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Management Stratégique

2022 – 2023
29 avril 2023
Code cours : G1H02F (03 & 04) & 5A1B02 (01 & 02)
Pr. D. Golsorkhi

PARTIEL DE MANAGEMENT STRATÉGIQUE (Sur 20


points)
Durée : 5h

Questions ouvertes (6 points) [En utilisant votre cours, les textes lus/les livres lus et vos réflexions
personnelles, faire deux ‘mini’ dissertations analytiques. Attention, si vous mettez en avant juste
des cas empiriques, vous serez HS. Il s’agit bien de questions de réflexion nécessitant un
développement conceptuel et empirique conjointement. Attention également à l’auto-plagiat pour
les étudiant(e)s qui sortent leurs essais ou des morceaux déjà rédigés. Cette pratique sera
considérée comme auto-plagiat et aboutira à l’invalidation de votre partiel (note de ZERO) au
minimum, si ce n’est d’autres sanctions complémentaires.

1- A l’aune de l’extinction (changement climatique et désastres écologiques), quelle(s) stratégie(s) pour


les entreprises ? (3 points)

Le contexte actuel est marqué par des enjeux environnementaux majeurs tel que l’extinction de
nombreuses espèces, le changement climatique et les désastres écologiques. Ces défis
représentent des menaces pour l’équilibre de notre planète et pour la survie de l’humanité à
long terme. Dans ce contexte, les entreprises ont un rôle crucial à jouer pour faire face à ces
défis. L’objectif est donc d’identifier les stratégies les plus efficaces pour que les entreprises
puissent participer à la transition écologique et s’engager dans une démarche de développement
durable. Cette démarche répond aussi à un besoin des entreprises de diversifier leurs
portefeuilles d’activités pour rester compétitives sur le long terme.

Les stratégies déduites et construites sont essentielles pour les entreprises qui souhaitent
intégrer la durabilité dans leur stratégie globale. Parmi ces stratégies, l’économie circulaire est
devenue de plus en plus populaire ces dernières années. Elle repose sur la réutilisation des
matériaux et des produits existants plutôt que sur leur élimination. Elle peut prendre plusieurs
formes, comme la location, la répartition, la réutilisation ou le recyclage des produits (Ikea,
Boulanger…). L’énergie renouvelable est également une stratégie déduite et construite
populaire, car elle permet aux entreprises de réduite leur empreinte carbone en utilisant des
sources d’énergie propres telles que l’énergie solaire, l’énergie éolienne ou la biomasse. Enfin,
l’approvisionnement responsable est une stratégie qui permet aux entreprises de travailler
avec des fournisseurs qui respectent les normes environnementales et sociales, en évitant les
matières premières extraites de matière non durable ou l’exploitation des travailleurs (TipToe,
etc.). Cette approche favorise les chaines d’approvisionnement durables et la création de valeur
partagée entre les partie s prenantes de l’entreprises

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En adoptant ces stratégies déduites et construites, les entreprises peuvent réduite leur
impact environnemental tout en créant de la valeur pour leurs clients et leurs actionnaires.

De plus, ces stratégies peuvent également contribuer à renforcer leur avantage


concurrentiel et leur réputation de marché.

En conclusion, intégrer la durabilité dans la stratégie de l’entreprise peut être bénéfique pour
toutes les parties prenantes et contribuer à la construction d’un avenir plus durable.
2- L’erreur stratégique : mourir ou rebondir ? (3 points)

Une erreur stratégique peut avoir des conséquences désastreuses sur une entreprise, notamment
en ce qui concerne son positionnement concurrentiel et sa survie à long terme. En effet, une
mauvaise décision stratégique peut entraîner une perte de parts de marché, un déclin de la
rentabilité et une baisse de la réputation de l'entreprise.

L'histoire de Nokia est un exemple frappant de l'impact d'une erreur stratégique sur une
entreprise. En 2007, Nokia était la marque la plus connue et la plus vendue dans le monde de
la téléphonie mobile. Cependant, malgré sa position de leader sur le marché, la société
finlandaise a commis l'erreur de ne pas anticiper l'importance croissante des smartphones et de
la connectivité Internet. Pendant que ses concurrents se concentraient sur l'innovation et la
différenciation de leurs produits, Nokia a continué à produire des téléphones portables
traditionnels, ignorants les nouveaux besoins des consommateurs. Cette erreur stratégique a
rapidement conduit à une chute de la part de marché de Nokia et à une perte de confiance des
consommateurs envers la marque. En fin de compte, Nokia a perdu la bataille du smartphone
et a été contraint de vendre sa division mobile à Microsoft. Cette histoire souligne l'importance
pour les entreprises de rester à l'écoute de l'évolution du marché et d'adopter une stratégie de
rupture pour rester compétitifs et durables à long terme.

L'erreur stratégique peut également affecter la chaine de valeur de l'entreprise, c'est-à-


dire l'ensemble des activités impliquées dans la création et la distribution de ses produits ou
services. Si une erreur stratégique est commise dans l'un des maillons de la chaine de valeur,
cela peut avoir des conséquences sur la qualité des produits, les coûts de production, la
logistique ou la communication de l'entreprise.
De plus, une erreur stratégique peut également mener à perte de part de marché et l’entreprise
peut être évincée par la concurrence.

Mais une erreur stratégique majeur entraine-t-elle l’arrêt de l’activité d’une entreprise?
Pas forcément.

Un exemple intéressant est celui de Lego. L’entreprise a connu une erreur stratégique dans les
années 2000 en se diversifiant dans des activités qui n'étaient pas en phase avec son expertise.
La société avait investi dans des parcs à thème et des jeux vidéo qui n'avaient pas rencontré le
succès escompté. En conséquence, Lego avait subi des pertes importantes et avait presque fait
faillite. Cependant, Lego a réussi à se redresser en se concentrant sur son cœur de métier, la
fabrication de jouets en briques, et en lançant de nouveaux produits innovants. Ils ont également
mis l'accent sur l'expérience client et ont développé des partenariats avec des franchises
populaires telles que Star Wars et Harry Potter pour augmenter leur visibilité et leur attractivité
auprès des consommateurs. Ces stratégies ont permis à Lego de se redresser et de devenir une
entreprise rentable à nouveau.

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ll existe plusieurs stratégies que les entreprises peuvent adopter pour rebondir après une erreur
stratégique. La diversification est l'une de ces stratégies, qui implique de se lancer dans de
nouveaux secteurs d'activité afin de réduire les risques et d'augmenter les sources de revenus.
Cette stratégie est souvent utilisée par les grandes entreprises ayant une capacité financière
suffisante pour supporter les coûts de développement de nouveaux produits ou services.
Une autre stratégie pour rebondir est la réorientation stratégique, qui consiste à revoir la
stratégie actuelle de l'entreprise pour s'adapter aux nouvelles tendances du marché ou aux
besoins des consommateurs. Cette stratégie nécessite une analyse approfondie des forces et des
faiblesses de l'entreprise, ainsi qu'une compréhension de son environnement concurrentiel et
des tendances du marché (Pestel, Porter…).
La coopération avec d'autres entreprises est également une stratégie efficace pour rebondir
après une erreur stratégique. Cette stratégie implique la collaboration avec d'autres entreprises
pour développer de nouveaux produits ou services, partager les coûts de recherche et
développement, ou encore pour pénétrer de nouveaux marchés. Cette stratégie peut prendre
plusieurs formes, comme la co-création, la co-marketing, ou encore la co-vente.
Enfin, la culture d'entreprise peut jouer un rôle important dans la capacité d'une entreprise à
rebondir après une erreur stratégique. Les entreprises doivent adopter une culture d'innovation
et de prise de risque pour pouvoir expérimenter de nouvelles idées et de nouveaux modèles
d'affaires. Les entreprises doivent également favoriser une culture de collaboration et de
communication ouverte afin de mieux s'adapter aux changements du marché.

En conclusion, pour rebondir après une erreur stratégique, les entreprises doivent être capables
de s'adapter rapidement aux changements du marché, d'adopter une culture de prise de risque
et d'innovation, et de trouver des partenaires stratégiques pour développer de nouvelles
opportunités de croissance.

Etude de cas (14 points) : L’industrie du streaming vidéo : révolution ou évolution stratégique ?

N’oubliez pas, problématisez d’abord et développez un plan cohérent pour répondre à votre
problématique.

Vous êtes en entretien pour entrer comme secrétaire général(e) du cabinet du PDG du groupe Canal+.
Après deux entretiens et deux premières épreuves de connaissances, il faut faire cette 3ème épreuve. Les
candidats doivent démontrer leurs compétences analytiques et conceptuelles sous contrainte temporelle.

Vous devez donc détecter une problématique pertinente et évaluer le cas par le biais des cadres
théoriques et conceptuels les plus appropriés, mais aussi organiser au mieux votre plan (apparent)
et l’analyse apportée. Plus votre diagnostic est dense conceptuellement et analytiquement, mais
aussi cohérent et clair, plus vous aurez la chance de passer à l’étape suivante qui est un entretien avec le
directeur de la stratégie.

Attention, certaines informations peuvent être redondantes, voire contradictoires dans les articles.
A vous de faire en sorte de ne pas tomber dans le piège. Par ailleurs, l’ordre chronologique des
informations n’est pas respecté, en d’autres mots, la temporalité de la publication (cachée) des
informations n’est pas toujours respectée. Bienvenue dans le monde réel du travail stratégique !

Bonne analyse !

P.S. : DEUX PAGES MAXIMUM (format Word) POUR CHAQUE QUESTION OUVERTE ET
8 PAGES MAXIMUM (format Word) POUR LE CAS.

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Étude de cas Canal +

Bonjour et merci de m’accueillir aujourd’hui au sein de Canal +. J’ai beaucoup apprécié nos
précédents entretiens et je tiens à réaffirmer ma volonté de rejoindre Canal + en tant que
secrétaire général du cabinet du PDG afin d’apporter mon expertise à l’équipe et dynamiser les
stratégies du groupe. Canal + doit faire face à de nombreux défis pour rester compétitif sur ce
marché en constante évolution. Je suis enthousiaste à l’idée de proposer des solutions
innovantes pour aider Canal + à relever ces défis et à s’adapter aux nouvelles tendances de
consommation des médias.

Dans cette étude de cas, j’aborderais l’état du marché actuel et de ses acteurs puis je proposerais
des options stratégiques pertinentes pour aider l’entreprise à croître de la manière pérenne. Bien
sûr, il est important de nuancer la pertinence de ces options stratégiques, qui demanderont
potentiellement un travail de fond plus poussé en amont. Néanmoins je suis convaincu que
Canal + a tous les atouts pour réussir cette évolution stratégique et je suis ravi de participer à
cette réflexion.

Dans un marché en constante évolution, Canal + doit faire face à des nombreux défis pour
maintenir ses parts de marché de la télévision mais elle peut également saisir de nombreuses
opportunités pour se développer et étendre son influence. Parmi les opportunités qui se
présentent à Canal, on peut citer l’augmentation de la demande pour des contenus de qualité
(dont l’entreprise possède déjà une très bonne expertise), la croissance rapide des marchés du
streaming et la montée en puissance de nouveaux modèles d’affaires tel que l’AVoD. En outre,
le partenariat avec Apple pour intégrer les séries et films d’Apple dans MyCanal, ainsi que la
large campagne publicitaire d’affichage pour promouvoir cette offre (que l’on a pu notamment
retrouver dans les métros lyonnais), sont des signes positifs pour l’entreprise.
Cependant, Canal + doit également faire face à des défis importants, notamment la concurrence
féroce des géants du streaming tels que Netflix, Disney + ou encore Warner Bros. Qui mise sur
la richesse de son catalogue de contenus pour attirer les spectateurs sur sa plateforme (DC,
Harry Potter, etc.). La pression exercée par ces acteurs sur les prix et la qualité des contenus est
assez intense, ce qui peut rendre difficile pour Canal + de maintenir sa place sur le marché. De
plus, la mise en place de la publicité chez Netflix (à l’instar de Youtube) peut être un signal fort
pour les annonceurs et un danger potentiel pour les plateformes de Canal + qui ont pour l’instant
bâti leur modèle sur l’absence de publicité.
Enfin, la nécessité de se différencier dans un marché saturé peut pousser Canal à diversifier son
offre, tant géographiquement qu’au niveau des activités. Cette stratégie pourrait offrir de
nouvelles opportunités de croissance, mais comporte également des risques inhérents à la
gestion de multiples activités. En restant à l’écoute des tendances du marché et en mettant en
œuvre des stratégies efficaces, l’entreprise peut espérer prospérer dans les années à venir.

Dans l’industrie du streaming vidéo, on peut identifier trois segments stratégiques qui se
distinguent par leurs caractéristiques et leurs besoins. Tout d’abord, il y a les plateformes de
SVOD comme Amazon Prime Video, qui proposent un large catalogue de films et de sériees
en échange d’un abonnement mensuel. Ensuite il y a les services de TV en direct tels que Sling
TV ou Youtube TV. Et enfin il y a les services AVoD, tel que Netflix très récemment, qui se
finance par la publicité partiellement ou totalement. En ce qui concerne les options stratégiques
pour Canala, la rivalité concurrentielle est un enjeu majeur dans ce marché. Ainsi, pour faire

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face à la concurrence Canal peut opter pour différentes stratégies telles que la dissuasion en
rendant son offre plus attrayante pour les consommateurs (réduction -26 ans proposé
actuellement pour être étendu à un plus grand nombre de consommateur par exemple), la
conciliation, la coopération en cherchant à s’associer avec des concurrents (comme l’on fait
M6, TF1, etc. avec Salto) pour proposer une offre plus complète. La diversification est une
autre option stratégique que Canal a pu mettre en place et pourrait continuer à développer. Le
partenariat historique avec Apple pour intégrer les séries et films d’AppleTV+ dans MyCanal
est très intéressant puisqu’il offre la possibilité de diversifier le catalogue de contenu actuel et
de toucher un public plus large.

Canal pourrait aussi chercher dans les années à venir à s’étendre sur de nouveaux
marchés (géographiquement) ou de développer une diversification de filière et d’activité,
en proposant des services complémentaires tels que la création d’une plateforme de
streaming musical ou de service de shadow gaming directement accessible depuis
MyCanal ou depuis la box Canal +, en complément des autres services déjà existant.

En conclusion, les perspectives pour Canal + sont prometteuses mais nécessitent une vigilance
constante. En continuant à proposer des contenus de qualités et en s’adaptant aux changements
en cours dans l’industrie, Canal + a toutes les chances de réussir dans l’univers passionnant du
streaming vidéo.

Salesforce et AWS proposent un service de streaming


multimédia clé en main
17 février 2022 / Usinenouvelle.com and Usine-digitale.fr

Salesforce et AWS lance une offre à destination des entreprises afin de leur faciliter le déploiement d'un
service de streaming multimédia auprès des consommateurs. Les partenaires unissent l'infrastructure
d'AWS et les capacités de marketing et de gestion clients de Salesforce.

Salesforce et AWS veulent simplifier l'exploitation de services de streaming multimédia. Ils dévoilent
ce 17 février 2022 une offre ayant pour objectif d'aider les distributeurs de contenus à créer et faire
grandir des plateformes d'abonnement de streaming vidéo et audio. Ce service combine l'infrastructure
d'AWS avec les outils de marketing et de gestion des clients de Salesforce.

Combiner infrastructure et outils marketing

Suite à l'acquisition de Vlocity en février 2020, Salesforce s'est aperçu qu'il y avait un besoin sur le
marché d'une solution de diffusion multimédia directe au consommateur. Le spécialiste du CRM dispose
des outils nécessaires pour générer les abonnements, les ventes incitatives et commercialiser la solution
auprès du client, notamment grâce à Vlocity. Mais il n'a pas l'infrastructure pour exécuter un tel service.

Toutefois, Salesforce et AWS ont un partenariat qui a été renforcé en juin 2021. Le spécialiste de la
gestion de la relation client et le spécialiste du cloud affirmaient alors vouloir lier plus encore leurs
produits et services afin de permettre à leurs clients d'utiliser plus facilement les deux plateformes.

Facilité le déploiement de plateformes de streaming

Cette offre de streaming vidéo "business to consumer" permet in fine de mettre en relation des
entreprises avec des consommateurs. La mise en place et le développement des services de streaming
est compliqué. Les entreprises doivent proposer un modèle de monétisation innovant, augmenter

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l'audience et la fidélisation, offrir des expériences personnalisées et un contenu interactif, se déployer à
l'international en s'adaptant aux différents marchés, etc.

Salesforce et AWS expliquent unir leurs forces pour proposer des solutions en ce qui concerne la gestion
de contenu et les abonnés. Le but étant que les entreprises clientes n'aient pas à résoudre ces défis d'eux-
mêmes et qu'elles puissent se concentrer sur les contenus et l'expérience de visionnage. Salesforce et
AWS assurent que leur offre va réduire le coût pour déployer un tel service tout en accélérant la
croissance des revenus et des abonnés.

Les fonctionnalités de base de cette offre comprennent : la gestion de bout-en-bout du cycle des abonnés
; une plateforme de données client pour les comprendre et les segmenter ; un outil de personnalisation
de contenu alimenté par des algorithmes de machine learning ; les opérations de streaming vidéo qui
prennent en charge un déploiement à grande échelle et les expériences interactives.

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Le groupe Canal+ et ViacomCBS Networks International
(VCN) annoncent un partenariat stratégique de longue
durée ; la plateforme de streaming Paramount+ sera lancée
en décembre prochain
17 février 2022 / Société Générale de Presse

Le groupe Canal+ et ViacomCBS Networks International (VCN) annoncent un partenariat stratégique


de longue durée ; la plateforme de streaming Paramount+ sera lancée en décembre prochain Le groupe
Canal+ et ViacomCBS Networks International (VCN) annoncent un partenariat stratégique de longue
durée ; la plateforme de streaming Paramount+ sera lancée en décembre prochain

Le groupe Canal+ et ViacomCBS Networks International (VCNI), filiale de ViacomCBS Inc. ont
annoncé, dans un communiqué, la signature d'un partenariat stratégique sur le long terme.

Cette collaboration s'articule autour de deux piliers principaux.

1-Le premier pilier concerne la distribution de Paramount+ et de 9 chaînes de ViacomCBS. D'ici la fin
de l'année, le groupe Canal+ distribuera le nouveau service de vidéo à la demande Paramount+ en
France. A son lancement, le service sera inclus pour les abonnés Canal+ bénéficiant de l'offre Canal+
Ciné Séries.

Paramount+ proposera des séries, des émissions et des films couvrant tous les genres, en provenance de
marques et de studios de production comme Paramount+ Originals, SHOWTIME(r), CBS, MTV,
Nickelodeon et Paramount Pictures, mais aussi une offre de contenus locaux de premier plan.

Les abonnés pourront ainsi retrouver sur le service des séries aux contenus originaux comme la série
dérivée du film "Grease" : "Grease : Rise of the Pink Ladies". On retrouvera aussi des titres de séries
populaires ("Dexter", "Bob l'Eponge SquarePants", "South Park", etc.) mais aussi une collection de films
Paramount Pictures ("Transformers, Mission Impossible, etc.).

Le groupe Canal+ poursuivra en outre la distribution de 9 chaînes de ViacomCBS : MTV, Nickelodeon,


Nickelodeon Junior, Nickelodeon Teen, Paramount Channel, Game One, J-One, BET et Comedy
Central.

La plateforme Paramount + disponible dans 48 pays d'ici à la fin de l'année 2022

Le groupe privé sera le seul acteur du marché en France à pouvoir intégrer Paramount+ à ses offres
commerciales (en "hard bundle"). Paramount+ sera également disponible en D2C via l'application
Paramount+ (iOS et Android) et via les téléviseurs connectés et plateformes OTT.

"Après le Royaume-Uni, l'Italie et l'Allemagne, le nouveau partenariat stratégique avec Canal+ accélère
notre expansion en Europe avec le lancement de Paramount+ en France en 2022", a annoncé M. Raffaele
ANNECCHINO, président et directeur-général de ViacomCBS Networks International.

Son groupe télévisuel, qui a gagné près de 10 millions d'abonnés supplémentaires à ses services de vidéo
en ligne Paramount+ et Showtime et atteint 56 millions d'abonnés dans le monde, va changer de nom
pour se rebaptiser Paramount Global.

En décembre prochain, la plateforme de streaming Paramount+ sera lancée en France, avec le souhait
d'intégrer tous les distributeurs français, a-t-on appris, confirmant une information du journal "Les
Echos".

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Le service de streaming est actuellement disponible aux Etats-Unis, au Canada, en Amérique latine,
dans les pays nordiques et en Australie et sera disponible dans 48 pays d'ici la fin de l'année 2022.

2-Le deuxième pilier traite de l'acquisition de contenus premium en exclusivité pour les chaînes et
services du groupe Canal+.

En effet, les films Paramount seront proposés en première exclusivité pour Canal +, six mois après leur
sortie en salles, conformément à la nouvelle chronologie des médias.

L'accord prévoit également l'accès exclusif pour Canal+ et Canal+ Séries à au moins deux séries
Showtime par an. Ces dernières seront ensuite disponibles sur le service Paramount+. Le groupe aura
aussi exclusivité de la diffusion de la série Paramount+ Originals "Halo", jusqu'au lancement du service
Paramount+.

Pour M. Maxime SAADA, président du directoire du groupe Canal +, ce partenariat "conforte à la fois
sur notre métier d'agrégateur, via la distribution de Paramount+ et des chaînes de ViacomCBS, et sur
notre métier d'éditeur, en sécurisant pour le long terme l'accès en exclusivité aux films Paramount et à
des séries Showtime pour notre chaîne Canal+".

RTL Deutschland / Accord WarnerMédia : La filiale


allemande du groupe...
17 février 2022 / Société Générale de Presse

RTL Deutschland / Accord WarnerMédia : La filiale allemande du groupe Bertelsmann RTL


Deutschland a annoncé ce mercredi avoir conclu un accord avec WarnerMédia pour renforcer son offre
de streaming RTL+. Le groupe allemand a lancé son service de vidéo streaming de vidéos en ligne
payant, RTL+, il y a environ trois ans. L'offre rassemble aujourd'hui plus de 2,6 millions d'abonnés
payants en Allemagne, avait rappelé M. Thomas RABE, président-directeur général de Bertelsmann et
de RTL Group, lors de son audition devant la commission d'enquête sénatoriale relative à la
concentration des médias en France fin janvier (cf. CP du 28/01/2022). L'objectif est d'atteindre les 8
millions dans les années qui arrivent. "Nous allons continuer significativement notre investissement à
environ 500 millions d'euros par an", avait encore précisé M. RABE.

Plus précisément, l'accord passé avec l'américain WarnerMédia est un accord exclusif portant sur "un
volume de programmes étendu et pluriannuel avec la société de production américaine Warner Bros
Entertainment". A partir du premier trimestre 2022, RTL Deutschland aura accès à des films et séries
exclusifs, y compris des films originaux de HBO Max, pour compléter le nombre croissant de films
allemands originaux sur son service de streaming RTL+. RTL Deutschland bénéficiera aussi de droits
exclusifs de télévision gratuite pour les futurs longs métrages et l'accès à la vaste bibliothèque de Warner
Bros.

CLIQ Digital ajoute à son offre plus de 400 heures de


contenus de séries primées
17 février 2022 / EQSFR

Demande croissante de contenus sériels / 14 nouvelles séries complètes pour les portails allemands et
autrichiens / Nouveautés supplémentaires attrayantes pour renforcer encore la catégorie Films & Séries

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La société CLIQ Digital AG a accordé une licence à ses principaux membres allemands et autrichiens
de CLIQ pour de nouvelles séries premium, représentant plus de 400 heures de divertissement de qualité,
de la société Palatin Media Film- & Fernseh GmbH, basée à Munich, dans le cadre d'un nouveau
partenariat. CLIQ continue ainsi d'élargir son portefeuille de produits de divertissement abordables pour
ses membres. En tant que fournisseur international de services de streaming, CLIQ offre aujourd'hui un
accès illimité à la musique, aux livres audio, au sport, aux films et aux jeux, tout en gagnant des clients
grâce à un marketing à la performance ciblé.

Fondée en 2011, Palatin Media Film- & Fernseh GmbH est une entreprise de médias audiovisuels basée
à Munich, qui dispose d'un vaste catalogue de plusieurs centaines de longs métrages, séries et mini-
séries. Les activités de Palatin Media comprennent la distribution mondiale avec un point fort dans les
pays germanophones, la production de programmes de fiction et de non-fiction, la distribution en salles
et l'exploitation de chaînes.

À partir du deuxième trimestre 2022, Palatin Media fournira 14 séries premium complètes de tous les
genres avec plus de 400 épisodes pour le portail multi-contenu cliqdigital.com. La bibliothèque de
Palatin comprend à la fois des programmes très réussis et des programmes primés qui s'intègrent
parfaitement dans le catalogue actuel de CLIQ. Les utilisateurs continuent de miser sur les avantages de
la vidéo en streaming à la demande (SVoD). En 2021, la valeur du marché mondial de la vidéo
numérique s'élevait à 86 milliards de dollars, soit la deuxième valeur la plus élevée parmi les médias
numériques, après les jeux vidéo. Un taux de croissance de plus de 10 % est également attendu en 2022.

Déclaration de Ben Bos, membre du conseil d'administration : « En 2022, nous poursuivrons notre
stratégie visant à augmenter et à améliorer notre bibliothèque de contenus de manière pertinente et utile.
Nos membres apprécient le grand choix et le large éventail de catégories, qui sont constamment élargis
et renforcés. Nous sommes très heureux que les séries complètes et de haute qualité de Palatin nous
permettent d'attirer de nouveaux membres CLIQ et de divertir plus longtemps les membres existants. »

À propos de CLIQ Digital : CLIQ Digital (www.cliqdigital.com) est un fournisseur mondial de services de streaming
spécialisé dans la commercialisation de produits de divertissement abordables, offrant à ses membres un accès illimité à des
films, des séries, de la musique, des livres audio, du sport et des jeux. CLIQ Digital a une longue et fructueuse histoire
d'entreprise dans le domaine du marketing numérique et propose des produits de niche pour le marché de masse à des prix
compétitifs. L'entreprise est active dans plus de 30 pays et employait 129 personnes de 32 pays différents au 31 décembre 2021.
CLIQ Digital est un partenaire commercial stratégique précieux pour les réseaux, les producteurs de contenus ainsi que pour
les éditeurs et les prestataires de services de paiement. L'entreprise a son siège social à Düsseldorf et des bureaux à Amsterdam,
Londres, Paris, Barcelone, Toronto et en Floride.

Paramount+ débarque en France


17 février 2022 / Les Echos

La plateforme de SVoD du géant américain ViacomCBS sera lancée en décembre prochain.

Elle a signé un accord de distribution avec Canal+ qui pourra continuer à diffuser les films de Paramount
et certaines séries de Showtime. Nouvelle offensive en vue de ViacomCBS en France. Un an après le
lancement dans l'Hexagone de Pluto TV, son service de streaming financé par la publicité, le géant
américain annonce l'arrivée en fin d'année de sa plateforme de vidéo à la demande par abonnement
(SVoD) Paramount+.

« Nous lançons Paramount+ en France en décembre prochain », précise aux « Echos » Raffaele
Annecchino, PDG de ViacomCBS Networks International. « Nous avons un accord de distribution avec
Canal+ mais nous souhaitons intégrer tous les distributeurs français pour avoir la diffusion la plus large
possible », précise-t-il en faisant référence aux opérateurs télécoms Orange, SFR, Free et Bouygues
Telecom.

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Le service est déjà disponible aux Etats-Unis, au Canada, en Amérique latine et dans quelques pays
d'Europe. L'accord - de « long terme », disent les partenaires, sans toutefois préciser de durée, et non
exclusif - avec la filiale de Vivendi prévoit que le groupe français soit le seul acteur du marché en France
à pouvoir intégrer Paramount+ dans ses offres commerciales. La plateforme sera proposée dans le
bouquet Canal+ Ciné Séries, aux côtés des chaînes Canal+ Cinéma, Ciné+, mais aussi de Disney+ et de
Netflix. Il s'étend aussi au renouvellement de la distribution par Canal+ des neuf chaînes de ViacomCBS,
parmi lesquelles MTV et Nickelodeon Junior.

Une plateforme « incontournable »

Canal+ a en outre préservé son accès en première exclusivité aux films des studios Paramount Pictures
sur sa chaîne cryptée conformément à la nouvelle chronologie des médias, soit six mois après la sortie
en salle. Ces films, parmi lesquels on compte « Le Parrain », les franchises Mission Impossible et Star
Trek, ou encore « Top Gun », ne seront disponibles que dans un deuxième temps sur Paramount+.

Surtout, Canal+ a aussi pu renouveler son accord qui lui permet de diffuser les fameuses séries à succès
de Showtime, là encore en avant-première, soit avant Paramount+. La chaîne cryptée disposait jusqu'ici
d'un accord lui permettant de diffuser l'intégralité de « The Chi », « Billions », « Homeland »… A
l'avenir, elle aura le droit d'aller piocher certaines séries et non plus l'intégralité.

« Paramount, c'est le studio le plus emblématique d'Hollywood, estime Maxime Saada, président du
directoire du groupe Canal+. Et Paramount+ fait partie des plateformes incontournables du marché.
Nous voulons nous associer avec celles qui gagneront la bataille car tout le monde ne gagnera pas. Et
elles veulent s'associer à nous. »

A son lancement, Paramount+ sera inclus sans surcoût pour les abonnés Canal+ bénéficiant de l'offre
Canal+ Ciné Séries, dont le prix mensuel reste à 35 euros (et 20 euros par mois pour les moins de 26
ans). Ce qui ne préjuge pas d'éventuelles augmentations tarifaires à l'avenir… « Quand on fait la somme
des offres contenues dans Canal+ Cinéma Séries, on arrive à une valeur théorique de plus de 100 euros,
souligne Maxime Saada. C'est une offre de contenus très large et très avantageuse que l'on propose à un
tiers de ce prix. »

Les deux groupes se connaissent bien : ils sont partenaires depuis trente ans. Canal+ a diffusé le premier
film « Indiana Jones » au moment de sa sortie et propose la chaîne de télévision MTV depuis plus de
vingt-cinq ans.

Même si le parc d'abonnés en streaming payant de ViacomCBS a progressé depuis le lancement de


Paramount+ aux Etats-Unis en mars 2021, il reste loin du trio de leaders mondiaux constitué par Netflix,
Amazon Prime Video et Disney+.

Une série de partenariats locaux en Europe

Pour tenter de rattraper son retard en Europe, ViacomCBS s'appuie sur une série de partenariats locaux.
En août, il a notamment décidé de s'allier avec Comcast pour lancer une plateforme commune de
streaming dans plus de vingt pays du Vieux Continent (mais pas en France), baptisée
« SkyShowtime ».

De plus, l'an dernier, ViacomCBS a aussi conclu un accord de distribution pluriannuel avec Sky - la
filiale de télévision payante de Comcast - afin de diffuser Paramount+ au sein de ses bouquets dans
plusieurs pays dont l'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Italie. « Nos services de SVoD nous permettent
d'être présents dans plus de 60 pays alors que nous accélérons le déploiement de Paramount+ sur tous
les marchés, partout dans le monde », assure Raffaele Annecchino.

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ViacomCBS change de nom et mise tout sur le streaming
17 février 2022 / Les Echos

Pour saluer les bons résultats de Paramount+, ViacomCBS se renomme « Paramount Global ».
L'entreprise enregistre des résultats en hausse mais sa croissance est presque entièrement tirée par la
vidéo à la demande.

ViacomCBS, le géant de la télévision américaine, se renomme « Paramount Global », ou plus


simplement Paramount. Son objectif est double : mettre l'accent sur son service de vidéo à la demande,
Paramount+, qui publie pour la première fois son nombre d'abonnés, et rappeler aux utilisateurs l'histoire
glorieuse du studio du même nom, fondé il y a plus de cent ans à Hollywood.

Son service de streaming - lancé en 2014 sous le nom de « CBS All Access » et renommé « Paramount+
» en mars dernier - est l'un des précurseurs du secteur, mais il peinait à recruter autant d'abonnés que ses
rivaux. Il a grandi rapidement ces trois derniers mois, ajoutant 7,2 millions d'abonnés pour atteindre les
32,8 millions. Présent aux Etats-Unis, au Canada, en Amérique latine et dans quelques pays d'Europe,
il se lancera en France à la fin de l'année.

La présidente du conseil d'administration, Shari Redstone, s'est félicitée des « progrès extraordinaires
accomplis au cours des deux dernières années », lors d'une conférence avec des analystes. Wall Street
n'était pas tout à fait de cet avis : le titre perdait 3,5 % dans les échanges après Bourse, selon Bloomberg.
Le leader du secteur, Netflix, a fait l'objet d'une brutale correction des marchés depuis le début de
l'année, accélérée par des résultats moins bons que prévu.

Des objectifs ambitieux

Paramount+ commence à jouer dans la même catégorie que les leaders du secteur, dont Netflix qui
compte près de 222 millions d'abonnés et Disney+ qui approche des 130 millions. En ajoutant les
services de streaming Showtime et BET, ainsi que la marque pour enfants Noggin, le nombre d'abonnés
à Paramount Global grimpe à 56 millions. L'entreprise se montre confiante sur sa capacité à continuer à
croître sur un marché de plus en plus concurrentiel. Elle affirme qu'elle pourra atteindre les 100 millions
d'abonnés à toutes ses plateformes de streaming d'ici à 2024. Jusqu'à présent, elle visait seulement une
base de 65 à 75 millions d'abonnés.

Paramount a choisi de se réorganiser autour de ses services de streaming, suivant ainsi les pas de ses
rivaux, Disney et WarnerMedia, avec son offre HBO Max. Cette stratégie s'explique aisément : presque
toute la croissance des ventes de Paramount l'an dernier provient de ses services de streaming. Ses
revenus progressent en effet de 21 % entre 2020 et 2021, tandis que ceux provenant du streaming
bondissent de 70 %.

L'entreprise a de plus annoncé son intention de combiner ses deux offres de streaming phares,
Paramount+ et Showtime, en une offre unique à prix réduit, à partir de l'été 2022. Elle s'inspire de
Disney, qui a lancé une offre combinant Disney+, Hulu et ESPN+. Ce qui a sans doute contribué à ses
bons résultats en début d'année.

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M6 et TF1 en pleine forme avant leur rapprochement
16 février 2022 / Les Echos

Grâce au rebond du marché publicitaire, les deux chaînes de télévision ont dégagé des performances
élevées en 2021.

Nicolas de Tavernost, qui va diriger la future entité, envisage désormais un niveau de marge
opérationnelle de 18-19 % pour TF1 et M6 combinés.

Dans ce qui pourrait bien être leur dernier bal de résultats annuels en solo, M6 et TF1 se sont montrés
sous leurs plus beaux atours. Portés notamment par le rebond du marché publicitaire, les deux groupes
audiovisuels ont dégagé des performances élevées en 2021.

Mais leur bonne santé ne plaide guère en faveur de leur projet de mariage fondé sur l'idée d'une
fragilisation du modèle d'affaires de la télévision face la mainmise de Google et Meta (Facebook) dans
la publicité en ligne et l'essor de Netflix et consorts dans le streaming vidéo.

Mardi soir, le groupe M6 a ainsi publié un résultat net de 280,8 millions d'euros pour 2021, un record
depuis sa création il y a trente-cinq ans à l'exception de 2006, année marquée par des plus-values
financières. Et TF1 n'est pas en reste : le groupe contrôlé par Bouygues vendredi a bondi en Bourse
grâce à un résultat net annuel de 225,3 millions d'euros.

La marge opérationnelle courante de TF1 et M6 - même en excluant les aides gouvernementales liées à
la pandémie - a atteint respectivement près de 13 % et 23,5 % l'an passé. « Cette bonne santé financière
va donc nous permettre de mener à bien le projet de fusion visant à construire un groupe efficace capable
de relever le challenge des nouvelles concurrences internationales », explique dans un entretien aux «
Echos » Nicolas de Tavernost, le patron de M6.

Si M6 confirme son statut de premier de la classe en Europe en termes de rentabilité, cela reflète bien
sûr « une gestion stricte des coûts de programmes et de structure », selon un communiqué. C'est un
mantra pour Nicolas de Tavernost qui doit diriger l'entité fusionnée pour laquelle il envisage désormais
un niveau de marge opérationnelle de 18-19 %, soit dans la moyenne européenne pour le secteur. Et pas
très loin par rapport à Netflix qui prévoit, lui, une marge opérationnelle de 19-20 % en 2022. La
rentabilité du groupe de Los Gatos était pourtant de 27 % au premier trimestre, mais elle a baissé tout
au long de 2021.Mais d'où viennent alors les craintes qui justifient le rapprochement TF1-M6 ? Les «
nuages noirs » s'amoncellent, a rappelé Gilles Pélisson, vendredi. Après un répit en 2020 quand les
téléspectateurs confinés sont revenus sur le média télévision, « nous commençons à reperdre de la durée
d'écoute individuelle parce que la consommation de la SVoD [service de vidéo à la demande, NDLR]
ne cesse de progresser, a-t-il rappelé. Il y a une évolution fondamentale des usages, cela fragilise et
affaiblit la télévision linéaire et nous nous devons d'offrir nos contenus sur le digital. »

Le risque d'une trop forte concentration

S'il y a un domaine où les performances de TF1 et M6 ont été très proches l'an dernier, c'est dans la
publicité, avec des croissances des revenus respectivement de 14 % et 16 % sur un an. Toutefois, le
marché de la publicité sur le Web reste plus dynamique par rapport à la publicité télévisée, et les deux
seraient devenus substituables aux yeux des dirigeants de TF1 et M6.

C'est un argument que les deux groupes audiovisuels n'ont de cesse de mettre en avant pour justifier le
bien-fondé de leur projet fusion. Un parti pris que certains annonceurs critiquent ouvertement, craignant
des hausses tarifaires à venir à cause de la trop forte concentration : TF1 et M6 contrôleraient environ
75 % du marché de la publicité télévisée en France.

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« C'est de bonne guerre de crier avant d'avoir mal, a relativisé Gilles Pélisson. D'après lui, une majorité
d'annonceurs et d'agences publicitaires françaises « ne souhaite pas être dans les mains de trois acteurs
américains ». En jouant l'apaisement, le dirigeant a appelé les annonceurs à envisager leurs campagnes
publicitaires dans le futur « sans regarder dans le rétroviseur ». Et Gilles Pélisson s'est, par ailleurs, dit
confiant que l'Autorité de la concurrence va procéder « à une analyse stricte de cet enjeu » du marché
pertinent de la publicité.

Le verdict de l'Autorité est attendu pour octobre ou novembre. Mais pour être dans les clous du droit de
l'audiovisuel qui limite à sept le nombre de chaînes linéaires qu'un seul groupe peut détenir alors que
l'ensemble TF1-M6 en compterait dix, d'ici avril, il faudra soit avoir trouvé des acheteurs pour trois
chaînes soit envisager de remettre certaines fréquences à l'Arcom. Le compte à rebours a commencé.

Concentration des médias : Les plateformes américaines de


divertissement qui jugent la période actuelle comme "un
âge d'or de la création audiovisuelle", souhaitent voir les
règles françaises davantage évoluer
14 février 2022 / Société Générale de Presse

Concentration des médias : Les plateformes américaines de divertissement qui jugent la période actuelle
comme "un âge d'or de la création audiovisuelle", souhaitent voir les règles Françaises davantage
évoluer Concentration des médias : Les plateformes américaines de divertissement qui jugent la période
actuelle comme "un âge d'or de la création audiovisuelle", souhaitent voir les règles Françaises
davantage évoluer

Les plateformes américaines de divertissement, Netflix, Disney+ et Amazon Prime ont estimé vendredi
au Sénat, au cours de leur audition devant la commission d'enquête sénatoriale relative à la concentration
des médias en France, que la période était "un âge d'or de la création audiovisuelle", mais souhaitent
encore voir les règles Françaises évoluer.

Netflix va lancer 25 projet originaux français en 2022

"Nous sommes entrés dans un âge d'or de la création audiovisuelle en France et au-delà", a défendu
Mme Marie-Laure DARIDAN, directrice des affaires publiques de Netflix France. L'acteur californien,
présent sur le marché français depuis 2014, propose du divertissement, des séries, des films, du
documentaire et de l'animation ; mais pas d'information, ni de sport.

"Tous nos revenus sont issus du produit de nos abonnements", a expliqué Mme DARIDAN, rappelant
que la plateforme ne diffuse aucune publicité. Le produit des abonnements doit permettre à la plateforme
"d'investir davantage dans les œuvres".

Netflix se dit également "engagé dans les écosystèmes locaux". La France a une "place à part", en raison
de "sa créativité, ses talents, et aussi son exception culturelle". C'est pour cette raison que la plateforme
souligne avoir "fait le choix d'investir", bien avant l'adoption du décret SMAD (décret du 22 juin 2021
relatif aux "services de médias audiovisuels à la demande" (SMAD) (n°2021-793)). Netflix a d'ailleurs
ouvert des bureaux à Paris, composés d'une centaine de collaborateurs.

"Pour les talents et les producteurs, il n'y a jamais eu autant d'opportunités", a défendu la directrice des
affaires publiques. "Nos investissements viennent en complément de ceux des services existants."

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Netflix va lancer 25 projets originaux français en 2022, tous produits avec des sociétés de production
française, notamment le projet de Federation Entertainment pour une série sur Notre-Dame ou Gaumont
pour la série Lupin.

Au total, l'investissement de la plateforme américaine s'élèvera en 2022 à plus de 200 millions d'euros
dans la production audiovisuelle et cinématographique française, dont les 2/3 dans la production
indépendante conformément au décret, et 40 millions d'euros pour le cinéma.

Si Netflix a signé il y a quelques jours l'accord sur la nouvelle chronologie des médias (cf. CP du
25/01/2022), "on est sur le point de signer la semaine prochaine avec les producteurs de cinéma (Blic,
Bloc et ARP) pour sanctuariser l'investissement de Netflix dans le cinéma", a-t-elle aussi annoncé.
L'accord inclura notamment une clause de diversité afin de financer des films à petits budgets.

La plateforme a souligné sa capacité à exporter la production française auprès de ses 220 millions
d'abonnés à travers le monde. La série Lupin a par exemple été vue par 76 millions de foyers à travers
le monde.

"Il n'y a jamais eu autant de services français ou internationaux qui rivalisent pour distraire le
consommateur", a ajouté Mme DARIDAN, indiquant que ces nouvelles offres sont proposées au
bénéfice de la qualité et la diversité de l'offre.

Netflix, qui a déjà signé un partenariat avec TF1 pour "Le Bazar de la charité" a un autre projet en cours
avec TF1, avec le même producteur, pour "Les Combattantes". La plateforme a aussi des projets de
partenariat de coproduction avec Arte ou France Télévisions.

La société américaine porte un "regard positif" sur la concurrence "d'où qu'elle vienne", et n'a pas de
position sur le projet de fusion TF1/M6. Elle souhaite néanmoins voir "évoluer le cadre réglementaire".
"On est venus en connaissance de cause sur le marché français", a expliqué Mme DARIDAN. Le marché
évolue vite, tout comme le mode de consommation, raison pour laquelle il est important de permettre
aux acteurs d'être "suffisamment flexibles".

Si Netflix a bien signé l'accord portant sur la chronologie des médias, 15 mois "reste une fenêtre
extrêmement longue dans le monde actuel", a ajouté la dirigeante. Il s'agit là d'un sujet "qui doit pouvoir
évoluer à l'avenir".

Disney+ prévoit de lancer six nouvelles séries en France en 2022

Disney est une société globale et diversifiée dans le domaine du divertissement avec ses filiales Disney,
Pixar, Marvel, Lucas Film, ou National Geographic, a quant à lui rappelé M. Thomas SPILLER, vice-
président chargé des affaires gouvernementales de The Walt Disney Company, EMEA. "Nous existons
depuis 88 ans autour du storytelling de qualité, la créativité et la technologie".

"La relation avec France est très ancienne", a-t-il insisté, rappelant que le mot Disney vient lui-même de
village normand Isigny-sur-Mer (14) qui a été anglicisé. La première filiale française est née en 1934,
avec la société anonyme Mickey Mouse.

Disney est aujourd'hui actif dans trois domaines : l'audiovisuel, les produits dérivés, et le parc
d'attraction. "Nous ne sommes pas présents dans les newsmédias ou l'information, et nous n'avons
aucune intention de l'être", a-t-il rappelé.

En 2019, Disney a généré un quart des billets de cinéma vendus en France, représentant 44 millions
d'euros via la taxe spéciale additionnelle (TSA), avec 50 millions de tickets vendus. Le groupe est aussi
présent dans l'édition et la distribution de chaînes de télévision avec Disney Channel.

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La plateforme Disney+ a été lancée en France le 7 avril 2020, en plein premier confinement et est active
dans plus de 50 pays. Disney+ est un service de streaming différent des autres, car l'essentiel du contenu
est produit par la Walt Disney Company. L'offre de contenus se présente autour de six univers
différenciés.

"Nous contribuons à produire des séries spécifiquement françaises pour Disney+", a indiqué le dirigeant
qui a annoncé qu'en 2022 le groupe lancerait 6 nouvelles séries en France. Disney, qui ne souhaite pas
communiquer le chiffre de ses abonnés par pays, dispose de 130 millions d'abonnés globaux. "La France
est un bon marché comme d'autres pays européens", a estimé M. SPILLER.

"Nous investissons énormément en France, nous continuerons à investir malgré un cadre réglementaire
très strict et qui ne prend pas forcément en compte ce que désire le public", a aussi indiqué M. SPILLER.

Interrogé sur la question de la chronologie des médias, le dirigeant a rappelé que Disney n'avait pas
signé l'accord, car "nous pensons que c'est un cadre très strict qui va au détriment de ce que nous
observons dans le comportement des consommateurs qui veulent tout, tout de suite, sur différentes
plateformes".

Sur le projet de fusion TF1/M6, Disney est l'un des premiers clients en tant qu'annonceurs. "On est
vigilants et inquiets sur le fait que demain, il n'y aura peut-être qu'un seul guichet pour les chaînes en
clair". De même, le groupe a indiqué qu'il porterait une "attention importante" sur l'accès aux contenus
locaux. "Lorsque l'on cherche des droits pour la partie streaming, on cherche à ne pas être exclus de cet
accès aux droits".

Disney est aussi présent en France via ses produits dérivés : avec les Disney Stores et également dans
l'activité de l'édition avec "Le Journal de Mickey" publié en France depuis les années 30. Enfin, le parc
Disneyland Paris situé à Marne-la-Vallée (77) a été ouvert en 1992. Il représente 6,2 % des recettes
touristiques de la France.

Les investissements d'Amazon Prime Vidéo ont été fixés à un minimum de 40 millions d'euros par
an

La société américaine Amazon est quant à elle présente sur le territoire français depuis 2000, a rappelé
M. Yohann BENARD, directeur des affaires publiques d'Amazon France. "Nous sommes au service des
Français et nous contribuons au développement de l'économie française."

L'offre de streaming Amazon Prime Video a été lancée en France il y a cinq ans. "C'est un service
encore jeune. Nos premières productions originales datent de 2020", a indiqué M. BENARD.
L'entreprise américaine ne souhaite pas communiquer le nombre d'abonnés par pays mais Amazon Prime
Video revendique au global 200 millions d'abonnés.

"En tant que nouvel entrant, nous sommes guidés par les attentes du public et nous voulons proposer un
catalogue de qualité", a expliqué le dirigeant. Le catalogue est composé de contenus français et
internationaux.

"Nous avions investi plusieurs dizaines de millions d'euros dans des créations françaises avant même
les obligations de financement." L'objectif que se fixe la société américaine est de proposer une douzaine
de nouveaux films et séries par an en France. "Le catalogue comporte plus d'œuvres européennes que
ce que prévoit la directive audiovisuelle."

Amazon n'est pas non plus présent dans les médias d'information, a rappelé M. BENARD, qui juge que
pour le divertissement, la tendance n'est pas à la concentration, mais note plutôt une intensification de
la concurrence et une plus grande complémentarité entre les diffuseurs.

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Les investissements d'Amazon ont été fixés à un minimum de 40 millions d'euros par an, à la fois pour
la production audiovisuelle et le cinéma, selon l'accord qui a été signé avec l'Autorité de régulation de
la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). Cette somme pourrait être dépassée en fonction
du chiffre d'affaires réalisé. Amazon a aussi précisé qu'il s'était engagé au financement du documentaire
à hauteur de 3 %.

M. BENARD a enfin estimé que le cadre réglementaire français était un "frein". "Les évolutions devront
se poursuivre".

Afrique : le contenu en streaming et la vidéo à la demande


généreront 2 milliards $ d’ici 2027, selon Digital TV
Research
14 février 2022 / ECOFF

Ces dernières années, le marché africain du streaming et de la vidéo à la demande sort de sa phase
embryonnaire. Pour de nombreux observateurs, le secteur génèrera bientôt d’importants revenus.

En Afrique, le contenu audiovisuel accessible en streaming et à la demande va créer des revenus de


l’ordre de 2 milliards $ d’ici 2027, selon les estimations du cabinet américain Digital TV Research.
L’information a été diffusée dans le rapport « Africa OTT TV and Video Forecasts » publié par
l’entreprise.

« L'Afrique du Sud et le Nigeria représenteront ensemble 56 % du total d'ici 2027, laissant 896 millions
$ répartis entre les 33 autres pays. Les revenus de la SVOD atteindront 1,66 milliard $ en 2027, contre
476 millions $ en 2021 », assure le cabinet.

Il y a quelques jours, les experts du cabinet digital TV Research avaient annoncé que les abonnements
aux plateformes over the top en Afrique passeraient à 13,72 millions d’ici 2027, contre 4,89 millions fin
2021. Beaucoup se sont alors interrogés sur l’impact de cette croissance au niveau des revenus.

Le rapport annonce également que 47 % des abonnements à l’horizon 2027 feront partie du parc de
Netflix. De quoi s’interroger sur le parc des plateformes africaines comme Showmax et leurs parts de
revenus.

Les PDG des télécoms européens veulent faire payer les


plateformes
14 février 2022 / EurActiv.fr

Les PDG de Telefónica, Deutsche Telekom, Vodafone et Orange ont demandé à la Commission
européenne, dans une lettre ouverte, de faire contribuer les grands fournisseurs de contenu aux
investissements dans les infrastructures.

Les poids lourds des télécommunications ont souligné qu’ils avaient dû réaliser des investissements
massifs pour améliorer la capacité de leurs réseaux pendant la pandémie de COVID en raison de
l’augmentation du trafic internet due aux blocages.

« La poursuite des investissements est fondamentale pour garantir l’accès et la participation sans
restriction des citoyens à notre société numérique », indique la lettre. « Mais la situation actuelle n’est

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tout simplement pas viable. La charge des investissements doit être partagée de manière plus
proportionnelle. »

L’argument n’est pas nouveau et a récemment refait surface à l’approche des élections présidentielles
françaises prévues en avril.

Les opérateurs télécoms français ont présenté jeudi (3 février) leur cahier de doléances, à destination
des candidats à l’élection présidentielle. 15 propositions parmi lesquelles on retrouve l’idée de créer un
droit de passage pour les géants du numérique qui satureraient les réseaux sans contrepartie.

« En l’état actuel des choses, les opérateurs de réseaux ne sont pas en mesure de négocier des conditions
équitables avec ces plateformes géantes en raison de leur forte position sur le marché, de leur pouvoir
de négociation asymétrique et de l’absence d’un terrain de jeu réglementaire équitable », ajoute la lettre.

Les opérateurs estiment que les médias sociaux, le streaming vidéo et les jeux représentent plus de
70 % du trafic. Ces services appartiennent à une poignée d’hypercalculateurs qui parviennent à
engranger d’énormes bénéfices. En revanche, les opérateurs internet estiment qu’ils doivent payer le
coût de la connectivité alors que leurs bénéfices n’ont cessé de diminuer.

Zach Meyers, chargé de recherche au Centre for European Reforms (CER), a toutefois déclaré que « les
entreprises de télécommunications semblent ignorer le fait que les plateformes numériques suscitent une
énorme demande dans les réseaux de télécommunications — par exemple, de nombreux consommateurs
sont prêts à payer plus pour une connexion 5G que pour un réseau mobile plus lent. »

La rentabilité des entreprises de télécommunications a fortement diminué ces dernières années,


précisément au moment où elles avaient besoin d’investir massivement dans la modernisation de leurs
infrastructures.

« Il y a probablement un certain degré de ressentiment, aussi — de nombreuses entreprises de


télécommunications ont essayé, et échoué, à devenir des fournisseurs sérieux de contenu numérique,
dans le but d’éviter de devenir des entreprises de services publics à faible rentabilité », a ajouté M.
Meyers.

Étant donné qu’ils ne peuvent pas réaliser un retour sur investissement « viable », les PDG ont averti
que les fournisseurs pourraient ne pas avoir d’arguments commerciaux pour développer davantage
l’infrastructure numérique.

Les télécoms européennes ont cité des exemples en dehors de l’Union européenne, notamment celui de
la Corée du Sud qui discute actuellement de la manière de réglementer la répartition des coûts de réseau
suite à l’augmentation du trafic générée par le succès de la série Squid Game.

Les États-Unis envisagent un service universel avec la contribution des plateformes en ligne. Cependant,
le marché américain des télécommunications est beaucoup plus concentré que le marché européen, avec
des tarifs plus élevés qui sont en partie réinvestis dans l’expansion de la capacité des réseaux.

« Comme les Européens ne sont pas prêts à passer à un modèle américain, faire contribuer les
plateformes aux investissements d’infrastructure est une solution possible », a déclaré Gérard Pogorel,
professeur d’économie à Télécom Paris.

Il note toutefois que cette solution « n’est pas simple car la définition de l’assiette de la contribution sera
délicate. »

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De même, le mécanisme de distribution des fonds serait assez complexe, car ce type de soutien est
généralement justifié pour des investissements qui n’auraient pas lieu autrement.

Pour M. Meyers, la directive européenne sur le droit d’auteur constitue un précédent pour obliger les
plateformes à payer une part pour les services qu’elles fournissent. Toutefois, une telle intervention ne
serait motivée que par des preuves solides qu’elle profiterait aux consommateurs.

« Mais comme les entreprises de télécommunications se plaignent de leurs faibles marges bénéficiaires,
il existe un risque réel que leurs actionnaires, plutôt que les consommateurs, en soient les principaux
bénéficiaires », a déclaré M. Meyers.

Un autre obstacle majeur est la manière dont cette intervention serait conciliée avec le principe de
neutralité du réseau. Pour le professeur Pogorel, tous les services internet devraient alors contribuer
proportionnellement à leur utilisation du réseau, ce qui pourrait entraîner une lourdeur administrative.

Les garanties proposées par Google « ne suffisent » plus à protéger les données des Européens collectés
par Google Analytics et envoyées aux États-Unis, selon la CNIL qui, par sa décision, confirme que les
jours sont peut-être comptés pour le service d’analyse d’audience web.

En guise d’alternative, M. Pogorel a suggéré de s’appuyer sur l’imposition minimale des sociétés, une
partie des revenus supplémentaires étant réinvestie dans la capacité des infrastructures numériques.
Cependant, cela ne couvrirait pas nécessairement les bons acteurs, car les plateformes à fort trafic
comme Netflix ne sont pas nécessairement aussi rentables que Google ou Facebook.

« Si nous ne remédions pas à cette situation déséquilibrée, l’Europe prendra du retard par rapport à
d’autres régions du monde, ce qui finira par dégrader la qualité de l’expérience pour tous les
consommateurs », ont écrit les PDG.

Pour les fournisseurs de télécommunications, faire payer aux grandes entreprises leur juste part
conduirait également à une utilisation plus durable des technologies numériques. Les grandes
plateformes en ligne ne seront pas incitées à optimiser les données qu’elles utilisent si elles ne paient
aucun coût économique pour celles-ci.

Le porte-parole de Meta a refusé de commenter l’affaire, tandis que Google et Microsoft n’ont pas
répondu à la demande de commentaire d’EURACTIV au moment de la publication.

Le monde de l'audiovisuel et du cinéma s'apprête à être


bousculé par la naissance de Warner Bros. Discovery
Qui ne dit mot consent : à l’échéance du 9 février, aucune autorité antitrust américaine n'a contesté le
projet de fusion entre WarnerMedia, filiale de l'opérateur télécoms américain AT&T, et son compatriote
Discovery. L'Union européenne, elle, a déjà donné son feu vert en décembre. Le géant Warner Bros.
Discovery naîtra au printemps.

Feux verts pour le lancement au printemps du nouveau géant du divertissement, du cinéma et de


l’audiovisuel – streaming vidéo et chaînes payantes compris : Warner Bros. Discovery (WBD). Bien
que la fusion entre les deux groupes américains WarnerMedia et Discovery ait été annoncée en mai
2021, cette prise de contrôle de la filiale de contenus audiovisuels et cinématographiques de l’opérateur
télécoms AT&T par son compatriote Discovery, lequel en prend le contrôle, entame sa dernière ligne
droite. Et ce, en vue de la finalisation – au deuxième trimestre – de cette mégafusion à 43 milliards de
dollars pour AT&T. Cette somme servira à l’opérateur télécoms pour se désendetter et renforcer ses

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investissements dans la 5G et la fibre optique. Le nouveau groupe WBD sera placé sous la houlette de
David Zaslav. L’ensemble compte faire jouer des synergies technologiques, marketing et numériques
pour dégager dans les deux ans « plus de 3 milliards de dollars » d’économie, selon le projet de lettre
aux actionnaires présentée le 1er février dernier en même temps que le prospectus de l’opération de
spin-off. WarnerMedia et Discovery discutent en outre depuis novembre dernier de la fusion de leurs
deux plateformes de SVOD : HBO Max et Discovery+. Les Netflix, Amazon, Prime Video et autres
Disney+ n’auront qu’à bien se tenir.

WBD sera coté au Nasdaq et tiré par le streaming

« Le regroupement en une seule plateforme entraînera des économies considérables. Je pense qu’il y
aura aussi des avantages significatifs pour les consommateurs à fusionner en une seule plateforme »,
avait déclaré le directeur du streaming et de l’international chez Discovery, le Français Jean-Briac
Perrette. La future plateforme commune de SVOD, « HBO Max Discovery+ », s’approchera des 100
millions d’abonnés et promet de bousculer les marchés audiovisuels et cinématographique au niveau
mondial, y compris les chaînes payantes. Ce nouveau rival de taille pourrait mettre fin au leadership de
Netflix (dont le service en ligne fut créé en 2007 avec aujourd’hui près de 222 millions d’abonnés), déjà
mis à mal par l’irruption de la plateforme Disney+ (lancée en 2019 et atteignant 118 millions d’abonnés).
L’ensemble Warner Bros. Discovery devrait peser d’emblée plus de 50 milliards de dollars de chiffre
d’affaires pour une valorisation attendue d’environ 130 milliards de dollars. Le conseil d’administration
de la nouvelle société sera composé de treize membres, dont sept avec le président du conseil nommés
par AT&T, tandis que Discovery nommera six membres, dont David Zaslav, son actuel patron. Le géant
des télécoms, qui se délestera de sa filiale WarnerMedia au cours du deuxième trimestre, organisera une
conférence virtuelle le 11 mars avec les investisseurs sur les aspects financiers de ce spin-off.

SVOD : HBO Max et Discovery+ face à Netflix

Warner Bros. Discovery sera alors un nouveau géant qui sera coté au Nasdaq à New York, sous le
symbole « WBD ». Les actionnaires d’AT&T en détiendront 71 %, tandis que ceux de Discovery les 29
% restants. « Cette transaction offre l’occasion de créer un concurrent mondial plus fort dans le
streaming et le divertissement numérique », s’est félicitée la firme de Dallas (où se situe le siège
d’AT&T). Il s’agit aussi pour les deux groupes qui vont fusionner de rattraper leur retard sur le peloton
de tête du marché mondial du streaming et de la SVOD constitué de Netflix, Disney+, Amazon Prime
Video et Apple TV+. « La WBD combinera les actifs de divertissement, de sport et d’actualité de
WarnerMedia avec les principales entreprises internationales de divertissement et de sport de Discovery,
afin de créer une entreprise mondiale de divertissement de premier plan et autonome », est-il prévu, les
deux parties amenées à fusionner étant en outre rompues à l’exploitation de licences à travers le monde.
Rivaliser avec les plateformes de streaming Netflix ou Disney+ nécessite plus que jamais de « réunir
des créateurs de contenu de calibre mondial et des catalogues de séries et de films de grande qualité dans
le secteur des médias ». WarnerMedia apporte à WBD ses grands studios d’Hollywood et ses
productions de divertissement, d’animations, d’information et de sports (plutôt de stock ou scripted).
Au-delà de l’emblématique major du cinéma américain Warner Bros., l’ex-Time Warner (renommé
WarnerMedia en 2018) édite la chaîne de télévision payante HBO, la chaîne d’information en continu
CNN, les réseaux de télévision par câble ou satellite TNT, TBS et TruTV (Turner) ou encore des
program- mes pour enfants Cartoon Network et DC Comics. Et c’est en mai 2020 que la plateforme de
streaming vidéo HBO Max a été lancée aux Etats-Unis, avant d’être rendue accessible dans d’autres
pays dont certains en Europe depuis l’automne 2021. Prochaine extension géographique, annoncée en
début de mois par Johannes Larcher, directeur de HBO Max à l’international : le 8 mars prochain. Mais
toujours pas en France car OCS, filiale d’Orange (66,67 % du capital) et de Canal+ (33,33 %), détient
jusqu’à fin 2022 l’exclusivité des contenus HBO. Lors d’une conférence téléphonique le 26 janvier
dernier, le PDG d’AT&T John Stankey a indiqué qu’ensemble la chaîne premium HBO et la plateforme
HBO Max avaient atteint 73,8 millions d’abonnés. Mais c’est à peine un tiers du parc d’abonnés de
Netflix et moins de deux-tiers de celui de Disney+. Discovery, qui ne possède pas de studio de cinéma,
apporte de son côté à WBD des programmes audiovisuels de divertissement de la vie réelle, de téléréalité

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(real life) et de sport (plutôt du flux ou unscripted) auprès de passionnés ou de superfans. Le groupe,
dont le principal actionnaire est le « cow-boy du câble » et magnat des médias John Malone, diffuse des
programme-phares sur tous les écrans tels qu’Eurosport, Discovery Channel, HGTV, Travel Channel,
MotorTrend, Animal Planet ou encore Science Channel. Et dans les plateformes numériques et
applications mobiles, Discovery apporte un savoir-faire en termes d’innovation. Dès 2015, le service de
SVOD Motor Trend OnDemand est lancé pour les passionnés de voitures. En 2019, Food Network
Kitchen est diffusé en live et on-demand pour les fans de cuisine. Puis, c’est à partir de 2020 qu’est
déployée la plateforme de SVOD Discovery+, d’abord en Inde, puis l’année suivante aux Etats-Unis.
Discovery+ s’appelait auparavant Dplay (en 2019) après avoir été lancé sous le nom de QuestOD (en
2018). Au Hollywood Reporter début août dernier, le directeur général de Discovery, David Zaslay,
avait indiqué que Discovery+ avait atteint les 18 millions d’abonnés : plus de douze fois moins que
Netflix et plus de six fois moins que Disney+. Puis à Fierce Video début novembre dernier le Français
Jean-Briac Perrette (photo ci-contre) chez Discovery, avait actualisé le nombre d’abonnés à 20 millions
au 30 septembre dernier. « Nous voulons accélérer dans le domaine des services de streaming de média
et de divertissement, en mode Direct- to-Consumer (DTC), pour les consommateurs du monde entier »,
a expliqué la firme de Dallas le 2 février dernier lors de la présentation de la scission d’avec sa filiale
de contenus.

Feux verts de l’Europe et des Etats-Unis

Auprès du gendarme de la Bourse américaine (la SEC), Discovery a pris acte qu’il n’y a eu à l’échéance
légale du 9 février dernier aucune contestation au projet de fusion « WBD », ni de la part de la Federal
Trade Commission (FTC), présidée depuis septembre 2021 par Lina Khan et pourtant plutôt hostile aux
positions dominantes, ni du DoJ (département de la Justice) ni même de la FCC (régulateur des
communications). Alors même que le DoJ avait reçu le 4 décembre 2021 une lettre de près de trente
Démocrates américains l’exhortant à examiner de très près le dossier « Discovery-WarnerMedia » avant
de rendre sa décision. Car selon ces parlementaires américains, le futur WBD risque de réduire la
diversité et l’inclusivité des contenus proposés aux consommateurs, lesquels pourraient être amenés à
les payer plus cher. Quant à la Commission européenne, elle a déjà fait savoir le 3 janvier dernier qu’elle
avait autorisé le contrôle de WarnerMedia par Discovery.

Disney+ compte près de 130 millions d'abonnés dans le


monde
11 février 2022 / Société Générale de Presse

Disney+ compte près de 130 millions d'abonnés dans le monde Disney+ compte près de 130 millions
d'abonnés dans le monde

L'entreprise américaine de divertissement Disney comptait début janvier près de 130 millions d'abonnés
à son service de vidéo en ligne Disney+, un chiffre bien supérieur aux attentes. Dans le détail, Disney+
a gagné 11,7 millions d'abonnés en un trimestre, pour atteindre 129,8 millions, selon un communiqué
du groupe mercredi, soit nettement plus que les 124,6 anticipés par le consensus des analystes établi par
FactSet. Le groupe est aussi parvenu à faire progresser de 9 % le revenu moyen par abonné au service.
Le chiffre d'affaires tiré des services vidéo en ligne qui comprennent, outre Disney+, Hulu et ESPN+, a
cru de 34 % sur un an.

Pertes opérationnelles de 600 millions de dollars sur les services en ligne

L'activité demeure cependant déficitaire et a vu ses pertes opérationnelles se creuser à 600 millions de
dollars sur le trimestre. Disney joue gros sur le segment de la vidéo en ligne, qui doit offrir un nouveau

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moteur de croissance, car la télévision traditionnelle s'essouffle. S'ils demeurent sensiblement supérieurs
à ceux du streaming, les revenus tirés de la télévision classique ont stagné sur un an.

Toujours côté contenu, Disney a bénéficié des succès de plusieurs films, en premier lieu "Spider-Man :
No Way Home", co-produit avec Sony, qui a rapporté 1,77 milliard de dollars au box-office depuis sa
sortie mi-décembre. Durant le premier trimestre de son exercice décalé (octobre à septembre),
l'entreprise de Burbank (Californie) a aussi profité de la reprise de ses parcs d'attraction, dont beaucoup
avaient été fermés pendant tout ou partie de la même période de 2020. Le chiffre d'affaires de la branche
a ainsi doublé, avec la hausse considérable du nombre d'entrées mais aussi la progression du montant
moyen dépensé par visiteur.

Un chiffre d'affaires en hausse de 34 % sur un an

Toutes activités confondues, les revenus ont augmenté de 34 % sur un an, à 21,8 milliards de dollars au
premier trimestre de leur exercice comptable. Le bénéfice, lui, est ressorti à 1,1 milliard de dollars. Le
bénéfice par action, scruté par les analystes, s'est inscrit à 1,06 dollar, soit bien mieux que les 73 cents
attendus. Le marché semblait accueillir favorablement cette publication avec une action en forte
croissance à Wall Street.

Le grand retour de Disney après la pandémie


11 février 2022 / Les Echos

Le géant du divertissement a ajouté 11,8 millions d'abonnés à Disney+, davantage que ce que
prévoyaient les analystes. Les visiteurs affluent dans ses parcs d'attractions et ses dirigeants investissent
dans la réalité virtuelle et augmentée.

Carton plein pour Disney+. Le service de streaming compte 129,8 millions d'abonnés, soit 11,8 millions
de plus qu'au trimestre précédent. Les analystes s'attendaient plutôt à une hausse de l'ordre de 7 ou 8
millions. Alors que les recrutements à Disney+ avaient déçu au trimestre précédent, le cours du groupe
Walt Disney s'est cette fois envolé de 7 % dans les échanges mercredi après la fermeture de Wall Street.

Contrairement à Netflix, qui se montre prudent au moins à court terme, Disney s'est dit très optimiste
sur sa croissance future, aux Etats-Unis et dans le reste du monde. « Nous avons plus confiance que
jamais dans cette plateforme », a déclaré son patron, Bob Chapek, lors d'une conférence avec des
analystes. Chaque abonné rapporte de plus en plus au groupe : le revenu moyen croît de 9 % pendant le
dernier trimestre. Le chiffre d'affaires tiré des services vidéo en ligne, qui comprennent aussi Hulu et
ESPN+, a progressé de 34 % sur un an. L'activité de ces services « direct to consumer » demeure
cependant déficitaire et a vu ses pertes opérationnelles se creuser, à 600 millions de dollars sur le
trimestre. L'équilibre est attendu dans trois ans. Pour séduire, il faut beaucoup investir en contenus.

Miser sur des franchises très populaires

Pour continuer à attirer des abonnés, l'entreprise californienne mise sur plusieurs franchises très
populaires. En 2022 sortiront notamment deux séries dérivées de l'univers de Star Wars. « Obi-Wan
Kenobi » reviendra sur l'enfance de Luke Skywalker sur la planète Tatooine, tandis qu'« Andor » se
déroulera cinq ans avant les événements narrés dans le film « Rogue One ». Deux séries viennent
compléter univers cinématographique Marvel avec deux super-héroïnes, « Ms. Marvel » et « She-Hulk
», une version féminine du géant vert à la force surnaturelle.

Le groupe vise toujours entre 230 et 260 millions d'abonnés à son service Disney+ d'ici à la fin de l'année
fiscale 2024, soit davantage que le nombre d'abonnés à Netflix aujourd'hui. Aux Etats-Unis, Disney
mise notamment sur son offre à 13 dollars qui combine des abonnements à Disney+, Hulu (un autre

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service de streaming plus généraliste) et ESPN+, qui permet d'assister à des événements sportifs en
direct.

L'année dernière, Disney a bénéficié du succès de plusieurs films, dont « Spider Man : No Way Home
», qui a rapporté 1,77 milliard de dollars au box-office depuis sa sortie mi-décembre. Les dessins animés
« Encanto » et « Luca » ont, eux aussi, attiré un large public. Et la nouvelle version de la comédie
musicale « West Side Story », filmée par Steven Spielberg, ainsi que le thriller « Nightmare Alley » ont
tous les deux été nominés aux Oscars. Ils ont cependant déçu au box-office et Bob Chapek a laissé
entendre que pour certains genres de films, créer de la valeur ne passait pas forcément par la salle.

Innovation technologique

Les visiteurs sont enfin de retour dans les parcs après la pandémie, même si les voyageurs internationaux
manquent à l'appel. Pendant les trois derniers mois, ses parcs d'attractions ont rapporté 2,45 milliards de
dollars de résultat opérationnel, notamment parce que les dépenses par personne ont augmenté. En 2020,
ces parcs étaient déficitaires. Disney mise sur l'innovation technologique pour remplir ses parcs, ont
expliqué ses dirigeants. Le groupe a notamment déployé le service Genie+ qui, en payant davantage,
permet d'éviter les queues devant les attractions.

Pour préparer l'avenir, Bob Chapek a déclaré que le métavers - ou en tout cas un « mélange des mondes
physiques et numériques » - était parmi ses priorités absolues. « A l'avenir, l'expérience Disney sera
moins passive […], qu'il s'agisse de sports ou de divertissement, et deviendra plutôt une expérience
interactive, où les usagers joueront un rôle actif », a-t-il expliqué aux analystes.

La concurrence dans le streaming se resserre, Disney+ en


boulet de canon
11 février 2022 / Le Mauricien

La concurrence s’intensifie dans l’univers de la vidéo en ligne par abonnement, avec Disney qui compte
désormais 130 millions d’abonnés à sa plateforme de streaming et fait plus que jamais figure
d’épouvantail pour Netflix, dont la croissance s’essouffle.

Parmi les derniers grands acteurs du secteur à publier ses résultats, Disney+ a annoncé mercredi avoir
gagné 11,7 millions d’abonnés durant les trois derniers mois de 2021. Globalement, les résultats de
l’empire du divertissement « en disent beaucoup sur les marques fortes de Disney et sa capacité à
s’élever au-dessus de la concurrence sur un marché des médias numériques de plus en plus encombré »,
a commenté Paul Verna, analyste pour le cabinet Insider Intelligence.

Le chiffre de Disney tranche avec Netflix. Le vétéran a quasiment le double d’abonnés, mais n’a gagné
que 8,2 millions de comptes payants sur la période, pour finir l’année à 221 millions. « Disney est parti
pour donner du fil à retordre à Netflix », prévient Tuna Amobi, analyste au sein du cabinet CFRA. « Ils
sont sur une trajectoire plus rapide et ce n’est pas surprenant. (…) Disney possède une énorme réserve
de contenus, des noms reconnus et des franchises mondiales ».

Lancé en novembre 2019, il y a à peine plus de deux ans, Disney+ joue tout sur la croissance, et ne vise
l’équilibre qu’en 2024. Disney prévoit de consacrer une enveloppe de 22 milliards de dollars à ses
contenus (hors sport) en 2022, avec des séries en pagaille et plus d’un nouveau film par semaine dans
les tuyaux. Et même si le service gagne encore beaucoup d’abonnés aux Etats-Unis, à la différence de
Netflix qui a déjà quasiment saturé le marché, la bataille se joue aujourd’hui à l’international, où le
nombre de comptes payants a cru de 40% en un an.

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Un gâteau qui grossit

A l’instar d’Amazon Prime Video, Disney suit le modèle de Netflix et a mis en chantier pas moins de
340 programmes originaux produits hors des Etats-Unis, qui devraient être disponibles d’ici un an et
demi à deux ans, a indiqué mercredi le PDG Bob Chapek.

« Nous venons juste de créer une nouvelle entité pour orienter le développement de ce contenu, pour
maximiser les chances d’avoir un succès mondial », a expliqué le dirigeant. Déjà détenteur d’un
catalogue sans équivalent, avec Marvel, Pixar ou Star Wars, Disney rêve d’un hit étranger à la « Squid
Game ».

Le géant de Burbank (Californie) n’est aujourd’hui présent que dans environ 60 pays, contre plus de
190 pour Netflix, mais ambitionne d’en ajouter 100 de plus d’ici 2023. « C’est là que vous verrez les
chiffres d’abonnement à niveau » par rapport à Netflix, anticipe Tuna Amobi.

Symbole de cette lutte acharnée pour conquérir de nouveaux territoires, l’Inde, où Netflix, Disney et
Amazon jouent des coudes pour tenter de capter une part de ce marché qui ne comptait encore l’an
dernier que 70 à 80 millions d’abonnés payants à un service de vidéo en ligne, dans un pays de 1,4
milliard d’habitants.

Netflix n’a pas hésité à y baisser ses prix, fin décembre, pour rester compétitif, à contre-courant de sa
politique tarifaire actuelle, tandis que Disney s’appuie sur sa filiale Hotstar, leader du marché indien
mais dont les revenus par abonné sont inférieurs de plus de 80% aux autres pays d’implantation de
Disney+.

Même s’ils comptent aujourd’hui 27 millions d’abonnés hors des Etats-Unis (73,8 au total), HBO et son
service HBO Max ne semblent pas disposer de la même puissance de feu. Leur mariage programmé
avec Discovery, sa plateforme Discovery+ et ses 20 millions de comptes, qui sera finalisé au printemps,
devrait transformer le groupe.

Quant à Paramount+ (47 millions d’abonnés) ou Peacock (24,5 millions d’utilisateurs, tous aux Etats-
Unis), voire même Apple TV+ (20 millions), ils ne sont, pour l’heure, que des seconds couteaux.

« Si vous n’avez pas les ressources pour financer les investissements en contenu, ça va être très difficile
de concurrencer les Disney+, Netflix et Amazon », estime Tuna Amobi.

Pour autant, « l’idée est plus pour chaque plateforme de prendre une part correcte d’un gâteau qui grossit
», explique l’analyste. Le cabinet Digital TV Research estime que les services de vidéo en ligne auront
1,7 milliard d’abonnés dans le monde en 2026, dont 910 millions pour les cinq principales plateformes
américaines.

« Il y a plus de concurrence qu’il n’y en a jamais eu », a admis le co-directeur général de Netflix, Reed
Hastings, au moment de la présentation des résultats du groupe, mi-janvier. « Mais nous avons Hulu et
Amazon (comme concurrents) depuis 14 ans. »

Pour lui, à mesure que la télévision traditionnelle disparaît, « d’ici 10 à 20 ans », « le streaming va
devenir tout le divertissement ».

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Thomas Follin : « Salto est une plateforme française
populaire »
10 février 2022 / L'Opinion

« MyTF1 et 6play répondent aux attentes traditionnelles ; nous, chez Salto, répondons aux nouvelles
attentes », assure le directeur général de Salto

Pourquoi TF1 et M6 s’appuieraient-ils sur Salto pour lancer une grande plateforme de streaming ? Salto
est le véhicule le plus avancé aujourd’hui. Notre plateforme, âgée de moins de deux ans, a fait une percée
remarquable. Selon le dernier baromètre NPA Conseil, réalisé avec Harris Interactive, Salto a fait la 3e
meilleure croissance de l'année au sein des plateformes en 2021. Nous sommes même devant Netflix en
termes de croissance sur le marché, et sur le dernier trimestre nous sommes en pleine accélération. Il va
donc falloir compter avec Salto. Nous nous inscrivons dans la trajectoire que nous nous étions fixée,
avec notamment près de 30 heures de visionnage en moyenne par abonné et par mois. Mais vous n'êtes
pas très connus... Notre notoriété n’a cessé de grandir. Plus de 75% de la population connaît aujourd’hui
Salto (baromètre Ifop pour Salto). Nous sommes une marque. Nous avons trouvé notre place sur
l’ensemble du marché, et notre croissance est dynamique. D’ailleurs toutes ces performances ont lieu
dans l’OTT (Over The Top, c’est-à-dire un service de streaming qui ne passe pas par la box), notamment
grâce au jeune public. Salto d’ailleurs, c’est 60% de consommateurs âgés de moins de 35 ans. La
majorité des consommateurs cumule plusieurs abonnements. Dans un rapport récent, le CNC présente
des chiffres différents qui ne sont pas tout à fait à votre avantage. En taux d’abonnement par foyer, Salto
arrive bon dernier derrière Netflix (52,1 %), Amazon Prime Video (34,1 %), Disney+ (23,8 %), Canal
+ (21,5 %), OCS (9 %) et Ciné + (6,9 %). En pourcentage d’utilisateurs, vous êtes 11e du classement, à
8,6% ! Cette étude du CNC compare des choux et des carottes. On ne peut pas comparer Salto avec de
la vidéo à la demande (VoD), ou de la vidéo avec abonnement. Aujourd’hui, ce qui est pertinent, c’est
de comparer Salto, qui est une plateforme, avec d’autres plateformes. C’est-à-dire Netflix, Amazon et
AppleTV. Point. Techniquement, comment fonctionnez-vous ? On s’appuie sur Bedrock streaming,
basé à Lyon, qui est un facteur clé de notre succès. Pas de bug, elle fonctionne extrêmement bien. Devant
les parlementaires, Thomas Rabe a évoqué des synergies possibles pour créer un champion européen du
streaming... Il existe plusieurs plateformes qui fonctionnent déjà bien dans plusieurs pays européens, je
pense notamment à Vidéoland, le numéro 2 hollandais du streaming. On peut très bien imaginer dans
les années à venir une mutualisation des coûts et des innovations afin de gagner en puissance de frappe.
On peut faire des synergies avec l’Allemagne sur des coproductions. Les synergies sont possibles sur
les algorithmes en termes de data, technologiquement, ou encore sur les achats que vous signez avec un
hébergeur. Les sites de replay MyTF1 ou 6play comptent des millions d’utilisateurs. Si les deux groupes
fusionnaient, n’auraient-ils pas intérêt à en faire leur plateforme de streaming alors que selon les
dernières évaluations vous comptez entre 500 000 et 700 000 abonnés ? Non. On ne fait pas le même
métier ! MyTF1, ce n’est pas un modèle économique de plateforme, c’est le prolongement des antennes.
Nous, chez Salto, nous n’avons pas d’utilisateurs, nous avons des abonnés. TF1 et M6 répondent aux
attentes traditionnelles ; nous, chez Salto, répondons aux nouvelles attentes. Regardez Netflix ou
Amazon, vous n’avez pas de linéaire. Pour TF1 et M6, l’enjeu va maintenant être d’investir de manière
complémentaire. Et pour elles, le meilleur endroit, c’est Salto. Si demain la fusion se réalise, Salto est
la plateforme qui présente tous les atouts. A quelle demande répondez-vous ? Nous sommes la
plateforme française. Nous répondons au public français et à sa demande. En effet, 70 % de la
consommation va vers des produits français : Balthazar, Nina, Sam, Candice Renoir. Or si vous prenez
Netflix, 5 % de la consommation seulement est faite sur des contenus français (source : Médiamétrie).
C’est bien le signe que les Français sont très orientés sur la création française et en attente de produits
français. C’est la raison pour laquelle nous grandissons à côté de grandes plateformes internationales,
sans être en concurrence frontale avec elles. Avec notre abonnement à 6,99 euros, nous sommes une
plateforme française populaire.

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Netflix, Disney+, HBO… : le casse-tête des abonnés volages
10 février 2022 / Les Echos

Un des enjeux les plus intéressants en 2022 pour les opérateurs de vidéo à la demande par abonnement
sera de gérer le public, notamment jeune, qui se désabonne et se réabonne en fonction des programmes.
Dans un contexte de hausse du « churn ».

Disney+ a montré mercredi soir qu'il restait des réserves de croissance sur le marché de la vidéo à la
demande par abonnement (SVoD) à un moment où Wall Street en doutait à la suite des prévisions
décevantes de Netflix fin janvier pour le trimestre en cours. La question n'est pas encore tranchée mais
Duncan Stewart, analyste tech et médias chez Deloitte, estime que « le marché a emmagasiné de la
croissance avec un temps d'avance pendant les confinements et c'est normal qu'il y ait un peu de
ralentissement aujourd'hui ».

Une chose apparaît néanmoins certaine alors que la SVoD surfe beaucoup moins sur la vague des
désabonnements à l'onéreuse télévision payante traditionnelle et atteint une forme de maturité dans
certains pays : le « churn » - ou l'attrition du nombre d'abonnés - va augmenter, autrement dit les services
vont devoir gérer avec attention les désabonnements.

Le cabinet Deloitte prévoit qu'en 2022, « au moins 150 millions de souscriptions à la SVoD vont être
annulées, avec un taux de 'churn' de plus de 30 % dans certains marchés ». C'est beaucoup rapporté au
nombre d'abonnés de 130 millions à Disney+ ou de 222 millions à Netflix. Et rapporté à un coût
marketing d'acquisition d'abonné qui peut aller jusqu'à 200 dollars.

Concurrence

Ce niveau de « churn » - même s'il est moins inquiétant qu'il n'y paraît - s'explique de plusieurs façons.
D'abord par le nombre de ménages abonnés combiné à la richesse des offres parmi lesquelles choisir :
au moins cinq, sans prendre en compte les services de niches. Aux Etats-Unis, marché désormais mature,
80 % des foyers ont accès à la SVoD et le taux de « churn » est de 35 %.

En Europe, le taux d'attrition oscille selon Deloitte entre 7 %, pour la Belgique où 53 % des ménages
ont souscrit à un service de SVoD, et 23 %, pour la Norvège où 75 % des ménages sont abonnés. En
France, le marché de la SVoD (hors bouquet Canal+) a encore progressé de 17 % en 2021, à un peu plus
de 1,5 milliard d'euros en valeur.

Ensuite, il est devenu bien plus facile de se désabonner à ces services souvent sans engagement : deux
ou trois clics suffisent. Enfin, l'inflation, y compris celle de ces services, monte et les budgets des
ménages ne sont pas extensibles, même si « il n'y a pas de corrélation entre les niveaux de 'churn' et de
revenus », explique Duncan Stewart.

Génération Y en pointe

La bonne nouvelle pour les géants de l'audiovisuel reste qu'il y a davantage de gens qui s'abonnent que
de gens qui se désabonnent. La croissance se poursuit donc. Notamment parce qu'un nouveau
phénomène devient de plus en plus prégnant : les désabonnements pour se réabonner plus tard. Une
tendance très liée à l'âge. « Quelque 6 % des baby-boomers le pratiquent et 47 % des membres de la
génération Y », précise Duncan Stewart. Ces sériephiles ou cinéphiles arbitrent leurs abonnements en
fonction des programmes du moment.

Les plateformes vont devoir prendre en compte cette tendance - et pas en rendant plus difficiles les
désabonnements, car cela peut se retourner contre eux. Mieux vaut bien communiquer sur les

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programmes à venir pour susciter un réabonnement ou éviter un désabonnement, ou mieux distiller leurs
sorties au cours de l'année.

Un segment AVoD ?

L'arme absolue contre le « churn » est en effet la programmation. Pour soutenir son développement en
Europe de l'Est, HBO Max vient par exemple de signer avec Sony pour pouvoir proposer « Spider-Man
» et « SOS Fantômes : L'Héritage ». Mais les plateformes peuvent difficilement aller au-delà de 15 à 20
milliards de dollars de dépenses annuelles, sous peine de fragiliser leur modèle économique.

Deloitte envisage deux autres remèdes contre l'attrition. Offrir ses programmes ou une partie d'entre eux
dans un bouquet, par exemple via un distributeur. De fait, Canal+ estime qu'il réduit son « churn » en
agrégeant à ses propres contenus Netflix et Disney+ (en plus de proposer des offres avec des
engagements jusqu'à vingt-quatre mois en échange d'une promotion tarifaire). Dans une stratégie de
segmentation des offres, Deloitte estime aussi que beaucoup d'opérateurs de SVoD vont ouvrir une
option gratuite financée par la publicité (AVoD).

Piratage de films et de séries : les nouvelles techniques


9 février 2022 / COMMAR

Alors que le partage en peer-to-peer est délaissé, le téléchargement en "direct download" et le visionnage
en streaming de contenus piratés gagnent en popularité, grâce aux réseaux sociaux et aux messageries
instantanées.

Le téléchargement de torrents n'a pas plus la cote. Alors qu'elle était très prisée il y a encore une dizaine
d'années, cette technique de partage de fichiers en peer-to-peer (P2P pour les intimes ou pair-à-pair en
français) n'a plus les faveurs des amateurs de contenus piratés. Il faut dire que sous la pression des ayants
droit, l'Hadopi – qui a récemment fusionné avec le CSA pour devenir l'Arcom – a mené une longue
bataille pour bloquer les sites proposant des liens de téléchargement tout en traquant les gros
consommateurs à grands renforts d'avertissements et, parfois, de sanctions.

Désormais, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique se concentre sur


d'autres cibles et techniques, en particulier sur l'IPTV et le streaming illégal, comme en témoigne le
récent blocage de sites pirates imposé aux fournisseurs d'accès à Internet (FAI) par le régulateur. Une
mesure réclamée – et acclamée – par les chaînes TV spécialisées dans le sport, qui se voyaient privés
des revenus substantiels générés par ce spectacle populaire et qui augure une lutte sans pitié contre les
diffuseurs "alternatifs". Mais, comme souvent, les pirates ont plusieurs longueurs d'avance sur les
autorités, et il existe toujours de nombreux moyens pour contourner les blocages et profiter illégalement
de toutes sortes de contenus, aussi bien en téléchargement qu'en streaming. Et, le plus étonnant, c'est
que beaucoup les partagent – souvent naïvement – sur les réseaux sociaux et les messageries
instantanées…

Direct Download : le téléchargement facile

L'une des techniques les plus prisées par les amateurs de contenus piratés reste le Direct Download.
Cette technique de téléchargement direct permet en effet de récupérer facilement des fichiers complets
– pesant parfois plusieurs giga-octets – sur des services de dépôt (comme Uploaded, Rapidgator,
1fichier.com, Turbobit, etc.) à des vitesses variables. À condition, bien entendu, d'avoir les liens
correspondants. Et c'est justement ce que proposent des sites de référencement. Le plus connu en France
a longtemps été Zone Téléchargement, qui était même devenu l'un des sites les plus populaires dans
l'Hexagone. Mais il en existe beaucoup d'autres, comme WawaCity, Libertyland, Zone-Annuaire, Free-
Telecharger, Zone-Mania ou DownMagaz.

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Tous fonctionnent peu ou prou sur le même principe. Stricto sensu, ces plateformes n'hébergent aucun
fichier protégé par des droits d'auteur. Mais elles fournissent tous les moyens pour se procurer des films,
des albums de musique, des jeux vidéo, des logiciels, des livres ou des magazines en proposant des liens
pour les récupérer sur des services de téléchargement direct – ou pour regarder des vidéos en streaming.
Et même s'il faut souvent jongler avec des pages de publicité souvent douteuses et des captchas,
l'opération s'avère assez simple, y compris pour des non-initiés – ce qui n'est pas le cas de certaines
méthodes de téléchargement, réservées à des experts – et quelques minutes suffisent généralement pour
récupérer un film du box-office en qualité standard, un jeu à la mode ou le journal du jour, sans rien
payer, évidemment… Bref, des sortes de supermarchés sans caisse.

Seulement, voilà : le plus difficile n'est pas de les utiliser, mais de les trouver. Car pour échapper aux
poursuites judiciaires, aux mesures de déréférencement des moteurs de recherche comme Google et aux
blocages des FAI, les sites de téléchargement illégal sont désormais contraints de déménager
régulièrement. Et alors qu'elles avaient pratiquement pignon sur rue il y a encore quelques années, ces
plateformes jouent désormais à cache-cache sur le Web, en changeant fréquemment d'URL. Et beaucoup
doivent faire face à l'apparition de clones plus ou moins bien réalisés qui profitent de leur "notoriété"
pour attirer les amateurs de contenus piratés : une guerre des clones qui participe à la confusion générale,
s'ajoutant aux changements d'adresse perpétuels et aux risques encourus en termes de sécurité, et incitant
nombre d'utilisateurs à se tourner vers des solutions payantes mais légales et sûres. Et pour éviter de
voir leurs fidèles fuir, ces sites n'hésitent pas à orienter vers des pages annexes où elles référencent leurs
nouvelles URL tout en signalant les – vilains – copieurs qui usurpent leur nom et en indiquant les
méthodes pour échapper aux blocages et aux radars.

Streaming gratuit : des services en accès libre

Si le téléchargement a toujours ses adeptes, beaucoup préfèrent aujourd'hui se tourner vers le streaming
pour regarder des vidéos en direct, sans les stocker. Il faut dire que le déploiement du très haut débit –
fibre optique, 4G et 5G – favorise cette pratique de consommation instantanée, tout comme le
développement des services de SVOD légaux, tels Netflix, Disney+ ou Amazon Prime Video, désormais
bien entrés dans les mœurs. Et là encore, malgré les efforts des moteurs de recherche, des ayants droits,
des FAI et des autorités de régulation, les plateformes illégales pullulent. Sans même parler des sites
étrangers, il existe des dizaines de plateformes en accès libre proposant des séries et des films en
streaming gratuit, en français comme en VOST (version originale sous-titrée), tels 01streaming, HDSS,
Streamdeouf, French-Stream, Wiflix, Coflix, Filmcomplet, CPasMal, FilmsRip, VoirSeries, Cinezzz,
DuStreaming, Serie.zone, Papdustream ou encore VostFree pour n'en citer qu'une poignée.

Réalisés souvent de façon artisanale, tous ces sites permettent de regarder facilement des films et des
séries directement dans un navigateur Web, sans nécessiter d'installation de logiciel ni d'inscription.
Pour les amateurs de la pratique, leur utilisation est enfantine. Sauf que ces plateformes parfaitement
illégales souffrent des mêmes problèmes que les "services" de téléchargement direct : elles doivent elles
aussi changer régulièrement d'adresse pour contourner les blocages et les déréférencements, tout en
luttant contre la multiplication des clones sauvages et autres imitations. Là encore, c'est la guerre
"fratricide", et un parcours du combattant pour les utilisateurs.

Blogs, réseaux sociaux, messageries… Les pistes pour trouver les sites pirates

Parallèlement à la multiplication de ces sites, une communication souterraine s'est développée au fil des
ans pour aider les amateurs de téléchargement pirate et de streaming gratuit à suivre ou à retrouver leurs
plateformes préférées et à en découvrir de nouvelles. En plus de sites personnels, des blogs et des forums
qui recensent ces services illégaux, de nouvelles méthodes apparaissent depuis quelques temps pour
faire leur promotion sur les réseaux sociaux et les messageries. Sur TikTok, on voit de plus en plus de
vidéos – généralement réalisées par des adolescents enthousiastes et inconscients – qui n'hésitent pas à
montrer comment regarder gratuitement des films et des séries en streaming "gratuit". Sur Discord, ce
sont des salons de discussion très spécialisés qui donnent les adresses des sites. Et sur Telegram, la

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messagerie préférée des trafiquants en tout genre, il suffit de lancer une recherche avec quelques mots
clés bien choisis pour trouver des sources. Même sans aller jusqu'à cet outil particulier, une requête dans
Google avec des termes comme BDrip, HDrip, 1080p ou VOSTF donne déjà de nombreuses pistes, en
dépit des mesures prises par le moteur de recherche…

Que ce soit grâce à TikTok, Discord ou Google, on tombe ainsi assez facilement sur des sites qui
proposent des contenus piratés en téléchargement ou en streaming, certains faisant même office de
catalogues avec des outils de recherche et des classements par genre, par année, par plateforme d'origine
(séries Netflix ou Amazon Prime Video, films Marvel ou Disney, etc.). Certes, il faut souvent se battre
contre les innombrables fenêtres de publicités qui envahissent l'écran, passer des captchas et éviter les
téléchargements douteux – et trompeurs – qui peuvent installer des malwares, mais les manipulations
restent assez simples, à la portée des novices et des plus jeunes. Et le tout, aux yeux de tous, en parfaite
illégalité.

VPN et DNS : les techniques pour contourner les blocages

Au-delà de la recherche d'adresses valables, le problème qui se pose souvent vient des différents
blocages mis en place par les FAI, quand ils ont été saisis par les autorités. Et du risque de se faire
repérer par les autorités. Qu'à cela ne tienne : la plupart des sites illégaux indiquent la marche à suivre
pour contourner les limitations et la surveillance, notamment en changeant de DNS et en installant un
VPN. Des techniques simples et parfaitement légales, elles, qui permettent aux amateurs de profiter de
contenus piratés en toute tranquillité. Les éditeurs de VPN ne s'y sont d'ailleurs pas trompés, en
soulignant discrètement ces avantages – bien réels – dans leur communication.

La question se pose alors sur l'efficacité des moyens mis en place et des mesures prises par des
organismes comme l'Arcom pour lutter contre ce "sport", surtout quand on voit comment il est promu
sur des réseaux sociaux très grand public. Ainsi, même s'il est symboliquement fort, le récent blocage
d'une trentaine de sites de streaming qui diffusent du sport en streaming n'empêche nullement d'y
accéder en France, en changeant de serveur DNS ou en passant par un VPN. Entre la facilité d'utilisation,
les augmentations de prix qui se profilent chez certains fournisseurs de SVOD et les innombrables voies
détournées pour accéder aux sites pirates, il n'est pas certain que la pratique cesse de sitôt…

Les Jeux olympiques d’hiver 2022 remportent la médaille


d’or du nombre de téléspectateurs en streaming, et de
l’engagement social
9 février 2022 / Business Wire

Les nouvelles données de Conviva révèlent un pic de streaming de 349 % pour la journée de la
cérémonie d’ouverture 2022 ; Team USA mène le monde sur les réseaux sociaux

FOSTER CITY, Californie - (BUSINESS WIRE) - Rien ne place davantage les Jeux olympiques au
centre de la scène mondiale comme la cérémonie d’ouverture ; et cette année, des millions de personnes
ont suivi l’événement en streaming, contribuant ainsi à une augmentation de 349 % du nombre de
téléspectateurs en streaming, par rapport à la journée de la cérémonie d’ouverture de 2018, d’après les
nouvelles données de Conviva, la plateforme de mesure en continu des médias diffusés en streaming.
71 % des téléspectateurs en streaming ont été mesurés lors des deux heures correspondant au milieu de
la cérémonie, en grande partie du fait de la brièveté de l’événement cette année.

« Les Jeux olympiques d’hiver 2022 sont prépondérants pour le visionnage en streaming, à la fois le
jour même de l’événement, et dans les deux semaines qui suivent, lorsque les spectateurs se joignent
aux programmes aux moments où cela leur convient le mieux », a déclaré Keith Zubchevich, président

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et chef de la direction, chez Conviva. « La bonne nouvelle, c’est que la qualité et la technologie du
streaming répondent à cette demande, faisant du streaming la méthode préférable pour vivre un
événement en direct. »

Qualités mixtes ; surprise des appareils

La qualité de la diffusion en streaming de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques d’hiver 2022
a connu des améliorations dans de nombreux domaines, avec une baisse de 4 % des échecs au démarrage,
et une qualité d’image 2 % plus élevée sur le jour de la cérémonie d’ouverture, par rapport à un vendredi
habituel. Ceci étant dit, les temps de départ et la mise en mémoire tampon ont continué de poser des
difficultés.

Les tablettes ont représenté 28 % des appareils de diffusion pour la cérémonie d’ouverture, ce qui est
surprenant si on compare ce chiffre aux données de Conviva indiquant que les tablettes ne comptaient
que pour 5 % du temps de visionnage dans le monde entier, au 4e trimestre 2021. Les grands écrans, qui
comprennent les smart TV, les appareils de télévision connectés, et les consoles de jeu, représentaient
près de la moitié du temps de visionnage de la cérémonie d’ouverture.

Un engagement social qui correspond au pic de streaming

L’engagement social a reflété l’explosion du streaming pour les Jeux olympiques d’hiver 2022, avec
une hausse de 370 % de l’activité des comptes officiels du comité olympique de plus de 120 pays, par
rapport aux six semaines qui ont précédé les Jeux. Twitter était en tête de toutes les plateformes sociales,
en volume de contenu posté, à hauteur de 37 %, tandis qu’Instagram a fourni le public le plus impliqué
avec 66 % de tous les engagements pour les comptes du comité olympique dans la semaine qui précédait
les Jeux olympiques d’hiver.

Team USA a eu le post le plus performant sur Facebook jusqu’à présent, avec son billet mettant en
valeur la première femme des minorités indigènes à jouer pour l’équipe américaine de hockey, ainsi que
le premier post sur Twitter qui célébrait la performance du patineur artistique Nathan Chen.

Méthodologie

Les données du rapport sur les Jeux olympiques d’hiver 2022, de Conviva ont été principalement
collectées grâce à la technologie de capteur de flux, exclusive de Conviva, actuellement embarquée dans
près de 4 milliards d’applications de streaming vidéo. Elle permet de mesurer plus de 500 millions de
spectateurs uniques regardant 200 milliards de flux par an, avec près de trois billions de transactions en
temps réel, par jour, dans plus de 180 pays. Le rapport inclut des données de la base d’éditeurs, de
Conviva, collectées le 4 février 2022, la date de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques d’hiver
2022, à la fois à l’échelle mondiale et en incluant uniquement les éditeurs diffusant les Jeux olympiques
en streaming. Les comparaisons des données comprennent les références mondiales des 90 jours
précédents, ainsi que la cérémonie d’ouverture des Jeux de 2018. Les données des médias sociaux sont
constituées des données de TikTok, collectées le 4 février 2022, ainsi que de Facebook, Instagram,
Twitter et YouTube, collectées à partir de la plateforme Social Insights de Conviva - Comité olympique,
qui incluait plus de 170 comptes, 21 000 posts, et plus de 13 millions d’engagements entre le 18
décembre 2021, et le 4 février 2022.

*À propos de Conviva
Conviva est la plateforme de recensement, de mesure continue et d’engagement pour le streaming multimédia. Alimentée par nos solutions
brevetées Stream Sensor™ et Stream ID™, notre plateforme en temps réel permet aux spécialistes du marketing, aux annonceurs, aux
opérateurs techniques, ainsi qu’aux équipes d’ingénierie et de service à la clientèle de créer, d’engager et de monétiser leurs publics. Conviva
se consacre à soutenir des marques telles que CCTV, DAZN, Disney+, Hulu, Paramount+, Peacock, Sky, Sling TV, TED et WarnerMedia qui
sont en train de dynamiser l’incroyable opportunité que représente le streaming multimédia. Aujourd’hui, notre plateforme traite près de 3
000 milliards d’événements de données de streaming par jour, prenant en charge plus de 500 millions de spectateurs uniques regardant 200
milliards de flux par an, diffusés en streaming sur des appareils par le biais de 4 milliards d’applications. Conviva garantit que les entreprises
numériques de toutes tailles peuvent proposer un meilleur streaming, et ce pour chaque flux, sur chaque écran, chaque seconde. Pour en savoir
plus, consultez le site www.conviva.com.

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Un coproducteur poursuit Warner Bros pour la sortie du
dernier "Matrix" en streaming
8 février 2022 / Le Temps Online

Cette plainte de Village Roadshow Entertainment est le dernier épisode en date d'une controverse
opposant les professionnels du cinéma et les géants du divertissement

Un des coproducteurs du dernier volet de la saga Matrix a porté plainte pour violation de contrat contre
les studios Warner Bros, auxquels il reproche d'avoir diffusé le film en streaming en même temps que
sa sortie en salles.

Cette plainte déposée à Los Angeles par le groupe Village Roadshow Entertainment est le dernier
épisode en date d'une controverse opposant les professionnels du cinéma qui tirent une grande partie de
leurs revenus des tickets de cinéma et les géants du divertissement qui cherchent désespérément à
développer leurs plateformes de vidéo à la demande pour plaire aux marchés financiers et aux
actionnaires.

L'an dernier, la star des films Marvel Scarlett Johansson avait publiquement pris à partie Disney qui
avait choisi de sortir Black Widow simultanément au cinéma et sur Disney +. L'actrice avait par contrat
droit à un pourcentage sur les recettes en salles et estimait dans une plainte avoir subi un manque à
gagner de plusieurs millions de dollars. Les deux parties ont depuis lors conclu un accord à l'amiable.

Les retombées de Village Roadshow décimées

Alors que l'industrie du cinéma subissait de plein fouet les restrictions sanitaires liées à la pandémie de
coronavirus, WarnerMedia, maison-mère des studios Warner Bros, avait décidé de diffuser l'intégralité
des sorties 2021 sur sa plateforme HBO Max. Ils s'étaient notamment attiré la colère du réalisateur de
Dune, Denis Villeneuve, qui estimait que cela risquait de "tuer" son film et constituait "une menace pour
le cinéma en général".

La plainte déposée affirme que la sortie de The Matrix Resurrections sur HBO Max était destinée
uniquement à doper les abonnements de ce service avant la fin de l'année, selon le Wall Street Journal.
Et cela "en dépit du fait que cela décimerait les recettes du film au box-office et que cela priverait Village
Roadshow des mêmes retombées économiques que Warner Bros et ses affiliés", accuse la plainte.

The Matrix Resurrections est le quatrième volet de la saga de science-fiction mettant en scène Keanu
Reeves. Début février, il avait engrangé environ 37 millions de dollars (32,37 millions d'euros) aux
Etats-Unis et au Canada, contre 172 millions (150,48 millions d'euros) à l'époque pour le premier Matrix.

Médias : clap de fin pour YouTube Originals


3 février 2022 / AIAC

Après six ans de bons et loyaux services, YouTube a décidé d’abandonner YouTube Originals, sa
division dédiée à la production de contenu original, notamment de séries scénarisées, de vidéos
éducatives ou encore de programmes sur la musique et les célébrités.

La nouvelle a été annoncée sur Twitter par Robert Kyncl, le directeur commercial de YouTube. Il
explique notamment cette décision par le succès du Partner Program de l’entreprise, c’est-à-dire son
programme de partage de revenus publicitaires, qui compte désormais plus de deux millions de
participants. « Nos investissements peuvent désormais avoir un impact plus important sur un nombre
encore plus grand de créateurs lorsqu'ils sont appliqués à d'autres initiatives », écrit-il.

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Par ailleurs, le départ de l’entreprise de Susanne Daniels, dirigeante de YouTube Originals, a également
joué dans la balance. Elle quittera son poste le 1er mars 2022. Quasiment tous les contenus d’Originals
vont ainsi toucher à leur terme, Robert Kyncl précise néanmoins que le YouTube Kids Fund et le Black
Voices Fund, un programme créé en 2020 pour « amplifier » les créateurs noirs sur la plateforme,
continueront d’être financés.

« Nous honorerons notre engagement pour les émissions déjà contractées en cours et les créateurs qui
sont impliqués dans ces émissions doivent s'attendre à recevoir des nouvelles de notre part directement
dans les jours à venir », continue Kyncl.

Pas vraiment une success story

Fondé en 2016, YouTube Originals avait au départ l’intention de venir concurrencer Netflix dans le
secteur du streaming. Le service était payant et proposait des émissions et des films scénarisés axés sur
les créateurs. Par la suite, il a changé d’axe en s’orientant vers les contenus financés par la publicité
mettant en scène des célébrités, auxquels les utilisateurs peuvent accéder gratuitement sans abonnement.

Si certaines productions ont plutôt bien marché, à l’instar de Cobra Kai désormais sur Netflix ou encore
de la série documentaire sur Justin Bieber baptisée Seasons, force est de constater qu’aucun énorme hit
n’est sorti du programme. Stratégiquement parlant, il est également intéressant de se demander ce que
YouTube Originals apportait réellement à l’entreprise, YouTube étant d’ores et déjà la plateforme de
streaming vidéo la plus populaire au monde.

YouTube suit la tendance

Robert Kyncl affirme que YouTube va davantage se concentrer sur Shorts et sur le live shopping. Si
l’on ignore encore les chiffres concernant les courtes vidéos made in YouTube, force est de constater
que l’entreprise choisit son camp et suit les traces de TikTok, dont le succès mondial est phénoménal.

TÉLÉS CONTRE PLATEFORMES UN GRAND PAS


DANS LE PAF ?
2 février 2022 / CB News

APRÈS AVOIR FAIT MAIN BASSE SUR LA FICTION, LES PLATEFORMES


S'ATTAQUENT AU SPORT ET AU DIVERTISSEMENT. NETFLIX AND CO VONT-ILS
SUBMERGER LES TÉLÉS LINÉAIRES ? UNE FUSION ENTRE TF1 ET M6
CONSTITUERAIT-ELLE UNE DIGUE EFFICACE ? ÉLÉMENTS DE RÉPONSE.

Qui aurait parié il y a un an qu'il faudrait s'abonner à Amazon Prime Video pour regarder les matchs de
foot de Ligue 1 ? Après des années de domination de Canal+ sur la retransmission du sport roi, ce n'est
pas la chaîne cryptée, pas plus que beIN Sports ou RMC Sport, qui ont raflé les droits du foot français
(Ligue 1 et 2) mais le géant du e-commerce pour environ 260 millions d'euros par an. Et ce n'est pas fini
: Netflix comme Amazon Prime diffusent des shows d'humoristes et d'autres spectacles, ainsi que des
documentaires.

Que va-t-il rester aux télés linéaires si ce phénomène s'accentue ? TF1, France TV et M6 ont réagi en
octobre 2020 en lançant Salto, plateforme SVOD made in France. Mais après un peu plus d'un an
d'existence, elle n'aurait séduit que 700 000 abonnés selon Delphine Ernotte, présidente de France
Télévisions. Un chiffre sujet à caution car dans son calcul, France Télévisions mélangeant les abonnés
payants et ceux qui bénéficient du mois d'essai gratuit. Pas de quoi inquiéter Netflix et ses sept millions
d'abonnés payants. Sans compter l'arrivée en France en 2023 d'HBO Max (WarnerMedia) et ses contenus

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à succès tels que « House of The Dragon », le prequel de « Game of Thrones », ou les films Warner
comme « The Batman ».

Comment les chaînes historiques peuvent-elles répliquer à cette offensive made in USA ? Surtout dans
un contexte réglementaire compliqué, avec la chronologie des médias qui régit les dates auxquelles les
films peuvent être diffusés dans les mois qui suivent leur sortie au cinéma. En décembre, Canal +, grand
argentier du cinéma français, a signé un accord avec les organisations représentatives du cinéma qui lui
permettra, contre un investissement de 190 millions d'euros par an durant les trois prochaines années,
de diffuser les films 6 mois après leur sortie en salles (au lieu de 12 jusqu'en 2018), et 22 mois pour les
télés linéaires (avec exclusivité de la diffusion jusqu'au 36e mois). Pour les plateformes SVOD, une
diffusion sera possible 15 mois après la sortie en salle contre 36 auparavant suite à la signature d'un
accord le 24 janvier entre chaînes de télévision, plateformes de streaming, organisations du cinéma et
le ministère de la Culture.

LE DINOSAURE DU MARCHÉ

« Cet accord est une première étape significative de modernisation de la chronologie des médias. Il
reflète notre approche constructive tout au long du processus de négociation et notre engagement à
contribuer au cinéma français », se félicite un porte-parole de Netflix, qui s'engage à produire au moins
dix films par an et à investir en moyenne 40 millions d'euros (soit 4 % de son chiffre d'affaires réalisé
en France). Disney +, qui renâcle à se soumettre à la chronologie des médias et a menacé d'abandonner
le marché français, et Amazon devront eux attendre 17 mois. Verdict de Caroline Lang, directrice
générale de Warner Bros Télévision France : « la France, c'est le dinosaure du marché ». Bertrand
Nadeau, directeur général d'Omnicom Media Group (OMG), a passé six ans dans le groupe TF1 et
connaît bien ces problématiques, d'autant plus que l'agence média qu'il dirige a pour client Netflix. Pour
lui, cette concurrence entre télés et plateformes concerne trois sujets. D'abord la fiction, qui est la
première raison d'abonnement à ces chaînes de streaming. Pour lui, les télés linéaires ont su réagir en
faisant progresser la qualité de leurs programmes : « les fictions françaises, unitaires ou feuilletonnantes,
ont mangé les séries US. Sur TF1, deux soirées étaient consacrées aux séries américaines, il n'y en a
plus qu'une ». De leur côté, les géants de la SVOD, qui ont commencé avec du “binge watching”, se
mettent eux aussi à feuilletonner, comme avec « Lupin » sur Netflix. Deuxième réaction des chaînes
historiques : une offre digitale délinéarisée plus musclée. « Les UX (expérience utilisateur) sont plus
qualitatives, on peut télécharger les contenus pour les regarder hors réseau et les chaînes ont réalisé des
acquisitions de contenus », décrit Bertrand Nadeau. Illustration avec « HPI » (« Haut Potentiel
Intellectuel »), la série de TF1 avec Audrey Fleurot qui cartonne malgré les Netflix, Amazon Prime
Video et Disney +. Les créations originales de Canal+ séduisent les spectateurs. « Les plateformes ont-
elles “plié le game” sur la fiction ? Je ne crois pas. Même si la DEI (durée d'écoute par individu) repart
un peu à la baisse, le panorama audiovisuel résiste bien », tempère le directeur général d'OMG. C'est
d'ailleurs en raison de cette réponse qualitative des télés que les plateformes s'intéressent à d'autres
thématiques, comme le divertissement et surtout le sport.

UNE FUSION QUI POSE QUESTION

Amazon est entré sur le marché du foot à un coût d'acquisition assez faible selon Bertrand Nadeau, de
260 millions d'euros pour une audience de 1 à 1,4 million d'abonnés au pass Ligue 1 (à comparer au 1,1
million promis par Mediapro avant sa déroute) : « beIN sport avait fait à peu près le même score quand
elle est arrivée sur ce marché, ce qui prouve qu'un acteur hors télé peut faire aussi bien qu'une chaîne ».
Troisième sujet : l'éventuelle fusion de TF1 (TF1, TMC, TFX, TF1 Séries Films, LCI, TV Breizh,
Histoire TV, Ushuaïa TV) et de M6 (M6, W9, 6ter, Paris Première, Téva, Série Club, Gulli, Canal J,
TiJi, MCM, MCM Top, RFM TV) comme réponse à l'offensive des géants du streaming. Un nouvel
acteur de poids qui pèserait 3,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel, cumulerait plus de 40 %
de l'audience télévisuelle et capterait environ 70 % du marché publicitaire de la télévision. Une fusion
qui inquiète les concurrents, au premier chef France Télévisions, les annonceurs, qui craignent des
hausses tarifaires, et les producteurs indépendants. Le Syndicat des producteurs créateurs de

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programmes audiovisuels (SPECT) estime « qu'avec le développement d'un pôle de production comme
une des cinq priorités du projet industriel présenté, c'est toute la filière audiovisuelle qui va être affectée
avec un risque important pour la diversité de la création et pour les 100 000 salariés de la production
audiovisuelle ». Alors qu'on aurait pu penser que la fusion ferait peur au concurrent du duo TF1 M6, les
chaînes concurrentes sont favorables à la fusion, comme l'ont expliqué lundi 24 janvier devant le Sénat,
Delphine Ernotte et Bruno Patino. Pour la présidente de France Télévisions, « si TF1 et M6 pensent
devoir fusionner pour rester en bonne santé, c'est important qu'ils le fassent. On doit défendre le média
télévision dans un monde où l'offre de médias est beaucoup plus large. On a besoin d'avoir des
concurrents privés en bonne santé, parce que si demain on avait des offres privées qui se délitaient […]
c'est tout le média télé qui tomberait et nous avec », entérinant ainsi une union sacrée des acteurs
télévisuels hexagonaux contre les prédateurs américains. Bertrand Nadeau estime qu'en matière
d'acquisition de droits, « joindre ses forces, avec plus de moyens pour acquérir des contenus, voire une
offre digitale fusionnée, c'est effectivement une forme de réponse. Même si, côté usage, ce
rapprochement ne va pas changer grand-chose pour le téléspectateur, ni enrayer la baisse de la DEI ».
Néanmoins, le dirigeant de l'agence média d'Omnicom reste optimiste sur l'avenir des télés françaises
malgré la puissance des streamers made in USA. Seule ombre au tableau selon lui : « TF1 va perdre son
principal concurrent qui l'a forcé à évoluer. Or, le groupe n'a jamais été aussi bon que quand M6 est
devenu plus puissant ». Apparemment le gouvernement n'est pas hostile à ce rapprochement. « Cette
fusion ne m'inquiète pas. Nous avons besoin de groupes forts dans l'audiovisuel privé qui assurent des
programmes gratuits de qualité », a déclaré la ministre de la Culture Roselyne Bachelot en août.

« LA FUSION DE LA PUBLICITÉ DIGITALE ET TÉLÉVISÉE ? TF1 ET M6 Y SONT


FAVORABLES, CELA RÉDUIRAIT LEUR POIDS DANS UN NOUVEAU MARCHÉ
ÉLARGI. »

UNE MENACE SUR LA CRÉATION AUDIOVISUELLE

De son côté, Roch-Olivier Maistre, président de l'Arcom (l'organisme fruit de la fusion du CSA et
d'Hadopi), décrit le mariage des deux groupes télévisuels comme « un de ses dossiers majeurs » à traiter.
« TF1 et M6 détiennent aujourd'hui dix autorisations pour émettre dix chaînes de télévision. La loi ne
permet d'en avoir que sept. Quelles sont les chaînes qui seront remises sur le marché ? À qui seront-elles
vendues ? Il y a toute une série de critères que nous aurons à regarder », a-t-il déclaré sur Europe 1 le 7
janvier.

L'Autorité de la Concurrence, par la voix de Benoît Cœuré, futur président en remplacement d'Isabelle
de Silva (qui avait exprimé « de sérieuses réserves » à cette fusion), s'est prononcée le 12 janvier : «
c'est une opération qui ne va pas de soi quand on regarde les parts de marché potentielles du nouvel
ensemble, notamment sur le marché publicitaire », a-t-il déclaré devant les parlementaires.

Avec toujours en suspens la question du « marché pertinent » de la publicité : faut-il fusionner la


publicité digitale et la publicité télévisée ? TF1 et M6 y sont favorables, car cela réduirait leur poids
dans un nouveau marché élargi. Quels sont les arguments des deux protagonistes ? Ara Aprikian,
directeur général adjoint contenus du Groupe TF1, évoque une menace sur l'information et la création
audiovisuelle française. Pour lui, il convient de prendre en compte la force de cette offensive permise
par le développement du numérique et de l'OTT (Over-the-top ou service par contournement) « qui est
massive et hybride, et qui nous attaque triplement. D'abord, en disruptant le marché publicitaire vidéo,
notre source de revenus essentielle. La croissance de leur chiffre d'affaires publicitaire est considérable.
La deuxième offensive des plateformes s'exerce sur la fiction, mais aussi désormais sur le divertissement
et le sport. Ce qui affecte notre capacité d'acquérir des droits et donc réduit de facto la durée d'écoute
potentielle de la télévision. Et la troisième conséquence, c'est la fragilisation des éditeurs comme nous
face aux groupes de production notamment internationaux qui continuent à se concentrer de manière
extrêmement rapide. Or, en France l'intégration verticale est très fortement limitée, contrairement aux
États-Unis où chaque network possède son propre studio de production. »

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LA RÉVOLUTION DE L'OTT

Le rapprochement TF1 M6 va permettre selon Ara Aprikian d'atteindre une taille critique pour pouvoir
continuer à investir dans des programmes de qualité, financer une information capable de contrebalancer
les fake news et acquérir les droits sportifs essentiels. L'objectif stratégique numéro un est donc de
réussir la fusion. Pour lui, la crainte de certains face à une distorsion de concurrence après l'arrivée du
futur géant n'est pas un argument pertinent : « si nous réussissons cette opération, nous resterons un
acteur modeste au niveau international. Nous sommes très loin de la création d'un mastodonte, mais
nous agissons pour créer un acteur privé capable de se transformer afin de répondre au niveau local à la
disruption engendrée par l'offre OTT, une évolution que le paysage audiovisuel n'a pas connue depuis
cinquante ans ». L'adaptation aux nouveaux usages du streaming réclame selon lui une capacité
d'investissement suffisante pour développer une plateforme combinant une offre de rattrapage et de
streaming (fondée sur MyTF1 et 6play) et une offre de SVOD. Le groupe TF1 a récemment lancé des
offres d'AVOD (Advertising Video On Demand : financée par de la publicité) sur MyTF1 ainsi que
MyTF1 MAX avec une offre HD sans interruption publicitaire. D'autres initiatives devraient suivre d'ici
à la fin de l'année.

Le dossier de la fusion est en phase d'instruction par l'Autorité de la Concurrence qui réalise un test de
marché et doit rendre sa décision en octobre prochain. Chez M6, on ne désire pas s'exprimer
officiellement. Mais un insider très proche de la direction a partagé son analyse avec « CB News ». Pour
lui, l'objectif du groupe dirigé par Nicolas de Tavernost est similaire à celui de TF1 : avoir plus de
moyens pour investir dans la technologie et le non linéaire. « Netflix investit environ 1 milliard de dollars
par an dans la technologie pour avoir le meilleur service utilisateur et 19 milliards dans les contenus (en
2021) ! Or, plus on peut se permettre d'investir, mieux on est placé pour plaire au spectateur, qu'il soit
devant la télé linéaire ou une plateforme de SVOD », estime cet expert. Les programmes de flux (jeux,
émissions en direct, retransmissions d'événements sportifs) ne sont plus une chasse gardée des chaînes
classiques, puisque les Amazon et Netflix commencent à grignoter ce gâteau, la fiction restant un enjeu
stratégique. Sur ce sujet, la source proche de M6 met en garde sur le danger que pose l'agressivité des
plateformes : « il y a de plus en plus de fictions françaises qui fonctionnent, contrairement à ce qui se
passait il y a dix ou quinze ans. Mais Netflix essaie d'assécher le marché en signant des deals avec les
meilleurs acteurs, les meilleurs auteurs et les meilleurs réalisateurs ».

HORIZON MARS 2023

M6 a ainsi produit et réalisé en 2012 « De l'autre côté du périph », un film avec Laurent Lafitte et Omar
Sy (2,2 millions d'entrées). La chaîne voulait réaliser une suite, mais Netflix a entre-temps conclu un
accord exclusif avec Omar Sy pour les cinq prochaines années. Résultat : c'est la plateforme qui va
produire et diffuser la suite qui sera intitulée « Au-delà du périph », réalisée par Louis Leterrier.

« UNE PARTIE IMPORTANTE DES AUDIENCES SERA SUR LE NON-LINÉAIRE :


POSSÉDER SA PLATEFORME DE STREAMING EST INCONTOURNABLE. »

Une partie toujours plus importante des audiences sera demain sur le non linéaire : posséder sa propre
plateforme de streaming est donc incontournable. Pour l'informateur proche de M6, Salto n'est pas la
solution : « quand vous êtes trois protagonistes, qui n'ont pas forcément les mêmes intérêts, c'est assez
compliqué. Sans oublier que l'Autorité de la Concurrence a été très sévère et que le chantier a duré trois
ans avant d'aboutir. Un laps de temps mis à profit par les plateformes pour gagner des millions d'abonnés.
Enfin, de peur qu'ils ne s'entendent au préalable, les patrons des trois chaînes ne sont pas au courant de
la nature des achats de contenus ! C'est très frustrant ». Quelle que soit la décision de l'Autorité et de
l'Arcom sur la fusion, le temps est compté car TF1 et M6 doivent enclencher rapidement la procédure
de renouvellement de leurs fréquences qui arrivent à échéance le 5 mars 2023. La loi interdit ensuite
tout changement d'actionnaire pendant cinq ans. Tous les 15 ans (10 ans plus une reconduction de 5 ans)
l'Arcom (ex CSA) lance un nouvel appel d'offres pour les autorisations d'émettre aux télévisions et aux
radios privées diffusées par voie hertzienne terrestre (TNT).

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TF1 et M6 vont devoir y répondre six mois avant si elles veulent conserver les fréquences 1 et 6. « Or,
même si TF1 et M6 opèrent ces canaux depuis vingt ans, cet appel d'offres remet les compteurs à zéro.
Il faut donc que l'Autorité de la Concurrence rende son avis fin 2022 car en fonction de la décision,
fusion autorisée ou non, TF1 et M6 devront se présenter seules ou de manière groupée. » Un délai serré
pour mettre en place un rapprochement de cette ampleur. Bref, entre discours officiel anti Gafa d'un côté
et sévérité réglementaire de l'autre, les deux chaînes privées ont du mal à se situer dans un paysage
audiovisuel bouleversé par l'arrivée de ces nouveaux acteurs de taille mondiale à la force de frappe sans
commune mesure avec celle des chaînes françaises. Or, conserver une industrie de divertissement
nationale viable et solide est un enjeu de soft power et économique de premier ordre. « La télé linéaire
reste un carrefour d'audience plébiscité par les Français. Mais il faut laisser les chaînes développer leur
offre non linéaire. Il y a trois ans, le marché publicitaire digital était équivalent à celui de la télé.
Aujourd'hui, il est trois fois supérieur (en fait 3,6 milliards en 2020 pour la télé contre 6,8 milliards pour
le digital en 2020, sources Irep et SRI NdA). Or, ces deux marchés sont entièrement substituables.
D'ailleurs les agences média comme les annonceurs, en tout cas en off, sont pour la fusion pour ne pas
rester prisonniers des Gafa aujourd'hui et demain des Netflix, Disney et Amazon », conclut l'insider.

Le groupe Televisa-Univision, issu de la fusion des deux plus


importants réseaux de télévision en espagnol, va lancer un
service de streaming en 2022
2 février 2022 / Société Générale de Presse

Le groupe Televisa-Univision, issu de la fusion des deux plus importants réseaux de télévision en
espagnol, va lancer un service de streaming en 2022 Le groupe Televisa-Univision, issu de la fusion
des deux plus importants réseaux de télévision en espagnol, va lancer un service de streaming en 2022

Le nouveau groupe audiovisuel Televisa-Univision, issu de la fusion au printemps dernier des deux plus
importants réseaux de télévision en espagnol du monde, va lancer un service de streaming dans cette
langue pour tenter de capter le marché potentiel que représentent les quelque 600 millions de
téléspectateurs hispanophones.

"Televisa-Univision est dans les temps pour lancer en 2022 sa plate-forme mondiale unifiée de
streaming (...) qui comprendra une version à abonnement gratuit et une autre premium", a indiqué le
groupe dans un communiqué.

L'entreprise télévisuelle formé des sociétés mexicaine Televisa et américaine Univision espère ainsi
concurrencer les principaux services de vidéo à la demande Netflix, Amazon Prime et Disney+ sur la
part de marché en espagnol. Le service inclura, entre autres, films, documentaires, vidéos éducatives,
sports et programmes d'information.

Televisa et Univision ont annoncé lundi la fin de leur processus de fusion, donnant naissance à "une
entreprise sans équivalent sur la scène médiatique mondiale", selon le président de la nouvelle entité,
M. Wade DAVIS, cité dans un communiqué. Leur fusion avait été appuyée par Google, le fonds
technologique japonais SoftBank et la banque d'investissement The Raine Group.

Les deux réseaux étaient déjà partenaires depuis une soixantaine d'années et avaient récemment créé de
façon conjointe TUDN, une chaîne de télévision par abonnement spécialisée dans le sport. Televisa-
Univision revendique à l'heure actuelle de toucher chaque jour 100 millions de clients hispanophones.

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NETFLIX - retour à la réalité
2 février 2022 / TA invest

Le cours a perdu 24,4% depuis l'annonce du résultat 2021, le 20/1. Un résultat solide pourtant. Le chiffre
d'affaires a gagné 18,8%, la marge opérationnelle est passée de 18,3 à 20,9% (record historique) et le
bénéfice s'est envolé de 85% à 11,55 USD par action. Mais le nombre de nouveaux abonnés a fortement
ralenti (+18 millions en 2021, contre +37 millions en 2020, année dopée par le confinement). Et pour le
1er trimestre 2022, Netflix ne compte pas sur plus de 2,5 millions d'abonnés supplémentaires, soit +1,1%
seulement par rapport au total de 221,8 millions recensé au 31/12/2021 ! La croissance de la base
d'abonnés reste cependant cruciale, pour faire face à la hausse continue des coûts de production (17,5
milliards en 2021) et tenir tête à la concurrence : Disney (138,63 USD ; conservez) compte en effet
dépenser 33 milliards de dollars cette année en contenus pour son activité de streaming ! Jusqu'ici,
Netflix dépense plus de liquidités qu'il n'en récolte. En 2021, sa dette a encore enflé et atteint 15,5
milliards de dollars. Et certains marchés s'approchent de plus en plus de la saturation. Pour assurer sa
croissance, Netflix procède certes à des hausses régulières du prix des abonnements. Mais cela a une
limite. Il n'a dès lors d'autre choix que d'investir pour se diversifier (jeux vidéo sur mobile depuis
novembre) et d'aller chercher des abonnés sur de nouveaux marchés... mais où les abonnements sont
parfois bien moins chers (en Inde, l'abonnement mensuel mobile de base coûte à peine 1,80 EUR !). En
2022, la marge opérationnelle va s'effriter (à 19 ou 20%), e.a. à cause des effets de change. Si le chiffre
d'affaires gagne 12%, cela devrait se traduire par un recul du bénéfice par action à ±10,8 USD.

NOTRE AVIS Le marché du streaming est transformé par la concurrence apparue ces deux dernières
années. Netflix perd sa position dominante et une partie de ses avantages compétitifs (interface,
algorithme ...). Ces prochaines années, la croissance annuelle de ses ventes risque de rester inférieure à
10-15%. Et contrairement au consensus, nous doutons que les marges puissent rebondir. Or, bien que la
valorisation du titre ait fortement baissé depuis début 2022, elle reste élevée (le cours vaut 36 fois le
bénéfice attendu pour 2022 et 9 fois la valeur comptable ; le rapport EV/EBITDA est de 24,5).
VENDRE.

Le business model de Netflix remis en question


31 janvier 2022 / Le Soir

Plus de 60 milliards de dollars de valorisation boursière effacés en une semaine. 38 % de chute de


l’action en un mois. Le numéro un mondial du streaming a bien mal commencé l’année. En cause ? La
déception suscitée par les résultats du quatrième trimestre et les prévisions pour le début de l’année,
dans un contexte où les valeurs technologiques ont moins la cote sur les marchés financiers. Le géant
du streaming n’a ajouté « que » 8,3 millions de nouveaux abonnés au quatrième trimestre, son chiffre
le plus bas pour cette période de l’année depuis 2017. Mais ce sont surtout les prévisions pour les trois
premiers mois de janvier qui ont refroidi les investisseurs. Netflix ne s’attend plus qu’à ajouter 2,5
millions d’abonnés contre 4 millions l’année dernière à la même époque. Il faut remonter au moins cinq
ans en arrière pour retrouver une performance aussi faible.

Ce ralentissement questionne le business model même de Netflix et de l’industrie du streaming en


général. On ne peut en effet pas dire que le groupe américain a réduit la voilure et affiché moins de
nouveautés à son compteur. Que du contraire. Il a sorti le grand jeu au quatrième trimestre : la série
coréenne dystopique Squid Game – le plus grand succès de son histoire –, la deuxième partie de la saison
5 de la Casa de Papel, le film événement Don’t Look up avec Leonardo DiCaprio et Jennifer Lawrence.
D’où l’interrogation de certains : si Netflix n’arrive pas à maintenir son rythme de croissance avec de
telles sorties, comment va-t-il y arriver par la suite ?

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L’entreprise explique ses difficultés en partie par la situation macroéconomique difficile de certains
pays, notamment en Amérique latine. Sa croissance se fait en effet aujourd’hui essentiellement en dehors
des Etats-Unis (à plus de 90 %), pays où elle commence à plafonner. Mais elle passe sous silence une
autre explication : l’intensification de la concurrence. Celle-ci est de plus en plus rude, même si Netflix
a l’habitude de dire que ses principaux concurrents sont « les jeux vidéo et le sommeil » et qu’il reste
encore beaucoup de place à prendre vu le poids important que représente la télévision linéaire dans les
habitudes de consommation.

Plus de concurrence

Les HBO Max, Disney +, Amazon Prime et Apple TV Plus se renforcent tout comme d’ailleurs les
acteurs locaux qui développent également leurs propres services de SVOD. Le taux de désabonnement
augmente. Que ce soit pour attirer de nouveaux abonnés ou conserver les existants, tous utilisent la
même recette : offrir du contenu exclusif et attractif. Et il faut le faire à une vitesse toujours plus grande.
Dans une récente étude, les analystes de la firme américaine MoffettNathanson soulignent à quel point
la durée de vie des contenus proposés par les plateformes de streaming tend à se raccourcir, en
particulier quand des séries peuvent être visionnées en mode « binge watching » en une seule nuit. «
Cela signifie que les plateformes doivent continuellement dépenser de l’argent dans de nouveaux
contenus. Tout ralentissement se traduit inévitablement dans des chiffres trimestriels moins bons. »

La guerre du streaming devient donc de plus en plus coûteuse. Selon les calculs du Financial Times,
les huit plus grands groupes médias américains vont dépenser 115 milliards de dollars dans de nouveaux
films et séries en 2022, certains le faisant à perte. A lui seul, Netflix a dépensé 17 milliards dans la
production de contenu en 2021, soit 22 % de plus qu’en 2019 (année pré-Covid). Selon les estimations
de Morgan Stanley, Disney devrait augmenter ses dépenses de 35 à 40 % en 2022 pour atteindre 23
milliards de dollars.

Ces dépenses ont un impact sur les marges. Au quatrième trimestre, celles de Netflix ont chuté, passant
de 14 à 8 % en un an. La plateforme a certes recours à des augmentations de prix mais c’est un jeu
dangereux alors que la concurrence augmente. Ces hausses de coûts continues font dire à certains
analystes que le streaming n’est peut-être plus un bon secteur dans lequel investir. La chute du cours
de Bourse de Netflix ne les contredira pas.

Les grandes plateformes de streaming peinent à fidéliser les


abonnés venus pour des blockbusters
1 février 2022 / L'Opinion

Les données montrent que près de la moitié des téléspectateurs américains qui s’étaient engagés juste
après la sortie de « Hamilton » et de « Wonder Woman 1984 » étaient repartis au bout de six mois

Les plateformes de streaming captent beaucoup de nouveaux abonnés lorsqu’elles diffusent un


programme ou un film très attendu. Mais, selon de nouvelles statistiques, beaucoup de ces clients se
désinscrivent au bout de quelques mois, ce qui constitue un problème, même pour les géants du secteur
disposant de gros moyens financiers. Ces données, fournies au Wall Street Journal par la société
Antenna, spécialisée dans la mesure des abonnés, montrent à quel point la concurrence dans le
streaming oblige tous les acteurs à produire en permanence des contenus à succès, souvent coûteux,
pour satisfaire des clients volatils. « Vous avez constamment besoin de nouveautés », confirme Michael
Nathanson, analyste chez MoffettNathanson. Les plateformes de streaming doivent non seulement se
constituer de vastes bibliothèques d’anciens programmes et de vieux films, mais elles sont également
soumises « à la nécessité de lancer quelques grands films de cinéma tous les trimestres pour convaincre
les consommateurs de leur utilité ». Ces grosses sorties ont représenté un moteur solide pour les

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abonnements au streaming, en particulier pour les plateformes les plus récentes. Le service Disney+,
par exemple, a engrangé beaucoup plus de nouveaux abonnés aux Etats-Unis le jour de la sortie de la
comédie musicale Hamilton qu’à n’importe quelle autre date depuis début 2020, deux mois après son
lancement. Beaucoup d’abonnés ne le restent pas très longtemps. Selon les données d’Antenna, près de
la moitié des Américains qui se sont engagés trois jours ou moins après la sortie d’Hamilton, de Wonder
Woman 1984 et de Greyhound ont quitté la plateforme concernée dans les six mois. Disney, Apple et
WarnerMedia (AT&T), la société mère de HBO Max, ont refusé de réagir à ces chiffres. Même si les
services de streaming ne conservent que la moitié des clients qui souscrivent à une offre pendant ces
périodes de forte affluence, cela constitue sur le long terme un nombre considérable d’abonnés. Aux
Etats-Unis, tous les services de streaming voient une fraction de leurs utilisateurs se désabonner chaque
mois. Pourtant, dans la durée, ils en recrutent davantage qu’ils n’en perdent. Mais les personnes qui
s’abonnent à un service juste après une grosse sortie le quittent généralement beaucoup plus rapidement
que la moyenne des abonnés, selon une analyse des données d’Antenna. Peacock — qui appartient à
Comcast — , une autre plateforme entrée sur le marché au cours des deux dernières années, a connu une
forte augmentation de son nombre d’abonnés aux Etats-Unis pendant les Jeux olympiques de Tokyo de
l’été dernier, pour lesquels il disposait des droits en streaming. Quatre mois plus tard, les chiffres
d’Antenna montrent qu’environ la moitié de ses utilisateurs américains inscrits au début des JO n’étaient
plus là. NBCUniversal, filiale de Comcast et société mère de Peacock, a refusé de commenter ces
données. La semaine dernière, Comcast a indiqué que plus de neuf millions de personnes disposaient
d’un abonnement payant pour regarder Peacock, en plus des sept millions de clients du câble et du haut
débit — de Comcast et d’autres fournisseurs — qui reçoivent le service gratuitement et l’utilisent
régulièrement. Antenna est capable de compiler les souscriptions quotidiennes à la plupart des
plateformes de streaming en agrégeant les données provenant d’une série d’applications tierces qui
aident les utilisateurs à gérer leurs boîtes mails ou à tenir leur budget mensuel. Ces applications
enregistrent les opérations relatives au streaming et les e-mails confirmant la décision des utilisateurs
de s’engager ou d’annuler ce type d’abonnements. A partir d’un échantillon de cinq millions de clients
américains, Antenna établit ses projections, sur le modèle de ce que le font les instituts de sondage ou
d’autres organismes de mesure comme Nielsen. Selon l’entreprise, les usagers de ces applications
acceptent que leurs données soient utilisées de manière anonyme. Les difficultés des plateformes de
streaming sont exacerbées par le fait que la plupart des services sont proposés sous la forme
d’abonnement mensuel, ce qui permet aux utilisateurs de résilier facilement leur contrat lorsqu’ils ont
fini de regarder un programme déterminé. La multiplication des services de streaming permet aux
utilisateurs d’avoir une large palette de possibilités. HBO Max, Disney+, Peacock, Apple TV+ et
Discovery+ sont apparus depuis 2019, tandis que ViacomCBS a rebaptisé et étoffé son service CBS All
Access, désormais appelé Paramount+. Tous se battent pour gagner des parts de marché face à des
acteurs plus anciens, notamment Netflix, Prime Video (Amazon) et Hulu, contrôlé par Disney. Les
ménages américains se sont abonnés en moyenne à 3,6 services de streaming l’année dernière, selon
Kagan, un bureau d’études sur les médias dépendant de S&P Global Market Intelligence. La base
d’abonnés américains de Netflix, le leader du streaming dans le pays, a stagné au cours des derniers
trimestres, selon les données de MoffettNathanson. Lors de la publication de ses résultats du quatrième
trimestre, le 20 janvier, Netflix a indiqué qu’il pourrait être pénalisé par cette concurrence plus vive,
ajoutant cependant poursuivre sa croissance dans les zones où s’étaient lancés ses rivaux. Son bénéfice
d’exploitation pour le trimestre s’était contracté à 8,2 %, contre 14,4 % un an plus tôt. Netflix a en partie
attribué cette chute à l’augmentation du volume de son offre de programmes par rapport à la même
période de l’année précédente, au cours de laquelle la Covid-19 avait contraint d’arrêter certaines
productions. L’action de Netflix a plongé de 22 % après l’annonce de ses prévisions pour le premier
trimestre 2022 : ces dernières tablaient sur un gain d’abonnés nettement inférieur à celui de l’année
précédente, malgré une multitude de séries et de films à succès. « Les coûts de production, de
commercialisation et de fidélisation des clients vont tous augmenter sur un marché concurrentiel »,
souligne M. Nathanson. Les plateformes de streaming ont dépensé environ deux fois plus dans les
contenus — en additionnant les créations originales et les acquisitions de droits de films et programmes
déjà sortis — l’an dernier qu’en 2017, selon les chiffres d’Ampere Analysis, un cabinet d’études. A lui
seul, Netflix prévoyait de dépenser 17 milliards de dollars pour ses contenus en 2021, avait déclaré
l’entreprise en avril. Les services plus anciens, disposant de bibliothèques de contenus plus importantes,
affichent des taux de fidélisation plus élevés que les nouveaux entrants. « Nous disons toujours que les

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titres présents dans la bibliothèque participent à augmenter l’engagement et à minimiser le taux de
désabonnement », a déclaré Bob Chapek, directeur général de Disney, lors d’une conférence
téléphonique avec des analystes en novembre. « Mais les nouveaux titres, les nouveaux contenus, qu’il
s’agisse de films ou de séries, permettent d’attirer de nouveaux [abonnés]. » Netflix a connu un afflux
important de nouveaux utilisateurs en mars 2020, au cours des premières semaines de la pandémie, alors
que les confinements laissaient plus de temps à de nombreuses personnes pour regarder des programmes
comme Tiger King depuis leur canapé. En dehors de cette période, un autre pic notable d’inscriptions
s’est produit début décembre 2020, lorsque Mank de David Fincher et la quatrième saison Big Mouth,
une série animée, sont sortis en streaming sur Netflix. Hulu, quant à lui, suscite habituellement une
vague de nouvelles inscriptions aux Etats-Unis le jour du Black Friday, date à laquelle le service propose
traditionnellement de fortes réductions. Selon un examen des données d’Antenna, l’une des programmes
les plus populaires de Hulu est The Handmaid’s Tale, la série dystopique avec Elisabeth Moss qui est
basée sur le roman de Margaret Atwood. Les téléspectateurs américains qui se sont abonnés à Netflix
au moment de la sortie de Big Mouth et Mank et à Hulu avant la quatrième saison de The Handmaid’s
Tale ont quitté la plateforme plus lentement que ceux qui ont respectivement souscrit à HBO Max, Apple
TV+ et Disney+ juste après la sortie de Wonder Woman 1984, Greyhound et Hamilton, selon les
données d’Antenna. Contrairement aux autres titres mentionnés, la quatrième saison de The Handmaid’s
Tale ne pouvait pas être visionnée en une fois : la diffusion de ses dix épisodes a été étalée sur plusieurs
mois. Apple et HBO Max disposent également des programmes à épisodes davantage susceptibles de
retenir les abonnés plus longtemps - notamment Succession pour HBO et Ted Lasso pour Apple. Netflix
s’est refusé à tout commentaire. Tous les succès n’attirent cependant pas un nombre spectaculaire
d’abonnés dès le début. Certains des programmes de streaming les plus populaires de ces deux dernières
années, comme Ted Lasso et Squid Game diffusés par Netflix, ont été des réussites inattendues qui n’ont
fait mouche aux Etats-Unis qu’après quelques semaines de bouche-à-oreille. Antenna ne suit pas les
recrutements d’abonnés à Prime Video d’Amazon car nombre d’entre eux rejoignent Prime pour
bénéficier d’autres avantages proposés par la plateforme. Les statistiques de la société n’incluent que
les utilisateurs qui s’inscrivent directement à un service ; elles n’intègrent pas les abonnés qui
souscrivent via un contrat passé avec des tiers, comme les opérateurs de téléphonie mobile. Le président
exécutif d’Antenna, Jonathan Carson est un ancien cadre de Nielsen. Il affirme avoir créé son entreprise
avec son associé, le directeur général Rameez Tase, car ils avaient perçu l’opportunité économique de
fournir des données fiables aux studios de cinéma et aux chaînes de télévision qui prenaient le virage du
streaming vidéo. (Traduit à partir de la version originale en anglais)

Audiovisuel : la SVOD précipite la concentration en Europe


au profit des majors américaines
1 février 2022 / La Tribune

L’année 2020 a battu des records d’audience. En 2021, la télévision a confirmé son rôle central dans les
foyers français. Pourtant les usages sur le poste se diversifient, surtout au profit de la vidéo par
abonnement (SVOD). Un rapport de l’Observatoire européen de l’audiovisuel (EOA) éclaire l’impact
sur le marché que produit cet engouement. Résultat, la ruée vers le streaming précipite les mouvements
de concentration. Or, pour l'heure, le marché de la SVOD est contrôlé à plus de 70% par les quatre
premières plateformes : Netflix, Amazon, Apple et Disney+. En face, les groupes européens
traditionnels sont poussés à la « plateformisation ». Explications.

Qu'il s'agisse des séries Squid Game, Lucifer ou d'Arsène Lupin, tous les succès de 2021, qui sont aussi
ceux de Netflix, ont été regardés à 75% sur un écran TV. Les usages du poste familial se diversifient,
notamment au profit de la vidéo par abonnement.

L'an passé, 8,7 millions de téléspectateurs ont ainsi visionné chaque jour un programme en SVOD
mesure le bilan L'année TV 2021 de Médiamétrie.

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L'Europe dans son ensemble constate cette évolution de consommation des contenus, qui pousse les
groupes audiovisuels historiques à revoir leur modèle et à diversifier leur offre.

Au moment où la commission d'enquête sur la concentration des médias du Sénat auditionne les grands
acteurs de l'audiovisuel français et européen, dans la perspective de la fusion TF1-M6, un rapport de
l'Observatoire européen de l'audiovisuel (EOA) éclaire encore mieux l'impact sur le marché que produit
l'engouement croissant du public pour la SVOD.

La concentration en marche

Surtout, il révèle l'enjeu de souveraineté culturelle qui en découle. Les fusions et acquisitions, dans la
diffusion comme dans la production, se sont en effet « multipliées sous l'effet de la ruée vers le
streaming et de la crise de la pandémie », selon cette étude européenne intitulée « Top players in the
European audiovisual industry - ownership and concentration ».

L'OEA cite, par exemple, les rachats en 2019 de TVN en Pologne par Discovery et du groupe suédois
TV4 Media par le telco finlandais Telia.

En France, l'acquisition en 2020 d'Endemol Shine Group par Banijay a donné naissance au leader
mondial indépendant de la production et de la distribution de contenus. D'autres structures comme
Newen (TF1) ou Mediawan, multiplient les acquisitions de sociétés pour peser sur les droits au niveau
européen voire mondial.

78% d'intérêts américains dans la SVOD en Europe

Concentré sur l'année 2020, le rapport relève que la SVOD demeure le marché audiovisuel le plus
concentré en Europe en termes d'abonnements. Les quatre premières plateformes OTT, pour "over-the-
top" soit au-dessus des chaînes classiques, (Netflix, Amazon, Apple et Disney+) contrôlent plus de 70
% des abonnements. « Quatre abonnements sur cinq sont signés avec une plateforme américaine »
détaille l'Observatoire.

Alors que la croissance des recettes d'exploitation cumulées des services audiovisuels des 100 premiers
groupes audiovisuels en Europe (+7,7% de 2016 à fin 2020) a été tirée uniquement par le secteur privé
(+12% sur la même période), les intérêts américains dans l'industrie audiovisuelle européenne ont suivi
cette tendance haussière. En 2020, ils atteignaient 78% du marché de la SVOD.

Fort de 6,152 milliards d'euros de recettes, Netflix Europe s'est ainsi affiché à la troisième place des
vingt premiers groupes audiovisuels européens en termes de revenus d'exploitation des services
audiovisuels.

Devancé par le groupe britannique Sky (16,279 milliards d'euros), il a fait quasiment jeu égal avec
l'allemand ARD (6,527 milliards d'euros), suivi de près par le groupe luxembourgeois RTL Group,
maison-mère de M6 (6,017 milliards d'euros).

A la fin 2020, soit un an après le lancement de la plateforme Disney+ (avril 2020 en France), The Walt
Disney Company Europe se classait à la huitième place (3,876 milliards d'euros) et Amazon Prime Video
à la vingtième (1,736 millions d'euros).

Percée attendue de HBO Max et Peacock

« Plus de 75% des revenus supplémentaires ont été cumulés par les seuls pure players SVOD, Netflix,
Amazon et DAZN, pour lesquels étaient disponibles des données distinctes sur les opérations
européennes » relève le rapport.

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Et c'est sans compter l'arrivée, depuis octobre, de HBO Max en Europe, dans les pays nordiques, en
Espagne et en Andorre (pas encore en France).

Selon les chiffres de Smartme Analytics, publiés en novembre, HBO Max a atteint en trois mois un taux
de pénétration de 4,9% en Espagne, se classant à la troisième place, derrière Netflix et Prime Video,
mais devant Disney+.

Également lancée en novembre 2021 au Royaume-Uni et en Irlande, la plateforme de streaming


Peacock (NBCUniversal-Comcast) poursuit son déploiement en Allemagne et en Autriche depuis le 25
janvier. Avant d'aborder la Suisse et l'Italie dans les prochains mois.

La SVOD s'impose donc comme le segment de marché audiovisuel le plus concentré en Europe, suivi
par la télévision à péage, activité qui demeure largement européenne : 72 % des abonnements sont
concentrés sur les 20 premiers opérateurs de télévision à péage note l'Observatoire européen de
l'audiovisuel.

« Plateformisation » des groupes traditionnels

Force ou faiblesse : face aux géants du streaming, les portefeuilles d'activité des principaux acteurs
traditionnels de l'audiovisuel en Europe sont bien plus éclectiques mais plus sensibles aussi aux aléas
du marché.

En 2020, leurs revenus, touchés par la crise publicitaire, ont stagné, voire reculé pour ce qui concerne
ceux de radiodiffuseurs publics, en baisse de 31 %.

Le poids de France Télévisions, l'ARD, la ZDF ou encore de la Rai est en diminution constante depuis
cinq ans, représentant un tiers de la consommation globale européenne.

A la fin de l'année 2020, quasiment tous les groupes publics proposaient au moins un service à la
demande. A l'image de Salto, en France, qui réunit France Télévisions, TF1 et M6 ou de l'offre RTL+
en Allemagne qui revendique plus de 2,8 millions d'abonnés payants.

« Je parle depuis plusieurs années, de la nécessité de consolider les médias en Europe » a souligné
Thomas Rabe, PDG du groupe Bertelsmann et de RTL Group, lors de son audition jeudi 27 janvier au
Sénat. « La seule option stratégique pour jouer un rôle significatif, c'est le rapprochement », a-t-il fait
valoir, s'agissant de la fusion entre TF1 et M6, qu'il juge impérative pour mieux investir dans le
streaming.

Le patron allemand a ainsi décrit des « plateformes américaines et chinoises » en « concurrence directe
avec les opérateurs historiques dans toutes leurs dimensions », qu'il s'agisse des recettes publicitaires,
du recrutement des abonnés, de la production de contenus et de la découverte de talents.

Delphine Ernotte a souhaité montrer, vendredi aux sénateurs, que cette concurrence ne concernait pas
seulement la fiction mais aussi les droits sportifs, Amazon ayant acquis en France ceux de la Ligue 1 de
football et du tournoi de tennis de Roland-Garros.

« Notre sujet consiste à nous armer face à ces oligopoles américains et peut-être un jour d'une autre
nationalité », a indiqué la présidente de France Télévisions. « Sur le marché de la télé, nous ne sommes
pas si nombreux et il faut que les acteurs soient en bonne santé », a-t-elle prévenu.

Obligations dans la création : quel impact ?

La dynamique de consolidations et de cessions est donc loin d'être achevée.

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Face à la menace des services over-the-top (OTT) à la demande, l'Observatoire européen de l'audiovisuel
note la tendance « pour les radiodiffuseurs et les assembleurs de programmes télévisuels de se diversifier
dans la production télévisuelle ».

A la fin 2020, la contribution des entreprises américaines en tant que producteurs exécutifs de titres
européens de fiction télévisuelle est restée limitée. Entre 2015 et 2019, ils ont initié 6 % du nombre total
de titres de fiction télévisuelle produits en Europe calcule l'OEA.

Netflix a déjà investi quatre milliards d'euros dans la création européenne et travaillé avec plus de 300
producteurs mais affirme ne détenir que « moins d'un quart des droits ».

Quel sera, demain, l'impact de la transposition de la directive européenne sur les services de médias
audiovisuels (SMA) ? Elle impose un quota d'exposition d'œuvres européennes de 30% et autorise les
états membres de l'UE à fixer des obligations d'investissement dans la création aux services
VOD/SVOD établis dans un autre État.

En France, les premières conventions de Netflix, Disney+, Apple App-iTunes Stores et Amazon Prime
Video, ont été signées en décembre avec l'Arcom (ex-CSA). En matière de création, elles représentent
une manne supplémentaire de 250 à 300 millions d'euros pour les créateurs et producteurs français.

En 2020, les intérêts américains dans l'industrie audiovisuelle européenne ont suivi une tendance à la
hausse, atteignant 78% du marché de la SVOD.

Chronologie des médias : Les films plus vite disponibles sur


petits écrans
31 janvier 2022 / Le Soir

Conséquence directe de l’essor des plateformes de vidéo à la demande, un accord a été conclu lundi
dernier en France autour d’une nouvelle chronologie des médias. Celle-ci règle les dates auxquelles les
films peuvent être diffusés, en ligne et à la télévision notamment, dans les mois qui suivent leur sortie
au cinéma.

Qui dit « chronologie » dit « temps » et dit aussi « accélération » : il s’agissait d’adapter l’ancienne
réglementation, qui arrivait à échéance fin février, aux modes de consommation en réduisant le temps
entre la date de sortie d’un film au cinéma et sa diffusion sur les petits écrans. Cette révolution était
souhaitée par les plateformes de streaming, en contrepartie de leurs obligations de financement à la
création.

Six mois après la sortie en salle

En pratique, l’accord conclu prévoit en premier lieu que les nouveautés seront disponibles sur Canal +,
financeur historique du cinéma français, six mois après leur sortie en salle, contre huit jusqu’à présent.

Pour les services de vidéo à la demande par abonnement, la durée sera également réduite. Actuellement
fixée à 36 mois, elle sera dorénavant de 15 mois pour Netflix, de 17 mois pour les autres plateformes
comme Disney+ ou Amazon Prime, qui n’ont pas signé l’accord. Enfin, pour les chaînes de télévision
gratuites, la fenêtre passe de 30 à 22 mois. Pour l’exemple, sorti en décembre, Spider-Man : No Way
Home pourra donc être diffusé en mai 2022 sur Canal+, en avril 2023 sur Disney, et cinq mois plus tard
sur une chaîne de télévision gratuite en France (TF1, France 2…).

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Et en Belgique ? Il n’y a pas de réglementation qui définit de chronologie des médias. « La France fait
figure d’exception à ce niveau », détaille Vanessa De Poortere, responsable juridique chez Belga Films.
« Dans la plupart des pays, il n’y a pas de réglementation, avec des fenêtres de diffusion qui sont fixées
par le marché et par des accords contractuels. » Mais, mécaniquement, le cadre fixé en France est adopté
en Belgique francophone. Il ne fait l’objet d’aucune obligation, mais d’une recommandation définie par
le Centre du cinéma de la Fédération Wallonie-Bruxelles, calquée sur le modèle français, et qui date de
2012. L’accord intervenu en France lundi « aura un impact » pour la Belgique, confirme Jeanne
Brunfaut, directrice adjointe du Centre du cinéma, dans le sens probable « d’un alignement avec la
chronologie française ».

Pour autant, si le système français percole chez nous, il ne vaut pas « pour tous les contenus et de façon
automatique », rappelle Vanessa De Poortere, dans la mesure où « la recommandation n’a pas d’autorité
légale ». Mais, poursuit-elle, « il est très important pour la production belge que l’ensemble des fenêtres
de diffusion soit maintenu, pour les distributeurs, les producteurs et les spectateurs. Les ventes se font
sur l’ensemble des fenêtres. S’il venait à en manquer une, toute la chaîne (distribution, production) en
serait fragilisée, avec pour conséquence un appauvrissement de l’offre qui pourrait se limiter
essentiellement à des blockbusters. »

Des retrouvailles et peu de créations originales : l'ère des


séries "blockbusters"
29 janvier 2022 / Agence France Presse

Comme un air de déjà-vu: lancés dans une course effrénée aux abonnés, les géants du streaming vidéo
investissent désormais massivement dans le recyclage d'anciennes séries à succès, actant l'ère de la série
"blockbuster".

Les années 1990 ont eu "Le Prince de Bel-Air", l'année 2022 aura sa suite, "Bel-Air". La plateforme
Peacock (groupe NBCUniversal) diffusera dès le 13 février une nouvelle version de cette série culte, qui
avait révélé Will Smith.

Même tonalité ou presque avec "How I met Your Father" -- diffusée sur Hulu depuis le 18 janvier et qui
arrivera en France le 9 mars sur Disney+ --, reprise de la série phare des années 2000 "How I Met Your
Mother". Ou avec "House of the Dragon" (sur HBO Max dans le courant de l'année 2022), fondée sur
l'univers de la série phénomène "Game of Thrones".

"Frasier", "True Blood", "Pretty Little Liars"... Que ce soit à travers un "spin-off" (l'histoire d'un
personnage secondaire d'une série), un "reboot", (série existante qui revient avec un nouveau casting et
une intrigue parfois légèrement différente) ou un "préquel" (comment les personnages en sont arrivés
là), l'heure est au recyclage.

Pas nouvelle, cette pratique qui consiste à miser sur un "blockbuster" déclinable à l'infini était plutôt
l'apanage du 7e art. Mais, depuis quelques années, le petit écran s'en est lui aussi saisi, à sa manière.

La fin d'année 2021 n'a pas fait exception avec l'épisode "retrouvailles" de la série culte "Friends" ou la
nouvelle saison de "Sex and the City" diffusée début décembre. Toutes deux sur HBO MAX (filiale de
WarnerMedia), qui a lancé l'automne dernier son déploiement dans plusieurs pays d'Europe.

"On assiste à une vraie guerre du contenu entre les plateformes", soutient auprès de l'AFP Jean Chalaby,
sociologue des médias à la City University de Londres.

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Netflix, Amazon Prime, Disney, HBO Max, Apple TV+... Tous veulent se tailler la part du lion d'un
marché dopé par la crise sanitaire. Mais y a-t-il de la place pour tout le monde? "Le public n'est pas
infini et n'a pas les moyens de cumuler trois ou quatre abonnements", souligne le sociologue.

C'est dans ce contexte que l'idée de la franchise a fait son chemin. "Elle sont un capital sur lequel
s'appuyer pour aller chercher de nouveaux abonnés", analyse auprès de l'AFP Rajinder Dudrah, qui
enseigne au département médias de l'université britannique de Birmingham.

De potentiels nouveaux abonnés souvent nostalgiques de leur jeunesse, souligne auprès de l'AFP
Andrew Connor, maître de conférences à l'université d'Édimbourg (Écosse), qui a travaillé dans le
département séries de la BBC.

Pour lui, l'argument émotionnel des retrouvailles d'un public avec une série culte a été pensé par les
plateformes. Et de pointer : "Dans le cas de +How I Met Your Mother+, le public typique de l'époque
était des ados. Aujourd'hui, ce sont des trentenaires en capacité de s'offrir un abonnement à une
plateforme".

Car leur modèle économique repose principalement sur le nombre d'abonnés, qui doit constamment
augmenter.

Netflix, malgré ses 220 millions d'abonnés, en a fait l'expérience et vécu une journée cauchemardesque
en Bourse le 21 janvier en raison de prévisions de croissance jugées décevantes.

Surtout, les franchises permettent de limiter les risques financiers. "Lancer une nouvelle série, ça coûte
beaucoup d'argent et le succès n'est pas garanti. Avec une franchise, le risque est quasiment nul", assure
M. Chalaby.

Reste une question : la création originale est-elle vouée à s'éteindre sous le poids de ces mastodontes?
"Il y aura toujours une place pour l'innovation", assure Andrew Connor, pour qui "la pandémie a montré
qu'il y avait de la place pour les programmes atypiques".

Et de rappeler le destin planétaire de l'"outsider" sud-coréen "Squid Game" ou la telenovela colombienne


"La Reina del Flow", qui s'est classée dans le top 10 d'une trentaine de pays dans le monde, dont la
France.

M6 et Canal+ plaident pour la souveraineté culturelle


29 janvier 2022 / Le Figaro

Maxime Saada (Canal+) et Nicolas de Tavernost (M6) étaient auditionnés par le Sénat sur la
concentration dans les médias.

AUDIOVISUEL Lorsque l'on évoque la problématique de la concentration dans les médias, le sujet est
presque systématiquement traité du point de vue de la concurrence et du respect du pluralisme. Rarement
abordé par le versant de la souveraineté culturelle. Il s'agit pourtant d'une composante cruciale de la
réflexion. Auditionné vendredi par le Sénat, Maxime Saada, le président du directoire du groupe Canal+,
est venu le rappeler devant la commission d'enquête sur la concentration des médias en France.

Cette année, les mastodontes Disney, Netflix ou encore Warner Bros et Discovery réunis dépenseront
respectivement 33, 19 et 22 milliards de dollars dans les contenus. « La croissance de ces chiffres est
quasi exponentielle. Ces investissements ne sont d'ailleurs pas exclusivement dédiés à la production de
contenus. Ils sont parfois utilisés pour verrouiller l'accès à des talents ou des propriétés intellectuelles »,
a pointé Maxime Saada. Puisqu'ils s'exportent mieux, les contenus hollywoodiens captent l'essentiel de

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cette manne, ce qui fait dire au dirigeant que « l’hégémonie culturelle américaine s'est largement
renforcée dans le monde et notamment en France ».

« Un enjeu de taille »

À titre d'exemple, il a indiqué qu'un seul programme hexagonal figurait dans le top 10 des contenus les
plus regardés sur Netflix... en France. En 2019, avant la crise sanitaire, « sur les quinze films ayant
réalisé le plus d'audience au cinéma, treize étaient américains », a-t-il également souligné. Alors que six
acteurs américains se partagent aujourd'hui l'essentiel du marché de la vidéo payante dans le monde, «
Canal+ fait figure de challenger, y compris sur son marché d'origine, la France ». Le groupe, qui totalise
22 millions d'abonnés, dont 13 à l'international, considère que la vidéo payante par abonnement étant
une industrie de coûts fixes, « il y a un enjeu de taille critique pour mieux les amortir ». Sur Netflix, le
film The Irishman de Martin Scorsese, dont le budget a atteint 134 millions d'euros, ne coûte que
60 centimes par abonnés, sachant que la plateforme en compte 222 millions. Si le film avait été diffusé
sur Canal+, cela reviendrait à 6,20 euros par abonnés.

S'agissant des inquiétudes des sénateurs quant à l'avantage concurrentiel que pourrait par exemple
procurer à Canal+ le rachat d'Editis par sa maison mère Vivendi, Maxime Saada a fait une démonstration
lapidaire. « Editis publie 4 000 ou 5 000 livres par an. Le risque que Canal+ s'en empare est assez faible
sachant que nous produisons une trentaine de séries par an. »

Également auditionné, Nicolas de Tavernost, le président du directoire du groupe M6, a expliqué que la
fusion entre TF1 et M6 « amènerait des investissements plus massifs dans la production et notamment
dans le streaming, qui est le cœur du projet ». Cela permettrait en outre d’« avoir plus de moyens pour
diffuser du sport en gratuit ». Et de poursuivre : « La création est aussi une affaire de cash-flow. C'est
la bonne santé de nos sociétés qui permettra de maintenir un écosystème français relativement
puissant. » Encore faudra-t-il que TF1 et M6 ne reversent pas l'essentiel des économies procurées par
cette fusion aux actionnaires, ont objecté les sénateurs. « Ceux qui refuseraient cette fusion prendraient
un grand risque pour l'audiovisuel français. (...) Aujourd'hui, avec les règles qui nous sont imposées, je
pense qu'il n'y a pas de risques. »

SVOD ; 100 milliards pour de nouveaux contenus : la


guerre du streaming promet une année faste pour les
patates de canapé
30 décembre 2021 / Atlantico

Les principales plateformes de streaming comme Amazon Prime, Disney et Netflix vont investir plus
de 100 milliards de dollars pour de nouveaux films et des séries inédites. Les géants de la vidéo à la
demande vont tenter de se renouveler alors que le secteur du streaming perd de l'argent.

Netflix, Walt Disney, Amazon… Selon un article du California News Times, les huit principaux
producteurs américains de contenus vidéos dépenseront au moins 115 milliards de dollars cette année,
dans le but de relancer une activité qui perd de l’argent. Comment expliquer de telles pertes au cours
d’une année marquée par la pandémie de Covid-19 ? Le modèle économique de ces entreprises est-il en
partie responsable ?

Anthony Poncier : Un certain nombre de séries qui étaient de véritables poules aux œufs d’or pour ces
plateformes ont dû s'arrêter à cause de la pandémie de Covid. Cela engendre de véritables pertes pour
les créateurs de contenus mais aussi des dépenses supplémentaires. De manière générale, le coût de
production des films a également considérablement augmenté ces dernières années.

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Il faut également savoir que le marché est en train d’évoluer fortement et ces sociétés ont besoin de se
renouveler sur le long terme. Aujourd’hui, la question principale pour ces entreprises est de savoir qui
aura le plus grand nombre d’abonnés et le catalogue le plus profond, dans le but de se détacher de la
concurrence. Pour se renouveler, elles investissent donc des sommes considérables et espèrent un retour
sur investissement sur le long terme.

Toutes ces entreprises ne partagent pas le même modèle économique. L’abonnement Amazon Prime est
lié au service de livraison, mais aussi à Amazon Music. Alors que Netflix est uniquement positionné sur
le streaming vidéo, Disney mise sur un système de déclinaison de licences, comme avec les Marvel ou
Star Wars. Elles ont donc une stratégie différente. Netflix souhaite rester leader, alors que le reste de la
concurrence veut avoir une base d’abonnés importante pour se rapprocher du leader.

Ces producteurs s’inquiètent de ne pouvoir attirer de nouveaux clients et la croissance du nombre


d’abonnés Netflix et Disney a fortement ralenti. Comment les créateurs peuvent-ils se renouveler afin
de relancer la demande ?

Les modèles de création sont en train de changer considérablement. A titre d'exemple, il y a quelques
années, l’idée de Showrunner était encore assez peu connue en France et beaucoup plus présente aux
États-Unis. De plus, le système de contrats entre plateformes et producteurs a également changé.
Lorsqu’un producteur investissait pour produire un film ou une série, il touchait des royalties à chaque
fois que la production était vendue à une chaîne étrangère. Aujourd’hui, ils cèdent souvent l’ensemble
de leurs droits.

Il faut également noter que les plateformes investissent de plus en plus dans des productions étrangères.
Si au début, Netflix ne sortait que des séries américaines, ils se rendent bien compte aujourd’hui que de
très nombreux consommateurs à travers le monde préfèrent les productions locales. Il faut se rappeler
que la Casa de Papel ne marchait pas en Espagne. Netflix l’a racheté avant de faire un nouveau montage
plus dynamique. Après le succès mondial de la série, il y a eu une suite, ce qui a rapporté énormément
d’argent. Le succès de la série coréenne Squid Game est un autre exemple frappant. Pour ces
plateformes, le but est de produire ou de racheter une série qui fera un buzz avant de surfer sur la vague
qui peut durer des années.

Netflix envisage également de proposer d’autres services, comme devenir une plateforme de streaming
de jeux. Ils pourraient donc couvrir d'autres usages.

Ces entreprises ont fait le choix d’investir massivement pour créer de nouveaux contenus. A titre
d’exemple, les investissements de Disney dans les contenus de streaming pourraient augmenter de 35
à 40 % en 2022. Dans un contexte où le secteur du streaming vidéo perd de l’argent, peut-on parler de
pari risqué ?

Pendant très longtemps, les réalisateurs voulaient absolument sortir leurs productions au cinéma. Il y
avait cette idée que si un film ou une série était diffusé à la télévision, la production serait forcément de
moindre qualité. Tout cela a considérablement changé. Aujourd’hui, la qualité de certaines séries
dépasse de loin ce qui se fait au cinéma. Même Martin Scorsese, qui est un véritable monument,
reconnaît qu’il a de plus en plus de mal à produire des films alors que les plateformes de streaming lui
font des offres en or. Il est certain que des grands noms du cinéma vont se tourner vers le streaming
dans les prochaines années.

Historiquement, le cinéma était le seul endroit accessible pour voir des films. Mais aujourd'hui, tout le
monde ne peut pas se permettre d’y aller régulièrement. Il faut payer les places, éventuellement les pop-
corn, les boissons … Les services de streaming proposent donc un service de grande qualité pour un
coût fortement réduit.

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Les modes de consommation sont en train de changer et les acteurs du streaming vidéo l’ont bien
compris. Ils investissent pour s’adapter à une demande qui évolue. Je ne pense pas que la situation soit
si dramatique pour eux.

Netflix siphonne les talents


14 octobre 2021 / Le Figaro

Omar Sy a signé avec le géant du streaming un contrat de plusieurs années.

STREAMING Netflix avait pris l'habitude d'opérer des raids sur les stars de Hollywood. À présent, le
leader de la vidéo à la demande par abonnement braconne les talents là où ils sont. C'est-à-dire partout
dans le monde. Dernière prise en date ? Omar Sy. Le comédien révélé par le film Intouchables et
catapulté star internationale grâce à la série Lupin, a scellé un contrat de plusieurs années avec la
plateforme américaine pour produire et jouer dans des films. Une grande première pour un artiste
français.

D'ores et déjà, Tour de Force, le prochain long-métrage réalisé par Louis Leterrier, avec Omar Sy et
Laurent Lafitte, devrait être lancé sur Netflix en 2022. Et Au-delà du périph, la suite du film sorti en
2012 De l'autre côté du périph, est également attendu sur le service américain. Fin août, Netflix avait
enrôlé de la même manière la comédienne Vanessa Kirby, qui joue la princesse Margaret dans la série
à succès The Crown, afin de développer des films centrés sur les femmes.

« Squid Game » bat un record

La stratégie de Netflix est cohérente. Près des deux tiers de ses 210 millions d'abonnés se trouvent
désormais ailleurs qu'aux États-Unis. Pour plaire à ses utilisateurs, le géant du streaming a donc
fortement accéléré ses investissements dans les contenus non américains. En début d'année, il avait par
exemple annoncé un plan de 500 millions de dollars dans les séries et films produits en Corée du Sud.
Le phénomène Squid Game lui donne raison. Lancé il y a moins de quatre semaines, le drame dystopique
sud-coréen a été vu par 111 millions de foyers abonnés, un record absolu pour un démarrage de série
sur la plateforme. Mieux : la fiction, dont aucun diffuseur ne voulait il y a dix ans, a été regardée à une
écrasante majorité hors de Corée. Le scénario de ce succès est identique à celui de La casa de Papel,
développé en Espagne, passé quasiment inaperçu lors de sa diffusion sur une chaîne locale et transformé
en succès planétaire par Netflix qui en détient maintenant les droits. Lupin, série produite par Gaumont
pour Netflix, est devenu un hit mondial. Résultat : Omar Sy, le gentleman cambrioleur de la fiction, a
été aspiré directement par la plateforme.

La guerre intense des talents menée par les géants du streaming n'est pas une bonne nouvelle pour les
écosystèmes audiovisuels locaux et pourrait à terme aboutir à un phénomène d'exclusion. Les moyens
déployés par les grandes plateformes mondialisées sont sans commune mesure avec ceux des acteurs
locaux. Ils entraînent une inflation des coûts de production et des salaires des stars. In fine, vis-à-vis des
producteurs et des chaînes de télé locales, les services de streaming assèchent doublement le marché.
En amont, ils compliquent l'accès aux talents ainsi qu'aux grandes franchises - Netflix vient de s'offrir
toutes les œuvres de l'écrivain anglais Roald Dahl moyennant plus de 700 millions de dollars. En aval,
ils réservent l'exclusivité des droits de leurs programmes à leur seul bénéfice.

Mardi, dans le cadre de la présentation de son grand plan France 2030, Emmanuel Macron a prévenu en
creux que Netflix, Amazon, ou Disney+ faisaient peser un risque sur le soft power et la souveraineté
culturelle de la France. Le président de la République, qui veut « placer la France en tête des contenus
culturels et créatifs », a notamment poussé à la « création de grands studios » .

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« Les moyens déployés par les grandes plateformes mondialisées sont sans commune mesure avec ceux
des acteurs locaux

Netflix s'offre un studio de jeu vidéo


30 septembre 2021 / Le Figaro

La plateforme met la main sur Night School Studio. La stratégie gaming de Netflix est encore peu
lisible, mais semble vouloir renforcer le temps passé sur ses services.

JEUX VIDÉO Netflix pousse ses pions dans le secteur du jeu vidéo. Le géant du streaming a annoncé
l'acquisition de son premier studio de développement, Night School Studio. Basé en Californie, il s'est
fait connaître en créant le thriller surnaturel Oxenfree, sorti sur PC et consoles. Ce rachat, dont le
montant n'a pas été divulgué, intervient deux mois après le recrutement par Netflix de Mike Verdu, un
vétéran du secteur, passé par Atari, Electronic Arts, Zynga...

Le champion du divertissement prend un risque mesuré avec cette acquisition. Night School Studio est
une petite structure indépendante qui n'a que trois jeux à son actif. L'entreprise s'est taillé une solide
réputation dans la création de jeux où la narration tient une importance de premier ordre. Écoulé à plus
de 3 millions d'exemplaires, son jeu d'aventure Oxenfree, qui met en scène des adolescents perdus sur
une île mystérieuse, aurait dû être adapté au cinéma par Skybound Entertainment. Le projet a été
abandonné, mais Night School Studio a annoncé en début d'année avoir signé « avec un autre groupe »
pour faire d’Oxenfree une série télé. Cette dernière finira-t-elle sur Netflix ?

Les liens entre les univers du gaming et de la série télé sont en tout cas bien ténus. Par le passé, Night
School Studio a développé un jeu mobile autour de la série Mr. Robot. Pourquoi ne pas retenter
l'expérience avec des licences Netflix ? À moins que Night School Studio ne se concentre sur des
créations originales qui happeront l'attention des abonnés...

Le développement de Netflix dans le secteur du jeu vidéo est à un stade encore précoce. À la fin du mois
d'août, le géant du streaming a lancé une première phase de test en Pologne. Toujours en cours, celle-
ci permet aux membres polonais de télécharger gratuitement deux jeux mobiles signés Netflix sur les
smartphones Android : Stranger Things 1984 et Stranger Things 3. « Ce n'est que le tout début et nous
avons beaucoup de travail à faire dans les mois à venir, mais c'est le premier pas », avait tweeté le géant
sur son compte Netflix Geeked. Depuis mardi, l'expérimentation a été étendue à l'Espagne et à l'Italie.
Les abonnés ont accès à cinq titres, dont le jeu de cartes Card Blast, le jeu d'adresse Teeter Up ou encore
le jeu de basket Shooting Hoops. Ces titres n'ont aucun lien avec les programmes audiovisuels produits
par la plateforme.

L'objectif de Netflix est d'étoffer un peu plus son offre de divertissements en proposant des séries, des
films, des documentaires, des dessins animés et à présent, des jeux vidéo. Tous les contenus ont vocation
à être disponibles depuis sa plateforme, et sans surcoût pour les abonnés. Pour l'heure, et bien que
l'essentiel de sa consommation s'effectue à partir d'une télévision, Netflix s'oriente vers une offre de jeux
pour smartphone. Une stratégie sans doute plus simple à mettre en œuvre dans un premier temps. Et
qui s'adresse, en outre, à un public allant au-delà de la simple communauté des fans de jeux vidéo.

Bataille de l'attention

Si Netflix ambitionne de consolider ses franchises audiovisuelles telles que Stranger Things, en les
adaptant en jeux vidéo, la firme de Los Gatos a sans doute une autre idée en tête. En misant sur ce que
l'on appelle dans le jargon le « casual gaming », des petits jeux pour mobile très accessibles et ludiques
à l'image de Candy Crush ou Angry Birds, la société californienne s'offre aussi une arme anti-
désabonnement à peu de frais.

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Tous les acteurs du divertissement sont aujourd'hui en compétition pour le temps disponible des
consommateurs. À mesure que le nombre de concurrents augmente, que l'offre se fragmente, la bataille
s'intensifie. Chacun tente donc de retenir les utilisateurs au sein de son écosystème le plus longtemps
possible. Un client qui consomme, en effet, est un client qui ne sera pas tenté de résilier son abonnement.

Netflix rend son service de streaming gratuit au Kenya pour


s'implanter dans le pays
22 septembre 2021 / Société Générale de Presse

"On ne peut pas faire moins cher. Le service de streaming Netflix propose depuis lundi, au Kenya, une
offre d'abonnement totalement gratuite. (...) La formule gratuite - et sans publicité - ne contient
cependant qu'une faible portion du catalogue de la plateforme. Environ un quart selon des informations
de l'agence Reuters. De plus, elle ne sera accessible que via un mobile Android. Pour Netflix, l'idée est
de donner goût aux contenus proposés gratuitement, avec l'espoir que le public se reportera ensuite sur
ses offres payantes, l'une à 300 Ksh (2,3 euros) et l'autre à 1450 Ksh (11,2 euros).

En misant sur des abonnements aux prix faibles (ou nuls) les services pénètrent plus facilement des
marchés où le salaire moyen est moins important qu'aux Etats-Unis ou en Europe. L'Inde est un bon
exemple de cette stratégie. Amazon Prime Vidéo et Netflix y ont développé des offres ultra low-cost,
dans l'espoir d'atteindre 1,3 milliard de clients potentiels.

En lançant cette offre dédiée au Kenya, Netflix montre son intérêt pour l'Afrique. Face à une croissance
qui ralentit, le service aux 209 millions d'abonnés cherche à séduire le marché au 1,2 milliard d'habitants.
Un projet qui n'est pas anodin tant le manque d'infrastructure et le coût des connexions internet rendent
difficile l'implantation de services numériques. (...)

Mais si les services de VOD d'Amazon, Disney ou encore Netflix regardent avec intérêt le continent
africain, ils ne sont pas les premiers arrivés. Ils vont devoir lutter contre le groupe Canal, pour qui la
zone est génératrice de croissance. La filiale de Vivendi y comptabilise déjà 5 millions d'abonnés directs
et compte se développer encore davantage en Afrique de l'Est, notamment en Ethiopie.

Pour s'assurer un développement dans la zone, Canal+ a investi l'année dernière dans son premier
concurrent. Il a acheté 12 % du capital de MultiChoice, une plateforme de télévision payante aux 20
millions d'abonnés. Les investissements se font aussi du côté de la création, la filiale internationale de
Canal+ détient entre autres Lagos et iRoko, deux studios au cœur de l'industrie cinématographique
Nollywoodienne."

Afrique : pour le moment Showmax bat Netflix au nombre


d'abonnés
6 octobre 2021 / Agence Ecofin

En Afrique, les plateformes audiovisuelles Over The Top connaissent une importante croissance avec
la pénétration du smartphone et du haut débit. Le marché est tracté par le streaming et la vidéo à la
demande qui afficheront, selon le cabinet Digital TV Research, un parc d’abonnés africains de 15,06
millions en 2026.

En Afrique, Showmax, filiale du groupe MultiChoice, est, devant Netflix, le principal fournisseur de
streaming et de vidéo à la demande en termes de parc d’abonnés. C’est l’une des conclusions

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importantes d’une recherche dont les résultats ont été publiés cette semaine par Dataxis, une compagnie
spécialisée dans la fourniture de données sur le secteur audiovisuel.

Selon les chiffres collectés par Dataxis, le principal fournisseur de streaming et de vidéo à la demande
est Showmax avec 31,6% du nombre d’abonnés total pour le continent, estimé par le cabinet Digital TV
Research à 5,11 millions. Showmax devance Netflix qui affiche 29,7% de parts dans le parc d’abonnés
continental. Video Play, uniquement accessible en Afrique du Sud, se classe 3ème avec 26,9%. Toutes
les autres plateformes, Amazon Prime et Apple TV+ inclus, se partagent 11,9% du marché.

Netflix est donc la plateforme étrangère avec le plus de succès sur le continent africain, en attendant
Disney+ qui fera son entrée sur le continent en 2022. Il faut rappeler que selon les prévisions de Digital
TV Research, au plan mondial Disney+ va dépasser le parc d’abonnés de Netflix en 2026.

La place de Showmax, qui multiplie les succès avec ses émissions de téléréalité locales, ses films et
séries, ainsi que le contenu sportif, pourrait toutefois être menacée par le changement de stratégie de
Netflix qui a, par exemple, lancé des offres gratuites au Kenya pour attirer plus d’abonnés.

Un demi-milliard d'abonnés pour les géants de la vidéo à la


demande
17 août 2021 / Le Figaro

Disney, Netflix et Amazon risquent de se heurter à la saturation du marché.

STREAMING Est-ce l'effet Loki, dieu viking et personnage de Marvel, qui a droit à sa minisérie ? La
plateforme de vidéo à la demande Disney+ a gagné 12,4 millions d'abonnés en trois mois, pour en
totaliser 116 millions. Et ce en dépit d'une augmentation du prix de son abonnement mensuel dans de
nombreux pays. Fort du lancement de séries phares comme Loki ou Falcon et le soldat de l'hiver ou de
films Pixar, tels que Luca, le service du géant américain est celui qui a affiché les meilleures
performances du secteur sur les dix-huit premiers mois de son existence.

Si impressionnante soit-elle, la progression de Disney+ n'en marque pas moins un ralentissement de sa


croissance trimestrielle, alors que la plateforme fêtera ses deux ans en novembre. Les ambitions de
Disney pour 2024 en tiennent compte : le groupe table sur un portefeuille de 230 à 260 millions
d'abonnés à cet horizon. L'objectif est ambitieux au regard des 209 millions d'abonnés de Netflix, atteints
au bout de dix ans.

Au cours du dernier trimestre, les trois géants de la VOD (Disney+, Netflix et Amazon Prime, qui
revendique 175 millions d'utilisateurs) ont franchi le cap symbolique du demi-milliard de clients dans
le monde. Ce à quoi il faut encore ajouter les utilisateurs d'autres plateformes, comme Apple TV+, qui
ne détaille pas le nombre d'utilisateurs de ce service, ou HBO+. Les plateformes de VOD ont vu leur
activité dopée par les confinements. Elles ont aussi bénéficié des évolutions technologiques, avec des
connexions qui s'améliorent dans les grands pays occidentaux. Les fabricants de téléviseurs se sont eux
aussi mis à l'heure du streaming en intégrant directement l'accès à ces services à leurs magasins
d'applications. Cette intégration a un double avantage pour les plateformes : leurs services sont
finalement accessibles sur grand écran et elles échappent à la commission prélevée dans les magasins
d'applications de Google et Apple.

Malgré cette apparente bonne santé du secteur, les études se multiplient pour tirer la sonnette d'alarme.
Mi-juillet, les analystes de Kantar alertaient sur « un ralentissement de la croissance », avec un
aplanissement de la courbe sur le marché américain. Le secteur du streaming serait-il proche de la

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saturation ? Selon Kantar, 74,6 % des ménages américains, soit 95,8 millions, disposent d'au moins un
abonnement à un service de VOD.

De nouveaux horizons

Face au risque de saturation du marché aux États-Unis, les regards se tournent vers les autres pays. Ainsi,
40 % des nouveaux clients gagnés par Disney+ viennent d'Inde. Une destination pour laquelle le groupe
a adapté sa stratégie : son service est distribué par un partenaire à un tarif bien inférieur à celui des pays
occidentaux et pimenté par des productions tout droit sorties des studios de Bollywood. De quoi mieux
satisfaire les attentes de ses clients locaux.

La déclinaison locale de continus globaux n'est d'ailleurs pas l'apanage de Disney. Amazon a ainsi acquis
en France la majorité des droits pour la Ligue 1 de football, quelques jours avant l'annonce de l'arrivée
de Lionel Messi au PSG. De quoi booster les souscriptions à son service, facturé 12,99 euros par mois,
en sus des 5,99 euros mensuels de l'abonnement à Prime.

Trois acteurs dominent le marché : 209 millions d'abonnés à Netflix / 175 millions d'abonnés à Amazon
Prime /116 millions d'abonnés à Disney+

L'achat de MGM par Amazon marquera-t-il la fin du


règne de Netflix ?
5 juin 2021 / La Tribune

OPINION. L’investissement dans l’acquisition ou la production de contenus originaux devient une


munition importante dans la guerre des contenus exclusifs que se livrent les plates-formes.

L'impitoyable guerre que se livrent les leaders mondiaux de la vidéo à la demande a atteint son
paroxysme avec l'acquisition du mythique studio hollywoodien MGM (Metro Goldwyn Mayer) par le
géant Amazon, le 26 mai, lors d'une transaction s'élevant à 8,45 milliards de dollars. La vente de MGM
est survenue après plus de six mois de négociations. Le studio américain, symbolisé par un « lion
rugissant », était déjà affaibli par d'importantes difficultés financières avant que la pandémie et la
fermeture prolongée des salles de cinéma ne lui portent un coup de grâce. Malgré la faible valorisation
boursière du studio MGM (estimée à seulement 5,5 milliards de dollars, il y a quelques mois), plusieurs
géants de l'industrie numérique, dont Apple, étaient intéressés par son rachat. Mais c'est Amazon qui a
remporté la mise et marqué l'histoire en devenant le premier acteur de l'industrie du « streaming » vidéo
à acquérir un studio majeur d'Hollywood. Amazon affiche ainsi clairement ses ambitions de détrôner
Netflix. Le service Prime Video compte déjà près de 200 millions d'utilisateurs, talonnant de près
l'entreprise californienne avec ses 208 millions d'abonnés. La course pour la première place sur le
marché de la vidéo à la demande n'a jamais été aussi serrée. Nos intérêts de recherches portant sur la
découvrabilité et l'accès à une diversité de contenus en ligne nous incitent à effectuer une veille régulière
des transformations et des déséquilibres provoqués par les plates-formes de diffusion numérique qui
contrôlent le marché mondial des biens et services culturels. Amazon s'offre la part du lion ! À l'ère de
la consommation multiplateformes, le moyen le plus efficace pour se démarquer et séduire un auditoire
en quête permanente de nouveautés et d'une diversité de choix est d'étoffer et de renouveler
régulièrement son catalogue. L'investissement dans l'acquisition ou la production de contenus originaux
devient une munition importante dans la guerre des contenus exclusifs entre plates-formes. La plate-
forme qui ne peut pas offrir suffisamment et assez rapidement de contenu pour gagner et fidéliser des
abonnés ne pourra pas rivaliser avec ses concurrents. D'ailleurs, le Wall Street Journal observe que
l'acquisition de MGM constitue un aveu de la difficulté qu'avait jusqu'ici Amazon à produire
suffisamment de contenus pour satisfaire la demande des abonnés de son service Prime Vidéo. Dans le
gigantesque club vidéo qu'est devenu Internet, on ne peut plus miser uniquement sur la qualité du

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catalogue comme le fait par exemple Apple, avec le service Apple TV+. Aux yeux des abonnés, le
nombre de titres disponibles acquiert désormais autant, voire plus, d'importance que la qualité des
contenus offerts. Amazon fait donc main basse sur un véritable trésor pour enrichir son catalogue, en
obtenant la propriété intellectuelle exclusive de 4 000 longs métrages (dont Le silence des agneaux,
Hobbit, Le magicien d'Oz, Rocky, Terminator, La panthère rose, et toute la saga James Bond). Il faut
ajouter à cela environ 17 000 programmes télévisés de la MGM, avec des séries vedettes comme
Stargate, Vikings, ou La servante écarlate. Ce catalogue contient des œuvres cinématographiques ayant
gagné plus de 180 Oscars et 100 Emmys. Par ailleurs, la croissance exponentielle des revenus générés
par le commerce électronique et par l'utilisation des services d'infonuagique dans le contexte de la
pandémie ont permis à Amazon de tripler ses profits en 2020 et de connaître une hausse de 44 % de son
chiffre d'affaires sur un an. Ces résultats lui laissent ainsi une marge de manœuvre très confortable pour
investir près de 11 milliards de dollars dans la production de contenu original. Amazon augmente ainsi
de près de 40 % son offre par rapport à l'année précédente. Elle a investi également près de 465 millions
de dollars dans la première saison de la série Le seigneur des Anneaux, déjà considérée comme la série
télévisée la plus onéreuse de l'histoire. Un redécoupage du paysage audiovisuel Alors que des prévisions
anticipaient déjà en 2019 que le nombre d'abonnements aux services de vidéo à la demande devrait
atteindre près d'un milliard à travers le monde, ces services ont connu un essor fulgurant durant la
pandémie. À lire aussi : Les salles de cinéma survivront-elles à la crise sanitaire mondiale ? Une étude
récente du Conseil supérieur de l'audiovisuel en France conclut que le marché se structure désormais
autour de quelques acteurs numériques mondiaux, qui renforcent leurs investissements dans la
production locale. Ils poussent ainsi les acteurs historiques à revoir leurs stratégies de différenciation,
grâce à d'ambitieuses opérations de rachat ou de fusion, de positionnement éditorial, d'agrégation de
contenus exclusifs et de développement d'offres alternatives. La démultiplication de l'offre oblige aussi
les acteurs à composer avec de nouveaux profils de consommateurs (dont une forte proportion de jeunes)
qui s'abonnent et se désabonnent régulièrement d'un service audiovisuel pour en tester d'autres.
Concurrencés par les géants du numérique, qui sont passés du statut de simples distributeurs et diffuseurs
à celui de producteurs de contenus, les majors de l'industrie hollywoodienne ont dû faire preuve d'agilité
et repenser leur modèle d'affaires. La course aux abonnés Le studio MGM était l'un des derniers
pionniers de la production cinématographique américaine à ne pas s'être adossé à une plate-forme de
vidéo en ligne ou à ne pas avoir créé son propre service de vidéo à la demande. À titre d'exemple, Disney
a fait l'acquisition en mars 2019 de la 21st Century Fox et a mis la main sur la plate-forme Hulu, avant
même le lancement de son propre service Disney+. Ce dernier a passé le cap des 100 millions d'abonnés
en un an, avec un catalogue enrichi des contenus des studios Fox, Pixar, Marvel ou Lucasfilm. Autre
exemple : après le rachat en 2018 du conglomérat Warner Media et après avoir lancé en mai 2020 sa
plate-forme HBO Max, le géant des télécommunications AT&T vient de décider de fusionner ses
activités avec Discovery. Il pourra ainsi investir davantage dans des contenus originaux et proposer plus
de choix aux spectateurs avec de nouvelles expériences vidéo. La stratégie agressive d'Amazon a de
quoi faire trembler Netflix, dont le nombre de nouveaux abonnés diminue en raison d'un manque de
renouvellement des contenus et d'une saturation sur certains marchés (notamment aux États-Unis et au
Canada). Parallèlement, avec l'achat de MGM et l'acquisition de son riche catalogue de films, il est fort
à parier que le nombre de nouveaux abonnés d'Amazon Prime Video monte en flèche dans les prochains
mois ou prochaines années. Amazon pourrait également priver ses principaux rivaux (Netflix, Disney+,
HBO Max, Apple TV+) de l'exploitation des contenus exclusifs autorisés sous licence de son nouveau
catalogue. Netflix prépare sa riposte Pour conserver sa position de leader, Netflix est contraint
d'accélérer sa croissance sur des marchés prometteurs tels que l'Afrique francophone et de diversifier
ses services, en proposant des contenus inédits. La multinationale a récemment sondé certains de ses
utilisateurs concernant une nouvelle plate-forme nommée N-Plus, qui pourrait proposer les
fonctionnalités d'un réseau social (avec critiques et commentaires partageables entre amis ou avec la
communauté), combinées à un site d'actualités incluant des balados, des listes de lectures personnalisées
et des informations sur les prochaines productions. D'autres rumeurs circulent selon lesquelles le groupe
californien nourrirait des ambitions pour le marché du jeu vidéo et envisagerait de lancer d'ici 2022 un
service pour concurrencer Apple Arcade. En allant au-delà de son cœur d'activité pour se positionner
dans l'industrie vidéoludique, la plate-forme prendrait un risque somme toute mesuré. Cela lui
permettrait d'offrir un divertissement interactif avec des contenus mêlant fiction et jeu vidéo afin de
susciter davantage l'engagement des utilisateurs et l'intérêt de nouveaux publics.

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Cinéma : la colère enfle à Hollywood contre Warner et HBO
Max
« Warner Bros pourrait bien avoir tué la franchise « Dune » et menace le cinéma en général », tonne le
réalisateur canadien Denis Villeneuve dans « Variety ». D'autres voix continuent de s'élever contre la
décision du groupe américain qui va sortir, en 2021, 17 films simultanément au cinéma et sur son service
de streaming aux Etats-Unis. Dont des blockbusters comme « Matrix 4 » ou « Dune ».

Haro sur Warner Media et HBO Max dans l'industrie du cinéma. « Warner Bros pourrait bien avoir tué
la franchise « Dune » et menace le cinéma en général. […] Le streaming à lui tout seul ne peut pas faire
vivre l'industrie du film telle que nous la connaissions avant le Covid », a tonné le réalisateur canadien
Denis Villeneuve, dans une tribune publiée par « Variety », qui précise avoir travaillé plus de trois ans
sur son film « Dune ».

Il y a une semaine, Warner Bros. a annoncé qu'il comptait sortir 17 de ses films prévus en 2021,
concomitamment, au cinéma et sur son offre de streaming vidéo HBO Max accessible uniquement aux
Etats-Unis. Ce qui doit concerner des superproductions comme « Matrix 4 » ou « Dune »… Cette
décision a suscité énormément de remous outre-Atlantique, alors que les exploitants de salles sont
quasiment sur les genoux avec la crise sanitaire ; en étant privés d'une fenêtre de diffusion exclusive sur
des blockbusters très prisés du grand public, AMC, Regal et consorts perdraient un atout majeur pour
attirer les spectateurs.

Christopher Nolan (réalisateur de « Tenet, » « Interstellar »), Adam Aron (PDG d'AMC), le producteur
Jason Blum (« Get Out », « Whiplash ») : les critiques acerbes pleuvent, depuis une semaine, sur Warner,
HBO Max et leur propriétaire, l'opérateur américain AT & T. « Il ne s'agit que de la survie du géant des
télécoms, qui porte actuellement une dette colossale de plus de 150 milliards de dollars », écrit aussi
Denis Villeneuve. Le studio hollywoodien Legendary (qui a produit « Dune ») pourrait, lui, contester
en justice la décision de Warner.

Un « win-win-win » selon le PDG d'AT & T

Le risque de se mettre tout l'écosystème à dos est réel pour ce dernier. Le très influent agent
hollywoodien, Richard Lovett, patron de CAA (Creative Artists Agency) a lui écrit une lettre
directement à Jason Kilar (PDG de Warner Media) dans laquelle il juge la décision de Warner «
inacceptable », arguant que celle-ci a été prise de manière unilatérale sans « considération des souhaits
de nos (leurs) clients ni de leurs droits contractuels », a révélé, jeudi, « Deadline ». « Inacceptable »,
tacle aussi la DGA (Directors Guild of America, le syndicat des réalisateurs : NDLR), qui menace de
porter l'affaire en justice.

Netflix investit 1 milliard de dollars dans ses studios de cinéma

Ce mardi, le PDG d'AT & T, John Stankey, avait pourtant tenté de circonscrire l'incendie lors d'une
conférence d'investisseurs organisée par UBS. Il a ainsi qualifié la décision de Warner de « win-win-
win » pour son groupe, les spectateurs et ses partenaires dans l'industrie du cinéma. Glissant au passage
que HBO Max compte désormais 12,6 millions d'abonnés « activés » - ce qui comprend les abonnés
directs et ceux ayant accès au service de SVoD via une souscription à d'autres offres de HBO -, contre
8,6 millions fin septembre, il a ajouté qu'in fine, le marché devra se conformer « à ce que les
consommateurs choisissent de faire ».

Des mots qui n'ont donc guère apaisé le landerneau hollywoodien qui s'inquiète aussi et surtout que
d'autres géants du divertissement prennent le même virage stratégique que Warner. Des craintes qui
pourraient bien être fondées. Jeudi, un certain Disney a notamment annoncé, au cours de son « Investor

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Day », que son film d'animation « Raya and the Last Dragon » sortira simultanément dans les salles de
cinéma et sur sa plate-forme Disney + en mars. La firme - dont le dernier Pixar, « Soul », n'est pas passé
par la case cinéma en novembre -, n'a pas annoncé qu'elle ferait de même avec l'ensemble de son
catalogue. Mais les lignes bougent très vite actuellement dans le septième art…

Sony achète pour 1 milliard d'euros le leader américain du


streaming de dessins animés japonais
Le groupe japonais reprend la société californienne Crunchyroll aujourd'hui détenue par WarnerMedia,
une filiale d'AT&T. Il veut renforcer son empreinte dans l'économie de l'abonnement pour casser sa
dépendance à la vente de produits électroniques beaucoup plus soumise aux cycles économiques.

Continuant d'investir dans son offre de vidéo et de musique à la demande pour casser sa dépendance à
la vente de produits ou de composants électroniques, Sony a indiqué, ce jeudi, qu'il allait racheter, pour
1,18 milliard de dollars (1 milliard d'euros), la plateforme Crunchyroll, spécialisée dans la diffusion de
dessins animés japonais. Techniquement, c'est la société Funimation Global Group. - une coentreprise
associant Sony Pictures Entertainment et la filiale Aniplex de Sony Music Entertainment - qui va
reprendre, dans une transaction réglée en numéraire, la société californienne aujourd'hui détenue par
WarnerMedia, elle-même propriété de l'opérateur télécoms AT&T.

Si le géant américain inscrit cette vente dans le grand programme de cession d'actifs jugés « non
stratégiques » par son nouveau PDG, John Stankey, Sony y voit, lui, une occasion unique de renforcer
son empreinte sur le marché mondial de l'« anime », qui ne cesse de croître hors des frontières du Japon.
« Nous avons une compréhension profonde de cette forme d'art mondiale et nous sommes bien placés
pour fournir un contenu exceptionnel aux publics du monde entier », s'est réjoui, dans un communiqué,
Tony Vinciquerra, le PDG de Sony Pictures Entertainment.

Selon l'Association de l'animation japonaise, la vente de contenus à l'étranger génère désormais presque
autant que le chiffre d'affaires réalisé dans l'Archipel. Au total, le marché du dessin animé japonais a
ainsi atteint, à l'échelle planétaire, 21 milliards de dollars en 2018, soit le double de ce qu'il réalisait au
début des années 2000. Une poussée en grande partie portée par les plateformes de VoD telles que
Netflix, Funimation ou Crunchyroll. Crunchyroll, 30.000 épisodes au catalogue

Fondé en 2006 à San Francisco, Crunchyroll a été l'un des pionniers sur ce segment et a accumulé un
catalogue de 1.000 titres composés de plus de 30.000 épisodes. Concentrée d'abord sur les Etats-Unis,
la société a ensuite développé son offre en Europe avec la prise de contrôle notamment, l'an dernier, du
distributeur franco-allemand d'anime VIZ Media Europe. Le groupe revendique ainsi aujourd'hui 3
millions d'abonnés payants et un fichier de 90 millions d'utilisateurs réguliers présents dans plus de 200
pays.

Sous l'impulsion de son PDG, Kenichiro Yoshida, Sony mise massivement sur le développement de
cette économie de l'abonnement, que ce soit dans la vidéo, la musique ou le jeu vidéo avec ses solutions
pour les utilisateurs des consoles PlayStation. Le groupe japonais espère ainsi compenser, sur le long
terme, la volatilité de ses activités industrielles de production de capteurs d'images, de casques audio ou
de smartphones, plus soumis aux cycles de la conjoncture économique mondiale.

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Pour rivaliser avec Netflix, Warner privilégie HBO au
détriment des salles de cinéma
En 2021, le studio proposera en même temps ses longs-métrages - dont des blockbusters très attendus -
sur grand et petit écran aux Etats-Unis.

Un coup de tonnerre qui fragilise les exploitants de salles.

« Clairement, WarnerMedia a l'intention de sacrifier une portion considérable de la rentabilité de son


studio de films et celles de ses partenaires dans la production et les réalisations de films, pour financer
sa start-up HBO Max », peste le patron d'AMC, Adam Aron, auprès du site Hollywood Reporter. Le
directeur général du premier exploitant de salles au monde veut un « dialogue immédiat et urgent » avec
WarnerMedia.

Pourquoi un tel courroux ? Alors que les exploitants de salles sont en très grande difficulté outre-
Atlantique en raison de la crise sanitaire et économique, Warner Bros [qui a pour maison mère
WarnerMedia, NDLR] a fait savoir, jeudi, qu'il avait l'intention de sortir concomitamment l'intégralité
de ses films prévus en 2021, dans les salles obscures et sur la plateforme de SVoD du groupe, HBO Max
(disponible uniquement aux Etats-Unis).

Ce qui va concerner 17 longs-métrages, dont des blockbusters très attendus comme « Matrix 4 » ou «
Dune », qui seront disponibles pendant un mois sur HBO Max, sans surcoût. Une manière pour le groupe
de mettre du vent dans les voiles de son offre lancée en mai et qui doit ferrailler avec Netflix, Disney+
et consorts.

Mais le coup est terrible pour les exploitants américains de cinémas qui ont un besoin impérieux de la
fenêtre de diffusion exclusive dont ils bénéficient actuellement pour ces superproductions destinées au
grand public, s'ils veulent attirer un maximum de spectateurs en salle.

Traditionnellement, l'usage voulait que les grosses productions hollywoodiennes soient proposées
uniquement dans les salles obscures pendant 90 jours aux Etats-Unis, avant d'être disponibles sur
d'autres supports. Outre-Atlantique, la chronologie des médias n'est pas encadrée comme en France via
un accord interprofessionnel, mais repose sur des « deals » noués entre studios et salles.

La déception « Tenet »

En juillet, le studio Universal et AMC avaient notamment trouvé un terrain d'entente via un accord
pluriannuel ramenant ce délai minimum à 17 jours. Un coup dur déjà pour AMC, mais à des années-
lumière de la décision radicale prise par WarnerMedia. « Nous vivons dans une période sans précédent,
a avancé Ann Sarnoff, la PDG de Warner Bros. [Cela] nécessite de faire preuve de créativité pour trouver
des solutions. »

Depuis plusieurs mois, les grands studios cherchent tous le bon calibrage pour leurs blockbusters. Sorti
en salle cet été et distribué par Warner Bros., « Tenet » a depuis généré près de 358 millions de dollars
de recettes, selon Box Office Mojo. Un chiffre encore insuffisant pour être rentable et une contre-
performance qui a poussé de nombreux studios à décaler de plusieurs mois la sortie de leurs
superproductions (dont le dernier « James Bond » distribué par Universal).

En juillet, Disney avait quant à lui proposé aux abonnés de sa plateforme de SVoD, Disney+, la populaire
comédie musicale « Hamilton ». Disponible sans surcoût associé, celle-ci a immédiatement fait décoller
les inscriptions sur Disney+.

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Puis le géant du divertissement a lancé l'adaptation en film de son dessin animé « Mulan » directement
sur son offre de streaming vidéo, dans certains pays, au prix de 30 dollars l'unité. Un échec en raison
du tarif trop élevé.

Le 25 décembre, le blockbuster « Wonder Woman 1984 » sera, lui, lancé le même jour au cinéma et en
streaming aux Etats-Unis. Le film sera disponible le 16 décembre dans les pays où les cinémas sont
ouverts - comme en France. Cette superproduction est l'œuvre de… WarnerMedia, qui va réaliser là un
test grandeur nature de son nouveau modèle économique. Le géant joue très gros sur ce coup-là.

Télévision : stratégie payante pour Hulu, pépite discrète de


Disney
Ce service, mélangeant des chaînes de télévision et un catalogue de contenus, compte 4,1 millions
d'abonnés aux Etats-Unis. L'offre s'adresse avant tout aux foyers américains qui résilient leur
abonnement au câble ou au satellite.

Les prix des offres de streaming vidéo sont sur une tendance haussière aux Etats-Unis. Elles ne sont
pas les seules. Hulu, la pépite de Disney, vient d'annoncer qu'elle allait augmenter de 18 % les tarifs
mensuels de son offre Hulu Live TV, qui va passer de 55 à 65 dollars. Ce service de télévision en direct,
dit aussi « skinny bundle » (un bouquet de chaînes de télévision à bas prix) se veut une alternative aux
offres du câble outre-Atlantique puisqu'il permet d'accéder à un cocktail de plus de 65 chaînes, locales,
sportives, nationales ou encore de divertissement (ESPN, CNN, VICE, etc.) ainsi qu'à l'offre SVoD
(avec publicités) de Hulu qui propose son catalogue de programmes (« The Handmaid's Tale », « Mrs.
America »…).

En juillet, son concurrent direct sur ce segment de marché, YouTube TV, avait aussi augmenté son prix
à 65 dollars par mois. Lancé en 2017, Hulu Live TV fait la course en tête dans le secteur avec 4,1
millions d'abonnés outre-Atlantique, soit près de 1 million de clients de plus que l'offre de la plate-forme
de vidéos appartenant à Google.

En un an, Hulu Live TV a vu son parc d'utilisateurs payants augmenter de 41 %. En décembre 2019, le
groupe avait déjà augmenté le prix de ce service de 10 dollars (de 45 à 55 dollars), ce qui n'a en rien
cassé sa dynamique.

Ciblant spécifiquement les « cord-cutters » (les foyers américains qui coupent leur abonnement au câble
ou au satellite), ce service est décrit comme un réservoir de croissance par Bob Chapek, le patron de
Disney qui est l'actionnaire majoritaire de Hulu. « Nous sommes vraiment optimistes par rapport à ce
business. […] C'est vraiment la solution complète, je pense », a-t-il assuré dans les échanges avec les
analystes après la publication des derniers résultats trimestriels du géant de l'entertainment, jeudi dernier.

Plus de 36 millions d'abonnés payants en tout

En tout, Hulu compte 36,6 millions d'abonnés, soit un bond de 28 % sur un an. Valorisé 27,5 milliards
de dollars, le groupe propose également deux autres offres de SVoD : l'une à 6 dollars par mois avec de
la publicité, soit moins cher que l'offre d'entrée de gamme de Netflix (8 dollars, mais sans publicité) qui
a récemment augmenté les prix de ses deux autres offres de streaming vidéo aux Etats-Unis. L'autre à
12 dollars (sans publicité), un prix mensuel presque deux fois plus élevé que le service Disney+ (7
dollars). Sans compter que Hulu est aussi intégré dans l'offre groupée incluant Disney+, Hulu et ESPN+
moyennant 13 dollars par mois.

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En difficulté sur ses métiers plus traditionnels (parcs d'attractions, cinéma, croisières), Disney parvient
à garder la tête hors de l'eau grâce au streaming. Lancée il y a un an, son offre Disney+ a déjà séduit 73
millions d'abonnés payants dans le monde. Et le groupe mise sur Hulu pour accélérer encore dans cette
activité : le service devrait être déployé à l'international en 2021.

Les plateformes de streaming menacées de censure en Inde


L'Inde a décidé de placer les plateformes de streaming comme Netflix, Amazon Prime ou encore
Hotstar sous la juridiction du ministère de l'Information et de la Diffusion. Elles échappaient jusque-là
au redoutable censeur indien.

Au pays de Bollywood, la décision était redoutée de longue date. Les plateformes de streaming, ainsi
que les sites d'information en ligne, relèvent désormais de la juridiction du ministère de l'Information et
de la Radiodiffusion. La brève notification officielle, publiée mercredi 11 novembre, ne fournit aucune
précision supplémentaire mais fait craindre un contrôle accru du gouvernement, voire une censure, sur
les contenus diffusés par ces plateformes.

Jusque-là, les actualités et le divertissement en ligne se trouvaient sous la tutelle du ministère du


Numérique et des Technologies de l'information, « qui avait choisi de ne pas réguler le contenu », précise
Nikhil Pahwa, militant pour les droits numériques et fondateur du portail MediaNama. « Les médias
traditionnels sont déjà régis - et de façon plutôt régressive - par le ministère de l'Information et de la
Radiodiffusion, qui est en substance le ministère indien de la Vérité », regrette Nikhil Pahwa.

Un « bip » sonore pour recouvrir un langage fleuri

Depuis l'arrivée des plateformes de streaming, les Indiens ont pu accéder plus facilement à des contenus
audacieux, là où les productions qui sortent en salle doivent passer à la moulinette de l'organisme de
certification des films (plus communément appelé le « Comité de censure ») pour en ressortir aseptisées.

Les créations originales d'Amazon ou de Netflix abordent librement des thèmes comme la sexualité ou
le nationalisme hindou, les personnages peuvent y employer un langage fleuri, d'ordinaire recouvert par
un « bip » sonore dans les salles obscures. Une révolution. Sur les réseaux sociaux, de nombreux Indiens
ont donc fait part de leur déception. « Le gouvernement se comporte comme des grands-parents. C'était
bien le temps que ça a duré, Amazon Prime, Netflix », regrette ainsi l'un d'entre eux sur Twitter.

« Ce changement de tutelle ne signifie pas que le ministère de l'Information et de la Radiodiffusion va


se mettre à réguler les contenus immédiatement mais le message est clair : le gouvernement va agir
davantage », clarifie Raman Chima, avocat associé à l'organisation de défense des droits numériques
AccessNow.

Auto-censure

Selon les informations des « Echos », le gouvernement ne souhaiterait pas assumer « le fardeau de la
réglementation des contenus » des plateformes de streaming et des médias en ligne et envisagerait la
possibilité d'un mécanisme d'autorégulation ou la création d'un régulateur indépendant. Plus d'une
dizaine de plateformes de streaming, locales et internationales, ont d'ailleurs signé un code de régulation
cette année.

Mais ce dernier n'a pas reçu d'approbation officielle. « Cette décision du gouvernement revient aussi à
dire aux intéressés : 'Faites ce qu'on vous dit, sinon nous réglementerons' », décode Raman Chima. En
clair, une façon de pousser à l'auto-censure.

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Discovery se lance dans le streaming aux Etats-Unis
Le groupe disposera de deux offres, dont un service de SVoD à 7 dollars par mois.

Un de plus. Aux Etats-Unis, un nouvel acteur historique de la télévision payante va débarquer dans le
streaming vidéo ; le groupe Discovery vient d'annoncer qu'il allait débarquer à son tour dans l'arène en
lançant son offre le 4 janvier.

Intitulée « Discovery+ », celle-ci va se découper sous deux formats : un service de SVoD à 7 dollars par
mois ; et un autre au tarif de 5 dollars, partiellement financé par de la publicité. Un vrai pari pour ce
poids lourd de la télévision payante qui pèse près de 13 milliards de dollars en Bourse, produit la célèbre
émission « Shark Week » et possède notamment Eurosport. Discovery+ va avoir fort à faire pour
bousculer les acteurs historiques et nouveaux du secteur. Disney+, Peacock, Apple TV+, HBO Max…
: en un peu plus d'un an, une cohorte de nouveaux services ont fait leur apparition outre-Atlantique aux
côtés d'Amazon Prime Video et Netflix.

« Excellent compagnon »

Pour se différencier de ses rivaux, Discovery+ va essentiellement piocher dans ses productions maison
pour nourrir le catalogue de contenus de ses deux offres de streaming. La firme - qui a pour actionnaire
principal le « tycoon » des médias John Malone - va notamment intégrer dans Discovery+ ses
documentaires et émissions sur la nature, la gastronomie et autres en provenance des chaînes Discovery
Channel ou Animal Planet.

Afin d'éviter l'affrontement frontal avec HBO Max, Netflix et consorts, le groupe ne compte pas aller
sur le terrain des séries télévisées. « Peut-être que les séries télé sont plus sexy mais ce que les gens
regardent réellement, ce sont nos programmes », a affirmé, bravache, le PDG de Discovery, David
Zaslav, ajoutant que Discovery+ sera un « excellent compagnon » des services les plus populaires
comme Netflix ou Disney+.

SVoD : Alchimie va entrer en Bourse


Streaming : Composée d’une cinquantaine de chaînes consommées en linéaire et à la demande, la
plateforme vidéo française Alchimie prévoit de lever une vingtaine de millions d’euros lors de son
introduction en Bourse à Paris, sur Euronext Growth, le 27 novembre. Avec 125 salariés, elle compte
générer 27 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2020. Ambitieuse, la société vise 58 millions d’euros
de revenus en 2022 avec 210 chaînes et la rentabilité au quatrième trimestre de cette année-là.

Quibi ou l'accident industriel du siècle à Hollywood


Près de 2 milliards de dollars levés, un casting alléchant de stars hollywoodiennes, un service 100 %
smartphone : Quibi entendait révolutionner l'industrie du streaming vidéo. Mais après seulement six
mois d'existence, le groupe s'est brutalement déclaré en faillite la semaine dernière. Retour sur un
naufrage.

Dire que Jeffrey Katzenberg en avait rêvé comme l'ultime sacre d'une carrière riche en paris qu'il aime
à situer « entre l'impossible et l'improbable ». N'est-ce pas lui qui avait tenu tête, à raison, à tout l'état-

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major de Disney qui ne croyait pas au « Roi Lion » ? N'avait-il pas été à l'avant-garde de l'animation en
fondant le studio DreamWorks aux côtés de Steven Spielberg ?

Le réveil a donc dû être des plus douloureux ce mercredi 21 octobre pour le dernier nabab d'Hollywood
: à peine six mois après son lancement, Quibi - le projet auquel il consacrait ses jours et ses nuits depuis
plus de deux ans - a officialisé ce jour-là sa fermeture pure et simple. A la clé, le licenciement de
quelques 250 salariés et la recherche de repreneurs pour ses actifs.

Un accident industriel inimaginable en début d'année. A l'époque, le groupe plastronnait, affirmant sa


volonté de révolutionner le monde du streaming vidéo avec ses formats courts (de 5 à 10 minutes) - des
films et des séries à gros budgets, des talk-shows et des news -, destinés aux smartphones. Un mélange
de « nouvel HBO centré sur les formats courts » et de « Spotify de l'information » pour les 25-35 ans,
résumait il y a dix-sept mois Jeffrey Katzenberg aux « Echos ».

Un duo de dirigeants qui présentait bien

Le ton s'est fait beaucoup plus laconique le 21 octobre dernier. « Nous avons envisagé et épuisé toutes
les options qui se présentaient à nous », ont écrit conjointement, dans un billet publié sur Medium, Jeff
Katzenberg et Meg Whitman, l'autre dirigeante de Quibi (ancienne patronne d'eBay et de Hewlett-
Packard Enterprise). Le duo présentait pourtant bien : quatre-vingts ans dans le business au compteur à
eux deux. Lui, un vétéran d'Hollywood. Elle, une dirigeante expérimentée, ayant fait toute sa carrière
dans la tech.

Pour lancer Quibi, l'entregent et les réseaux respectifs des deux personnalités fait d'ailleurs des
merveilles. Ils réussissent à lever 1,8 milliard de dollars auprès d'un panel d'investisseurs, un score à
faire pâlir d'envie la mieux dotée des licornes. Disney, Sony, ViacomCBS, NBC Universal, Time
Warner, Google, Facebook ou Alibaba : soucieux de ne pas manquer « the next big thing », les plus
grands noms d'Hollywood et de la Silicon Valley mettent tous au pot.

De quoi financer dès la première année 175 programmes découpés en 9.600 épisodes. Steven Spielberg,
Benicio del Toro, Jennifer Lopez, Idris Elba ou Bill Murray : le casting est alléchant. Sans oublier le «
turnside », cette technologie qui permet de renverser l'image - et parfois de proposer un plan différent -
selon que l'on regarde son smartphone en format portrait ou paysage. Un aspect majeur de la plateforme.
Les contenus sont pensés pour y être picorés entre deux métros ou dans une file d'attente - la marque
Quibi est d'ailleurs une contraction de « quick bites », pour « bouchées rapides ».

« Nous ne faisons pas partie de la guerre du streaming »

Des fonds, des noms, de l'innovation… la plateforme présente donc de beaux atours. Mais aussi de
(vaines) certitudes. « Notre modèle est littéralement pensé pour dégager des marges importantes, nous
n'avons pas besoin de gagner une audience considérable pour être rentable », fanfaronne alors
Katzenberg, qui dégaine deux offres : un abonnement mensuel à 4 dollars (avec publicité) ou 8 dollars
(sans).

« Nous ne faisons pas partie de la guerre du streaming. […] Nous sommes en compétition avec la gratuité
», énonce-t-il aussi en référence à TikTok, Instagram et YouTube. Le bientôt septuagénaire ignore
encore qu'il va se retrouver pris en étau entre les poids lourds de la SVoD et les plateformes sociales les
plus populaires.

D'autant que les premiers errements stratégiques apparaissent alors que le lancement approche. « Ils ont
fait beaucoup de publicités, avec des spots qui sont passés pendant les Oscars en février. Mais cela
mettait toujours en avant le produit et jamais le contenu, se souvient Gilles Pezet, chez NPA Conseil.
Résultat, tout le monde savait ce qu'est Quibi, mais personne n'a jamais compris ce qu'il y avait dedans.
»

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Quibi a subi la crise sanitaire de plein fouet

Surtout, le vétéran d'Hollywood qu'est Katzenberg n'a pas vu venir ce qu'on appelle dans le jargon des
séries le « twist » de l'année 2020 : Covid-19, crise sanitaire et confinement. Rien de pire ne pouvait
arriver à un service pensé à 100 % pour la mobilité et qui débarque fraîchement sur le marché.

Mais le lancement est bien maintenu à début avril. Seul changement : Quibi réajuste le tir concernant
son offre d'essai gratuite qui passe de 15 à 90 jours. Une fausse bonne idée et une vraie erreur stratégique.
« Trois mois gratuits avec un catalogue de programmes aussi peu épais, ça n'avait aucun sens », tacle
Gilles Pezet.

Loi de Murphy oblige, cette bévue se double rapidement d'une complication de taille : la société new-
yorkaise Eko Interactive attaque Quibi en justice, l'accusant d'avoir violé son brevet avec sa technologie
permettant de visionner les vidéos en plein écran. Une action en justice soutenue financièrement par
Elliott, un fonds activiste qu'aucune entreprise au monde n'aime voir traîner dans les parages…

Une application trop hermétique

Les semaines passent, le confinement se prolonge et les premières indications chiffrées de Quibi tombent
: elles sont catastrophiques. Mi-mai, le service est englué dans les tréfonds des classements de
téléchargements, à la 138e place sur l'App Store et à la 85e place sur le Google Play Store aux Etats-
Unis, selon App Annie. « J'attribue tout ce qui est allé de travers au coronavirus », évacue alors Jeff
Katzenberg.

Un peu court tant la liste des erreurs commises est longue. « L'offre à 8 dollars par mois était très chère
par rapport à l'offre de contenus et aux prix de Netflix, Disney+ ou OCS en France. D'autant qu'ils
visaient un public jeune et moins fortuné », note Valérie Pechels, productrice chez Wildcats Productions.
Surtout que Quibi n'a aucun « back catalogue » en stock.

Technologiquement, l'application est aussi très hermétique et restrictive dans sa consommation. « Ils ont
commis l'erreur de ne pas proposer une lecture de leurs contenus aux grands écrans, alors qu'ils avaient
du contenu pour », souligne Albin Lewi, directeur artistique du festival Canneseries et ancien de Canal+
et iTunes. Quibi s'échinera ensuite pendant l'été à « ouvrir » davantage son application. Mais plus tard.
Bien trop tard.

Pas de hit à la « House of Cards »

Mais toutes ces errances et approximations n'auraient pu être que des peccadilles si Quibi avait su arriver
avec un hit faisant office de produit d'appel à même de lui conférer une aura auprès des utilisateurs et
mettre le buzz en route. « Le contenu est roi » est la loi en vigueur régissant le marché du streaming
vidéo.

Las… Quibi n'aura pas su sortir du chapeau son « House of Cards » ou son « Game of Thrones » maison.
Tout n'est pourtant pas à jeter. « Leur programme 'FreeRayshawn', une série sur les violences policières
contre les Noirs qui est sortie au printemps, en plein Black Lives Matter, a été récompensé par deux
Emmy Awards », explique Albin Lewi.

« Quibi était du faux haut de gamme »

Mais c'est l'arbre qui cache une forêt de contenus trop protéiforme et pas assez identifiée. « Avoir levé
près de 2 milliards les a desservis et les a amenés à voir trop grand et viser trop large », énumère Patrick
Holzman, fondateur de Blackpills, la plateforme française de contenus courts. « I l y a un vrai problème
de positionnement, tranche Gilles Pezet. Ils disaient viser les 25-35 ans et proposent des contenus avec
John Travolta. »

60
Pire, certains programmes sont taillés à la scie sauteuse par la critique outre-Atlantique. L'épisode « The
Golden Arm » du programme « 50 States of Fright » est ainsi décrit comme « profondément bizarre et
inexplicablement mauvais » par « GQ ». L'une des scènes, dans laquelle joue l'actrice Rachel Brosnahan,
devient un sujet de moquerie viral sur Twitter.

La pire des sentences. « Quibi était du faux haut de gamme. Cela a été présenté comme du HBO, mais
c'est du Canada Dry », assène Gilles Pezet.

A sa décharge, Quibi a aussi pâti de la concurrence hors norme entre les plateformes. La firme a beau
payer certains programmes très cher (100.000 dollars la minute), s'alignant sur les tarifs d'un Netflix,
elle est quand même perçue comme un plan B par certains créateurs. « Si vous avez un show qui peut
devenir un gros hit, vous le pitchez à Netflix ou HBO. […] Sinon vous le pitchez à Quibi », confie
anonymement à « Vulture » un producteur… en contrat avec Quibi. Cruel.

A des années-lumière de ses objectifs pour l'année 2020

C'est bien connu, les bad buzz volent en escadrille. Mi-juin, les dissensions entre Katzenberg et Whitman
sont révélées au grand jour dans la presse américaine. S'ils se donnent du « buddy » et du « partner »
lors de réunions internes, les frictions ont été nombreuses au début du projet et refont surface avec les
difficultés rencontrées par leur création commune. Ce qui ne simplifie par la gestion de crise.

Début juillet, Quibi fait une mise au point chiffrée. A date, son application a été téléchargée 5,6 millions
de fois et le taux de conversion en abonnés est conforme aux standards du secteur, avance la firme. Soit
près de 10 %. En clair, Quibi a conquis quelque 500.000 abonnés en trois mois. Une paille par rapport
aux 28 millions enregistrés sur une période comparable par Disney+ quelques mois plus tôt. Surtout,
Quibi est à des années-lumière de ses objectifs annoncés pour l'année 2020 (7,4 millions d'utilisateurs
payants) comme de son seuil de rentabilité. Le temps presse pour le groupe qui carbonise son cash de
semaine en semaine. Début août, Quibi teste une version gratuite de son service en Australie et en
Nouvelle-Zélande. Mais il est déjà trop tard pour redresser la trajectoire de l'avion en piqué.

« La chose la plus stupide à avoir coûté 1 milliard »

La plateforme devient même un sujet de moquerie à Hollywood. « Quibi est […] la chose la plus stupide
à avoir jamais coûté 1 milliard de dollars », se permet l'humoriste Jimmy Kimmel, le 20 septembre, en
ouverture de la cérémonie des Emmy Awards.

Dans le même temps, Quibi se met en quête d'un repreneur. WarnerMedia, Facebook, Apple : tous vont
dire « niet » à Katzerberg et Whitman. En cause notamment : le conflit avec Eko Interactive sur la
technologie. Mais aussi et surtout la ligne dans les contrats, signée avec les créateurs les plus chevronnés,
qui stipule que ces derniers redeviennent propriétaires et maîtres de l'exploitation de leur œuvre au bout
de sept ans.

Le groupe a dû consentir cette condition très avantageuse pour convaincre les grands noms de l'industrie
de collaborer avec lui. Ce qui se retourne aujourd'hui contre lui. L'un des ultimes épisodes d'une «
business story » catastrophe avec un scénario digne d'une série ou d'un film. Un format court à l'image
des programmes sur feu Quibi.

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Salto, pour quoi faire ?
France Télévisions, TF1 et M6 dévoilent ce jeudi les contours de Salto, leur plateforme de SVoD,
sorte de « Netflix à la française », qui veut se positionner sur un marché pour l'heure dominé par
les Américains.

Ainsi naquit Salto. La plateforme de SVoD de France Télévisions, TF1 et M6 va voir le jour le 20
octobre prochain. Fruit d'une alliance aussi inédite qu'incroyable entre trois groupes de télévision
historiques français pour le développement d'une offre numérique, ce « Netflix à la française » entend
se positionner sur un marché, pour l'heure, à dominante américaine.

Cent pour cent payante, la plateforme va proposer des chaînes de télévision en direct, des programmes
en rattrapage, de la vidéo à la demande, des avant-premières et quelques contenus exclusifs dont des
séries internationales. Loin d'avoir la prétention surréaliste de reprendre le leadership à Netflix, Salto
entend avant tout se frayer un chemin en occupant une place forte dans la création française dont il
s'érige en porte-étendard.

L'ambition est grande, mais le budget pauvre : 250 millions d'euros sur trois ans - quand bien même
Salto pourra s'appuyer sur les contenus de ses maisons mères auxquels elles consacrent plus de 3
milliards -, là où Netflix met, lui, plus de 17 milliards de dollars cette année…

Entre ringardise et pillage

Si la naissance du divin enfant Salto est très attendue, une question demeure : était-ce vraiment
nécessaire ?

Pour les vieilles chaînes du PAF, l'enjeu est crucial. L'ouragan Netflix a imposé un nouveau mode de
consommation des contenus audiovisuels et a détrôné Canal+ de la place de numéro un de la télévision
payante dans l'Hexagone. France Télévisions, TF1 et M6 devaient donc créer une alternative
concurrentielle sur ce marché. Et vite, sous peine d'être ringardisés. Ou de le laisser aux Américains…

Car Netflix a fait des petits. Aujourd'hui, on assiste à une déferlante de services SVoD provenant des
gros studios du pays de l'Oncle Sam, Disney, Warner, Paramount, Universal, ou des géants de la tech,
Amazon et Apple, dont certains ont lancé leurs services en France. Il fallait tenter de créer un rapport de
force avec ces plateformes. Il y a là un enjeu de souveraineté culturelle. Si la France n'exploite pas ses
contenus, on les lui pillera !

Mutation numérique

L'urgence pour les chaînes historiques d'accélérer leur mutation numérique et d'adapter leur façon de
travailler aux nouveaux usages supposait aussi une réaction nationale d'ampleur. Opérer ces
transformations avec la taille critique que confère l'alliance de trois gros acteurs de l'audiovisuel, c'est
mieux. Salto va les forcer à rentrer dans une nouvelle dynamique de distribution moderne de leurs
contenus et de transformation de leurs schémas traditionnels de création de programmes. Enfin, Salto
c'est aussi une (petite) brique pour ancrer la création française dans le champ de la concurrence
internationale.

Encore faut-il que le consommateur soit séduit… L'initiative arrive bien tard, dans un marché déjà
encombré, qui plus est, en pleine crise sanitaire et sociale. Salto a raté la vague du confinement sur
laquelle les Netflix et Disney+ ont surfé pour gagner des abonnés. Miser sur les « déserteurs » de la
télévision que Salto entend attirer ne sera pas suffisant pour proclamer une réussite. Et se lancer sans
être présent dans les bouquets télé d'Orange, SFR, Free et Bouygues Telecom, c'est démarrer avec un
handicap…

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Quoi qu'il en soit, les contenus de Salto seront déterminants dans un marché où les géants de la SVoD
s'arrachent déjà à coups de milliards les plus gros succès télévisuels du monde entier. Et la cohérence
de l'offre, aussi. Un client s'abonne d'abord à un service qu'il peut clairement identifier. A cet égard,
Salto ne crée-t-il pas une ambiguïté en se voulant, tout à la fois, un outil de distribution de chaînes de
télévision et un pur produit de SVoD, qui revendique un positionnement franco-français ? D'autant plus
qu'il diffusera aussi des séries norvégiennes, australiennes, québécoises ou encore américaines…

Un destin à la StopCovid ?

Les Français seront-ils enclins à payer pour une plateforme qui, certes, propose quelques inédits ou
avant-premières et une offre conséquente de 10.000 heures de programmes, mais dont la majorité va
provenir de chaînes de télévision aujourd'hui accessibles gratuitement ? Et qui ne dispose pas encore de
créations originales, celles-là mêmes qui ont fait tout le succès des Netflix et autre Disney+ en leur
conférant une vraie singularité ?

Les intérêts potentiellement divergents du trio d'actionnaires de Salto, ce « trouple » improbable qui
mêle un groupe de service public et deux privés, pourraient aussi nuire à la plateforme. Déjà, l'Autorité
de la concurrence a beaucoup compliqué la gouvernance de Salto en posant des verrous un peu partout.

Surtout, les choix stratégiques seront-ils alignés ? Un exemple : le service public France Télévisions
compte retirer ses séries de Netflix pour les réserver à Salto, en espérant ramener le public avec. Mais
les groupes privés à but lucratif, TF1 et M6, auront, eux, bien du mal à faire de même si leurs
programmes sont plus rentables sur Netflix… De fait, ces deux-là ne seront-ils pas tentés, parfois, de
sortir de vieux programmes de leurs étagères poussiéreuses pour les refourguer à Salto ?

Complexe, la route s'annonce aussi longue et sinueuse. Les maisons mères de Salto le savent : elles vont
devoir jongler entre les contraintes, composer et, surtout, poser les curseurs là où il faut. Pour éviter à
Salto un destin à la StopCovid, l'appli de traçage numérique des cas contact du Covid-19 lancée par le
gouvernement pour sauver des vies. Et boudée par les Français…

Netflix content de son début d'année 2023


Le service de streaming ajoute 1,75 million d'abonnés au premier trimestre, au-dessous des attentes des
investisseurs. Il décide de mettre fin à son activité d'origine. Netflix a ajouté 1,75 million d'abonnés à
son portefeuille et en détient désormais un total de 232,5 millions.

« En bref, nous avons bien commencé l'année 2023 ». Au même moment où Netflix annonce qu'il va
mettre fin au service déclinant de distribution de DVD par lequel tout a commencé il y a 25 ans, le
service de streaming vidéo américain qui a révolutionné le secteur de la télévision se montre satisfait de
son premier trimestre 2023. Dans un environnement de conquête d'abonnés devenu plus compliqué
depuis l'année dernière, le défi de Netflix est de bien faire fructifier ses ambitions dans la publicité et de
réussir son initiative de limitation des partages de comptes, qui touchent plus de 100 millions d'abonnés.

Netflix a ajouté 1,75 million d'abonnés au premier trimestre à son portefeuille et en détient désormais
un total de 232,5 millions. Ses revenus de janvier à mars sont légèrement au-dessous des anticipations
des marchés, qui s'attendaient aussi selon Bloomberg à une augmentation de 2,41 millions d'abonnés.
Mais le résultat d'exploitation de Netflix a dépassé les attentes des marchés, à 1,7 milliard de dollars.
Après la clôture de Wall Street, l'action Netflix était orientée à la baisse avant de se redresser.

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Génération de liquidités

Alors que ses grands concurrents comme Disney+ ou Max, le service de Warner, doivent encore
atteindre l'équilibre financier, le groupe désormais dirigé par Ted Sarandos et Greg Peters met en avant
sa solidité financière. S&P et Moody's, les deux agences de notation de dettes les plus connues, placent
désormais sa dette dans la catégorie « investment grade », un statut convoité.

Surtout, le groupe prévoit de générer 3,5 milliards de dollars de liquidités cette année, contre 3 milliards
prévus auparavant. Netflix a longtemps financé ses achats de contenus par de la dette supplémentaire -
ce qu'il n'a plus besoin de faire.

Système de partage de comptes étendu

Netflix a annoncé qu'il allait étendre à de nombreux pays son système de facturation de partage de codes
au deuxième trimestre, soit un peu plus tard qu'attendu. Les Etats-Unis seront notamment concernés par
ce système qui permet en réalité de monétiser le partage de comptes, pour en limiter l'impact. Si la
manœuvre a généré des annulations d'abonnements lorsqu'elle a été testée dans certains pays au premier
trimestre, le groupe estime que sa tentative est un succès. Il précise toutefois procéder à des ajustements
pour limiter les effets négatifs. Une partie du surcroît de revenus attendu est reportée du second au
troisième trimestre, précise le groupe.

Côté publicité, le spécialiste de la vidéo par abonnement se dit satisfait de son nouveau tarif réduit en
contrepartie d'une exposition des abonnés à de la publicité. « Aux Etats-Unis, par exemple, notre tarif
avec publicité a un revenu total par abonné plus grand que pour notre service de base », assure le groupe.

Une ombre au tableau, la zone Europe, Moyen-Orient, Afrique voit ses revenus diminuer de 2 %, à 2,52
milliards en raison d'une baisse de 6 % du revenu par abonnés. Par ailleurs, la puissance du dollar affecte
la marge d'exploitation du trimestre, qui si elle est supérieure aux attentes des analystes, est inférieure à
celle de l'an dernier à la même époque.

Warner : les 4 défis d'un studio centenaire


Alors qu'il vient de fêter son 100 e anniversaire, le studio hollywoodien Warner traverse une période de
profonde transformation depuis sa fusion avec Discovery il y a un an. Le nouveau groupe doit se
réinventer.

Une semaine après avoir fêté avec ses employés les 100 ans de Warner, le PDG de Warner Bros.
Discovery, David Zaslav, a choisi la scène du studio 14 de la major - où a été tourné le film « Casablanca
» - pour présenter son nouveau service de streaming « Max ». « Pour notre entreprise, c'est notre rendez-
vous avec le destin. L'année dernière était une année de rétablissement, et maintenant c'est parti », a-t-il
lancé.

Un an après la fusion entre Warner et Discovery, ce gigantesque conglomérat des médias et du


divertissement, présent dans la production et la distribution cinématographiques, la télévision et le
streaming vidéo, avec des marques phares comme Discovery Channel, CNN, Eurosport, DC Studios ou
encore HBO, doit désormais prouver aux utilisateurs et au marché le bien-fondé de son modèle. Ses
défis ne manquent pas.

1. Alléger la dette

Au moment de la fusion, le nouvel ensemble était lesté par une dette colossale d'environ 55 milliards de
dollars. La priorité de David Zaslav a donc été de tailler dans les dépenses. Plusieurs projets en ont fait
les frais. Le long-métrage « Batgirl », achevé pour un budget de 90 millions de dollars, est ainsi

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directement entré en pertes comptables, voyant sa sortie annulée. Le service de streaming payant de
CNN a aussi été arrêté peu après son lancement. Plusieurs milliers de postes ont enfin été supprimés.
Au final, cette politique sans compromis a permis de réduire de 5,5 milliards de dollars la dette du groupe
à fin 2022.

Malgré ces coupes drastiques, « l'entreprise reste fortement endettée » soulignait en mars Moody's. «
Nous nous attendons à ce que, après l'investissement dans les contenus de SVOD, le management
continue à utiliser la plupart voire tout son flux de trésorerie, dans le remboursement de la dette »,
indiquait l'agence de notation.

2. Percer dans le streaming

Le groupe reste très dépendant des ressources tirées de la télévision linéaire, qui représentaient 57 % de
ses revenus en 2022. Or celles-ci se tarissent, le public se tournant vers les usages à la demande.

Warner Bros. Discovery doit donc à tout prix rattraper son retard dans le streaming. Pour cela, le groupe
conserve sa plateforme Discovery +, mais espère surtout percer avec son nouveau service de streaming
Max, le successeur de HBO Max enrichi des contenus de Discovery +. Confiant, Moody's s'attend à ce
que la croissance dans le streaming permette à terme de « renverser la pression séculaire qui fait décliner
les revenus et l'EBITDA sur le segment linéaire. »

3. Reconquérir Hollywood

En donnant sa conférence depuis un studio historique de Warner, David Zaslav souligne son attachement
au septième art. Le PDG a aussi installé son bureau à Burbank, en Californie, plutôt qu'à New York.
Signes d'une volonté de réchauffer les relations avec l'industrie du film.

Celles-ci avaient été heurtées à la fois par les coupes menées l'année passée et par la politique de son
prédécesseur, Jason Kilar. Fin 2020, ce dernier avait décidé de diffuser les films du studio directement
sur HBO Max, en même temps qu'ils sortaient en salle. David Zaslav, lui, veut redonner une place plus
importante à la salle. Une vingtaine de films doivent sortir en 2023, dont « Barbie » et « Dune 2 », contre
6 en 2022.

4. Un cours de Bourse au tapis

Le prix de l'action à Wall Street ne reflète pas vraiment ces efforts. Même s'il remonte la pente en 2023,
le cours de Bourse de Warner Bros. Discovery a perdu plus de 40 % depuis la fusion, alors que Disney
et Comcast ont moins baissé en Bourse (respectivement -24 % et -20 %).

Selon le « Financial Times », la théorie d'une potentielle vente de Warner Bros. Discovery à Comcast
circule toujours dans les milieux hollywoodiens. Mais un cours de Bourse très déprimé serait un
handicap, car cela obligerait AT&T, qui détient toujours 71 % du nouveau groupe, à cristalliser
d'énormes pertes dans l'éventualité d'une cession. En septembre, David Zaslav avait coupé court à la
rumeur en disant de manière assez lapidaire que la maison n'était pas à vendre.

Séries télévisées : HBO et Amazon sortent l'artillerie lourde


Très attendues, les séries « House of the Dragon » et « Le Seigneur des anneaux : Les Anneaux de
pouvoir » vont enfin sortir respectivement le 22 août et le 2 septembre en France. Dans un secteur du
streaming en plein doute sur ses perspectives économiques, la pression monte autour de ces projets aux
budgets pharaoniques établis quand la croissance semblait illimitée aux yeux de certains.

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Dans la guerre sans merci que se livrent les plateformes de streaming, la sortie rapprochée des premiers
épisodes du « Seigneur des anneaux : Les Anneaux de pouvoir » (Amazon Prime Video) et « House of
the Dragon » (HBO Max) pourrait bien être la mère des batailles dans un secteur en plein doute sur ses
perspectives.

Très attendues et censées reprendre le flambeau de deux géants du genre de l'« epic fantasy », ces deux
séries bénéficient de budgets colossaux. La presse spécialisée fait état de près de 200 millions de dollars
(197 millions d'euros) pour la première saison de « House of the Dragon » qui sera diffusée à partir de
dimanche aux Etats-Unis par HBO Max et la chaîne homonyme.

Le public français pourra regarder le premier épisode lundi 22 août sur OCS dès 3 heures du matin…
en simultané avec la sortie américaine. Une sortie « événementielle » donc, c'est-à-dire pas d'une seule
traite mais un nouvel épisode par semaine, à un horaire fixe. Comme HBO en a l'habitude. Histoire de
créer l'attente chez les fans et les curieux. A rebours de Netflix qui a longtemps bâti son succès en sortant
en une seule fois tous les épisodes de ses séries pour provoquer chez son public un effet « binge », de
visionnage boulimique.

La série la plus chère de l'histoire

A 20 millions pour chacun des dix épisodes, la facture de « House of the Dragon » est plus élevée que
celle de la huitième et dernière saison de « Game of Thrones », le plus grand succès de HBO Max, dont
l'épopée des dragons partage l'univers narratif. C'est environ 20 fois le coût horaire moyen d'une fiction
française, mais aussi largement en deçà des 58 millions de dollars qu'a coûté chaque épisode des «
Anneaux de pouvoir ».

La série qu'Amazon Prime s'apprête à diffuser mondialement le 2 septembre est en effet la plus chère de
l'histoire : 464 millions de dollars dépensés ne serait-ce que pour produire sa première saison. Et aux
coûts de production et de tournage, il faut ajouter les 250 millions négociés avec le géant américain par
les ayants droit de J. R. R. Tolkien dans un accord de 2017 portant sur cinq saisons.

Même si les niveaux d'audience sont parmi les secrets les mieux gardés chez Amazon Prime Video,
comme chez Netflix et les autres géants de la vidéo à la demande par abonnement (SVoD), tout faux
pas auprès du public aurait des répercussions considérables pour l'industrie et pour les entreprises
engagées dans ces projets.

Nouvelle donne

Ces deux séries (dans le jargon de la « prod », il s'agit de préquels dont l'intrigue se situe avant celle
d'un opus principal) ont été conçues dès 2017, à une époque où les budgets semblaient illimités. Mais la
donne a changé. La décrue du nombre des abonnés de Netflix crée beaucoup d'incertitude. Même si pour
le streaming des poches de croissance existent surtout hors des Etats-Unis, la baisse du pouvoir d'achat,
une récession à l'horizon et le retour à la normale post-Covid sont autant de freins.

Dans ce contexte, les plateformes n'ont pas trop le choix. Pour être plus rentables, presque toutes
cherchent de nouveaux revenus avec des offres adossées à la publicité ; certaines (Netflix et HBO Max)
réduisent aussi leurs effectifs.

Autre conséquence : après plusieurs années d'inflation, les budgets de production semblent avoir atteint
un plateau. En juillet, les dirigeants de Netflix ont affirmé que son budget annuel restera autour de 17
milliards de dollars à horizon 2023. Chez Disney, qui recrute des abonnés à tour de bras en streaming
mais dont la plateforme phare Disney+ n'est toujours pas rentable, cela devrait se stabiliser à 30
milliards, programmes sportifs inclus.

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Choix douloureux

Chez Warner Discovery (HBO Max, CNN, Eurosport, etc.), l'heure est décidément à la modération. Né
d'une fusion en avril, ce géant américain des médias est moins rentable que prévu et a besoin de réduire
une montagne de dette (49 milliards de dollars). Début août, son patron, David Zaslav, a expliqué sa
vision aux analystes financiers : elle consiste notamment à réaliser des économies, redonner de la valeur
aux sorties au cinéma et privilégier la qualité à la quantité dans le streaming - même au prix de choix
douloureux, comme la non-diffusion de « Batgirl », un film déjà finalisé pour 90 millions de dollars.
Au vu de la nouvelle stratégie de Warner Discovery, le fait que le coût de « House of the Dragon » n'ait
pas trop grimpé sonne comme un signe d'assagissement. Mais dans un univers du streaming de plus en
plus concurrentiel, les plateformes ont toujours besoin de contenus iconiques pour se distinguer. En plus
de générer des audiences sur le court terme, les nouvelles sorties inspirées d'une saga mondialement
connue renforcent le catalogue, un atout majeur pour fidéliser le public.

Quelles retombées pour Amazon ?

Quant aux plateformes qui, comme Amazon Prime Video, sont un service parmi d'autres proposés par
un géant de la tech, les retombées et le retour sur investissement d'une série comme « Le Seigneur des
anneaux » seront très difficiles à estimer. Combien de nouveaux abonnés ? Quels gains en matière de
notoriété et fidélisation des clients à ses offres de livraison rapide ou de cloud ? Aussi faramineux puisse-
t-il paraître, le budget record mobilisé par le groupe de Seattle sur ce type de contenu incontournable
peut entraîner des « effets de halo » positifs sur tout son écosystème, note un connaisseur. « La bataille
des contenus fait toujours rage. Pour la gagner, il faut développer des marques, les entretenir sur
plusieurs décennies et les monétiser sur tous les supports », précise-t-il.

Comment HBO a révolutionné le monde des séries


L'an prochain, cette pionnière de la télévision à péage va fêter ses 50 ans. La chaîne qui a donné
naissance à tant de séries cultes, des « Soprano » à « Game of Thrones », amorce un tournant stratégique
important avec le lancement de sa plate-forme de streaming HBO Max fin octobre dans plusieurs pays
européens. L'occasion de revenir sur sa formidable histoire.

« Il n'y a rien au monde de plus puissant qu'une bonne histoire », disait le nain Tyrion dans l'ultime
épisode de « Game of Thrones ». C'est avec cette fameuse tirade, dont la chaîne pourrait faire son
étendard, qu'Andy Forssell, patron de HBO Max, a officiellement annoncé le lancement à compter du
26 octobre de cette nouvelle plate-forme de streaming en Europe. D'abord dans les pays nordiques et en
Espagne. Puis en 2022 en Europe de l'Est et au Portugal. Christina Sulebakk, la patronne danoise de
HBO Max Europe et Moyen-Orient, a précisé qu'on la trouverait sur tous les terminaux pour près de 9
euros par mois.

WarnerMedia, maison mère de HBO (détenue elle-même par AT&T), n'a jamais caché la vocation
globale de cette plate-forme, lancée l'an dernier aux Etats-Unis. Avec un objectif affiché : rattraper les
concurrents Netflix, Amazon et Disney. Mais HBO doit procéder par étapes. « Dans des pays comme
l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie ou la France, il existe en effet des partenariats de longue date qui
doivent prendre fin avant notre arrivée. Il s'agira d'une négociation au cas par cas », a expliqué Antony
Root, vice-président exécutif des productions et des programmes originaux de HBO Europe, à Séries
Mania fin août. C'est la contrepartie de créer du neuf à partir d'une chaîne depuis longtemps installée
dans le paysage audiovisuel.

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En France, pas avant 2023
Dans l'Hexagone, c'est la chaîne OCS qui détient les droits de première diffusion des séries HBO
depuis sa création en 2008. L'accord a toujours été renouvelé, le dernier contrat - élargi pour la
première fois à l'ensemble des droits - remontant à 2018. OCS ne communique pas sur sa date de fin
mais, selon nos informations, ce ne devrait pas être avant 2023… En attendant, WarnerMedia vient
de nommer Vera Peltekian à la tête des productions originales de télévision pour HBO Max en
France. Jusqu'à présent responsable des séries dramatiques de Canal+ (« Engrenages », « Les
Revenants », « Tunnel », « Les Sauvages », « Paris Police 1900 »), celle-ci aura pour mission de
développer de nouveaux contenus pour la plate-forme (séries, comédies, documentaires et
programmes de flux).

De quel genre de « spin-off » parle-t-on précisément entre HBO et HBO Max ? Alors que la marque
HBO s'adresse à un public plutôt ciblé et exigeant, Max vise un marché de masse. La plate-forme
propose certes des séries et des documentaires haut de gamme, mais également des comédies et des
émissions de téléréalité. Plus large, l'offre de HBO Max va puiser dans les blockbusters de la Warner («
Harry Potter », « Le Seigneur des anneaux », « Matrix », « Suicide Squad », « Mad Max », « Friends »
…) - dont les nouveaux films seront visibles quarante-cinq jours seulement après leur sortie en salle -
ainsi que dans la réserve des superhéros DC (Superman, Batman, Zack Snyder's Justice League…) et
des dessins animés d'anthologie (Tom & Jerry, Looney Tunes, etc.). A terme, seront aussi inclus les
programmes des chaînes Discovery.

En mai dernier, AT&T et Discovery ont en effet annoncé la création d'une nouvelle société, issue de la
fusion de WarnerMedia (HBO, CNN, DC Comics, etc.) et Discovery (Discovery Channel, Animal
Planet, Discovery +, Eurosport, etc.), probablement sur pied courant 2022. Juste derrière Disney, ce
nouveau géant des médias, détenu à 71 % par AT&T et à 29 % par Discovery, prévoit d'investir 20
milliards de dollars par an dans de nouvelles productions, dans les mêmes eaux que Netflix.

En mettant le paquet désormais sur le streaming, les actionnaires de HBO entament une vraie révolution
pour l'ancêtre des télés à péage. Même si la chaîne, qui fête l'an prochain ses cinquante ans, en a vu
d'autres… Quand on évoque l'âge d'or des séries télé, on pense souvent au Home Box Office du tournant
de ce siècle, celui d'« Oz », de « Sex and the City », et puis des « Soprano », « Six Feet Under » et «
The Wire » (« Sur écoute »), qui lui ont donné tout son lustre. Ce que l'on sait moins, c'est que cette
chaîne existait déjà depuis une trentaine d'années avant de produire ces œuvres cultes du petit écran, et
qu'elle a inspiré nombre de chaînes à péage dans le monde.

Timides premières années

C'est à Charles Dolan, le premier à câbler les immeubles new-yorkais, que l'on doit la création de Home
Box Office. A la tête de sa société depuis 1966, l'entrepreneur n'arrive pas à rentabiliser son réseau. À
l'occasion d'une croisière en famille vers la France à bord du Queen Elizabeth II à l'été 1971, « Chuck »
aurait alors l'idée, raconte Bill Mesce dans son livre « Au cœur de l'ascension de HBO », de créer une
chaîne de télé payante, associée à son réseau, proposant à ses abonnés des films et des événements
sportifs en direct. Son nom de code : « The Green Channel ». Il lui faudra des mois pour convaincre ses
partenaires de Time-Life, peu emballés par le modèle des télés à péage, de lui allouer une subvention de
développement.

Sous un nouveau nom, provisoire avant de s'imposer, Home Box Office est lancé à 19 h 30, heure de
l'Est, le 8 novembre 1972 à Wilkes-Barre, dans le nord de la Pennsylvanie. Son programme inaugural ?
Un match de la Ligue nationale de hockey entre les New York Rangers et les Vancouver Canucks depuis
le Madison Square Garden et puis le film « Sometimes a Great Notion » (« Le Clan des irréductibles »),
un drame social réalisé par Paul Newman où des syndicalistes affrontent un conglomérat, avec Newman

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lui-même et Henry Fonda. Ce premier soir, la chaîne comptait moins de 400 abonnés qui avaient accepté
de payer 6 dollars par mois pour ce nouveau service.

Un lancement tempétueux
A l'exception d'annonces dans les gazettes locales, les débuts de Home Boxe Office sont restés assez
confidentiels. Le maire de Wilkes-Barre n'a même pas assisté à la cérémonie de lancement, tandis
que le vice-président de Time Inc., J. Richard Munro, bloqué dans les embouteillages, n'a pu arriver
à temps… Même la météo n'était pas de la partie : une tempête a fait tomber l'antenne utilisée pour
relayer le signal au sommet du Pan Am Building, le technicien terminant la réparation vingt-cinq
minutes seulement avant la première diffusion.

Deux ans plus tard, alors que Time Inc. contrôle désormais les trois quarts du capital et que des
divergences sont apparues, Chuck Dolan finit par céder ce qui lui reste de la chaîne et démissionner. Il
se servira de l'argent obtenu pour créer la Long Island Cable Community Development Co., ancêtre de
Cablevision Systems Corporation que son fils a revendu en 2016 à Patrick Drahi (Altice, SFR, BFM…)
pour 17,7 milliards de dollars. L'Américain gardera cependant le contrôle du réseau AMC, du Madison
Square Garden et de plusieurs clubs sportifs. A 94 ans, ce discret milliardaire vit toujours dans sa
propriété d'Oyster Bay à Long Island.

En octobre 1973, Home Box Office compte seulement 8.000 abonnés en Pennsylvanie et dans l'Etat de
New York et souffre d'un taux de désabonnement important en raison d'émissions trop répétitives. Les
programmes sont alors étoffés avec des shows musicaux et des émissions pour les enfants, les plages de
diffusion augmentent (jusqu'à douze heures par jour les week-ends), de même que la couverture
régionale. En avril 1975, le service - disponible également au New Jersey et au Delaware - atteint les
100.000 abonnés…
Le saut dans l'espace

Un seuil symbolique qui enclenche une nouvelle étape dans la jeune histoire de la chaîne : son
développement sur tout le territoire américain grâce au satellite. Bien que les télédiffuseurs de l'époque
hésitent encore à s'aventurer dans ce type de transmission - pour des raisons techniques et financières -,
Home Box Office pense que c'est la seule issue pour tisser un service national de télévision payante
alors que la mise en place d'une vaste infrastructure de tours relais dans les 50 Etats et territoires
américains présente un coût prohibitif.

C'est ainsi que le 30 septembre 1975, à 21 heures, heure de l'Est, Home Box Office devient le premier
réseau de télévision du monde à délivrer en continu son signal par satellite. Au programme : le match
de championnat de boxe des poids lourds qui a vu Mohamed Ali battre Joe Frazier par KO technique.
Deux ans plus tard, le réseau atteint le million d'abonnés et réalise son premier bénéfice… Le ciel est
désormais dégagé.

Durant la décennie 80, la chaîne se lance alors dans la production de programmes scénarisés originaux
: « Not Necessarily the News » - parmi les pionnières des émissions d'information satiriques qui ont vu
le jour par la suite (« The Daily Show », « The Colbert Report » et « Last Week Tonight with John
Oliver ») - ou The Terry Fox Story, le premier téléfilm jamais produit par une chaîne de télévision
payante.

La pionnière du brouillage
Toujours pionnière, Home Box office décide de brouiller en 1984 ses flux satellites (à l'aide du
système de cryptage Videocipher II). Plus de 1,5 million de propriétaires de paraboles et des
entreprises (notamment des hôtels et des bars) regardent en effet sans payer HBO grâce à leurs
antennes satellites. La chaîne veut y mettre un terme et pousser les clandestins à s'abonner. Les
protestations sont nombreuses mais elle tient bon, et d'autres télés à péage feront de même…

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Le succès ne se dément pas. Sous son nouveau nom, HBO diffuse désormais 24 heures sur 24, sept jours
sur sept, à l'instar de son rival Showtime et de sa chaîne sœur Cinemax, créée en 1980. Le nombre
d'abonnés dépasse les 17 millions en 1989, ce qui commence à susciter des convoitises… Après deux
tentatives bloquées par son rival Paramount, Warner Communications réussit ainsi en 1990 à mettre la
main sur Time Inc., déboursant 14,9 milliards de dollars pour devenir un géant des médias. C'est le début
d'une nouvelle ère.
Le premier âge d'or

Les années 1990 sont celles où HBO commence à se tailler une solide réputation grâce à ses programmes
originaux à la fois de grande qualité et irrévérencieux comme « Les Contes de la crypte »,
« Dream On », « Tracey Takes On… »… L'une des émissions comiques scénarisées qui a vu le jour au
début de la décennie, « The Larry Sanders Show », est devenue la série phare de la chaîne, glanant trois
Primetime Emmy Awards, trois Golden Globe Awards et deux Peabody Awards.

Derrière cette « révolution » : Chris Albrecht. Ancien comique et fan de contre-culture, ce fonceur
ambitieux, qui prend la tête de la création originale de HBO en 1995, voit arriver avec intérêt des séries
sortant enfin de l'ordinaire des bons flics et méchants voyous sur les grands réseaux commerciaux : «
Miami Vice » de Michael Mann chez NBC, « Twin Peaks » de David Lynch et « New York Police
Blues » de Steven Bochco et David Milch chez ABC ou encore le « X-Files » de Chris Carter à la Fox…

Quelque chose est en train de changer à la télé et Chris Albrecht ne veut pas rater la marche. Au contraire,
il veut la sauter et - c'est une chance - le nouveau patron de HBO, Jeff Bewkes, lui laisse les coudées
franches… « Parce qu'on a dépensé sans compter, on dit parfois que le HBO de ces années-là ressemblait
à la Villa Médicis et que l'on a rejoué la Renaissance en finançant des artistes. Oui, il y avait de ça »,
confirme Carolyn Strauss, le bras droit de Chris Albrecht à l'époque, citée dans « La Saga HBO » de
Jean-Vic Chapus, Mathieu Rostac et Axel Cadieux.

Sa recette pour générer des séries cultes ? Donner le pouvoir à l'auteur. Elle est toujours valable près de
trente ans plus tard. Son premier grand coup d'éclat dans le monde des séries télé : ce sera « Oz » de
Tom Fontana, déjà auteur de deux shows remarqués (« Hôpital St Elsewhere » et « Homicide »). Univers
carcéral, acteurs inconnus, peinture parfois glauquissime du quotidien des prisonniers : cette série qui
va rencontrer un franc succès et durer six saisons fixera les canons de la fiction chez HBO : réalisme,
violence, sexe, exigence scénaristique et immersion dans des univers singuliers.

Ce sera le début d'une longue suite d'œuvres devenues mythiques au début des années 2000 comme
« Oz » de Tom Fontana, « Sex and the City » de Darren Star, la minisérie sur la Seconde Guerre mondiale
de Tom Hanks et Steven Spielberg « Band of Brothers », la minisérie multiprimée « Angels in
America » de Tony Kushner, avec Al Pacino, ou encore la tragi-comédie « Entourage » de Doug Ellin.

Mais c'est « Les Soprano » du génial David Chase, où James Gandolfini incarne un mafieux dépressif,
qui devient l'emblème de la chaîne et un incroyable succès d'audience et d'estime (21 prix au long de
ses six saisons). Elle sera suivie par la mémorable « Six Feet Under » d'Alan Ball (neuf Emmys) et
l'extraordinaire « The Wire » de David Simon, moins populaire au moment de sa diffusion mais encensée
par la critique. C'est le premier âge d'or de HBO. « HBO a bel et bien donné de la noblesse à la télévision
en engageant des moyens insensés, en prenant des risques, en se comportant comme un mécène
bienveillant envers les scénaristes » confie Tom Fontana dans « La Saga HBO ».

Traversée du désert

Les années suivantes sont un peu moins glorieuses. Suivant le quotidien de forains ambulants au temps
de la Grande Dépression, « Carnivale » (« La Caravane de l'étrange ») est annulé après seulement deux
saisons en 2005. Idem pour « Rome », série historique ambitieuse et hyperréaliste sur la vie au temps
de Jules César mais dont le budget faramineux de 100 millions de dollars pour douze épisodes (4.000
costumes, un Colisée construit à 60 % de la taille originale…) a conduit aussi à son arrêt au bout de 22
épisodes en 2007…

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Scénariste star de la chaîne comme David Simon et David Chase, David Milch n'obtient pourtant que
trois saisons pour son western « Deadwood », alors qu'il en prévoyait au moins cinq, et une seule pour
« John from Cincinnati », axée sur une ancienne gloire du surf et sa famille dysfonctionnelle - le plus
grand flop connu de la chaîne…

Plus inquiétant. Les recettes de HBO sont désormais appliquées par ses concurrents. AMC lance en 2007
le génial « Mad Men » de Matthew Weiner (un disciple de David Chase), sur le milieu de la publicité à
sa grande époque, et un an plus tard « Breaking Bad » de Vince Gilligan, deux séries cultes qui n'auraient
pas dû échapper à HBO. C'est la fin pour Chris Albrecht, qui sort même par la petite porte, après une
affaire de violence et de harcèlement. Ce visionnaire s'en remettra en devenant dès 2010 le patron des
chaînes Starz… Il est remplacé par Richard Pepler, un brillant lobbyiste.

Le passage à vide ne dure guère au siège de HBO à Manhattan. Grâce à « True Blood », thriller sur des
vampires, le service retrouve un grand succès public, rivalisant même avec celui des « Soprano » (jusqu'à
12,4 millions de téléspectateurs par semaine lors de la deuxième saison). La chaîne adapte également la
série israélienne « BeTipul » avec « In Treatment » (« En analyse »), bien accueillie mais dont l'audience
restera plutôt confidentielle. Toujours dans la veine psy, « Tell Me You Love Me » de Cynthia Mort ne
réussira pas non plus à capter un large public malgré des scènes de sexe sans doute les plus crues jamais
vues à la télévision. Il faudra attendre les années 2010 pour que HBO retrouve tout son lustre et plus
encore…

Nouvel âge d'or

Trois séries vont marquer le formidable retour de la chaîne au premier plan de la création télévisuelle.
D'abord « Boardwalk Empire » en 2010, située à Atlantic City au moment de la prohibition, renoue avec
le thème de la mafia dans un décor magnifique de ville côtière. Et emprunte beaucoup à l'univers
cinématographique, avec Steve Buscemi, l'un des acteurs fétiches des frères Coen, dans le premier rôle
et le pape d'Hollywood Martin Scorsese derrière la caméra pour l'épisode pilote - qui a coûté la somme
rondelette de 18 millions de dollars ! Un record à l'époque.

Longtemps étanche, la cloison entre le cinéma et la télé est en train de s'effacer : Gus Van Sant met en
scène le pilote de « Boss » (Starz), David Fincher réalise « House of Cards » (Netflix), Steven
Soderbergh « The Knick » (Cinemax) … Et la concurrence s'aiguise encore avec la diffusion de
nouvelles grandes séries chez les concurrents comme « The Walking Dead » (AMC), « Homeland »
(Showtime) ou « The Affair » (Showtime), sans compter l'arrivée de Netflix (« House of Cards », «
Orange Is the New Black »). D'ailleurs, la chaîne se met aussi au streaming en lançant son service HBO
Go.

Devançant l'air du temps, la série féministe « Girls » de Lena Dunham cartonne, révélant au passage
Adam Driver. De son côté, l'écrivain Nic Pizzolatto dégaine le polar emblématique du réseau : « True
Detective », dont la première saison en 2014 avec Matthew McConaughey et Woody Harrelson place la
barre tellement haut que les suivantes ne pourront que décevoir.
Mais c'est bien sûr le succès planétaire de « Game of Thrones » qui va rétablir la suprématie de HBO
dans le monde des séries. Cette histoire de dragons et de nains, adaptée de la saga éponyme de George
R. R. Martin par David Benioff et D.B. Weiss, est devenue la plus piratée, la plus regardée dans le
monde (battant « Les Soprano »), la plus primée, devenant un vrai phénomène de pop culture avec tous
ses produits dérivés.

« GoT » s'étirera sur huit saisons et même si la dernière fut, de l'avis général, bâclée, elle reçut encore
l'Emmy de la meilleure série dramatique, pour la quatrième fois, égalant ainsi « The West Wing » (« A
la Maison-Blanche ») et « Mad Men »… A côté de ce succès phénoménal, HBO a continué de lancer
des projets d'auteurs ambitieux comme l'impressionnant « Tchernobyl » de Craig Mazin, « Mare of
Easttown » avec Kate Winslet, ou le formidable « Succession » de Jesse Armstrong.

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La pression AT&T

Parallèlement, de nouveaux changements, capitalistiques cette fois, sont en cours. Le 22 octobre 2016,
AT & T annonce une offre sur Time Warner de 108,7 milliards de dollars. Après une tentative de blocage
de l'opération par le ministère de la Justice, la fusion est actée en juin 2018. Désormais filiale du groupe
de télécoms, WarnerMedia doit concilier deux cultures bien différentes entre le texan AT & T et la new-
yorkaise HBO… En février 2019, Richard Plepler, à tu et à toi avec le gratin d'Hollywood et du Parti
démocrate, s'en va pour prendre la tête d'AppleTV +. C'est le signal de la « reprise en main » et d'une
orientation moins « arty », plus productiviste du groupe avec le lancement de la plateforme HBO Max.

C'est le PDG de Discovery, David Zaslav, qui prendra la tête de la nouvelle entité formée par Warner et
Discovery, après la finalisation de la fusion l'an prochain, et non Jason Kilar, le patron de WarnerMedia
depuis 2020, qui a pourtant lancé HBO Max en mai 2020 et engrangé près de 11 millions d'abonnés
supplémentaires en un an. L'objectif désormais : atteindre les 400 millions d'abonnés dans le monde
contre 67,5 millions fin juin ! Un objectif ultra ambitieux au vu des plus de 200 millions d'abonnés
Disney + et Netflix…

D'aucuns craignent que cette compétition effrénée endommage la marque HBO, encapsulée à merveille
dans son plus fameux slogan : « It's not TV, it's HBO ». Antony Root, depuis dix ans à la tête des
créations originales de HBO en Europe, ne semble pas inquiet : « HBO Max sera différent de HBO mais
HBO sera sur la plate-forme HBO Max, ce qui est formidable pour le public européen. Max est un
complément, même s'il aura des contenus originaux. » Christina Sulebakk, passée par HBO Nordic,
HBO Portugal et HBO Espagne, le confirme : « Nous aimons les histoires qui contextualisent la société.
C'est toujours notre quête. » Quand même : Change is coming…

Médias, streaming, Warner Bros. Discovery : art


impopulaire
Warner Bros. Discovery fait atterrir Wall Street sur les fruits de son union. Après la baisse de l'ordre de
9 % à 17 % des perspectives pour 2022 et 2023, Wall Street découvre que « l'happy end » de la fusion
de l'ancienne branche d’AT&T et du network n'est pas pour tout de suite.

Victoria Abril avait un jour défendu qu'il valait « mieux être à poil dans un chef-d'oeuvre qu'habillée
dans un navet ». Les actionnaires de Warner Bros. Discovery, eux, ont non seulement perdu un bon pan
de leur chemise depuis la fusion de l'ex-fille d'AT & T et de la maison mère d'Eurosport (-42 % depuis
le 8 avril). Mais ils sont loin d'être certains de détenir un joyau du septième Art avec le producteur des
« Batman » et « Game of Thrones ».

Wall Street est même persuadé du contraire. Les trois premiers mois du mariage ont consommé une
perte nette inattendue de 3,4 milliards de dollars. L'abaissement de 7 % à 12 % de la fourchette d'objectif
d'Ebitda pour cette année, et de 17 % pour celui de l'an prochain a achevé de vider la salle. Le titre a
reperdu en une séance (-16,5 % vendredi) le terrain gagné depuis le 25 juillet en anticipation
d'éventuelles bonnes nouvelles après les coupes claires opérées par le patron de Discovery, David
Zaslav, à la tête du nouvel ensemble.

Bad boy contre « Batgirl »

L'ex-NBC Universal sait se faire des amis. Il a stoppé le service de streaming CNN + au bout d'un mois
et 350 millions de dollars dans des recrutements à prix d'or, et mis à la poubelle le premier « Batgirl ».
Il préfère récolter les crédits d'impôts grâce aux pertes générées par un budget de 70 à 90 millions plutôt
que de le diffuser.

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Son pari à long terme est que la qualité finira par payer et que le temps des chèques signés sans réfléchir
est révolu. Les gérants pourront toujours se consoler avec la maxime d'Hitchcock : « meilleur est le
méchant, meilleur est le film » !

À noter

Warner Bros. Discovery donne la priorité à la génération de cash-flow libre pour réduire son énorme
dette nette de 49,1 milliards de dollars, soit 5 fois l'Ebitda. Le directeur général, David Zaslav espère
que les 3 milliards de synergies de la fusion lui permettront de ramener ce levier entre 2,5 et 3 fois d'ici
deux ans. Mais bien qu'en légère hausse (+4 %) au second trimestre, le cash-flow libre (789 millions)
était 18 % sous les attentes.

Environ 2 milliards de dollars de frais de la fusion et de charges de restructuration et 2 autres milliards


en amortissements de contenus, soit 4 % de ceux acquis dans le rapprochement, sont en partie
responsables de la perte nette trimestrielle de 3,4 milliards. L'activité de streaming (un quart du total) a
multiplié par 2,4 fois en un an sa perte brute d'exploitation, à 560 millions.

La fusion des plateformes de streaming HBO Max et Discovery + n'aura lieu que dans un an. L'ensemble
pèse moins que les 100 millions d'abonnés imaginés lors de la publication des bans de fiançailles il y a
un an, à cause du portefeuille inactif provenant d'AT & T. A fin juin, il comptait 92,1 millions de
souscripteurs, contre 220,7 millions chez Netflix et 205,6 millions pour Disney+.

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David Zaslav promet 1 milliard de dollars d'Ebitda pour l'activité de streaming et de distribution par
satellite (HBO, HBO Max et Discovery +) en 2025 sur la base de 130 millions d'abonnés, après un pic
de pertes cette année. Le groupe réfléchira également l'an prochain à une version de son service basée
sur la publicité, à l'instar de Netflix et Disney+.

Avec « Max », Warner Bros. Discovery passe à l'offensive


dans le streaming
La nouvelle plateforme, qui réunira les contenus de HBO Max et Discovery +, sera d'abord lancée aux
Etats-Unis le 23 mai prochain. Ce service généraliste, rival de poids pour Netflix et Disney+, accueillera,
entre autres, une nouvelle adaptation en série de « Harry Potter ».

Pour Warner Bros. Discovery, ce n'est rien de moins qu'un « rendez-vous avec le destin », selon son
PDG David Zaslav. Mercredi à Burbank, en Californie, le patron du conglomérat des médias, issu de la
fusion en avril 2022 entre WarnerMedia et Discovery, a maximisé l'enjeu du lancement très attendu de
« Max », son nouveau service de streaming qui va réunir les contenus des deux plateformes existantes,
HBO Max et Discovery +.

Commercialisée à partir du 23 mai prochain aux Etats-Unis, avant un déploiement en fin d'année en
Amérique latine, puis l'an prochain en Europe et en Asie-Pacifique, la nouvelle plateforme se pose en
concurrente frontale de Netflix et Disney+. Une approche généraliste que résume son slogan : « The
One to Watch » (celui à regarder).

Il y a du chemin à parcourir… HBO Max et Discovery + totalisent à eux deux 96 millions d'abonnés fin
2022, contre 230 millions pour Netflix fin 2022 et 162 millions pour Disney+ en février dernier. Les
abonnés de HBO Max migreront automatiquement vers Max, tandis que ceux de Discovery + auront la
possibilité de rester sur le service d'origine.

En septembre dernier, le directeur financier du groupe avait annoncé viser 130 millions d'abonnés aux
services de streaming d'ici à 2025. L'équilibre financier du futur service, lui, doit être atteint en 2024.

Riche catalogue

Les tarifs des abonnements, plus élevés que ceux de Netflix dans les deux offres d'entrée de gamme,
témoignent de cette recherche de profit plutôt que de croissance. Ils s'établiront aux Etats-Unis à 9,99
dollars mensuels avec publicité, 15,99 dollars sans et 19,99 dollars dans une formule premium.

Les atouts de Max sont nombreux. A commencer par le riche catalogue de contenus du groupe,
susceptible de plaire à toutes les générations. Aux séries haut de gamme de HBO, comme « House of
the Dragon », « Game of Thrones » ou « Succession », s'ajoutent des émissions populaires de téléréalité
de Discovery +, comme « Property Brothers », les cartons au cinéma de Warner comme « Le Seigneur
des Anneaux », ou encore l'inépuisable franchise DC Comics (« Batman », « Superman », « Wonder
Woman », « Aquaman »…).

Sans oublier les contenus pour enfants, avec entre autres les dessins animés Hanna-Barbera (« Tom et
Jerry », « Scooby-Doo », etc.) et bien sûr « Harry Potter ». Warner a annoncé au passage l'adaptation
des best-sellers de J.K. Rowling en série, dont la diffusion s'étalera sur les dix prochaines années.
Harry Potter et George R.R. Martin

La marque HBO - dont les programmes sont accessibles en France par le pass Warner sur Amazon Prime
Video - n'apparaît plus dans le nom du service, signe d'une volonté de toucher un public plus large,

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notamment les enfants. HBO reste mise en avant dans l'interface, ses productions constituant un produit
d'appel pour attirer des abonnés.

Outre la future série « Harry Potter », plusieurs nouveautés de HBO ont été annoncées, dont une série
issue de l'univers du créateur de « Games Of Thrones », George R.R. Martin (« A Knight of the Seven
Kingdoms »), une autre tirée de l'univers DC Comics, « Le Pingouin », avec Colin Farrell, une nouvelle
saison de « And just like that », la suite de « Sex and the City », ou encore une nouvelle version de
« True Detective », en Alaska.

Pour capitaliser sur cet actif d'exception, le service a adopté un système de navigation efficace, qui était
un vrai point noir dans HBO Max. Le temps de chargement sera aussi plus court. Le système de paiement
et de relance des clients potentiels a également été amélioré, afin de diminuer le taux de désabonnement.

« Free cash flow »

Le PDG sous-entend également une possible intégration à venir des contenus d'informations
(WarnerBros Discovery détient CNN) et de sport.

Laissant aux scénaristes maison le sens du storytelling, David Zaslav a conclu sa présentation de manière
prosaïque : « nous allons générer du flux de trésorerie, que nous allons investir dans de super
histoires ». En espérant un « happy end » financier pour le groupe, aujourd'hui lourdement endetté,
fortement dépendant d'activités télévisuelles en déclin et qui doit à tout prix réussir ce nouveau pari.

Marvel : une franchise de rêve qui n'est plus infaillible


Le studio détenu par Disney a enchaîné les succès planétaires depuis 2008 en renouvelant le genre des
films de super-héros. Mais cette franchise a rencontré des ratés dernièrement. Des ajustements
s'imposent.

Tout ne tourne plus rond chez Marvel. L'accueil mitigé rencontré depuis février par son dernier long-
métrage, « Ant-Man et la Guêpe : Quantumania », donne une nouvelle illustration de la baisse de régime
du studio détenu par Disney.

Avec plus de 100 millions de dollars pour son premier week-end dans les cinémas américains en février,
Ant-Man 3 avait mieux démarré que les deux précédentes aventures de l'homme-fourmi. Mais son box-
office aux Etats-Unis a chuté de près de 69 % lors de son deuxième week-end d'exploitation, du jamais-
vu pour la fameuse franchise Marvel Cinematic Universe (MCU). Et sur Rotten Tomatoes, un site qui
agrège les critiques, le score de ce film au casting d'exception (Michael Douglas, Michelle Pfeiffer, Paul
Rudd…) n'est que de 47 %. Là aussi, un plus bas pour un Marvel. Et qui arrive alors que des rumeurs
de tensions internes circulent, notamment à la faveur du départ de la dirigeante Victoria Alonso.

« Fatigue » des superhéros

Depuis une quinzaine d'années, et plus précisément le premier « Iron Man » en 2008, le producteur
Kevin Feige, éminence grise de Marvel et patron des studios depuis 2015, a enchaîné les succès en
puisant dans une immense bibliothèque de plus de 7.000 personnages de comics (Spider-Man, Black
Panther, Hulk, Captain America…) pour créer le MCU. Il en a fait la plus belle franchise de cinéma au
monde avec - pour l'instant -31 films à son actif, et près de 29 milliards de dollars (26,5 milliards d'euros)
de recettes de billetterie, en cumul.

Seulement voilà, depuis le succès planétaire de « Avengers : Endgame » en 2019, une seule pellicule («
Spider-Man : No Way Home », en 2021) a dépassé le milliard au box-office mondial. Et il s'agissait là
d'une coproduction avec Sony. D'aucuns parlent de « fatigue » des super-héros.

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Plan d'économies chez Disney

Sous le règne de l'ancien patron de Disney, Bob Chapek, les studios Marvel ont produit ou mis en
chantier des films ou séries à une cadence très, voire trop soutenue. Et la logique du « streaming first »
au détriment de la salle avait rendu plus difficile de couvrir les coûts de production.

De retour aux commandes depuis quelques mois, Bob Iger veut être sélectif dans la stratégie de
production et diffusion. Et il serre les cordons : 5,5 milliards de dollars d'économies, y compris 3
milliards sur les contenus, et 7.000 réductions de postes sont prévus au global. Pour Marvel, Bob Iger
appelle de ses vœux à un nouveau cap.

Miser sur de nouveaux personnages

Y aura-t-il un Ant-Man 4 ? Rien de moins sûr. Il y aura « beaucoup de nouveautés » dans les prochaines
productions Marvel, a lancé Bob Iger en mars, lors d'une conférence organisée par Morgan Stanley à
San Francisco, en suggérant que parfois le studio se serait laissé aller à trop de « sequels » centrés sur
un même personnage.

Pas de révolution de principe, donc : l'univers Marvel va continuer à développer ses arcs narratifs où les
super-héros apparaissent dans plusieurs films. Pour attirer à la fois les aficionados et des audiences plus
larges, Marvel va aussi continuer à faire appel à des stars - comme Harrison Ford qui aura un rôle dans
le prochain « Captain America », sur les écrans l'an prochain.

Mais il y aura des ajustements. Marvel va sans doute faire moins de sorties par an et elles seront plus
espacées, a concédé Kevin Feige dans une interview avec « Entertainment Weekly ». Si tous les
arbitrages ne sont pas encore rendus, le producteur mise clairement aussi sur de nouveaux personnages
avec notamment un opus mettant en scène les Quatre Fantastiques, prévu pour 2025. Les superhéros
n'ont pas dit leur dernier mot.

Audiovisuel : l'investissement des plateformes monte en


puissance
Netflix, Amazon Prime Video, Disney+ et consorts doivent financer la création française et européenne
depuis 2021.

Netflix, Amazon Prime Video, Disney+ et consorts commencent à peser de plus en plus lourd dans
l'écosystème audiovisuel et cinématographique français. En 2021, les grosses plateformes américaines
ont dépensé presque 160 millions d'euros dans la création selon l'Arcom, le régulateur de la télévision
et du numérique.

A l'été 2021, la publication du décret dit « SMAD » (services de médias audiovisuels à la demande) a
fait entrer les services étrangers dans l'exception culturelle française. Ceux-ci doivent consacrer au
moins 20 % du chiffre d'affaires qu'ils réalisent en France au financement de la production d'œuvres
européennes et d'expression originale française, avec des sous-quotas précis (sur le septième art, la
production indépendante…)

Or, ce premier bilan - intégrant donc ces nouvelles obligations sur une demi-année - est encourageant
puisque l'investissement des SMAD - uniquement français à l'époque - est passé de 21 millions d'euros
en 2020 à 186 millions à 2021. La très forte croissance a donc été portée par Netflix, Disney+ et Amazon
Prime Video, qui pèsent pour presque 159 millions d'euros d'investissements à eux seuls.

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Si l'Arcom n'a pas encore compilé les données pour 2022, il se montre optimiste. La prévision, donnée
en 2021, d'un investissement des plateformes étrangères autour de 250-300 millions sur une année
pleine, en rythme de croisière, est « plausible », souligne Roch-Olivier Maistre, le président de l'Arcom.

Les chaînes traditionnelles restent majoritaires

Toutefois, les chaînes de télévision linéaires traditionnelles restent encore largement majoritaires dans
l'écosystème. En 2021, elles ont investi 1,2 milliard d'euros dans la création audiovisuelle et
cinématographique, si bien que télévisions et plateformes totalisent 1,4 milliard (+14 %), un chiffre
record.

Dans le détail, les TF1, M6, France Télévisions, Canal+, Netflix, Disney+, etc. ont dépensé 978 millions
en 2021 dans l'audiovisuel (+11,8 %), dont 144 millions d'euros pour les SMAD (un chiffre supérieur
aux obligations prévues par le décret) - et 429 millions d'euros dans la production cinématographique
(dont 42 pour les SMAD).

L'Arcom a relevé quelques manquements des plateformes dans le cinéma, mais est en train de travailler
avec celles-ci pour récupérer les sommes manquantes.

Le régulateur a, par ailleurs, conclu un nouvel avenant à la convention avec Amazon Prime Video
comprenant, entre autres, un financement de l'animation et un renforcement d'un quota de production
indépendante. « C'est un équilibre gagnant/gagnant pour le monde de la production et Amazon », se
félicite Juliette Théry, membre de l'Arcom.

Netflix réorganise sa division film pour se concentrer sur les


grosses productions
Le géant du streaming veut fusionner ses divisions petits et moyens budgets et privilégier les productions
ambitieuses. Deux de ses longs-métrages viennent justement de rafler des Oscars.

« Less is more ». Netflix semble vouloir fait sien l'adage minimaliste de l'architecte allemand Mies van
der Rohe. Selon l'agence Bloomberg, le numéro 1 mondial du streaming chercherait à réduire le nombre
de films produits annuellement, afin de s'assurer que ceux qui sortent sont de meilleure qualité.

Dans cette optique, la firme de Los Gatos aurait décidé de rassembler deux de ses unités de productions,
respectivement dédiées aux films à petits et moyens budgets. Cette décision devrait aboutir à une
poignée de licenciements. Deux cadres historiques de la maison vont également partir : Lisa Nishimura,
jusqu'ici responsable des documentaires et films à petits budgets, et Ian Bricke, vice-président jusqu'ici
chargé des films indépendants. Netflix ne fait pas de commentaire.

Contrairement aux vagues de licenciements de plusieurs centaines d'employés annoncées mi-2022, cette
manœuvre ressemble davantage à une réorganisation, visant à centraliser la prise de décision et à
renforcer le poids des productions ambitieuses, qu'à une volonté de couper les coûts.

Netflix produit une cinquantaine de films par an, plus qu'aucun autre studio de Hollywood, pointe
Bloomberg. Mais dans cette avalanche de longs-métrages, trop peu reçoivent le succès public ou critique
espéré. La dernière cérémonie des Oscars s'est toutefois bien passée pour Netflix. Plusieurs de ses
productions ont raflé des statuettes, notamment « A l'Ouest rien de nouveau » (meilleur film étranger,
photo, musique et décors) et « Pinocchio » (meilleur film d'animation).

Cette réorganisation intervient alors que Netflix doit faire face à une concurrence de plus en plus vive,
venant de Disney+ mais aussi d'Amazon et d'Apple. Tous deux auraient décidé d'accroître leurs

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investissements dans le cinéma en mettant chacun plus d'un milliard de dollars par an dans la production
de films.
Partage de comptes

Netflix doit donc trouver les moyens de rivaliser et de continuer à faire croître son portefeuille d'abonnés
(231 millions fin 2022), sans disperser ses efforts pour préserver sa rentabilité et soutenir son cours de
Bourse. L'action remonte progressivement depuis la mi-2022, après avoir chuté au premier semestre de
l'année passée, marqué par de premières baisses du nombre de ses abonnés.

Le nombre de fidèles est lui aussi reparti à la hausse dans la deuxième moitié de l'année, grâce
notamment au lancement d'une offre moins chère avec publicité. Netflix envisage également de resserrer
bientôt sa politique de partage de comptes. Une autre version du « less is more ».

Télé : la revanche du petit écran


On disait la télévision gratuite condamnée à une mort lente. Elle fait mieux que résister. Elle pourrait
rebondir.

Ce n'est pas parce que nous sommes tous mortels que nous allons tous mourir tout de suite. Cette vérité
valant aussi bien pour les humains que pour les entreprises, l'heure est venue pour les champions de
l'audiovisuel tricolore de changer de discours.

TF1 et M6, qui affirmaient l'an dernier qu'ils étaient condamnés à disparaître rapidement si on ne les
laissait pas fusionner, reconnaissent désormais que même si elle est de plus en plus concurrencée, la
télévision gratuite est loin d'être morte.

D'abord parce que même si elle risque d'aller moins bien demain, la télévision d'aujourd'hui ne va pas si
mal. Média préféré des Français, regardée plus de trois heures trente par jour par des millions d'entre
eux, la télévision reste une industrie encore très rentable. TF1 et M6 ont dégagé à eux deux presque trois
milliards d'euros de résultat opérationnel sur les cinq dernières années.

Challenger

Certes, l'audience s'érode, se fragmente et vieillit et les jeunes passent de plus en plus de temps sur les
réseaux sociaux et les offres de streaming. Le combat avec Amazon Prime Video, Netflix, Disney ou
YouTube s'annonce bien sûr inégal. Capables d'amortir leurs investissements technologiques et dans les
contenus sur une base mondiale et bien moins encadrés sur le terrain réglementaire que les acteurs
français, les géants du numérique sont des adversaires redoutables captant à la fois du temps d'attention
comme des recettes publicitaires.

Mais nos champions du PAF disposent de plusieurs atouts. Même si leur force de frappe financière est
limitée, ils ont la capacité d’investir plus que Hollywood dans des contenus français. Or, dans
l'Hexagone comme ailleurs, même si les contenus américains brillent, il existe une vraie prime aux
contenus locaux. Disposant de fréquences hertziennes et proposant un accès gratuit, TF1 et M6 sont
aussi, avec France Télévisions, les seuls à pouvoir toucher chaque jour autant de millions de foyers
français. Et ce sont bien les succès qu'ils construisent sur leurs chaînes en direct qui, en différé, génèrent
ensuite le plus d'audience sur leurs plateformes de télévision de rattrapage.

Monétiser

Avec le boom du replay, nos géants ont une bien plus grande capacité à amortir et à monétiser des
contenus moins périssables qu'avant. Surtout, si la réglementation, aujourd'hui contraignante pour le
petit écran, était amenée à évoluer.

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Les chaînes gratuites de plus en plus consommées via des apps et des box pourraient alors profiter de
l'essor de la publicité personnalisée. Une réclame 2.0 qui aurait même potentiellement plus de valeur
dans les univers sûrs et mesurables de TF1 et de M6 que dans ceux de Facebook et de TikTok, qui
inquiètent de plus en plus les annonceurs.

Nicolas de Tavernost : « M6 doit développer des offres pour


toucher directement les téléspectateurs »
Télévision délinéarisée, streaming, relations avec les opérateurs télécoms, renouvellement de la
fréquence de la Six… Le président du directoire de M6, Nicolas de Tavernost, explique aux « Echos »
pourquoi son groupe veut accélérer les investissements dans ses offres en ligne tout en restant sur la
TNT.

Êtes-vous inquiet pour l'avenir de la télévision gratuite ?

La télévision gratuite a subi une succession de chocs depuis une dizaine d'années. Et le phénomène s'est
accéléré au cours des cinq dernières années. Nous devons faire face à de nouveaux concurrents et de
nouveaux usages. Entre les géants du streaming et le boom des réseaux sociaux, nous affrontons des
acteurs internationaux très puissants qui captent du temps de consommation et des recettes publicitaires.
Mais la télévision gratuite historique reste le média le plus puissant : elle est regardée près de 3 heures
et demie par jour par des millions de Français. C'est le seul média capable de réunir la nation autour de
grands événements.

Mais c'est un média en déclin ?

La période du Covid a masqué en partie l'essor de la concurrence mais le monde a changé et il faut
s'adapter. C'est ce que nous avons commencé à faire. Nous ne partons pas de zéro mais il faut accélérer
pour faire face à l'évolution des usages et à l'évolution démographique et au vieillissement de la
population.

Nous avons lancé dès 2008 nos premiers services de télévision de rattrapage avec M6 Replay, nous
avons investi dans la technologie avec la société technologique Bedrock, nous réalisons déjà près de 100
millions d'euros de recettes publicitaires digitales mais nous devons amplifier notre effort. M6 n'est pas
qu'un acteur de la télévision hertzienne historique linéaire, nous sommes aussi et déjà dans la télévision
délinéarisée.

Faudrait-il aller plus loin ?

Il faut être réaliste. Un acteur français, aussi puissant soit-il, ne peut rivaliser avec un Netflix ou un
Amazon dans un service de streaming payant. Mais nous avons des atouts pour proposer un service de
VoD complémentaire en grande partie financé par de la publicité. Nous devons jouer de la
complémentarité entre notre diffusion linéaire qui offre une incroyable caisse de résonance et des
services d’AVoD permettent de toucher plus de monde, d'amortir des programmes et de générer des
recettes publicitaires qui pourront être tirées par le développement de la publicité adressée. Nous devons
être sur la TNT, comme dans les box et l'OTT [la télévision en streaming, NDLR].

La plateforme Salto va-t-elle s'arrêter ?

Il y a quatre ans nous nous étions posé la question et avions considéré ne pas avoir la taille suffisante
pour faire un service de SVoD tout seuls. C'est la raison pour laquelle en anticipation de phase sur une

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fusion nous avions créé Salto. Mais la fusion TF1-M6 ayant été rejetée par l'Autorité de la concurrence,
nous revenons à notre métier fondamental qui est de faire un accès gratuit à la télévision.

Pour cela, nous devons développer de manière plus forte nos services d'AVoD et menons en ce moment
une revue stratégique pour chiffrer les investissements qui seront nécessaires au cours des prochaines
années.

Mais pour séduire, vous allez devoir investir plus dans les programmes ?

Beaucoup plus pas forcément mais différemment oui. Si nous voulons lancer courant 2024 un feuilleton
qui représentera un investissement significatif de 30 millions par an, c'est parce que c'est le genre de
programme qui peut attirer des jeunes en télévision de rattrapage tout en gardant une population plus
large en linéaire. C'est aussi pour cela que nous investissons de plus en plus dans les programmes
français et moins dans les contenus américains. En trois ans, nous avons maintenu le même nombre de
films d'Hollywood mais nous avons divisé par trois notre offre en séries et téléfilms américains en
passant de 1.500 à 500 heures de programmes par an. Voilà pourquoi, sans renoncer au sport - car nous
diffuserons une partie des matchs de la Coupe du monde de rugby ou de l'Euro de football 2024 - nous
n'investirons pas plus dans le sport qui se prête peu à la télévision délinéarisée.

Peut-on se développer dans le streaming quand on vend déjà M6 et des services aux opérateurs de
box ?

Plus de 70 % de notre audience est encore générée par les box qui structurent le marché français. Les
opérateurs sont nos partenaires mais ce modèle représente plus le passé que l'avenir. Nous devons
développer des offres qui nous permettent de toucher directement les téléspectateurs via des téléviseurs
connectés et nos applications.

Nos accords avec les opérateurs nous permettent d'évoluer dans ce sens même si nous devons trouver
un nouveau terrain d'entente. Nous devons maîtriser nos apps qui offrent bien plus de possibilités en
matière de publicité adressée de façon moins contraignante que les box. Nous devons trouver le chemin
d'une transition intelligente pour passer progressivement d'un monde intermédié par les box à un monde
où, comme avec la TNT, nous gardons un contact direct avec le public. Cette évolution est nécessaire
pour d'une part offrir plus de services à notre public et d'autre part mieux maîtriser la vente de notre
publicité. Nous rentrons dans un monde où les datas sont indispensables et nous devons y avoir accès
pour mieux servir notre public et nos clients.

M6 a-t-il la taille critique ?

Pour réussir notre transformation nous avons depuis des années constitué un groupe. Nous avons investi
dans des chaînes et dans la radio, dans des diversifications et dans la technologie. Nous avons travaillé
sur un mariage avec TF1 qui nous aurait permis d'être plus fort. Cette approche nous a été interdite.
Nous avions sans doute raison trop tôt. Mais nous continuons de nous développer. Dans la technologie
nous investissons en partenariat avec le RTL Group dans Bedrock et nous serions prêts à lancer de
nouvelles chaînes si des fréquences TNT étaient disponibles en France. Nous n'avons que 5 chaînes en
France, dont une payante, et la loi nous permettrait d'en avoir 7.

Vous n'auriez pas besoin de nouveaux investisseurs ?

Nous sommes un groupe rentable et pas endetté. Nous avons donc les moyens de nous développer. Notre
actionnaire RTL Group a rappelé qu'il ne souhaitait pas réduire sa participation de contrôle. Mais nous
sommes aussi une entreprise cotée avec du capital flottant. Nous sommes par exemple très heureux
d'accueillir dans notre capital CMA CGM (avec une participation supérieure à 8 %, NDLR) et nous
interprétons cela comme un signe de confiance.

80
Pour que votre fréquence soit renouvelée, certains exigent que vous investissiez plus dans la fiction
par exemple ?

Depuis la loi de 1986, M6 est le seul nouvel acteur de la télévision généraliste en France qui se soit
développé en contribuant réellement à la création dans l'Hexagone, à côté des trois autres chaînes
historiques. Mais notre ambition n'a jamais été de faire la même chose que les autres.

A-t-on besoin d'un JT de plus à 20 heures ? Nous avons informé autrement et attiré un public plus jeune.
Nous avons investi plus que d'autres dans les émissions comme Capital, Zone Interdite ou E = M6 qui
prouvent que de nombreux formats peuvent réussir en prime time. 88 % de nos programmes en prime
time sont de la programmation inédite. Personne ne fait aussi bien.

Mais globalement l'audience de M6 baisse !

Quand le nombre d'acteurs augmente, l'audience se fragmente : ceci est vrai pour toutes les chaînes.
Mais il faut regarder l'audience du groupe dans son ensemble, il faut regarder les audiences consolidées
grâce au replay et il faut savoir que le groupe M6 est celui dont l'audience des chaînes est la plus jeune.
Nous avons d'ailleurs fait nos meilleures audiences historiques en 2022 sur les moins de 50 ans. M6 est
la chaîne la plus jeune d'Europe après ProSieben [chaîne de télévision généraliste privée allemande,
NDLR].

Où en est la préparation de votre succession ?

L'actionnaire a souhaité que j'accompagne le groupe dans son nouveau modèle tout en préparant la
transition générationnelle. C'est ce que nous avons fait en faisant grandir des talents en interne. La
transition est en route.

Netflix retrouve de son lustre et dépasse 230 millions


d'abonnés
Le géant du streaming a recruté 7,7 millions de clients au quatrième trimestre, grâce au succès de
nouveautés comme « Wednesday », ou « Glass Onion ». Les abonnements avec publicité n'ont pas
cannibalisé l'offre haut de gamme. La croissance des abonnés va ralentir au premier trimestre, mais avec
des marges supérieures aux prévisions.

L'année 2022 avait mal commencé pour Netflix, mais elle s'est terminée en beauté, avec plus de 230
millions d'abonnés. Le géant américain du streaming a annoncé jeudi à la clôture de Wall Street avoir
recruté 7,7 millions de nouveaux abonnés au quatrième trimestre. Ce n'est certes pas autant que les 8,3
millions enregistrés un an plus tôt. Mais c'est bien mieux que l'objectif de 4,5 millions annoncé pour la
période d'octobre à décembre. Le groupe confirme donc avoir remonté la pente en fin d’année, après
avoir pour la première fois de son histoire perdu des abonnés au premier semestre.

Netflix en a donc encore sous le pied. On aurait pu craindre que le leader du streaming voie ses
perspectives s'épuiser. Que nenni. Le streaming ne pèse que 40 % du temps d'écran aux Etats-Unis et au
Royaume-Uni, et Netflix moins de 10 %. « Nous pensons qu'à la fin, la vaste majorité du temps passé
sur la télévision aura lieu via le streaming, ce qui devrait nous procurer une longue rampe de croissance
alors que nous continuons à améliorer notre service », affirme le groupe dans la lettre aux investisseurs
qui dévoile les résultats du quatrième trimestre.

Cette croissance s'explique essentiellement par le succès des nouveaux contenus, notamment la série «
Wednesday », la quatrième saison de « Stranger Things », qui ont tous les deux déjà dépassé un milliard

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d'heures passées devant l'écran, le documentaire « Harry and Meghan », qui est le deuxième le plus
regardé dans l'histoire des productions Netflix, ou le film « Glass Onion ».

Peu de cannibalisations avec le nouveau forfait

Le chiffre d'affaires a crû de 4 % au quatrième trimestre, et même de 10 % en neutralisant l'effet de la


variation des taux de change. Il s'élève à 31,6 milliards sur un an. Le résultat opérationnel a chuté au
dernier trimestre en raison de l'appréciation du dollar, mais il est supérieur à l'objectif, et sur 2022, il
s'élève à 6,4 milliards (ajusté de l'effet change et de 150 millions de dollars de coûts de restructuration).

Aucun chiffre n'a encore filtré sur les premiers résultats du service à tarif réduit (6,99 dollars aux Etats-
Unis) partiellement financé par la publicité, qui a été lancé en novembre. Il est trop tôt. Toutefois, Netflix
assure que « le prix plus bas provoque une croissance incrémentale des abonnements ». De plus, « il y
a eu très peu d'abonnés en provenance d'autres formules », autrement dit, l'offre bas de gamme n'a pas
cannibalisé le haut de gamme à 15,50, voire 20 dollars - l'offre à 10 dollars est désormais plus difficile
à trouver sur le site de Netflix aux Etats-Unis.

Selon une enquête menée en décembre par la société Forrester Research, 36% des adultes américains
veulent réduire leurs dépenses d'abonnement en 2023, dans un contexte de baisse du pouvoir d'achat et
de risque de récession. C'est à la fois une menace pour le cœur de métier de Netflix, et l'occasion de
développer de nouveaux modèles économiques.

La lutte contre les passagers clandestins

Selon Bank of America, la vidéo à la demande financée par la publicité (AVOD, advertising-based video
on demand) va croître et siphonner une partie des revenus des médias en ligne et des réseaux sociaux.
En 2027, prévoient les analystes de la banque, elle pourrait peser 70 milliards de dollars, contre 37
milliards l'année dernière. Netflix prévient toutefois que la montée en charge de son service AVOD sera
lente, « avec un impact sur 2023 modeste ».

Au premier trimestre 2023, le groupe prévoit que le nombre d'abonnés va très peu progresser, ce qui est
déjà mieux que le déclin du premier trimestre 2022. Mais les efforts de Netflix pour lutter contre les
clients « passagers clandestins » devrait se voir dans les recrutements du deuxième trimestre. Alors que
l'abonnement est en théorie réservé à un foyer, les codes sont souvent partagés avec des amis à
l'extérieur. Netflix estime la perte à 100 millions de foyers, et souhaite monétiser ce halo de clients
potentiels : « A la fin du premier trimestre, nous voulons commencer à déployer plus largement notre
service de partage payant », déclare le groupe.

Un nouveau tandem de direction

Les perspectives financières sont favorables. « Nous nous attendons à ce que la croissance de notre
chiffre d'affaires à revenu constant accélère et à ce que la marge opérationnelle grossisse sur l'année
complète (hors variations conséquentes du taux de change) », annonce Netflix, qui a aussi révisé sa
prévision de marge opérationnelle 2023, de 19-20 % à 21-22 %.

Une décennie après avoir débarqué dans la production de contenus propres, « nous avons passé la phase
la plus intensive en cash de cette construction. Par conséquent, nous pensons que nous allons maintenant
générer un free cash flow annuel positif et soutenu à partir de maintenant », assure le groupe.

Au passage, le fondateur Reed Hastings fait un pas en arrière en devenant président exécutif. Le directeur
des opérations Greg Peters a été nommé co-directeur général avec Ted Sarandos.

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Amazon, Netflix : quand les plateformes de streaming
reprennent les vieilles recettes de la télé
Publicité, matchs de football, événements en direct, téléréalité, coaching sportif… Pour poursuivre leur
croissance, les plateformes s'inspirent des chaînes de télévision. Tandis que celles-ci continuent d'imiter
les plateformes. Se retrouveront-elles à mi-chemin ?

La « plateformisation » des chaînes de télévision est en marche depuis plusieurs années. Mais il va
désormais falloir inventer un autre néologisme pour désigner la manière dont les plateformes, dans un
mouvement inverse, reprennent les méthodes et les formats fétiches des canaux du petit écran.

Les signaux s'accumulent. Le plus manifeste est l'irruption d'offres avec publicité chez Netflix depuis
novembre, puis Disney+ depuis décembre aux Etats-Unis, bouleversant le modèle de ces plateformes
SVOD (Subscription Video On Demand), où l'abonnement garantissait jusqu'alors l'absence
d'interruption commerciale.

Les dernières frontières s'effacent

Ce genre de formule est appelée à se répandre. Dans une récente étude, le cabinet Deloitte Global estime
que d'ici à 2030, « la plupart des abonnements aux services de vidéo en ligne seront partiellement ou
entièrement financés par la publicité ». Concurrençant les chaînes sur ce marché, elles devront se plier
aux mêmes règles qu'elles en matière de mesure d'audience. Médiamétrie a récemment confirmé son
intention de calculer celle des plateformes d'ici à deux ans.

Une fois la coupure publicitaire passée, les programmes proposés sur Netflix, Amazon Prime Vidéo et
consorts se rapprochent aussi de plus en plus de ceux des chaînes de télévision. Des formats des années
1980 y trouvent une nouvelle jeunesse, comme en témoigne l'arrivée fin décembre sur Netflix d'un
programme de coaching sportif, dans la lignée de « Gym Tonic », l'émission culte de Véronique et
Davina diffusée sur Antenne 2 dès 1982. D'autres émissions de divertissement ont envahi depuis
quelques années les plateformes, qu'il s'agisse de téléréalité, de jeux, de cuisine, d'immobilier ou de
décoration.

Le direct a longtemps fait figure de dernière frontière. Mais celle-ci est de moins en moins étanche. Le
26 février, Netflix diffusera ainsi en temps réel une cérémonie hollywoodienne, les SAG Awards, qui
fait figure de répétition des Oscar. A l'automne, Amazon Prime Video a retransmis en direct pour ses
abonnés le concert à Paris du chanteur Kendrick Lamar.

Pluie de milliards sur le sport

C'est surtout dans le sport que les plateformes concurrencent durement les chaînes traditionnelles.
Netflix est l'un des seuls acteurs à ne pas avoir encore franchi le cap. En 2021, Amazon a chipé à Canal+
la majorité des droits de la Ligue 1 de football, pour 250 millions d'euros par an sur trois saisons. Il
pourrait tenter de les conserver lors du prochain appel de l'offre de la LFP prévu cette année.

Le géant de Seattle a aussi récupéré en 2019 une partie de ceux de Roland-Garros, pour les éditions 2021
à 2023. Un tournoi traditionnellement diffusé par France Télévisions. Amazon s'est en outre arrogé en
2021 ceux des matchs du jeudi soir de la NFL pour dix ans, à raison d'un milliard de dollars par an. Mi-
2022, Apple a, quant à lui, déboursé un montant estimé à 2,5 milliards de dollars pour les droits sur dix
ans de la MLS, le championnat américain de football (ou soccer), que la firme va commencer à diffuser
à la fin du mois.

L'année passée a enfin été marquée par une autre transaction de grande ampleur, avec l'acquisition par
Viacom18 - une joint-venture entre Paramount Global, le conglomérat indien Reliance Industries, et
Bodhi Tree Systems -, des droits digitaux de la ligue indienne de cricket, pour 3 milliards de dollars. La

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frénésie d'achat devrait se poursuivre. Selon l'étude de Deloitte Global, en 2023, « les streamers
dépenseront plus de 6 milliards de dollars en droits sportifs exclusifs majeurs sur les plus grands marchés
mondiaux ».

Plateformisation des chaînes

Ce qui faisait la singularité des plateformes SVOD semble donc en train de s'estomper, alors que les
chaînes, comme TF1, M6, France Télévisions, côté gratuit, ou Canal+, côté payant, investissent dans les
séries et se « plateformisent » à tout va. Le replay prend une part de plus en plus importante dans leur
consommation, les poussant parfois à diffuser certains épisodes de série en « preview », avant le direct.

Même si Salto, la plateforme de SVOD commune à France Télévisions, TF1 et M6, a fait long feu, les
deux chaînes ont lancé, respectivement à l'automne 2021 et à l'automne 2022, leurs propres plateformes
de replay sans publicité sur abonnement (SVOD), MyTF1Max et 6PlayMax, à l'image d'ITVX, le service
équivalent de streaming d'ITV, en Angleterre.

Recherche de nouvelles recettes

La consommation à la demande semble en effet appelée à devenir la règle. En France, elle représentait
50 % de la consommation vidéo totale, y compris les réseaux sociaux, des 18-64 ans au troisième
trimestre 2022, contre 34 % quatre ans plus tôt, d'après un sondage Ampere Analysis cité dans le dernier
« observatoire de la vidéo à la demande » du CNC. Cette proportion atteint 82 % aux Etats-Unis sur la
même tranche d'âge, et déjà 81 % chez les Français de 18-24 ans.

Dans ce contexte, il est légitime de se demander pourquoi les plateformes imitent des concurrents
qu'elles veulent ringardiser. La concurrence féroce qu'elles se livrent, le ralentissement de la croissance
du nombre d'abonnés sur les marchés arrivés à maturité, où l'inflation contraint les dépenses des
consommateurs, la hausse des taux d'intérêt qui les poussent à chercher plus vite la rentabilité, offrent
autant de pistes de réponses, justifiant en particulier la recherche de nouvelles recettes publicitaires.
Mais l'idée est peut-être aussi, simplement, d'enlever une à une toutes les raisons qui demeurent de
regarder la télévision hors d'une plateforme.

En 2023, la télévision veut accélérer dans l'AVoD


ITV, le TF1 britannique, vient tout juste de dégainer sa nouvelle plateforme et M6 va bientôt étoffer son
service avec des chaînes purement numériques. Pour 2023, les grands groupes audiovisuels mettent le
cap sur les offres en ligne gratuites et financées par la publicité.

Cap sur l'AVoD (vidéo à la demande financée par la publicité) en 2023 pour les grands groupes
européens de télévision en clair. ITV, le TF1 britannique, vient tout juste de dégainer sa nouvelle
plateforme et M6 va lancer au premier trimestre ses chaînes numériques.

Confrontés à la baisse de la durée d'écoute, et pris en tenaille entre YouTube et les plateformes
américaines Netflix et Disney+ de vidéo à la demande par abonnement (SVoD) qui se mettent à la
publicité, les acteurs historiques de la télévision gratuite doivent réagir.

Investissement massif pour ITV

Dernier épisode en date de cette « guerre du streaming » : la refonte de la plateforme d'ITV, qui a lancé
le 8 décembre une nouvelle offre baptisée « ITVX » avec à la clé plus de 800 millions de livres (916
millions d'euros) d'investissement, majoritairement dans les contenus, et un objectif de doubler les
revenus numériques à horizon 2026.

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De quoi montrer la voie ? Chez TF1, le directeur général Rodolphe Belmer travaille pour donner un
nouveau souffle à la Une. Même si rien ne filtre sur les détails de sa nouvelle stratégie, les premiers
éléments qui émergent laissent penser que l'AVoD sera un axe prioritaire. Tous les groupes audiovisuels
sont aux prises avec une baisse de la consommation des chaînes classiques en clair et une conjoncture
publicitaire incertaine.

1 milliard en 2023

« Si vraiment la publicité ralentit en 2023, cela peut freiner l'enthousiasme autour de l'AVoD », tempère
Philippe Bailly, président de NPA Conseil. Mais à plus long terme ce marché devrait rester un relais de
croissance. Selon les estimations du cabinet Idate, les revenus de l'AVoD devraient croître de 19 % par
an aux Etats-Unis d'ici 2026. Toujours selon Idate, le rythme de croissance sera moins fort en Europe,
mais avec une progression estimée à 14 % par an en France, le marché hexagonal de l'AVoD devrait
franchir le seuil du milliard de revenus en 2023.

« Les contenus de l'AVoD montent en gamme, analyse Jacques Bajon, directeur d'études chez Idate.
Avec ITVX, c'est déjà l'étape d'après, avec une hybridation de services (AVoD, FAST, SVoD…) qui
propose une offre de plus en plus totale. »

Tout en intégrant aussi une offre payante, le socle d'ITVX sera la gratuité et le financement par la
publicité. Avec aussi des produits premium (plus de 250 films, 200 séries, avant-premières, matchs de
la Coupe du monde au Qatar en direct, etc.) et de nouvelles chaînes numériques ciblant les goûts du
public.

Montée en gamme

Pour rattraper un certain retard français dans le streaming, TF1 et M6 ont déjà progressivement étoffé
leurs plateformes numériques en y ajoutant des briques. Par exemple, depuis plus d'un an myTF1
propose des chaînes thématiques dites FAST (« Free Ad-Supported TV »). Quant à M6, les contenus
uniquement destinés à sa plateforme gratuite 6Play ont augmenté de 30 % sur un an à 6.000 heures, avec
aussi une montée en gamme, met en avant Frédéric de Vincelles, directeur général des programmes en
charge des plateformes digitales.

« De grands studios comme CBS, ITV et BBC ouvrent les vannes de leurs catalogues à l'AVoD. L'offre
de programme de 6Play s'est ainsi premiumisée avec plus d'utilisateurs et plus de revenus publicitaires
», explique Frédéric de Vincelles.

Le phénomène FAST

Ces dernières années, le FAST s'est imposé outre-Atlantique comme une nouvelle gamme de l'AVoD
au sein de services purement gratuits comme Pluto TV (Paramount), Tubi (Fox) ou ceux des fabricants
de téléviseurs (Samsung, LG).

En Europe, ce phénomène est juste naissant. En France, les diverses offres FAST comptent 450 de ces
chaînes purement numériques avec au total entre 3 et 4 millions d'utilisateurs mensuels actifs, selon
NPA Conseil. Aux Etats-Unis, selon Dataxis, il y aurait déjà environ 300 millions d'utilisateurs pour les
chaînes FAST tous les mois, soit neuf Américains sur dix !

Freins structurels

De fait, la monétisation des offres FAST reste relativement limitée : environ 200 millions d'euros en
Europe cette année contre près de 3 milliards aux Etats-Unis. Si la marge de progression semble
immense, il y a des freins. En France, la majorité des foyers accède à la télévision via leur box ou même
via la TNT, pas via des services de streaming.

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En insérant de la publicité, Netflix casse un dogme
fondateur
La publicité est un peu contre-nature pour le « binge-watching » et les formats relativement libres façon
Netflix. Mais les annonceurs risquent d'être intéressés, y compris en France.

Depuis quelques trimestres de contre-performances, Netflix casse certains de ses grands mythes. Il ne
se bat ainsi plus uniquement contre le jeu vidéo « Fortnite » ou le sommeil. Celui qui a révolutionné la
télévision reconnaît en effet qu'il a désormais pour concurrents Disney+ ou HBO Max.

Surtout, mardi soir, le groupe a cassé un de ses dogmes fondateurs, suscitant déjà l'inquiétude de certains
de ses concurrents traditionnels qui en vivent. La plateforme de vidéo à la demande par abonnement
(SVoD) laisse ainsi entendre qu'elle va mettre en place de la publicité d'ici à 2023 afin de proposer des
offres moins chères.

Comme le note Richard Greenfield, un analyste américain, il est « difficile de ne pas penser au discours
du groupe sur la façon dont la publicité obligeait les créateurs à mettre des moments de suspense
['cliffhangers'] avant les coupures ». Autrement dit à l'aspect contre-nature de la publicité pour un Netflix
mettant l'accent sur le « binge-watching », qu'il a popularisé, et la liberté des formats. Mettre de la
publicité n'est pas une décision légère - d'autant que les coupures accentuent les taux de désabonnement.

Elasticité

Alors que sa capitalisation boursière s'effondre depuis ses plus hauts de la fin 2021, le groupe n'a pas
vraiment le choix que d'envisager cette idée. L'inflation généralisée appauvrit les ménages. D'où la
première baisse en dix ans - de 200.000 - du nombre de souscripteurs au premier trimestre 2022.

Alors que le groupe envisageait de hausser les prix pour maintenir son rythme de croissance de revenus,
l'élasticité attendue des consommateurs n'est pas au rendez-vous. Au premier trimestre, le rythme de
croissance des revenus a été divisé par deux, à 10 % environ, par rapport à ces dernières années.

Plus fondamentalement, Wall Street se demande désormais si le potentiel d'abonnés à Netflix est
plafonné à un peu plus de 200 millions plutôt que les 600 à 800 millions évoqués par le passé. Après
avoir bénéficié des désabonnements à la télévision payante très chère, Netflix doit faire plus d'efforts
pour recruter. Si cette panne de croissance se confirme, les géants américains qui ont tout misé sur la
SVoD au prix de certains sacrifices sur la télévision payante et la salle de cinéma en souffriront
également.

Une compétence à acquérir

Tous ces acteurs - Disney (Disney+ et Hulu), Warner (HBO Max), CBS (Peacock), Paramount, etc. - se
sont en tout cas déjà mis à cette vidéo par abonnement en partie financée par la publicité (AVoD). Mais
pour eux, c'était beaucoup plus naturel. Ils ont en effet les structures et les forces de vente héritées de
leurs chaînes payantes.

Cinq questions pour comprendre la chute de Netflix

Pour Netflix, tout cela est à construire et prendra du temps. « C'est complexe également d'un point de
vue technologique », précise un expert. Netflix a prévu de d'abord s'en remettre à un sous-traitant. A
court terme, le groupe doit donc encore compter sur sa capacité à créer des hits. Il ne prévoit d'ailleurs
pas de réduire son gigantesque budget contenus de 17 milliards de dollars par an, dont 5 pour les films.

D'un autre côté, les annonceurs ne demandent pas mieux que de communiquer sur Netflix, y compris en
France où il a près de 10 millions d'abonnés et - par sa nature à la demande - des capacités de ciblages.

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Sur ce marché de l'AVoD, il sera en France face aux initiatives récentes de TF1 et M6 pour investir ce
créneau. Et sera un concurrent de poids.

Netflix : la nouvelle aliénation de masse ?


La plateforme vidéo change nos habitudes de spectateurs et bouscule le cinéma. Pour le pire uniquement
? Échange entre le producteur Romain Blondeau, auteur de « Netflix, l’aliénation en série », et le critique
Hervé Aubron.

Comme d’autres plateformes, Netflix est dans le viseur de celles et ceux qui se mobilisent pour la
pérennité du cinéma français, dont le modèle économique est très fortement fragilisé. Mais, à côté de
cet aspect propre à un de nos secteurs culturels les mieux protégés jusqu’à aujourd’hui, la critique monte
aussi à propos des productions de Netflix elles-mêmes, et de ce que l’usage de cette plateforme nous fait
en tant que spectateurs et spectatrices.

Dans un petit essai paru à la rentrée, Netflix, l’aliénation en série (Seuil, 2022), Romain Blondeau relève
par exemple à quel point les contenus de cette firme mondialisée sont devenus standardisés. Ancien
journaliste, aujourd’hui producteur impliqué dans l’appel à des états généraux du cinéma, il dénonce des
habitudes de consommation qui participent du « monde diminué et toujours plus domestiqué auquel rêve
la Silicon Valley ».

Pour mieux comprendre cette charge et évoquer les politiques culturelles qui seraient appropriées, nous
lui avons proposé un dialogue avec le critique Hervé Aubron. Dans le numéro des Cahiers du cinéma
de mars 2021, ce dernier avait caractérisé Netflix comme un « empire du neutre », évoquant des films
en forme de « récits circulaires, [qui] avancent en faisant du surplace ».

Mediapart : Est-ce qu’il n’y a pas quelque chose de classique, voire de convenu à dénoncer comme
aliénant un nouveau médium de masse, avant qu’il n’entre dans les mœurs ? Des intellectuels illustres
ont fait le même diagnostic à propos d’autres supports : la radio, le cinéma, la télé, l’arrivée d’Internet…

Romain Blondeau : D’abord, les critiques d’hier n’étaient pas forcément à côté de la plaque. L’aliénation
produite par Netflix ne nous exonère pas des aliénations précédentes, comme celle produite par la
télévision, et je me suis inspiré de cet héritage critique, de Neil Postman, Bourdieu, etc. Mais je crois
que par le passé, nous étions davantage en capacité des résister à ces aliénations.

Dans le livre, je reviens sur la phrase de Patrick Le Lay, alors PDG de TF1, prononcée en 2004 sur « le
temps de cerveau disponible ». Elle avait créé une polémique nationale, au point qu’il avait été sommé
de s’expliquer. La phrase du PDG de Netflix, Reed Hastings, affirmant en 2017 que « [son] seul
concurrent dans cette industrie, c’est le sommeil », est beaucoup plus invasive. Mais elle a à peine été
relevée. Elle n’a suscité aucune polémique.

Il me semble qu’avec Netflix, l’aliénation a atteint une phase terminale. Tout va plus vite et se décline
sur plusieurs écrans, dont celui de notre téléphone : l’aliénation est dans notre poche. Sans mythifier la
salle de cinéma, on peut au moins dire que l’on y regarde quelque chose de manière synchrone, et que
l’on regarde ensemble dans la même direction.

À cet égard, je ne crois guère aux thèses sur les communautés virtuelles qui se formeraient autour des
séries, comme Sandra Laugier le défend ; l’idée que l’on n’est jamais seul face à un écran d’ordinateur,
mais que l’on est un parmi des millions, et que ces millions font communauté. Politiquement, cela me
paraît inconséquent, notamment parce que nous sommes dans une période où le cinéma est fragilisé.

J’ai toujours été intéressé par les discours théoriques qui consistent à trouver du cinéma partout, même
dans les lieux les plus impurs, et je viens moi-même de cette école critique. Mais ces discours ne sont

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possibles, je veux dire politiquement responsables, qu’à la condition d’avoir un cinéma puissant et
majoritaire. Ce qui n’est plus le cas.

Hervé Aubron : Il est vrai que le cinéma a pu être considéré comme un spectacle aliénant. Mais le binge
watching [le fait de regarder une série d’une traite – ndlr] et désormais le speed watching [qui permet
d’accélérer la vitesse de défilement des images – ndlr] dont parle Romain Blondeau dans son essai nous
font franchir un seuil.

Lorsque les gens suivent une série sur un écran de portable ou de téléphone, pourquoi pas en accéléré,
regardent-ils toujours vraiment les images qui défilent ? Si Netflix demeure très opaque sur ses
audiences réelles, c’est aussi parce qu’on ne sait pas combien de gens sont vraiment devant leur écran,
ou font autre chose en même temps, ou s’endorment dans leur lit.

Il y a bien sûr toujours des gens qui dorment ou pensent à autre chose dans une salle de cinéma, mais
cela n’a rien à voir en termes d’implication, de présence, d’attention, même flottante, ou tout simplement
de disponibilité, qui passe aussi par un abandon, alors que le streaming, selon moi, peut s’inscrire dans
un horizon d’hyperactivité.

Les salles sont désertées, et il n’y a pourtant jamais eu autant de tournages, à tel point que l’on peut
manquer sur les plateaux de techniciens ou de matériel… Il est assez terrible de se dire qu’il y a peut-
être plus de figures humaines sur les écrans que devant, que les flux d’images et de récits se déversent
peut-être sans spectateurs au sens ancien du terme, tout simplement parce qu’ils ne sont pas « là », au
sens le plus large.

Sur un plan symbolique, il est frappant que le succès de la série Squid Game, qui met en scène beaucoup
d’exécutions sommaires, ait coïncidé avec le drame survenu sur le tournage d’un western à l’ancienne,
intitulé Rust, avec Alec Baldwin, dont la chef-op a trouvé la mort suite à la manipulation d’une arme
réellement chargée. Cela a révélé une dégradation des conditions de tournage, y compris pour le cinéma
« classique », tant la boulimie des plateformes suscite une inflation.

La délinéarisation, qui permet de regarder tous les épisodes à la suite, a-t-elle vraiment changé le
regard ?

R. B. : Oui. Attendre un épisode d’une semaine sur l’autre, laisser la fiction phosphorer en nous, ça nous
rendait plus agissants, ça nous impliquait davantage. Et puis cela permettait d’instaurer une ritualité,
voire une sacralité des rendez-vous. La série House of the Dragon, actuellement diffusée sur HBO, est
sans doute de moindre qualité que Games of Thrones, mais son rythme de diffusion, avec des épisodes
non accessibles immédiatement, produit une stimulation plus forte pour moi que les séries disponibles
d’un bloc.

H. A . : Twin Peaks, The Return, de David Lynch, constitue un récent sommet des séries en streaming,
mais avait gardé le rythme d’un épisode mis en ligne chaque semaine. Il ne faut pas oublier que le binge
watching est un terme dérivé de l’alcoolisme : le binge drinking. Cela renvoie à un côté addictif, mais
peut aussi être connoté de manière cool, à l’instar d’un pilier de bar se targuant de tenir l’alcool.

R. B. : Je suis agacé par ce chantage au « cool », qui nous présente la situation actuelle comme un
progrès qu’il serait impossible ou inconvenant de questionner. On nous oppose souvent, de façon
relativiste, que le cinéma a survécu à la télé ou à la VHS. Mais l’argument est faible, dans la mesure où
si le cinéma a pu résister à la télévision et à la vidéo, c’est justement parce que ces dernières ont été
régulées, parce qu’on leur a opposé des politiques culturelles volontaristes et ambitieuses.

Là, on ne sait plus réguler des industries qui ont des sièges sociaux à l’autre bout du monde et pratiquent
« l’optimisation fiscale », au point que Netflix, qui gagne des milliards, n’a payé que 770 000 euros
d’impôts en France en 2019.

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Je pense qu’il faut renverser ce stigmate de la ringardise. Dire que le lieu du cool, c’est la salle de cinéma.
Une ville sans cinéma, c’est une ville enlaidie. Un spectateur seul dans son salon se prive d’un lieu de
sociabilité et d’une expérience émancipatrice. Il faut assumer une logique décroissante dans notre
consommation des images, assumer d’être des Amish du cinéma !

Peut-on affirmer cela alors que Netflix a été en pointe dans la représentation des minorités et sur
certaines thématiques, à l’instar des violences policières, invisibles dans la production de séries
françaises et encore peu montrées dans le cinéma mainstream ?

R. B. : Là, nous parlions des usages de Netflix, des modes de consommation. Mais j’admets que Netflix
a été un allié objectif des nouvelles luttes égalitaires. La plateforme a déplacé quelque chose dans
l’industrie du cinéma, l’a obligée à réagir sur les questions de visibilité des minorités. Il ne faut
cependant pas se leurrer : il s’agissait d’un calcul commercial cherchant à convaincre certains publics.

L’autre vertu de Netflix que je reconnais, c’est d’avoir favorisé des productions locales exportables au
niveau mondial dans une logique « glocale ». Et alors qu’il était quasi impossible d’exporter des films
sous-titrés aux États-Unis, ils ont généralisé la possibilité de regarder une série sous-titrée et de donner
accès à des productions en VO.

Est-ce qu’au cours des années Netflix, on peut repérer une vraie bascule en termes d’esthétique et
d’écriture dans sa production ?

R. B. : Oui. Je la date un peu arbitrairement de 2017, avec La Casa de Papel. Netflix a touché un public
très large à ce moment-là, au-delà des sériephiles, et s’est lancé dans une vraie course à la production.
La plateforme était déjà en croissance, mais c’est devenu exponentiel. Elle a aussi fait évoluer son
modèle économique, elle s’est financiarisée, elle s’est endettée, et s’est contrainte à une production
massive et standardisée.

Aujourd’hui, elle produit de manière standardisée une série coréenne anticapitaliste (Squid Game) aussi
bien qu’un show sur l’immobilier de luxe en France, qui dresse le portrait élogieux d’une famille
d’expropriateurs (L’Agence). Elle diffuse une mini-série sur le poids des violences sexuelles
(Unbelievable) mais aussi un film polonais faisant l’apologie de la culture du viol (365 jours). Sa ligne
est très confuse.

H. A. : Netflix se veut comme une sphère, couvrant tous les publics possibles, le plus réactionnaire
comme le plus supposément progressiste. Tout cela aboutit à un immense effet de neutralisation. C’est
le « en même temps » que décrit Romain Blondeau.

À côté de cela, il y a les grandes signatures – Scorsese, les frères Coen, Fincher – qui constituent en
quelque sorte le rayon « épicerie fine », mais qui, alors qu’ils ont carte blanche, embrayent sur ce
processus de neutralisation, en envoyant trop d’effets d’art ou de signature qui s’annulent. On se retrouve
donc avec des films qui ressemblent à des grosses machines anémiées des films gris, tel The Irishman
ou Monk.

R. B. : L’emblème le plus récent de ça, c’est Athéna, de Romain Gavras, qui distribue des sens et des
contre-sens, et finit par tout neutraliser, au point d’aboutir à un film purement confusionniste.

Iriez-vous jusqu’à dire qu’il y a eu un âge d’or de liberté, puis une standardisation ?

H. A. : Il est difficile de parler « d’âge d’or » pour une firme fondée en 2014. Au tout début, Sense8
[une série de science-fiction transgenre et métaphysique conçue par les sœurs Wachowski – ndlr] était
une bizarrerie, hors cahier des charges, mais l’audience n’a pas dû satisfaire Netflix. Des productions se
risquaient aussi à des allégories de Netflix elle-même. Okja, de Boog Joon-ho, faisait le portrait d’une
firme qui s’appelle Mirando (ce qui évoque les yeux, le regard), et envoie des bêtes transgéniques à
l’abattoir – peut-être le bétail des fictions ou des spectateurs…

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R. B. : Avec Squid Game, mais aussi avec Lupin, on voit comment Netflix avale tout, même ce qui
pourrait paraître antagoniste au capitalisme. Bella Ciao, le chant des partisans italiens, est devenu
l’hymne de leur carton pop planétaire La Casa de Papel ! C’est le génie noir de ce capitalisme de
plateforme que d’arriver à pénétrer tous les marchés, même avec des contenus qui lui sont antagonistes.

H. A. : Les films Netflix utilisent quasiment toujours le montage alterné, entre une action présente et
des réminiscences qui, morcelées, peuvent apparaître comme des épisodes.

En quoi ?

H. A. : Les films Netflix sont toujours des films en montage alterné, avec un arc narratif du présent au
présent, et puis des réminiscences. Dans les séries, les arcs sont morcelés, comme des épisodes. Dans
des films comme Monk ou The Irish Man, le principe de savoir ce qui va arriver est importé dans le
film, qu’on pourrait découper en épisodes.

R. B. : Le code typique de l’industrie sérielle, c’est la pluralité des points de vue, qui est le produit du
montage alterné. Une série ne peut pas avoir un point de vue conducteur dans une logique de marché,
puisqu’il faut pouvoir parler à toutes les audiences, produire de l’identification chez tous les spectateurs,
concerner à la fois à des gens âgés et des adolescents.

Plus généralement, en travaillant maintenant dans l’industrie du cinéma, je constate à quel point le
scénario, avec ses signifiants et ses informations, est devenu l’objet central d’un film, pour le
financement et après. On peut très difficilement faire valoir la mise en scène pour un projet. Une série
Netflix ne filme rien d’autre que du texte, un scénario qui se déplie. Et c’est ce scénario qui est devenu
roi, sous l’influence évidente de la plateforme.

Le troisième endroit où la logique sérielle infuse, c’est l’idée de vitesse. Gavras a reconnu récemment
avoir écrit, travaillé et mis en scène le plan-séquence d’ouverture d’Athena pour le proposer à une
plateforme, en « sachant » que le public décide dans les cinq premières minutes s’il va continuer à
regarder.

H. A. : Paradoxalement, le scénario d’Athéna n’est pas une machinerie rutilante et pourrait tenir sur un
post-it. On retrouve une forme de confusion générale dans l’autre film récent de Netflix, Blonde, qui dit
tout et son contraire sur la figure de Marylin Monroe.

R. B. : C’est vrai. Blonde s’annonce avec des signaux ultra-féministes mais c’est le film le plus
violemment patriarcal et misogyne que j’ai vu depuis longtemps, avec des scènes pro-life et des vues
subjectives depuis l’utérus de Marylin.

Quant à Athéna, sa réception a été assez bonne à la Mostra de Venise, ce qui illustre, selon moi, la
manière très contestable dont les films Netflix sont montrés. Les films de prestige de la plateforme
bénéficient d’avant-premières dans certains grands festivals, à destination d’une petite élite, puis ils sont
montrés de manière évènementielle dans les grandes villes du monde, toujours à destination d’un public
choisi de happy few. Et ensuite, la masse du public va les voir sur son petit écran.

Quand on pense que le cinéma a été inventé pour les pauvres et les enfants, pour ceux qui ne savent pas
lire, cette manière de projeter les films à deux vitesses est terrifiante.

Est-ce que Netflix a tout de même inventé des choses d’un point de vue cinématographique ?

H. A. : Netflix n’a inventé que dans le champ des séries. Sur le plan des films, les plus grandes signatures
n’ont pas livré là leurs œuvres les plus fortes. Uncut Gems, de Joshua et Ben Safdie, est un des plus
grands films des dernières années, mais c’est presque incidemment qu’il s’est retrouvé sur Netflix.

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Tous leurs films finissent par tourner en rond, ce qu’annonçaient les plans circulaires de Roma,
d’Alfonso Cuarón, qui a été un des premiers grands noms débauchés par Netflix. Et alors que les
premières productions étaient tournées vers l’anticipation, désormais on a le plus souvent affaire à des
films assez rétro.

R. B. : Ils ont tout de même accéléré une forme de représentation des minorités qui aurait fini par se
produire à Hollywood, mais ils l’ont fait avec dix ans d’avance. Pour le reste, je trouve que Netflix est
en train de faire disparaître la figure du producteur dans la fabrique des films, au même titre qu’il est en
train de balayer les distributeurs du circuit de sa diffusion. Et cela se ressent.

Ce n’est pas un hasard si, sur Netflix, les films des grands cinéastes sont parmi les moins bons de leurs
auteurs. C’est parce qu’il n’y a pas d’éditeurs ou alors qu’il y en a trop. À Netflix, les grandes signatures
n’ont pas vraiment de producteurs derrière elles.

Et pour les séries, cela fonctionne comme un comité d’audit, avec une quinzaine d’interlocuteurs, qui
annotent les scénarios, qui apportent chacun leur point de vue, et cette addition de subjectivités amène
nécessairement à une standardisation, au « moyen », qui se diffuse partout. À l’inverse de ces pratiques,
je crois beaucoup au duo entre un producteur et un réalisateur.

Vous craignez donc que Netflix ne dénature l’économie du cinéma au sens large, en plus de
contribuer à vider les salles ?

R. B. : Le problème est que le cinéma se met à courir derrière Netflix, alors qu’il ne saura jamais faire
la même chose. Un des enjeux des états généraux que nous demandons, c’est précisément de dire que
l’industrie audiovisuelle et celle du cinéma ne sont pas identiques, alors qu’il existe une porosité de plus
en plus forte, encouragée par le Centre national du cinéma (CNC). Ce n’est pas dire qu’une industrie est
supérieure à une autre, mais simplement qu’elles sont différentes, qu’elles n’ont pas le même
vocabulaire.

Alors que notre industrie du cinéma est un champion national, qui crée de l’emploi, de la richesse
monétaire et de la richesse symbolique, on cherche de plus en plus à imiter les grands groupes de contenu
audiovisuel, sans avoir leurs moyens ni leur savoir-faire.

H. A. : Il est paradoxal que le CNC, dont le président Dominique Boutonnat est contesté, appelle à
développer les productions pour les plateformes. Si l’idée est de devenir un pays qui propose des studios
moins chers qu’aux Etats-Unis pour produire des séries uniformes, c’est une drôle d’ambition. On a le
sentiment que la seule idée est de faire de la France un prestataire de services pour les grands groupes.

R. B. : L’idée du plan « France 2030 », porté par le CNC, consiste en effet à créer des grands studios
pour l’audiovisuel, au risque de défaire un cinéma national financé par une caisse nationale. Il s’agit
d’un trésor, que le gouvernement veut défaire, de la même manière qu’il s’en prend à la Sécurité sociale
ou à l’assurance-chômage, avec les mêmes accusations de passéisme, et de paresse subventionnée.

C’est notre « déjà-là communiste », comme dirait Bernard Friot, nos trésors nationaux, qui sont
aujourd’hui détricotés par des logiques marchandes. C’est un système que le monde entier nous envie,
et qui a été imité avec succès par des pays comme la Corée du Sud.

Les plateformes alternatives offrent-elles une piste pour éviter l’aliénation et la mort économique
du cinéma ?

R. B. : Puisque les plateformes ambitionnent de remplacer les chaînes de télévision, on peut imaginer
que Netflix prenne la place qu’occupait TF1. La question est de savoir quelles plateformes pourraient
jouer le rôle d’Arte ou de France Télévisions, et plus généralement de la meilleure manière d’intégrer
les plateformes à l’écosystème existant.

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Je pense qu’il ne faut pas toucher à l’exclusivité de la salle dans la diffusion initiale des films, même
s’il faut sans doute réfléchir à nouveaux frais à la chronologie des médias. Ça ne me réjouit pas mais
c’est ainsi. Il y a d’ailleurs parfois des négociations qui vont déjà dans le sens d’une meilleure
cohabitation entre la salle et le streaming. Par exemple, la plateforme MUBI avait négocié deux mois de
salles pour Annette, de Carax, avant de le mettre en ligne.

H. A. : On ne peut pas tout mettre sur le dos des plateformes non plus. C’est une occasion à saisir pour
renouveler le cinéma en tant que lieu. Le gigantisme des multiplexes est mis à l’épreuve, et cela peut
remettre en selle les salles indépendantes à l’intérieur des villes. Mais il ne s’agit plus d’uniquement
projeter des films, sans rien autour : cela doit redevenir un lieu ouvert à la vie locale, aux diverses
communautés, abriter par exemple un café, un restaurant, d’autres espaces culturels. Autrement dit : un
lieu construit autour des écrans mais qui ne s’y résume pas, qui les prolonge autrement, projette et se
projette, au sens le plus large.

R. B. : Je crois aussi à la salle comme lieu de sociabilité, très différente d’une idée en vogue consistant
à proposer des salles « premium » afin de résister à la désertion des salles. Selon cette idée mortifère, il
s’agit d’offrir des beaux espaces, des équipements de grande qualité, mais à un public forcément plus
privilégié, pour des tarifs plus élevés. Le cinéma ne doit jamais devenir un loisir « premium », il doit
rester un lieu populaire, accessible aux pauvres et aux enfants.

Salto, chronique d'une mort annoncée


La plateforme de streaming de TF1, M6 et France Télévisions est proche de la liquidation. Barrières de
l'Autorité de la concurrence, difficultés à conclure des contrats avec les opérateurs télécoms, divergences
de stratégie… Retour sur les principales sources de l'échec du grand projet français anti-Netflix.

« Le meilleur de la création française », le grand projet de « l'équipe de France de l'audiovisuel », l'arme


anti-Netflix… A l'automne 2020, le PAF se félicitait du grand bond en avant que constituait Salto. Pour
la première fois depuis bien longtemps, des groupes concurrents faisaient front ensemble contre les
mastodontes américains du streaming.

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Las ! Le grand projet du PAF a fait long feu : ces derniers jours, les salariés de TF1, M6, France
Télévisions, maisons mères de la plateforme de vidéo à la demande par abonnement, ainsi que ceux de
Salto, ont été prévenus de sa liquidation prévue. A moins d'un acquéreur de dernière minute, Salto n'aura
vécu qu'un peu plus de deux ans. Et, contrairement à TPS, il y a une vingtaine d'années - qui était aussi
un projet de plusieurs acteurs -, vendu à Vivendi, cette fois, il n'y aura pas de chèque à la clé…

Un projet venu trop tard

Le pari était, dès le départ, osé. « C'était une sorte de mission impossible, résume un bon connaisseur.
A la naissance de Salto, plusieurs mauvaises fées étaient penchées sur son berceau ». Problème de timing
d'abord : Salto a vu le jour en octobre 2020, relativement tard, alors que Netflix, Disney+, Amazon
Prime Video s'étaient renforcés avec la crise sanitaire. Avec leurs milliards, ils ont la capacité de faire
des productions originales, y compris locales, d'autant que la réglementation leur impose désormais
d'investir dans la production française. « On a l'impression que les trois groupes se sont dits : 'Il faut
faire quelque chose', mais sans forcément être prêts à mettre les moyens adéquats et à perdre de l'argent
longtemps », estime François Godard, analyste chez Enders. En interne, certains fustigent le fait que les
actionnaires n'ont pas pleinement joué le jeu, ou du moins joué avec prudence… « Au départ, Salto a
été fait pour de mauvaises raisons : Delphine Ernotte portait le projet dans l'optique d'un nouveau
mandat, TF1 voulait prouver qu'il pouvait sortir de la télévision traditionnelle et M6 n'avait aucun intérêt
à se laisser marginaliser », ajoute Alain Le Diberder, expert du cabinet Buzz2Buzz.

Pas de contrats majeurs avec les opérateurs télécoms

Ensuite, l'Autorité de la concurrence a mis plusieurs entraves - des « boulets », diraient les proches du
dossier. Limites des achats couplés de programmes, accès restreint aux contenus des maisons mères,
freins sur la promotion croisée, murailles de Chine etc. Début 2022, Martin Bouygues, dont le groupe
contrôle TF1, reconnaissait : « Salto est mal né, du fait d'obligations administratives extrêmement
lourdes qui lui ont été imposées avant même sa naissance. Elles oblitèrent à mon avis assez grandement
son avenir. »

Autre tare majeure : la difficulté à conclure des accords avec des opérateurs télécoms, essentiel dans les
pratiques de visionnage de la télévision et du streaming. Salto n'est parvenu à conclure que des accords
avec Bouygues et Amazon Channels. Dans un contexte de tensions de négociations entre les chaînes et
les opérateurs, Salto aurait été trop gourmand selon les dires des uns, tandis que d'autres estiment que
les opérateurs télécoms n'ont pas fait d'efforts… « Il ne manquait pas grand-chose pour réussir l'aventure
Salto, les opérateurs télécoms auraient pu tout changer », estime un proche du dossier.

Un grand gâchis

Enfin, les stratégies ont beaucoup évolué en quelques années. D'amis, TF1 et M6 sont redevenus
concurrents, une fois la fusion abandonnée. Tous deux misent désormais sur le streaming financé par la
publicité et ont tout intérêt à garder les exclusivités pour leurs plateformes propriétaires. L'arrivée de
Rodolphe Belmer à la tête de TF1 - après l'échec de la fusion - a sans doute précipité les choses, ce
dernier laissant entendre qu'il voulait sortir. « Or, tout l'intérêt d'un possible repreneur était d'avoir les
programmes », rappelle un bon connaisseur.

Finalement, Salto se termine en grand gâchis, avec une ardoise qui serait autour de 200 millions de
pertes cumulées à partager entre ses trois actionnaires, selon nos informations. Certes, il n'a pas à rougir
de ses quelque 800.000 abonnés payants - pas si mal sans opérateurs télécoms. Mais il est loin des 2,3
millions qu'auraient espérés ses promoteurs initialement pour fin 2023, un niveau qui aurait pu permettre
d'atteindre l'équilibre.

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Les tentatives nationales ont du mal à percer

Une histoire qui trouve des échos ailleurs en Europe. Pour un service de streaming payant (hors niche),
difficile de prospérer sur une base purement nationale, car opérer dans des frontières est en contradiction
avec l'essence même du modèle d'une plateforme : permettre des effets d'échelle en attirant le maximum
d'abonnés et en amortissant les budgets de production.

Hormis quelques-uns comme Viaplay, le groupe scandinave qui a su aussi s'exporter dans plusieurs
marchés européens et tente de percer aux Etats-Unis, avec une stratégie de niche, ou le groupe RTL qui
a vu ses plates-formes de streaming croître en Allemagne et aux Pays-Bas, de nombreuses tentatives
nationales ont eu du mal à percer. D'ailleurs, les rares partenariats entre diffuseurs ont généralement eu
la vie courte, ou très difficile.

Outre-Rhin, ProSiebenSat s'est résolu en 2022 à racheter les parts de l'Américain Discovery dans Joyn,
plateforme lancée en 2019. Même BritBox, la « JV » qui a sans doute inspiré Salto, a la vie dure. Créée
par ITV et la BBC en 2017, cette plateforme compte 2,4 millions d'abonnés à l'international et un peu
plus de 700.000 au Royaume-Uni. Une goutte d'eau par rapport à Netflix ou Disney+. ITV a racheté les
parts de BBC Studios dans la branche britannique de BritBox. Même si leur partenariat perdure, les
clients de l'option premium de la nouvelle plateforme d'ITV - l'équivalent britannique de TF1 - sont
poliment invités à se désabonner de BritBox… « Salto n'est peut-être pas une grande réussite, mais
France Télévisions, TF1, M6 auraient-ils pu ne pas tenter l'aventure de la SVOD ? On leur aurait
reproché », conclut un expert du secteur.

Salto, le Netflix à la française, s'arrête (vraiment)


Clap de fin pour la plateforme de l'audiovisuel français, annoncent France Télévisions, M6 et TF1. Le
mandataire judiciaire chargé de sa liquidation doit préciser « à bref délai le calendrier d'arrêt de la
plateforme et des abonnements ».

Le couperet est tombé mercredi soir. Salto, la plateforme française de programmes vidéo, s'arrête, ont
annoncé les chaînes de télévision France Télévisions, M6 et TF1, qui la détenaient à parts égales. Le
mandataire judiciaire chargé de sa liquidation doit préciser « à bref délai le calendrier d'arrêt de la
plateforme et des abonnements », précise un communiqué commun. La plateforme lancée en octobre
2020 compte près « d'un million d'abonnés », selon ses propriétaires, au prix de 7,99 euros par mois (ou
5,80 euros mensuels pour un abonnement pris sur un an).

« Une communication spécifique sera envoyée très prochainement aux abonnés de Salto pour les
informer des conséquences sur leur abonnement en cours », poursuivent France Télévisions, M6 et TF1.
Après des semaines d'agonie, ce « Netflix à la française » avait indiqué lundi sur sa page d'accueil qu'elle
ne prenait plus de nouveaux abonnés, signe annonciateur de sa disparition imminente.

Cet arrêt n'est donc pas une surprise : l'avenir de la plateforme était compromis depuis des mois,
notamment depuis l'échec, fin septembre, de la fusion entre TF1 et M6, auxquels France Télévisions
devait revendre sa part pour boucler son budget. « Ce projet arrêté, les actionnaires de Salto ont jugé
que les conditions n'étaient pas réunies pour la poursuite de Salto dans son actionnariat actuel »,
soulignent France Télévisions, M6 et TF1.

Licenciements économiques

Ils pointent « la gouvernance complexe et contrainte de cette alliance et (le) refus de la plupart des
opérateurs fournisseurs d'accès à Internet de distribuer la plateforme à l'instar des plateformes
américaines ». « Par ailleurs, les marques d'intérêt reçues de plusieurs acteurs pour la reprise de Salto
n'ont pu aboutir à une concrétisation », assurent-ils.

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« Les groupes France Télévisions, M6 et TF1 se sont engagés à faire leurs meilleurs efforts pour offrir
de nouvelles opportunités aux collaborateurs de Salto » après leur licenciement économique collectif,
poursuivent-ils. Salto employait mi-janvier 42 personnes en CDI et huit en CDD.

En publiant leurs résultats annuels lundi et mardi, M6 et TF1 avaient indiqué que Salto leur avait coûté
en 2022 quelque 46 millions d'euros chacun (en incluant les provisions de charges de liquidation).

Au-delà de l'échec de la fusion TF1-M6, Salto a pâti d'une stratégie confuse et de multiples obstacles,
dans un marché dominé par les géants américains comme Netflix, Disney+ ou Amazon Prime Video.
Par ailleurs, Salto pouvait difficilement rivaliser sur le plan des financements, avec 135 millions d'euros
investis par ses actionnaires. Bien loin des milliards déboursés par Netflix et consorts.

Amazon et Canal+ s'intéresseraient à Salto


Amazon et Canal+ auraient exprimé leur intérêt pour la plate-forme de TF1, M6 et France Télévisions,
qui est en vente. Le repreneur devra négocier avec les chaînes de télévision pour définir des accords sur
les programmes.

La vente de Salto aiguise les appétits. Alors que les trois maisons mères de la plate-forme, TF1, M6 et
France Télévisions, ont fait part de leur souhait de se désengager, plusieurs prétendants se seraient
déclarés intéressés.

Selon nos informations, confirmant celles de la « Lettre A », au moins deux acteurs auraient regardé le
dossier : Amazon et Canal+. Un troisième, Molotov, se serait penché sur Salto, selon une source proche,
mais ce dernier dément formellement indiquant que ni Molotov, ni FuboTV (le groupe qui a acquis
Molotov) « n'ont exprimé aucun intérêt concret ».

Une banque conseil doit être désignée dans les prochains jours et les trois groupes derrière Salto
travaillent à l'ouverture d'une « data room », avec l'objectif d'aller vite. Les actionnaires de Salto
souhaiteraient, en effet, que les prétendants se soient positionnés autour de la mi-décembre. « D'autres
pourraient faire valoir leur intérêt d'ici là », espère un proche du dossier.

Ni Amazon, ni Canal n'ont souhaité faire de commentaires à ce stade. Le géant américain a déjà intégré
Salto dans son bouquet Amazon Channels depuis le printemps 2022 : cela permet à tous les abonnés
Prime Video de s'abonner directement à la plate-forme, avec un accès à une interface spécifique. Cette
inclusion avait donné un coup de boost aux abonnements, alors que la plate-forme n'était jusqu'alors
accessible que via Bouygues et les télévisions connectées (mais pas Orange, ni Free, ni Canal +). Pour
le repreneur, il s'agirait ainsi d'enrichir le catalogue, avec des productions locales.

Quant à Canal+, il complèterait son offre payante, en reprenant la base d'abonnés de Salto. Selon un bon
connaisseur, il aurait fait part de son intérêt mais avant que d'autres ne rentrent dans la course. Il sera
donc intéressant de voir s'il continue. « C'est plus une opportunité pour Canal qu'une nécessité et
jusqu'alors il n'était pas prêt à mettre une grosse somme », relativise un bon connaisseur.
La question des programmes au centre

Quoi qu'il en soit, l'acquéreur pourrait mettre la main sur une base potentielle de plus 800.000 foyers
abonnés - avec l'objectif d'arriver au cap du million en fin d'année - ainsi que la plate-forme
technologique. Quant aux programmes, il s'agira d'une négociation entre le repreneur et les trois
actionnaires derrière Salto, sur ce que chacun est prêt à laisser sur la plate-forme, une fois que les accords
en vigueur seront terminés. Salto propose en exclusivité plusieurs séries et programmes de TF1, M6 et
France Télévisions (des fictions et des feuilletons quotidiens en avant-première etc.).

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Si France Télévisions pourrait accepter de mettre une bonne partie de ses programmes sur Salto, les
groupes privés pourraient avoir, eux, intérêt à garder ceux avec le plus de valeur ajoutée pour leur propre
plate-forme de replay (financée par la publicité) et les récentes versions payantes de 6Play et MyTF1.

De cette négociation sur les programmes mis à disposition et leur durée dépendra le prix et le nombre
d'abonnés. « Les négociations ne s'annoncent pas simples… », dit un bon connaisseur. Quoi qu'il en soit,
les trois actionnaires doivent s'entendre pour que la vente se fasse, ce qui obligera nécessairement à des
concessions.

Certains ont les yeux qui brillent en rappelant que Molotov était entré dans le giron de la société new
yorkaise FuboTV en 2021, pour quelque 160 millions d'euros, alors même qu'elle avait un nombre bien
plus faible d'abonnés payants. « Mais le modèle est différent », rappelle un spécialiste. Salto est
largement déficitaire.

Canal+ fait un « coup » en intégrant Apple TV + dans son


offre
La chaîne cryptée annonce un partenariat historique avec Apple pour intégrer les séries et films
d'AppleTV + dans MyCanal. Les 9,5 millions d'abonnés de Canal+ en France en bénéficieront bientôt…
sans surcoût.

C'est un joli coup pour la chaîne cryptée. Canal+ a annoncé jeudi soir un partenariat « historique » avec
Apple. L'ensemble de ses abonnés bénéficieront à partir du 20 avril, de l'intégralité des contenus de la
plateforme Apple TV +… sans aucun surcoût.

Ces films et séries seront directement accessible via l'application MyCanal. Ils incluront des productions
phares d'Apple TV+ comme la série « Ted Lasso », primée aux Emmy Awards, le film « CODA », Oscar
du meilleur long-métrage l'an passé, ou encore la première production franco-britannique d'Apple, «
Liaison », avec Vincent Cassel et Eva Green.

L'application accueillera aussi au fil de leurs sorties des nouveautés comme la comédie « Ghosted », la
série franco-japonaise « Les Gouttes de Dieu », inspirée d'un manga, ou celle de science-fiction « Silo
». Certaines séries originales d'Apple seront diffusées directement sur la chaîne Canal+, notamment «
The Morning Show », « Foundation » et « Téhéran ».

Accord pluriannuel

Cet accord pluriannuel unique en son genre entre Apple et un distributeur sera valable dans un premier
temps en France et en Suisse. Il sera étendu plus tard à la République Tchèque et à la Slovaquie, où
Canal+ est présent.

Les détails financiers sont confidentiels. AppleTV + ne gagnera pas d'abonnés avec ce partenariat, mais
celui-ci lui permet d'élargir considérablement son audience en entrant d'office dans les 9,5 millions de
foyers abonnés à Canal+ en France, à fin 2022. Jusqu'ici, le service, lancé en novembre 2019, était
uniquement accessible sur abonnement pour 6,99 euros mensuels. Apple ne communique pas sur le
nombre de ses abonnés, mais il reste un petit acteur dans l'Hexagone face à Disney+ ou Netflix, qui lui
compte environ 10 millions d'abonnés.

« Avec ce partenariat historique, nous consolidons à la fois notre métier d'agrégateur, via la distribution
d'Apple TV+, et notre métier d'éditeur, avec la diffusion de séries Apple Original sur notre chaîne
Canal+, pour le plus grand plaisir de nos abonnés », s'est réjoui le président du directoire du groupe,
Maxime Saada, dans un communiqué.

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L'intégration d'AppleTV marque une étape supplémentaire dans la stratégie d'agrégation de la filiale de
Vivendi. Dans son offre Séries, Canal+ propose déjà à ses abonnés l'accès à Disney+, Netflix, Paramount
+ ou OCS, récemment racheté par le groupe.

Pour faire connaître la nouvelle, CANAL+ lancera une large campagne publicitaire d'affichage à partir
de la semaine prochaine.

TF1 prêt au bras de fer pour doper l'audience de MyTF1


Le champion de la télévision gratuite renégocie ses contrats de distribution avec les opérateurs télécoms.
Objectif : permettre à son service MyTF1 de s'inviter sur les écrans d'accueil des téléviseurs pour monter
en puissance dans le streaming gratuit.

La démarche est délicate. Les enjeux de distribution des chaînes ont créé tellement de conflits ces
dernières années que la moindre étincelle suffirait à rallumer des braises mal éteintes… Selon nos
informations, TF1 a récemment pris l'initiative de renégocier avec les opérateurs télécoms les conditions
de commercialisation de ses contenus et les discussions sont tendues, en particulier avec Orange.

Il s'agit d'un passage obligé pour le nouveau PDG de TF1, Rodolphe Belmer. Après l'échec de la fusion
avec M6, son mantra est de monter en puissance dans le streaming gratuit financé par la publicité («
advertised video on demand » ou AVoD). Il lui faut pour cela toucher directement un maximum de
téléspectateurs en se passant si possible des box des opérateurs.

Négociation achevée avec Canal

Même si aucun de ces contrats pluriannuels qui lient la première chaîne gratuite de France et les acteurs
du « triple play » n'arrive à échéance prochainement, des clauses permettent à TF1 de renégocier les
modalités de distribution. « Le marché a beaucoup changé avec l'arrivée de Netflix et Disney dans la
publicité mais aussi la distribution de YouTube sur les box, justifie la chaîne. Dans ce contexte, TF1
essaye d'adapter ses contrats et ses relations dans une logique mutuellement profitable avec les
'telcos'. »

Arrivé chez TF1 en octobre, quand le conflit avec Canal+ battait son plein, le nouveau patron a
rapidement réglé l'affaire avec la filiale de Vivendi. Dans ce « deal », selon nos informations, Canal+
se passe de certains services (MyTF1 Max, avant-premières, etc.) en échange d'un meilleur tarif négocié
pour la reprise des offres de TF1.

Le dossier est aussi refermé avec Free et n'a sans doute même pas été ouvert avec Bouygues Telecom,
société soeur de TF1 au sein du groupe Bouygues. En revanche, les discussions sont tendues avec
Orange. « Les contrats sont en cours, sans aucune échéance fixe de négociation », dit-on chez l'opérateur.
Avec SFR, les pourparlers s'éternisent mais butent davantage sur la technique que sur le principe.

Bataille d'icônes

L'univers de la vidéo à la demande a été bouleversé par le lancement des offres avec publicité de Netflix
et Disney+, et si TF1 veut tirer son épingle du jeu il lui faut forcément faire évoluer les choses. Or, les
contenus de la filiale de Bouygues sont parfois enfouis au sein des arborescences de programmes
proposés dans les box des opérateurs.

Pour nouer une relation plus directe avec les téléspectateurs, TF1 voudrait que son service MyTF1 soit
accessible directement sur les écrans d'accueil des téléviseurs connectés au même titre que des services
comme YouTube ou Netflix. Une possibilité qui, selon nos informations, n'est pas permise dans l'accord

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avec Orange. Une contrepartie concédée il y a quelques années, lorsque TF1 a réussi à obtenir d'être
payé par les opérateurs télécoms pour ses contenus, mais qui bride aujourd'hui la Une.

TF1 en quête de données

Autre enjeu clé derrière la renégociation des contrats : obtenir des box et autres distributeurs davantage
de partage des data des utilisateurs afin de permettre à la régie de TF1 de mieux monétiser la vente
d'espaces publicitaires. D'après certaines sources, une publicité ciblée grâce à ces données se vend trois
à cinq fois plus cher qu'une publicité non qualifiée. Or, 60 % à 70 % des inventaires disponibles sur
MyTF1 sont enrichis en data, mais il faut encore progresser.

TF1 vient notamment de signer un accord avec Retailink (FNAC Darty) afin de croiser les données des
utilisateurs actifs sur MyTF1 et les clients des sites marchands de ce groupe de grande distribution.
L'objectif : vendre aux annonceurs des inventaires qui ciblent de manière très fine plus de 1.000
segments de consommateurs.

Alors que le marché de la publicité télévisée en France stagne depuis plusieurs années au-dessus des 3
milliards d'euros, les chaînes privées (TF1, M6…) veulent surfer sur une croissance prévue à deux
chiffres ces prochaines années sur le marché de l'AVoD. Et la fin des cookies tiers qui impactent les
performances publicitaires de Facebook (Meta) et Google constitue aux yeux des dirigeants de
l'audiovisuel une opportunité de gagner des parts de marché.

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