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LES ENTREPRISES

I- L'organisation financière des entreprises


Une entreprise doit présenter des comptes (à l'État, aux organismes financiers...). La
comptabilité d'entreprise peut être stratégique: présenter des comptes n'est pas neutre, et
vise souvent un objectif.
La financiarisation conduit à transformer progressivement les coûts fixes et coûts variables.
D'où, à partir des 90's, des mots d'ordre tels que : "fais ce que tu sais faire", "recentre toi sur
le cœur de métier"...  réduction des tailles des entreprises, les actionnaires peuvent mieux
surveiller l'activité de l'entreprise.
Succès de la métaphore du réseau : si l'entreprise devient réticulaire, c'est qu'elle est
désormais réactive, souple, liée à son environnement, et non plus bureaucratique, verticale,
statique.

L'entreprise emprunte, aux banques ou aux marchés financiers directement : elle doit donc
présenter des comptes pour faire état de sa solidité. Elle publie alors un bilan et un compte
de résultat.
o Bilan = synthèse, décrit le patrimoine de l'entreprise. Il est établi généralement à la
fin d'une année civile, "à la fin d'un exercice". C'est le tableau de bord de l'entreprise.
Il est établi 2 fois : à l'actif et au passif.
À l'actif, on classe du moins liquide au plus liquide :
 1ère catégorie = l'actif immobilisé, biens durables de l'entreprise (brevets,
marque, fond de commerce, terrains, matériel...). Ces biens peuvent être
dévalorisés d'une année sur l'autre, et être donc provisionné (on met de
l'argent de côté en avance en prévoyant la chute de valeur)
 2ème catégorie : l'actif circulant. Ce sont des stocks qui se renouvellent durant
le cycle de production (MP, emballages, créances, valeurs mobiliaires...)
Au passif, ce sont les obligations de l'entreprise à l'égard des apporteurs de capitaux
(dettes). On les classe en fonction d'exigibilité croissante :
 Les capitaux propres : le capital social de l'entreprise. Somme intouchable 
elle ne sera réutilisable que lorsque l'entreprise sera dissoute : c'est une
garantie pour les créanciers.
 Les réserves : bénéfices non distribués.
 Les provisions : faire face à des risques (la dépréciation du capital, un défaut
de la part d'un débiteur...)
o Compte de résultat = activité de l'entreprise de l'exercice précédent. À partir de cela,
on peut tenter de mesurer les performances de l'entreprise.
 L'EBE (Excédent Brut d'Exploitation) = valeur ajoutée de l'entreprise (/!\ ce
n'est pas le CA). Intéresse les actionnaires dont les rendements dépendent en
grande partie de l'EBE.
 Capacité d'autofinancement (cash flow) = l'EBE auquel on soustrait tout ce
qui relève des charges financières. C'est l'argent qui reste, l'épargne brut.
 Taux de marge = EBE/VAB (Valeur Ajoutée Brut produite).
 Rentabilité économique = c'est le résultat (perte/bénéfices/etc.) sur l'actif
économique (= capitaux propres, emprunts). Sert à mesurer si la firme est
capable de dégager un résultat suffisant par rapport au capital qu'elle utilise.
Mesure si l'entreprise se porte bien ou pas  situation interne de l'entreprise
 Rentabilité financière = résultat net (différence entre les bénéfices et les
pertes de l'ensemble des produits et des charges des entreprises) par rapport
aux capitaux propres (= ceux qu'apportent les actionnaires). C'est le cours de
l'action. Préoccupe les actionnaires notamment. Scrutée par les marchés
financiers, car c'est le retour sur investissement de l'action.

Il n'y a pas de neutralité du financement de l'entreprise contrairement à ce que dit la théorie


économique. Le financement bancaire et le financement par les marchés financiers ne
conduisent pas forcément l'entreprise à retenir les mêmes paramètres.
Avec le capitalisme financier actionnarial, la rentabilité financière prévaut.

II- Qu'est-ce qu'une firme ?


Longtemps, la firme s'est réduit à une boite noire. C'est comme cela que la théorie
économique envisageait le capitalisme. Dans cette vision là, une firme est une combinaison
de facteurs de production (travail et capital) en partant du principe que les facteurs sont
substituables (si le coût du travail augmente, on remplace le travail par du capital). La firme
est donc un problème technique : on arbitre entre des facteurs de production à disposition.
La firme est rationnelle, elle choisit la solution optimale qui maximise le profit. Ce qui est
intéressant, c'est la coordination par le marché, l'optimum, l'équilibre.
La théorie économique fait progressivement apparaître des problèmes. Par exemple, la
concurrence peut être imparfaite : nombre d'acteurs plus faible que ne le dit la CPP,
barrières à l'entrée... La firme finit par avoir une stratégie : elle vise à acquérir un pouvoir de
marché (grossir par la taille, qualité du produit, innovation...).
Chamberlain (économiste américain) a insisté dans les 30's sur la différenciation des produits
(une entreprise a intérêt à faire en sorte que la courbe de demande se déplace vers le
monopole : on vend moins mais on vend plus cher. Ex : ceux qui achètent le dernier iPhone).

Rationalité dont font preuve les représentants de l'entreprise ?


Herbert Simon : auteur de la distinction célèbre entre rationalité limitée et rationalité
procédurale. Il abandonne l'idée de l'entreprise comme agent qui atteint toujours la
situation optimale.
o Rationalité limitée = les agents sont rationnels à partir des informations dont ils
disposent. Si l'agent ne possède pas des informations utiles, la décision qu'il prend à
l'instant t n'est pas forcément la bonne (mais pas parce qu'il n'est pas rationnel).
o Rationalité procédurale = l'agent est rationnel en fonction des méthodes qu'il
emploie (il respecte les procédures).

Ronald Coase (économiste de Chicago, prix Nobel) : 1937, La nature de la firme. Il est néo-
classique : il adore la CPP (Concurrence Pure et Parfaite), l'acteur rationnel, l'étude de
marché. Il essaye de penser la firme. Pour lui, la firme est une forme de coordination : les
agents se coordonnent par la firme. Le point de départ est donc de dire la firme est une
forme de coordination alternative au marché : soit on décide d'acheter quelque chose (un
bien, un service) et donc on recourt au marché, soit on décide de le fabriquer soit même (on
crée notre boite). Pour Coase, il existe des coûts de transaction (= coût d'accès au marché) et
des coûts d'organisation (= coût pour faire fonctionner la firme). Si les coûts de transaction
sont supérieurs aux coûts d'organisation, il vaut mieux créer la firme. Dans le cas contraire, il
vaut mieux passer par le marché.

Olivier Williamson : prix Nobel d'économie 2009  "la rationalité est limitée". Comme je ne
sais pas précisément à l'avance quels sont les événements qui vont se produire, j'ai intérêt à
pouvoir m'appuyer sur une organisation. L'entreprise est alors un nœud de contrats.
L'hypothèse de Williamson (conforme au néo-libéralisme) est de dire que l'agent
économique est opportuniste. Autrement dit, quand je signe un contrat, je réfléchis à
comment ne pas respecter mes obligations...Le contrat est censé délimité les avenirs
possibles : le contrat est donc censé limité les incertitudes. Mais cela ne garantit en rien
l'action qui sera menée.
Il donne l'exemple du hold-up : il dit que dans l'entreprise, il y a plein d'actifs. Par exemple
un trader peut quitter sa boite avec son carnet d'adresse (les gens lui font confiance à lui,
pas à l'entreprise pour laquelle il travaille). L'actif est alors incorporel, et appropriable.
L'entreprise doit donc faire attention au fait que ses salariés peuvent faire un hold-up, ie
détourner dans leur propre intérêt les ressources de l'entreprise.

Une des théories majeures de la micro-économie = théorie de l'agence. Un contrat relie une
personne (= un principal, cela peut être une entreprise) à un autre agent économique qui est
censé accomplir en son nom une tâche. Nomination d'un PDG rémunéré en partie sur les
résultats de l'entreprise  ne touche sa rémunération que si les objectifs sont atteints. Mais
il doit y avoir des coûts d'agence, ie surveiller cet agent, l'obliger à rendre des comptes, etc.

Entrepreneur :
Franck Knight : Risques, incertitudes et profits, 1921. La distinction de Knight porte sur le
risque et l'incertitude. Le risque, c'est ce qui est probabilisable (espérance de vie par ex). On
peut donc calculer le risque. L'incertitude, c'est l'impossibilité de calculer.
L'entrepreneur dit Knight est celui qui assume le risque.
La rémunération de l'entrepreneur ne dépend donc pas de sa productivité marginale, de son
travail, mais de sa prise de risque.
Joseph Schumpeter ("destruction créatrice") : économiste autrichien. Il a publié en 1912 La
théorie de l'évolution économique, et en 1942 son testament : Capitalisme, socialisme et
démocratie. Schumpeter ne connaît que les déséquilibres, le temps long, les ruptures. C'est
est un adversaire de Marx. L'entrepreneur innovateur chez Schumpeter est celui qui
bouleverse l'ordre économique : il trouve quelque chose que les autres n'avaient pas trouvé
avant lui (un procédé, un produit). Après lui, les autres produits sont déclassés. C'est donc un
agent de progrès. Le capitalisme ne peut se penser sans entrepreneur innovateur. C'est un
héro, car en face de lui il y a plein d'obstacles (les entrepreneurs routiniers, les
consommateurs, ceux qui n'ont pas envie que ça change). Il est pessimiste : il annonce que le
capitalisme a de grandes chances de se casser la gueule (en abandonnant l'innovation).
John Kennett Galbraith : 1967, Le nouvel État industriel. Il parle de "technostructure". Le
pouvoir appartient désormais au manager. L'objectif de ces grandes entreprises industrielles
est "la filière inversée". C'est la pub et le marketing qui doivent influencer le goût des
consommateurs. On rend ses produits désirables, il faut s'assurer un minimum de ventes
nécessaires pour que le produit soit rentable. Les dirigeants des grandes firmes se
comportent alors comme des bureaucrates. La grande entreprise capitaliste peut désormais
être gérée comme une entreprise planifiée. Elle ne vise alors certainement la prise de
risque, bien au contraire (elle veut conserver des parts de marché)...

À partir de la fin des 80's aux USA, débats très importants à l'intérieur même du capitalisme,
de la direction des firmes. L'idée qui prédomine désormais est que les actionnaires ont
complètement été évacués par les managers. On théorise alors la corporate governance : la
vision même de l'entreprise capitaliste change. Elle doit rendre des comptes à son
actionnaire. Les dirigeants sont responsables devant les actionnaires  on est pris dans des
logiques d'incitation.
On passe de la stakeholder value à la shareholder value (la valeur actionnariale devient la
référence).

À partir des 90's, libre circulation des capitaux  favorise les actionnaires (le capital est
liquide). Les coûts fixes doivent devenir des coûts variables (les salariés sont embauchés avec
des contrats à durée limitée, missions ponctuelles, on n'achète pas mais on loue les
bâtiments, downsizing = réduction de la taille...).
Si le dirigeant ne satisfait pas ses objectifs, il dégage...

Neil Fligstein : spécialiste des structures capitalistes et des entreprises. À partir des 80's, il y a
des évolutions technologiques qui ont rendu possible le passage à la corporate governance :
révolution informatique (favorise l'horizontalité plutôt que la verticalité, a permis la
suppression de plein de postes). L'évolution technologique a permis de réduire les coûts du
travail, et cela affaiblit la valeur du travail par rapport au capital. Cela accroit
mécaniquement la marge. Il analyse les taux de profits secteur par secteur, et réalise que les
profits des entreprises américaines n'ont pas augmenté car la part affectée aux actionnaires
a augmenté (l'actionnaire est redevenu le boss).
On a donc un changement des rapports de force entre acteurs, et évidemment le pouvoir de
la finance, qui est le pouvoir pris par les investisseurs, est renforcé.
Les dirigeants sont au service des actionnaires, qui est le principal agent.

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