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Ado 053 0659
Ado 053 0659
Joëlle Nouhet-Roseman
Dans Adolescence 2005/3 (T. 23 n°3), pages 659 à 668
Éditions Éditions GREUPP
ISSN 0751-7696
DOI 10.3917/ado.053.0659
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JOËLLE NOUHET
Kosupure3. Au Japon, tous les cuisiniers portent une toque blanche, tous
les skieurs débutants sont équipés de la panoplie complète du skieur de
compétition olympique... L’habit révèle l’activité, l’appartenance sociale
ou professionnelle. Aujourd’hui encore, de l’école maternelle à
l’université, les enfants et les adolescents sont vêtus d’uniformes et, dans
les entreprises, les employés portent tous le vêtement de travail
correspondant à leur fonction.
D’origine relativement récente, Kosupure désigne le loisir qui
consiste à porter des costumes étranges ou extravagants en public. Comme
le carnaval ou Halloween, c’est l’occasion d’apparaître différent, de
ressembler à des chanteurs à la mode ou à des personnages de mangas. À
Tokyo, Kosupure a lieu une fois par semaine, le dimanche, dans le célèbre
quartier nommé Harajuku, lieu branché pour adolescents polychromes :
cheveux verts ou jaunes, lèvres bleues, visages teintés, coiffures hérissées,
ils portent des atours trashy, des dentelles ou des cuirasses, des bandages
rouge-sang, du skaï, du latex, des accoutrements voyants, plissés ou
déchirés et parfois effrayants.
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Rachel, dix-sept ans, vit avec sa famille : père, mère, frère et sœur. Elle
aura bientôt dix-huit ans et fait des études de commerce à Paris. Elle a un
amoureux, va souvent au cinéma et aime la lecture, dont les mangas qui
l’occupent environ une heure par jour. Elle est jolie, sans maquillage et vêtue
simplement lors de notre rencontre. Très spontanée, elle est intelligente et
nuancée dans ses propos.
Quand je l’interroge sur ses déguisements de cosplay, sa réaction est vive.
Rachel précise que le cosplay n’a rien à voir avec des déguisements : « Dans le
déguisement on ne joue pas, on est seulement déguisé en n’importe qui ou
n’importe quoi, une citrouille ou une sorcière quelconque. Dans le cosplay, on
incarne le personnage et c’est pour le spectacle. On fait le cosplay d’un
personnage précis, on incarne un personnage, Kiki la petite sorcière ou Dark
Angel, par exemple. Par ailleurs, les personnages d’un Disney ou d’un Comics ne
sont pas considérés comme cosplay. Pour que ce soit un cosplay, il faut que ce
soit japonais. »
Rachel a assisté à sa première convention en 2001 à la Villette, elle avait
alors été impressionnée par le cosplay de Sailor Moon, son héroïne préférée.
« Lorsque j’ai aperçu cette Sailor Moon, j’étais subjuguée par la qualité du
costume et la ressemblance avec le personnage. J’ai donc voulu aussi tenter
l’expérience. » Rachel a aussi apprécié « le côté convivial, le côté exhibition », le
fait que l’on s’adresse aux cosplayers par leur nom de personnage,
« directement ». Ainsi, dans le cosplay, outre la dimension ludique et conviviale,
on n’est pas « n’importe qui ou n’importe quoi », on s’affirme en tant que
personnage identifiable dans une sociabilité partagée.
C’est à dix ans que Rachel découvre Sailor Moon. Enfant, comme
beaucoup d’autres petites filles, Rachel se déguisait beaucoup, sa mère
confectionnait des costumes, pour elle et sa sœur aînée. De confession juive, la
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8. Freud,1900, p. 214.
MANGAMANIA ET COSPLAY 665
BIBLIOGRAPHIE
Joëlle Nouhet
Équipe de Recherches sur l’Adolescence
Université Paris VII - Denis Diderot
UFR Sciences Humaines Cliniques
107, rue du Faubourg Saint-Denis
75010 Paris, France
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