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Latérodysmorphose mandibulaire
J.-M. Salagnac
Les latérodysmorphoses mandibulaires regroupent des pathologies très variées. Selon leur
étiopathogénie, on distingue : les latérodysmorphoses d’origine mandibulaire pure, les
latérodysmorphoses entrant dans le cadre d’une asymétrie craniofaciale et les latérodysmorphoses
secondaires à une pathologie de voisinage. Elles s’accompagnent souvent de déformations secondaires
au niveau de la face. Le diagnostic des anomalies morphologiques de l’ensemble de la face et de la
mandibule repose sur l’examen clinique et sur un bilan radiologique qui comprend au minimum un
orthopantomogramme et des téléradiographies de profil, de face, axiale. L’étude de ces radiographies
demande une méthodologie précise qui se trouve facilitée par un logiciel et une méthodologie originale. Le
diagnostic doit être aussi précoce et précis que possible. Le traitement doit être adapté à chaque
pathologie. Les traitements orthopédique et orthodontique ne sont jamais suffisants ; ils ne doivent
jamais provoquer de compensations dentoalvéolaires visant à réduire la malformation ; leur objectif est
de rendre congruentes les deux arcades pour le traitement chirurgical auquel ils seront associés. La
chirurgie intervient à différents niveaux de la mandibule en fonction de la pathologie initiale, mais des
interventions complémentaires au niveau de la face sont parfois nécessaires s’il existe des déformations
secondaires importantes.
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observée à la partie basse du visage ne témoignant pas néces- Les photographies intrabuccales sont réalisées de profil droit
sairement de l’importance de la dissymétrie osseuse et gauche, de face en position d’intercuspidation terminale et de
sous-jacente. face en relation centrée montrant le premier contact dentaire.
L’observation de la situation du menton doit se faire en
position de repos et dents serrées. En effet, dans les latérodys-
morphoses avec déviation latérale du menton, celui-ci est dévié Examen électromyographique
en position de repos et dents serrées.
Il est peu utilisé en pratique courante, une asymétrie d’acti-
L’observation intrabuccale et sur les moulages de la situation
vité musculaire est en faveur d’une étiologie musculaire de la
des points interincisifs supérieur et inférieur l’un par rapport à
latérodéviation mandibulaire [10].
l’autre et par rapport au plan de symétrie du visage et des
arcades dentaires, la comparaison des côtés droit et gauche de
la voûte palatine par rapport au raphé médian, des rapports
dentaires transversaux, de l’orientation du plan d’occlusion, de Examen radiologique
l’inclinaison des procès alvéolaires, la recherche de facettes C’est le seul capable d’étudier la dissymétrie squelettique.
d’abrasion anormales par leur étendue et par leur localisation, Toutes les latérodysmorphoses, même celles d’origine mandi-
peuvent orienter le diagnostic mais ne sont jamais suffisantes. bulaire pure, s’accompagnent de déformations secondaires au
L’examen fonctionnel comporte trois éléments importants : la niveau de la face. Ainsi, toute latérodysmorphose mandibulaire
recherche de la relation centrée, l’observation des trajets implique non seulement une étude structurale et positionnelle
d’ouverture et de fermeture mandibulaire et l’observation des de la mandibule, mais aussi une étude structurale et de symétrie
mouvements des condyles ; ces éléments orientent la recherche de l’ensemble de la face et de l’extrémité céphalique. Ces
de l’étiologie de la latérodysmorphose. latérodysmorphoses ont également des répercussions sur les
relations antéropostérieures et verticales maxillomandibulaires.
Dans les latérodysmorphoses d’étiologie mandibulaire unilaté-
Examen photographique rale, l’hémimandibule opposée est souvent affectée et ne peut
donc servir valablement de référence pour apprécier l’amplitude
Les photographies devraient être réalisées en position de de l’atteinte du côté pathologique.
repos et dents serrées, selon un protocole strict et reproductible. La mise en évidence des anomalies primitives et secondaires
Cependant, elles sont incapables de révéler la nature exacte de repose actuellement sur un bilan radiographique qui comprend :
la dissymétrie osseuse sous-jacente. Les photographies du visage une radiographie panoramique, une téléradiographie de profil,
doivent être réalisées de face pour mettre en évidence la une téléradiographie de face et une téléradiographie en inci-
déviation mandibulaire par rapport à l’axe de symétrie du visage dence basale.
et de profil (droit et gauche) pour comparer la symétrie ou la L’examen tomodensitométrique est très utile dans l’explora-
dissymétrie des côtés droit et gauche. Des photographies en tion de certaines asymétries faciales afin de préciser la forme, le
« contre-plongée » peuvent être utiles dans certaines pathologies volume et le siège de la malformation. Des reconstructions 3D
telles les hyper- et les hypocondylies. peuvent être demandées. Leurs coûts et leurs modalités de
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Tableau 1.
Conséquences des mouvements parasites sur les trois incidences.
Mouvements parasites Tangage autour d’un axe transversal Roulis autour d’un axe antéropostérieur Rotation autour d’un axe vertical
Conséquences sur les différentes incidences
Profil Sans conséquences Dissymétries artificielles Dissymétries artificielles
Face Dissymétries artificielles Sans conséquences Distorsions d’image ; faux rapports
verticaux
Axiale Distorsions d’image ; faux rapports Dissymétries artificielles Sans conséquences
antéropostérieurs
réalisation font qu’elles sont encore peu utilisées en ODF. d’une symétrie rigoureuse donnerait une impression de géomé-
Cependant, elles apportent des avantages incontestables, en trie absolue et invraisemblable »... et pourtant, tous recherchent
particulier grâce aux possibilités d’étudier indépendamment en dans leur diagnostic à visualiser et à quantifier les défauts de
« volume », le maxillaire et la mandibule, la charnière craniora- symétrie et à rétablir par leur thérapeutique une symétrie des
chidienne. Il est même possible d’y ajouter une analyse arcades dentaires, une symétrie squelettique des maxillaires et
céphalométrique. Souhaitons que, dans un avenir proche, ces un fonctionnement symétrique des mâchoires. D’où leur
examens prennent toute la place qu’ils méritent. recherche d’un système médian de référence. De nombreux
axes, plans, croix de symétrie ont été proposés, la croix semble
Radiographie panoramique être le meilleur procédé et nous l’avons retenu, mais aucun n’est
totalement satisfaisant [16].
Bien qu’imprécise, elle fournit beaucoup d’informations. Elle
Tous les auteurs essaient de différencier les asymétries
peut être réalisée soit en occlusion terminale, soit en bouche
« acceptables » considérées comme normales, des asymétries
semi-ouverte ce qui permet d’apprécier la mobilité d’un condyle
pathologiques. L’objectif du diagnostic est de mettre en évi-
par rapport à l’autre. Ce cliché permet notamment de comparer
dence le siège et l’importance des asymétries et de préciser les
la symétrie :
possibilités thérapeutiques. À partir de quelle amplitude une
• de forme et de dimensions des deux hémimandibules ;
asymétrie doit-elle être traitée ?
• de volume des cols et des têtes condyliennes ;
La difficulté à obtenir un bilan tridimensionnel correct, à
• la forme et la situation des apophyses coronoïdes par rapport
repérer certains points, à trouver un plan de symétrie irrépro-
au sommet des condyles ;
chable fait que malgré une méthodologie rigoureuse, il persiste
• de situation du canal dentaire par rapport au bord basilaire ;
des erreurs. Beaucoup d’analyses de symétrie sont longues et
• la distance des apex dentaires par rapport au canal dentaire ;
complexes à mettre en œuvre et ne sont guère utilisables en
• l’existence ou non d’encoche préangulaire (unilatérale ou
pratique courante. Le praticien doit utiliser une méthode
bilatérale, symétrique ou asymétrique).
simple, même approximative, qui permet d’obtenir une préci-
Répétée périodiquement elle permet de suivre l’évolution de sion de résultats supérieure à la somme des erreurs inévitables
la pathologie. et qui lui donne des renseignements suffisants.
Les progrès de l’informatique, le logiciel « Cephalo 2000 » de
Bilan téléradiographique tridimensionnel la société Nantes Ortho pour l’analyse de profil et la méthode
Il s’est imposé depuis les travaux de Nardoux [11] et surtout de visualisation des asymétries proposée ici permet une étude
depuis le rapport du congrès d’ODF en 1974 présenté à Nantes précise, complète et rapide du bilan tridimensionnel facilement
par Choquin, Duchateaux, Ferré, Vion sous la direction de utilisable en pratique quotidienne [17].
Delaire [3]. Une méthode d’étude du bilan est nécessaire ; toutes Avant étude de ces téléradiographies, il est indispensable de
les méthodes proposées se heurtent à une difficulté : celle du vérifier si elles ne comportent pas d’erreurs dues à une mauvaise
choix du plan de symétrie du visage ; mais quel plan de orientation de la tête lors de la prise des clichés. La critique du
symétrie choisir ? bilan tridimensionnel a été bien étudiée par Vion [18] et Verdon.
Pour Topinard : [12] « Dans le crâne, on ne saurait trouver ni Ces auteurs insistent sur le caractère exceptionnel d’obtenir un
un point, ni une ligne invariable à l’abri de toute objection bilan tridimensionnel rigoureusement réalisé, c’est-à-dire trois
pour servir de comparaison ou de point de départ à un système incidences parfaitement orthogonales entre elles, avec notam-
de mensuration. » Pour Wackenheim : [13] « Lorsqu’un organe ment une incidence frontale orthogonale à la vue latérale et
aussi complexe que le squelette craniofacial est asymétrique, il une incidence axiale orthogonale à la vue latérale : en obtenir
est très difficile de trouver quelle est la structure primitivement deux chez un même patient à 1 an d’intervalle, par exemple
anormale puisque l’asymétrie est une comparaison droite- pour suivre l’évolution d’une latérodysmorphose, relève presque
gauche qui implique qu’au préalable, nous ayons fixé un de l’impossible.
système de références. » Le Tableau 1 résume les conséquences des mouvements
Rappelons la définition de la symétrie : du grec sun : avec et parasites sur les trois incidences.
metron : mesure, harmonie résultant de certaines combinaisons Les principales causes d’erreurs dans l’interprétation des
et proportions régulières ; la définition mathématique est : clichés sont :
disposition de deux figures qui se correspondent point par • la qualité des documents radiographiques ;
point, de telle sorte que deux points correspondants de l’une ou • l’erreur personnelle de l’opérateur dans le relevé des points,
de l’autre soient à égale distance d’un point, d’une droite ou des mesures... ;
d’un plan donné et de part et d’autre. • l’erreur de méthode qui conduit à des conclusions erronées.
On ne peut aborder le problème du choix du plan de symé-
Téléradiographie de profil
trie sans remarquer un paradoxe dans la littérature orthodonti-
que. En effet, il est admis que la symétrie parfaite n’existe pas Bien qu’elle ne permette ni l’étude transversale ni l’étude de
chez l’homme, la parfaite symétrie est illusoire au niveau de la la symétrie de la mandibule, elle demeure indispensable pour
face même chez les sujets cliniquement normaux, ni même l’appréciation de l’architecture craniofaciale dans sa globalité,
dans la nature. Pour Izard [14] « L’asymétrie de la figure est une des relations mandibulomaxillaires, des relations mandibulocrâ-
caractéristique de l’espèce humaine. » La symétrie peut même niennes, des relations mandibulorachidiennes. C’est l’incidence
être nuisible à l’harmonie du visage, pour Baud [15] « un visage de choix pour l’étude (Fig. 3) :
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Tableau 2.
Signes radiologiques de bonne Signes de mouvements parasites
orientation en incidence frontale en incidence frontale
- La ligne supérieure des rochers se - La ligne supérieure des rochers se
trouve au niveau de la suture trouve au-dessus ou au-dessous de
ethmoïdomaxillaire (bord la suture ethmoïdomaxillaire
médiosupérieur de l’apophyse - Un côté paraît plus large que
pyramidale du maxillaire) l’autre, donnant l’impression d’une
- La distance entre le plafond de dissymétrie transversale
l’orbite et le menton doit être la
même sur le cliché de profil et de
face
- La distance entre le bord des
incisives inférieures et le menton
doit être la même sur le cliché de
profil et de face
2
3
• pour la recherche de l’image d’un double contour sans
2
intersection des branches montante et horizontale de la
mandibule qui serait un signe pathognomonique des latéro-
1 gnathies mandibulaires pour Choquin [3].
Téléradiographie de face
Elle est souvent réalisée en position d’intercuspidation
terminale, ce qui peut faire apparaître des fausses asymétries
mandibulaires qui sont en réalité des anomalies de position
A mandibulaire. Nous partageons l’avis de Deblock, Groshens-
Royer et Counot-Nouqué [4] de réaliser les téléradiographies
frontales en relation centrée. Elle ne permet de juger de la
position réelle de la mandibule par rapport au maxillaire
supérieur et par rapport au crâne qu’à cette condition.
Remarque : cette incidence permet de comparer la forme,
l’orientation et les dimensions transversales des branches
montantes, mais ne permet pas d’apprécier les dimensions
antéropostérieures des branches montantes et horizontales
(Tableaux 2, 3, 4).
Étude de la symétrie générale de la tête en incidence
frontale. L’étude de la symétrie verticale et transversale s’effec-
tue par comparaison des côtés droit et gauche par rapport à une
croix dite croix de symétrie (Fig. 4) [19].
Lorsqu’il existe une symétrie crânienne, les points et structu-
res suivants sont alignés de haut en bas : le sommet du crâne :
point SC, l’apophyse crista galli : point ethmoïdien central (Ec),
la lame perpendiculaire de l’ethmoïde, la suture intermaxillaire,
le centre de l’apophyse odontoïde (Od), le point interincisif
supérieur, le point interincisif inférieur, le point menton (Me).
Le segment SC-Ec correspond à la voûte du crâne, le segment
Ec-ENA correspond à l’étage supérieur de la face, le segment
ENA-Me correspond à l’étage inférieur de la face (Fig. 4). Dans
beaucoup d’asymétries cranio-facio-mandibulaires, l’alignement
de ces trois secteurs n’existe plus.
Cependant, le secteur base de la crista galli lame perpendicu-
laire de l’ethmoïde n’est pas, ou peu, affecté, aussi l’axe vertical
de la croix est positionné sur ce segment. Normalement, ces
trois segments sont confondus avec l’axe vertical de la croix.
Ainsi les déviations des trois segments par rapport à l’axe de la
croix apparaissent nettement.
Ce procédé est particulièrement intéressant dans les grandes
asymétries où, comme le souligne Talmant, [20] « il n’y a plus de
Figure 3. plan de symétrie ».
A, B. 1. Appréciation du niveau de l’angle mandibulaire/rachis. 2. Double Ils sont construits et tracés de couleurs différentes comme suit
contour mandibulaire. 3. image d’une hémimandibule incluse dans (Fig. 4) :
l’autre. • le supérieur, à partir du point Ec situé à l’union de la lame
criblée et de la lame perpendiculaire de l’ethmoïde et d’un
point de la lame perpendiculaire (LP) pris en regard du
• de la situation de l’angle mandibulaire par rapport au rachis renflement de la muqueuse pituitaire, cette ligne est prolon-
cervical supérieur (notamment par rapport à l’angle antéro- gée vers le haut jusqu’au sommet de la voûte du crâne qu’elle
inférieur de C2) dans les latérodysmorphoses mandibulaires coupe au point SC. Il objective les anomalies de situation du
par anomalie verticale d’une ou des deux branches montantes sommet du crâne et les dissymétries de la voûte ;
de la mandibule ; • un moyen, tracé de la crista galli (point Ec) au point LP ;
• des décalages sagittaux d’une branche montante par rapport prolongé vers le bas, il s’arrête au niveau du centre de l’image
à l’autre ; de l’odontoïde (il correspond au segment Na-ENA de la ligne
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Tableau 3.
Structures utiles à l’étude de symétrie visibles sur une incidence frontale.
Boîte crânienne Rachis-base du crâne Face
Contour de la voûte crânienne : - Odontoïde : visible une fois sur deux Orbite voûte orbitaire : bien visible
- pariétal environ Arcade zygomatique : peu visible
- temporal - Corps vertébraux visibles Vomer : bien visible
- frontal : cortical interne - Masses latérales de l’atlas : peu visibles Fosses nasales : bien visibles
- Crista galli : assez peu visible Maxillaire :
- Jugum sphénoïdal : bien visible - apophyse pyramidale du maxillaire : visible
- Rocher : bord supérieur bien visible - tubérosité maxillaire : visible
- Trous grands ronds : bien visibles - sinus maxillaire : bien visible
- apophyse montante : bien visible, surtout dans la partie inférieure
- suture intermaxillaire : bien visible
Mandibule :
- ATM : cavité glénoïde visible ; condyle temporal : visible ; condyle
mandibulaire : rarement visible
- ramus : très visible
- corpus : très visible
- denture : incisives centrales supérieures et inférieures bien visibles
ATM : articulation temporomandibulaire.
Tableau 4.
Types de dissymétries que l’on peut étudier sur un cliché en incidence
frontale.
Verticale et transversale :
- globale de la tête
- de la voûte du crâne
- des orbites
- de la base du crâne
- des fosses nasales
- des arcades zygomatiques
- des parties latérales du maxillaire supérieur
- des condyles temporaux, des ATM
- des branches montantes de la mandibule
- des angles mandibulaires
- des plans d’occlusion droit et gauche
ATM : articulation temporomandibulaire.
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SC
Clp
FM FM FM
Na
M M M
Pts CT CT
Ct
CP CP
NL NL
Cp
Pti
Od NP ENA
la Od
NP
ENA
is
Go
Go
ls
Pa
Pa
ia
Mo
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C3 C3 C3 C3
C1 C1 C1 C1
MC
FM FM FM FM
M M M M
C2 C2 C2 C2
CT CT CT C4 CT
CP F5 CP CP CP
NL NL
NL NL
F1 F1
Od Od
NP NP
F3 ENA F3 ENA
F6 F6
Go Go
Go Go
Pa Pa
Pa Pa
F5
F7 F7
Mo Mo
ENA
Mx Mx
Ms Ms
Mi
Mi
Figure 9. Points et lignes utilisés pour l’étude de la symétrie des Figure 10. Comparaison de la forme des deux hémimandibules/axe
structures dentoalvéolaires. vertical de la croix de symétrie en incidence frontale. L’axe transversal de
la croix est placé au niveau des arcades zygomatiques.
crista galli, lame perpendiculaire de l’ethmoïde, vomer, tuber-
cule antérieur de l’atlas, basion, centre de l’odontoïde, point
occipital postérieur. Cette ligne est divisée en trois segments Aussi la branche verticale de la croix est-elle placée sur le
(Fig. 11), ce sont : segment moyen.
• segment antérieur : crête frontale interne-ENP (épine nasale
postérieure) ; La branche transversale de la croix de symétrie est placée soit
• segment moyen : voméro-occipital (partie postérieure du au niveau des apophyses ptérygoïdes pour étudier la symétrie
vomer-basion), ce segment est généralement le moins affecté d’implantation des maxillaires supérieur droit et gauche, soit au
par les dissymétries ; niveau des ATM pour étudier la symétrie de leur implantation
• segment postérieur : basion-occipital postérieur. sur la base du crâne.
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Tableau 5.
Signes radiologiques de bonne orientation en incidence axiale Signes de mouvements parasites en incidence axiale
1. La crête frontale doit coïncider avec le plan sagittal médian (représenté par 1. Tangage : défaut le plus fréquent dû à un manque de déflexion de la tête :
la lame verticale de l’ethmoïde et le vomer) - le basion se projette dans la moitié postérieure de l’image de l’odontoïde
2. Les faces vestibulaires des incisives supérieures doivent déborder autant - les faces vestibulaires des incisives supérieures ne sont pas au même aplomb
l’image radiologique du frontal que sur la vue latérale du frontal que sur la vue latérale
3. La distance entre les bords libres des incisives supérieures et inférieures doit - la distance entre les bords libres des incisives supérieures et inférieures n’est
être la même en incidence axiale et latérale pas la même que sur la vue latérale
2. Roulis : la crête frontale est déviée (à droite ou à gauche) par rapport au
plan sagittal médian.
Tableau 6.
Structures utiles à l’étude de symétrie visibles sur une incidence axiale.
Boîte crânienne Base du crâne Face
Corticale externe du : Temporal : Maxillaire (peu visible) :
- frontal - pyramides pétreuses - tubérosités (bien visibles)
- pariétal - situation des ATM - arcades dentaires
- occipital Occipital : Mandibule (très visible) :
Il est facile d’observer la - contour du trou occipital - corps
symétrie générale - projection de l’odontoïde sur le bord antérieur du trou - branches montantes
occipital - col
Sphénoïde : - apophyses coronoïdes
- corps - condyles +++
- apophyses ptérygoïdes - arcades dentaires (appréciation de la coordination
Ethmoïde : apophyse crista galli (visible une fois sur deux). transversale des arcades dentaires)
- incisives supérieures et inférieures (apprécier le décalage
antéropostérieur)
Les trois étages du crâne
Étage postérieur de la statique Étage moyen de l’implantation mandibulaire Étage antérieur de l’implantation maxillaire
ATM : articulation temporomandibulaire.
Tableau 7.
Types de dissymétries que l’on peut étudier sur un cliché en incidence
axiale.
Antéropostérieure et transversale
- du contour du crâne
- de la base du crâne
- de la situation de l’odontoïde/trou occipital
- des condyles occipitaux
- des pyramides pétreuses
- des tubérosités maxillaires
- des apophyses ptérygoïdes
- de l’implantation des ATM
- du corps de la mandibule
- des arcades dentaires supérieure et inférieure
ATM : articulation temporomandibulaire.
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■ Exemples cliniques
Pour illustrer la méthodologie décrite, nous présentons deux
pathologies mal connues des orthodontistes et qui échappent
aux possibilités thérapeutiques de l’orthopédie dento-maxillo-
faciale : les latérodysmorphoses mandibulaires par hypercondy-
lie et les latérodysmorphoses mandibulaires par hypocondylie.
Ces deux pathologies évolutives sont sources d’échec thérapeu-
tique faute de ne pas avoir été reconnues suffisamment tôt.
Latérodysmorphose mandibulaire
par hypercondylie
Les hypercondylies mandibulaires sont rares, bénignes, elles
sont typiquement caractérisées par une hypertrophie avec
hyperactivité de croissance de l’unité condylienne (condyle et
Figure 12. Étude de la symétrie mandibulaire en incidence axiale.
col du condyle). L’examen histologique montre un os sain avec
accroissement excessif du cartilage sans aucune anomalie
structurale : il existe entre la fine couche fibrocartilagineuse
■ Pronostic et traitement superficielle et la structure osseuse profonde, une couche
d’épaisseur variable de cartilage hyalin dans laquelle les
Le pronostic et le traitement dépendent du diagnostic chondrocytes sont groupés en îlots [21].
étiopathogénique qui doit être aussi précoce et précis que Leur étiopathogénie est mal connue. Différentes causes ont
possible. Seules les latérodysmorphoses mineures sans troubles été proposées : traumatique, vasculaire, neurocristopathique,
esthétiques et fonctionnels importants peuvent trouver une phénomènes inflammatoires locorégionaux...
solution dans un traitement orthopédique et orthodontique. Elles sont le plus souvent unilatérales mais peuvent être
Les traitements orthopédiques fonctionnels par appareillage, bilatérales. Elles apparaissent rarement avant 10-12 ans mais
destinés à recentrer la mandibule par rapport au plan sagittal peuvent survenir beaucoup plus tardivement et affectent
médian et à assurer une mastication prédominante du côté légèrement plus les filles que les garçons. Lorsqu’elles apparais-
opposé à l’insuffisance de l’hémimandibule, peuvent être utilisés sent chez un sujet jeune, elles s’accentuent pendant la crois-
chez de jeunes patients dans certaines latérodysmorphoses sance et se stabilisent ensuite. Dans les formes à évolution
comme les hypocondylies, les dysplasies condyliennes, le rapide des adaptations dentoalvéolaires et des déformations
syndrome du premier arc... Ils peuvent apporter une améliora- osseuses secondaires du maxillaire et de la mandibule peuvent
tion de la fonction masticatrice et même de la forme de la apparaître. Il faut savoir reconnaître les signes cliniques et
mandibule, mais ils ne sont jamais suffisants pour obtenir une radiologiques précurseurs ainsi que leurs caractéristiques
forme normale de la mandibule en fin de croissance. cliniques et radiologiques. Il est alors facile de faire le diagnostic
Le plus souvent, le traitement associe orthopédie, orthodontie différentiel avec :
et chirurgie orthognathique. L’objectif des traitements orthopé- • les prognathies mandibulaires, les prolatérognathies mandi-
diques et orthodontiques est de rendre congruentes les deux bulaires dans lesquelles les condyles sont de volume normal
arcades dentaires pour permettre la prise en charge chirurgicale. et l’un des cols est allongé ;
Ils ne doivent surtout pas provoquer des adaptations dentoal- • les prognathies de l’acromégale ;
véolaires pour compenser l’anomalie squelettique, ce qui • les hypertrophies mandibulaires des dysplasies fibreuses ;
pourrait gêner la chirurgie. • les macromandibulies de certaines « classe II division 2 » ;
• les hypocondylies unilatérales ;
La chirurgie est spécifique à chaque type de latérodysmor-
• les tumeurs condyliennes ;
phose et peut intervenir à différents niveaux de la mandibule :
condyle, col du condyle, branche montante, branche horizon- • les hémihypertrophies mandibulaires ;
tale, symphyse mentonnière. Des interventions complémentai- • les latérognathies fonctionnelles.
res peuvent parfois être nécessaires lorsqu’il existe des Selon la classification nantaise, on distingue deux principales
déformations secondaires au niveau du squelette facial. Un formes anatomocliniques : les formes à développement vertical
traitement orthodontique postopératoire est parfois nécessaire et les formes à développement transversal. Plus exceptionnelle-
pour améliorer les rapports occlusaux. ment, on rencontre des formes mixtes et des associations
hypercondylie d’un côté et hypocondylie sur le côté
La latérodysmorphose du syndrome de Robin constitue une controlatéral.
exception. Très élargie au départ, la forme de la mandibule se
normalise progressivement après les traitements chirurgicaux Examen direct du visage
initiaux et les traitements orthopédiques.
De face (Fig. 13)
Des asymétries mandibulaires modérées, « acceptables »,
souvent associées à des asymétries de la base du crâne et/ou des Cette anomalie se caractérise par :
maxillaires supérieurs droit et gauche présentent des occlusions • une asymétrie de l’étage inférieur de la face ;
dentaires asymétriques de type classe I d’Angle d’un côté et • une augmentation de hauteur de l’étage inférieur de la face
classe II d’Angle de l’autre côté. Ces situations sont relativement du côté de l’hypercondylie ;
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Examen radiologique
Le bilan radiologique permet de mettre en évidence les
caractéristiques de l’hypercondylie, mais aussi les adaptations du
squelette facial en général et du squelette maxillaire en
particulier.
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Examen scintigraphique
La scintigraphie osseuse isotopique permet d’apprécier le
potentiel de croissance du condyle à un moment donné et donc
Figure 15. Bilan téléradiographique de profil. le caractère évolutif de l’hypercondylie. Cet examen préopéra-
toire est essentiel et doit être réalisé systématiquement selon
Vernex [21].
Traitement
Un traitement d’orthopédie dentofaciale ne peut empêcher
l’évolution des déformations dentoalvéolaires consécutives à
l’hypercondylie ; il peut même être néfaste et ne doit jamais
créer de compensations dentoalvéolaires. Il est donc très
important de reconnaître les premiers signes cliniques et
radiologiques de l’hypercondylie. Pour Delaire [22, 23], la condy-
lectomie est l’indication de choix quel que soit l’âge du sujet ;
un néocondyle fonctionnel se reformera ensuite. Le traitement
doit être entrepris dès le diagnostic établi et quel que soit l’âge
du patient. Lorsqu’il existe des déformations secondaires
mandibulaires et maxillaires sévères, des ostéotomies complé-
mentaires sont parfois nécessaires ainsi qu’un traitement
orthodontique pour parfaire l’occlusion dentaire (Fig. 18–24).
Latérodysmorphose mandibulaire
par hypocondylie
Examen direct du visage
Asymétrie de l’étage inférieur de la face (Fig. 25, 26) avec :
• ascension de la commissure labiale droite ;
• légère déviation vers la droite du menton ;
• élévation de l’angle mandibulaire droit/gauche.
Examen intrabuccal
Figure 16. Bilan téléradiographique de face. Il met en évidence (Fig. 27) :
• une non-concordance des points interincisifs supérieur et
inférieur ;
• Déviation de la symphyse mandibulaire. • une inclinaison vers la gauche des axes des incisives inférieu-
• Obliquité compensatrice des axes des incisives inférieures. res ;
• des rapports occlusaux transversaux conservés.
• Abaissement du plancher du sinus maxillaire.
En incidence verticale (Fig. 17) Examen radiologique
• Hypertrophie condylienne. Téléradiographie de profil
• Allongement de l’hémimandibule du côté de l’hypercondylie.
Elle souligne (Fig. 26, 28) :
• Importance de la latérodéviation mandibulaire. • un contour de la branche montante droite totalement inclus
• Décalage des points interincisifs supérieur et inférieur. dans l’image de la branche montante gauche ;
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Salagnac J.-M. Latérodysmorphose mandibulaire. EMC (Elsevier SAS, Paris), Odontologie/Orthopédie
dentofaciale, 23-472-F-10, 2006.
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