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Chapitre 4.1 Comment créer la bonne séquence de négociation ?

Ce chapitre explique comment assembler tous les éléments présentés jusqu'à présent. Et
c'est-à-dire, en particulier, comment créer la séquence de négociation la plus efficace?
Par quoi commencer? Sur quoi enchaîner? Dans quel ordre faire les choses? Comment
conclure? Y a-t-il un ordre logique dans tout cela? Eh bien oui. Et pour vous aider à développer
la bonne séquence de négociation, je vais vous présenter deux outils différents.

Le premier est assez simple. Il s'appuie sur les dix éléments de la préparation que nous avons
abordée dans le module 2. Prenez un instant pour vous les remémorer. Vous devriez déjà bien
les connaître. Et maintenant, imaginez-vous, juste avant le début concret d'une négociation.
Vous vous apprêtez à entrer dans la pièce. Et donc, très concrètement, lequel, selon vous, de
ces dix éléments devrait vous venir, en premier, à l'esprit? La logistique. Vous devez prendre
le soin d'arriver avec suffisamment d'avance pour choisir votre place, pour vérifier
l'équipement, brancher votre PC, disposer la documentation sur la table, etc. Autant de
petites choses très concrètes, mais qui ne doivent pas être des petits grains de sable au tout
début.

Quel doit être l'élément suivant?

La communication. Vous devez ciseler soigneusement vos premières paroles afin de créer une
bonne première impression. Le but implicite de ces premiers mots échangés est
généralement d'établir de bonnes relations entre les négociateurs présents autour de la table.
Et cela vous donne le troisième élément. Donc un peu de petit bavardage peut aider, rappelez
les progrès enregistrés lors de la dernière réunion, si nécessaire. Fournissez quelques
explications concernant un évènement désagréable qui aurait pu nuire un petit peu à votre
lien de confiance. Donc logistique, communication, relations.

Le quatrième élément de cette séquence sera l'organisation. Clarifiez avec votre


interlocuteur le temps dont vous disposez, les points qui doivent être discutés, dans quel
ordre, quelques aspects de méthode. Maintenant, vous avez planté le décor de la
négociation. Et vient le moment d'aborder le fond. Cela aurait été une erreur de se précipiter
pour parler de cette dimension des problèmes sans d'abord prendre en compte les quatre
éléments que nous venons de citer. Alors cinquième élément, vous allez maintenant essayer
de comprendre les motivations profondes qui ont amené les négociateurs autour de la table.
Ensuite, logiquement, vous allez essayer d'imaginer les bonnes solutions, l'élément numéro
six, afin de concevoir un accord global, créatif, équitable. Pour savoir quelles solutions seront
inclues ou exclues de l'accord, vous argumenterez grâce à ce que nous avons appelé des
justifications, c'est le septième élément. Bien, peu à peu émerge un accord potentiel sur la
table. Et dans notre séquence, il nous reste trois éléments à utiliser sur les dix.

Numéro 8, le moment est venu de comparer les solutions posées sur la table avec votre
meilleure solution portable. Si votre plan B est plus intéressant, il n'y aura pas d'accord.
Numéro 9, il est encore temps de prendre en compte les parties prenantes, toutes ces entités
qui ne sont pas présentes autour de la table, et pour qui la négociation revêt un enjeu. Essayez
d'anticiper leur réaction pour vous assurer qu'elles soutiendront, qu'elles faciliteront la mise
en œuvre de l'accord.
Dernier élément, et certainement non des moindres, le mandat. Vérifiez que l'accord global
respecte les instructions que vous avez reçues. Alors vous voyez, les dix éléments s'avèrent
une ou deux fois de plus bien pratiques. Ils nous fournissent une approche logique en dix
étapes, mais c'est vrai qu'une approche aussi linéaire est un peu trop théorique. Et dans la
plupart des négociations, les choses sont plus fluctuantes. Alors c'est pour cela que dans les
parties suivantes, nous vous présenterons un second outil pour développer progressivement
une séquence de négociation efficace.

4.2 Gérer les priorités pour une négociation efficace -1ère partie

Afin de développer une séquence de négociation efficace, nous avons analysé d'innombrables
négociations, discuté avec beaucoup de négociateurs expérimentés dans différents secteurs,
l'entreprise, la diplomatie. Et nous avons à chaque fois essayé de comprendre ce qui leur
semblait le plus utile de faire et à quel moment. Cette analyse a fait émergé quelque chose
d'intéressant, nous nous sommes rendu compte qu'en négociation il y a un grand nombre de
choses évidentes au sens premier du terme, c'est-à-dire qui se voient de loin. Et ça, tout le
monde y fait attention, c'est gros comme une maison qu'il faut faire telle et telle chose. Par
exemple, c'est évident qu'un négociateur doit parler à l'autre pour essayer de le convaincre,
et d'où la tentation assez répandue, de parler sans arrêt.

Néanmoins, il est apparu qu'avant de faire ces choses évidentes, les négociateurs les plus
efficaces prêtent attention à un autre aspect, en général moins visible, un peu plus subtil, et
pourtant absolument essentiel. Par exemple, écouter. Et ils écoutent si bien que, quand ils
prennent la parole, ils savent exactement quel argument avancer, comment le présenter et
contre quelle faille s'en servir. Et pour résumer, au lieu de faire ce qui est évident, en oubliant
l'essentiel, le bon négociateur doit d'abord traiter l'essentiel, avant de se tourner vers ce qui
est évident. Alors sur cette même idée, idée très simple, l'essentiel avant l'évident, je vais
vous présenter dix principes qui vous aideront à aborder les bonnes priorités dans le bon
ordre, dans toute négociation.

Dès que vous serez tenté de faire ce qui paraît évident, ces principes, comme une forme de
corde de rappel, vous aideront à vous concentrer d'abord sur un autre aspect beaucoup plus
essentiel. Ce n'est qu'après que vous passerez aux choses évidentes. Prêt à découvrir ces dix
principes? Vous verrez, ils vous aideront aussi à récapituler le contenu des trois précédents
modules.

Principe numéro 1. Avant tout, avant toute autre chose, quelle est selon vous la
préoccupation constante des négociateurs vraiment efficaces? Prenez un instant pour noter
vos réponses. Maintenant, avant de vous révéler la bonne réponse, je vais utiliser un petit
exemple. Imaginez que vous avez travaillé toute la semaine sur un rapport que vous devez
présenter à un client potentiel, en réunion, lundi matin neuf heures chez eux. Là nous sommes
vendredi, il est 16 h et vous venez d'envoyer par e-mail votre beau rapport, 100 pages, bien
charté, avec des graphiques, des images en couleurs, tout ça est somptueux. Vous avez
terminé votre travail, le week-end s'annonce vachement bien. À 16h05 vous recevez un e-mail
de votre contact. Il vous félicite pour votre rapport et vous demande d'en apporter des
exemplaires imprimés pour la réunion de lundi matin, en précisant, on sera une vingtaine de
personnes. Autrement dit, vous devez imprimer cent fois une vingtaine, un peu plus de 2 000
pages bien sûr en couleur, pour tous vos beaux graphiques, et puis faire relier chaque
exemplaire pour que ça ait l'air un peu sérieux. Et là, il est vendredi, 16h08. Dans la plupart
des organisations, il y a quelque part, en général dans un sous-sol obscur, un employé ou une
équipe en charge de ces gros photocopieurs qui sont capables de cracher le bidule
rapidement. Et là maintenant il est 16h10 en ce vendredi après-midi. Donc vous vous grouillez
d'aller dans le fameux sous-sol, avec votre clé USB avec le petit fichier, et là, l'employé en
question s'apprête à partir, il est 16h11 un vendredi. Alors, premier scénario, vous n'avez
jamais rencontré cet employé avant. Pire, vous l'avez rencontré, mais, comme ça n'est qu'un
sombre technicien, vous ne lui avez pas prêté beaucoup d'attention. Eh bien là, il y a presque
100 % de probabilité pour que cette personne vous réponde "mais écoutez cher Monsieur, ou
chère Madame, je suis désolé, mais j'ai éteint les machines, et d'ailleurs pour une telle
quantité, et en couleur, avez-vous fait signer le formulaire B16 à votre manager?

Second scénario, vous connaissez déjà cette personne. Vous avez pris un café un jour
ensemble, par hasard, avez discuté de ce que vous voulez, de musique, de vacances. Eh bien
c'est démontré, il y a une vraie probabilité pour que cette personne vous réponde, " t'es
vraiment pénible, me faire ça un vendredi après-midi, mais, parce que c'est toi, je vais le faire.
Tu as le formulaire B16? Non, écoute, c'est pas grave, tu me l'apportes mardi, et bien sûr tu
me dois un café ". Et en tous cas vos photocopies seront prêtes. Quel est l'unique ingrédient,
mais essentiel, qui change tout? Vous l'avez compris, les relations. Et c'est pour cela que, avant
toute autre chose, la préoccupation essentielle des bons négociateurs est de nouer des
relations de confiance, de travail. Autrement dit, ne vous attendez pas à réussir à créer un lien
de confiance au moment où vous en aurez besoin dans une négociation. Il sera généralement
trop tard. Ce premier principe est très puissant, et c'est pour cela que j'insiste un peu. Et il est
encore plus puissant dans un sens négatif.

Lee Ross, professeur à Standford, a démontré le pouvoir d'un biais cognitif qu'il a appelé la
réaction dévaluatoire, reactive devaluation. Si les gens réagissent négativement à une
proposition, ce n'est pas seulement à cause de son contenu intrinsèque, mais parce qu'ils
n'ont pas de bonnes relations avec la personne qui a émis cette proposition. Si cette même
proposition était faite par une personne qu'ils apprécient, en laquelle ils ont un niveau
minimum de confiance, ils auraient été nettement plus enclins à l'accepter. Alors, j'ai parlé
assez longuement de ce premier principe, la relation avant tout le reste, parce que c'est le
socle sur lequel repose tout le reste, comme vous allez le découvrir dans les parties suivantes.

4. 3 Gérer les priorités pour une négociation efficace - 2ème partie

Vous rappelez-vous d'une des clés qui soutend ces dix principes? C'est toujours d'accorder la
priorité à l'essentiel avant de passer aux choses plus évidentes. Nous allons maintenant
aborder le deuxième de ces dix principes. La négociation est bien sûr synonyme d'action. Il
faut aller rencontrer des gens, participer à une réunion, faire des propositions. Mais avant
l'action, l'essentiel sera la préparation. Le bon négociateur est prêt. Et vous le savez, la
préparation était le sujet du module 2. J'espère que désormais, vous êtes bien familier de ces
dix éléments.

o Pour la dimension des personnes, relations entre négociateurs, relations avec les
patrons qui donnent le mandat, et puis les parties prenantes.
o Pour la dimension des problèmes, les motivations, les solutions à la table, comment
les justifier, et puis les solutions hors-table.

o Pour la dimension du processus, comment, l'organisation, la communication, la


logistique.

Une fois préparé, vous serez évidemment tenté de prendre tout de suite part à la négociation,
laquelle en général impliquait des partenaires extérieurs. Pourtant, il reste une étape
intermédiaire essentielle qui s'intercale entre la préparation et la réunion. Il va falloir trouver
un consensus interne avec votre environnement immédiat avant d'aller vers l'extérieur. Vous
êtes préparé, mais cette préparation est-elle alignée sur celle de vos proches collaborateurs,
de vos partenaires internes?

Imaginez la situation suivante. Un responsable commercial bien préparé a vendu une grande
quantité de produits de son entreprise, sauf qu'il n'a pas vérifié en amont si le directeur de la
production de son entreprise était capable de fabriquer une telle quantité dans ces délais-là.
Vous voyez le problème venir. Donc ce troisième principe, consensus interne avant toute
réunion externe est très important. Quand vous devez par exemple assister à une réunion
avec une équipe dont chaque membre représente un département distinct de votre
organisation, il faut impérativement établir un consensus et de la cohésion interne avant de
rencontrer la partie adverse.

Sommes-nous tous d'accord sur nos objectifs, sur nos stratégies?


Comment se répartir les rôles ?

Ce principe-là, je le vois malheureusement régulièrement, n'est pas respecté lorsque des


consortiums d'entreprises répondent à de grands appels d'offres internationaux. Il faut
impérativement cette cohésion interne au sein même du consortium. En prime, je vais vous
présenter le principe 3bis. Avant une réunion multilatérale où plusieurs parties doivent
négocier, le principe essentiel, c'est de créer d'abord des alliances. Il faut essayer de former
autour de vous, de vos approches, des coalitions avec des discussions bilatérales informelles.
Ainsi, lorsque vous arriverez dans la négociation multilatérale, vous ne serez pas isolé. Principe
sûr. Maintenant, vous avez trouvé un consensus avec vos collaborateurs, et donc vous êtes
impatient, dans la réunion, de parler du problème. C'est évident qu'il y a négociation parce
qu'il faut résoudre un ou plusieurs problèmes. Mais il y a quelque chose d'essentiel à caler au
préalable.

Pour augmenter vos chances de résoudre le problème, vous devez d'abord mettre en place le
bon processus, donc le processus avant le problème. Il faut clarifier les règles du jeu.

De combien de temps disposons-nous?


Comment structurer l'ordre du jour?
Allons-nous discuter d'un point après l'autre ou au contraire adopter l'approche du paquet
cadeau, de l'accord global?
Donc ce quatrième principe, le processus avant le fond, vous permettra d'éviter deux
scénarios pénibles. Premier, personne n'a réfléchi au processus, et donc la négociation risque
d'être chaotique, ce qui en général ne vous aidera pas à atteindre vos objectifs.
Second scénario plus pénible encore, vous, vous n'avez pas vérifié le processus, contrairement
à l'autre négociateur, et eux ont tout organisé selon leurs propres préférences. Donc n'oubliez
pas, il faut établir le processus avant de s'attaquer au problème.

4.4 Gérer les priorités pour une négociation efficace - 3ème partie

Vous allez maintenant découvrir trois autres principes qui vous aideront à développer la
bonne séquence de négociation, quel qu'en soit le sujet, quel qu'en soit le lieu. Nous avons
déjà évoqué le principe numéro cinq, il est évident que le négociateur doit parler à l'autre
partie pour la convaincre, mais il est essentiel d'écouter d'abord l'autre négociateur. Pourquoi
écouter? Pas seulement pour être gentil ou sympa ou améliorer votre karma, mais pour deux
raisons principales.

Première raison, la négociation est structurée par des asymétries d'information, vous savez
des choses que l'autre ignore et l'autre sait des choses que vous aimerez bien connaître. Donc,
afin de réduire ces incertitudes, ces angles morts, prenez l'écoute au sérieux. Vous obtiendrez
plus d'information, vous saurez mieux que dire, que ne pas dire. Donc poser des questions,
creusez en profondeur.
Seconde raison, le fait d'écouter quelqu'un et de l'écouter vraiment en faisant
authentiquement preuve d'intérêt et de respect est généralement profitable à la qualité de la
relation et cela c'est cohérent avec le principe un. Donc comme vous le verrez ces dix principes
forment un système unifié, structurel. Principe numéro six, eh bien, une fois la discussion
engagée sur le fond de la négociation, en général on est tenté de se focaliser sur une question
évidente, qui obtiendra quoi, qui fera quoi, comment va se répartir les choses, donc c'est
toujours ce versant compétitif de la négociation, concentré sur la distribution de la valeur
disponible qui attire évidemment. Et pourtant, il est d'abord plus essentiel de se concentrer
sur une autre question, comment générer des choses ensemble, comment diminuer les coûts
ou les risques, comment augmenter l'intérêt de notre coopération, comment faire grandir
gâteau disponible. Et c'est d'abord vers ce versant coopératif de la négociation qu'il faut se
diriger. C'est celui-ci qui va nous permettre d'aller vers des sommets et après seulement on se
répartira ce que nous avons créé en commun. C'est logique.

En général l'objectif d'une négociation n'est pas d'obtenir de maigres gains à court terme, mais
de s'impliquer dans la mesure du possible dans un partenariat beaucoup plus avantageux et
beaucoup plus durable. Alors, n'oubliez pas ce principe numéro six, il faut générer de la valeur
avant de se préoccuper de la distribuer. Principe numéro sept, face à un problème,
évidemment la plupart des négociateurs cherchent une solution. Problème, solution ça parait
évidemment. Et pourtant c'est allé un cran trop vite. Les négociateurs les plus efficaces savent
que pour avoir une chance d'identifier la bonne solution à un problème donné, ils doivent
d'abord rechercher autre chose qu'une solution.

Ils doivent d'abord obtenir de l'information, sans a priori sur ce que pourrait être la solution.
Ce n'est que après avoir réuni suffisamment d'information sur les problèmes, sur les
motivations plus profondes qui le sous-tendent qu'un négociateur aura les meilleures chances
d'identifier les bonnes solutions. Une fois de plus, c'est logique, c'est du bon sens, mais on
tend à l'oublier. Et d'ailleurs ce principe numéro sept s'accorde très bien avec deux des
principes précédents. La préparation avant l'action. Il faut faire ce qu'il faut en amont pour
obtenir les bonnes informations. Et de même l'écoute avant la prise de parole. Vous
obtiendrez plus d'information à la table des négociations grâce à une bonne écoute et cela
vous permettra ensuite de vous poser les solutions qui ont le plus de chance de percuter. Donc
on vient de voir les principes cinq, six et sept. Il reste encore trois principes que nous allons
vous présenter dès les parties suivantes.

4.5 Gérer les priorités pour une négociation efficace - 4ème partie

Dans cette partie, je vais terminer la présentation des dix principes qui vous aident à décider
que faire et dans quel ordre, à quel moment, pour quelle raison, pour construire la meilleure
séquence possible de négociation. Toujours selon cette même idée, préoccupons-nous de
l'essentiel avant de nous précipiter vers ce qui est évident. Le principe numéro 8 est aligné
sur le précédent. On négocie dans le monde réel, et donc évidemment on a besoin de solutions
réalistes. Pourtant, l'expérience prouve que les bonnes solutions en général, il faut les inviter.
Il est contreproductif de s'en tenir uniquement aux vieilles recettes ou de se contenter
d'appliquer la solution qui a fonctionné la fois d'avant.

Les bons négociateurs sont des gens créatifs, innovants. Ils imaginent la solution à laquelle
personne n'a encore pensé, et c'est ainsi qu'ils arrivent à sortir de l'impasse. Bien sûr, ensuite,
ils vérifient et revérifient que leur solution innovante est également réaliste Est-elle légale,
conforme aux normes en vigueur, faisable techniquement, est-ce que c'est financé, etc.? Mais
ne vous précipitez pas. La créativité d'abord, le réalisme ensuite, et les deux avec le même
degré d'implication et d'exigence. Nous approchons maintenant de la fin d'une négociation. A
un moment donné, vous serez confronté à cette question évidente, devez-vous dire oui ou
non à un accord potentiel? Et la plupart des gens tirent des conclusions trop rapides à ce stade
et ils passent ainsi à côté de l'étape essentielle qui consiste à d'abord évaluer correctement
ce qu'impliquerait un " oui, nous avons un accord " ou un non.

D'où ce principe numéro 9, évaluer le paquet disponible avant de décider. Et cela fait
référence à un point abordé dans la première partie du module 3. Qu'est-ce qu'un bon accord?
N'oubliez pas qu'un bon accord doit passer le test des dix éléments. A la toute fin d'une
séquence de négociation, j'espère que vous vous souviendrez à chaque fois de notre dixième
et dernier principe. Naturellement, les négociateurs seront impatients de clore la discussion
et de passer à autre chose. Mais avant de suspendre toute séance de négociation, il est
essentiel de vérifier et de revérifier tous les points pour les valider et ne laisser aucun
malentendu. Et en effet, cette dernière étape donne lieu à de nombreuses erreurs. C'est un
moment délicat, la clôture d'une négociation ou en tout cas la clôture d'une réunion de
négociation avant la prochaine réunion. Parce que le Diable se trouve dans les détails.
Imaginez une petite négociation informelle. Vous pensez déjà peut-être déjà à votre prochaine
réunion, la prochaine tâche que vous avez à accomplir, et là, des erreurs vont se produire. Ou
bien au contraire imaginez une longue négociation, ça a pris des heures, et il est maintenant
très tard, vous êtes épuisé, vous êtes fatigué, et donc susceptible de commettre des erreurs.
Donc je vous encourage à prendre ce dernier principe très au sérieux. Vous devez valider avant
de conclure. N'oubliez pas que la négociation dure jusqu'au point final de la dernière page du
dernier document. Récapitulons ces dix principes. Ils vous servent de boussole dans toute
négociation. Chaque fois que vous vous apprêtez à faire quelque chose d'évident, vérifiez que
vous avez bien pris d'abord l'essentiel en compte. Les relations avant tout le reste, la
préparation avec l'action, le consensus interne avant une réunion externe, et la coalition
avant une réunion multilatérale, le processus avant le problème, l'écoute avant la prise de
parole, la création de valeur avant la répartition de cette valeur, la recherche d'informations
avant la recherche de solutions, l'innovation d'abord, le réalisme ensuite, évaluer avant de
décider, valider avant de conclure. Une fois de plus, je vous invite à mémoriser ces principes
car ils pourront vraiment vous être utiles dans vos négociations réelles.

4. 6 Conclusion : le rapport de force

Nous arrivons maintenant à la fin de ce chapitre sur les fondamentaux de la négociation. Nous
avons abordé une liste assez longue de sujets, mais il en reste un, le rapport de force. Que
faire quand l'autre partie est en position de force?

Mais d'abord, qu'est-ce qu'un négociateur en position de force? Voilà une question légitime
que j'aimerais aborder dans cette dernière partie. Alors, selon vous, quels ingrédients
génèrent un rapport de force favorable pour un négociateur? Prenez un instant pour réfléchir
à cette question. Je présenterai ma propre réponse ensuite.

Prêt?

Ici encore, nos 10 éléments s'avèrent bien utiles. Ils vous aident à vous préparer, voir le
module 2, à évaluer un accord potentiel, module 3, et même à développer une séquence de
négociation logique, module 4. De plus, ils fournissent une checklist qui peut vous aider à
évaluer en détail qui est en position de force autour de la table. En effet, chacun de ces 10
éléments va contribuer à former ce rapport de force. Les relations entre les négociateurs. Qui
a le plus besoin de préserver de bonnes relations à long terme? Si je suis plus à l'aise que vous
à l'idée de mettre un terme à notre relation professionnelle, je suis en position de force, car
vous serez prêt à céder sur le fond pour préserver nos relations et ne pas passer à côté
d'opportunités futures.

Deux, le mandat. Qui négocie pour le compte du mandant le plus influent? Imaginez que vous
négociez pour le compte d'un patron dont tout le monde sait qu'il quitte l'entreprise à la fin
du mois. Votre pouvoir de négociation s'en trouve diminué.

Trois, les parties prenantes. Qui a le plus de soutien, d'alliés, en dehors même de la salle de
négociation? Quatre, les motivations. Qui a le plus besoin de conclure un accord? Dans
l'ensemble, l'autre partie attend-elle quelque chose de nous, ou bien est-ce l'inverse? Qui est
plutôt le demandeur de la négociation? Ensuite, les solutions posées sur la table. Qui peut
proposer des solutions plus intéressantes grâce à des ressources particulièrement à
profusion? Les justifications, outils très importants pour le pouvoir d'un négociateur. Qui peut
justifier ces exigences par des critères objectifs que personne ne peut facilement réfuter? Je
vous demande telle solution parce que la loi dispose que j'y ai droit. Or, ce n'est même plus
négociable. Les solutions hors table, voilà l'élément véritablement central du rapport de force.
Le négociateur en position de force est celui qui peut quitter la table sans accord et à un
moindre coût pour lui que pour l'autre, parce qu'il a un meilleur plan B. L'organisation va aussi
offrir un peu plus de pouvoir au négociateur qui est en position de décider, par exemple, de
ce que l'on inscrit à l'ordre du jour, ou qu'on n'y inscrit pas. C'est le négociateur qui ne va pas
avoir une échéance particulière, alors que l'autre est obligé de conclure avant une certaine
deadline.

La communication. Là aussi, les asymétries de l'information font pencher le rapport de force


vers moi, si je sais quelque chose que l'autre ne sait pas. Et enfin la logistique, dernier élément
à ne pas sous-estimer. Si la négociation a lieu là où je le souhaite, là où j'organise les choses
de manière concrète, le choix de la pièce, tout cela va m'arranger. Cela crée quelque chose
qui m'est plutôt favorable en termes de rapport de force. Après avoir procédé à cette
évaluation du rapport de force, ne désespérez pas si vous en concluez que ce rapport de force
est clairement en faveur de l'autre partie. Quelle que soit la situation structurelle, d'autres
aspects interpersonnels vont vous aider à tempérer, voire à neutraliser ce rapport de force.
Par exemple, qui est le mieux préparé? Dans quelle équipe y a-t-il le plus de cohésion?

Généralement, les négociateurs en position de force, précisément parce qu'ils se sentent en


position de force, ont tendance à être trop sûrs d'eux, moins bien préparés, moins cohérents
dans leur équipe. Qui possède les meilleures qualités personnelles en termes d'écoute, de
capacité à prendre la parole de manière percutante, ou lorsqu'il s'agit d'être créatif, d'inventer
des solutions innovantes. Et puis, il y a toujours un plus pour les négociateurs qui s'investissent
réellement, qui restent profondément concentrés, qui gardent leur calme sur la distance.
Alors, nous voici arrivés au terme ultime de ce cours. Plus vous lisez les chapitres, plus vous
allez vous familiariser avec les outils et les méthodes qui sont présentées. Plus vous les
utiliserez dans vos négociations, plus vous obtiendrez des résultats tangibles. Pour ma part, je
vous souhaite beaucoup de succès dans vos négociations futures. À vous de jouer.

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