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Leçon 6.

Le contrat

Partie I. La formation du contrat


Introduction

 Tout le monde conclut des contrats (tout le temps et même sans le savoir)

Contrat
=
Substrat des relations
sociales
Achat d’un journal Appel à un plombier
 Principales bases légales du droit des contrats :

1. L’ancien Code Civil (contrat de vente, contrat d’entreprise et de mandat)

2. Le Code de droit économique (« CDE ») (protection du consommateur)

 Attention ! Réforme du droit des obligations

1. Nouveau « Livre 1er » qui reprend des concepts de base (ex : abus de droit)

2. Nouveau « Livre 5 » qui reprend le droit des obligations (cf. infra)

• Pour information : Doc. n° 55-1805/001 et n° 55-1806/001

• Remarque : textes entrés en vigueur le 1er janvier 2023


 Nouveau Code civil (aka le « Code civil ») : comporte dix livres que le législateur remplit au
fur et à mesure de l’avancement de ses travaux de modernisation du droit privé :

o Livre 1er. Dispositions générales (en vigueur depuis le 1er janvier 2023) ;

o Livre 2. Les personnes, la famille et les relations patrimoniales des couples (en vigueur
depuis le 1er juillet 2022) ;

o Livre 3. Les biens (en vigueur depuis le 1er septembre 2021) ;

o Livre 4. Les successions, donations et testaments (en vigueur depuis le 1er juillet 2022) ;

o Livre 5. Les obligations (en vigueur depuis le 1er janvier 2023) ;

o Livre 6. La responsabilité (travaux en cours) ;

o Livre 7. Les contrats spéciaux (travaux en cours) ;

o Livre 8. La preuve (en vigueur depuis le 1er novembre 2020) ;

o Livre 9. Les sûretés (travaux en cours) ;

o Livre 10. La prescription (travaux en cours)


1. La notion de contrat

 Définition : un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes avec


l’intention de faire naître des effets de droit (article 5.4 du Code civil)

 Contrat : opération simple ou complexe

Passage devant le
notaire requis (=
acte authentique)
 Remarques sur la portée des règles applicables aux contrats :

1) Article 5.3 du Code civil

 « Les dispositions du présent livre sont supplétives, à moins qu’il


résulte de leur texte ou de leur portée qu’elles présentent, en tout ou
en partie, un caractère impératif ou d’ordre public »

 Idée : consécration du caractère supplétif du droit des contrats

2) Article 5.13, alinéa 2, du Code civil

 « Les règles particulières aux contrats spéciaux sont établies dans les
dispositions de l’ancien Code civil [c.’-à-d. les articles 1582 à 2010] et
du présent Code qui concernent chacun de ces contrats, dans le Code
de droit économique et dans les lois particulières »

 Cf. infra.
 Rappel de la notion de règle supplétive

o Principe : règles obligatoires, SAUF si les parties décident d’y déroger

o Exemple : article 1651 de l’ancien Code civil

« S'il n'a rien été réglé à cet égard lors de la vente, l'acheteur doit payer au lieu
et dans le temps où doit se faire la délivrance »,

On peut y déroger = règle supplétive


1.1. La rencontre de volontés en vue de produire des effets juridiques

 Naissance du contrat : rencontre de deux volontés sur le même objet

o Exemple : une personne veut vendre des pommes – une autre personne veut
acheter des pommes = contrat !

o Parfois plus compliqué…

• Exemple : une personne veut vendre des pommes « reinette » – une


autre veut acheter des pommes « Golden » = contrat ?

Discordances entre les deux volontés = acheteur peut


recourir aux vices de consentements pour faire annuler le
contrat (cf. infra)
1.2. L’offre-acceptation

 Formation du contrat ? Rencontre de deux volontés par une offre suivie d’une
acceptation (article 5.18 du Code civil)

o Exemple : offre = je vends ma BMW série 3 pour 10.000 EUR – acceptation =


j’accepte et je viendrai la chercher lundi matin Contrat formé

 Trois caractère de l’offre au sens juridique (article 5.19 du Code civil) :

1) Complète : contenir les éléments essentiels et substantiels du contrat


projeté

• A défaut = « invitation à entrer en pourparlers »

• Exemple d’éléments essentiels pour la vente : chose et le prix

• Exemple d’éléments substantiels pour la vente : la date de livraison


2) ferme : l’offrant doit avoir la volonté de s’engager sur le plan juridique

 Idée : proposition doit témoigner de la volonté de conclure un contrat

 Conséquence : pas une offre au sens juridique du terme

Propositions très Propositions


incomplètes formulées sur le ton
de la plaisanterie
(exemple : pas de
rémunération dans (exemple :
un contrat de travail) proposition faite
dans un show TV)
3) Extériorisée : l’offre doit parvenir à son destinataire

 Offre réceptice : offre adressée à une personne déterminée

o Effet : irrévocable lorsqu’il parvient à son destinataire = offrant ne


peut plus la retirer après ce moment sans commettre une faute

 Offre au public : offre adressée à un nombre indéterminé de personnes

o Effet : obligatoire par le seul fait de son extériorisation et l’offrant est


liée avec le premier acceptant venu

Offrant lié pour autant


qu’il y ait des stocks
 Acceptation ? Innovation du Code civil !

o Notion : l’acceptation est toute déclaration ou autre comportement du


destinataire de l’offre qui exprime l’accord sur celle-ci, sans ajouts, limitations
ou autres modifications concernant des éléments essentiels ou substantiels
(article 5.20, alinéa 1er, du Code civil)

o Quid si modification des éléments essentiels ou substantiels de l’offre ?

• Article 5.20, alinéa 2, du Code civil : les ajouts, limitations ou autres


modifications entraînent le rejet de l’offre initiale et constituent, le cas
échéant, une nouvelle offre

• Conséquence : formulation d’une « contre-offre »


2. Typologie des contrats

 Sources : articles 5.5 à 5.12 du Code civil

2.1. Contrats consensuels, réels et formels (article 5.5 du Code civil)

 Contrats consensuels : contrat formé par l’accord de volontés, sans que sa validité soit
soumise à une exigence de forme (alinéa 1er)

o Exemples : le contrat de vente ou le contrat de mandat

 Contrats réels : formation soumise à la remise d’une chose (alinéa 3)

o Exemple : le contrat de prêt = formation par la remise de la chose prêtée

 Contrats formels : validité soumise à une exigence de forme (alinéa 2)

o Exemple : le contrat de donation ou contrat d’organisation de voyages


o Exigence de forme ?

• Exemple de la donation d’une maison :

Article 4.158 du Code civil

« Tout acte de donation est, à peine de


nullité, passé devant notaire ».

Contrat formel ou
aussi dit « solennel »
2.2. Contrats synallagmatiques et unilatéraux (article 5.6 du Code civil)

 Contrats synallagmatiques : chaque partie souscrit des obligations (alinéa 1er)

o Exemple 1 : le contrat de vente

• Vendeur = obligation = transférer la propriété

• Acheteur = obligation = payer le prix

o Exemple 2 : le contrat de bail

• Bailleur = obligation = mettre le bien à disposition

• Locataire = obligation = payer le loyer


 Contrats unilatéraux : une partie seulement souscrit des obligations (alinéa 2)

o Exemple 1 : le contrat de prêt Seule obligation = emprunteur =


remboursement de la somme prêtée

o Exemple 2 : le contrat de cautionnement Seule obligation =


caution = payer le créancier en cas d’inexécution du débiteur garanti

Créancier contrat Débiteur (cautionné)


ca
u
tio
nn
em
en
t

Caution = paye en cas


Caution d’inexécution du
débiteur
 Remarque : pas confondre contrat unilatéral et engagement par déclaration
unilatérale de volonté (= acte juridique unilatéral) (article 5.125 du Code civil)

o Contrat unilatéral = accord de volontés entre deux personnes

o Engagement par déclaration unilatérale de volonté = volonté d’une personne

• Exemple : offre de contracter = Je vous vends ma voiture pour 10.000 EUR

Engagement de maintenir l’offre


=
Résultat d’une seule volonté
2.3. Les contrats à titre onéreux et les contrats à titre gratuit (article 5.7 du Code civil)

 Contrats à titre onéreux : le contrat procure un avantage à chaque partie (alinéa 1er)

o Exemples : le contrat de vente ou le contrat de bail

 Contrats à titre gratuit : une partie qui procure un avantage à l’autre ne reçoit en
échange aucun avantage (alinéa 2)

 Exemples : la donation ou le mandat à titre gratuit (service d’ami)

 Intérêt de la distinction : application de règles propres à chaque catégorie

o Exemple : la responsabilité du débiteur bénévole = appréciée avec clémence par les


cours et tribunaux (moins sévèrement qu’en cas de contrat à titre onéreux)
2.4. Contrats nommés et les contrats innommés

 Disposition ? Allusion à l’article 5.13 du Code civil

 Contrats nommés : contrat réglé par les dispositions particulières

o Exemple : le contrat de vente (articles 1582 à 1701 de l’ancien Code civil)

o Régime juridique : prévu par les dispositions de l’ancien Code civil

 Contrats innommés : contrat non réglé par des dispositions particulières

o Exemple : le contrat de leasing (contrat issu purement de la pratique)

o Régime juridique : établi par la doctrine et la jurisprudence sur la base d’une


combinaison de règles issues des contrats nommés
2.5. Contrats conclus intuitu personae

 Dispositions ? Le Code civil ne consacre pas explicitement cette catégorie de contrat

 Base : le cocontractant est indifférent lors de la conclusion du contrat

o Exemple : commande d’une pizza = c’est la pizza qui importe, pas le livreur

 Exception : le cocontractant est essentiel lors de la conclusion du contrat

Avocat Chirurgien Peintre


 Exemples de conséquences du caractère intuitu personae du contrat :

o Exécution personnelle du débiteur (article 5.196 du Code civil)

• Exemple : un peintre réputé doit réaliser la toile lui-même (il ne peut pas
demander à l’un de ses assistants de la réaliser)

o Décès, faillite et incapacité du débiteur : ces évènements peuvent entrainer la


dissolution du contrat intuitu personae (article 5.142 du Code civil)

o Exemple : décès du peintre réputé ses héritiers ne doivent pas


achever la peinture
2.6. Contrats entre personnes privées, entre entreprises et avec un consommateur

1) Contrats entre personnes privées : régis par le Code civil et l’ancien Code civil

2) Contrats entre entreprises (« contrats B2B ») :

 Régis par le Code civil et l’ancien Code civil

 Régis par le Code de droit économique

 Exemple : un contrat de vente conclu entre Carrefour et Delhaize

Contrat régi par :

- Code civil (Livre 5 sur les obligations)

- Ancien Code civil (articles 1582 à 1701)

- Code de droit économique (article VI.91)


 Notion d’entreprise (au sens Livre VI du CDE) :

o Article I.8, 39°, du CDE : « toute personne physique ou personne morale


poursuivant de manière durable un but économique, y compris les
associations ».

o Conséquence : notion d’entreprise = très large (exemple : un avocat)

 Règle spécifique : interdiction des clauses abusives dans les contrats B2B
(article VI.91/3 du CDE)

o Notion : « toute clause d’un contrat conclu entre entreprises est abusive
lorsque, à elle seule ou combinée avec une ou plusieurs autres clauses, elle
crée un déséquilibre manifeste entre les droits et obligations des parties »

o Clauses présumées abusives (article VI.91/5 du CDE)

o Clauses réputées abusives en toutes hypothèses (article VI.91/4 du CDE)

• Sanction : nullité relative (article VI.91/6 du CDE)


3) Contrats entre une entreprise et un consommateur (« contrats B2C »):

 Régis par le Code civil et l’ancien Code civil

 Régis par le Code de droit économique

 Exemple : la construction d’un abri de jardin par Brico pour un particulier

Contrat régis par :

- Code civil (Livre 5 sur les obligations)

- Ancien Code civil (articles 1787 à


1799)

- Code de droit économique (Livre VI


sur les pratiques du marché et la
protection du consommateur)
 Champ d’application :

o Notion de consommateur : « toute personne physique qui agit à des fins


qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle,
artisanale ou libérale » (article I.1, 2°, du CDE)

o Notion d’entreprise (au sens du Livre VI) : cf. article I.8, 39°, du CDE.

 Régime spécifique : interdiction des clauses abusives dans les contrats B2C
(articles VI.82 à VI.86 du CDE)

o Remarque : clauses abusives dans les contrats B2C ne sont pas toujours
les mêmes que celles prévues pour les contrats B2B (cf. supra)

o Notion : « toute clause ou toute condition dans un contrat entre une


entreprise et un consommateur qui, à elle seule ou combinée avec une
ou plusieurs autres clauses ou conditions, crée un déséquilibre
manifeste entre les droits et les obligations des parties au détriment du
consommateur » (article I.8, 22° du CDE)
o Clauses réputées en toutes hypothèses abusives (article VI.83 du CDE)

• Exemple 1er : clause ayant pour objet de « fixer ou modifier


unilatéralement le délai de livraison d'un produit » (5°)

• Exemple 2 : clause ayant pour objet de « déterminer le montant de


l'indemnité due par le consommateur qui n'exécute pas ses obligations,
sans prévoir une indemnité du même ordre à charge de l'entreprise qui
n'exécute pas les siennes » (17°)

• Sanction : nullité relative (article VI.84 du CDE)


3. Les principes généraux du droit des contrats

Introduction : le principe de « l’autonomie de la volonté »

 Concept philosophique : le contrat est l’œuvre exclusive de la volonté souveraine


des parties (les « méta principe » du droit des contrats)

 Idée : les parties peuvent se doter de leurs propres lois par leur volonté commune

Un individu est tenu Essor prodigieux


à un contrat « parce au 19e siècle :
qu’il l’a voulu, parce stimule l’esprit
qu’il a voulu et créatif et génère
comme il l’a voulu » des initiatives
Figure née aux USA et
importée chez nous
3.1. Le principe de la liberté contractuelle (article 5.14 du Code civil)

 Deux facettes :

o 1° : liberté de contracter avec la personne de son choix sans avoir à motiver sa


décision de refuser de contracter ou de contracter (alinéa 1er)

o 2° : liberté de déterminer le contenu du contrat pourvu qu’il satisfasse aux


conditions de validité prescrites par la loi (alinéa 2)

Construction Vente d’une


d’une maison : voiture :

je peux refuser les parties peuvent


de contracter insérer les clauses
avec un de leur choix
entrepreneur (exemple : clause
pas solvable d’arbitrage)
 Trois tempéraments aux principes de l’autonomie de la volonté :

1) Ordre public et les lois impératives (articles 5.3 et 5.8 du Code civil)

• Exemple 1 : contrat ayant pour objet de trafic de drogue encourt la


nullité absolue (= objet contraire à l’ordre public)

• Exemple 2 : bail à ferme = durée minimale prévue par la loi (article 4)

• Parties ne respectent pas la durée minimale de 9 ans (clause


contraire à une disposition impérative) = clause encourt la
nullité relative et la durée prévue par la loi s’applique

2) Contenu du contrat parfois imposé par le législateur

• Exemple : l’assurance de responsabilité civile souscrite par le conducteur


d’un véhicule automobile = c’est un contrat obligatoire et son contenu
est défini à l’avance par le législateur (article 1er AR 16 avril 2018)
3) Article 5.52 du Code civil (! nouveauté importante !)

o Texte : « « [t]oute clause non négociable et qui crée un déséquilibre


manifeste entre les droits et obligations des parties est abusive et réputée
non écrite » (alinéa 1er), sachant que « [l]’appréciation du déséquilibre
manifeste tient compte de toutes les circonstances qui entourent la
conclusion du contrat » (alinéa 2)

o Idée : interdiction générale de la clause abusive dans tous les contrats


d’adhésion et qui n’entrent pas dans le champ d’application du CDE

o Contrat d’adhésion (article 5.10 du Code civil) : contrat rédigé


préalablement et unilatéralement par une partie et qui n’est pas négociable

Contrats Vente entre


financiers deux
non soumis particuliers
aux articles (deux
VI.91/1 et s. « consomma
du CDE teurs)
 Liberté contractuelle et conditions générales :

o Conditions générales : définissent le contenu du contrat en réglant certains


problèmes (droit applicable, indemnités en cas de non-paiement, etc.)

o Opposabilité au cocontractant ? Deux conditions (article 5.23 du Code civil)

• Connaissance effective : cocontractant doit avoir la possibilité d’en


prendre connaissance concrètement avant la conclusion du contrat

• Deux formes d’acceptation :

 Expresse : une signature = « J’accepte vos conditions générales »

 Tacite : une entreprise reçoit les conditions et n’émet aucune


protestation (comportement = attention à la preuve !)

! matière commerciale !
3.2. Le principe du consensualisme (articles 5.28 et 5.29 du Code civil)

 Principe : le contrat se forme par le seul accord de volontés des parties (article 5.
28 du Code civil)

o Exemple : la vente d’un smartphone = un coup de téléphone suffit

 Tempéraments (article 5.29 du Code civil) :

o Contrats réels : formation du contrat par la remise de la chose (exemple : le


contrat de prêt d’une chose ou d’argent)

• Pas de remise = Contrat inexistant (nullité relative automatique)

o Contrats formels : formation du contrat dépend d’une condition de forme


spécifique (exemple : la conclusion d’une donation par un acte authentique)

• Absence de forme = nullité du contrat


3.2.1. Le formalisme de validité

 Notion : formalités ou mentions obligatoires destinées à protéger le consommateur

 Exemple : article VII.78 du CDE

o Conclusion d’un contrat de crédit à la consommation

o Nombreuses formalités et mentions obligatoires :

• Informations sur les modalités de remboursement

• Consommateur doit indiquer en toutes lettres le montant du crédit

• Consommateur doit indiquer « Lu et approuvé pour… euros à rembourser »

• etc.
3.2.2. Formalisme de protection et révolution digitale

 Évolution de la société : nécessité de réglementer les contrats électroniques

 Base de la réglementation en droit belge : Livre XII du Code de droit économique

 Formalisme spécifique pour ces contrats (articles XII.6, 7, 15 et 16 du CDE) :

o Informations précises sur le prestataire de services (article XII.6 du CDE)

o Informations les différentes étapes techniques à suivre pour conclure le contrat et


les moyens techniques pour identifier et corriger des erreurs commises dans la
saisie des données avant que la commande ne soit passée (article XII.7 du CDE)
3.2.3. Le formalisme probatoire et d’opposabilité

 Notion : « les conditions de forme requises uniquement pour la preuve ou


l’opposabilité du contrat n’ont pas d’incidence sur sa validité » (article 5.29, alinéa 4,
du Code civil)

1) Formalisme probatoire :

o Méconnaissance de ces formalités : ! acte n’est pas nul !

• On ne peut juste pas s’en servir comme preuve devant un juge

o Exemple : article 8.20 du Code civil

« L'acte sous signature privée qui constate un contrat synallagmatique


ne fait preuve que s'il a été fait en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant
un intérêt distinct »

Deux parties = deux exemplaires


2) Formalisme d’opposabilité

o Méconnaissance de ces formalités : ! acte n’est pas nul !

• On ne peut pas l’opposer à des tiers (= autres personnes que les parties)

o Exemple : l’acte authentique de vente d’une maison doit être transcrit dans le
registre tenu au bureau de l’Administration générale de la documentation
patrimoniale pour que les parties puissent opposer cette vente aux tiers (article
3.30 du Code civil)

• Pas de transcription : vente pas opposable aux créanciers du vendeur qui


pourront la faire saisir si ce vendeur a des dettes
3.3. Le principe de la convention-loi (articles 5.69 et 5.70 du Code civil)

 Notion : [l]e contrat valablement formé tient lieu de loi à ceux qui l’ont fait

 Deux conséquences :

1) Le contrat ne peut être modifié ou résilié que du consentement mutuel des


parties, ou pour les causes que la loi autorise

o Exemple de clause de résiliation unilatérale : « Le contrat pourra être résilié


par une partie moyennant un préavis de trois mois adressé à l’autre par
courrier recommandé »

o Exemples de faculté légale de résiliation unilatérale : article 1794 de


l’ancien Code civil (contrat d’entreprise), articles 2003 et 2007 de l’ancien
Code civil (contrat de mandat)

• NB : cas de « résiliation ad nutum » : sans préavis et sans justification


2) Le juge ne peut dispenser les parties ou l’une d’elles d’exécuter le contrat, en
modifier la teneur ou y ajouter des clauses sur la base de l’équité

o Exemple 1er: le juge ne peut réduire le loyer d’un bail d’habitation pour des
considérations d’équité

o Exemple 2 : le juge ne pourrait décider d’annuler une clause d’un contrat de


travail qu’il trouve « manifestement léonine » en défaveur du travailleur
 Deux tempéraments au principe de la convention-loi :

1) Droit de rétractation (article 5.22 du Code civil)

o Notion : la loi ou le contrat peut accorder un droit de rétractation à


une partie, qui dispose alors, après la conclusion du contrat, d’un délai
pendant lequel elle peut porter à la connaissance de l’autre partie
qu’elle renonce au contrat (sans frais, justification ou indemnité)
Achat d’un téléphone dispendieux à la
suite de la visite d’un commercial à
votre domicile : 14 jours, à dater de la
prise de possession du téléphone, pour
se rétracter (article VI.67, § 2, 2°, CDE)
2) Renégociation ou de dissolution du contrat (article 5.74 du Code civil)

o Conditions centrales : changement de circonstances qui bouleverse


l’économie contractuelle et qui rend l’exécution du contrat excessivement
onéreuse pour le débiteur

o Exemple : un contrat de transport conclu avant la crise énergétique et


devenu excessivement onéreux pour le transporteur à la suite de celle-ci

• Possibilité de demander la renégociation ou la dissolution du


contrat de la part du transporteur à son cocontractant

• Refus du cocontractant ? Demande adressée au juge

• ! Innovation majeure du Livre 5 ! (cf. infra)


3.4. Le principe de la bonne foi et de l’abus de droit (article 5.73 du Code civil)

3.4.1. La bonne foi

 Notion : respect de la correction et de la loyauté lors de la formation et de


l’exécution du contrat (« [l]e contrat doit être exécuté de bonne foi »)

 Histoire de la bonne foi :

1) Adoption de l’ancien Code civil : principe absent du droit des contrats bien que
mentionné à l’article 1134, alinéa 3, de l’ancien Code civil (principe peu
compatible avec une société libérale)

2) Essor prodigieux : passage d’un simple principe d’interprétation du contrat au


début du 20e siècle à un principe fondamental à l’heure actuelle
 Double fonction de la bonne foi :

1) Fonction complétive (article 5.71 du Code civil)

o Principe : le contrat oblige non seulement à ce qui y est convenu, mais


encore à toutes les suites que la loi, la bonne foi ou les usages lui donnent
d’après sa nature et sa portée (= base de « l’obligation d’information »)

o Exemple : un professionnel de la vente = doit informer son client sur les


caractéristiques de la chose vendue et le mettre en garde contre les
éventuels vices liés à son utilisation

2) Fonction modératrice (article 5.73, alinéas 2 et 3, du Code civil)

o Base de l’interdiction de l’abus de droit (cf. infra)

o Innovation du Code civil : les parties ne peuvent exclure ou limiter


l’application du principe de bonne foi à leur contrat = nullité de la clause
(article 5.73, alinéa 3, du Code civil)
3.4.2. L’abus de droit

 Notion : chacune des parties doit, dans l’exécution du contrat, se comporter comme le
ferait une personne prudente et raisonnable placée dans les mêmes circonstances
(article 5.73, alinéa 2, 1°, du Code civil)

o Exemple : locataire paie plus son loyer et quitte les lieux loués le bailleur
commet un abus de droit en réclamant l’exécution en nature (retour dans les lieux)

 Critères spécifiques de l’interdiction de l’abus de droit :

1) Exercice d’un droit avec l’intention de nuire (cf. article 1.11 du Code civil)

2) Exercice d’un droit sans intérêt ou de façon disproportionnée

3) Exercice d’un droit en le détournant de sa fonction légale initiale

o Critère très rare en pratique

o Exemple : droit de grève détourné de sa fonction (embêter l’employeur)


 Critères spécifiques =/= liste exhaustive

o Idée: reconnaissance de nouveaux critères possible par la Cour de cassation

o Exemple : « rechtsverwerking » (abus de droit si exercice d’un droit d’une


manière objectivement inconciliable avec l’exercice normal de ce droit)
(reconnaissance de ce critère spécifique par Cass. 1er octobre 2010)

• Exemple : bailleur néglige de réclamer des intérêts de retard pendant des


années pour des loyers non payés Rechtsverwerking =
réduction des intérêts de retard accordés au bailleur par le juge (idée :
suspension du cours des intérêts pendant toutes les années où le bailleur a
trainé)

Il ne faut pas trainer en tant que


créancier pour récupérer une créance
3.5. Le principe de la relativité du contrat (article 5.103, aliéna 1er, du Code civil)

 Principe : le contrat ne fait naitre des obligations qu’entre les parties

« Effet relatif du contrat » ou « relativité des effets du contrat »

 Exemple : un prêt de 10.000,00 EUR Prêteur = peut réclamer la


somme qu’à l’emprunteur – Emprunteur = doit rembourser la somme qu’au prêteur

 Exceptions : les tiers ne peuvent demander l’exécution d’une obligation contractuelle


que si la loi le prévoit et dans le cas prévu à l’article 5.107 du Code civil

o Les actions directes (= dérogations spécifiques prévues par la loi)

o La stipulation pour autrui (= article 5.107 du Code civil)


3.5.1. La stipulation pour autrui (article 5.107 du Code civil)

 Notion : contrat par lequel les parties – le stipulant et le promettant – s’accordent


pour faire naitre, à charge de ce dernier, un droit au profit d’une tierce personne –
le tiers bénéficiaire – qui n’a pas pris part à la conclusion du contrat

 Exemple : le contrat d’assurance-vie


Objet du contrat
Promettant contrat Stipulant =
(assureur) (assuré) versement d’un
capital au tiers
bénéficiaire au
décès du stipulant
Ca
pi
ta
l

= Tiers au contrat d’assurance


Tiers bénéficiaire
= Droit devient irrévocable dès
acceptation par le tiers bénéficiaire
(article 5.107, alinéa 6, du Code civil)
3.5.2. L’action directe

 Notion : hypothèse où un tiers peut se prévaloir directement d’une créance


issue d’un contrat auquel il n’est pas partie (action directe = origine légale)

o Conséquence : « tiers intercepte la créance » issue d’un contrat et


devient titulaire d’un droit propre envers le débiteur

 Exemple 1er : l’action directe de la victime d’un accident de la circulation

Article 150 de
Responsable Assurance RC Assureur la loi du 4 avril
d’un accident
2014
=
te La victime
e c
Victime de n dir peut
ti o directement
l’accident Ac demander
réparation à
l’assureur
 Exemple 2 : l’action directe du sous-traitant contre le maitre de l’ouvrage

Contrat avec
Maitre de
l’EP, mais pas
l’ouvrage
avec le ST
Article 1798 de l’ancien
Code civil : ST intercepte
la créance dont l’EP
dispose à l’égard du MO
Manque de Entrepreneur
liquidités (paie principal
=
pas son ST) (construction
d’une maison)
Demande de paiement
du ST directement au MO
(pour toutes les sommes
Veut son argent que l’EP lui doit et dans la
mais sait que Sous-traitant mesure de ce que le MO
l’EP n’est pas (responsable de n’a pas encore payé à l’EP)
solvable l’électricité)
4. La formation dynamique du contrat

 Notion : phase des négociations (= les préliminaires avant… la conclusion du contrat)

 Remarque : tant que les parties sont en pourparlers PAS DE CONTRAT

 Exemple : négociation d’un contrat de distribution en Chine = document de


travail indique que « les parties envisagent la conclusion d’un contrat… »

• Pas encore de contrat

Pourparlers
=
Discussions
 Innovation majeure du Code civil :

o Ancien Code civil : aucune disposition légale dédiée à la phase préliminaire

o Code civil : réglementation complète de la matière aux articles 5.14 à 5.17

 Trois points essentiels :

1) Liberté de rompre les négociations (article 5.15 du Code civil)

• Principe : les parties sont libres d’entamer, de mener et de rompre des


négociations précontractuelles (alinéa 1er) (rupture =/= acte illicite en soi)

• Tempérament : les parties doivent agir conformément aux exigences de la


bonne foi (alinéa 2)

• Négociations : pas le Far West


2) Obligation d’information (article 5.16 du Code civil)

• Fonction complétive de la bonne foi : les parties se fournissent pendant les


négociations précontractuelles les informations que la loi, la bonne foi et les
usages leur imposent de donner, eu égard à la qualité des parties, à leurs
attentes raisonnables et à l’objet du contrat

• Remarque : pas d’obligation d’information générale d’information lors des


pourparlers = communication d’informations quand la bonne foi l’impose

Obligation d’indiquer le projet de


construction d’autoroute à l’acquéreur
3) Rupture fautive des pourparlers (article 5.17 du Code civil)

• Principe : les parties peuvent engager leur responsabilité


extracontractuelle pendant les négociations précontractuelles

• Base légale : article 1382 de l’ancien code civil (standard de l’homme


normalement prudent et diligent)

• Exemples :

 Rupture brutale des pourparlers juste avant la conclusion du contrat,


sans un juste motif ;

 Refus de renouvellement d’un contrat sans un juste motif ou de façon


manifestement disproportionnée

 Rupture des pourparlers imputable à une faute délibérée d’une


partie, comme le fait qu’une partie n’ait jamais eu la volonté sérieuse
de conclure ou qu’elle ait entamé les négociations pour obtenir des
informations confidentielles de sa part
• Frais indemnisables ? Cf. article 5.17, alinéa 3, du Code civil

1. Intérêt négatif : frais des négociations

2. Intérêt positif : avantages nets qui auraient été procurés par


l’exécution correcte du contrat s’il avait été conclu

Cession d’actions
avortée en raison
du comportement
de l’acquéreur :
quid vendeur ?

Intérêt négatif : frais Intérêt positif : plus-value de


d’avocat et de notaire 10.000 EUR par rapport au prix
des actions achetées il y a un an
5. Les conditions de validité du contrat

 Article 5.27 du Code civil : Pour la validité d’un contrat, les conditions suivantes
doivent être remplies :

1° le consentement libre et éclairé de chaque partie

2° la capacité de chaque partie de contracter

3° un objet déterminable et licite

4° une cause licite

 Remarque : appréciation des conditions de validité du contrat au moment de la


conclusion du contrat et non à une date postérieure à celle-ci (cf. infra)

o Exemple : un contrat de bail. Pas d’immeuble lors de la conclusion du contrat :


nullité pour absence d’objet (article 5.49) – Perte de l’immeuble après la
conclusion du contrat (incendie) : dissolution pour impossibilité d’exécution
(article 5.100) = pas le même régime juridique
5.1.1. L’erreur

 Notion : erreur consiste à croire vrai qui est faux ou croire faux ce qui est vrai

o Exemple : l’achat d’un tableau = je crois ce tableau authentique (un vrai), alors
que c’est une contrefaçon (un faux)

 Deux sortes d’erreur : l’erreur-obstacle et l’erreur sur la substance

o En dehors : pas d’annulation du contrat pour erreur

o Erreur matérielle : rectification possible du contrat (article 5.31 du Code civil)

o Exemple : une vente de 10 tonnes de blé à une entreprise américaine

Prix libellé en dollar lors des négociations et


puis « par erreur » en euros dans le contrat =
rectification possible de l’erreur matérielle
5.1.1.1. L’erreur obstacle (article 5.31 du Code civil)

 Définition : erreur à ce point grave qu’il n’y a pas de rencontre des consentements

 Sanction : nullité relative

 Conditions (article 5.31 du Code civil) :

1) Erreur déterminante (cf. erreur-vice de consentement)

2) Erreur excusable (cf. erreur-vice de consentement)

 Deux sortes : erreur in corpore et in negotio


1) Erreur in negotio = nature du contrat

Une partie = vente

Pas de contrat !

Autre = location

2) Erreur in corpore = objet du contrat


Une partie = terrain A
Vente d’un terrain
Pas de contrat !

Autre = terrain B

NB : il s’agit de cas d’école…


5.1.1.2. L’erreur-vice de consentement (article 5.34 du Code civil)

 Notion : erreur-vice de consentement si une partie a eu, de manière excusable, une


représentation erronée d’un élément qui l’a déterminée à conclure le contrat, alors
que l’autre partie connaissait ou devait connaître ce caractère déterminant

 Trois conditions :

1) Erreur déterminante du consentement de l’errans

• Notion de qualité déterminante = qualité sans laquelle la partie victime


de l’erreur (= l’errans) n’aurait pas contracté

• Exemple : j’achète un tableau de Nicolas Poussin que je crois authentique

C’est un faux : erreur sur le caractère authentique

= erreur sur une qualité déterminante de mon


consentement (compte tenu du prix payé)
2) Erreur doit avoir pénétré le champ contractuel

o Principe : cocontractant de l’errans connaissait ou devait connaitre la


qualité substantielle

o Exemple 1er : achat d’un tableau de Nicolas Poussin = le vendeur du


tableau devait savoir que son authenticité était déterminante de mon
consentement compte tenu du prix que je l’ai payé

3) Erreur doit être excusable

o Principe : une personne prudente et raisonnable placée dans des


circonstances analogues aurait également commis l’erreur

o Appréciation du caractère raisonnable : prise en considération de l’âge,


des qualifications et des compétences professionnelles de l’errans

Preuve des trois conditions de l’erreur : repose sur l’errans


 Sanctions (article 5.33 du Code civil) :

1) Nullité relative du contrat

2) Dommages et intérêts (article 5.33 juncto article 5.17 du Code civil)

o Condition : erreur trouve son origine dans une faute du cocontractant

o Exemple : le tableau de Nicolas Poussin = vendeur a dit qu’il s’était


renseigné sur son caractère authentique, alors que ce n’était pas le cas

Nullité + dommages et intérêts complémentaires


5.1.2. Le dol (article 5.35 du Code civil)

 Notion : le dol est une erreur provoquée intentionnellement par le cocontractant,


quels que soient la nature et l’objet de l’erreur (élément intentionnel du dol)

 Deux conditions du dol (outre l’élément intentionnel) :

1) Manœuvres frauduleuses

• Manœuvres positives : la vente d’une voiture

Manipulation du
compteur kilométrique
=
Passage de 50.000 à
20.352 kilomètres
• Manœuvres négatives ? dol par silence = réticence dolosive

1. Obligation de communiquer une information

2. Rétention volontaire d’information

 Exemple 1er : la vente d’un véhicule d’occasion = le vendeur


omet volontairement de dire que le véhicule a subi un grave
accident

 Exemple 2 : la vente d’une maison = le vendeur omet


volontairement d’indiquer à l’acheteur que la maison est
infestée par la mérule alors qu’il ne pouvait pas l’ignorer
2) Manœuvres déterminantes du consentement de la victime

o Notion : la victime doit démontrer que, sans les manœuvres, elle


n’aurait pas contracté

o Exemple : le compteur kilométrique trafiqué = acheteur doit démontrer


qu’il n’aurait pas acheté la voiture sans les manœuvres frauduleuses

• Preuve des deux conditions (+ élément intentionnel) du dol :


repose sur la victime (article 5.35, alinéa 4 du Code civil)
 Deux remarques :

1) L’erreur de la victime du dol ne doit pas être excusable

• Cf. article 5.35, alinéa 2, du Code civil

Différence majeure avec l’erreur-vice de consentement !

2) Dol émanant d’un complice du cocontractant

o Principe : assimilé au dol provenant du cocontractant (article 5.35,


alinéa 3, du Code civil)

o Exemple : la manipulation du compteur kilométrique. Le dol sera admis


si un garagiste a demandé au propriétaire d’une voiture de trafiquer
son compteur kilométrique afin de pouvoir la lui racheter et de la
revendre à un bon prix à un nouvel acquéreur grâce à cette manœuvre
 Sanctions (article 5.33 du Code civil) :

1) Dol principal = dol déterminant du consentement de la victime

o Nullité relative

o Culpa in contrahendo : dommages et intérêts complémentaires

2) Dol incident = dol pas déterminant du consentement de la victime

o Principe : victime aurait quand même contracté si elle avait eu


connaissance des manœuvres, mais à de meilleures conditions

o Effet : dommages et intérêts Rééquilibrage du contrat


5.1.3. La violence (article 5.36 du Code civil)

 Notion : lorsqu’une partie conclut un contrat sous une contrainte illégitime de son
cocontractant qui lui fait craindre une atteinte considérable à l’intégrité physique ou
morale ou aux biens de cette partie ou de ses proches

 Exemple : forcer quelqu’un à contracter sous la menace de faire du mal à ses proches

 Trois conditions :

1) Crainte d’une atteinte considérable

• Principe : la crainte doit être de nature à faire craindre un mal considérable


à une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances

• Champ d’application : menace contre l’intégrité physique, morale ou aux


biens d’une partie ou de ses proches
2) Crainte déterminante du consentement de la victime

• Annulation du contrat : la victime de la violence doit démontrer qu’elle


n’aurait pas contracté sans les menaces de son cocontractant

3) Actes injustes ou illicites

• Exemple 1er : l’auteur de la violence fait signer une reconnaissance de dette


à une personne en usant de voies de fait (menaces, des coups ou des
destructions de biens)

• Exemple 2 : une personne est menacée d’une plainte pour détournement


de fonds et accepte de verser des montants supérieurs aux montants
détournés sous la pression de l’auteur de la violence
• Deux tempéraments :

1. La contrainte dans le cadre de l’exercice normal d’une autorité


n’est pas, en soi, un acte injuste ou illicite.

 Idée : la seule « crainte révérencielle » envers les parents


ou son employeur ne suffit pas pour entrainer la violence

2. Exclusion de la violence pour les agissements qui s’expliquent


par l’exercice normal d’un droit

 Exemple : un bien menacé d’expropriation = la conclusion


d’une convention de cession amiable avec l’autorité
expropriante n’est pas, en soi, un acte injuste ou illicite =
exercice légitime d’un droit reconnu à l’autorité
 Remarques :

o Preuve des trois conditions de la violence : repose sur la victime

o La violence peut émaner d’un tiers complice ou d’une personne dont répond le
cocontractant (article 5.33, alinéa 3, du Code civil)

 Sanctions (article 5.33 du Code civil) :

1) Violence principale = violence déterminante du consentement

• Principe : nullité relative et dommages et intérêts complémentaires

2) Violence incidente = violence pas déterminante du consentement

• Principe : la victime aurait quand même contracté sans la violence, mais à


des conditions plus intéressantes

• Effet : dommages et intérêts (très rare)


5.1.4. La lésion et l’abus de circonstances (articles 5.37 et 5.38 du Code civil)

 Notion de lésion : la lésion consiste en un déséquilibre entre les prestations des


parties existant au moment de la conclusion du contrat

o Remarque : le seul fait de l’existence d’un déséquilibre ne suffit pas à conclure à


la lésion = le législateur se méfie de ce vice de consentement (société libérale)

La vente d’un immeuble évalué à 500.000,00 EUR


= un acheteur peut accepter de le payer
1.000.000,00 EUR pour des raisons personnelles

Déséquilibre = résulte du jeu


normal des relations
commerciales
o Conséquence : la lésion est reconnue par le législateur dans des cas
particuliers et prévus par la loi (article 5.38 du Code civil)

• Exemple : la lésion de plus de sept douzièmes pour la vente d’immeuble


(article 1674 de l’ancien Code civil)

 Remarque : la lésion protège le vendeur (pas l’acheteur)

 Idée : prix de vente est inférieur à cinq douzièmes de la valeur réelle


de l’immeuble = vendeur peut réclamer l’annulation du contrat

o Sanction de la lésion simple : nullité relative


 Notion d’abus de circonstances : déséquilibre manifeste entre les prestations des
parties, lors de la conclusion du contrat, à la suite de l’abus par l’une des parties de
circonstances liées à la position de faiblesse de l’autre partie

o Trois conditions :

1) Déséquilibre manifeste entre les prestations des parties

• Principe : déséquilibre très important (appréciation par le juge)

• « Manifeste » : déséquilibre pas simplement défavorable à une partie

2) Exploitation de l’état d’infériorité d’une partie par l’autre

• Principe : exploitation des faiblesses, de l’âge, de l’inexpérience ou


des passions d’une partie

• Exemple : un contrat de transport = petit transporteur se voit imposer


des conditions manifestement déséquilibrées par un commissionnaire
abusant de sa dépendance économique à lui
3) Lien de causalité entre l’abus et le déséquilibre manifeste

• Principe : le juge doit être certain que la convention n’aurait pas été
conclue ou qu’à tout le moins, elle ne l’aurait été qu’à des conditions
moins désavantageuses pour la victime de l’abus de circonstances

• Exemple : une mère de deux enfants est victime d’un incendie qui
anéantit son habitation. Le matin même de l’incendie, cette dame en
plein désarroi signe une quittance d’indemnisation que lui présente un
inspecteur d’assurances. Le montant de l’indemnité est dérisoire =
annulation du contrat passé entre cette mère et l’assureur

o Sanctions (article 5.33, alinéa 2, du Code civil) :

• Nullité relative (abus déterminant) ou adaptation des obligations (abus


pas déterminant)

• Culpa in contrahendo : dommages et intérêts complémentaires


5.2. L’objet (articles 5.46 à 5.49 du Code civil)

 Notion :

o Objet du contrat : les obligations ou les autres effets de droit que visent les
parties (article 5.46, alinéa 1er, du Code civil)

o Objet d’une obligation : obligation a pour objet une prestation qui peut
consister à faire ou ne pas faire quelque chose, à donner quelque chose ou à
garantir quelque chose (article 5.46, alinéa 2, du Code civil)

 Caractères de l’objet :

1) Dans le commerce et possible

2) Déterminé ou déterminable

3) Licite
5.2.1. Un objet dans le commerce et possible (articles 5.47 et 5.48 du Code civil)

 Objet dans le dans le commerce :

Viande impropre à la consommation

= La loi prescrit qu’elle n’est plus dans le commerce :


peut donc pas faire l’objet d’un contrat

 Objet possible :

Vente de la lune ? Non = objet impossible


5.2.2. Un objet déterminé ou déterminable (article 5.49 du Code civil)

 Principe : la prestation doit être déterminée, ou au moins déterminable sans qu’un


nouvel accord de volontés des parties soit exigé

1) Objet déterminé : la lecture du contrat permet de définir la nature et l’étendue


des prestations

• Exemple : un contrat portant sur la « vente d’un chien » sans autre


précision = objet des obligations de l’acheteur (prix) n’est pas déterminé

2) Objet déterminable : contrat contient tous les éléments objectifs permettant


de définir les prestations des parties

o Exemple : l’achat des actions au prix du marché à telle date = L’objet des
obligations de l’acheteur est déterminable = le prix au cours de bourse à
une date donnée est un élément objectif

 Imprécision de l’objet : complément possible par les usages professionnels et les


règles de l’art (article 5.71, alinéa 1er, du Code civil)
 Détermination de l’objet par un tiers ou par une partie (article 5.49 du Code civil) :

o Applications : articles 1591 et 1592 de l’ancien Code civil

• Par une partie : un avocat qui détermine la stratégie du dossier

• Par un tiers : vente conclue à « dire d’expert » (condition : le contrat doit


contenir les éléments de base du calcul du prix ou les éléments par relation
avec lesquels le prix peut être déterminé par les experts)

o Contrôle par le juge : au départ de la bonne foi

 Choses futures : peuvent être l’objet d’une prestation (article 5.50 du Code civil)

o Condition : l’existence de la chose future doit être certaine sans qu’un nouvel
accord de volonté des parties soit requis

o Exemples : vente d’une voiture à fabriquer ou d’une récolte de l’année à venir


5.2.3. Un objet licite

 Notion : la prestation est illicite lorsqu’elle crée ou maintient une situation qui est
contraire à l’ordre public ou à des dispositions légales impératives

 Remarque : le simple fait qu’une convention contrevienne à une norme impérative ou


d’ordre public ne suffit pas à rendre son objet illicite (point de vue objet)

o Exemple : « le contrat d’assurance, dont l’objet est de couvrir le risque d’incendie


d’un bungalow pour lequel aucun permis de bâtir ou d’urbanisme n’avait été
délivré, n’a pas eu pour effet de créer ou de maintenir une situation illégale »
(Cass., 19 mai 2005, Pas., 2005, n° 284)

 Exemples d’objets illicites :

o La location d’un bien immobilier d’un complexe destiné à la prostitution crée ou


maintient une situation contraire à l’ordre public

o Un contrat tendant à l’exercice illicite d’une profession réglementée (ex. : avocat


ou médecin) est nécessairement doté d’un objet illicite
5.3. La cause (article 5.53 du Code civil)

 Notion : la cause s’entend des mobiles qui ont déterminé chaque partie à conclure le
contrat, dès lors qu’ils sont connus ou auraient dû l’être de l’autre partie

= Mobiles déterminants

= Connus ou qui auraient dû être connus

 Remarque : le mobile déterminant doit être extériorisé

o Exemple : location d’une maison à la suite d’un engagement dans une nouvelle
société = mobile propre au locataire constitue un objectif déterminant de son
engagement avec le bailleur et peut pénétrer le champ contractuel s’il en fait
expressément part à son bailleur
 Utilité de la cause :

1) Contrat sans cause est frappé de nullité relative (article 5.54 du Code civil)

• Principe : tout contrat doit avoir une raison d’être

• Tempérament : « contrats abstraits de leur cause »

 Idée : les parties ou la loi peuvent décider qu’une l’absence ou


que la disparition de la cause n’aura aucun effet

 Exemple : le cautionnement = contrat abstrait de sa cause

Créancier Débiteur

Caution ne peut
Caution pas invoquer la
perte de la cause
pour refuser de
payer le créancier
2) Contrat affecté d’une cause illicite est nul (article 5.56 du Code civil)

• Exemple 1er : une personne loue une maison dans l’unique but d’y
exercer un trafic de drogues (si bailleur au courant du trafic)

• Exemple 2 : un donateur a la volonté de faire naitre, de maintenir ou


de rémunérer des relations immorales (hors mariage) avec le donataire

• Remarque : le mobile illicite doit être commun aux cocontractants


pour impliquer la nullité, c’est-à-dire connu des deux parties (rejet de
la « théorie du mobile unilatéral illicite » de la Cour de cassation)
5.4. La capacité

 Conclusion d’un contrat : il faut être juridiquement capable de contracter

 Principe : capacité = toute personne peut contracter (article 5.40 du Code civil)

o Exception : l’incapacité (article 5.41 du Code civil)

o Mineurs

o Personnes protégées par l’article 492/1 de l’ancien Code civil

o Personnes à qui la loi interdit de conclure certains contrats

 Distinction : capacité de jouissance et capacité d’exercice (cf. leçon 3)


5.5 L’ordre public et les lois impératives

 Rappel : on ne peut déroger à l’ordre public ni aux règles impératives (article 1.3, alinéa
3, du Code civil)

1) Ordre public : règle touchant aux intérêts essentiels de l’État ou de la collectivité,


ou qui fixe, dans le droit privé, les bases juridiques sur lesquelles repose la société,
telle que l’ordre économique, moral, social ou environnemental (alinéa 4)

2) Règle impérative : protection d’une partie réputée plus faible par la loi (alinéa 5)

 Régime de la nullité :

1) Nullité absolue : cf. article 5.58, alinéa 1er et article 5.61, alinéa 4, du Code civil

2) Nullité relative : cf. article 5.58, alinéa 2 et article 5.61, alinéa 2, du Code civil
3) Innovation majeure du Code civil (article 5.59, alinéa 3, du Code civil)

• Annulation par notification : « A moins que le contrat soit constaté par


un acte authentique, l’annulation résulte également d’une notification
écrite que toute personne habilitée à se prévaloir de la nullité adresse, à
ses risques et périls, aux parties au contrat »

Contrôle a
posteriori du juge :

1) Inefficacité de
l’annulation

Annulation judiciaire Annulation par notification 2) Sanction en


(lettre) cas de faute
= reste le principe (exemple : la
= possible depuis le 1er résolution)
janvier 2023
Numéros de la leçon à ne pas étudier : il faut tout connaitre
Merci

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