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NEUROPATHIES TOXIQUES

D’ORIGINE MEDICAMENTEUSE
NTAKIRUTIMANA E.
D.E.S - Neurologie médicale
CHU Kamenge, le 30 Mars 2021.
PLAN
I. Introduction
II. Epidémiologie
III. Physiopathologie
IV. Diagnostic positif
V. Diagnostic étiologique
VI. Prise en charge
VII.Conclusion

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I. Introduction
 Les neuropathies toxiques peuvent être environnementales, professionnelles, récréatives, ou
iatrogènes, et la prévalence de leur origine est régie par des facteurs géographiques et
économiques.
 Dans les pays développés, la cause la plus fréquente de neuropathie toxique est la toxicité
d’origine médicamenteuse, en particulier celle associée à la chimiothérapie.
 La prévalence de la neuropathie périphérique induite par la chimiothérapie a été signalée
comme atteignant 68 % au cours du premier mois suivant la fin du traitement et l'on peut
s'attendre à ce qu'elle augmente avec l'augmentation des taux de survie au cancer.
 Dans les pays en développement, les neuropathies toxiques sont secondaires aux expositions
environnementales et professionnelles à divers agents y compris l'arsenic, le plomb, le
mercure et les composés organophosphorés, qui sont des neurotoxiques périphériques
importants.

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II. Epidémiologie
 L'incidence des neuropathies chimio-induites varie selon les études et en fonction de
la dose : elle est d'environ 12 % à la dose conventionnelle et de 70 à 100% avec des
doses cumulatives plus élevées (540-600 mg/m2).
 Elle peut être inférieure (14%) en cas de monothérapie et atteint 38% en cas de
polychimiothérapie.
 La neuropathie associée à l'utilisation de médicaments antirétroviraux à analogues
nucléosidiques tels que la didanosine (ddI), la stavudine (d4T) et la zalcitabine (ddC)
est dose-dépendante et on estime qu'elle survient chez 15±30% des patients recevant
chacun de ces médicaments.
 La neuropathie périphérique a été rapportée dans 13% des cas de la cohorte de patients
traités pour une tuberculose multirésistante (fluoroquinolones?).
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II. Epidémiologie
 Facteurs de risque

Sałat K. Pharmacological Reports (2020) Swati P. et al. Bull Adv Drug React (2014)
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III. Physiopathologie

Implication des lésions des fibres nerveuses intra-épidermique (IENF), le stress


oxydatif, la décharge spontanée anormale, l'activation des canaux ioniques, la
régulation à la hausse de diverses cytokines pro-inflammatoires et l'activation du
mécanisme de la CIPN. Swati P. et al. Bull Adv Drug React (2014)
Hu L.-Y. et al.Current Neuropharmacology (2019)
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IV. Diagnostic positif
IV.1. Tableau clinique :
 Neuropathie longueur-dépendante, sensitive (rarement sensitivo-motrice) avec
hypoesthésie en gants et en chaussettes.
 Exceptions : cisplatine (ataxie proprioceptive), chloroquine et colchicine
(neuromyopathie).
 L’imputabilité du médicament doit prendre en compte trois paramètres :
• La présentation clinique.
• La chronologie entre l’instauration du médicament et la survenue de la
neuropathie.
• La confrontation de ces données individuelles aux données de la littérature.

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IV. Diagnostic positif
IV.2. Evaluation clinique
 L'évaluation d'une neuropathie toxique se déroule comme pour toute neuropathie de
cause inconnue.
 La 1ère étape consiste à vérifier que le patient souffre réellement d'une atteinte
nerveuse périphérique.
 Le clinicien utilise l’anamnèse, l'examen clinique et l’ENMG pour localiser le niveau
de l’atteinte du SNP et caractériser le type de lésion : cellules de corne antérieure,
racines nerveuses, plexus, axones sensoriels ou moteurs, muscle, ou jonction
neuromusculaire.
 Le score DN 4 et l’échelle CTCAE v5 sont les plus utilisés dans le dépistage des
symptômes de NPM.

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IV. Diagnostic positif
IV.2. Evaluation clinique

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IV. Diagnostic positif
IV.2. Evaluation clinique
Cotation des neuropathies sensitives périphériques selon l’échelle CTCAE v5.0

Kachrani R. et al. Journal of Pain & Palliative Care Pharmacotherapy (2020)

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IV. Diagnostic positif
IV.3. Evaluation paraclinique
 Électroneuromyogramme : confirme le mécanisme axonal et la nature symétrique
de la neuropathie.
 Biopsie nerveuse : uniquement en cas de doute diagnostique.
 Imagerie par laser doppler : utilise le réflexe d’axone et la quantification d’une
réponse vasodilatatrice cutanée après dépôt d’une goutte d’histamine.
 Microscopie confocale de la cornée : permet d’évaluer la densité des fibres
nerveuses dans le plexus nerveux sous-basal.
 Test de la fonction sudomotrice (Réponse cutanée sympathique) : dépiste les
neuropathies périphériques précoces, les glandes sudoripares étant innervées par de
petites fibres C.

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V. Diagnostic étiologique
V.1. NP chimio-induites
 La neurotoxicité des chimiothérapies est fréquente et représente le principal facteur
limitant du traitement après la toxicité hématologique.
 Non seulement la chimiothérapie est la principale cause de neuropathies toxiques,
mais aussi elle est parfois inévitable, car la poursuite du traitement peut être
nécessaire pour le patient.
 En outre, le cancer lui-même peut causer une neuropathie paranéoplasique, rendant les
nerfs plus sensibles à la neurotoxicité induite par la chimiothérapie.
 De nombreux agents chimiothérapiques ont une dose toxique cumulative connue qui
provoque une neuropathie, et ceci doit être pris en compte lors du traitement des
patients.
Villatte C. et al. Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2017)
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V. Diagnostic étiologique
V.1. NP chimio-induites
 Les mécanismes physiopathologiques sont très hétérogènes mais la clinique est tjrs identique :
douleur neuropathique sensitive, distale, symétrique, parfois associée à une atteinte motrice
ou à une atteinte du SNA.
 Les douleurs sont dites en « gants » et/ou en « chaussettes » et touchent parfois un territoire
hyperesthésique. Elles sont dose-dépendantes, pouvant aller de simples paresthésies à un
handicap fonctionnel important altérant la qualité de vie.
 Le délai d’apparition entre l’instauration de la chimiothérapie et l’apparition des signes de NP
dépend du type de chimiothérapie. L’incidence est variable en fonction des médicaments
utilisés, de leur dose par cure et de leur dose cumulée.
 Les plus incriminés sont les sels de platine (Cisplatine, Oxaliplatine), les vinca-alcaloïdes
(Vincristine, Vinorelbine) et les taxanes (Paclitaxel, Docétaxel). L’association des sels de
platine et des taxanes est à l’origine d’une neurotoxicité accrue (25 à 71 %).
Villatte C. et al. Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2017)
Diezi M., Rev Med Suisse (2014)
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V. Diagnostic étiologique
V.1. NP chimio-induites

Villatte C. et al. Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2017)


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V. Diagnostic étiologique
V.1. NP Chimio-induites

Landrieu P. Correspondances en Onco-hématologie (2010)


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V. Diagnostic étiologique
V.2. Neuropathies dues aux autres médicaments
 De nombreux médicaments utilisés dans plusieurs pathologies aiguës, subaiguës ou
chroniques peuvent entrainer à des degrés divers des neuropathies périphériques.
 Pour la plupart de cas, l'incidence de la neuropathie périphérique reste rare.
 Il s’agit surtout :
• Des médicaments cardiovasculaires (Amiodarone, Flecainamide, Hydralazine,…) ;
• Des anti-infectieux (Isoniazide, Ethambutol, Métronidazole, Fluoroquinolones, Chloramphénicol,
Dapsone, Nitrofurantoine, ddI, d4T, ddC,…) ;
• Des anti-inflammatoires (Chloroquine, Sels d’or, …) ;
• Des anticonvulsivants (Phénytoïne), anesthésiques (Oxide d’azote), antigoutteux (Colchicine) ;
• Des médicaments utilisés dans la désintoxication alcoolique (Disulfiram).
Taledano M., Neurol Clin (2020)
Staff N. P. et al., Continuum (Minneap Minn) (2014)
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V. Diagnostic étiologique
V.2. Neuropathies dues aux autres médicaments

Staff N. P. et al., Continuum (Minneap Minn) (2014)


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V. Diagnostic étiologique
V.2. Neuropathies dues aux autres médicaments

Staff N. P. et al., Continuum (Minneap Minn) (2014)


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V. Diagnostic étiologique
V.2. Neuropathies dues aux autres médicaments

Staff N. P. et al., Continuum (Minneap Minn) (2014)


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VI. Prise en charge
1. Traitement préventif :
• Perfusion de calcium et de magnésium (NP liées à l’oxaliplatine),
• Vit B6 (NP due à l’INH)
• Vit B12 (NP due au Monoxyde d’Azote).
• Arrêt du médicament incriminé (en fonction de la sévérité de la NP et du bénéfice du ttt) : se
méfier toujours des aggravations retardées avec le cisplatine, survenant malgré l’arrêt du ttt.

2. Traitement symptomatique :
• Antidépresseurs (tricycliques, ISRS),
• Anticonvulsivants (Gabapentine, Lamotrigine) ou
• Anesthésiques locaux (Lidocaïne).
• Opiacés sont proposés en 2è ou 3è ligne à cause de leurs nombreux E2.

3. Kinésithérapie : en cas de gêne fonctionnelle majeure.


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VI. Prise en charge

Hu L.-Y. et al.Current Neuropharmacology (2019)


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VII. Conclusion
 Si les chimiothérapies, dont il existe de nombreux modèles expérimentaux et les antibiotiques
sont les plus fréquemment en cause dans les neuropathies médicamenteuses, toutes les classes
de médicaments peuvent être concernées.
 Les manifestations peuvent être multiples, sensitives, dysautonomes ou motrices.
 L’origine médicamenteuse doit toujours être envisagée devant une neuropathie axonale
sensitive longueur-dépendante dont le bilan étiologique reste négatif et un médicament pris au
long cours.
 La pharmacovigilance doit être interrogée et, en cas de doute, le médicament si possible
supprimé.
 A l’heure actuelle, le traitement reste symptomatique sur la douleur neuropathique, avec
l’utilisation des antidépresseurs, certains anticonvulsivants ou anesthésiques locaux, seuls ou
en association.

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Références
1. Diezi M., Kuntzer T. Neuropathies périphériques d’origine médicamenteuse. Rev Med Suisse 2014 ;
10 : 954-7.
2. Villatte C. Authier N., Picard P. et al. Douleurs aiguës et chroniques induites par les traitements
médicamenteux du cancer. Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2017) 18, 78—86.
3. Hu L.-Y. Mi W.-L., Wu G.-C. et al. Prevention and Treatment for Chemotherapy-Induced Peripheral
Neuropathy: Therapies Based on CIPN Mechanisms. Current Neuropharmacology, 2019, 17, 184-196.
4. Swati P., Mali S. Overview of drug induced peripheral neuropathy. Bull Adv Drug React 2014(4);1,3-
12.
5. Kachrani R., Santana A., Rogala B. et al. (2020): Chemotherapy-Induced Peripheral Neuropathy:
Causative Agents, Preventative Strategies, and Treatment Approaches. Journal of Pain & Palliative
Care Pharmacotherapy, DOI: 10.1080/15360288.2020.1734144.
6. Toledano M., Toxin-Induced Neuropathies. Neurol Clin 38 (2020) 749–763.
7. Staff N. P. et al. Peripheral neuropathy due to vitamin deficiency, toxins, and medications.
Continuum (Minneap Minn) 2014;20(5):1293–1306.
8. Sałat K. Chemotherapy‑induced peripheral neuropathy: part 1-current state of knowledge and
perspectives for pharmacotherapy. Pharmacological Reports (2020) 72:486–507.
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