cas, le guérisseur devra identifier l’origine
de cette influence.
Une autre caractéristique des cultures africaines est leur ancrage dans une
communauté. Ainsi la maladie d’une personne n’est pas qu’une affaire
individuelle. L’influence néfaste de certaines forces surnaturelles est censée être
dirigée également vers la famille et vers la communauté du malade. On connaît
assez bien aujourd’hui certaines pratiques thérapeutiques collectives (comme le
N’Doep au Sénégal) où les sacrifices d’animaux et les danses collectives avec
transes sont censés calmer les esprits mauvais et les expulser du corps. Leur
fonction est aussi de prendre en charge collectivement le malade et sa maladie.
Ainsi, le fait de considérer la santé comme une caractéristique individuelle est-il
propre aux cultures occidentales. Dans d’autres cultures, les croyances relatives
à la santé et à la maladie s’intègrent dans des systèmes de croyances
transcendant l’individu (philosophies, religions) : l’état de santé d’une personne
dépend de l’équilibre entre des forces caractérisant des ensembles complexes
(famille, lignée, communauté, nature, cosmos).
En réalité, les croyances relatives à l’origine des maladies et aux pratiques de
soins varient aussi à l’intérieur d’un même pays, en fonction du niveau socio-
culturel des individus notamment, mais aussi de leur appartenance religieuse.
Un faible niveau d’éducation rend plus probable les explications magiques et
externes (chance, destin). Les adeptes de certaines « religions » rejetteront
partiellement ou complètement les soins médicaux, allant parfois jusqu’à mettre
en danger la vie de leurs enfants.
La santé quant à elle, est intimement liée à la maladie. C’est la maladie par ses
effets perturbateurs qui nous obligent à nous poser a posteriori, la question de la
santé. Sans maladie, la santé irait de soi et ne poserait pas de question.

R. Dériche la définit : « la santé c’est la vie dans le silence des organes ».

La santé ne fait pas parler d’elle-même, certes, mais peut-on la confondre pour
autant avec le silence des organes ? Non ! Car un organe peut être malade sans
être bruyant et inversement, les plaintes lors d’une hypochondrie ou des troubles
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fonctionnels font beaucoup de bruits sans que l’organe soit la cause de ces
bruits.

La médecine doit prendre en compte l’homme global en situation dans son


milieu. La santé pour un individu donné sera donc avant tout liée aux idées, a
priori, qu’il se d’elle, idées qui seront elles-mêmes fonction de ses influences
culturelles, de la représentation qu’il se fait de son corps et de son
fonctionnement. C'est-à-dire en fin de compte de l’image idéale qu’il a de lui-
même. La santé fait partie de ses idéaux, de son système de valeurs, qui ne
s’accordent pas nécessairement avec ceux de son médecin et de la science
officielle.

La santé apparaît comme relevant tout autant du système de valeurs que se


donne l’individu ou une société donnée, que d’une normalité biologique.

Les progrès de la médecine sont actuellement beaucoup plus liés à des valeurs
de mieux être et de mieux vivre qu’à des considérations biologiques : lutte
contre le vieillissement, contraception, chirurgie esthétique, thérapeutique du
confort, prévention précoce des perturbations de la relation mère enfant.

1.2- Le normal et le pathologique :


Lorsqu’on parle de normal et de pathologique, on se réfère à des notions
qualitatives et quantitatives et par rapport à un organisme fonctionnant
globalement.

Les références utilisées sont très importantes pour définir la notion de normalité.
La normalité implique la notion de norme qui renvoie à ce qui se tient dans un
juste milieu, (ce qui sert de référence) à ce qui est dans la moyenne. Une norme
n’a de sens que par rapport à un contexte (ex : le chiffre de la tension artérielle).

Ainsi, la notion de normalité a deux sens :

- le premier sens est statistique : ce qui est normal est ce qui s’observe le plus
fréquemment (ex : le QI moyen est fixé à 100)

- le deuxième sens est qualitatif : il fait directement intervenir la position


personnelle de l’observateur. A cet effet, on ne peut donc éviter de considérer le
point de vue personnel des malades et donc des individus. Il est important d’être
conscient de ses références personnelles, du groupe auquel on appartient, de son
milieu, de son époque, chacun intériorisant tout un système de normes.

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En clinique, un état est considéré comme normal, s’il est approprié à un individu
donné, avec ses caractéristiques et ses buts (ex : le rythme cardiaque est plus
rapide chez un jeune, en altitude, à l’effort).

Le contexte prend une valeur encore plus grande dès qu’on apprécie des
phénomènes pathologiques. La pathologie naît d’une diminution des capacités
d’adaptation et de création, l’état pathologique devient alors une modification
quantitative de l’état normal. L’évaluation clinique doit tenir compte du
fonctionnement psychique normal avec ses pulsions, ses défenses, la nature de
ses conflits.

Chez l’enfant, la référence à une normalité est encore plus complexe, car on doit
se référer à un développement, en tenant compte des variations individuelles : un
symptôme peut être plus normal à un âge qu’à un autre (ex : l’incontinence
nocturne n’a pas la même signification à un an qu’à 12 ans). Un symptôme qui
sera transitoire, n’a pas forcement une valeur péjorative. Les symptômes
peuvent changer selon le contexte ou la maturation et le problème sous jacent
reste aussi grave.

Enfin il est difficile d’isoler la pathologie du milieu et du système de valeurs


familial ou social où elle se développe. L’étude de l’enfant confirme ainsi la
relativité de la signification pathologique des manifestations observées et la
nécessité d’une évaluation dynamique.

1.3- Notion de guérison :


La notion de guérison est étroitement liée à celle de la santé. Facile à concevoir
en cas de maladie aigue où elle se confond avec un retour pur et simple à l’état
antérieur, elle est plus complexe à définir dans les cas des troubles chroniques
invalidants ou susceptibles de se répéter comme pour les maladies
psychosomatiques.

Tout comme la notion de santé, celle de la guérison demandera à être relativisée.


Elle apparaîtra plus d’avantage comme une construction active qu’un état
statique. Le malade devra apprendre à vivre avec sa fragilité au moins
potentielle, et à utiliser au mieux l’ensemble de ses capacités physiques,
psychologiques, auxquelles les médicaments constitueront un appoint précieux
voire indispensable.

En cas de récidive, il faut plutôt parler de moment de crises que de rechutes.


Car les rechutes sous-entendent l’échec et ont un effet démoralisant et
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démoralisateur. La crise implique l’idée d’une situation difficile, « critique »,


mais aussi d’une dynamique riche de potentialités évolutives, voire mutatives. Il
s’agira d’encourager patient et soignant (médecin) à en rechercher les conditions
de survenue et à leur trouver une issue la plus favorable.

II- Le sujet et sa maladie :

2.1- Le concept de maladie :

2.1.1- Evolution et modèles théoriques :

Spontanément nous savons tous ce qu’est une maladie, nous avons tous été
malades, ou connu quelqu’un ayant eu une longue maladie. Le sens commun
donne une définition claire et simple de la maladie : la maladie est un état
affectant le corps d’un individu et qui impose d’aller voir le médecin pour
guérir.
Le concept de maladie n’a pas le même sens pour le malade, le médecin et pour
le sociologue, il n’est pas non plus identique d’un malade à l’autre, d’un
médecin à l’autre, d’un sociologue à l’autre.
L’évolution du savoir montre que les maladies se définissent de deux manières :
biologiquement et socialement :
- le concept biologique prône une définition simple de la maladie : il s’agit d’un
état, d’un processus biologique qui affecte le corps.
- socialement la maladie est définie comme système d’interaction complexe
entre le biologique, la réaction individuelle et les influences socio culturelles.
Dans la théorie anthropologique de la maladie, deux conceptions de la maladie
opposées se confrontent depuis l’Antiquité : le modèle bio-médical et le modèle
holiste.

Le modèle bio-médical s’inspire de celui des sciences physiques (matérialiste,


positiviste) ; il isole le corps malade (voire même certains de ses organes). Ce
modèle a su apparaître comme la principale responsable des progrès accomplis
en matière de santé publique au XXe siècle. Ce modèle considère la maladie sur
trois aspects différents : ontologique, exogène, maléfique
- ontologique : renvoie à l’anatomie, au microscope et à l’anatomo-
pathologie : la maladie a un « être », une existence solide : la lésion
anatomique.
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- exogène : la maladie résulte de la pénétration d’un élément étranger et


hostile à l’intérieur du corps ou de l’esprit du malade (modèle de Pasteur).
- maléfique : la maladie constitue une agression extérieure, un ennemi qu’il
faut éliminer.
Dans ce modèle, les maladies sont donc des entités spécifiques, indépendantes.
Peu importe la personne : tout le monde souffre de la même maladie. Le rôle du
médecin est alors de ne s’intéresser qu’à la maladie. Dans ce modèle le meilleur
des médecins est le chirurgien : il ôte la maladie, et tout redevient comme avant.

Le modèle holiste qui s’oppose point par point au précédent : fonctionnel,


endogène, bénéfique
- fonctionnel : la maladie ne correspond pas à une lésion spécifique, il est
impossible de la trouver concrètement dans le corps : la maladie résulte d’une
rupture d’équilibre entre l’homme et lui même. C’est l’explication
d’Hippocrate, la maladie résulte d’un déséquilibre entre quatre humeurs : le
sang, le phlegme, la bile jaune et la bile noire. Chaque individu a son équilibre
propre : la maladie n’a de sens que par rapport à un individu particulier.
- endogène : la maladie est déplacée du côté de l’individu, elle n’est plus
considérée comme une entité étrangère mais elle est liée à l’histoire de la
personne.
- bénéfique : être malade a un sens bénéfique : la maladie correspond à une
sorte de « crise » et permet à l’individu de voir des choses qu’il refusait de voir.
La maladie lui permet de se comprendre et de gérer ses conflits.
Dans la perspective holiste, la maladie n’est pas centrale ; ce qui est central est
la capacité de l’individu à s’adapter tant d’un point de vue psychologique que
physique. La réalité biologique est toujours la même mais elle s’exprime
différemment selon chaque individu.
Dans ce modèle : la maladie n’est pas la réalité biologique mais le résultat de
l’interaction entre une essence biologique et la manière dont réagit l’individu. Le
meilleur des médecins est le psychologue ou le psychiatre qui écoute l’individu
et l’aide à se comprendre.
Pour résumer : modèle holiste contre modèle bio-médical : le premier a été
dominant jusqu’au XIX ième siècle, à partir de la naissance de la médecine
moderne le modèle biomédical domine, ce qui ne veut pas dire que le modèle
holiste a disparu.

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Du point de vue de l’approche historique, les maladies ont une histoire et


prennent sens dans un environnement social particulier, chaque époque a sa
maladie emblématique : au Moyen Age : la peste, la lèpre, au XIX ieme siècle :
la tuberculose, la syphilis, au XX ieme siècle : le cancer puis le SIDA, au XXI
IIème siècle : selon l’OMS les maladies mentales joueront ce rôle.
A la même réalité biologique ne correspond pas le même regard social. La
maladie n’a pas le même sens pour un homme du Moyen Age que pour un
homme du XXieme siècle.
Deux évolutions majeures : nous sommes passés :
- du modèle collectif et contagieux des maladies (où maladie est avant tout
synonyme d’épidémie) à un modèle individualisé : de nos jours la maladie est
une histoire personnelle,
- d’un modèle où dominent les maladies aiguës à un modèle où dominent les
maladies chroniques :
La maladie aiguë : temps court de quelques jours à quelques semaines : un
début, un déroulement et une fin. La cause peut être traitée, le plus souvent par
des médicaments. Deux possibilités : la guérison ou la mort. Ce modèle s’intègre
dans le modèle bio-médical : une maladie précise, un ennemi maléfique à
éradiquer, la maladie est centrale, l’individu est périphérique. Dans ce modèle le
patient a un interlocuteur essentiel : le médecin. L’avis du patient est secondaire.
La maladie chronique : un début, mais pas de fin, elle dure toute la vie ou du
moins très longtemps. Maladie souvent incurable, seules les conséquences
peuvent être traitées. L’absence de guérison a pour conséquence que le patient
doit apprendre à vivre avec sa maladie. Ce modèle se rapproche du modèle
holiste : une maladie générale qui s’intègre à la vie du patient, l’individu est
central, la maladie périphérique. Dans ce modèle le patient a de multiples
interlocuteurs, le médecin n’est que le maillon d’une chaîne. Le médecin a
besoin de l’aide du patient pour le suivi et la prise en charge de la maladie, le
patient devient un partenaire. La maladie chronique représente la maladie
prototype du XXieme siècle reléguant la plupart des maladies aiguës au niveau
de la « biologie », le travail noble du médecin au quotidien n’est pas le
traitement des grippes et des angines mais la gestion du diabète, le dépistage du
cancer….
En conclusion nous pouvons dire que la maladie ne prend sens que dans un
contexte donné, à une époque donnée, en fonction des enjeux et des besoins de

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l’époque (économiques, industriels, sociaux…). Les maladies ne correspondent


pas uniquement à un processus biologique qui affecte le corps. Les maladies
n’ont pas de définition biologique universelle, éternelle et immuable, elles ne
sont pas uniquement le reflet de l’ordre naturel des choses. Chaque maladie a
une histoire et s’insère dans un contexte social.
2.1.2- La maladie pour les médecins et pour les patients
Il semble « aller de soi » que la maladie soit pour le patient une expérience
subjective et pour le médecin une affection dont il essaye en toute objectivité
d’identifier les symptômes, le nom, la cause et d’évaluer la gravité, l’évolution
future et les traitements les plus appropriés. Ainsi, la frontière entre la maladie
pour le patient et pour le médecin ne serait pas si évidente.
La différenciation classique entre la maladie du patient et celle que diagnostique
le médecin est-elle loin d’être claire. Aucune perspective n’est totalement
objective ni totalement subjective. Chacun des discours est relatif et construit
socialement. Une distinction aussi artificielle ne peut que dévaloriser ce que le
patient a à dire à son médecin et nuire à une compréhension réciproque. Ce que
les médecins et les malades entendent aujourd’hui par maladie n’est guère
superposable, ne serait-ce tout d’abord qu’en raison de conventions langagières
différentes (« J’ai un rhume » devient une « rhinite ». « J’ai mal à la tête » une
« migraine » ou une « céphalée »). Ce décalage qui existe entre
théories « profanes » et conceptions « savantes » (ou bio-médicales) a une
importance particulière dont on doit tenir compte.
La conception biomédicale serait-elle plus « vraie » que les autres ? Selon la
conception bio-médicale, une maladie correspond à un ensemble de symptômes
dus à une pathologie organique sous-jacente.
Dans les cultures anglophones, il existe deux termes distincts pour désigner la
maladie : « disease » et « illness ». Le premier correspond à des troubles
organiques objectifs ayant une (ou des) cause(s) et des signes de symptômes
identifiables. Le second est utilisé pour désigner l’expérience subjective des
patients qui ne correspond pas forcement à une pathologie vérifiable. On peut
prendre comme exemple le mal de dos (ou lombalgie). Sur les patients qui ont
réellement une atteinte décelable (hernie discale. arthrite vertébrale), 30%
seulement se plaignent d’avoir « mal au dos ». Inversement, chez 70 à 80% des
patients consultant pour des douleurs du rachis, aiguës ou chroniques, on ne
trouve aucune cause organique ni fonctionnelle décelable à l’origine de ces
plaintes.

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Ainsi, il est essentiel de tenir compte des conceptions et représentations des


patients (par exemple à propos de la « cause » de leur maladie) pour mieux
comprendre comment se constitue l’expérience individuelle subjective de la
maladie et quel est le sens de cette maladie pour le sujet.
Cet intérêt pour l’expérience subjective du patient module bien évidemment
l’efficacité de toute intervention thérapeutique ultérieure, la compréhension et
l’acceptation du diagnostic et des traitements par les patients, l’attitude envers
les soins, l’observance et l’adhésion thérapeutique, l’adoption de comportements
sains, l’élaboration de stratégies de coping plus ou moins fonctionnelles.etc)
2.2- Le sujet malade :

2.2.1- Malade, patient, client ou usager ?

Dans le langage quatre façons différentes de nommer un même rôle : malade,


patient, client, usager.
Un malade est une personne souffrant d'une maladie. Le terme est descriptif et
met en avant la transformation biologique, physique que subit l’individu.
Un patient désigne une personne recevant une attention médicale ou à qui sont
prodigués des soins. Le fait de solliciter l’aide du médecin transforme le malade
en patient. Le patient est celui « qui attend », il est dans les mains du médecin.
Patient renvoie à une image de « passivité » où le médecin est expert, le malade
profane.
Un client est, en économie, une personne qui achète un bien de consommation
ou en médecine un savoir, un conseil, un avis. En médecine, les médecins de
ville parlent de clientèle. Le concept de « client » renvoie à une image moins
noble, mais bien réelle : si le médecin est celui qui guérit, qui soigne le patient ;
en retour « le malade » est celui qui fait vivre le médecin en le rémunérant. Le
malade est-il alors un patient ou « un client roi » en droit d’obtenir, le service
qu’il est venu chercher ?
Un usager est une personne qui utilise un service public, il s’oppose au client
qui utilise les services d’une entreprise privée. En médecine, parler d’usagers du
système de santé est habituel. Le concept d’usager renvoie à une nouvelle image
: le malade est un individu qui a des droits et peut avoir recours à la justice. Le
médecin est celui qui soigne, qui guérit, qui vend un service mais il ne vend pas
un service comme un autre, il doit respecter un code de déontologie et être
dévoué au bien public.
Aucune de ces définitions ne recouvre à elle seule la réalité, mais donne une
image globale de la personne qui se trouve dans le cabinet du médecin. Cette
Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
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même personne aura plusieurs types d’attentes, portera tour à tour plusieurs
masques, jouera différents rôles :
• celui qui expose des symptômes, et attend un diagnostic,
• celui qui fait confiance, remet sa vie entre « les mains » du médecin et attend la
bonne décision, la bonne proposition,
• celui qui vient chercher un service précis et qui paye pour cela, et entend donc
obtenir ce qu’il est venu chercher,
• celui qui est en souffrance, et a besoin de « son médecin » au moment où il se
sent mal ; et attend dévouement, « sacrifice » et disponibilité.
Malade et Patient renvoient l’image d’un individu passif. L’autorité est dans les
mains du médecin. Client et usager renvoient l’image d’un individu actif. Le
pouvoir est dans les mains de celui qui consulte.
2.2.2- L’état de maladie :

L’état de maladie peut être défini de 3 manières différentes : un certain état du


corps, une certaine interprétation du médecin, un certain état de conscience du
malade. La maladie est à l’origine d’une atteinte de l’intégrité du sujet, d’une
gêne à l’exercice normal de sa vie. Elle entraîne une rupture de l’équilibre
antérieur, à laquelle le patient doit s’adapter. Cette adaptation mobilise une
quantité de l’énergie psychique du patient. Ainsi, la maladie est susceptible de
déclencher chez l’individu un certain nombre de réactions, variables selon sa
personnalité, sa représentation imaginaire et la représentation collective de la
maladie.

Sous l’angle psychologique, la maladie est perçue comme un état négatif. Alors
que la conscience de la santé s’exprime phénoménologiquement dans un
sentiment d’assurance, celle de la maladie est faite, d’une part de la souffrance,
d’autre part d’un sentiment de faiblesse. Ce qui est essentiel dans cet état, c’est
l’anxiété des suites du moment présent, de la possibilité de complications, c’est
la présence de menaces de nouvelles souffrances et peut-être de destruction. Le
sujet devant cette situation décidera ou non de consulter un médecin duquel il
attendra qu’il le rassure et le soulage, cette double fonction appartenant aussi
bien au diagnostic qu’au traitement. Le diagnostic et le pronostic du médecin
auront deux fonctions contradictoires : ils sont un danger dans la mesure où ils
confirment l’état de maladie, ils sont un espoir, car seul le médecin est capable
d’apporter une aide à travers la possibilité du traitement. Car d’une part, une
souffrance diagnostiquée est bien moins pénible à supporter qu’une souffrance

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dont on ignore la cause et d’autre part le traitement outre son action réelle,
rassure par son existence même.

2.3- Les effets psychologiques de la maladie

Toute maladie plonge le sujet dans une situation nouvelle et déclenche de


nombreuses modifications psychologiques. Le médecin doit savoir reconnaître
ces modifications comportementales et l’origine de ces processus
psychologiques nouveaux pour un bon déroulement du traitement proposé.

2.3.1- Les implications psychologiques de la maladie

Etre malade signifie :

- être en situation de faiblesse : la maladie est presque toujours souffrance,


atteinte corporelle et limitation des possibilités physiques quand ce n’est pas
l’invalidité. Dans la définition de la maladie, il y a une atteinte de l’intégrité du
sujet et une gène à l’exercice normal de sa vie. Ceci est ressenti comme un
manque, un défaut, une diminution.

- être en situation de dépendance : dépendance à l’égard des soignants


(médecin, infirmier), dépendance à l’égard de l’entourage physiquement et
moralement.

2.3.2- Les conséquences psychiques de la maladie pour le sujet

Sur le plan psychique, la maladie se caractérise par les conséquences psychiques


suivantes :

- La régression qui est un mécanisme universel, inévitable que tout médecin


doit connaître et comprendre. Toute blessure, toute maladie entraîne une
réaction de protection qui est d’ailleurs banale et naturelle propre à tout
organisme que de se replier sur lui-même en cas d’agression et de souffrance. La
régression psychique est fonction de la gravité de la maladie et de la
personnalité du patient.

Elle se caractérise chez l’homme par l’émergence d’un comportement infantile


avec : réduction des intérêts (le malade ne vit que dans le présent et l’avenir
proche, ne supportant pas l’attente) ; égocentrisme ( le malade n’envisageant
plus le monde que par rapport à lui, n’imaginant pas que les autres puissent aussi
être malades ou fatigués, ne supportant pas la frustration) ; dépendance de

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l’entourage (pour la nourriture, la boisson, les soins corporels, accompagnée


d’une hypersensibilité aux réactions de cet entourage) ; mode de pensée
magique (illogique avec croyance en la toute puissance du médecin, des
médicaments ou de la maladie).

En fait, la régression est un mécanisme très utile et nécessaire car elle permet au
patient de s’adapter à la situation nouvelle de maladie. Régresser c’est en effet
quitter ses soucis et les exigences habituelles et recentrer ses forces sur soi-
même. Elles seront utiles pour lutter contre la maladie et protéger le malade
rendu vulnérable. C’est également accepter aide et soutien de la part de
l’entourage. Elle peut aussi être utile au processus thérapeutique (observance du
traitement par exemple), la maladie favorise les processus de régression, la
guérison s’accompagne d’une reprise d’autonomie.

La régression peut être aussi pathologique: si elle est trop importante en intensité
et en durée et empêche la participation active et énergique du patient au
processus thérapeutique. Dans ce cas, la régression peut avoir des effets négatifs
en dépassant son but et enfermer le malade dans une conduite qui s’auto
entretient. C’est le cas chez les personnalités névrotiques (personnalités
passives-dépendantes et histrioniques) pouvant trouver dans cet état une
occasion d’exprimer leurs revendications affectives. Dans ces circonstances, la
tâche du médecin consistera à limiter les tendances régressives.

- La dépression est un vécu psychique de dévalorisation, d’incomplétude,


accompagné par un sentiment de fatalité avec abandon de tout projet et de tout
souhait et une absence de révolte avec résignation. Les réactions dépressives
sont fréquentes au cours des maladies chroniques et/ou sévères. Elles peuvent
être exprimées par le malade ou masquées par des plaintes somatiques. La
dépression survient chaque fois que la régression n’est pas bien acceptée par le
malade et l’entourage et parfois quand la maladie altère l’image idéale de soi,
c’est à dire du narcissisme du sujet ou quand elle représente aussi une
confrontation avec la mort. En cas de dépression, un traitement spécifique est
nécessaire.

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2.3.3- Les réactions psychologiques du malade face à sa maladie :

2.3.3.1- Facteurs déterminants des réactions du malade face à sa maladie

Les réactions du sujet malade face à sa maladie dépendent de la qualité de


l’adaptation qui n’est pas une simple acceptation passive et une soumission à la
maladie, mais une attitude souple et équilibrée du malade qui lui permet de
changer son fonctionnement habituel sans pour autant se désorganiser.
L’appréciation de la qualité de l’adaptation doit se fonder sur de nombreux
facteurs qui tiennent :

- au sujet lui-même : son âge, sa personnalité, ses croyances, sa culture : par


exemple les représentations culturelles de l’épilepsie, son système de valeurs,
ses modalités habituelles de fonctionnement, son état affectif..

- à la maladie elle-même : la sévérité de la maladie (brusque résurgence de


l’angoisse de mort dans les maladies sévères), caractère récupérable ou non des
lésions, caractère évolutif aigu ou chronique, avec évolution critique, avec
aggravation progressive, avec ou sans remissions, importance et nature des
altérations fonctionnelles, des handicaps éventuels consécutifs à la maladie.

- aux conditions dans lesquelles la maladie intervient : situation


socioéconomique de la famille du malade, position statutaire du malade dans la
famille etc.

2.3.3.2- Types de réactions : Différents types de réaction peuvent être


retrouvés :

- Réactions anxieuses :

Elles sont fréquentes. L’état de maladie représente pour l’individu une menace
vitale et une atteinte de l’intégrité du Moi. La maladie est liée à la peur de la
mort, la souffrance, l’altération des liens affectifs et/ou sociaux. L’anxiété
associe des manifestations psychiques, somatiques et comportementales. Elle
témoigne en général d’un processus normal d’adaptation aux contraintes et aux
conséquences de la maladie. Lorsqu’elle est pathologique, l’anxiété nécessite
d’être traitée.

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- Réactions d’ordre narcissique :

La maladie menace l’intégrité de l’individu et induit des réactions variables sur


son narcissisme. Par narcissisme, il faut comprendre le caractère de « tout
inviolable, impérissable, important, capable et digne d’être aimé » de l’individu ;
c'est-à-dire une surestimation de soi, recherche de l’admiration des autres. Les
réactions narcissiques sont fréquentes quand la dimension narcissique domine le
fonctionnement psychique. Certains patients se sentent blessés dans leur
narcissisme et développent la crainte de ne plus être dignes d’être aimés ou se
replient sur eux-mêmes et en accentuant leur égocentrisme, d’autres, au
contraire voient leur narcissisme renforcé par l’expérience de la maladie :
l’intérêt porté à sa propre personne malade devient la source de nombreuses
satisfactions. Certains comportements narcissiques pourront être utiles au
médecin, s’ils facilitent la participation du patient à la thérapeutique.

- Le déni de la maladie ou dénégation :

Le déni de la maladie ou dénégation est une réaction courante. Le déni de la


maladie est un refus de la maladie, rarement de façon ouverte mais le plus
souvent inconscient, parfois camouflé sous une pseudo rationalisation qui se
traduit par un refus de se plier aux exigences du traitement, par la persistance
des habitudes nocives, d’une activité excessive (mécanisme observable dans les
états terminaux de maladies mortelles). Par exemple, un patient « refuse de
s’écouter » et nie partiellement la réalité en méconnaissant la gravité de son état
et en rationalisant sa maladie qui « est due à un surmenage passager ». Ces
attitudes peuvent s’accompagner parfois de comportements d’hyperactivité. Le
déni peut avoir de graves conséquences par le refus de soins qu’il entraîne et la
méconnaissance totale du danger. Il témoigne souvent d’une fragilité psychique,
le malade se protégeant d’un risque d’effondrement par le recours à ce
mécanisme de défense archaïque. Si le soignant (médecin) comprend que
derrière ce déni, c’est la peur qui l’emporte, il comprendra également que c’est
en rassurant son patient par la qualité de leur rapport, qu’il aura le plus de
chance à vaincre ce déni.

- Attitudes agressives et persécutives

La réaction persécutive est souvent la conséquence du déni. Pour éviter la


dépression, le malade rejette sur l’extérieur la cause de ses malheurs : on lui veut
du mal, on l’a mal soigné, voire ce sont les soins qui sont responsables de ses
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troubles. L’agressivité n’est pas la particularité des patients psychiatriques. Elle


est souvent le reflet de la perception d’une menace et peut s’exprimer de façons
très variées : agressivité passive, agressivité verbale voire physique.
L’agressivité peut aussi témoigner d’un sentiment d’injustice et de persécution
(Se considérant comme victimes d’une agression, certains patients pensent plus
ou moins consciemment qu’on « on leur veut du mal », le mécanisme de défense
mis en jeu est un mécanisme projectif). Il y a des malades qui cherchent à
obtenir réparation du préjudice (cas fréquents surtout en chirurgie).

- L’isolation :

L’isolation se traduit par l’absence apparente d’affects, d’émotions


accompagnant la prise de conscience de la maladie. Le malade parle volontiers
de sa maladie en termes scientifiques, se documente à son sujet et paraît très
bien prendre le fait. Derrière cet écran, les affects simplement réprimés sont
laissés à eux-mêmes et peuvent avoir des effets néfastes.

2.3.3.3- Attitudes des soignants face aux réactions des malades :

Les soignants devront comprendre le sens des réactions du malade et apprécier


leur valeur d’adaptation. Ils doivent évaluer le caractère pathologique de la
réaction qui dépend de la souffrance du patient et son inadaptation à la situation,
du caractère inhabituel de la réaction dans son intensité et dans sa durée et la
nécessité d’une intervention thérapeutique. Enfin, ils doivent s’abstenir de tout
acte de nature à altérer ses relations avec ses patients afin de ne pas briser par
une réaction inappropriée l’équilibre toujours plus ou moins fragile de leur
malade. Des réactions pathogènes pourront s’en suivre.

2.3.4- La maladie vécue :


La maladie est vécue par le sujet qui accorde aux épisodes pathologiques des
sens plus ou moins conscients, déterminant les attitudes observées et
représentant autant de stratégies pour tenter d’alléger la souffrance. Les
exemples de maladie vécue sont nombreux :

- La maladie est vécue comme un défi : ceci entraîne des conduites actives,
souvent adaptées et une coopération avec les soignants.

- La maladie représente un ennemi, interne ou externe qui envahit, qui est à


combattre, le malade adopte une attitude active ou passive selon l’estimation

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qu’il fait de ses forces, parfois il accuse les autres d’avoir provoqué ou aggravé
sa maladie.

- La maladie est une punition, une expiation qui peut certes conduire à
l’abandon, mais aussi à une renaissance avec le sentiment d’avoir suffisamment
expié.

- La maladie est une faiblesse : le sujet est sensible surtout à la défaillance. Cela
est souvent le cas quand il s’agit de maladies chroniques à rechute chez l’enfant
qui acquiert le sentiment d’être différent, anormal, et a honte de lui-même.

- La maladie est un moment de répit qui peut dispenser des exigences habituelles
de la vie quotidienne et peut atténuer les conflits internes.

- La maladie est une stratégie, une technique, qui permet d’obtenir l’attention et
le soutien des autres chez l’enfant ou dans des situations d’isolement. Il existe de
bénéfices secondaires évidents.

- La maladie est un dommage irréparable qui mène à la dépression et au suicide.

- La maladie est une valeur soit dans un sens moral ou religieux, soit comme
source de satisfaction narcissique.

- La maladie est vécue comme une initiation permettant d’accéder à un niveau


de connaissance plus élevé à une illumination.

2.3.5- Bénéfices liés à la maladie

La maladie est avant tout négative et source de souffrance, elle peut aussi être
source de bénéfices.

Les bénéfices primaires: jouent un rôle dans le déclenchement de la maladie ou


de l’accident, soit comme cause à part entière soit comme facteur déclenchant
(la maladie permet d’apporter une solution à une situation de tension interne ou
de souffrance narcissique peu supportable : elle apaise et soulage).

Les bénéfices secondaires : résultent des conséquences de la maladie sans


intervenir directement dans son apparition (mais peuvent favoriser sa
pérennisation).

-Certains bénéfices sont conscients et connus du malade (arrêt de travail pour


une maladie)

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- d’autres sont inconscients : se soustraire à des relations frustrantes, éviter les


obligations familiales et sociales, fuir dans l’imaginaire et la pensée magique,
être reconnu comme malade par l’entourage, être materné…

- Lorsque ces différents bénéfices sont plus importants dans l’économie du


malade que ceux qu’il trouve dans son fonctionnement de sujet sain, le sujet
peut avoir des difficultés à guérir de sa maladie.

2.4- Le malade et son entourage :

De la même façon que la maladie représente une rupture de l’équilibre pour le


malade lui-même, elle représente une rupture d’équilibre pour la famille. Avec
l’avènement de la maladie, les rôles, l’accomplissement des tâches, les relations,
les investissements affectifs, les modes de communication changent dans le
système d’interaction familial. Le rôle du malade au sein du groupe se trouve
modifié, ce qui amène une restructuration du groupe. La maladie exclut le
malade du réseau institutionnel de droits et d’obligations, elle fait de lui un
individu déviant.

La maladie est d’abord un comportement inhabituel, dévié d’un des membres du


groupe qui détruit la complémentarité habituelle des rôles. La survenue de la
maladie entraîne une crise d’adaptation, un changement et une discontinuité qui
sont plus ou moins manifestes selon le caractère aigu ou traumatique, accidentel,
critique de la maladie elle- même.

Devant ce défi on observe trois phases adaptatives : choc initial, mise en place
des défenses, puis réorganisation.

Dès après la première phase des mécanismes de défense sont mis en place au
niveau du groupe familial. Parmi eux on note l’intellectualisation, la
rationalisation, la dénégation etc.

De façon dynamique inconsciente, la maladie réactive, les conflits antérieurs,


conflits de la relation parent enfant, conflit à l’intérieur du couple, conflit dans
l’histoire d’un des parents, réactivation d’un deuil antérieur, assimilation à une
maladie semblable.

Les attitudes des parents à l’égard de leurs enfants malades dépendent du désir
qu’ils ont eu d’être parent, de la part d’investissement narcissique faite sur
l’enfant, de la crainte qu’ils ont de voir grandir ou perdre l’enfant, enfin du
sentiment qu’ils ont d’être responsables de son état.
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La maladie est alors vécue plus ou moins comme une agression personnelle, une
menace de désorganisation de l’équilibre libidinal ou au contraire comme une
occasion de trouver une médiation permettant de faire appel aux autres.

La structuration du groupe familial, sa tolérance vis-à-vis du malade joue un,


rôle fondamental dans le pronostic, de la réadaptation sociale lorsque le malade,
suffisamment amélioré par un traitement médical, y retrouve sa place.

2.5- Le sujet malade face à l’imminence de la mort :

Bien que l’être humain soit le seul être vivant qui sache qu’il va mourir tôt ou
tard, il n’en demeure pas moins qu’il soit tranquille et serein tant que sa vie n’est
pas menacée par l’idée de l’imminence de sa propre mort ou de celle de ses
proches. C’est la maladie en fonction du degré de gravité et de ses effets
perturbateurs, qui vient mettre un terme à cette sérénité du sujet en lui
confrontant à l’idée de la probabilité de sa propre disparition. Ce qui est
susceptible de provoquer une angoisse importance. En effet, la peur devant la
mort est une manifestation psychologique tout à fait normale, un mécanisme
inhérent à tous les êtres humains dont le psychisme révèle l’action de
mécanismes communs. En effet, l’imminence de sa propre disparition, entraine
le plus souvent chez le sujet, des réactions spectaculaires nécessitant une
attention particulière de la part des chercheurs qui s’interrogent sur les attitudes
à adoptées auprès des mourants et sur leurs vécus respectifs.

Ainsi E Kübler Ross décrit les stades affectifs par lesquels passe un sujet qui va
mourir :

- Une phase de choc-dénégation qui correspond à un refus de la situation, la


dénégation venant souvent des soignants,

- Une phase de colère dans laquelle, le sujet s’énerve contre lui-même,


contre Dieu et tout le monde, se demandant, pourquoi lui et non les autres.

- Une phase de négociation dans laquelle, le sujet fait des promesses de don
de biens, de changement de conduite, ou de renoncement à certaines
faveurs, promesses faites à l’endroit de Dieu, des forces surnaturelles ou
des soignants au cas où il pourra s’en sortir.

- Une phase de dépression pendant laquelle, le malade ne parle plus et ne


souhaite pas être dérangé.

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- Une phase de résignation dans laquelle le malade se laisse faire.

A ce stade, l’important pour les soignants et la famille est de comprendre les


besoins et la façon de s’adapter des mourants à travers l’établissement d’une
relation et d’une communication qui ne sont pas forcement verbales. Il s’agit
d’aider ces sujets à surmonter cette situation difficile fortement anxiogène pour
eux ; les accompagner dans les derniers instants de leur vie. La présence
physique d’autrui auprès d’eux, les gestes, l’affection, la tendresse, les mots dits,
le regard, etc., sont autant d’actes significatifs et hautement appréciables pour
ces sujets en proie à l’angoisse de mort.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
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C. La fonction soignante

Dans les diverses sociétés depuis la haute antiquité, une fonction soignante est
attribuée à certains de ses membres (le personnel médical et para médical).

La fonction soignante a d’abord été confondue avec les pratiques magiques et


religieuses : il s’agit de chasser le mal, réintroduire le bon sous diverses formes.

Par la suite la médecine a été étayée sur des conceptions philosophiques du


monde, le médecin qui n’est plus choisi sur ses capacités personnelles à
communiquer avec les forces irrationnelles, mais sur son savoir, essaie
d’appliquer ses connaissances générales aux problèmes particuliers de la
maladie. La demande irrationnelle adressée aux médecins n’a pas diminué pour
autant.

La relation reste aussi importante que dans les rapports avec les charmants et
sorciers mais diffractée sur les divers membres d’une équipe soignante.

Pour la commodité et la simplification, une analyse psychologique spécialisée


peut alors être nécessaire. On peut souligner la relation médecin –malade tout en
sachant la fragmentation des tâches et le rôle institutionnel.

2. Le soignant, statut, rôle et motivations :

a- Statut et rôle :

On distingue dans le statut et le rôle du médecin cinq traits caractéristiques.

 La compétence technique : avec la scientificité accrue de la médecine, il est


demandé au médecin une haute compétence technique. Le savoir est le
fondement de l’obligation à coopérer qui est imposée aux malades. La
compétence technique doit avoir un aspect institutionnalisé, constitué par les
examens dans les quels le médecin fait la preuve sociale.

 L’attitude universaliste : le terme d’attitude universaliste implique que le


médecin doit traiter toutes les personnes suivant les mêmes règles et sans
préférence. Le médecin ne doit faire aucune distinction de personnes, si ce n’est
d’après la gravité et la nature de la maladie dans les soins qu’il prodigue aux
malades.

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 La spécificité fonctionnelle : cette conception est liée à la spécialisation des


rôles dans notre société. Les compétences, les privilèges et les obligations du
médecin ne sont valables que dans le domaine de la maladie. Le médecin jouit
en effet du droit de libre accès à la personne physique et morale du malade, il
peut pénétrer dans l’intimité du corps et des âmes.

La spécificité fonctionnelle est marquée en particulier par l’obligation du secret


médical, secret faisant partie d’un ensemble de règles déontologiques. D’autre
part, la spécificité fonctionnelle libère le médecin du soupçon qu’il pourrait tirer
profit de sa position par rapport au malade.

 La neutralité affective : comme la spécificité fonctionnelle maintient les


relations d’autorité et de dépendance dans d’étroites limites. L’autorité que
possède le médecin n’est pas analogue à celle d’un père sur son enfant. Le
médecin ne doit juger moralement son malade, il ne punit pas. Il doit pouvoir
également conserver une existence personnelle en dehors de ses fonctions.
Aussi, s’il doit avoir une attitude « humaine » envers le malade, il doit réserver
et même refuser toutes relations plus personnelles. Si la neutralité affective
protège le médecin, elle est aussi pour le malade une garantie technique :
l’existence d’une attitude émotionnelle du médecin envers le malade tend à
interférer avec la qualité de ses soins. C’est la raison pour laquelle le médecin
évite de soigner les membres de sa propre famille.

 L’attitude altruiste et le désintéressement : Ce trait qui


incarne « l’orientation vers la collectivité » se base sur le fait que l’opinion
publique oppose les professions libérales et les professions commerciales. Les
premières ont pour but la collectivité, les secondes le Moi, les unes sont
caractérisées par le désintéressement, les autres par la recherche du gain. La
nécessité du désintéressement du médecin résulte de la vulnérabilité du malade.
C’est la garantie que le médecin ne profitera pas de l’impuissance du malade
pour l’exploiter. Le désintéressement est donc un élément essentiel de la
confiance du malade en son médecin. La notion de désintéressement a été très
anciennement institutionnalisée puisqu’elle est déjà formulée dans le serment
d’Hippocrate.

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b- Les facteurs influençant le choix de la profession de soignant

- Les motivations personnelles :

Les motivations du médecin apparaissant conscientes de prime abord, sont le


plus souvent sous-tendues par des mobiles plus inconscients et se regroupent
autour de :

Un intérêt scientifique : désirs de voir, comprendre, savoir, toucher, pouvoir


s’exprimant par le désir d’expérimenter, transgresser, de savoir, l’envie de voir
et d’explorer le corps, le tout sous tendus par le couple pulsionnel voyeur-
exhibitionniste plus inconscient.

Un intérêt humanitaire : désirs conscients de soulager, se rendre utile, réparer,


soigner, guérir, se dévouer, goût des contacts sous tendus par l’attrait de la
réparation des tendances agressives et sadiques.

Un intérêt socio-économique et personnel : désirs de gagner de l’argent


permettant de maintenir un certain statut financier et social et de satisfaire à un
besoin de sécurité.

Par exemple pour un pédiatre et pour ceux qui veulent de façon générale
soigner des enfants, se surajoute l’identification à l’enfant tout puissant, le désir
d’être un bon parent, revanche d’avoir été un enfant faible et diminué, recherche
de satisfactions libidinales au contact physique de l’enfant. L’identité du
soignant est basée sur les identifications solides au cours de la formation.

- Les attentes de la société

Les attentes de la société peuvent influer sur le choix de la profession et


concernent le savoir technique, l’altruisme, l’universalité du pouvoir, le
désintéressement, la neutralité affective, morale, juridique voire politique et
religieuse. Ces attentes réelles ou imaginaires peuvent confronter le médecin à
des conflits internes.

3. La relation médecin- malade

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a- Caractéristiques de la relation médecin malade :

Le sujet soigné se retrouve avec un soignant qui est investi de savoir (sinon
pourquoi le consulter !). Entre le médecin et le malade, il existe toujours une
situation inégalitaire malgré qu’on veuille ou non revendiquer un droit à la santé
et une position égalitaire.

Ce n’est ni une relation amicale, ni familiale, ni commerciale. C’est une relation


de confiance qui s’inscrit dans le cadre d’une pratique éthique soumise au code
de déontologie médicale.

La relation thérapeutique médecin-malade est déterminée par de nombreux


facteurs, individuels et socio-culturels. Elle naît de la demande d’un patient
souffrant adressé à un médecin ayant le savoir sur la maladie. Elle tend à poser
le malade comme sujet passif. Le médecin doit prendre la responsabilité de la
démarche de soin.

- C’est une relation fondamentalement fondée sur l’inégalité et l’asymétrie: la


demande du patient le rend passif et dépendant et sa souffrance le rend
mobilisant et le diminuant. Le malade est non seulement limité par sa maladie
mais aussi se trouve en position de faiblesse en faisant une demande de
guérison. Dans cette situation il éprouve un besoin de compréhension et de
compassion de la part du médecin.

- C’est une relation d’attente et d’espérance mutuelle : le malade attend la


guérison ou le soulagement, le soignant la reconnaissance de son pouvoir
réparateur. Avec ses symptômes, un malade demande certainement au médecin
de le guérir de sa maladie (aspect technique), mais aussi soutien, réassurance,
sécurité et affection (relation affective et une disponibilité).

-C’est une relation où le lieu d’échange est avant tout le corps mais où la parole
a sa place.

Dans la relation médicale, contrairement à la psychanalyse où l’analyse est


primordiale, il est demandé au médecin, une efficacité, une réponse qui peuvent
n’être possibles que dans l’agit (soigner et nettoyer un grand brûlé hurlant de
souffrances, nécessite de ne pas trop s’interroger sur ses motivations et la
situation que cela représente !). La question fondamentale est plus souvent celle
du mode de communication à utiliser en fonction de la situation spécifique de la
maladie ou du moment de la maladie (par exemple reconnaître la valeur des
Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
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signaux échangés avec un malade sub-comateux en réanimation, dans une


situation où il faut reconnaître les stimuli fournis).

Une relation médecin-patient harmonieuse doit permettre une démarche


diagnostique, l’amélioration de la qualité de vie du patient ; la prise en compte
du point de vue du patient, une bonne observance thérapeutique, un exercice
médical le plus confortable possible.

b- Le rôle du médecin :

- Dispositions générales :

Le médecin réagit devant son malade non seulement comme un technicien averti
des maladies, mais aussi comme personne ayant une histoire propre,+ ⁄- sensible
à la souffrance de l’autre. Le médecin doit avoir une représentation de la
maladie et des malades avec lesquels il doit établir un échange à la fois verbal,
corporel et médiatisé à travers l’accueil qu’il doit réserver à son patient.

Pour Balint, le médecin est un remède en soi, même si son action est médiatisée
par un médicament. Une meilleure maîtrise de la relation inter-individuelle doit
permettre au médecin d’établir avec son patient un échange affectif qui aura des
vertus curatives.

De même que le malade réagit à sa maladie en fonction de sa personnalité


propre, le médecin réagit face à son malade par un certain nombre d’attitudes
conscientes et inconscientes qui dépendent de sa personnalité et de son histoire,
et qui sont susceptibles d’infléchir le cours de la relation thérapeutique.

Le médecin est indépendant dans ses décisions. Il doit écouter son patient et son
entourage affectif, ce qui constitue un des aspects fondamentaux de la démarche
de soin. Il a l’obligation de respecter le malade et garder le secret médical : un
médecin respecte l'intimité de ses patients ; il ne les trahit pas. Le médecin prête
le serment d'Hippocrate : « Admis dans l'intérieur des maisons, mes yeux ne
verront pas ce qui s'y passe, ma langue taira les secrets qui y sont confiés ». Le
secret médical s'impose même après la mort.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
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Le médecin n’impose pas par force son point de vue à son patient, il doit
chercher à obtenir son consentement dans tout ce qu’il fait. Par contre, il a
l’obligation d’information du malade : informer le patient c'est respecter les
principes d’humanité et d’autonomie. La relation médecin-Malade doit aboutir à
une information telle qu'elle est définie : « Le médecin doit à la personne qu'il
examine une information claire, simple et loyale sur son état, les investigations
et les soins qu'il lui propose. Il veille à la compréhension des explications
données». En pratique, et pour respecter le patient sans échapper à son rôle, le
médecin se devra d’expliquer au patient sa maladie en adaptant son langage à
celui du malade.

- L’accueil du patient :

Accueillir quelqu’un c’est lui recevoir et lui donner de l’hospitalité. Accueillir


un patient, c’est prendre en compte sa souffrance afin de la permettre de
s’exprimer d’une façon socialement acceptable. En somme, accueillir, c’est
accepter celui qui a perdu ses repères, ses limites, ou celui dont les repères sont
perturbés et qui ne se retrouve plus sans aide. C’est à travers le savoir être tout
autant que son savoir faire que le soignant parviendra à contenir la souffrance du
patient. L’esprit dans lequel on accueille, conditionne les actes que l’on pose, les
paroles que l’on prononce. Un accueil de mauvaise qualité peut hypothéquer
l’observance au traitement et l’alliance thérapeutique pour des années. Les
soignants doivent accueillir avec bienveillance leurs patients. L’accueil n’est pas
seulement une série d’actes mais une disposition mentale particulière du
soignant qui consiste à accueillir l’autre psychiquement, en renonçant à se
retrancher dans un système défensif. Se préparer psychiquement à l’accueil,
c’est poser ses émotions contradictoires, les transformer en atout.

Un accueil réussi repose sur des cibles représentées par une foule de petits
détails et d’évidences:

On accueille une personne avant d’accueillir une pathologie, des symptômes et


des troubles du comportement. C’est avant tout un être humain, un autre nous-
mêmes que nous recevons dans un lieu conçu pour soigner.

On accueille une souffrance : c’est permettre à cette souffrance de s’exprimer


d’une façon socialement acceptable. Quelles que soient les formes que prennent
les symptômes, leur modes d’expression, les péripéties de l’accueil, n’oublions
pas que nous accueillons une personne qui souffre, qui a besoin de soins, qu’elle
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Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
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le reconnaisse ou non.

- On accueille un citoyen : La personne accueillie reste un citoyen qui possède


des droits et des devoirs même si elle se sent indigne : le centre de prise en
charge est un lieu social. Autrement dit, les règles de sociabilité, de courtoisie,
de politesse restent valables.

- On accueille un contexte : La pathologie s’exprime au sein d’un contexte dont


il faut tenir compte. La famille fait partie de ce contexte. Accueillir, c’est être
ouvert non seulement au patient mais aussi à ses proches.

- On accueille un mystère, souvent des secrets qui nous échappent.

- On accueille une personne en crise : La crise n’est pas uniquement un


phénomène négatif, c’est aussi une opportunité pour remettre en cause les
fonctionnements passés, qui ont fragilisé la personne, de découvrir d‘autres
mécanismes de défense, plus adaptés, moins couteux psychiquement et
socialement.

L’accueil remplit schématiquement 4 fonctions ; tous les actes que nous


accomplissons au cours de l’accueil répondent à l’une ou l’autre de ces 4
fonctions : accueil, civilité, sociabilité ; recueil des données ; soutien, protection,
partage des affects ; soins ou thérapie à proprement parler qui supposent de
s’ouvrir aux émotions ressenties par le patient.

b. Le rôle du patient :

Le patient à son tour reproduit dans l’échange de façon transférielle des


relations déjà vécues ou fantasmées, prêtant par exemple au médecin une image
maternelle protectrice ou une figure paternelle autoritaire à travers le récit de
l’histoire de sa maladie et de son vécu. En réponse, le médecin éprouve dans le
contre transfert des sentiments positifs ou négatifs.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
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c- La place de l’éducation thérapeutique dans la relation médecin


malade :

L’éducation thérapeutique, ou formation thérapeutique, consiste à exercer un


ensemble cohérent d’actions en vue de conférer au patient des compétences
précises, lui permettant de participer à la gestion de son traitement et de son
suivi. L’éducation thérapeutique s’adresse à un patient atteint d’une maladie
chronique et satisfait à des objectifs de prévention secondaire (prévention des
complications de la maladie) ou tertiaire (prévention de l’aggravation des
complications). Elle se distingue de l’éducation sanitaire d’une population non
malade, dans un souci de prévention primaire à l’égard de l’apparition d’une
pathologie et permet la réalisation d’économies de santé. Exemple: dans le cas
du diabète, la réduction de la fréquence et de la durée des hospitalisations, ainsi
que la réduction de la fréquence des amputations ont été établies.

Elle nécessite souvent:

-l’acquisition d'un savoir : le soignant transmet au patient un niveau suffisant


et nécessaire de connaissances pour une mise en pratique adaptée. Exemple :
Connaître l'objectif glycémique 2h après un repas ;

-l’acquisition d'un savoir-faire : le soignant montre puis fait faire au patient


un geste, il s'agit d'un apprentissage. Celui-ci doit le plus souvent être répété,
en tâchant de se rapprocher ou de se projeter des conditions dans lesquelles
s'effectuera ce geste à domicile. Exemple : Savoir mesurer sa glycémie capillaire
-l’acquisition d'un savoir-être : le patient met en pratique à bon escient les
acquis du savoir et du savoir faire dans sa vie quotidienne. Le rôle du soignant
est ici dans le dialogue, proposant au patient l'analyse de ses expériences, et la
progression par objectifs successifs vers un savoir-être de plus en plus adéquat.

Exemple : Comparer sa glycémie avant et après un repas, et réfléchir au vu


des résultats au caractère adapté ou non de l’alimentation et du traitement à
ce moment là.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
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d- Approche psychanalytique de la relation médecin malade : notion de


transfert et de contre-transfert

Le concept de transfert fait référence à des réactions affectives conscientes et


inconscientes du patient à l’égard de son médecin. Il s’agit de désirs
inconscients qui sont actualisés et un certain nombre de désirs insatisfaits du
patient qui vont se projeter sur la personne du médecin en ce qu’il représente
inconsciemment un autre personnage. Le malade peut ainsi répéter des situations
douteuses qu’il a vécues dans son passé. Le transfert peut être positif ou négatif.

• Transfert positif : le malade éprouve des sentiments de sympathie, de


confiance (Coup de foudre, médecin parfait) ; puissance et pouvoir
attribués au médecin

• Transfert négatif : image négative, relation antithérapeutique

Le concept de contre-transfert: réactions affectives conscientes et


inconscientes du médecin vis-à-vis de son patient. Il est très lié à la personnalité
et à l’histoire personnelle du médecin.

Généralement positif, le contre- transfert permet une relation médecin-malade


de qualité caractérisée par l’empathie du médecin et une action thérapeutique
efficace (le médecin s’identifie au patient et comprend sa situation tout en étant
capable de garder une certaine distance vis à vis de lui, distance requise par
l’objectivité nécessaire à la prise de décisions thérapeutiques). Il peut être à la
base d’un surinvestissement du malade : « bon malade » avec comme risques de
créer une dépendance. Quand il est trop positif, cela peut conduire au risque
d’une identification massive au malade et/ou à une perte d’objectivité dans les
soins.

Le contre transfert négatif peut conduire au rejet inconscient du malade : «


mauvais malade », à une agressivité inconsciente ou être à l’origine d’échecs de
la relation thérapeutique. Une absence de contre-transfert peut conduire à une
froideur excessive.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
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4- Les effets de la fonction soignante :

On appelle effets de la fonction soignante, l’ensemble des phénomènes


psychologiques pouvant être induits au cours de la relation soignant soigné. Les
principaux effets de la fonction soignante sont :

● L’effet placebo : est un des aspects psychologiques les plus importants de la


thérapeutique médicamenteuse. Il montre bien l’importance de la part
psychologique dans la prescription. Le placebo est une substance
pharmacologique inerte, sans propriétés ni action pharmacodynamique propre,
administrée à un malade par un médecin et qui entraîne malgré tout des
modifications objectives et subjectives de l’état du malade, c'est-à-dire qui est
qui est susceptible de modifier l’état du malade, soit en l’améliorant (effet
placebo-positif), soit en déclenchant des effets indésirables (effet placebo-
négatif ou effet nocebo). Le terme placebo (futur du verbe: placere qui veut dire
je plairai) a été employé dans les pays de langue anglaise depuis le XVIIIème
siècle pour désigner un médicament sans action réelle, que le médecin donne au
malade pour lui plaire.

Lorsqu’on administre un placebo à des malades on peut observer de


modifications de leur état, c’est à dire un effet placebo. On dit que ces malades
sont sensibles au placebo. Certains sujets par contre voient leur état non
modifié : ils sont appelés non sensibles au placebo. Des études ont démontré que
le pourcentage moyen d’amélioration après administration d’une substance
inerte était de l’ordre de 33 %. Les facteurs qui contribuent à la réalisation de
l’effet placebo sont de quatre ordres : le malade (la personnalité du sujet, de sa
croyance dans l’efficacité du traitement), sa maladie (nature des symptômes
pour lesquels il est administré), le placebo (l’aspect même du placebo, sa
présentation et modalités de sa prise, nombre et couleur des comprimés) et le
médecin (son attitude, l’influence qu’il exerce sur le patient).

Les sujets placebo-répondeurs sont plutôt les sujets sociables et extravertis, qui
ont une « attente » par rapport aux effets du produit.

Le prescripteur, influence la réponse au placebo (la relation positive au médecin,


favorise la réponse au placebo et par extension au traitement actif).

Ce phénomène est pris en considération dans l’expérimentation des


médicaments. Parfois le placebo peut être prescrit de façon délibérée.

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L’effet placebo montre que l’action d’un médicament est due à la fois aux
propriétés pharmacologiques, à l’attitude du prescripteur et à l’attitude du
malade.

● L’effet « étiquette » : montre aussi l’importance de la relation soignant-


soigné : quand un médecin nomme une maladie, même si cela est erroné, on
constate que des patients ont tendance à se conformer à l’image de la maladie
qu’on leur attribue ; une réassurance est obtenue ainsi même si elle se fait aux
prix de limitations. Cet effet correspond à ce qui est observé dans d’autres
domaines par exemple dans le domaine de l’éducation un élève qualifié de
débile le sera.

● Les effets iatrogènes : On utilise la notion d’effets iatrogènes pour désigner


les influences néfastes que le personnel soignant peut provoquer chez les
patients. Le médecin, par méconnaissance des facteurs psychologiques peut
ainsi créer des symptômes pathologiques. On observe une escalade des
symptômes et en réponse des examens complémentaires et des thérapeutiques
qui peuvent à leur tour avoir des effets secondaires ou des séquelles nécessitant
de nouveaux soins.

5-Le rôle de la personnalité du médecin dans ses relations avec le malade.

Si les aspects sociaux, représentés par la « communauté », déterminent dans une


large mesure l’attitude du médecin envers le malade, cette attitude sera nuancée
dans chaque cas individuel par la personnalité du médecin. Chaque médecin
indépendamment de sa spécialité ou dans le domaine où il intervient doit savoir
que ses mots ont une grande influence de suggestibilité sur ses patients qui
dépend le plus souvent de la personnalité du malade, des conditions et des
circonstances du traitement et surtout de la qualité des rapports qu’il entretient
avec le malade. Dans chaque acte médical, la personnalité du médecin apparaît :
il se prescrit en quelque sorte lui-même. Les valeurs et la personnalité
interviennent de sorte que la prescription, le choix thérapeutique n’est jamais
complètement rationnelle. Balint a montré que « chaque médecin crée, bon gré,
malgré, une atmosphère unique par ses modes individuels de pratiquer la
médecine, et essaie ensuite de convertir ses patients à les accepter.

La personnalité du médecin détermine son style d’exercice, qui se manifestera


non seulement dans les décisions thérapeutiques, mais dans tous les aspects de
ses relations avec le malade. Ceci est évident dans bon nombre de cas :
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prescription de contraceptifs dépendant de la représentation de la sexualité, arrêt


de travail en liaison avec les idéologies sociales, attitude devant les difficultés
scolaires en rapport avec sa propre histoire scolaire, poursuite ou non des
traitements chez un mourant rattaché à l’attitude plus ou moins optimiste devant
la vie ; acte ou choix thérapeutique, envoi ou non au spécialiste.

L’influence du médecin sur le malade dépend de ses connaissances


psychologiques et de ses capacités psychothérapeutiques, de son style de travail
et plus particulièrement de sa personnalité (la qualité du contrat avec le malade
dépend en général de la personnalité et du comportement du médecin) c'est-à-
dire de sa façon de réagir aux différentes manifestations du malade. Le style du
travail, la jovialité, le sourire du médecin ont une importance considérable. Tout
cela peut contribuer à augmenter le niveau de confiance que le malade a par
rapport à son médecin et jouer sur le degré de croyance du malade dans la
réussite du traitement.

Après un diagnostic d’une maladie grave (diabète, sclérose en plaque, cancer,


sida, cardiopathie), le sujet vit une crise profonde. Le bouleversement
psychologique affecte aussi la famille du patient.

Pour l’équipe soignante en générale et pour le médecin soignant en particulier,


la difficulté de la prise en charge tient à la nécessité de tenir compte le
l’ensemble de la personne.

Le travail du soignant consiste à affronter la vérité. Si le soignant laisse au


malade l’occasion d’évoquer sa douleur aussi longuement qu’il le souhaite, il
parvint à franchir l’obstacle du coup et peut parler de lui-même et de toutes les
composantes de sa personnalité. Le travail du soignant consiste à aider le
malade.

En outre, la personnalité du médecin joue un rôle important dans ce qui est


appelé sous le terme de fonction apostolique du médecin.

La mission ou fonction apostolique signifie que chaque médecin a une idée


vague mais presque inébranlable du comportement que doit adopter un patient
lorsqu’il est malade. Tout se passe comme si chaque médecin avait la
connaissance révélée de ce que les patients sont en droit ou non d’espérer, de ce
qu’ils doivent pouvoir supporter et, outre, comme s’il avait le devoir sacré de
convertir à sa foi tous ses patients.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
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6- Les qualités personnelles du médecin à développer :

Vu l’importance du rôle de la personnalité du médecin dans ses rapports avec


ses patients, celui-ci doit s’occuper particulièrement de sa formation personnelle
et s’orienter sur le model de personnalité du médecin spécialiste. Il doit chercher
à développer les traits de personnalité suivants :

- La compassion qui est sans doute une des qualités nécessaires pour tout
soignant. Un bon soignant doit sentir la douleur d’autrui comme la sienne. Il doit
pouvoir se situer par rapport aux sentiments des malades. Cela lui permettra de
comprendre l’état du malade et partager ses souffrances, ce qui acquiert une
importance considérable sur le plan psychologique. Il est à noter qu’on est bien
soulagé quand on se sent compris.

- La sincérité est aussi une des qualités essentielles du travail du médecin qui ne
doit jamais mentir ni dissimuler ses lacunes, ses défauts, ses erreurs même si
personne n’en sait. Chaque erreur commise doit être corrigée si non dans le cas
contraire la conscience professionnelle du médecin sera fortement atteinte.

- L’optimisme du médecin qui est une des qualités nécessaires lui permet de
suggérer au malade l’espoir d’une guérison prochaine.

- La tendresse et l’attention pour le malade constituent deux traits souhaitables


du comportement professionnel du médecin. L’impolitesse et la discourtoisie
traumatisent le malade avec des répercutions infaillibles sur le cours de la
maladie. Le manque d’attention vis-à-vis du malade peut entraîner des
conséquences graves.

- La modestie et le courage, la ponctualité doivent se manifester dans le travail


et le comportement extérieur du médecin.

Il n’est suffisant pour le médecin d’être bon, gentil, tendre, il est surtout
souhaitable de posséder en outre une intelligence pratique, d’avoir de
l’imagination afin de comprendre profondément l’état du malade et de lui
accorder le soutien nécessaire.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
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Bref aperçu sur la psychologie spécifique de la santé

I- Les réactions probables des malades en fonction du caractère aigu


ou chronique de la maladie :

1. Caractéristiques générales :

Les différentes maladies peuvent affecter différemment l’état des malades en


fonction du degré de gravité et du type d’affection de sorte que les réactions du
malade dépendront du caractère aigu ou chronique de la maladie, du caractère
récupérable ou non des lésions, du caractère irréversible ou non des symptômes,
du caractère contagieux ou non de la maladie et enfin du caractère fatal ou non
de l’issue de la maladie. Ainsi chaque maladie va affecter profondément
l’équilibre psychique du malade en fonction du domaine spécifique de
l’affection. On ne réagira pas de la même façon à une maladie aigue comme une
simple diarrhée qu’à une maladie chronique comme le diabète ou un cancer. De
même il serait impossible d’avoir les mêmes types de réactions devant des
problèmes gynécologiques que devant une dermatose purulente.

2. Caractéristiques des réactions des malades dans les maladies aiguës :

En cas de maladie aiguë, les réactions du malade sont plus modérées quand il
s’agit de maladie dont le caractère est réversible et récupérable. Le malade
garde toujours l’espoir d’un futur rétablissement du fonctionnement normal de
l’organisme. L’attention du malade est surtout focalisée sur l’endroit de la
localisation de la douleur dont l’intensification a un impact sur sa personnalité.
Les changements qui interviennent en cas de maladie aiguë sont en général très
intenses et massifs, mais sont réversibles. Dans les cas de maladies respiratoires
aiguës accompagnées de fortes fièvres et de céphalées intenses, il peut apparaître
le sentiment d’apathie, de fatigue, l’irritabilité, la difficulté de concentration et la
diminution des capacités mnésiques et intellectuelles ainsi que la détérioration
de l’humeur. Chez ces malades, les émotions peuvent subir un changement
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notoire. Ils deviennent nerveux, impulsifs, très susceptibles et même agressifs


parfois. Ces troubles émotionnels perturbent la logique et le jugement et le
raisonnement du malade, le caractère critique de la pensée, comme pour dire la
pensée suit après les émotions. On observe une régression de la personnalité du
malade dont le niveau de contrôle peut diminuer mais qui n’est pas en général
affectée et par conséquent conserve entièrement sa capacité d’adaptation.

3. Caractéristiques des réactions des malades dans les maladies


chroniques :

Par contre, quand il s’agit de maladie chronique dont l’issue est susceptible
d’être fatale ou de maladie dont le caractère des lésions est irréversible, les
patients vont développer dans la plupart du temps des réactions agressives ou
dépressives des plus bénignes au plus dramatiques au point que des troubles
émotionnels perturbent le jugement logique, le caractère critique de la pensée.
On observe une régression de la personnalité en général. Des adultes pourront se
comporter comme des petits enfants, se plaindre, pleurer et rechercher de la
compassion de la part de l’entourage. Ces réactions survenant de façon générale
pour toutes les pathologies chroniques seront fonctions de la personnalité du
malade, mais et surtout du caractère particulier de la maladie. Un tel état doit
être nécessairement pris en compte par le personnel soignant dans la prise en
charge des malades. Les changements peuvent être insignifiants mais, ils se
constituent lentement et ont un caractère chronique. La durée même de la
maladie exerce sur une influence négative sur la personne souffrante. Les
perspectives de guérison semblent irréelles pour les malades qui ne s’intéressent
désormais qu’à eux-mêmes et à leur état. L’apaisement périodique des douleurs
et l’amélioration de l’état général provoquent une fluctuation de l’humeur ou
bien suggèrent l’espoir à la guérison. Mais les récidives contribuent au
développement du pessimisme et de la susceptibilité. Les malades deviennent
capricieux, chez eux, se développent une indifférence, une insensibilité. Ils
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deviennent froids à l’égard des proches et des parents. Derrière ces changements
psychiques, se trouve cacher l’envie de guérir.

Il est important de souligner que dans ces genres de situations, la question la


question sur la nécessité de communiquer au malade le caractère incurable de la
maladie ou sa mort imminente. A ce propos, il est recommandé de ne jamais
oublier que les changements intervenus au niveau de la personnalité à la suite
des maladies chroniques, altèrent l’état de conscience et ne permettent pas de
dire toute la vérité aux malades.

II- Les particularités psychologiques des malades en fonction du type


d’affection

1. Les réactions probables des malades en chirurgie :

La haute compétence technique de la médecine est le plus affirmée dans le


domaine chirurgical. Ce qui est susceptible de détourner l’attention du personnel
soignant des autres aspects de la relation soignant- soigné. Cette situation est
souvent mal tolérée par le malade qui se sent abandonné à la merci du médecin
et du reste du personnel soignant en chirurgie. Les patients éprouvent dans la
plupart des cas des sentiments négatifs faits de peurs d’inquiétude, d’angoisse de
sorte que si derniers ne sont pas pris en considération peuvent entraver l’issue
normale de l’opération. Il serait souhaitable de procéder à un entretien individuel
avec les patients et certains membres de leur famille avant de faire toute
opération si facile soit- elle. Ces entretiens permettront de découvrir les
inquiétudes, les craintes et les réserves qu’ils ont par rapport à l’opération. Par
exemple certaines opérations comme les amputations de membres, de seins chez
une femme peuvent avoir un effet traumatique grave sur l’image du corps du
malade entraînant ainsi un refus de l’opération.

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Le malade sait et pense que l’opération ne pourra pas se faire sans


conséquences, ce qui amène le patient à se poser beaucoup de questions sur le
reste de sa vie, les conséquences qui en découleront, l’issue favorable ou fatale
de l’opération. Devant une telle situation, le personnel soignant doit pouvoir
préparer le malade à l’opération et de faire dissiper ses craintes vis-à-vis de
toutes les réserves qu’il a par rapport à l’acte opératoire (l’anesthésie, l’acte
chirurgical etc.)

Il faut pouvoir faire ressortir ce que signifie une telle opération pour le malade et
ce que la maladie peut représenter pour le pronostic vital du malade. Il est
important de tenir compte des craintes et des désirs des malades qui pour la
plupart des cas arrivent sur la table d’opération sans informations justes sur ce
qui va se passer. L’entretien leur permet de lever toute équivoque par rapport
aux informations reçues çà et là par les patients et leurs proches. Le médecin et
l’infirmier doivent pouvoir communiquer au malade les informations sur les
possibilités réelles dont le patient est en droit d’espérer après l’opération, les
difficultés que celle-ci peut engendrer.

L’équilibre psychique du malade, après l’opération dépendra surtout de la


manière dont le schéma des représentations du corps est accepté et réintégré
dans la nouvelle situation par exemple après une amputation nécessitent
l’installation d’une prothèse. Les séquelles provoquées par l’opération peuvent
amener le patient à se poser beaucoup de questions sur le reste de sa vie d’où
l’intérêt d’une prise charge psychothérapeutique.

2- Les réactions probables des malades en dermatologie :

La peau est un organe que l’individu expose devant son entourage au même titre
que sa figure. Elle a une signification psychologique importante à plusieurs
égards : elle apparaît comme :

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- la frontière entre l’individu et son milieu, entre « moi » et « toi » ;


- un organe d’expression de la crainte, des inquiétudes, de la peur, de la
joie, de la honte, bref en un mot un organe « d’exhibitionnisme
somatique » ;
- un organe créant l’impression positive ou négative chez l’observateur ;
- Un organe de sensation avec lequel on sent la chaleur, le froid, les
impulsions sexuelles, les démangeaisons, etc.

A cet effet, toutes les lésions cutanées provoqueront des phénomènes nerveux
importants du point de vue psychologique. Ainsi, il va de soi que les maladies
de la peau susciteront du point de vue esthétique divers sentiments négatifs et
de dégout pour l’entourage et la honte, le sentiment d’infériorité personnel, le
manque de confiance pour le sujet malade. L’image extérieure du malade se
trouve déformée. Les malades surtout à l’âge de la puberté peuvent être
déprimés. Par exemple le sujet malade souffre de sa maladie qui est la lèpre,
mais encore beaucoup plus du fait qu’il soit lépreux, car rejeté, répugnant,
stigmatisé et exclu socialement.

Dans cette situation, l’apport du personnel soignant s’avère capital sur le plan
psychologique. Il s’agira pour lui d’établir un bon contact avec les patients dans
le cadre d’un entretien clinique plus élaboré afin de minimiser leur sentiment
d’infériorité, de honte et leurs inquiétudes pour pouvoir rehausser leur estime de
soi.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
Techniques et des Technologies de Bamako (USTTB)
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3- Les réactions probables des malades en pneumo-phtisiologie :

Les individus atteints de tuberculose peuvent se retrouver dans un état


émotionnel grave qui frôle la dépression. Certains de ces patients seront dans le
déni et refuser leur traitement. Plus de 60 à 70% d’entre eux éprouveront un
choc émotionnel après l’annonce du diagnostic à cause de la stigmatisation
sociale et la discrimination dont les tuberculeux font l’objet dans la société. En
effet l’entourage est enclin à rejeter le tuberculeux par crainte d’être contaminé.
Aussi une des caractéristiques des malades tuberculeux réside au fait qu’ils
peuvent adopter des attitudes persécutrices néfastes face aux réactions de
l’entourage familial et social, ce qui n’est pas de nature à faciliter leur prise en
charge. Dans ces conditions, pour obtenir un résultat positif, le personnel
soignant doit être en mesure de dépasser ses propres craintes et les préjugés sur
le malade tuberculeux à travers l’établissement avec lui d’un bon contact afin
d’éviter qu’il ne refuse ou qu’il n’interrompe son traitement. A cet effet des
entretiens fréquents et périodiques doivent être menés avec lui pour minimiser
de telles situations.

4- L’infection à VIH/SIDA :

Le problème fondamental qui se présente dans ce cas est celui de l’annonce et la


nécessité d’une prise en charge psychothérapeutique. L’annonce d’un tel
diagnostic sans une préparation psychologique préalable du malade peut le
conduire à la dépression et le suicide. Cela est dû au fait que le malade supporte
plus difficilement la peur de la maladie à issue fatale que la maladie elle-même.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
Techniques et des Technologies de Bamako (USTTB)
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Les réactions à l’annonce de la séropositivité sont extrêmement variées, elles


peuvent être intenses, spectaculaires et prolongées au point que les malades
peuvent présenter des troubles de comportement réactionnels d’allure
dépressive, névrotique ou psychotique sur un fond de personnalité
préalablement fragile. La plupart de ces manifestations émotionnelles et
comportementales peuvent être comprises comme autant d’aménagements
particuliers de l’angoisse de mort, toujours présente dans de telles situations.
Quelque soit l’intensité des réactions, il importe cependant pour le soignant
d’apprécier la présence et la qualité de l’entourage socio-affectif pour permettre
une meilleure gestion de la situation. Le soignant doit savoir aborder toutes les
questions relatives à l’annonce qui doit se faire en deux temps : la phase de
préparation avant- test dont le but est de convaincre le patient à faire le test et la
phase après-test qui a pour but d’annoncer le résultat positif ou négatif avant de
prodiguer les conseils nécessaires pour un soutien psychologique.

5- Les réactions probables des malades psychiatriques :

a- Les malades souffrant de troubles psychosomatiques

Le malade psychosomatique va manifester les conflits psychiques par le biais de


son corps. Le terme de psychosomatique est employé au cas où des problèmes
psychologiques déterminent des lésions anatomocliniques objectivables. Ces
pathologies surviennent lorsque le sujet est dans une situation émotionnelle
insoluble, pressent un désagrément impossible à éviter ou est dans
l’impossibilité de prévoir l’issue. Les différents états émotionnels comme la
peur, l’angoisse, la colère, l’anxiété, l’agressivité, les frustrations émotionnelles
etc.… peuvent être des causes potentielles de la pathologie psychosomatique.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
Techniques et des Technologies de Bamako (USTTB)
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b. Les malades souffrant d’hypochondrie et de troubles


hypochondriaques :

L’hypochondrie se caractérise par des préoccupations excessives relatives au


corps et à la santé physique ; elle se fonde sur une perception et une
interprétation erronée des sensations corporelles. Le sujet se plaint de
fourmillements, de lourdeurs abdominales, de douleurs, de brulures, et autres
malaises. Ces sensations s’organisent, aboutissant à la crainte ou à la conviction
d’être atteint d’une maladie organique grave (cancer, cardiopathie, etc.) ; soit
qu’il n’existe aucune perturbation dans le fonctionnement corporel, soit qu’il
existe une symptomatologie physique, mais ne s’appuyant pas sur des
changements organiques tangibles. Le sujet peut souhaiter ou exiger qu’on
multiplie les examens complémentaires pour détecter une éventuelle lésion qui,
en fait, n’existe pas. L’enfant ou l’adolescent hypochondriaque se préoccupe
exagérément d’un trouble réel ou imaginaire de son fonctionnement corporel, ce
qui est souvent l’indice d’un trouble névrotique (particulièrement la dépression)
et à l’occasion d’un état psychotique sous-jacent (craintes paranoïdes).

c. Les malades souffrant de troubles psychotiques majeurs

Le malade psychotique n’a pas conscience du caractère pathologique de son


état, il est convaincu qu’il est dans le vrai. Pour lui, les autres, eux, se trompent
et son comportement va découler de cette conviction pathologique, d’où la
difficulté d’approche du psychotique délirant ainsi que le besoin de le traiter
contre son gré en prenant des mesures autoritaires légales (hospitalisation
d’office ou hospitalisation à la demande d’un tiers).
Les psychoses sont des maladies psychiatriques graves. Elles se caractérisent
pour l’essentiel par un fait majeur : la perte du contact avec la réalité qui se
manifeste par un symptôme essentiel : le délire. Le délire est un ensemble
d’idées fausses qui envahissent le psychisme du délirant, mais c’est aussi une
expérience vécue qui bouleverse complètement et profondément sa personnalité.

Pr Souleymane COULIBALY, PhD, psychologue clinicien, service de psychiatrie, CHU Point G, Bamako
Maître de conférences à Faculté de Médecine et d’OdontoStomatologie (FMOS), Université des Sciences
Techniques et des Technologies de Bamako (USTTB)

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