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Chapitre I- notions fondamentales de droit fiscal


Selon le dictionnaire Larousse le droit constitue « l’ensemble des principes régissant
les rapports des hommes entre eux, et qui servent à établir des règles juridiques ». Le
droit fiscal est une branche du droit.
Selon le Professeur Filiga Michel SAWADOGO « le droit fiscal regroupe l’ensemble
de la législation et, d’une façon plus générale, des règles relatives aux impôts. En tant
que discipline, le droit fiscal étudie comment les différents impôts sont établis et
recouvrés par les pouvoirs publics ».
Par ailleurs, plusieurs branches du droit public comme le droit administratif, le droit
constitutionnel, le droit budgétaire, etc. entretiennent des rapports avec le droit fiscal.
Mais, le droit fiscal ne peut pas ignorer le droit civil, le droit des affaires, le droit des
sociétés commerciales et du Groupent d’intérêt économique (GIE), la comptabilité
commerciale, etc.
Le droit fiscal, selon les commentaires issus de la définition de l’impôt,
incontestablement relève du droit public. En effet, les impôts fournissent des recettes
aux budgets de l’Etat et des collectivités locales (communes et régions). Ces
ressources leur permettent d’intervenir dans la vie économique et sociale. En outre,
les techniques d’établissement et de recouvrement des impôts font recours
notamment à l’utilisation de la force publique (les prérogatives de l’administration
fiscale). Après avoir donné la définition de la fiscalité et sa source, nous aborderons
la définition de l’impôt, son fondement et son rôle.
Section I- définition et source de la fiscalité
1-Définition
Le terme fiscalité, du latin ‘’ficus’’, signifie petite corbeille en osier que les Romains
utilisaient pour recueillir de l’argent. En outre, selon le petit Larousse, il désigne le
système de perception des impôts ; l’ensemble des lois qui s’y rapportent et des
moyens qui s’y conduisent.
La fiscalité peut être subdivisée en deux parties : la fiscalité de porte et la fiscalité
intérieure.
Si la fiscalité de porte s’intéresse aux droits de douane et les taxes perçues au cordon
douanier, la fiscalité intérieure par contre concerne les impôts et taxes recouvrés à
l’intérieur d’un Etat donné et dont la gestion, pour l’essentielle au Burkina Faso, est
confiée à la Direction Générale des Impôts (DGI). La DGI est donc chargée de la

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mise en œuvre de la politique fiscale intérieure du gouvernement. A cet effet, elle se


réfère à des lois notamment le Code général des impôts et l’ensemble des lois de
finances qui le modifient chaque exercice. Ces différentes lois constituent, entre
autres, des sources du droit fiscal.

2-Sources du droit fiscal


Les impôts portent atteinte à la propriété privée et à ce titre, ils relèvent du
domaine de la loi. Le parlement qui est la représentation du peuple a compétence
pour voter la loi. Aussi, au Burkina Faso, aux termes des dispositions de l’article 101
9ème tiret de la constitution Burkina Faso adoptée par référendum le 2 juin 1991 et
modifiée après la relecture du 05 novembre 2015 « La loi fixe les règles concernant :
- l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes
natures… ».
Précisons que le Code Général des Impôts (CGI) actuel constitue la Loi N°058-2017
du 20 décembre 2017 portant Code général des impôts du Burkina Faso. Cette loi a
été régulièrement modifiée par les différentes lois de finances, chaque année depuis
2018.
A côté de la loi, on peut citer les conventions internationales (sources
supranationales), la doctrine administrative (instructions administratives et
circulaires) et la jurisprudence fiscale.

a- Les conventions fiscales


Ce sont des accords d’une force supérieure aux lois fiscales des pays
signataires, passés entre deux (Burkina Faso-France et Burkina Faso-Tunisie) ou
plusieurs Etats (cas de l’UEMOA) pour régler la situation fiscale de leurs
ressortissants qui peuvent faire, du fait de leurs activités et leur zone géographique,
l’objet d’une imposition dans chaque Etat concerné et ce sur la même activité ou le
même revenu.
Ces conventions fiscales ont pour objectif d’éliminer les doubles impositions
sur le revenu. Elles aboutissent le plus souvent :
- à l’imposition dans un Etat et à l’exonération dans l’autre ;
- ou aussi à l’imposition dans l’Etat de la résidence principale ou du centre d’intérêt
économique avec déduction de l’impôt acquitté dans l’autre Etat au titre des activités
qui y sont exonérées.

b- La doctrine administrative
La doctrine administrative est l’ensemble des commentaires que l’administration
fiscale produit en vue de l’application de la loi fiscale, ainsi que les instructions
adressées aux agents chargés de l’assiette, du contrôle et du recouvrement. Cette
doctrine, opposable à l’administration, ne l’est pas aux contribuables qui peuvent

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l’attaquer devant le juge compétent. Ces décisions rendues par le juge en matière
fiscale constituent la jurisprudence fiscale.

c- La jurisprudence fiscale
La jurisprudence fiscale constitue l’ensemble des jugements rendus en matière
fiscale suite aux requêtes introduites par les contribuables contestant l’interprétation
faite par l’administration à propos d’une ou de plusieurs dispositions fiscales.
En effet, le juge est amené à préciser l’interprétation de la loi dans les litiges opposant
les contribuables à l’administration fiscale ou à apporter des précisions sur des
notions que la loi n’a pas défini avec une précision suffisante.

Le droit fiscal relève du domaine du droit public même s’il entretient des rapports
avec de nombreuses matières du droit privé. Les sources du droit fiscal sont
essentiellement la loi, les conventions fiscales, la doctrine administrative et la
jurisprudence fiscale. Ces sources permettent à la DGI de procéder aux émissions,
aux recouvrements et aux contrôles des différents impôts et taxes.

Section II- définition, fondement et rôles de l’impôt


Il est important pour bien comprendre cette partie de définir l’impôt, de donner son
fondement avant de préciser son rôle dans les Etats.

1 Définition de l’impôt
Plusieurs définitions existent. Aussi, selon la définition actuelle proposée par
Mehl Lucien et Beltrame Pierre « L’impôt est une prestation pécuniaire, requise des
personnes physiques ou morales de droit privé, voire de droit public, d’après leurs
facultés contributives, par voie d’autorité, à titre définitif et sans contrepartie
déterminée, en vue de la couverture des charges publiques ou à des fins
d’intervention de la puissance publique ».
Cette définition appelle les commentaires suivants :
- « prestation pécuniaire » signifie la fin des impôts en nature qui a prévalu
avant l’impôt moderne ; ce qui explique que de nos jours les impôts sont acquittés
en argent.
- « personnes physiques ou morales de droit privé, voire de droit public »
ce qui est déterminant dans le critère d’imposition à l’impôt, c’est le but d’intérêt
privé ou lucratif poursuivi par la personne. Son statut n’est pas important. C’est ainsi
que certaines entreprises publiques (les EPIC, SE, les SEM, etc.) comme la

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SONABEL, la SONABHY, l’ONEA, la SOFITEX, etc. sont imposables au même


titre que les entreprises de droit privé.
- « d’après leurs facultés contributives » chaque citoyen doit payer l’impôt
selon le niveau de sa richesse. Ainsi, il doit avoir une corrélation positive entre le
niveau de la richesse du contribuable et le montant de ses impôts.
- « par voie d’autorité », le consentement individuel n’est pas nécessaire. La
force publique peut être utilisée pour le recouvrement des impôts et cela lorsque le
contribuable ne s’acquitte pas spontanément de ses droits dans le délai prévu par la
loi.
- « sans contrepartie déterminée », le paiement de l’impôt ne donne pas lieu
à un avantage direct quelconque. Par contre, il y a des retombées directes pour toute
la communauté si les finances publiques sont bien gérées (bonne gouvernance).
- « en vue de la couverture des charges publiques ou à des fins
d’intervention de la puissance publique », les recettes fiscales servent à effectuer
les dépenses d’intérêt général (défense nationale, sécurité publique, santé, etc.). En
outre, elles sont utilisées pour réglementer la vie économique et sociale. C’est le cas,
lorsque l’Etat accorde des exonérations fiscales afin d’attirer les investisseurs
étrangers. De même, on peut imposer plus un produit donné afin de décourager sa
consommation (tabacs, cigares, cigarettes, alcool, sachets en plastiques, etc.).
En marge de l’impôt, il existe d’autres prélèvements comme la taxe, la redevance et
la taxe parafiscale.

2-Fondement de l’impôt
L’apparition de l’impôt remonte depuis la Haute Antiquité. L’impôt est né avec
l’organisation de la vie en formation étatique.
L’impôt existe également dans les religions monothéistes (Islam, Christianisme, etc.)
pour d’une part couvrir certaines charges communes, voire réaliser des
infrastructures (mosquées, églises, etc.), et d’autre part, aider les pauvres ou les
moins riches. Ces impôts servent à rémunérer ceux qui collectent et gèrent ces
contributions légales.

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Selon Mehl et Beltrame, l’impôt a été successivement considéré comme un « don,


comme un prélèvement opéré d’autorité, comme un échange, un prix, une prime
d’assurance et, enfin comme une obligation résultant du principe social ».
a- L’impôt est un prix et une prime d’assurance
Selon cette conception, l’impôt est à la fois la garantie et le prix payé pour la
protection des personnes et des biens. Ainsi, pour Montesquieu, chaque citoyen
donne une partie de ses biens à l’Etat pour avoir la sécurité. Outre cette conception,
l’impôt obéit à un devoir de solidarité.
b- L’impôt est un devoir social
Tous les citoyens sont solidaires et chacun doit contribuer au financement des
charges communes. En effet, l’article 13 de la Déclaration des Droits de l’Homme et
du Citoyen de 1789 dispose qu’«une contribution est indispensable ; elle doit être
également répartie entre les citoyens en raison de leurs facultés ».
On retrouve cette solidarité agissante dans la conception de l’impôt dans les religions
où l’on estime que l’impôt constitue un droit du pauvre dans la richesse des personnes
nanties à qui Dieu a octroyé cette fortune.
Au total, l’impôt résulte du consentement collectif et de ce fait relève du domaine de
la loi dans un Etat de droit. Une fois la loi votée, il revient au gouvernement, à travers
l’administration fiscale, de veiller à son application. Quels sont les différents rôles
de l’impôt ?
3-Les rôles de l’impôt
On peut assigner à l’impôt un triple rôle. Le rôle financier, le rôle économique et le
rôle social.
a- Le rôle financier de l’impôt
Le rôle financier de l’impôt est mis en exergue par l’importance que représente
l’impôt dans l’établissement du budget de l’Etat et des collectivités locales
(communes et régions). Le budget traduit la politique chiffrée de l’Etat et à cet effet,
il détermine les recettes nécessaires à la couverture de toutes les dépenses notamment
celles de fonctionnement. Ces recettes, pour l’essentiel, sont constituées des produits
des impôts et taxes recouvrées par les régies financières notamment la Direction
générale des impôts et la Direction générale des douanes. Il en résulte que l’impôt
fournit une part très significative des ressources du budget de l’Etat et des
collectivités locales au Burkina Faso.

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a- Le rôle économique de l’impôt


Le rôle de l’impôt initialement neutre a évolué et de nos jours, l’impôt est
utilisé comme un instrument de politique économique.
En effet, avec la crise économique de 1929 qui a montré les limites du libéralisme
intégral et avec surtout les contributions remarquables de J. M. Keynes, les
économistes ont admis un rôle plus important à l’Etat dans la réalisation du
développement et de l’équilibre économique.
Aussi, l’Etat grâce aux finances publiques réalise de grands travaux en période de
chômage pour créer des emplois et relancer l’économie en stimulant la
consommation.
Il en est de même lorsqu’en matière d’investissement, face à la défaillance du secteur
privé dans certains secteurs stratégiques de l’économie, l’Etat se trouve dans
l’obligation de créer des entreprises pour satisfaire la demande (cas de la SONABEL,
de l’ONEA, de la SONABHY, de la LONAB, etc.).
La fiscalité est de plus en plus utilisée pour attirer les investisseurs dans certains
secteurs jugés prioritaires à travers de nombreux avantages fiscaux accordés
notamment grâce au code des investissements et au code minier en particulier.
En plus de son rôle économique, l’impôt remplit un rôle très important qui est le rôle
social.
b- Le rôle social de l’impôt
Le rôle social de l’impôt peut être appréhendé à travers la recherche de la
justice fiscale. Aussi, selon le précis de droit fiscal burkinabé « l’impôt doit être
établi de manière à permettre l’égalité et la justice fiscales, lesquelles contribuent à
la justice sociale ». Il en résulte que tous les citoyens qui ont le même niveau de
richesse aient la même contribution (équité horizontale). Par contre, ceux qui ont des
capacités contributives différentes soient traités différemment (concept d’équité
verticale). Ce volet est pris en compte par la personnalisation de l’impôt grâce à la
prise en compte de la situation de famille et à l’utilisation des taux progressifs par
tranches.
A travers ce rôle social, l’objectif est de corriger les écarts entre les revenus des
citoyens.
En outre, l’impôt doit jouer un rôle de redistribution des revenus. A cet effet, on
prend plus avec ceux qui ont une forte capacité contributive qu’avec ceux qui en ont
moins, voire en ne prenant rien avec ceux qui sont totalement démunis (cas
d’exonération accordée aux indigents en matière de taxe de résidence, l’exonération
de l’IUTS à la tranche de 0 à 30 000 F CFA, etc.).
De même grâce aux investissements sociaux (écoles, universités, centres de santé,
etc.), l’Etat met à la disposition de tous des services à moindre coût.

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Enfin, l’Etat grâce à différentes aides (bourses d’études, aides aux étudiants et aux
personnes frappées par les calamités naturelles, la gratuité des soins aux femmes et
aux enfants de moins de 5 ans, etc.) contribue à cette redistribution des revenus.

Le droit fiscal constitue une branche du droit public qui garde de nombreux liens
avec à la fois les autres droits publics et le droit privé. Aussi, ses sources sont dans
la plupart des pays, la loi qui se retrouve sous forme d’un Code général des impôts
regroupant l’ensemble de la législation fiscale. Ce Code est régulièrement modifié
par la loi de finances votée chaque année, d’où l’instabilité de la loi fiscale. Cette
instabilité rend la maîtrise de cette discipline assez complexe. Il importe donc d’être
en permanence à la recherche de l’actualité fiscale en vue d’être régulièrement
informé pour une meilleure application de cette législation fiscale.

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