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Master2 Promo 9 ABIDJEAN – cours Economie internationale

Sommaire

I. Smoby Toys contre-attaque mais la justice ne suit pas

II. Votre mission

III. Présentation de la Société Smoby Toys


a. Historique
b. Quelques données
c. Eléments sur l’environnement, le marché du jouet et la position concurrentielle

IV. Interview de la directrice des Ressources humaines de Smoby Toys

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Enoncé du cas

I. SMOBY Toys contre-attaque, mais la justice ne suit pas

Alors qu’en 2012 la société Smoby Toys a obtenu le trophée de la « Responsabilité Sociale de
l’entreprise », en 2015, peu avant Noël, Smoby Toys a fait l’objet de différents articles très négatifs,
entachant sa réputation, dans la presse nationale française et dans la presse spécialisée sur les jouets.
Il lui est notamment reproché d’importer une partie de sa production fabriquée en Chine, de ne pas
être l’entreprise responsable qu’elle prétend être, d’avoir eu un dirigeant accusé d’abus de biens
sociaux, d’avoir licencié en France et donc d’être tenue responsable d’une partie de la hausse du
chômage dans le Jura. L’entreprise a réagi, un mois après la publication de ces articles, abondamment
relayés et commentés sur les réseaux sociaux, en attaquant les journaux et donc les journalistes qui
les avaient écrits, pour diffamation. Mais quelques mois plus tard, l’entreprise a été déboutée car la
diffamation n’a pas été prouvée.
Cet évènement lui a fait perdre plus de 30% de son chiffre d’affaires en décembre 2015 par rapport à
décembre 2014. Encore aujourd’hui, son nom est cité dès lors que l’on parle des conséquences
négatives de la délocalisation de l’industrie du jouet en Asie, à savoir perte d’emplois en France,
jouets contrefaits, perte du savoir-faire et des compétences dans les régions françaises.

II. Votre Mission

Vous êtes un consultant externe mandaté par le Comité de Direction de Smoby Toys, très affecté par
les rumeurs qui circulent sur la société. Il vous demande de l’aider à faire en sorte que cela ne se
reproduise plus. Pour cela vous allez réaliser une étude sur l’entreprise Smoby Toys qui a délocalisé
sa production en Asie, puis l’a relocalisée en partie en France. Vous allez donc chercher à comprendre
si les accusations sont fondées. Ensuite, vous proposerez au Comité de Direction, une démarche pour
éviter ces rumeurs dans le futur. Vous lui expliquerez sur quels éléments il doit communiquer et quel
type de veille il pourrait mettre en place pour identifier les rumeurs.
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Pour cela :
1) Vous réaliserez une analyse de l’entreprise faisant ressortir les éléments qui prêtent à la
critique. Quelles conclusions en tirez-vous ? Les éléments sont-ils fondés ?
2) Vous identifierez les déterminants de la délocalisation et de la relocalisation et leurs
conséquences. Quels éléments pourraient faire l’objet d’une communication auprès des
clients pour contrecarrer la rumeur ?
3) Vous proposerez ensuite un type de veille à mettre en place désormais dans la société,
afin de l’aider à identifier ce type de rumeurs. Si le Comité de Direction adhère à votre
proposition et vous demande de réaliser cette veille, comment procèderiez-vous ?

III. Présentation de la Société Smoby Toys


Le Groupe Français Familial, Smoby Toys, d’envergure internationale, spécialisé dans la fabrication
et la commercialisation de jouets, produit principalement des jouets destinés à éveiller la curiosité des
enfants : baby-foot, jeux d’extérieur (toboggan, cabane en plastique…), véhicules miniatures, jeux
d’imitation (cuisines en plastique ...). Le groupe possède différentes marques qui lui permettent de
répondre aux besoins des enfants selon leur âge. Par exemple :

1er âge Berchet


Enfants (3-5 ans) Smoby
Enfants (4-8 ans) Majorette
Adultes – collectionneurs Solido

Aujourd’hui leader sur le marché Français du jouet, le groupe est implanté à l’étranger grâce à ses
filiales.

a. Historique
Lorsque les deux amis que sont Paul Moquin et Jean Breuil créent en 1924 une société associant leurs
deux noms, ils sont certainement loin d'imaginer l'incroyable histoire que va vivre leur entreprise,
devenue internationale en trois générations.
À ses débuts, la société Moquin Breuil fabrique toute sorte d'ustensiles en bois (articles ménagers,
pour écoliers, pipes, etc…). Etablie à Lavans-Les-Saint-Claude, cette ville jurassienne est le berceau
du jouet en bois français, et va rester le pied à terre de la future marque Smoby. du jouet en bois
français.

En 1947, pour répondre à la forte demande de jouets bon marché, la marque Mob, filiale de Moquin
Breuil se lance dans l'aventure du plastique. Jean Breuil acquiert une presse à injecter et entreprend
de reconvertir l’entreprise vers la fabrication d’objets bon marché : seaux, bacs, pelles et le fameux
cadeau Bonux, petit jouet en plastique que l’on trouve dans les paquets de lessive.

C’est ainsi que le plastique va supplanter le bois, qui ne sera plus désormais travaillé que par quelques
fabricants de jouets hauts de gamme. C’est l’avènement du « jouet à un franc ». Mob est alors en
mesure de fabriquer, en quantité suffisante et à un prix défiant toute concurrence, des jouets destinés
aux magasins Prisunic et Monoprix.
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En 1968, Mob prend conscience de la forte croissance du marché du jouet premier âge, grâce au
phénomène du baby-boom. C’est ainsi que le fils du fondateur, Jean-Pierre Breuil et son épouse
décident de se spécialiser dans le jouet. L’entreprise grandit donc dans le jouet sous la marque MOB.
De cette période, émerge un jouet mythique : « la marchande » avec sa célèbre balance Roberval.
Cependant, la concurrence s’intensifie lorsque le géant américain Mattel s’installe en France.
La stratégie de MOB est alors d’investir dans le design pour donner plus de valeur ajoutée aux
produits et de se développer à l’international. C’est la raison pour laquelle, les dirigeants créent une
marque à consonance plus internationale : SMOBY.
A cette époque, la politique de SMOBY est de rester une entreprise familiale. Pourtant en 1983, elle
entre à la bourse de Lyon. Elle devient la première entreprise familiale à être cotée au second marché.

En 1993, Jean-Christophe Breuil, petit-fils du fondateur, devient PDG de Smoby à 23 ans, suite au
décès brutal de son père. Ce changement de direction va marquer une véritable rupture dans la
politique stratégique de l’entreprise.
Le groupe rachète plusieurs entreprises : Lardy en 1993, Ecoiffier en 1994, Monneret en 1996. Le
jeune patron initie une stratégie de croissance externe ambitieuse, et se développe à l’international.
Le groupe poursuit son extension. Son appétit est énorme. En 1998, afin de briguer différents marchés
et de maîtriser toute la chaîne de fabrication (emballage), Smoby se porte acquéreur de Pico, puis
d’Unice et Novembal en 2000. En 2003, il reprend Majorette toys. Solido et Verem, - qui
appartenaient à Majorette -, tombent dans son escarcelle. Le groupe change alors de dénomination
pour s’appeler Smoby- Majorette. En 2005, en achetant Berchet, le groupe Smoby devient numéro
un français et numéro deux européen du jouet avec 300 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Cette croissance a un prix que l’entreprise SMOBY n’avait pas forcément mesuré.

En 2007, lourdement endettée par ces acquisitions (277 millions d'euros), l'entreprise, est placée pour
six mois en procédure de sauvegarde ce qui lui permet d’être mise à l’abri de ces créanciers. Cette
procédure est renouvelée en septembre, suite à son rachat par MGA Entertainment, groupe américain,
au printemps 2007 pour un euro symbolique. Mais faute d'accord avec les créanciers et de plan de
continuation, la société Smoby-Majorette est placée le 9 octobre 2007 en redressement judiciaire par
le tribunal de commerce de Lons-le-Saunier, avant que le groupe américain renonce à la reprise le 22
février 2008.
Début mars 2008, ce même tribunal annonce la reprise de Smoby et Berchet par le numéro un
allemand du jouet, Simba-Dickie, aux dépens de la holding grenobloise Abcia. Ecoiffier est repris par
son ancien propriétaire, Jacques Ecoiffier, avec Simba comme actionnaire minoritaire. Majorette est
repris la semaine suivante par le groupe d'investissement français Compagnie MI29.

La descente aux enfers de l’entreprise continue avec l’arrivée d’un nouvel évènement : le 25 mars
2008, le PDG de Smoby, Jean-Christophe Breuil, est mis en examen pour abus de biens sociaux et
blanchiment en bande organisée. Il est ensuite placé en détention provisoire. C’est un véritable
cataclysme autant économique que moral, car Smoby semblait inébranlable. Après le jugement
prononçant le redressement judiciaire, la marque qui faisait rêver les petits comme les grands est alors
associée à une procédure judiciaire pénale. C’est une dure épreuve pour les habitants du village qui
s’identifient à ce fabricant de jouets notamment du fait que le fondateur, Jean Breuil ait exercé les
fonctions de maire de la commune, mais également pour l’image de marque de l’entreprise.
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La reprise de l’entreprise par la société Simba-Dickie démarre douloureusement avec un plan social.
En avril 2008, 396 employés sont licenciés sur 800 personnes. Les sociétés Smoby, Berchet et
Ecoiffier sont regroupées dans la nouvelle structure Smoby Toys sous la direction de Thomas Le Paul,
ancien responsable de la filiale italienne de Simba. Le 2 février 2010, Smoby Toys est choisi comme
repreneur de Majorette.

b. SMOBY TOYS : Quelques données


a. Fiche identité 06/01/2015 – Société.com

ENTREPRISE SMOBY TOYS


Secteur d’activité Fabricant de jeux et jouets
Date de création 1er mars 2008
Forme juridique SAS
Capital 20 000 000€
N°RCS 503 23 421
Code NAF 3240Z
Adresse Lieu-dit Le bourg dessus
39170 Lavans-Lès-Saint-Claude
Téléphone 03 84 41 38 00
Site internet www.smoby.fr
Dirigeant SIEBER Michaël - Président

b. Activité : jouet

Le secteur d’activité économique de Smoby Toys est la conception, la production et la


commercialisation de jeux et de jouets traditionnels. C’est un secteur fortement impacté par la
saisonnalité : L’été avec les jouets de plage et d’extérieur représentant 15% des ventes et l’hiver avec
les ventes de Noël qui représentent 75%
Les acquisitions multiples vont permettre de palier à cette saisonnalité comme l’intégration de
Majorette avec des ventes plus régulières sur l’année grâce aux jouets garçons (petites voitures).

c. Politique de produit

Il s’agit de produits globaux et les goûts sont uniformes. Le nombre de référence est de 600 environ
au catalogue. Grâce aux usines françaises, roumaines, espagnoles, chinoises et sud-américaines, le
groupe vend partout dans le monde. La gamme proposée presque exclusivement en plastique de 1947
à 2003, passe à l'acier avec Solido et Majorette, et à la résine avec Verem.
La gamme est principalement orientée vers les jouets pour filles et le rachat de Majorette va lui
permettre d’équilibrer l’offre garçon. Les renouvellements de gamme nécessitent beaucoup de
modernisation et ainsi d’innovation grâce à la mutation industrielle. Mais il faut prendre en compte
l’évolution des goûts obligeant les industriels à être proactifs dans les courts cycles de production.
C’est pourquoi annuellement, ils renouvellent les segments traditionnels à 25 ou 35% et les produits
de mode à 50 ou 60%.
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Les sommes investies en recherche et développement sont comparables à celles d’entreprises
industrielles technologiques (4 à 5% du chiffre d’affaires).

d. Politique de prix

Les jouets en bois restent des jouets haut de gamme, les prix sont donc assez élevés. L’arrivée du
plastique et des jouets à “bas prix” changent les habitudes des consommateurs et obligent réellement
Smoby à se réinventer.
Le magasin d’usine permet de vendre des produits directement aux consommateurs avec des remises
pouvant aller jusqu’à moins 70% par rapport aux prix de vente des distributeurs.

e. Fournisseurs

Les principaux fournisseurs sont japonais et chinois.


La saisonnalité pose aux industriels de redoutables problèmes de logistique, et exige d’eux des
capacités de stockage considérables et le recours à une main-d’œuvre temporaire pour faire face à
cette variation du niveau d’activité.

C. Eléments sur l’environnement, le marché du jouet et position concurrentielle


Le marché du jouet est un marché en forte expansion dans un environnement concurrentiel important.

a. Concurrents directs
● Les sociétés françaises : Meccano, Berchet, Majorette (avant acquisition)
● Les sociétés Européennes: Burago, Lego, Ravensburger
● Les multinationales américaines: Hasbro, Mattel, Fisher-Price et japonaises: Bandai
Leur avantage concurrentiel est qu’elles commercialisent des produits à forte image de marque en
s’appuyant sur des budgets publicitaires colossaux et un marketing agressif.
● Les fabricants chinois et sud-est asiatiques: VTECH, Playmates
Leur produit cible est le jouet bas de gamme qui envahit le marché s’apparentant souvent au gadget.

Certains anciens sous-traitants sont devenus indépendants en produisant pour leur propre compte. Ils
utilisent la chaîne de production de leurs anciens clients occidentaux et réussissent à produire avec
une qualité comparable mais à un prix compétitif. L’apparition de ces nouveaux concurrents
imitateurs constitue une vraie menace pour Smoby, Lego, Mattel et Hasbro qui doivent établir de
nouvelles stratégies de diversification et éviter l’imitation en s’orientant sur des gammes
inintéressantes à imiter pour les Chinois.
b. Concurrents indirects

Il existe également une concurrence indirecte par les produits de substitution que sont les jeux
numériques ludiques, les tablettes ludiques. Même dès le 1er âge, une partie des parents se tourne
vers ce style de jouets afin de stimuler de plus en plus intellectuellement leurs enfants. Certains
enfants de la génération née dans le numérique se détournent des jouets traditionnels très tôt dans
l’enfance pour la tendance numérique au grand désespoir de leurs parents ou des psychologues.

c. Distribution

On observe une forte concentration des fabricants et des distributeurs sur un marché marqué par une
forte saisonnalité des ventes. Les grands distributeurs français sont Carrefour, Auchan, Jouéclub,
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Toys’R’us …etc.

Durant les 20 dernières années, de grandes mutations ont eu lieu dans le marché des jouets avec la
montée en puissance de l’industrie asiatique. Le marché a subi l’invasion de produits asiatiques de
moindre qualité à un prix plus bas grâce à des coûts de production plus faibles.
De plus, l’arrivée des nouvelles technologies a modifié la conception de certains jouets et en a fait
émerger de nouveaux comme les jeux vidéo et le numérique ludique, qui sont des produits de
substitution aux jouets traditionnels. Les jouets dotés d’électronique deviennent interactifs. Toute
cette innovation implique une stratégie de diversification par le passage du jeu traditionnel au jeu
électronique et multimédia.

Sur le marché du jouet, Smoby couvre plus des 2/3 de l’offre du marché. Sa position concurrentielle
reste dominante en France, forte en Europe et favorable dans le reste du monde. Smoby est le numéro
1 mondial du Baby-foot, le fabricant numéro 1 Européen de jouet d’extérieur, le leader français de la
petite voiture à travers sa filiale Majorette. Ses atouts sont incontestablement son savoir-faire, sa
créativité (politique d’innovation), sa notoriété ainsi que la qualité de ses produits.

IV Interview de la directrice des Ressources humaines de Smoby Toys


La Directrice des Ressources Humaines de Smoby Toys, Madame Valérie Pellerin, a été interviewée
en 2015 par des journalistes. Ce sont ces derniers qui sont à l’origine des articles négatifs. Ils sont
venus pour avoir son avis sur les facteurs explicatifs des délocalisations et des relocalisations et les
impacts au niveau des ressources humaines. Elle leur a donné sa vision de la situation de Smoby au
cours de sa carrière dans l’entreprise. Ils étaient intéressés et souhaitaient recueillir son avis car Mme
Pellerin est entrée chez Smoby en 1991 et en plus de 20 ans, elle a été témoin et acteur d’une politique
stratégique qui a su s’adapter à la mondialisation.

Elle se souvient très bien du déroulé des interviews. Elle avait pris des notes qu’elle a conservées. Ils
ont commencé par lui dire que la définition de la délocalisation est : « l'abandon d’une activité de
production nationale, le transfert de cette activité vers une unité de production à l’étranger et
l'importation de la partie de la production réalisée à l’étranger destinée au marché national ou local.
Ce qui se traduit par des pertes d’emploi sur le territoire national. » Mais Mme Pellerin n’était pas
d’accord avec cette définition.
Selon elle, Smoby a toujours essayé de préserver les emplois en France. En effet, avec la forte
concurrence internationale, des produits ne pouvaient plus être produits en France. Toutefois, le fait
de fabriquer ces produits dans des pays dit à « bas coût », a permis de garder certains moules donc de
conserver des marchés sur le territoire.
La société Smoby a commencé à faire fabriquer des jouets dans les pays à bas coût et principalement
la Chine à partir de 1995, comme de nombreuses entreprises. Le développement de jouets est constant
et demande une grande réactivité. Smoby a commencé à faire fabriquer en Chine afin de pouvoir
garder des prix compétitifs tout en continuant à se développer. Le but était de garder en France, les
objets en plastique volumineux, avec peu d’électronique et nécessitant peu de main d’œuvre aussi,
comme les maisons, toboggans, bacs à sable, cuisines, établis ... Pour certaines catégories de jouets
notamment les jouets en plastique assez volumineux il ne présente guère d’intérêt de délocaliser car
les coûts de transport sont trop élevés par rapport au coût de fabrication des jouets.

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Ces produits sont donc fabriqués dans les 3 usines françaises du Jura et de l’Ain. Pour tous les jouets
à base de textile (poupées) et d’électronique, la Chine s’impose. Il s’agit de jouets de petite taille
demandant beaucoup de main d’œuvre et de dextérité. Mais à aucun moment, il a été prévu de fermer
une usine française.

En 2007-2008, la Presse a eu tendance à confondre la sauvegarde de l’entreprise avec la démarche de


délocalisation. « Lors de la vente de Smoby à la société Simba-Dickie, il y a eu certes des suppressions
d’emplois mais c’était pour sauvegarder l’entreprise fortement endettée et non une conséquence de
la délocalisation de la fabrication » avait-t-elle dit aux journalistes.

Les journalistes avaient insisté : « Grand défenseur de la production française, Smoby a dû toutefois
se résoudre à faire fabriquer près de la moitié de ses jouets en Chine » lui ont-ils demandé. Elle a
expliqué que compte tenu du contexte économique, de l’agressivité de la concurrence et de l’essor
des jouets contenant de l’électronique, JC Breuil a pris cette décision. Ils lui ont demandé plus de
précisions sur ce qui a motivé son PDG alors…
Mme Pellerin a répondu : « les risques de change liés notamment à la fluctuation de la parité
Euro/Dollar ; Le coût de fabrication de moules : A partir de la fin des années 1990, il était très
difficile de faire fabriquer ces moules en France. En effet, le manque de moulistes a provoqué une
hausse des coûts de fabrication en France. Le coût moyen de fabrication des moules pour fabriquer
les jouets est en Chine 30% moins élevé qu’en France. Ainsi, la fabrication est complètement faite
maintenant en Chine. Mais le faible coût des moules permettait de fabriquer plus de moules qu’avant,
car 1 moule sur 3 était « gratuit » et ce moule « gratuit » permettait de faire la fabrication en France
et ainsi de conserver les emplois »

Ils l’ont questionnée sur les autres implantations à l’étranger de Smoby. Elle leur a dit que Smoby
s’est implanté en Espagne en 2004 et a des partenaires sous-traitants espagnols depuis 1996. En
rachetant Majorette, cette entreprise fournit à Smoby une plus grande ouverture sur le marché
étranger, dont la Thaïlande, puisque cette dernière y est déjà présente à 70% de sa production. Le
PDG le disait lui-même à l’époque, a expliqué Madame Pellerin : « ce qui est intéressant dans ce
rachat c’est que « le plus gros du travail est déjà fait » en matière de restructuration et
délocalisation ». Grâce aux implantations de Majorette qui détient sa propre filiale en Thaïlande,
Smoby renforce sa présence dans la zone et bénéficie de conditions de production avantageuses en
termes de coûts. Elle sous-traite en Chine, dans la région de Shenzhen. Afin de dynamiser les ventes,
une plate-forme commerciale a été mise en place à Hong Kong.
La stratégie de SMOBY était de s’implanter sur le marché Chinois en progression : profiter de la
hausse du niveau de vie de pays comme la Chine et l’Inde. JC Breuil a créé aussi d’autres filiales
étrangères dans la fin des années 90 en Amérique du Sud.

Suite au mouvement de délocalisation, la société SMOBY n’a jamais eu recours à des plans sociaux.
L’objectif de la délocalisation était surtout de développer une nouvelle production à l’étranger qui
n’existait pas en France. Ainsi aucune production en France n’a été arrêtée.
Cependant, le développement économique et la création d’emplois qui ont eu lieu à l’étranger se sont
faits au détriment de création d’emplois en France dans un souci de rentabilité. Certes, l’effectif a été
réduit mais cela, selon elle, cela s’est passé par une bonne gestion de l’emploi : Départs à la retraite
ou départs volontaires non remplacés ; Développement des compétences de salariés surtout sur les

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nouveaux matériels utilisés.

Les autorités, Etat, collectivités locales n’ont jamais aidé l’entreprise pour garder l’emploi ou éviter
le départ de nouveaux jouets en Chine. Toutefois, cela n’a pas eu que des impacts négatifs : certains
postes ont dû être créés ou préservés grâce la fabrication dans les pays à bas coût : Emplois pour le
suivis de projet, envoi d’expatriés, emplois chez les fournisseurs Asiatiques… sans parler des emplois
induits chez les transporteurs, les assureurs dans les banques pour s’occuper de ces opérations de
commerce international.

Lorsque les journalistes lui ont donné une définition de la Relocalisation qui selon eux est : « le retour
dans leur pays d'origine d'unités productives, d'assemblage ou de montage antérieurement
délocalisées sous diverses formes dans les pays à faibles coûts salariaux. », Mme Pellerin a là aussi
apporté des nuances à cette définition : « Ce ne sont pas des productions qui reviennent en France
mais de nouveaux produits qui sont habituellement fabriqués en Chine qui sont produits maintenant
chez nous, c’est-à-dire, qu’au lieu de les faire faire par des sous-traitants extérieurs, ils sont fabriqués
en France ». Les jouets ayant des durées de vie très courtes demandent à être renouvelés rapidement,
donc le choix de fabrication dans tel ou tel pays est remis en cause à chaque fois.

Et puis elle leur a dit : « nous ne sommes pas une exception : Smoby, tout comme les entreprises qui
ont une « stratégie qualité », dont les principaux clients et marchés sont en France ou en Europe, et
qui cherchent à préserver leur notoriété, a voulu relocaliser une partie de sa production en France.
Aussi, eu égard à des facteurs socio-culturels, les entreprises « familiales » ont une histoire, un lien
fort avec leur région d’origine, avec le « berceau familial ». Et de souligner : « une entreprise c’est
aussi « une histoire, des compétences accumulées ».

En 2009, Smoby décide donc relocaliser une partie de sa production de Chine en France. Un premier
constat montre que si les délocalisations ont apporté des premiers gains sur les coûts de revient de la
production, elles ont beaucoup déçu sur d’autre critères. Le contexte économique a beaucoup changé
surtout depuis 2008.

Smoby a pu constater que certaines entreprises chinoises avec lesquelles elle travaillait n’étaient pas
en bonne santé économique. Elles ont dû fermer prématurément, par manque de compétitivité ou par
manque de main d’œuvre. Smoby a perdu confiance dans certains fournisseurs chinois : la qualité des
matériaux utilisés n’était pas toujours à la hauteur des attentes ; l’existence de contrefaçon ou
d’erreurs de fabrication ont rendu la relation client-fournisseur parfois difficile.

Durant la période les salaires chinois ont fortement augmenté. Cela s’explique par la mise en place
d’un salaire minimum en Chine, mais aussi par la pénurie de main d’œuvre qualifiée, compétente.
Le prix des matières premières a également augmenté, tout comme celui du transport. Les délais ne
sont pas toujours respectés, d’où l’impossibilité de réapprovisionner les stocks rapidement. Et puis
les consommateurs privilégient le « Made in France ».

C’est donc un atout pour l’entreprise d’avoir une production de proximité, avec des délais de livraison
courts sur ses principaux marchés que constituent la France et l’Europe. Cela représente un avantage
face à des concurrents Chinois ou Américains.

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En 2009, Smoby investit 2 millions d’euros pour renouveler une partie de ces machines. Désormais
les nouveaux produits de sa ligne 2ème âge sont fabriqués en France.
En 2012, l’entreprise obtient le trophée de la « Responsabilité Sociale de l’entreprise » et ouvre un
magasin d’usine à Lavans-Les-Saint-Claude. En 2013, un nouvel entrepôt à Moirans-en-Montagne
est créé. En 2014, Smoby emploie 420 salariés dans le Jura et 80 salariés en Espagne. La société
dispose d’une entreprise Majorette à Bangkok. Elle sous traite toujours une partie de ses fabrications
en Asie. En France, elle investit dans la formation des salariés (budget 3 fois plus important que
l’obligation légale !) et mise sur le travail pluridisciplinaire. Enfin, elle favorise l’embauche de
personnel féminin.
Smoby Toys progresse dans un secteur où la concurrence est vive. Le chiffre d’affaires augmente
grâce à la dynamique commerciale et à l’investissement constant dans l’outil industriel. Les
investissements massifs permettent à la base française d’être compétitive et rentable. La relocalisation
et les restructurations réalisées sont bénéfiques pour la société. A ce jour, 70% de la production est
réalisée dans le Jura. L’évolution s’accompagne de préoccupations sociales et environnementales. Le
“made in France” constitue une vraie valeur ajoutée. Encore récemment, la Commission Européenne
a mis en garde le consommateur contre 2435 produits chinois contrefaits dont ¼ sont des jouets.

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