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Chapitre 4

LES CRISTAUX IONIQUES

I- Introduction

Dans les cristaux ioniques, les analyses structurales révèlent un empilement triplement périodique
d’anions et de cations. Ces cristaux ioniques sont formés à partir :

- des éléments situés dans la partie gauche de la classification (les alcalins, les alcalinoterreux
mais aussi les éléments du bloc d) qui ont une faible électronégativité et sont réducteurs
- et des éléments situés dans les colonnes situées très à droite de la classification (gaz rares
exclus), qui possèdent eux une électronégativité élevée.

Une liaison ionique entre deux ions de signe opposé résulte de leur attraction électrostatique mutuelle.
La liaison ionique est forte mais n’est pas dirigée.

Les cristaux ioniques sont décrits comme un arrangement infini d’ions qui sont empiler de façon à
maximiser les interactions attractives entre ions de signe opposé et à minimiser les interactions
répulsives entre ions de même signe.

Signalons aussi que la distance entre deux ions est accessible expérimentalement et qu’elle
permet de connaître la somme des rayons ioniques de l’anion et du cation. La plupart des
tables utilisées prennent la valeur de référence R (O2-) = 140 pm pour l’ion oxyde

Dans la suite de cours, nous décrirons le cristal ionique parfait, cristal résultant d’un empilement
d’ions assimilés à des sphères dures, de rayons ioniques donnés, indéformables et ne pouvant
s’interpénétrer. Ce modèle du cristal ionique parfait rend plus ou bien compte du cristal réel, dans
lequel une liaison purement ionique n’existe pas : la liaison ionique a toujours un certain caractère de
covalence (liaison iono-covalente).

Dans la suite, nous décrivons plusieurs structures cristallines très courantes : il convient de
bien les connaître. Les ions sont assimilés à des sphères dures et nous décrivons ces structures sous «
l’angle spatial » uniquement : comment sont disposés les ions, cations et anions

II- La liaison ionique dans les cristaux ioniques.

Exemples : NaCl(s), FeO(s), ZnS(s)...

Un cristal ionique est formé par l’assemblage tri périodique d’ions positifs et négatifs. Le motif
cristallin est électriquement neutre. L’existence des ions dans le cristal a été prouvée par mesure des
intensités de rayons X diffractés par un cristal, puis confirmée à partir de mesures de RMN.

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Ainsi, dans le réseau de chlorure de sodium NaCl, les atomes neutres de sodium à 11
électrons et de chlore à 17 électrons n’existent pas. Ils sont remplacés par des particules à 10
et 18 électrons, correspondant aux ions Na+ et Cl-.
1- Nature des liaisons et énergie de cohésion.
La liaison ionique résulte donc de l’attraction électrostatique entre ions de charges
opposées, qui ont généralement acquis la structure du gaz noble le plus proche, et de
répulsions à courte distance.
Dans un cristal ionique, nous devons donc considérer d’une part les interactions
électrostatiques entre les ions constitutifs du réseau (attractives entre ions de signes contraires,
répulsives entre ions de même signe), et, d’autre part, une interaction répulsive entre plus
proches voisins traduisant la non-interpénétration des nuages électroniques. L’édifice stable
correspond au minimum de l’énergie du système.
Les forces sont donc électrostatiques, fortes (environ 100 kJ.mol-1), non directionnelles.
La symétrie du nuage électronique s’avère le plus souvent sphérique, de sorte que le cristal
ionique peut être considéré comme un assemblage de sphères inégales, électriquement
chargées.
On définit le rayon ionique comme étant le rayon apparent d’un atome E ayant subi une
modification de son cortège électronique. Bien que la liaison ionique pure soit physiquement
impossible, une évaluation des rayons ioniques a pu être réalisée dans quelques cas
favorables, comme celui de NaCl, à partir des courbes d’isodensité électronique.
D’une manière générale, on identifie la distance dCA entre les noyaux des deux ions Cp + et
Aq- à la somme de leurs rayons ioniques, de sorte que si l’un est connu, l’autre le devient.
L’ensemble le plus complet de rayons ioniques a été compilé par Shannon et Prewitt à partir
de plus de 1000 études structurales. Leurs tables sont fondées sur les valeurs attribuées aux
ions oxyde O2- et fluorure F- : le rayon de l’ion oxyde O2- est fixé à 126 pm (convention
adoptée dans les tables couramment utilisées) et le rayon de l’ion oxyde F- est fixé à 119 pm.
Cette additivité des rayons ioniques n’est toutefois qu’approchée, car ces grandeurs sont
sensibles à l’environnement.
Les particules chargées sont ici des ions (cations et anions). Leurs masses et leurs volumes,
très supérieurs à ceux des électrons (l’ion chlorure a ainsi une masse environ 65 000 fois
supérieure à celle d’un électron) les rendent difficilement mobiles au sein d’un réseau
cristallin rigide. A l’état solide, ces composés s’avèrent de très mauvais conducteurs de
l’électricité, alors qu’ils constituent de bons conducteurs à l’état fondu ou en solution
(électrolytes).

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Exemple : NaCl, Tfus = 801 °C (élevée), soluble dans l’eau, isolant à l’état solide.
2- Ecart au caractère ionique : évolution vers une liaison covalente.
a- La liaison ionique
Dans la description d’un cristal par un modèle ionique, nous supposons que les entités
constitutives du réseau sont des ions, autrement dit que nous pouvons isoler autour de chaque
noyau un nuage électronique qui lui est propre, dont la symétrie est sensiblement sphérique.
On peut ici considérer deux sphères, l’une équivalente à l’ion chlorure Cl-, l’autre à l’ion
sodium Na+, juxtaposées. Dans le modèle ionique, on suppose que l’on peut attribuer à
chaque centre attracteur un nuage électronique à symétrie sphérique bien définie.
b- Pouvoir polarisant d’un ion
Un ion crée autour de lui un champ électrique qui peut déformer les nuages électroniques des
ions voisins (polarisation des ions). Le pouvoir polarisant d’un ion sera d’autant plus
important que le champ à sa périphérie sera plus grand. Il augmentera donc avec sa charge et
diminuera avec son rayon. Ainsi, les cations petits et parfois très chargés (Al3+, Fe3+) ont un
grand pouvoir polarisant. Les anions gros et peu chargés ont un pouvoir polarisant faible.
c- Polarisabilité d’un ion
La polarisabilité d’un ion traduit l’aptitude de son nuage électronique à subir une déformation
sous l’action d’un champ électrique crée par les ions voisins. Elle est d’autant plus grande que
l’ion est gros. C’est pourquoi les anions sont très polarisables, alors que les petits cations ont
une polarisabilité négligeable.
d- Ecart au caractère ionique
La déformation du nuage électronique est d’autant plus marquée que l’anion est polarisable et
que le pouvoir polarisant du cation est grand. Lorsque cette polarisation est importante, la
répartition électronique qui en résulte est analogue à celle d’une liaison covalente, et le
modèle ionique n’est plus utilisable.
Le cristal est donc d’autant plus ionique que le cation a un pouvoir polarisant faible et
que l’anion est faiblement polarisable.
Dans les cristaux ioniques, CxAy, le caractère ionique de la liaison devrait en théorie être de
100 % : il en est rarement ainsi. Dans la pratique, une liaison sera considérée comme ionique
si le pourcentage ionique ICA dépasse 50 %.
Le pourcentage ionique ICA, nombre qui mesure le caractère ionique d’une liaison C-A,
s’exprime, dans la théorie de Pauling, par une relation empirique fonction des
électronégativités des deux éléments :

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Le caractère ionique d’une liaison est donc d’autant plus marqué que la différence
d’électronégativité entre A et C est grande : la liaison ionique requiert l’association d’un
élément faiblement électronégatif (situé en bas et à gauche de la classification
périodique) avec un élément fortement électronégatif (placé en haut et à droite de celle-
ci). Ces deux conditions expliquent pourquoi les halogénures alcalins constituent des cristaux
ioniques stables, les énergies de cohésion variant de – 400 à – 900 kJ.mol-1 environ.
Par contre, le sulfure de zinc possède un caractère de liaison covalente marquée (fort pouvoir
polarisant de Zn2+, grande polarisabilité de S2-). Mais les structures correspondant à des
assemblages de cations peu polarisants (K+, Rb+, Cs+) et d’anions peu polarisables (F-, Cl-)
sont très bien décrites par le modèle ionique.
Ainsi, le modèle covalent et le modèle ionique d’une liaison correspondent à deux limites de
la répartition électronique entre les centres attracteurs. Cette évolution vers la covalence pour
la liaison entre ions (et donc vers un cristal moléculaire) se traduit sur les propriétés
physicochimiques :
Lorsque le caractère ionique du cristal diminue, on observe une forte diminution des
températures de fusion
Les températures de fusion diminuent aussi quand la charge du cation augmente
De même la solubilité dans l’eau diminue fortement : tous les sels peu solubles dans l’eau
présentent un caractère covalent notable (ex : les halogénures d’argent).

III- Les cristaux ioniques de type MX.

Dans ces composés, la maille élémentaire contient le même nombre de cations que
d’anions. La différence vient des modes de réseaux dans lesquels ils cristallisent.

1- Composé de coordinence 8-8 (type CsCl).

- description du réseau
Dans la structure, chaque ion est entouré de huit ions de charge opposée placés aux
sommets d’un cube d’où la coordinence 8-8. En considérant le cube anionique, le chlore au
1
sommet du cube est partagé par 8 cubes ; il compte donc pour pour chaque cube.
8

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Comme il y a 8 sommets, on a donc 1 chlore par maille élémentaire. Le cation est au centre
du cube donc appartient totalement à ce cube. Il y a 1 césium par maille.
La formule du composé est bien CsCl.

Figure 12 : Structure d’un composé ionique type CsCl


- Conditions de stabilité
La stabilité de la structure est définie par :
- la non empiétement des anions à distance minimale qui se traduit par :
2 ranion  a (a arête du cube) (1)
- le contact entre le cation et l’anion qui se traduit par :
2( ranion  rcation ) = a 3 (2)
rcation
avec rcation < ranion soit < 1 (3)
ranion
De la relation (2) on tire :
2(rcation  ranion )
a=
3
La substitution de la valeur de a dans la relation (1) donne :
r r rcation
ranion  cation anion soit ranion ( 3  1)  rcation soit 0,732 
3 ranion
En combinant cette dernière relation avec la relation (3), on obtient,
rcation
0,732  <1
ranion
C’est la condition de stabilité dans les composés de coordinence 8-8. Ainsi tout composé
rcation
ionique dont le rapport des rayons ioniques ( ) est compris entre 0,732 et 1 cristallise
ranion
dans la structure type CsCl.

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Rayons ioniques : r{Cl-}= = 181 pm ;r{ Cs+}= = 169 pm
La masse molaire est du chlorure de césium est de : M = 168,36 g.mol-1

2- Composés de coordinence 6 - 6 (type NaCl).

- Description du réseau
Les anions ou les cations décrivent une structure cubique faces centrées (CFC) (Figure 14).
Nous avons :
- 1 anion à chaque sommet soit au total 1 anion par maille
-1 anion au centre de chaque face. Nous avons 6 faces, chaque face étant
commun à 2 cubes, l’anion compte pour moitié soit 3 anions par maille
Le total général des anions est de 4 par maille.
Les cations ou l’anion occupent les milieux des arêtes et le centre du cube. Chaque arête
1
est commun à 4 cubes ; chaque cation situé sur l’arête participe pour à la maille comme
4
nous avons 12 arêtes il y a donc 3 cations par maille ; si on ajoute le cation du centre du
cube, on a un total général de 4 cations par maille.
La formule du composé est donc NaCl.
Dans cette structure, chaque ion est entouré de six ions de signes opposés placés aux
sommets d’un octaèdre d’où la coordinence 6-6

Figure 13: Structure d’un composé ionique type NaCl

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- Condition de stabilité.
- Le non empiétement des anions à distance minimale :
a 2
2ranion  (1)
2
- Le contact entre anion et cation :
a
(ranion  rcation ) = (2)
2
rcation
avec rcation  ranion soit < 1 (3)
ranion
a a
La relation (2) donne en fonction de ranion et rcation , en remplaçant par sa
2 2
valeur dans (1), on a :
2ranion  2(rcation  ranion ) soit
2 r rcation
 cation  1 soit ( 2  1) 
2 ranion ranion
d’où l’intervalle rcation
0.414   0,732
ranion
C’est la condition de stabilité des composés de coordinence 6-6. Tout composé ionique
dont le rapport des rayons ioniques est dans cet intervalle cristallise dans le réseau type
NaCl

Rayons ioniques : r{Cl-}= = 181 pm ; r{Na+}= = 97 pm


La masse molaire est du chlorure de césium est de : M = 58,5 g.mol-1

3 Composés de coordinence 4-4 (type blende ZnS).

- Description du réseau.
Dans le réseau type blende, on un empilement cubique faces centrées de l’anion soit 4
anions par maille élémentaire. Les cations occupent 1 sur 2 des centres des 8 petits cubes
a
d’arêtes a’ = a étant l’arête de la maille élémentaire soit un total de 4 cations par maille
2
d’où la formule ZnS.
Les ions sont dans des sites tétraédriques définis par les ions de signes opposés
d’où la coordinence 4-4.

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Figure 14 : Structure d’un composé ionique type Blende
- Condition de stabilité
Non empiétement :
a 2
2ranions  (1)
2
Contact anion - cation :
a 3
(rcation  ranion )  (2)
4
de la relation (2) on tire
a 2(rcation  ranion )

2 3
a
en remplaçant par sa valeur dans (1) on a :
2
2 2 (rcation  ranion )
2ranion  soit 3ranion  2 (rcation  ranion ) soit
3
3  2 rcation 6  2 rcation
 soit 
2 ranion 2 ranion
soit :
rcaion
0,225   0,414
ranion
C’est la condition de stabilité du réseau type blende. Le
composé ionique dont le rapport ionique est dans cet intervalle dans la structure blende.

Rayons ioniques : r{S2-}= = 184 pm, r{Zn2+}= = 74 pm


La masse molaire est du sulfure de zinc est de : M = 97,4 g.mol-1

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4 Composé de coordinence 4-4 (type Wurtzite ZnS)

On a un empilement hexagonal compact des anions les cations occupent la moitié des sites
tétraédriques définis par les anions.
La coordinence est le même que dans la structure blende de même que la condition de
stabilité.

IV-Autres types de composés ioniques

1 composé ionique MX2.


- Les fluorines type CaF2.
Les cations décrivent le réseau cubique faces centrées soit un total de 4 cations par maille. Les
a
anions occupent les centres des huit petits cubes d’arête , a étant l’arête de la maille
2
élémentaire soit un total de 8 anions par maille.
Chaque cation est entouré de 8 anions aux sommets d’un cube et chaque anion est entouré de
4 cations aux sommets d’un tétraèdre. La coordinence est : 8-4.
Exemples : CaF2, SrF2, BaF2, BaCl2, CdF2, PbO2, CeO2.....

On prend l’ion calcium pour origine ici dans la description de la structure.


Rayons ioniques : r{F-}= = 136 pm, r{Ca2+}= = 99 pm
La masse molaire est de la fluorine est de : M = 78,1 g.mol-1

- Les antifluorines
Une structure est dite antifluorine si elle correspond à l’occupation par le cation
des sites occupés par l’anion dans la fluorine. Ce sont essentiellement certains oxydes et
chalcogénures qui cristallisent dans cette structure : Li2O, Na2O, Na2S, K2S.
Nous avons également les rutiles (type TiO2) qui font partie des composés MX2.
Dans Cette structure, la coordinence est de six pour le cation qui s’entoure de 6 anions aux
sommets d’un octaèdre déformé. L’anion possède une coordinence 3.
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2 Les spinelles type AB2O4.
La structure spinelle est bâtie à partir d’un empilement cubique faces centrées des
anions (O2-) ; une maille élémentaire contient 4 oxygènes. Mais la maille dans cette
structure ne s’identifie pas à cette unité élémentaire à cause de l’occupation dans le réseau
spinelle de certains sites tétraédriques (Td ) et octaédriques (Oh). Sites occupés et vides
sont repartis selon une distribution géométrique régulière concernant 32 oxygènes
correspondant à 8 mailles élémentaires de base. Cette entité géométrique représente la
maille élémentaire du spinelle.
Dans cette maille, seuls 16 sites Oh et 8 sites Td sont occupés. Ainsi pour 32
oxygènes et afin de respecter la formule AB2O4 on aura à placer 8 atomes de A et 16
atomes de B. Il est donc commode de placer les atomes A dans les sites Td et les atomes B
dans les sites Oh. De tels spinelles sont dits normaux ou directs. C’est le cas des composés
MAl2O4 avec M = Fe, Co, Ni, Mn et Zn.
Dans certains spinelles les 8 sites tétraédriques sont occupés non pas par les
atomes A mais par 8 des 16 atomes B ; les sites octaédriques étant occupés par les 8
atomes B restant et les atomes A. Ces composés sont appelés Spinelles inverses. Il sont
représentés par la formule : B(AB)O4.
Exemples : Fe(MgFe)O4, Fe(TiFe)O4.

V- Conditions de stabilité des structures ioniques

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