Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
NEWSLETTER
É dito
Chers lecteurs,
Nous vous avons présenté il y a un an (en février 2020), une analyse sur la
réforme du Code du Travail, qui était en cours de discussion entre le Ministère
en charge de l’Emploi, le Patronat et les Organisations syndicales.
Une nouvelle rédaction, qui intègre les commentaires des partenaires sociaux et du Bureau Interna-
tional du Travail (BIT), a été arrêtée et adoptée lors du Conseil des Ministres du 19 février 2021.
Aussi, nous vous proposons dans la présente newsletter, une actualisation de notre analyse,
du Projet de Code du Travail (ci-après, nouvelle rédaction), tel qu’issu de sa version en date du
30 décembre 2020.
Bonne lecture !
Il s’agit des dispositions qui sont de nature une durée inférieure à « quatre cinquième Toutefois, des incohérences apparaissent à
à favoriser et/ou à sécuriser l’emploi, à 4/5 » au moins de la durée légale du travail. la lecture des dispositions relatives aux
garantir la représentativité salariale et à définitions du contrat d’intérim, du contrat
renforcer les droits des travailleurs. Actuellement, le travail effectué à temps de mission et du contrat de mise à disposi-
partiel résulte de conventions librement tion, ainsi que de la structuration de leur
1/ UNE REFORME EN FAVEUR DE conclues entre les parties, à défaut de cadre régime juridique. Si la réforme aboutit en
L’EMBAUCHE ET DE L’EMPLOYABILITE légal. La nouvelle rédaction s’arrime ainsi à l’état, on peut craindre des difficultés de mise
une mutation en cours dans le monde du en œuvre de ces formes contractuelles.
On peut notamment citer : travail, en tenant compte des employés qui
souhaitent plus de flexibilité dans leurs b) La refonte du régime juridique du contrat
a) La consécration légale de nouvelles conditions de travail. Des garanties sont d’apprentissage (art. 95 à 113).
formes contractuelles. apportées au travailleur, dans la mesure où
ce dernier dispose des mêmes droits que La réforme s’inscrit en faveur de l’employa-
• Le contrat de travail saisonnier (art. 25 al 4) celui qui travaille à temps plein (art 37 al 4). bilité des jeunes inactifs, dans la mesure où :
et le travail à temps partiel (art. 37)
• Le contrat d’intérim et le contrat de • L’âge pour bénéficier de la qualité
La nouvelle rédaction définit le travail mission (art. 26 à 36) d’apprenti serait de 16 ans au minimum à
saisonnier comme l’« exécution de tâches 25 ans au maximum, au lieu de 30 ans
appelées à se répéter chaque année à des Ces nouvelles formes contractuelles ont été actuellement (art.95 al 1) ;
dates à peu près fixes en fonction du rythme codifiées pour limiter les abus du contrat de • L’obligation faite aux entreprises, existant
des saisons ou des modes de vie collectifs, à mise à disposition. depuis au moins 3 ans et employant entre
certains secteurs d’activités dont il est d’usage 20 et 50 travailleurs, d’accueillir un nombre
constant de ne pas recourir au contrat de La nouvelle rédaction codifie la durée du d’apprentis correspondant à 5% de ses
travail à durée indéterminée en raison de la contrat de mission, en précisant que cette effectifs, a été codifiée (art.95 al 2) ;
nature de l’activité exercée… ». dernière est désormais fixée à 2 ans « renou- • L’apprentissage peut être mis en œuvre
vellement compris » (art.30 al 3). dans tous les secteurs d’activités (art. 95 al 3) ;
Cette consécration marque la volonté de • L’apprentissage peut également s’effec-
tenir compte du caractère cyclique des La règlementation actuelle prévoit que la tuer par voie d’« insertion professionnelle » ou
activités liées à l’hôtellerie ou à l’agriculture, durée du contrat est de 2 ans maximum, d’ « alternance » (art.97) ;
en permettant aux employeurs, de s’extirper et qu’il ne peut être renouvelé qu’une fois. • Les entreprises ont la faculté de fixer
du cadre légal strict et « dissuasif » à certains des allocations additionnelles en dehors
égards du CDD. Par ailleurs, le délai accordé à l’Inspecteur de la rémunération minimale due, en fonction
du Travail pour faire viser le contrat de de la forme d’apprentissage, ce qui serait
La nouvelle rédaction innove également, mission a été portée de huit (8) à quinze selon nous de nature à constituer une source
par la codification du contrat de travail à (15) jours (art.30 al 2). de motivation pour les apprentis ;
temps partiel. Ce dernier est conclu pour • Le régime de l’apprentissage a été clairement
1/ LA REFORME ET SES INTERETS licenciement susceptible d’être retenu par un Les Pouvoirs publics ont souhaité ainsi
POUR L’ENTREPRISE employeur ne peut, par principe, pas être favoriser le recrutement de travailleurs
contesté par l’employé. étrangers, dans le cadre de projets priori-
a) Précisions sur le régime du CDD. taires pour l’Etat, et pour lesquels le
d) La libre répartition de la durée légale de recrutement d’un travailleur gabonais ne
L’article 23 du Code du Travail précise que travail par l’employeur (art. 194). pouvait pas être envisagé.
la durée ne peut excéder 2 ans « renouvel-
lement compris » (art. 23 al. 1er). La durée légale du travail en vigueur est g) Dispositions diverses.
de quarante (40) heures par semaine, l’horaire
Pour rappel la rédaction actuelle de l’article journalier étant de huit (8) heures par La réforme prévoit de nombreuses autres
23 prévoit que la durée du CDD « ne peut jour, comprises entre 7H 30 et 16H30. innovations, telles que la définition de la
excéder 2 ans. Il ne peut être renouvelé notion d’employeur ou celle de la clause
qu’une fois ». C’est ce qui résulte du Décret no0028/PR/ de non-concurrence. Toutefois, nous avons
MEFPTFP du 29 janvier 2021 publié au souhaité mettre un accent particulier sur
La rédaction actuelle continue de donner Jounal Officiel du 12 février 2021. Il nous la notion de « mandataires sociaux », telle
lieu à des divergences d’interprétation, semble pertinent de faire un développement qu’elle est appréhendée par le projet.
laissant penser à certains que la durée du particulier sur ce point (p.6).
CDD était de 4 ans, renouvellement inclus. A cet égard, le projet prévoit en son
La réforme prévoit que la répartition article 1 al.9 et 10 que les mandataires
La nouvelle rédaction a le mérite de lever journalière de la semaine de quarante heures sociaux « […] sont à leur tour considérés
les difficultés d’interprétation observées par semaine peut être fixée « librement » comme des travailleurs dans leurs relations
actuellement. en fonction des secteurs d’activités. avec l’employeur qu’ils représentent à
condition qu’ils cumulent un contrat de
La réforme consacre une pratique assez travail et que la révocation ad nutum ne
b) Reconnaissance légale du télétravail répandue chez certains employeurs en leur soit pas de nature à emporter la résiliation
(art.50). permettant désormais de s’appuyer sur un de leur contrat de travail ».
cadre légal, pour adapter la répartition de
La nouvelle rédaction définit le télétravail l’horaire journalier en fonction des nécessités Ce texte semble consacrer la position de
ainsi que le cadre général de sa mise en et des particularités de leurs activités. l’Administration en matière de formalités
œuvre. Elle donne aux parties (employeurs d’embauche/de séjour des dirigeants
et salariés) la latitude de régler conven- e) L’encadrement du droit de grève. étrangers (à savoir l’établissement de contrats
tionnellement (par voie d’accord collectif, de Directeurs Généraux).
ou par une convention entre l’employeur et le La grève fait désormais l’objet d’un régime
salarié) les différentes questions résultant plus strict dans le cadre de sa mise en œuvre : En effet, la pratique actuelle observée au
de son implémentation. sein de l’Administration du travail conduit
• Sanction d’un salarié gréviste qui s’est les entreprises à ‘’recruter’’ les Directeurs
c) Refonte du régime du licenciement rendu coupable d’une faute lourde ou de Généraux selon les règles applicables à
pour motif personnel (art.60 à 67). voies de fait avec menaces (art. 380). l’emploi des salariés étrangers (autorisation
• Extension du service minimum à toutes d’emploi/contrat de travail), alors même
La nouvelle rédaction prévoit qu’un les entreprises (art. 383 al. 1er). que ces derniers ont été désignés par les
employeur peut licencier pour motif Organes sociaux, dans les conditions
personnel, un salarié pour « tout motif » Actuellement, un service minimum est prévues par la réglementation applicable
autre que ceux : obligatoire pour certaines entreprises (en en matière de Droit des Sociétés.
raison de leur utilité sociale ou de leur spécificité,
• Liés à sa personnalité ; cf. art. 348 Code du Travail). Il convient toutefois de souligner que cette
• Liés à l’exercice de ses droits légaux et disposition est contraire aux dispositions
contractuels ; Le préavis devra indiquer les modalités du de l’Acte Uniforme OHADA relatif au droit
• Liés à son appartenance à une organisation service minimum dans les entreprises dont des sociétés commerciales et du GIE (Acte
syndicale ; l’arrêt total est de nature à porter atteinte Uniforme) qui prévoit une distinction des
• Discriminatoires. à la sécurité et à l’accès aux soins ainsi fonctions de mandataire social et de salarié.
qu’à l’équilibre de l’économie nationale.
On peut constater la suppression de la En effet, les mandataires sociaux ne peuvent
distinction actuelle entre le licenciement Les secteurs d’activités concernés sont listés conclure un contrat de travail que si ce dernier
résultant d’une faute et celui résultant de dans le projet de Code (cf. art. 383 al. 3). correspond à un emploi effectif 5.
l’inaptitude du salarié.
Cette mesure devrait permettre aux Il résulte donc des dispositions de l’Acte
La nouvelle rédaction supprime également employeurs de préserver une certaine Uniforme :
la notion du caractère réel et sérieux du continuité du service dans l’entreprise,
motif de licenciement. réduisant ainsi l’impact économique • Qu’un mandataire social ne peut conclure
pouvant résulter d’une situation d’inactivité. un contrat de travail que pour une fonction
Cette volonté de simplification du régime du distincte de son mandat ;
licenciement pour motif personnel tend à f) Mesures destinées à favoriser l’investis- • Que le cumul des qualités respectives de
fragiliser l’emploi. sement (art.140). mandataire social et de salarié, entraîne
l’application d’un régime juridique distinct
En effet, dès lors que l’employeur n’est plus Cette procédure simplifiée est destinée et spécifique, notamment en ce qui concerne
tenu de justifier d’un motif réel et sérieux au cas particulier des grands chantiers d’infra- la cessation de leurs fonctions, (à savoir, la
pour mettre en œuvre un licenciement pour structures conclus avec l’Etat Gabonais. révocation par les Organes habilités ou la
motif personnel, l’Inspection du travail ainsi démission pour le mandataire social et la
que les juges n’ont plus la capacité d’en La réforme prévoit à cet égard, que les mise en œuvre d’une procédure de licenciement
apprécier le bien-fondé. formalités liées à l’emploi des travailleurs ou la démission s’agissant du Dirigeant salarié).
étrangers pourront être effectuées dans un
Ainsi, en listant limitativement les motifs délai maximum de huit (08) jours. On peut déplorer le fait que cet aspect de la
de licenciement abusifs, la nouvelle rédac- réforme opère une confusion entre la qualité
tion laisse supposer que tout autre motif de de mandataire social et celle de salarié.
J.O n°90/2020
Arrêté n°025/MCPMEI/MER du 30 octobre 2020, fixant les conditions d’attribution de la dispense prévue à
l’article 120 de l’Acte Uniforme OHADA relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du Groupement d’Intérêt
Economique.