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Si la formalisation par écrit d’un contrat à durée indéterminé à temps plein n’est pas
obligatoire (contrairement aux autres types de contrat : CDD, temps partiel, etc.), le
recrutement d’un salarié conduit, le plus souvent, à la rédaction d’un contrat dans lequel les
parties vont convenir des conditions de leur collaboration.
Remarque : une directive communautaire (n° 91-533 du 14 octobre 1991) impose la remise
d’un écrit au salarié dans les deux mois suivants son embauche sur lequel doivent figurer
plusieurs mentions obligatoires (identité des parties, titre, grade et catégorie d’emploi
exercé, rémunération, date du début du contrat, etc.) mais le Ministère du travail, confirmé
sur ce point par la CJUE, considère que ces informations sont contenues dans les
documents remis à l’embauche ou figurant sur les bulletins de paie.
De la même manière, alors qu’un contrat ne peut, en principe, être modifié sans le
consentement mutuel des parties (art. 1193 du code civil), la jurisprudence admet que
l’employeur puisse imposer au salarié un changement de ses conditions de travail alors
même que cette décision reviendrait sur une clause de son contrat de travail. (II)
Rappelons, tout d’abord que le contrat de travail ne peut, d’une manière générale, déroger
dans un sens défavorable aux dispositions légales ou conventionnelles sauf si cette faculté
de dérogation est expressément prévue.
Exemple : depuis 2014, un employeur ne peut pas, en principe, occupé un salarié à temps
partiel moins de 24 heures par semaine… sauf si le salarié en fait la demande (contraintes
personnelles, cumul d’activité, étudiants de moins de 26 ans).
Les clauses instituant une responsabilité financière du salarié sont interdites car assimilées
à des sanctions pécuniaires prohibées par l’article L.1331-2 du code du travail (et
pénalement sanctionnées – cf. L.1334-1 du code du travail).
De la même manière, sont interdites les clauses « compromissoires » (clause par laquelle
les parties conviennent, à l’avance, de confier le règlement d’un éventuel litige né de
l’exécution d’un contrat à un arbitre extra-judiciaire) et les clauses d’«arbitrage » (clause par
laquelle les parties, déjà en litige, conviennent de confier le règlement de leur différend à un
arbitre extra-judiciaire). L’article L.1441-1 du code du travail réserve, en effet, la résolution
des litiges nés des contrats de travail aux conseils de prud’hommes.
Les clauses par lesquelles un salarié renonce par avance à un droit légal et celles par
lesquelles l’employeur se réserve le droit de modifier unilatéralement le contrat sont
également interdites (clause potestative).
Les clauses du contrat ne peuvent pas porter atteinte aux droits fondamentaux de la
personne ni comporter de dispositions contraires à l'ordre public ou aux principes issus de
la Constitution (égalité professionnelle entre les hommes et les femmes).
La Constitution mais également des traités internationaux ratifiés par la France (C.E.D.H.,
conventions de l’O.I.T., …) ou encore des règles communautaires (directives, règlements)
contiennent des dispositions protégeant spécifiquement l’exercice de certaines libertés
telles que le droit de grève, la liberté syndicale, la liberté du travail, la liberté religieuse, le
secret de la correspondance, …
L’exercice de ces libertés dans le cadre d’une relation de travail salarié n’est toutefois pas
absolu et peut, dans certaines conditions, connaître des limites voire des interdictions.
L’article L.1221-1 du code du travail précise, à ce propos, que « nul ne peut apporter aux
droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient
pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».
Ainsi, tout en reconnaissant ces droits et libertés, la loi admet des restrictions à leur exercice
dès lors ces limitations sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées
au but recherché.
Parmi les causes justifiant une restriction aux libertés individuelles, on peut citer :
- Le contact avec le public ou la clientèle qui peuvent légitimer le port d’une tenue
spécifique ou l’interdiction de telle ou telle tenue ;
- La sauvegarde des intérêts légitimes de l’entreprise (clause d’exclusivité, clause de
non concurrence, …);
- La santé et la sécurité (contrôle des sacs avant l’entrée dans l’entreprise ayant fait
l’objet d’alertes à la bombe, contrôle de l’état d’imprégnation alcoolique pour des
salariés affectés à la conduite de véhicules, …)
Si la restriction aux libertés est justifiée par une cause légitime, encore faut-il que la mesure
imposée par l’employeur soit proportionnée au but recherché.
C’est sur ce même principe que l’article L.1321-2-1 du code du travail (créé par la loi du 8
août 2016) dispose que : « le règlement intérieur peut contenir des dispositions inscrivant le
principe de neutralité et restreignant la manifestation des convictions des salariés si ces
restrictions sont justifiées par l'exercice d'autres libertés et droits fondamentaux ou par les
nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise et si elles sont proportionnées au but
recherché »
A. Intérêt de la distinction
Les décisions prises par l’employeur s’imposent à son salarié sauf si elles ont pour incidence
de modifier son contrat de travail.
Il est, dès lors, essentiel de savoir distinguer les décisions de l’employeur qui caractérisent
une modification du contrat de travail de celles qui s’analysent comme de simple
changement de ses conditions de travail.
A l’inverse, le salarié pourra refuser la modification de son contrat de travail sans que son
opposition ne puisse, en tant que telle, justifier son licenciement pour faute (même si son
refus peut, in fine, conduire à son licenciement).
Si, dans cette hypothèse, un refus ne peut, par lui-même, légitimer un licenciement
disciplinaire, il peut cependant conduire au licenciement du salarié concerné s’il apparaît
que la modification proposée était justifiée par un motif légitime (difficulté économique,
insuffisance professionnelle, inaptitude médicale au poste, …).
Selon les juges, le caractère contractuel d'une modification s'apprécie en fonction non
seulement des stipulations contractuelles mais aussi en considération des éléments par
nature « essentiels » à tout contrat de travail.
La distinction n’est pas toujours facile et dépend, parfois, des circonstances de l’espèce.
La révision d’un accord collectif (ou la remise en cause d’un usage d’entreprise, d’un
engagement unilatéral ou d’un accord atypique) ne constitue pas, en revanche, une
modification du contrat de travail auquel le salarié peut s’opposer. Ainsi, les nouvelles
clauses de l’accord se substitueront aux anciennes sans que le salarié ne puisse se
prévaloir d’une modification de son contrat.
Enfin, il arrive que le contrat de travail signé par un salarié lors de son embauche, prévoit
expressément la possibilité pour l'employeur de modifier unilatéralement les modalités
d'exercice du travail et prive, par conséquent, le salarié de la possibilité de s’y opposer.
C’est le cas, par exemple, de la clause de mobilité qui permet à l’employeur d’imposer au
salarié un nouveau lieu de travail sans son accord.
B. Illustrations
Sauf lorsqu’elle s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre d’un accord de performance, la
rémunération, qui constitue un élément essentiel du contrat du travail, ne peut pas être
modifiée, ni dans son montant ni dans sa structure, sans l'accord expresse du salarié (même
si l’employeur prétend que cette modification est plus favorable au salarié).
NB : Bien que faisant partie de la rémunération, les primes ne sont pas traitées comme le
salaire de base et peuvent, quant à elles, être modifiées sans l’accord du salarié si elles ne
résultent pas de son contrat de travail mais d’un accord collectif ou d’un usage d’entreprise
Pour autant, l'employeur peut faire évoluer les tâches effectuées par le salarié tant que ces
missions restent en lien avec sa fonction et sa qualification.
Selon les circonstances, un changement d'affectation peut ainsi être considéré par les juges
comme une modification de contrat ou un simple changement des conditions de travail.
C’est ainsi qu’il a été jugé que l’affectation d’un salarié conduisant précédemment des
tramways, sur une ligne de bus ne caractérisait une modification de son contrat de travail
mais un simple changement de ses conditions de travail.
La mention du lieu de travail dans le contrat de travail a valeur d'information à moins qu'il
ne soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail
exclusivement dans ce lieu.
En l'absence de clause de mobilité ou de stipulation d'un lieu exclusif de travail prévu au
contrat, la jurisprudence a développé le critère du « secteur géographique », pour
déterminer l'existence d'une modification du contrat de travail.
Lorsque le nouveau lieu de travail, se situe dans le même secteur géographique que le
précédent, il s'agit d'un simple changement des conditions de travail ne nécessitant pas
l'accord du salarié.
La jurisprudence n’a pas clairement défini la notion de secteur géographique dont les
contours relèvent souvent de l'appréciation souveraine des juges du fond selon les
circonstances des litiges qui leur sont soumis.
L’interdiction du travail à domicile sans l'accord du salarié est, selon la cour de cassation,
justifiée par les articles 9 du code civil et L. 1121-1 du code du travail, qui énoncent
respectivement que « chacun a droit au respect de sa vie privée » et que « nul ne peut
apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions
qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but
recherché ».
L’article L. 1222-9 du code du travail précise, quant à lui, que le refus du salarié de travailler
à son domicile ne peut pas constituer un motif de rupture du contrat.