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En octobre 1870, Arthur Rimbaud a 16 ans, épris de liberté il fugue et rédige pendant son vagabondage 22

poèmes qui deviendront les cahiers de Douai. Paul Verlaine le surnomme l’homme aux semelles de vent en
raison de son amour pour le voyage et la vie de bohémien.
Ma bohème est un texte célébrant l’errance, la liberté mais aussi le monde de la nature.
Rimbaud joue avec les règles du sonnet traditionnel et propose un texte novateur où le vagabond qu’il est
évoqué le bonheur procuré par la nature mais aussi les chansons d’amour pour la poésie.
Ainsi nous allons nous demander en quoi ce sonnet original célèbre le monde ?
Pour cela nous verrons dans un premier mouvement le vagabondage du poète du vers 1 à 6 et dans un
deuxième mouvement nous considérerons la nature synonyme de liberté du vers 7 à 14.

Le vagabond est un poète qui en raison de sa liberté enthousiasme les artistes de la fin du 19e siècle.
Lorsque Rimbaud fugue il goûte au bonheur de l’errance. En effet la répétition du verbe de mouvement : «
aller » au vers 1 : « Je m’en allais » et au vers 3 : « J’allais » esquisse le portrait d’un poète voyageur.
C’est parce qu’il est libre, que le poète s’amuse avec les règles de la poésie traditionnelle.

En effet, le premier vers qui est un alexandrin présente une césure irrégulière. (Dans un alexandrin
classique, la césure est après la 6ème syllabe) Ici, nous pouvons observer qu’elle se fait après la quatrième
syllabe : « Je m’en allais, // les poings dans mes poches crevées ». Ce premier vers, en outre, met en
évidence la dimension autobiographique de ce sonnet. Deux marques de la première personne du singulier
sont visibles : le pronom personnel : « je » qui ouvre le poème et le déterminant possessif « mes » : « mes
poches », indique que Rimbaud l’errance qu’ est la sienne. Il est vrai que la pauvreté qu’a connue l’auteur,
transparaît grâce à l’adjectif : « crevées » (v 1) et au substantif « paletot » (v 2). Si le lecteur comprend que
ce poème évoque le vagabondage de Rimbaud, il ignore l’itinéraire de l’auteur. Effectivement, le
complément circonstanciel de lieu « sous le ciel » (v 3) est extrêmement vague. Il se trouve dans la nature,
mais son emplacement demeure imprécis. La liberté physique est alors totale pour le poète. Ce sentiment
est tellement intense qu’il se met au service de la muse qu’il interpelle via une apostrophe : « Muse ! » Il
semble entretenir une forme d’intimité avec ce personnage mythologique comme le suggèrent le
tutoiement et le substantif « féal ». (Les 9 Muses sont les filles de Zeus et de Mnémosyne, fille de Gaïa
(Terre) et Ouranos (Ciel) Chaque muse représente et protège une forme d’art. Terpsichore est la muse de la
poésie lyrique et de la danse) Ce vagabondage paraît, à mesure que les vers se succèdent, offrir une liberté
langagière à Rimbaud. L’interjection : « Oh ! là ! là » du vers 4, plutôt orale, est inhabituelle et d’étonne dans
ce sonnet. Toutefois, elle traduit son enthousiasme, sa joie de vivre, son envie de retrouver l’amour: «
amours splendides » (v 4) Il faut comprendre que l’errance au sein de la nature ouvre le champ de tous les
possibles. Ce n’est sans doute pas un hasard si l’adjectif : « crevées » (v 1) rime avec le participe passé «
rêvées », puisque le vagabondage permet le rêve de Rimbaux. Le vers 5 fait écho aux vers 1 et 2 puisque
Rimbaud montre, à nouveau sa pauvreté, les deux adjectifs : « unique » et « large », révèle une fois de plus
le dénuement du poète. Néanmoins, la nature lui offre la liberté et le vers 6 s’ouvre sur une comparaison
plutôt originale, mise en avant par un tiret : « – Petit-Poucet rêveur ». Rimbaud devient à son tour un
personnage de conte merveilleux mais ne sème pas des cailloux, mais des rimes lui permettant de retrouver
sa route, il utilise alors un rejet au vers 7 qui met en lumière le substantif : « rimes »: « j’égrenais dans ma
course / Des rimes » (v 6-7) met en exergue cet amour incommensurable pour la poésie qui l’accompagne
pas à pas. De plus, le mot « course » rend compte d’une course physique : une envie de fuir, de partir mais
aussi une couse poétique dans le but de repousser les limites de la poésie. La nature tient un rôle essentiel
dans ce sonnet puisqu’elle est synonyme de liberté. Les vers 7 et 8 mettent en lumière la relation
particulière que le poète entretient avec elle. Les déterminants possessifs : « mon auberge » et « mes
étoiles » indiquent qu’elle semble lui appartenir. Les sonorités douces : allitérations en m, assonances en
ou : « rimes / mon / mes / doux frou-frou » miment la douceur, la protection de cette nature qui offre un
toit à Rimbaud. Elle met ses sens en éveil l’ouïe : « doux frou-frou », le toucher : « je sentais des gouttes »,
le goût : « comme un vin de vigueur ». Ce sonnet peint un jeune homme qui vagabonde sans contraintes et
ce sentiment de liberté gagne le poème tant sur le fond que sur la forme. En effet, dans un sonnet
traditionnel, les quatrains et les tercets doivent être grammaticalement indépendants. Ici, pourtant, le
second quatrain se prolonge dans le premier tercet : « Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou / et je
les écoutais assis au bord des routes » (v 8-9) On parle de sonnet libertin, un choix poétique très audacieux
qui montre l’émancipation créatrice de Rimbaud.

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