Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Pour progresser en tant que négociateur, il faut déjà être conscient de certains biais
trompeurs, d'intuitions contre-productives. Tout d'abord, il est faux de croire qu'il n'y a
pas de cercle d'apprentissage en négociation, et que donc, on n'apprend jamais rien.
C'est faux. Adopter le point de vue radicalement inverse.
Considérez toute négociation importante comme une occasion d'apprentissage.
Autrement dit, à la suite d'une négociation, prenez un peu de temps pour analyser votre
performance. Cette analyse ex-post ou ce ret-ex (retour d'expérience) comporte deux
volets.
D'une part, identifiez ce qui a fonctionné, et pourquoi. Cela vous aidera de savoir si vous
avez été bon, vraiment bon, ou simplement si vous avez eu un coup de bol terrible. Vous
pourrez ainsi identifier vos points forts et vous reposer dessus en toute confiance pour
votre prochaine négociation.
D'autre part, identifiez tout aussi lucidement ce qui n'a pas fonctionné, et pourquoi.
Cela vous évitera de simplement rejeter le blâme sur l'autre en disant, " la négociation a
échoué parce que l'autre n'a pas compris à quel point nous sommes excellent ". Et vous
pourrez ainsi peu à peu identifier vos points faibles, ceux que vous avez tout intérêt à
améliorer avant votre prochaine négociation.
Selon l'importance de la négociation, le fait de réfléchir à ces deux questions simples,
qu'est-ce qui a bien marché et pourquoi, qu'est-ce qui n'a pas bien marché et
pourquoi, peut prendre quelques minutes ou plusieurs heures et vous pouvez le faire
seul ou avec des collaborateurs. Pratiquer de manière informelle cet exercice de ret-ex
peut s'avérer excellent pour développer un bon esprit d'équipe et une capacité collective
à aller un cran plus loin dans les négociations. Votre analyse vous aidera à vous
concentrer sur les bonnes questions lors de votre prochaine préparation, et donc
d'obtenir de meilleurs résultats lors de la négociation, que vous analyserez à leur tour,
etc.
Une autre idée fausse mais répandue est notre tendance naturelle à sous-estimer
l'autre partie et à nous faire un peu trop confiance. Mieux vaut adopter le point de vue
inverse, votre interlocuteur a justement été choisi par son organisation parce qu'il ou elle
est capable et compétent. Évitez de tirer des conclusions trop rapides du type " non mais
s'il ne comprend pas, c'est qu'il est stupide ". Non, peut-être que c'est vous qui n'avez
pas été suffisamment clair, explicite.
Autre exemple, " il est nerveux parce qu'il ne sait pas se contrôler ". Non, peut-être que
c'est vous qui ne savez pas vous contrôler, qui avez une tendance à témoigner une
agressivité qui bloque tout.
Une troisième idée reçue tout aussi fausse consiste à croire que la négociation serait
toujours et uniquement une pure compétition. L'objectif serait de battre l'autre. Au
contraire, personne n'aime être battu par son adversaire.
Beaucoup de gens croient que la négociation serait toujours une affaire de concession. Ils
pensent que c'est forcément un jeu à somme nulle : ce que je gagne, l'autre doit le
perdre, et vice versa. Non, la réalité est différente. Et comme nous le verrons plus tard, la
négociation va vous aider à créer des choses ensemble. Je ne suis pas toujours obligé de
prendre à l'autre ce dont j'ai besoin. Je peux le créer avec lui, avec son soutien. Et l'autre
acceptera de m'aider sur ce point parce qu'il sait que je l'aiderai à faire de même sur un
autre point de la négociation par un esprit de réciprocité, et cela change tout. Voilà
pourquoi il faut aussi éviter cet autre écueil. Croire qu'il n'existe qu'une solution donnée
dans une négociation, et évidemment la nôtre.