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Chapitre II : Origine des langues

L’origine des langues se cache dans le brouillard de l’évolution. S’il est possible
de dater l’écriture, il reste assez difficile de dire comment et quand l’homme a
commencé à parler. Trouver une réponse à la question de l’origine des langues
ne peut relever que d’une hypothèse. Cette question implique en effet deux
problèmes.
Le langage humain est-il une pure évolution du langage animal ? Cela relèverait
tout simplement de l’émotionnel.
Y avait-il au commencement une langue commune qui se serait diversifiée ou
alors les diverses langues ont émergé à travers diverses lieux ?
Nous avons déjà vu que l’émergence du langage vocal ne s’explique qu’avec
l’intelligence.
Louis Lachance, dans un long chapitre, souligne que la différence entre le
langage émotionnel ou animal n’est pas de degré mais de nature. Cf. la
Philosophie langage P.45. Cela est avéré dans la mesure où les signaux animaux
ne changent pas, mais la langue humaine évolue et change. On invente les mots
nouveaux pour les situations nouvelles.
Malgré le fait que tous les hommes sont doués de la même intelligence, tous ne
parlent pas la même langue. Et en observant la diversité de langues on constate
aussi d’une part qu’il existe des familles de langues ayant les mêmes sources et
d’autre part les différences considérables entre diverses familles de langues.
La question qui se pose est de savoir si l’hominisation et la langue conséquente
se sont réalisées indépendamment des divers lieux. Y avait-il au départ une
langue commune qui se serait diversifiée avec les immigrations ? La question est
ouverte mais les préhistoriens préfèrent la seconde hypothèse, celle des
immigrations. Ce qui est certain c’est que la langue est vivante et se développe
avec l’évolution sociale et culturelle. Par l’expansion des espèces humaines et
l’émigration des diverses ethnies, les conditions de vie changent et les nouveaux
défis font surface. Du coup, les coutumes, la culture et les langues se

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développent d’une manière différente. En outre l’usage et la commodité
peuvent produire les nouvelles langues. Ex. Du latin dont sont issues les
nouvelles formes du langage tel que le Français, l’Espagnol…
L’histoire nous apprend aussi qu’une langue peut mourir ou être effacée par une
autre (le latin est encore en vie grâce à l’Église)
De même, une langue peut s’imposer à un peuple qui, originellement, parlait une
autre. Malgré le fait que le langage soit un phénomène humain par excellence, il
reste que c’est assez tardivement qu’il a fait l’objet d’une science spécifique. Le
fait est que l’animal parlant, a tout d’abord été appréhendé comme un animal
raisonnable. Cela n’exclut pas que la langue comme moyen d’expression et
même de domination a toujours attiré l’attention. Dans le monde mythique, la
parole est considérée comme un don de Dieu et est dotée d’une force Divine.
C’étaient les prêtres et les sorciers qui s’occupaient d’une manière particulière
de la langue. C’est ainsi que nous avons des formules magiques dans la religion
ou sorcellerie pour se servir des forces supérieures. Et dans les rites religieux il
y’a des paroles sacrées.
Les sophistes grecs semblent les premiers à s’être emparé de la langue pour une
manipulation plutôt profane, ici la force Divine est substituée par la force
démagogique. Celui qui sait parler et argumenter s’impose, la force des
sophistes était la rhétorique. Même si Platon les fait paraître en mauvaise
posture, ils étaient capables de dire ce qui est faux et vrai dans une persuasion
sans pareille.
La rhétorique est très importante dans la politique : la vérité est secondaire ce
qui est premier c’est le succès.

Relation langue et vérité


Socrate s’évertuait à chercher le vrai sens des mots c’est pourquoi il procède
toujours par la définition. Platon dans le Cratyle considère les paroles comme
expressions naturelles des idées innées. Dans Le sophiste il traite la structure

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complète d’une phrase lui permettant d’établir sa vérité ou sa fausseté. Aristote
pour sa part développe dans l’Organon la logique en analysant et en déterminant
le sens de divers mots et leurs différences spécifiques. Pour lui, la phrase égale
sujet +copule +prédicat. Il dégage par ailleurs dix catégories. Toutes les lois de
la langue s’édifient sur les caractères de la proposition, laquelle consiste à
affirmer ou à nier une chose.
Au moyen âge c’est la question des concepts universaux et abstraits qui
animent le débat. Y a-t-il une chose qui corresponde au terme abstrait ? Les
réalistes affirment oui, ce sont les idées absolues, les nominalistes disent non, il
n’y a que des mots et des choses.
Saint Thomas propose une synthèse qui est plus ou moins acceptée par les
linguistes modernes. Pour lui « les universaux sont les êtres de la raison fondés
dans les choses ». L’enjeu de cette discussion se trouve au niveau métaphysique
et théologique, s’il n’y a que les mots et les choses matérielles, il ne peut y avoir
de vérité métaphysique ni de vérité ontologique et cela a des conséquences pour
la théologie par exemple. La Renaissance ne s’intéresse pas seulement à la
philosophie grecque, mais aussi aux langues mortes comme le latin classique, le
grec et l’hébreu. L’intérêt des langues est plutôt animé par le désir de
connaissance. C’est au dix-huitième siècle qu’émerge les recherches sur les
langues comme système cohérent en matière de communication.
Condillac et Rousseau appliquent une théorie de signes sur la langue.
Humbold et Herder entament le discours sur l’origine des langues et la question
de la diversité des structures langagières. Pour eux une langue est un tout
organique qui se développe dans l’histoire. Dans la langue se manifeste l’esprit.
Ferdinand De Saussure est considéré comme le fondateur de la
linguistique moderne, la linguistique ne s’intéresse qu’à la forme, à la cohérence
systématique des éléments du langage, au phénomène signifiant-signifié. À la
suite de De Saussure sont nées diverses écoles ; on peut citer entre autres :
l’école de Prague dont le thème central est la phonologie c'est-à-dire la fonction

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des sons dans la langue. L’école de Copenhague qui traite du problème de la
logique. L’école de Frege qui stipule que toute philosophie se base sur le
langage, par conséquent il faut expliquer et clarifier les systèmes conceptuels de
la science et de la religion. La thèse principale est que toute phrase qui ne se
réfère pas à une réalité n’a pas de sens. Hansen montre qu’il y’a d’autres
énoncés qui ne sont pas des affirmations, mais qui ont bel et bien un sens. Il
propose donc un nouveau système de l’acte de parler.

Distinction entre langues et discours

Tout discours se réalise dans une langue, la langue est un système formel
qui dépasse l’individu. C’est un acquis qui concerne certains groupes. Le
discours oral est un événement actuel (au sens philosophique) dans une situation
donnée et est prononcé par une personne déterminée. La langue est une
institution sociale un système établi en puissance indéfini. La langue n’est ni
vraie ni fausse. Par contre le discours est l’activité d’une personne un évènement
passager limité à un individu ou à une circonstance, il peut être vrai ou faux.

Langue comme système conventionnel


Il est certain que par nature tous les hommes ont la capacité de parler mais
tous ne parlent pas la même langue. Ceci semble un fait banal, mais cela pose
pas mal de questions à toute intelligence attentive. Nous constatons par exemple
que beaucoup de gens parlent le français mais chacun à sa manière. Il faut donc
distinguer la langue comme système de son usage individuel. Il se pose donc une
question : quelle fonction exerce une langue ? Est-ce que la différence des
langues a une importance, si oui laquelle ?

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La linguistique contemporaine définit la langue comme un système de
signes vocaux conventionnels ; cela veut dire que le système implique les mots
qui désignent les choses, les activités les réalités et les règles d’utilisation. Le
signe par contre est ce qui peut à la fois désigner et communiquer quelque
chose. Le terme signe implique alors une intention. En effet le signe désigne
quelque chose d’autre que lui-même. Le signe doit être compris, il doit évoquer
dans l’esprit du récepteur le désigné.
La linguistique moderne distingue bien le signe d’avec le signal que la
tradition appelle signe naturel. Le signal évoque seulement quelque chose. Ex.
La fumée est un signal qui évoque le feu et le feu tricolore est un signe. La
fumée n’est pas le signe du feu parce qu’il manque une intention, malgré le fait
qu’elle évoque le feu elle n’en est qu’un signal.
Conventionnel traduit le fait qu’il n’y a pas de relation nécessaire au
naturelle entre le signe et le désigné. C’est par convention que tel mot désigne
tel le chose. Dans diverses langues les mots différents indiquent la même chose.
Dans une même langue il y’a les mêmes mots pour les choses différentes. Ex.
homonyme opposé au synonyme. Par contre les synonymes des mots sont rares
parce que les différents mots indiquent avec des nuances la même chose. Tout
cela montre qu’il n’y a pas de relation nécessaire ou naturelle entre les mots et
les choses. C’est dire que les mots sont librement inventés. Cela n’exclut pas
qu’il y ait des mots qui imitent d’une certaine manière les choses indiquées : on
parle en français des onomatopées

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