Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
LA NOTION DE PUISSANCE DANS SON RAPPORT À LA CAUSA SUI CHEZ LES STOÏCIENS ET
DANS LA PHILOSOPHIE DE SPINOZA
Author(s): Jean-Marc NARBONNE
Source: Archives de Philosophie, Vol. 58, No. 1 (JANVIER-MARS 1995), pp. 35-53
Published by: Centre Sèvres – Facultés jésuites de Paris
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/43037233
Accessed: 04-11-2016 17:58 UTC
JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted
digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about
JSTOR, please contact support@jstor.org.
Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at
http://about.jstor.org/terms
Centre Sèvres – Facultés jésuites de Paris is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend
access to Archives de Philosophie
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
Archives de Philosophie 58, 1995, 35-53
LA NOTION DE PUISSANCE
DANS SON RAPPORT À LA CAUSA SUI
CHEZ LES STOÏCIENS
ET DANS LA PHILOSOPHIE DE SPINOZA1
1. L'étude que l'on va lire n'est pas à proprement parler une suite , mais dans u
taine mesure un complément à l'article « Plotin, Descartes et la notion de causa sui
dans cette même revue il y a peu de temps (tome 56, cahier 2, 1993, p. 177-195
avons senti le besoin de poursuivre la réflexion amorcée dans l'essai précédent
élargir la perspective. En soi indépendantes, les deux études s'éclairent toutefo
l'autre et mettent diversement en relief, on pourra le constater, les caractères d'une
matique néanmoins commune.
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
36 J. -M. NARBONNE
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 37
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
38 J. -M. NARBONNE
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 39
cause des choses »14 en tant que cause non pas tra
nente »15, doctrine que Zac interprète à tort com
noziste16.
Par ailleurs, le monde est conçu dans l'un et l'autre système21 comme
un « individu », plus exactement comme un système d'individus for-
mant une totalité organique. Dans le stoïcisme en effet, chaque chose a
son caractère propre, et néanmoins, « toutes choses sont liées entre
elles, et d'un nœud sacré (...). Tous les êtres sont coordonnés ensemble,
tous concourent à l'harmonie du même monde ; il n'y a qu'un seul
monde, qui comprend tout, un seul Dieu, qui est dans tout »22. Or ce
Dieu-Monde est lui même un individu, un « vivant immortel »23 qui
embrasse tout, comme chez Spinoza : « la Nature entière est un individu
dont les parties, c'est-à-dire tous les corps, varient d'une infinité de
manières, sans aucun changement de l'Individu total »24.
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
40 J. -M. NARBONNE
25. Ibid., III, pr. vi. Notons tout de suite que chez Sp
liberté particulière de l'agent, puisqu'il est comma
« L'effort par lequel chaque chose s'efforce de pe
dehors de l'essence actuelle de cette chose » (ibid., I
p. 183 : « C'est un problème de savoir comment Spi
pective qui est la sienne, de l'effort qu'il fait lui-mêm
de parvenir à la sagesse. Cet effort - il faut sans dou
dé, selon lui, par la richesse et la complexité de notre
26. A.-J. Voelke, L'idée de volonté dans le stoïcism
27. Cf. Voelke, ibid., p. 51 et 66.
28. Cicerón, De finibus, III, 5, 16 : « [Les stoïciens]
où un animal est né... il est ordonné à lui-même et a
sa nature et tout ce qui est capable de la conserver,
de tout ce qui pourrait concourir à sa destruction (
de soi-même a été le premier principe » ; 6, 20 : «
dans sa constitution naturelle, puis de se tenir aux ch
de fuir celles qui lui sont contraires » ; 7, 23 : « Com
départ les premières tendances de la nature, la sage
ces premières tendances » (trad. Brun).
29. Op. cit., IV, pr. xxn, corollaire.
30. Gesammelte Schriften, Bd. II : Weltanschauung
Renaissance und Reformation, Göttigen et Stuttgar
liche Ethik Spinozas, das Ziel seines Werkes auf die S
chen Uebereinstimmungen im einzelnen, dass die B
gelesenen, die antike Tradition verarbeitenden nieder
Z.B. Lipsius de constantia anzunehmen unvermeidlich
31. Pour les stoïciens, « ce qui est sans cause et c
ment pas » (S.V.F., II, 973), le hasard lui-même n'ét
humaine (S.V. F., II, 965-972). Comparer Éthique, I,
cause maintenant une chose n'est dite contingen
connaissance en nous ».
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 41
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
42 J. -M. NARBONNE
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 43
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
44 J. -M. NARBONNE
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 45
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
46 J. -M. NARBONNE
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 47
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
48 J. -M. NARBONNE
58. Cf. V uillemin, op. cit., p. 387 : « Percussions, oscillations, ondes fournissent au
nominalisme ses modèles de mouvement. L'adéquation dans l'expression de l'universel
ou sa dissolution dans la circonstance ont pour conséquence d'exclure du mouvement la
présence d'une puissance actualisée : le mouvement est en acte ». On a vu qu'on pouvait
parler dans le stoïcisme d'un mouvement-qualité, c'est-à-dire de la qualité conçue comme
un rapport de mouvements. Spinoza, il est intéressant de le remarquer, ne pense pas autre-
ment, pour qui « chaque chose corporelle n'est rien d'autre qu'une quantité déterminée de
mouvement et de repos » ( Court traité, II, Appendice, Ap. T.l, p. 165).
59. Porphyre et Victorinus , tome I, Paris, 1968, p. 227 sq.
60. Ennèade , VI, 8 [39], 20, 9-11.
61. Ethique , II, pr. m, scolie : « la puissance de Dieu n'est rien d'autre que l'essence
active de Dieu ».
62. Ibid., I, pr. xxxiv : « La puissance de Dieu est son essence même ».
63. Ibid., I, pr. xi, scolie : « Dieu a de lui-même une puissance absolument infinie
d'exister et, par suite, il existe absolument ».
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 49
Nous avons indiqué plus haut pourquoi, stricto sensu , la causa sui
n'existait pas, pourquoi elle était « improprement nommée » causa sui
et se réduisait toujours, en définitive, à une transformado sui.
Dans la confrontation qu'il mène entre la métaphysique de Descartes
et la compréhension « onto-théo-logique » de la métaphysique diagnos-
tiquée par Heidegger comme la figure essentielle de toute métaphy-
sique, J.-L. Marion cite ce dernier qui met en avant, comme Descartes
lui-même, l'idée d'un Dieu auto-causateur : « L'être de l'étant, au sens
du fondement ( Grund) ne peut fondamentalement se représenter que
comme causa sui. Ainsi est appelé le concept métaphysique de Dieu ».
Autrement dit, « ... la conciliation ( Austrag ) montre et dispense l'être
comme fondement qui apporte et présente, lequel fondement requiert
lui-même une fondation à sa mesure à partir de ce qui se fonde en lui, à
savoir une causation par la plus originelle des choses. Cette chose est la
cause comme causa sui. Ainsi se formule le nom approprié pour le nom
de Dieu dans la philosophie »65.
Que le Dieu de la philosophie soit le Dieu causa sui , voilà ce qui
étonne, au regard justement des traditions philosophique et théologique
qui, sinon continûment, du moins prioritairement, ont défendu la thèse
inverse de l'a-causalité divine (que l'on songe un instant à Platon, Aris-
tote, saint Augustin, saint Thomas, etc.). Heidegger, comme nous
64. Op. cit., p. 363 : « Plotin paraît bien être le premier penseur qui ait introduit cette
conception [Dieu comme force et comme puissance infinie] dans la philosophie
grecque ». S'il méconnaît l'empreinte stoïcienne de cette puissance divine plotinienne,
Brochard aperçoit cependant tout de suite ce que celle-ci comporte d'anti-
aristotélicien : « A la vérité, Plotin se flatte de rester fidèle à l'esprit grec et de continuer
la tradition des Platon et des Aristote ; mais malgré les efforts qu'il fait pour conserver la
terminologie de ses devanciers, il est aisé de voir qu'il se fait illusion à lui-même. [...] le
mot puissance ne désigne plus seulement chez lui comme chez Aristote une simple possi-
bilité, mais au sens positif une force active, une énergie toujours agissante. [...] le mot par
lequel il la [5C. sa cause première, efficiente et antécédente] désigne le plus souvent est
celui d'énergie ou d'acte, et ces mots n'ont plus pour lui le sens qu'ils avaient dans la phi-
losophie ď Aristote » (p. 363-364).
65. Heidegger, Identität und Differenz, Pfülligen, 1957, p. 70 ; trad, franç. in Ques-
tions I, Gallimard, Paris, 1968, p. 306. Cf. J.-L. Marion, Sur le prisme métaphysique de
Descartes , PUF, Paris, 1986, p. 95-96, dont nous reprenons la traduction.
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
50 J. -M. NARBONNE
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 51
74. Casper, op. cit., p. 325-326 : « Stellt die Aufgipfelung der idee der causa sui zur
Idee des sich selbst im All produzierenden Geistes nicht im Grunde die höchste Tyrannie
dar ? Und ist der Gott, der sich so als die Notwendigkeit der sich selbst vermittelnden
absoluten Person zeigt, nicht gerade der Vernichter jedes wirklichen endlichen Selbst-
seins und seiner Freiheit ? »
75. Ibid., p. 328 : « Aber ein solches Fassen Gottes aus der Vollmacht des Denkens,
wie es unter dem Titel der causa sui verbirgt, bedeutet, das zeigt nicht nur die Geschichte,
in Wirklichkeit die Eliminierung Gottes ».
76. Cf. Manfred Frank, Der kommende Gott , Teil I et II, Frankfurt, Suhrkamp, 1982 et
1988.
77. Casper, op. cit., p. 328.
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
52 J. -M. NARBONNE
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms
PUISSANCE ET CAUSA SUI 53
81. Comparer Brochard, op. cit., p. 354 : « Les stoïciens soutenaient aussi que Dieu et
le monde ne font qu'un, et ils allaient même bien plus loin que Spinoza, puisqu'ils décla-
raient que Dieu et le monde sont un corps visible et tangible ; cette théorie ne les empê-
chait pas d'affirmer que Dieu ou la cause immanente du monde, prend conscience de lui-
même, qu'il se distingue de l'univers en un certain sens .[...] Il semble bien que Spinoza
se soit arrêté à une conception analogue : bien qu'identique au monde, Dieu se distingue
de lui comme la cause de ses effets et la substance de ses modes. Il prend conscience de
lui. Il y a une différence entre la nature naturante et la nature naturée ». C'est justement en
vertu de cette différence qu'on peut encore parler, comme le remarque V. Delbos (Le Spi-
nozisme, , Vrin, Paris, 1993), d'un résidu de finalisme dans la doctrine spinoziste : « Spino-
za rejette expressément les causes finales ; mais il explique l'univers par une essence
suprême et par des essences particulières. Or cette notion d'essence, en supposant l'anté-
riorité d'une nature intelligible par rapport à ce qui doit se manifester et se produire, n'est-
elle pas le substitut de l'idée d'une préordination par des fins ? » (p. 175).
This content downloaded from 192.122.237.41 on Fri, 04 Nov 2016 17:58:43 UTC
All use subject to http://about.jstor.org/terms