Vous êtes sur la page 1sur 30

INTRODUCTION GENERALE

Le droit des biens et l’étude juridique des biens, des biens utiles à l’Homme. Les biens constituent
des richesses donc le droit des bien ne peut pas se comprendre sans faire l’étude des rapports entre
l’homme et les biens et le rapport fondé sur les droits réels. C’est un rapport qui met en jeux un
propriétaire d’un côté et des bénéficiaires qui disposeront de l’utilité de la chose, il a donc un
démembrement de la propriété juridique du bien et les utilités matérielles de ce bien.

I. Présentation de la matière

Le droit des biens est une matière qui trouve son origine textuelle dans les lois tables, la table VI est
consacrée au droit des biens. Le droit des biens est théorisé au 11 ème siècle par Gallus qui est l’auteur
des instituts où il y a une théorie du droit des biens. Les instituts se divisent en 4 livres. Ces instituts
seront après compilés par Justinien qui jugera utile de compiler les textes pendant les invasions
barbares. Depuis le droit romain, le droit des biens n’a pas beaucoup changé d’un pdv structurel et
celui qu’on retrouve dans le Cciv d’aujourd’hui est un droit des biens proche de celui des romains. On
reprend dans le CC l’ordre romain du droit civil qui est les personnes, les biens, les obligations. Le
droit des biens si on le situe dans cette subdivision on peut voir que le droit des biens est un droit
général, il a une place précise dans le CC. Le DB c’est un droit qui transcende cette division, il va au-
delà de la place qui lui est réservé. La propriété est présente dans le droit des obligations, le droit des
biens est présent dans le droit des personnes qui peut concerner les biens (ex : la notion même de
personne se définit par la personnalité juridique qui est l’aptitude à acquérir des biens). Ex de DB
dans d’autre matière du droit civil  : arrêt sur le non commercial, la question posée est qu’un associé
qui constitue une société a son nom avec d’autre gens et qui s’en sépare peu- il obligé les associés a
utilisé le nom de cette personne. La CC répond par la positive, l’associé qui part peut interdire aux
associés de garder son nom sauf si l’associé renonce à ses droit s de propriétés incorporels sur son
patronyme. Cela transcende le droit des affaires en faisant référence a droit des biens.

II. Tendance actuelle du droit des biens

Le DB est fondamentalement inchangé depuis le droit Romain, on garde la même structure, division.
Il faut remarquer que cette matière a été bouleversé par de nouvelles tendances.

La personnification des choses  :


Pour le droit des biens, la personnification des choses est un bien de personnification. Il faut faire la
distinction entre les biens et les choses. Cette qualification est essentielle car elle délimité un champ
de protection et un régime adapté. Tout ce qui n’est pas une personne est une chose. Il existe des
catégories dont la qualification n’est plus si simple, des qualifications aux frontières des choses et des
personnes. Il a les problématiques par rapport aux fœtus et aux cadavres. Il y a en matière de
qualification 2 tendances extrêmes soit tout ramener aux biens soit tout ramener à la personne.
Notre époque est en pleine expansion de la catégorie de la personne, on ramène les choses dans la
catégorie des personnes c’est la personnification des choses c'est-à-dire qu’on traite juridiquement
des biens par le régime de la personne. Cette expression a été systématisé par Juditte Rossvel. Ex  : le
traitement réservé à l’animal. En la matière il y a eu une réforme avec la loi du 16 février 2015. Avant
2015, l’animal était spécifiquement qualifié de meuble par le CC art anc. 516 CC. Désormais, l’article
516 du CC «  sont meuble par leur nature les biens qui peuvent se transporter d’un lieu à un autre  ».
Est désormais incéré un autre article 515-14 CC qui dispose «  Les animaux sont des êtres vivants
doués de sensibilité [..] ils sont soumis au régime des biens  ».
L’animal est un bien malgré la suppression de la mention à l’article 516. L’animal est un bien qui peut
être approprié. L’animal c’est un bien spécial, personnifié. Cette qualification d’être sensible oriente
son régime vers le régime d’être sensible. Le législateur a voulu protéger d’avantage les animaux.
1
Certains auteurs ont voulu aller plus loin J-P Marguenot, il souhaiterait donner la personnalité
juridique pour les animaux, les animaux n’aurait plus la qualification « d’être sensible ». D’un point
de vue théorique il est clair que si on se met à personnifier les animaux on remet en considération la
subma divisio qui fonde le droit civil. D’un point de vue de la logique juridique il faut comprendre les
influences que peuvent avoir cette décision cela poserait un problème pour les personnes dans un
abattoir, ceux qui vendent de la viande, les consommateurs, certaines traditions culinaires, certaines
traditions comme la corrida. Ces réflexions existent aussi pour les nouvelles technologies,
notamment le robot qui devrait avoir la personnalité juridique. En Inde et en nouvelle Zélande des
montagnes ont été reconnu comme des entités vivantes avec la personnalité juridique.

L’essor des biens communs :


Cette grande tendance elle nait grâce du recul du dogme de la propriété privée. La PP elle est conçue
comme attaché a une seule personne et comme étant souveraine et absolue. C’est la vision classique
que l’on a mais certains auteurs tendent a la remettre en cause. Ils disent que cette idée est fausse,
de façon historique mais aussi dans le sens ou on devrait remplacer cette idée par une autre. La
propriété dans cette vision-là, elle est très contestée par une doctrine qui a d’abord été active au RU.
Elle milite pour donner a certains biens, un usage commun. On est face à la notion des communs/
biens commun. Cette doctrine milite pour la mise en place de bien commun c'est-à-dire de bien dont
l’appropriation et l’usage se ferait par un groupe ou une collectivité. Cette doctrine est actuellement
très vive dans le domaine environnemental et numérique. Le domaine environnemental pour
protéger des ressources dites essentielles. Le domaine numérique pour les informations et les idées,
même idée qu’il faut lutter contre l’attribution a une personne des informations. Elle milite pour la
participation commune a ces différentes informations/ idées ex  : wikipédia. Attention, ces communs
ce sont des propositions doctrinales qui n’a pas encore de résultat en droit positif car aucune
catégorie juridique ne correspond a cette notion de bien commun.

La relativisation du droit de propriété :


Le droit de P est un droit classiquement définit comme un droit absolu, inviolable. On renvoi a une
vision de la propriété conçut comme un droit subjectif et fondamental (art 2/ 17 DDHC). C’est un
droit qui est un droit conçu au-dessus des autres parce qu’il confère à son propriétaire une
exclusivité sur son bien. C’est la vision classique, maintenant 2 nouvelles tendances diminue le DP
comme droit absolu. Cette tendance c’est le contrôle de proportionnalité de la CC. Ce contrôle
pourrait remettre en cause l’absolutisme du droit de propriété. Le contrôle de proportionnalité est la
possibilité pour un juge d’écarter la loi quand il considère que les effets de la loi est disproportionné
au regard de tel ou tel droit invoqué par l’individu. Ce contrôle est récent il date d’un arrêt de la
première chambre civil 1 chambre civil 2013. A partir de cette décision le contrôle de
proportionnalité est lancé et le juge peut donc écarter la loi. Il y a les arguments des techniciens du
droit qui disent que ce contrôle est juste un contrôle de conventionalité de la loi. Certains invoquent
que ces droits et normes fondamentales dont des normes floues qui doivent être appréciées par le
juge. Le droit porte toujours atteinte au droit et liberté car le droit est un compromis qui restreint les
droits et liberté. Donc, donner la possibilité a un juge de mettre le droit de coté au nom d’un droit ou
liberté fondamentale est une remise en cause de la démocratie.
Appliqué au droit des biens se contrôle de proportionnalité pourrait aboutir à remettre en cause
l’absolutisme du droit de propriété quand l’application de ce droit irait à l’encontre d’une liberté ou
d’un droit fondamental
Ex  : des squatteurs sur un terrain, le titulaire du droit de propriété peut leur demander de partir avec
ce contrôle les squatteurs pourraient invoquer les droits de l’homme pour écarter le droit de
propriété.
Pour l’instant, en droit de propriété jamais la cour n’a donné raison à quelqu’un qui invoquerait la
violation du droit de propriété, elle fait toujours primer le droit de propriété. Certains arrêts laissent

2
penser que la cour pourrait considérer que le droit de propriété pourrait être restreint dans le cas de
violation de droit et liberté.
THEME 1. LA NOTION DE BIEN
Chapitre 1  : Critères nécessaires à la qualification de bien

Le Cciv ne définit pas la notion de bien. C’est la doctrine qui est venu qualifier. 2 critères :
- Son utilité pour les personnes
- Son aptitude à être approprier par les personnes

Section 1. L’utilité.

Dans un 1er sens, le bien désigne les choses qui appartiennent à l’usage de l’Homme et qui lui
permettent de satisfaire à ses besoins en les utilisant et en les échangeant. L’utilité est la raison 1 ere
de l’appropriation du bien. Le droit des biens est un droit des richesses, et l’utilité est liée à la notion
de valeur.
Le bien est utile parce qu’il a une valeur, tant d’un point de vue subjectif qu’objectif. La notion de
valeur est renvoyée à Aristote qui avait recensé la valeur d’usage et la valeur d’échange. La valeur
d’usage désigne l’usage propre du bien par celui qui en dispose. La valeur d’échange désigne la
capacité de la chose à servir d’instrument de la chose, c’est-à-dire tout ce que peut retirer un
propriétaire de son bien, par ex, ce qu’on peut retirer d’une vente.
Un appartement a une valeur d’usage (y habiter) et une valeur d’échange (le vendre). L’utilité a une
définition vague, donc il est difficile d’en dessiner les contours. Cela permet aussi à la notion d’être
évolutive et de s’adapter à la société. Par exemple, les immeubles étaient hier très valorisés pour leur
usage (patrimoine familiale), elle est la richesse majeure sous l’époque féodale (la Terre est la
richesse essentielle). Les meubles sont considérés comme des choses de moindre intérêt car ils
peuvent changer très souvent de propriétaires. Res mobilis, res vilis : chose mobilière, chose vile
(donc dépourvu de valeur). Mais aujourd’hui, les meubles sont valorisés pour leur valeur d’échange.
Dans une société marchande comme la nôtre, la valeur d’échange a supplanté la valeur d’usage, en
plaçant les meubles sur le devant de la scène juridique.

Section 2. L’appropriabilité.

L’appropriabilité signifie que tout bien est susceptible d’appropriation, et faire l’objet d’un droit de
propriété. Une chose, qui n’est pas susceptible d’appropriation n’est pas un bien aux yeux du droit.
On peut donc avec la notion d’appropriation définir les contours de distinction entre bien et chose.
Les choses sans maître et les choses communes sont celles qui ne sont pas susceptibles de faire
l’objet d’une propriété.

I. Les choses sans maitre

Il y a 2 raisons au fait qu’une chose n’ait pas de maître : soit elle n’en a jamais eu, soit elle n’en a plus.

a. Les choses qui n’ont jamais eu de maître

Ici, on classe les res nullius, dans lesquels on trouve les animaux sauvages (gibiers, crustacés), même
s’ils peuvent être appropriés par des chasseurs par le mécanisme de l’occupation.
b. Les choses qui n’ont plus de maître

3
Ici, ce sont les res derelictae, c’est-à-dire les choses abandonnées. Elles avaient un propriétaire et ont
perdu la qualité de bien par abandon de leur propriétaire. Elles peuvent en retrouver un toujours par
le biais du mécanisme de l’occupation. Ces choses ne s’appliquent pas à tous les biens abandonnés et
notamment ceux qui ont perdu de leur valeur une fois consommés (par ex : les détritus).

c. Les choses qui ne sont pas susceptibles de retrouver un propriétaire, même


abandonnées

Par exemple, les immeubles abandonnés restent approprier soit par la commune soit par l’État.
Même principe pour les successions vacantes ou renoncées qui seront appropriées par l’État.

II. Les choses communes

On les appelle les res communes. Elles sont visées art 714 Cciv : il est des choses qui n’appartiennent
à personne et dont l’usage est commun à tous. Contrairement aux biens communs qui sont
appropriés par tous, les res communes n’appartiennent à personne, mais leur usage est à tous.
Elles peuvent être définies comme des choses utiles à l’ensemble de tous, mais sans propriétaire : la
lumière, l’air, l’eau de pluie, etc… leur protection est prévue art 714 al 2 Cciv, et doivent passer par
des lois de police pour jouir de ses fruits. S’il est impossible d’approprier l’entièreté de la res
communes, il est néanmoins possible de s’en approprier une portion. Par ex, l’eau de pluie peut être
appropriée par un agriculteur. Cette catégorie des res communes tend à se réduire
considérablement. De plus en plus, leur usage devient règlementé et cela éloigne les utilisateurs de
la chose. Au contraire du but de l’art 714 Cciv, les lois de police ne sont pas cohérentes avec l’esprit
de l’art. Par ex, la loi du 30 déc 2006 fait de l’eau une composante du patrimoine commun de la
nation (art L210-1 Code de l’environnement).

Chapitre 2. Les critères indifférents à la qualification de biens.

Par critères indifférents, on entend ceux qui n’inclut pas sur la qualification de bien : pas forcément
un bien matériel, qui circule, et qui a une valeur économique

Section 1. L’immatériel/l’incorporel

Les choses incorporelles ne peuvent pas être saisies et ne peuvent être saisies que par l’esprit. Par
ex : le fonds de commerce, les droits sociaux, un savoir-faire, le bitcoin, etc.. ; on sait depuis le droit
romain que l’immatériel ne fait pas obstacle à la qualification de chose.
Une chose immatérielle peut-elle être un bien et faire l’objet d’une appropriation ? si oui, ce sont des
biens. Les concepts fondamentaux du droit des biens ont été forgés par référence au monde des
choses sensibles. Les auteurs classiques (médiévaux principalement) ont forgé une vision de la
propriété individuelle tellement haute que dans leur esprit la propriété s’incorporait avec son objet.
Ceci avait pour effet de séparer la propriété des choses incorporelles, et on évinçait l’étude des
choses incorporelles du droit des biens. La grande distinction réalisée par Gaius était celle entre les
choses corporelles et incorporelles, ce qui lui a permis de distinguer les droits et leur objet.
Les auteurs s’appuyaient sur cette distinction pour soutenir que le droit de propriété ne peut porter
que sur l’objet et non sur les droits. S’il y a propriété, elle ne porte que sur ce qui est matérielle.
Encore aujourd’hui, cette problématique fait débat : peut-on être propriétaire d’une créance ? d’une
hypothèque ?
Selon les auteurs qui refusent de reconnaitre aux droits personnels ou réels la qualité de bien, ils
soutiennent que le raisonnement qui permet de parvenir à cette idée d’appropriation des droits
serait tronqués. La propriété étant un droit, on ne peut considérer que le propriétaire a un droit sur

4
un droit. Le droit est un lien et une personne et une chose ou une autre personne, donc admettre la
propriété sur un droit revient à admettre un droit sur un lien.

Le droit positif tend plutôt à reconnaitre la qualité de bien aux choses incorporelles, qui a été
reconnu d’ailleurs dans une décision du CC°, 20 janvier 2011, relative au droit de propriété des
créanciers. Plus largement, la majorité des auteurs aujourd’hui se veulent pragmatiques et avancent
que la catégorie des biens s’est considérablement élargie pour introduire l’intégralité des choses
corporelles. Une chose incorporelle peut faire l’objet d’un droit car diverses lois sont venues
introduire les choses incorporelles comme des biens.
Les productions de l’esprit sont considérées comme des biens, les fonds d’exploitation sont des
biens, les biens intellectuels aussi, etc…

Parmi les biens incorporels, figurent les œuvres littéraires et artistiques, les marques, les bases de
données, les logiciels, etc.

La JP elle-même témoigne de cette extension de la notion de bien aux choses incorporelles. Pour la
CEDH, il faut protéger toute personne physique au respect de ses biens (art 1 er du protocole
additionnel de la CESDH). Comme application de cet art, la CEDH intègre à cette définition les choses
incorporelles, donc pour elle, les choses incorporelles sont des biens (CEDH, 14 février 2006, Le
Carpentier et autres c./ France). Dans cette définition, la CEDH intègre par la même occasion les
créances.

Ainsi, le caractère corporel ou non d’une chose ne fait pas obstacle à sa qualification en tant que
bien.

Section 2. La restriction à la circulation juridique d’un bien.

La circulation juridique peut se définir de côté du sujet : le fait de pouvoir disposer de tout acte
juridique à titre onéreux ou gratuit sur son bien (vente, ou donation). La circulation du côté de l’objet
est le fait de circuler d’un patrimoine à un autre par la technique du transfert de propriété. La
circulation juridique du bien répond au principe de liberté totale. L’art 537 al 1 er Cciv dispose que les
particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent. La circulation juridique peut
parfois être limitée. On dira que les biens sont soit hors du commerce, soit indisponible, soit
inaliénable. Ces 3 notions sont voisines et aboutissent toutes à la restriction de circulation d’un bien.

L’indisponibilité est la notion la plus large et englobe les 2 autres. Elle désigne l’impossibilité pour un
propriétaire de disposer de son bien, et il ne pourra exercer sur sa chose aucun acte juridique ni
même utiliser sa chose. Il est rare que l’indisponibilité soit totale, elle est le + souvent partielle ou
graduelle. Par exemple, les choses dangereuses sont des choses dont la circulation est interdite,
comme les substances vénéneuses. Le droit interdit l’importation, la production, la consommation
etc., des substances vénéneuses. Les biens sacrés (les sépultures) sont aussi des choses indisponibles.
Ces choses ne cessent pas d’être des biens pour autant. Ainsi, la restriction de la circulation juridique
d’un bien va définir son régime juridique mais ne modifie pas sa qualification de bien.

Section 3. L’absence de valeur économique.

La valeur conduit à reconnaitre l’utilité d’un bien, mais elle n’est pas nécessairement économique.
Par exemple, une chose peut avoir une valeur sentimentale. Il existe même des biens à valeur vénale
négative, comme le veut une théorie proposée dans une revue juridique : il existe des biens qui
appauvrissent leur propriétaire comme par ex, un immeuble pollué dont la décontamination est plus
chère que la valeur de l’immeuble même, ou encore les choses en ruine.
5
En conclusion, il faut constater que l’histoire de la notion de bien est celle de son élargissement. A
l’origine cantonnée à la notion de bien corporel, elle a fini par s’élargir aux biens incorporels malgré
les débats qui peuvent encore subsister entre les auteurs.
L’article 520 du projet de réforme du droit des biens dispose sur cette question que « sont des biens,
les choses corporelles ou incorporelles, faisant l’objet d’une appropriation, ainsi que les droits,
définis aux articles précédents ».
(Rattraper cours Moodle) thème 1 : la notion de bien ; thème 2 : la classification des biens

THEME 2. LA CLASSIFICATION DES BIENS


Le droit des biens est un droit très systématisé. Matière qui repose sur des distinctions, sous
distinctions… toutes ses distinctions renvoient à un régime qu’il faut appliquer et ordonner. Cette
classification a pour but de qualifier les biens. Qualifier un bien va revenir à placer ce bien dans une
catégorie juridique pré établie. Ce travail de classification renvoie à des distinctions principales. Elles
fournissent un point de départ à la classification. Il y a des distinctions aussi secondaires qui viennent
affiner la classification du bien.

Chapitre 1. Les distinctions principales.

On parle de distinctions principales car elles sont le « point de départ » de la classification du bien. Il
s’agir donc de la distinction entre les meubles et les immeubles (art 516 Cciv). Cet article pose la
summa divisio et fait de cette distinction, une distinction totale. En droit romain, la distinction
fondamentale du droit des biens étaient celles entre les biens corporels et incorporels.

Section 1. Biens meubles et immeubles.

I. Présentation de la distinction.

Cette distinction juridique apparait à la fois évidente et insolite. Évidente car elle repose sur un
critère physique, intuitif et s’impose facilement à l’esprit de tous : meuble peut se déplacer,
l’immeuble est fixe. Insolite pour le juriste car une donnée physique n’est pas nécessairement qui
doit l’emporter pour le juriste. Le mouvement de personnification des choses s’éloigne de la réalité
du monde.
On retient cette distinction car elle tient dans le fait que la hiérarchie entre les biens et entre les
choses a longtemps été opérée en fonction de la valeur des choses.

Juridiquement, il y a de multiples différences de régimes entre les meubles et les immeubles :

- La publicité : la fonction de la publicité relative aux biens est de porter à la connaissance des
tiers l’identité le titulaire d’un droit réel sur un bien. L’immeuble, comme il est fixe, est
facilement localisable, donc on identifie aisément son propriétaire. En matière mobilière, les
meubles sont destinés à circuler, ils sont mobiles, donc la publicité foncière n’a aucun effet et
n’est pas apte à saisir le meuble. La règle de publicité en matière mobilière est donc celle de
l’article 2276 Cciv : « En fait de meuble, la possession vaut titre ». C’est donc la possession
qui identifie le propriétaire.

- La possession : les effets ne sont pas subordonnés aux mêmes exigences en matière
mobilière ou immobilière. Le fait de posséder peut mener à une prescription acquisitive. La
6
possession peut amener à la propriété au bout d’un certain temps. Mais en matière
mobilière, art 2276 Cciv, on est propriétaire dès lors qu’on a la possession. En matière
immobilière, la prescription doit s’inscrire dans le temps, il faut posséder pendant 10 à 30
ans.

- Les suretés : celle qui se rapporte à un immeuble s’appuie sur la propriété et elle joue sans
que le propriétaire soit dépossédé de son bien. Par exemple, l’hypothèque ne se dessaisit pas
de son bien. En matière mobilière, le principe des suretés repose forcément sur la
dépossession. Par exemple, le gage.

La division des meubles et immeubles est générale en ce qu’elle s’applique à tous les biens parce
qu’aucune qualification alternative est possible. Entre les parties, les critères de distinction posés par
la loi sont supplétifs de volonté. La qualification retenue sera la qualification juridiquement valable
entre les parties. Elles peuvent donc donner une qualification à leur bien qui ne correspond pas à la
réalité concrète (Com, 2 mars 1999). Il y a une exception car la JP considère qu’à l’égard des tiers
seule importe la situation physique du bien (Civ, 3 ème, 26 juin 1991)

II. Le contenu de la distinction

a. Les immeubles

Art 517 Cciv  : «  Les biens sont immeubles, ou par leur nature, ou par leur destination, ou par l'objet
auquel ils s'appliquent.  »

1. Les immeubles par nature

Cette catégorie se définit autour de la terre, du terrain, du fonds. L’article 518 cciv disposent que les
fonds de terre et les bâtiments sont immeuble par leur nature. L’immeuble par nature c’est la terre
et tout ce qui y est attaché. L’attache matérielle au sol suppose que si cette attache est rompue, alors
la nature du bien change. Ainsi, l’art 520 al 1 er prévoit que « les récoltes pendantes non encore
recueillies sont immeuble. Dès lors que les grains sont coupés et les fruits détachés, quoi que non
enlevé, ils sont meubles ». C’est un très vieil article. L’article 521 Cciv prévoit que s’agissant des
coupes de bois, celle-ci ne deviennent meuble qu’au fur et à mesure que les arbres sont abattus.

En sens inverse, si l’attache au sol n’est pas rompue mais créée, la réciproque est vraie : le meuble
devient un immeuble. L’art 522 cciv confère aux animaux que le propriétaire du fonds va livrer au
fermier pour la culture du sol la qualification d’immeuble. Il faut que les animaux soient attachés au
fonds.

Du côté de la JP, le juge va considérer comme immeuble par nature, tous les éléments dont le
démontage ne peut s’opérer sans détérioration de l’ensemble. Généralement, le critère appliqué par
les juges, c’est le critère du niveau de détérioration du fonds lui-même. Ce critère fait naitre de
nombreux débats relatifs à la qualification de nombreux bien : un mobil home, un poteau électrique,
etc… ; (Civ, 3ème, 23 janvier 2002)
La position générale de la JP est celle qui veut que si l’encrage est le seul fait de l’apesanteur, alors la
JP y voit des meubles. Si l’encrage procède d’une incorporation naturelle ou humaine, alors cela est
un immeuble par nature. Pour les biens incorporés à la terre, alors la JP considère ces biens comme
des immeubles (art 523 Cciv concernant les tuyaux d’eaux).
La 1ère chambre civile de la Cour de cassation a eu l’occasion de juger que des boiseries incorporer à
un immeuble comme des immeubles par nature en raison de leur incorporation prévue dès l’origine
à un immeuble bâti. Cela forme un tout indivisible, donc un immeuble par nature.
7
Lorsque le détachement se produit, alors le bien immeuble redevient un meuble (Plen, 15 avril 1988).
2. Les immeubles par destination

Les immeubles par destination sont des biens qui sont physiquement des meubles mais que le droit
considère comme des immeubles parce qu’ils sont l’accessoire d’un fonds et qu’il est opportun de
maintenir ce lien entre le fonds et l’accessoire. C’est un passage d’une qualification de meuble à
immeuble qu’on appelle l’immobilisation par destination. Cela se définit par l’union de 2 biens de
natures différentes dont la nature de l’un va rétroagir sur l’autre. Ce jeu a un intérêt principal qui
permet de maintenir une unité entre un principal et les meubles attachés à ce fonds. Un tel souci de
maintenir l’unité d’un ensemble apparait dans l’article 524 Cciv qui dresse les biens qu’un
propriétaire d’un fonds a placé pour les services de l’exploitation de ce fonds : animaux attachés à la
culture….

L’immobilisation par destination demande la réunion de plusieurs critères cumulatifs :


- Il faut un bien meuble par nature placé sur un immeuble.
- L’immeuble et le meuble doivent appartenir au même propriétaire : unicité du propriétaire.
- Il faut un lien entre le meuble et l’immeuble : le meuble doit servir à l’immeuble. Ce lien doit
être si nécessaire que l’on ne peut pas séparer les biens. Il s’agit de qualifier ce lien qui peut
être de plusieurs natures.

Le 1er lien de destination est le lien d’affection. Ce 1 er lien est déduit de l’article 524 Cciv, il faut que le
meuble soit affecté au service de l’immeuble et indispensable à son exploitation. On appelle ces
immeubles des « immeubles par destination ».

Le 2ème lien est le lien d’attache à perpétuelle demeure. On parle ici de destination matérielle. Ce lien
est déduit de l’article 524 in fine Cciv, ce sont des immeubles par destination mais ici les meubles
doivent être fixés matériellement aux immeubles. On appelle cette fixation l’attache à perpétuelle
demeure. L’article 524 Cciv parle de scellé en plâtre, à chaud ou à ciment. Cela concerne les biens qui
ne peuvent être détachés ou fracturés sans détériorer le fonds, cela inclus une intégration pérenne a
l’immeuble mais dans cette hypothèse, il n’y a pas de dissociation entre le meuble et l’immeuble.

L’encrage n’est pas le seul critère pour qualifier un immeuble par perpétuelle demeure, l’article 525
Cciv dit que les statuts sont immeubles quand placés dans niche exprès alors qu’elle puisse être
enlevé sans fracture ou détérioration. Cette attache suppose 2 conditions :
- L’immeuble doit recevoir en son sein le meuble et de façon pérenne
- La seconde condition, est que le meuble ne doit jamais perdre de son individualité. Quand
bien même ce meuble serait fixé à l’immeuble il ne doit pas se confondre avec lui. Article 525
alinéa 3 : fait référence aux tableaux et ornements cela fait partis de cette catégorie quand la
volonté du propriétaire est de les attachés au fonds mais ils peuvent être enlevé. Il s’agit de
distinction fine et difficile en définitive la question sera une appréciation souveraine.

Cessation immobilisation :
Il y a une requalification du bien qui redevient meuble, la seule volonté du propriétaire ne peut faire
perdre la qualification du bien.

L’ensemble ornemental :
Cette dernière catégorie est très controversée parce qu’elle ne repose pas sur la loi mais sur la JP.
Dans cette conception, la JP a eu l’occasion de dire qu’un meuble servant à la déco d’un immeuble ne
pourrait être qualifié d’immeuble. La JP a déduit cette qualification de l’article 524 Cciv. elle
considère que l’intention de propriétaire d’attacher un meuble à l’immeuble est si forte que cela
8
entre le changement de la nature du meuble. On remarque d’une part que c’est une qualification
casuistique, les législateurs n’avaient pas envisagé cette possibilité. On ne trouve pas de critère pour
affiner cette qualification. La cour d’appel de Poitiers a eu l’occasion de refuser cette qualification et
ce lien ornemental pour des vases posés sur des socles même s’ils formaient un tout ornemental.

3. Les immeubles par leur objet

Article 526 Cciv : «  Sont immeubles, par l'objet auquel ils s'appliquent : L'usufruit des choses
immobilières ; Les servitudes ou services fonciers ; Les actions qui tendent à revendiquer un
immeuble »

L’usufruit et les servitudes ce sont des éléments attachés a la propriété. L’usufruit c’est un
démembrement de propriété l’un est titulaire de la propriété l’autre de l’usage de la propriété. Le
lien avec la propriété avec la chose est très ténu. Ces notions épousent la nature juridique du bien
qui en fait la propriété.

La servitude : elle épouse la qualification immobilière car elles ne peuvent se rapporter qu’a des
immeubles dont elles sont conçues comme des droits réels immobiliers.

Usufruit : lui peut être mobilier ou immobilier cela dépend du bien auquel il est attaché. Il
correspondra à la nature du bien duquel il dépend.

Action en revendication : action pour se voir reconnaitre comme propriétaire d’une chose. Soit
l’action en revendication concerne une chose mobilière et l’action en revendication sera mobilière et
inversement. La nature de l’action dépendra de la nature du bien qu’elle concerne. L’immeuble par
leur objet car la nature dépend du bien en jeu.

b. Les meubles

Parmi les meubles, on peut distinguer 3 catégories : les meubles par nature, les meubles par
détermination de la loi et les meubles par anticipation.

Les meubles par nature :


Il s’agit de tout ce qui se déplace ou qui peut être déplacé sans changement matériel d’un fond. Les
meubles sont une qualification très hétérogène art 528 anc. CC : sont meuble par leur nature les
animaux et corps qui peuvent se mouvoir par eux même qu’on les déplace ou qu’ils puissent se
mouvoir.
Les meubles par détermination de la loi : l’article 529 CC donne une liste des meubles concernés, en
réalité cette qualification s’applique a tous les meubles qui sont eux définit par la loi. C’est une
catégorie générique qui regroupe les autres : droit personnel portant sur un meuble, les droits
sociaux ce sont des droits incorporels sur lesquels les associés vont agir pour agir sur la société ex : le
droit de vote.

Les meubles par anticipation  : 


C’est une création prétorienne, c’est la JP qui a créé cette catégorie. La mobilisation par anticipation
concerne des biens qui sont a priori des immeubles mais qui vont être soumis par anticipation au
meuble car ils ont vocations à être déplacés ex : deux parties qui vont vendre de la raison sur pied,
quand la raison est sur pied c’est un immeuble mais une fois récolté le raisin sera un meuble et c’est
ce qu’ils vont vendre. Dans le contrat de vente on vend des meubles par anticipation.
C’est une qualification par prétérition, c’est la volonté des parties qui va changer la qualification des
biens. Même si la réalité physique ne répond pas a la qualification on va quand même pouvoir y
9
modifier. La JP a élaboré cette qualification pour faciliter la cession des biens pour qui puisse être
directement associé à la nature qu’ils auront. Il y a 2 conditions pour répondre à cette condition : il
faut avoir l’intention des parties de mobiliser les meubles et il faut que la mobilisation soit en voie de
réalisation certaines et à court terme.

Cette distinction meuble/ immeuble a montré sont insuffisance car cette distinction doit englober
une autre distinction qui est celle de corporelle/ incorporelle qui a pris plus de place. La qualification
des biens qui est devenu plus importante c’est les bien corporelle. Cette distinction est pour certain
en désuétude et il faudrait la remplacer par la distinction entre le corporel et l’incorporel.

Section 2. La distinction entre bien corporel et incorporel

Sous le droit romain, cette distinction était essentielle. Au Moyen-Âge, ils ont réduit cette distinction
en réduisant les biens aux choses corporels. Elle tend à revenir avec le développement des droits
incorporels.

I. Les biens corporels.

Les biens corporels sont tous les biens qui sont pourvus d’une matérialité meuble ou immeuble.

II. Les biens incorporels.

Les droits incorporels ont été systématisés par le droit romain ils ont remarqué qu’il y avait des biens
créés par l’abstraction des hommes et cela donnait lieu à une qualification juridique. Pour les
romains seul les droits faisaient partis de cette catégorie. C’est avec la modernité que ces biens
incorporels se sont développés.

a. Les droits

Un droit est un rapport juridique entre 2 personnes. On distingue les droits réels, personnels et
sociaux.

La distinction entre le droit réel et personnel : on dit que le droit réel est un droit exercé sur une
chose alors que le droit personnel est le droit d’exiger d’une personne quelque chose. En pratique
cette distinction n’est pas toujours aussi radical.

Dans une créance on a deux facettes du côté du débiteur c’est un rapport de droit personnel avec le
créancier car il ne peut payer la créance qu’a lui et ne peut lui imposer un autre débiteur que lui-
même. Du côté du créancier les choses sont différentes s’il a un rapport de droit réel et personne car
le créancier peut librement agir sur la créance comme sur n’importe quel bien. Il a un pouvoir sur la
créance qui est un bien pour c’est un droit réel.

b. Les propriétés incorporelles.

Cette catégorie de bien incorporel n’avait pas été systématisé par les romains car née sous l’époque
moderne. Ce sont les biens issus de la créativité ou de l’industrie des Hommes. Au sens de savoir-
faire, esprit d’invention, aptitude particulière, compétence. Cela peut être une œuvre d’art, ouvrage,
procédé breveté, marque. Dans cette catégorie on trouve surtout les fonds incorporels et les
propriétés intellectuelles

Fonds incorporel :
10
On trouve parmi eux, les fonds de commerce, les fonds libéraux, etc… ; De façon générale, cela
désigne un moyen de conceptualiser une entreprise. Ce sont des biens qui vont être mis au service
d’une entreprise, cet ensemble de bien est qualifié de bien. Ex : fonds de commerce c’est un
ensemble qui est bien incorporel constitué de bien corporel : matériel, marchandise...
Mais la valeur de ve fonds de commerce réside dans tous les autres éléments qui eux sont
incorporels. C’est le cas de la clientèle. La clientèle est relative à l’attraction que le propriétaire a. a
côté de la clientèle, il y a le nom commercial, le bail.
Le fonds de commerce peut faire l’objet de plusieurs contrats dont certains feront l’objet d’un
transfert de propriété. On va pouvoir céder le fonds de commerce via cession entreprise et les effets
sont les mêmes que pour une vente. Il y aura une délivrance de fonds de commerce, une garantie
des vices cachés etc… ; Le régime sera celui de la vente.

Les propriétés intellectuelles :


Elles renvoient aux idées lorsqu’elles sont appropriées par leur créateur. Elles seront alors protégées
par le droit des biens. Le Professeur Zennati a démontré qu’en réalité, même s’il s’agit d’un bien
spécifique ces propriétés répondent au régime classique des biens. C’est le Code de la propriété
intellectuelle pour autant qui s’applique. Si une personne transforme une idée en création, cette
personne sera déclarée propriétaire car la chose émane de sa force de travail, donc le 1 er
propriétaire. Pour autant ces éléments répondent à un régime spécifique ex : droit d’auteur…

Chapitre 2. Les distinctions secondaires

Section 1. La distinction entre les biens consomptibles et non consomptibles.

L’idée qui fonde cette distinction est que des biens se consomment par le premier usage et d’autre
ont un usage qui peut se répéter. Cette distinction a un vrai intérêt car elle touche le domaine de
restitution car les choses non consomptibles ne peuvent pas être restituées. Lorsqu’un contrat
impose une telle restitution du bien cette restitution ne pourra pas portée sur le même bien mais un
bien de même calibre, qualité… la JP a considéré que le contrat permettant l’exploitation d’une
carrière ne peut être qualifié de bail car on ne peut pas utiliser cela s’en en modifier la substance. Le
contrat de bail suppose que l’on mette le bien entre les mains du loueur, si on consomme la chose on
ne peut pas rendre la chose en tant que t’elle et donc il ne s’agit pas de bail. Si la chose est
consommée il y a transfert de propriété donc il a vente. Cette distinction elle trouve un écho fort
dans la distinction entre le prêt a usage (1875 CC) cette notion se distingue du prêt de consommation
c'est-à-dire un prêt d’une chose consomptible. La personne sera tenue de restituer la chose en
équivalent. Lorsqu’il s’agit d’un contrat qui porte sur une chose consomptible alors nécessairement il
y a transfert de propriété.

Section 2. La distinction entre les choses fongibles et non fongibles.

Les choses sont généralement déterminés peut leur localisation, caractère, individualisation par le
moyen d’une numérotation ou dénomination. Dès lors elles sont considérées de biens non fongibles
on ne peut pas les inter-changer. Ce sont des corps certains. D’autre choses quant à elles existent en
quantité ou un nombre identique et sont donc interchangeable ce sont des choses fongibles, les
choses de genre. Ces choses elles se définissent par l’espèce à laquelle elles appartiennent et la
production de masse. La distinction semble tenir à la nature des choses. Il faut remarquer que la
volonté est susceptible d’influer sur la qualification des choses fongibles/ non fongibles. Par exemple
pour des marchandises destinées à être vendue elles sont de base des choses de genre, une fois
vendu cela devient une chose de corps certain. (Voiture produit en série une fois achetée sera
individualisée).

11
Intérêt distinction :
- Restitution : lorsqu’une demande de restitution porte sur un corps certain c’est la chose
certaine qui doit être restitué si c’est une chose de genre c’est une équivalence.
- Moment de transfert propriété : le moment de transfert n’est pas le même. Pour le corps
certain le transfert se fait dès la conclusion du contrat (sauf stipulation contraire). Pour une
chose de genre ce transfert de propriété s’opère qu’au moment de l’individualisation de la
chose. Il y a un décalage entre la conclusion du contrat et le transfert de propriété.
- Charge des risques : qui doit supporter le risque de disparition, détérioration du bien avant la
délivrance du bien ? cela va dépendre de la nature du bien. Si on est en présence d’un corps
certain l’effet translatif est immédiat alors c’est l’acheteur qui sera en charge des risques (res
perit domino). S’il s’agit d’une chose de genre le principe est dit « res perit debitori », la
charge des risques va incomber au vendeur.

Section 3. La distinction entre les fruits et les produits.

On a l’habitude de dire qu’il existe les bien stérile et ceux qui produisent des revenus. Il faut
distinguer le capital du revenu que le bien va produire. Le régime pour le revenu sera différent de
celui du capital.

Le capital est un ensemble de bien frugifère et productif d’une personne qui lui rapporte des fruits ou
lui fournissent des produits.

Le revenu est une ressource périodique d’une personne issue de son travail ou capital.

La catégorie des revenus n’est pas homogène car il faut distinguer 2 types des revenus ; fruit et
produit.

I. Les fruits

Au sens juridique les fruits peuvent être définis comme des revenus périodiques issus d’un bien qui
ne sera pas ni altéré ni diminué par la production du fruit. Les fruits donnent des revenus périodiques
sans affecter la valeur du bien considéré. Le législateur de 1804 à distinguer les fruits naturels et
industriels (583 CC) et puis les fruits civils. (584 CC).

Les fruits naturels sont ceux qui proviennent du capital sans intervention d’autrui. Les fruits civils
sont les fruits qui ressortent du payement d’autrui (loyer).

II. Les produits

Au contraire des fruits, les produits consistent en ce qui est retirer du capital de façon irrégulière et
qui entraine une détérioration du bien. (Arbre abattu, carrière utilisé). En principe des arbres sont
des produits mais si le propriétaire les as mis en coupe réglé alors les arbres deviennent des produits
et non plus des fruits (598 CC).
Il a intérêt à distinguer produit et fruit car l’un et l’autre se trouve généralement dissocié.
L’usufruitier a droit au fruit mais pas au produit. Le possesseur de bonne foi aura le droit au fruit de
la chose mais pas au produit (544 CC).

THEME 3. LA PROPRIETE INDIVIDUELLE

12
Article 544 Cciv : « La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus
absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements »

Cet article date du Code civil de 1804. Il peut se scinder en deux parties :
- Le principe : la propriété est un droit absolu
- L’exception : pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois et règlements.

Cet article qui conçoit la propriété comme un droit absolu et individuel est une idée qui vient tout
droit des révolutionnaires et philosophes des Lumières. C’est pour cela que la propriété est un droit
inscrit dans la DDHC. Il faut néanmoins noter que le contexte éco et sociale de la révolution et du
Cciv de 1804 n’est plus du tout le même. Pour cette raison, derrière la lettre de l’art 544 Cciv se cache
aujourd’hui qui est bien différent de l’époque de sa création parce que d’un pdv philosophique,
l’individualisme tend à décliner au profit d’une conception + sociale et collective de la propriété.
Aujourd’hui, législateurs et JP tendent à se servir de la 2 ème partie de l’art 544 Cciv pour limiter le
caractère absolu du droit de propriété.

Chapitre 1. L’évolution de la notion de propriété.

La doctrine a conceptualisé le droit de propriété pour le mettre au service à autre chose qu’un seul
individu.

Section 1. L’évolution de la conception du droit de propriété

I. Le droit archaïque

Dans ce droit archaïque, la propriété est une propriété divinisée. La Terre appartient aux dieux, et
ainsi, aucun individu ne peut personnellement se l’approprier. « La Terre est la 1ère femme du
Créateur, elle nourrit les vivants et entourent les morts » (proverbe Malgache). Il existe un lien
mystique entre l’Homme et son bien. Le corolaire de cette vision est que la Terre est nécessairement
un bien collectif. Par exemple, il existait une société de rotation des champs, qui consistait à tourner
selon les individus qui pouvaient exploiter la Terre.

II. Le droit romain

Le très ancien droit romain a une vision pas très éloignée du droit archaïque. La propriété va
s’individualiser à Rome au 1er et 2ème siècle de notre ère. Des droits individuels sont octroyés aux
Hommes et ces droits leur confère des pouvoirs sur leur chose : l’exclusivité (c’est-à-dire la possibilité
pour une personne d’exclure de son bien). Cette propriété individuelle ne pouvait porter que sur
certains biens, seulement au pater familias et aux citoyens romains. Ce type de propriété est celle qui
se rapproche le plus de la nôtre.

L’exemple de la propriété provinciale : l’Empereur octroyait des terres provinciales à des aristocrates,
des bourgeois, grandes familles etc…

III. L’ancien droit (du 11ème au 15ème)

Du 11ème au 15ème siècle, la vision féodale de la propriété est complètement différente que celle du
droit romain. A l’époque féodale, il n’y a pas d’exclusivité d’une personne sur une chose. La propriété
féodale se comprend non pas dans le rapport d’un homme à un bien mais plutôt en partant de la
Terre. Cette terre fait l’objet d’une superposition de droit. C’est à cette époque qu’on distingue 2
droits qui se superposent sur la terre : Le domaine utile, Le domaine éminent.
13
Le Seigneur est propriétaire de la Terre en ce sens qu’il en a le domaine éminent. Autrement dit, le
Seigneur n’exploite pas la Terre. Il concède cette terre au tenancier (paysan), qui a le domaine utile.
Le domaine éminent serait une propriété d’un lien entre un homme et cette terre alors que le
domaine utile serait le droit de jouir de cette terre. Le tenancier devait verser des charges au
Seigneur. C’est pourquoi le Seigneur avait le droit de justice. Le concept juridique actuel le plus
proche est celui de l’usufruit (démembrement de la propriété entre le propriétaire, qui a le droit de
propriété, et l’usufruit qui a le droit de jouir de la chose.

En parallèle de cette propriété spéciale, il y avait également des propriétés collectives dans lesquelles
les terres sont mises en commun (par exemple communautés familiales qui réunissaient leurs terres.

IV. La Révolution et le Code civil

La Révolution est une réaction aux privilèges de l’AN régime. La propriété cristallise ses privilèges. On
met donc à la conception de la propriété.
Ces par les lois du 7 et 24 août 1789 que sera mis fin à la distinction des domaines. Dès lors que les
privilèges sont abolis, le droit de propriété est libéré et devient unique et uniforme. O

On veut mettre fin aux propriétés collectives du Moyen Age parce qu’ils appartiennent
essentiellement au domaine religieux et qu’on voulait nationaliser les lieux de culte. Les
révolutionnaires ont pensé la propriété inviolable et sacré. Ils ont alors inscrit l’inviolabilité du droit
de propriété dans la DDHC : (art 2 C°, et l’art 17 DDHC).
Leur idée était noble, en réaction à des injustice, mais instaurer la propriété privée presque comme
un dogme finit parfois par lui faire du tort.

Les rédacteurs du Code civil ont repris en grande partie la vision révolutionnaire de la propriété. Ils
l’ont conçu comme un droit individuel et naturel, et même comme le socle du Code civil et de tout le
droit des obligations. Les rédacteurs du Code civil, pour les mêmes raisons, ont voulu accorder une
très faible place à la propriété collective. En 1804, on ne retrouve que la notion d’indivision comme
propriété collective.

En bref, la propriété dans le Cciv de 1804 est un conçu comme un droit quasi-absolu, exclusif et
perpétuel. Le propriétaire ne peut pas par des actes juridiques admettre toutes les limitations qu’il
veut à son droit de propriété. Il ne peut consentir que les limitations qui ont été prévues par le Cciv :
quant aux droits que peuvent avoir un autre titulaire sur la chose (ex : usufruit, ou servitude).

L’évolution de la conception de propriété n’est pas encore terminée puisque la vision des rédacteurs
du Cciv est en train d’évoluer vers une vision plus relative (moins absolue), ce qui se voit au regard
des fonctions du droit de propriété.

Section 2. L’évolution des fonctions du droit de propriété.

En effet, la conception que l’on retient de la propriété va de pair avec la fonction qu’on souhaite lui
donner. La fonction que les rédacteurs du Cciv est une fonction qui a été inspirée par un courant de
pensée de la doctrine des physiocrates libéraux (née aux alentours du 18 ème/19ème siècle, courant de
Mirabeau, Beaudeau, Roudeaud). Cette école de pensée repose sur une doctrine qui est
économique, et qui considère que l’activité la plus importante est l’agriculture. Ainsi, on veut que le
propriétaire du sol soit celui qui exploite le sol, donc propriété individuelle.

I. La fonction sociale du droit de propriété


14
Ce développement de la fonction sociale est souvent attribué à Léon Duguit. L’idée de l’auteur est de
mettre la propriété au service d’une fonction de bien commun. A cette époque, d’autres théories ont
aussi vu le jour chez les philosophes, qui ont tenté de conceptualiser la propriété pour la raccorder
avec le marxisme, avec le communisme ou même l’anarchisme. Par exemple, pour Proudhon « la
propriété c’est le vol ». Dans son schéma de pensée, il maintient la propriété individuelle mais ce
qu’il appelle « la force travail » n’est pas rémunéré et cette absence de rémunération, c’est du vol
pour lui.

Arrêt du CC° du 19 janvier 1995 relatif au droit à un logement décent : le CC° consacre ce droit
comme un OBC (objectif à valeur constitutionnelle), en se basant sur 2 droits fondamentaux : le droit
à la sécurité matérielle et la dignité humaine. Ainsi, l’exigence de logement décent a été consacré à
l’article 1719 Cciv, et en 2016 a été créé le bail réel solidaire. Le but était de permettre l’accès aux
personnes à faibles revenus à un logement, en distinguant dans la loi le foncier (la terre) du bâti. Des
OFS (organismes de foncier solidaire) sont propriétaires d’un terrain et se chargent soit d’édifier une
construction, soit de racheter un terrain avec une construction, et ils vont simplement mettre à bail
le bâti sans le foncier. Le bailleur ne paye le loyer qu’en contrepartie de la jouissance du bâti. Ces
loyers à faible coûts peuvent être longs et scellés.

II. L’apparition de la fonction environnementale de la propriété ?

L’idée de la fonction environnementale de la propriété repose moins sur une vision sociale d’aide au
prochain que sur une vision trans-générationnelle de préservation de l’environnement pour le futur.
Cette vision se fait en réaction à la vision économique classique de la propriété qui est fondée sur
l’exploitation du sol. Si le propriétaire a un pouvoir absolu sur sa Terre, alors il peut tout faire dessus,
et même détruire sa terre. On veut alors imposer des impératifs pour limiter son action sur la nature.

Pour protéger un bien/chose, on tente de faire basculer cette chose dans le régime juridique des
personnes. En personnifiant la nature/la terre, et en lui octroyant un statut spécial, on protège mieux
l’environnement.

CEDH, 27 novembre 2007, Hamer c./ Belgique : des impératifs économiques, et même certains droits
fondamentaux comme le droit de propriété, ne devraient pas se voir accorder la priorité face à des
considérations relatives à l’environnement.

En France, c’est à partir du milieu des années 70 que les choses ont bougé. Par exemple, en 1976, on
crée dans le Code de l’environnement, une police administrative des installations classées. La
responsabilité environnementale est prévue dans le Code de l’environnement depuis 2008. En 2016,
on a fait rentrer dans le Cciv la notion de préjudice écologique.

Conclusion :

La vision de la propriété privée n’a pas toujours été individuelle, ni absolue. La propriété du Cciv est
un choix qui est contingent et vient tout droit de la Révolution.
Elle ne peut plus être conçue en elle-même et pour elle-même, mais doit ou peut être mise au
service d’autres finalités qui sont davantage collectives.

Chapitre 2. L’évolution de la protection de la propriété

15
La protection est le moyen par lequel la propriété est juridiquement protégée et sanctionnée. En
1804, il n’y a que le Cciv qui est un texte à valeur juridique et protège la propriété.

Section 1. Les normes.

I. Les normes qui protègent la propriété en droit interne

Au-delà du Cciv, on a 2 normes de rang supérieur qui protègent le droit de propriété :

- Article 2 DDHC : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels
et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la
résistance à l'oppression. »

- Art 17 DDHC : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce
n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la
condition d'une juste et préalable indemnité.  »

En 1789, la DDHC n’a aucune valeur, si ce n’est une symbolique. Les articles 2 et 17 DDHC acquièrent
une valeur juridique quand elles ont été incluses dans le bloc de constitutionnalité en 1971 dans la
décision Liberté d’association. Par cette décision, le CC° donne une valeur juridique au préambule de
la C° de 1958, qui renvoi au préambule de la C° de 1946, ce dernier renvoi à la DDHC. Pourtant, il
faudra attendre environ 20 ans pour que le CC° rende une décision sur le sujet de la propriété.
C’est par la décision du 16 janvier 1982 relative aux lois de nationalisation de Mitterrand que le CC°
admet que l’article 17 de la DDHC permettait de considérer comme n’étant pas conforme à la C°
certaines dispositions de la loi sur les nationalisations, car elles ne comportaient aucune contrepartie
indemnitaire pour les entreprises nationalisées. On protège le droit de propriété en obligeant le
versement d’une juste et préalable indemnité en contrepartie de l’atteinte légitime au droit de
propriété.

II. Les normes du Conseil de l’Europe.

C’est le protocole additionnel n°1 dans son article 1 de la CEDH, intitulé « protection de la
propriété » : « toute personne physique ou morale à droit au respect de ses biens. Nul ne peut être
privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique, réglementer l'usage des biens conformément
à l'intérêt général ou […] assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes »

III. Les normes de l’UE

La Charte des droits fondamentaux de l’UE de 2000 porte sur le droit de propriété en son art 17, et
prévoit 2 points, toujours principe/exceptions, mais les exceptions sont + détaillées. La Charte des
droits fondamentaux de l’UE ajoute cependant une protection de la propriété intellectuelle.

Section 2. L’interprétation de ces normes

I. Par les juridictions de l’ordre interne

C’est le juge judiciaire qui est considéré comme le garant des DLF, donc c’est lui qui apprécie la
violation ou non du droit de propriété. Ensuite, le CC° est protecteur de la propriété individuelle. Il va
contrôler la conformité de la loi à cette norme qu’est la propriété individuelle.
Le CC° autorise les limitations au droit de propriété apportée au législateur à 2 conditions :
- Que ces limitations législatives soient circonstanciées au regard de l’intérêt général.
16
- Que ces limitations n’aient pas un caractère de gravité tel que le sens et la portée de ce droit
soient dénaturés.

II. Par la CEDH

a. Sur le contrôle

A chaque type d’atteinte correspond un contrôle spécifique. Plus l’atteinte est grave, plus le contrôle
réalisé par la CEDH est resserré. On peut donc hiérarchiser les types de contrôle :

 Le contrôle portant sur des mesures privatives de propriété :

Juridiquement, il s’agit d’opérer un transfert de propriété forcé, qui va entraîner une dépossession
totale et définitive du bien (ex : expropriation pour cause d’utilité publique). La CEDH va donc vérifier
3 choses :
- Si la mesure est légale
- Si la mesure est légitime (intérêt général, utilité publique)
- Si la mesure est proportionnée au but visé (contrôle de proportionnalité)

 Le contrôle des mesures qui sont restrictives de propriété  :

Ici, il s’agit d’une atteinte à la substance du droit de propriété de nature à engendre une charge
spéciale exorbitante pour le propriétaire. Les autorités publiques doivent faire tout ce qui est en leur
pouvoir pour sauver les intérêts patrimoniaux du propriétaire. (CEDH, 2005, Arrêt Matheus)

b. Influence de la CEDH sur la Cour de cassation

Ce contrôle de la CEDH, et le triple test a eu une influence considérable sur le contrôle de


conventionalité exercé par la Cour de cassation.
La Cour de cassation a le pouvoir et le devoir de juger de la conformité de la loi à un texte
supranational. L’article 55 de la C° dispose que les conventions sont au-dessus des lois, et que la Cour
de cassation doit donc jouer son rôle de contrôle, mais les juges français ont rarement été en faveur
de ceci. Dans les conventions internationales, il y a les DLF. Or, les DLF sont d’une nature particulière
parce qu’ils ne sont pas définis et ont une substance qui peut varier. Autrement dit, l’appréciation de
tel ou tel droit fondamental peut varier d’un juge à un autre. Les juges de la Cour de cassation se sont
toujours refusés à exercer un contrôle de conventionalité en prenant pour norme les DLF. C’est à
partir de 2013, à force d’avoir été condamnée par la CEDH, va finir par reprendre la méthode de
triple test + contrôle de proportionnalité de la CEDH. Il s’agit pour le juge d’écarter la loi au litige
quand il estime que cette loi a un effet excessif sur tel ou tel individu au regard de tel ou tel droit
fondamental.

Les auteurs qui sont contre ce contrôle de conventionalité invoquent une remise en cause de la
démocratie, car les juges écartent une loi qui est le fruit d’une procédure démocratique. Il ne s’agit
plus pour le juge de prendre une règle générale, de l’appliquer à une espèce et de conclure, mais
plutôt de mettre à égal niveau la règle générale et la liberté fondamentale. Par un contrôle de
proportion, on porte une règle au-dessus d’une autre.

Le contrôle de proportionnalité des juges consiste aussi à mettre deux droits face à face. C’est une
sorte de balance des intérêts. On peut mettre par ex, d’un côté le droit de propriété et le droit au
respect du domicile, d’un côté le droit de propriété et le droit au respect de la vie privée et familiale.

17
Est-ce que du fait de ce dernier contrôle de proportionnalité, le droit de propriété peut-il être
davantage relativisé ? autrement dit, le contrôle de proportionnalité peut-il porter atteinte au droit
de propriété ? La JP actuelle, depuis 5 ans, est amené à se positionner sur cette question :

- Civ, 3ème, 22 octobre 2015 : expulsion à la suite d’une installation de campement illicite sur un
terrain public qui appartenait à la ville de paris. La CA accepte l’expulsion, et les occupants
illicites se pourvoient en cassation en invoquant l’art 8 de la CEDH sur le respect du domicile.
Autrement dit, en expulsant ils sont privés du droit au domicile. Deux droits s’affrontent : le
droit au domicile contre le droit à la propriété privée. La Cour de cassation répond par un
rejet et concède au pourvoi qu’il fallait bien faire un contrôle de proportionnalité. C’est la 1 ère
fois que la Cour de cassation accepte de mettre en balance le droit de propriété face à un
autre droit. Elle considère que l’état des campements faisait courir un risque pour ses
usagers et que donc l’expulsion était nécessaire.

- Civ, 3ème, 21 décembre 2017  : même faits avec ressortissants syriens. Le propriétaire agit en
référé. La CA rejette l’action en référé parce qu’il n’y a pas selon elle de trouble
manifestement illicite car elle effectue un contrôle de proportionnalité. Au regard de la CA,
on fait céder le droit de propriété car « l’expulsion aurait pour effet de placer les
ressortissants dans une plus grande précarité ». La Cour de cassation casse et annule l’arrêt
d’appel sans fait de contrôle de proportionnalité. Selon elle, l’occupation sans droit ni titre
du bien d’autrui constitue un trouble manifestement illicite.

- Civ, 3ème, 17 mai 2018 : action en destruction d’une habitation construite sur le terrain
d’autrui. La CA accueille la demande en démolition. Le pourvoi en cassation invoquait là
encore l’article 8 CEDH relatif au respect du domicile et de la vie privée et familiale car
l’occupation servait d’habitation. La Cour de cassation rejette le pourvoi, et effectue un
contrôle de proportionnalité très stricte, en 4 étapes : est-ce qu’il y a une ingérence dans le
droit invoqué ? (Oui, car on demande la destruction) ; cette ingérence est-elle prévue par la
loi ? (Oui, art 545 Cciv le propriétaire peut agir en destruction) ; L’ingérence poursuit-elle un
but légitime ? (Oui, le proprio veut récupérer son terrain) ; Cette ingérence est-elle
proportionnée et est la seule mesure pour atteindre ce but ? (Oui, la démolition est
proportionnée au but recherché).

- Civ, 3ème, 4 juillet 2019 : l’expulsion est la seule mesure de recouvrer la plénitude de son droit.

On remarque alors que la Cour de cassation accepte le contrôle de proportionnalité mais c’est
toujours le droit de propriété qui gagne. On se rend compte que ce contrôle de proportionnalité
n’est pas celui de la CEDH, concret, in casu, mais plutôt un contrôle subjectif.

Aujourd’hui, la Cour de cassation a franchi un cap en raison de 2 arrêts récents :

- Civ, 3ème, 19 décembre 2019 : action en destruction d’un ouvrage qui résultait d’un
empiètement sur une servitude de passage.

- Civ, 3ème, 16 janvier 2020  : contrôle de proportionnalité de la loi, commune qui agissait contre
des propriétaires en destruction de leur maison d’habitation parce qu’elle avait été
construite en violation des règles d’urbanisme.

Dans ces deux arrêts, la Cour de cassation exerce un contrôle de proportionnalité et demande aux
juges d’appels d’exercer concrètement le contrôle de proportionnalité (contrôle type CEDH, et
mettre concrètement en balance le droit de propriété avec un autre droit).
18
Pour l’instant, la Cour de cassation n’a jamais fait céder le droit de propriété devant un autre droit,
mais on sent que cela pourrait arriver.

THEME 4. LA PROPRIETE INDIVIDUELLE, LES PREROGATIVES


Les prérogatives sont les pouvoirs attribués aux propriétaires. Deux visions peuvent être distinguées :
une vision classique et une vision moderne.
Ces 2 visions sont 2 angles de vue pour définir les prérogatives. Tandis que dans la vision classique,
on a cherché à définir un contenu au droit de propriété, dans la vision moderne, on s’attarde
davantage sur les contours et les limites du droit de propriété. Par-là, le droit de propriété est absolu
et souffre de quelques limites. Le Professeur Zenatti avait une définition assez claire quant aux
prérogatives selon la vision classique : « un propriétaire peut donc tout faire sauf ce qui est interdit,
alors que le titulaire d’un droit ne peut faire ce qu’il lui ait permis.
Cette approche différente rétroagit sur la conception de la propriété. Dans la conception classique, la
propriété est définie comme un droit subjectif, rattachée à la personne qui a l’exclusivité sur la chose.

Dans la vision moderne, la propriété n’est pas conçue comme un droit réel mais comme une
puissance. C’est un attribut qui permet au propriétaire d’exercer une maitrise sur ses biens. Dès lors,
la propriété est profondément liée à la volonté. C’est un pouvoir de volonté.
Les auteurs qui défendent de la vision moderne dénoncent que la vision classique est une sorte de
détournement ou déformation du droit romain.

Les 3 prérogatives du droit de propriété :


- L’usus : le droit d’user du bien
- Le fructus : le droit de jouir du bien
- L’abusus : le droit de disposer de la chose

Chapitre 1. L’usus, le droit d’user du bien


Dans l’article 544 Cciv, il faut entendre le terme de loi dans son sens large, comme toute règle
générale formulée par écrit. De plus, on entend par règlement, son sens large, c'est-à-dire englobant
également la jurisprudence.

Section 1. Définition

L’usus peut revêtir une double définition :


- Positive : l’usus renvoie au pouvoir qu’a le proprio d’utiliser le bien comme il l’entend.
- Négative : l’usus est la possibilité de ne pas user de chose (le droit de ne rien faire de la
chose).

On pourrait également distinguer de l’utilisation matérielle de la chose et utilisation juridique.


L’utilisation matérielle est la plus classique, avec la possibilité d’user d’une chose corporelle comme
on le souhaite. L’utilisation juridique car elle concerne souvent les choses incorporelles.

19
L’usus va varier selon la nature du bien, car tous les biens ne sont pas susceptible d’usage. Les biens
incorporels au sens stricto sensu ne sont pas susceptibles d’un usus. Seul le fructus leur ait
applicable. Tous les biens ne sont pas susceptible du même usage. Les biens consomptibles peuvent
être utilisés d’un seul trait, alors que les biens non consomptibles peuvent être consommés dans le
temps.

Section 2. Les limites.

Les limites concernent les restrictions imposées au propriétaire concernant l’usage du bien.

I. L’abus de droit

a. Les difficultés du droit de propriété


L’hypothèse est celle où une personne cause un dommage en utilisant son droit. La théorie de l’abus
de droit n’est pas contestée, mais à l’origine, elle a été très discutée. Cette théorie ne figure pas dans
le Code civil, elle est une création de la doctrine du début du 20 ème siècle.

La révolution a mis au-dessus de tous les DLF, y compris au-dessus des droits objectifs. L’abus de
droit vient alors relativiser la force du droit de propriété. C’est Louis Josserand, universitaire lyonnais,
écrit « De l’esprit des droits (…) » en 1917. Si vous portez atteinte à la propriété privée, socle de la
vision moderne du droit, on porte atteinte à tout un édifice. On oppose alors 2 auteurs : Josserand,
défendeur de cette théorie, et Plagnol et Ripert.

L’idée générale de Josserand était de dire si en tant que propriétaire, j’ai un usage excessif de mon
droit, et que je porte préjudice à autrui, alors, ma responsabilité peut être engagée. Face à cela, les
libéraux de droite critiquent cette théorie.

La critique technique de cette théorie est celle de Plagnol à la même époque. Pour lui, cette théorie
de l’abus de droit comporte une contradiction, c’est une logomachie. Pour lui, un même acte ne peut
pas être considéré comme conforme et comme contraire au droit. Ce à quoi Josserand répond qu’on
peut très bien agir dans les limites de mon droit ou en vertu de mon droit, et que cette action soit en
définitive considérée comme contraire au droit objectif.
Il s’agit donc là d’une controverse de mot parce que tous les auteurs admettent à l’époque que
l’usage d’un droit, et donc l’usage de la propriété, peut souffrir de limites.

b. L’admission prétorienne

La théorie de l’abus de droit créée par la doctrine a trouvé un encrage en JP très rapidement. Le 1 er
arrêt à avoir fait naître ce concept en JP est l’arrêt dit « Clément-Bayard » du 3 août 1915.
Dans cet arrêt, la Cour cassation estime que « l’usage de la propriété n’a eu pour seule cause
d’engendrer le dommage », et pour la 1ère fois utilise le terme d’abus de droit pour limiter le droit de
propriété.

c. Le critère

Quelle est la limite entre la liberté du propriétaire et l’abus du droit de propriété ?

3 critères ont été cités en doctrine :


- La faute dans l’exercice d’un droit : proposés par les Professeurs Mazeaud et Chabas. S’il y a
faute, il y a illicéité, et s’il y a illicéité il ne peut pas avoir d’usage d’un droit, car « tout abus
est une faute mais toute faute n’est pas un abus »
20
- L’intention de nuire : mais problème de preuve, comment apprécier l’intention de nuire ?
- La finalité sociale des droits : proposé par Josserand. Il y a abus de droit lorsque le titulaire de
ce droit à détourner la finalité sociale du droit.

La jurisprudence a commencé par retenir le critère le + restreint, soit celui de l’intention de nuire.
Puis, elle a étendu ses critères et le critère qui prévaut aujourd’hui est celui de la faute dans
l’exercice d’un droit. Aujourd’hui la tendance évolue et tend à l’extension du critère. Le critère qui
peut être retenu est désormais un peu plus général et consiste dans une sorte d’équilibre ou le juge
va être amené à comparer le droit de propriété d’une part et son effet sur les tiers d’autre part. Ainsi,
il va regarder l’intérêt qu’avait le propriétaire à exercer son droit, et d’un autre côté l’analyse du
préjudice subi par les tiers. De là, il va faire une balance des intérêts et s’il estime que le préjudice est
supérieur à l’intérêt qu’avait le propriétaire d’utiliser son droit, alors il y a abus.

II. Les troubles anormaux du voisinage

a. L’admission prétorienne

Comme l’abus de droit, la théorie des troubles anormaux du voisinage a pris naissance dans la JP.
C’est le juge qui crée cette théorie au 20 ème siècle, mais on retrouve quelques traces au milieu du
19ème siècle. L’arrêt créateur de la théorie des troubles anormaux du voisinages est un arrêt du 27
novembre 1844 : la réparation doit être due quand le dommage excède la mesure des obligations
ordinaires du voisinage.

Cette théorie devient un principe général du droit privé au 20 ème siècle à telle enseigne que la Cour de
cassation vise aujourd’hui ce principe dans ses arrêts de la manière suivante : « Vu le principe selon
lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal du voisinage » (ex : Civ, 3ème, 23 novembre
1994)

b. Les parties à l’action

Il y a d’abord la victime, qui se plaint du trouble, et de l’autre côté le défendeur. Il y a deux règles :
- Le propriétaire du fonds depuis lequel les inconvénients ont augmenté peut toujours être
poursuivis, même s’il n’est pas lui-même l’auteur du trouble.
- De manière alternative ou cumulative, peuvent être également poursuivis le/les auteur(s)
matériel(s) du trouble.

Il peut donc avoir une discordance entre celui qui émet le trouble et celui qui engage sa
responsabilité. L’idée qui sous-entend cette règle est que seul le propriétaire peut mettre fin au
trouble.

c. Les conditions de l’action

Il y a 3 conditions de l’action :
- Il faut un trouble : peu importe que ce trouble provienne d’une activité agricole, industrielle,
artisanale, commerciale ou privée.
- Il faut que ce trouble soit anormal : qu’il dépasse ce que peut normalement et socialement
supporter un individu lambda. Sur ce point, les juges sont particulièrement attentifs au
caractère constant, permanent et répétitif du trouble. C’est un faisceau d’indice pour
qualifier ce trouble.
- L’activité à l’origine de ce trouble doit être licite : sinon, on passe sur le biais de la
responsabilité civile pour faute, sans l’usage de cette théorie.
21
La problématique de la préoccupation : le défendeur à l’action (le perturbateur) peut-il être excusé
ou se défendre en raison du fait que le trouble invoqué était antérieur à l’installation de la personne
et connu de celle-ci ? le législateur a alors posé l’article L112-16 du Code de l’habitation et de la
construction, qui répond Non à cette question. Il ne peut pas se défendre en invoquant le fait qu’il
était là avant, sauf pour les activités visées à l’article L112-16.

d. Les effets de l’action

Il y a 2 effets si l’action prospère :

- L’action en cessation du trouble : cette action ne suppose pas la présence d’un préjudice, la
victime n’aura pas besoin de démontrer qu’elle souffre d’un dommage, la seule menace d’un
dommage suffit à déclencher cette action. La raison est de dire que quand il y a un trouble
anormal du voisinage, il y a une dépréciation de l’immeuble, donc un dommage
- L’action en réparation des conséquences du trouble : ici, on suppose la preuve du dommage
subit par la victime.

Chapitre 2. Le fructus, le droit de jouir du bien


Section 1. Définition

Le fructus est le droit de jouir de la chose c'est-à-dire d’en retirer tous les fruits qu’elle donne. C’est
le droit de recueillir les récoltes d’un fonds de terre, de percevoir les loyers d’un immeuble. La
jouissance peut résulter d’actes matériels ou juridiques. La jouissance résulte d’actes matériels
quand le proprio récolte les fruits naturels ou industriels, et la jouissance résulte d’acte juridique
quand le propriétaire conclut des actes qui vont être destinés à fructifier un bien.
Le fructus est aussi la liberté de choisir la destination de l’exploitation du bien (liberté de planter ce
qu’on veut, liberté de choisir ses locataires etc…).
Enfin, le fructus est aussi la liberté de choisir la destination des fruits récoltés (dépenser, accumuler,
épargner, etc…)

Négativement, le fructus est aussi le droit de ne pas jouir de la chose, c'est-à-dire de ne pas percevoir
les fruits naturels, de ne pas exploiter par des actes matériels ou juridiques don bien.

Section 2. Limites

I. Limites justifiées par des intérêts particuliers

Ici, on est dans l’hypothèse où la jouissance du propriétaire est limitée quand son droit est limité par
un autre droit réel. C’est l’exemple de l’usufruit : démembrement de la propriété.
La jouissance du propriétaire est également limitée quand son droit est concurrencé par des droits
personnels. Par exemple, quand on met son droit a bail, alors on donne un droit personnel au
bailleur.

II. Limites justifiées par l’intérêt général

a. Limites au droit d’exploitation

L’exploitation de certains biens répond à des considérations d’intérêt général, et par conséquent
cette exploitation est soumise à des autorisations, des interdictions, voire des monopoles.
22
Par exemple, les gisements. Ces biens ne peuvent être exploités que par l’État ou en vertu d’un
permis d’exploitation ou de concession administrative. Celui qui disposera de ce permis ne peut
exploiter la mine qu’en vertu d’une durée maximum de 5 ans (2x renouvelable), selon l’article 55 du
Code minier.
Autre exemple, les réserves naturelles (zones dans lesquelles les exploitations de terre sont
interdites). On donne des interdictions dès lors que « ces réserves sont susceptibles de nuire au
développement naturel de la faune et de la flore et plus généralement d’altérer le caractère de ladite
réserve » (art L332-3 al 1er du Code de l’environnement).

b. Limites au droit de non-exploitation

Le propriétaire d’un fonds n’a pas toujours la liberté de ne pas exploiter ce fonds. Par exemple, le
Code rural prévoit que sous réserves de certaines dispositions spéciales, l’article L125-1 du Code rural
permet à toute personne physique ou morale de demander à l’autorité administrative l’autorisation
d’exploiter une parcelle considérée comme sous-exploitée.

Chapitre 3. L’abusus, le droit de disposer du bien


L’abusus est le cœur du droit de propriété, donc dès lors qu’on perd ce droit, on perd la propriété.

Section 1. Définition

I. Définition positive

Le propriétaire peut faire 2 choses en vertu de l’abusus :


- Des actes matériels de destruction
- Des actes juridiques de disposition

S’agissant des actes matériels :


Le proprio a le droit de transformer son bien, en altérant sa substance ou en le détruisant. Ce pouvoir
de physique singularise le propriétaire des autres titulaires des droits réels parce que seul lui a le
pouvoir de détruire le bien. C’est également un pouvoir discrétionnaire qui en principe n’est soumis à
aucune autorisation, aucune justification ou aucune sanction.

S’agissant des actes juridiques  :


Le propriétaire a le droit d’accomplir sur son bien tous les actes de disposition, c'est-à-dire qu’il peut
céder son bien à titre gratuit ou à titre onéreux. Il peut transmettre son bien entre vifs ou à cause de
mort. Il peut hypothéquer son bien ou le démembrer. Il peut y renoncer par une volonté unilatérale.
Il peut enfin l’abandonner.

II. Définition négative

L’abusus est le droit de ne pas disposer de son bien, c'est-à-dire de ne pas le détruire, mais de le
conserver matériellement ou juridiquement. Cela signifie que le propriétaire a le droit en principe de
ne pas vendre son immeuble, d’où l’article 545 Cciv : « nul ne peut céder sa propriété si ce n’est pour
cause d’utilité publique » (Plen, 6 janvier 1994).

Le propriétaire peut également obliger son successeur à conserver son bien, et ne pas le détruire.
Cela se fait par la clause d’inaliénabilité. Elle n’est valable qu’à la seule condition qu’elle soit limitée
dans le temps (généralement la vie du donateur).
23
Section 2. Limites

I. Les limites au droit de disposition

Ces limites sont de 2 ordres :

- Les limites à la libre disposition : des intérêts supérieurs peuvent exigés une règlementation,
un encadrement de la libre disposition du bien. C’est le cas des biens précieux, de la
destruction d’un immeuble classé, ou encore des biens de famille. Par exemple, l’art 215 al 3
Cciv interdit à un époux de disposer seuls des droits par lequel est assuré le logement de
famille.

- Les limites au droit du choix de l’acquéreur : en principe, quand on parle d’abusus, le droit de
disposition permet au proprio de choisir librement son acquéreur. Il existe pourtant des
exceptions à ce principe, et un type d’exception est grandissant : droits de préemption
(consentis soit à des personnes privées soit des personnes publiques). Ce sont des droits de
préférence. Quand le proprio décide de vendre sont bien, le titulaire d’un droit de
préemption seront les acheteurs prioritaires de ce bien. Par exemple, l’État dispose d’un
droit de préemption sur toute vente publique ou privée d’œuvres d’art (Code du patrimoine,
art L123-1 et suivants).

II. Les limites au droit de conservation

a. Limite à la conservation juridique

L’expropriation pour cause d’utilité publique : elle dépouille le propriétaire de son immeuble mais à
la double condition qu’il y ait une cause d’utilité publique et le versement d’une juste et préalable
indemnité

La nationalisation : elle dépouille aussi le propriétaire de son immeuble mais relativement à une
exploitation économique. En principe, pour que l’exploitation éco soit nationalisée, il faut qu’elle soit
directement utile à la nation.

b. Limite à la conservation matérielle

Le propriétaire, par exception va devoir limiter la conservation matérielle qu’il exerce sur un bien.
Soit le législateur, soit la JP oblige le propriétaire à détruire son bien. C’est le cas pour les bâtiments
en ruine ou menaçant de ruines, qui peuvent être dangereux pour les tiers ; idem pour un animal
dangereux qui doit être abattu.

THEME 5. LA PROPRIETE INDIVIDUELLE : LES CARACTERES


Les caractères du droit de propriété sont : l’absolutisme, l’exclusivisme et la perpétuité.

Chapitre 1. L’absolutisme
Section 1. Définition

24
Peut-on considérer la propriété comme absolue ? La propriété existe en elle-même et par elle-même.
Pour Christian Attia la propriété « n’est pas un élément d’un autre droit, elle ne se définit pas
relativement à un autre droit qui lui servirait de référence ». On dit aussi que le droit de propriété est
le droit réel le plus complet. Pour Roubier, c’est la forme la plus complète de droits subjectifs.
Le propriétaire peut faire sur sa chose tout ce qu’il veut sauf ce qui lui est interdit.

Section 2. Limites

Prenons l’exemple la servitude de passage (possibilité d’obliger un propriétaire de passer sur son
terrain), est une limite à l’usage de son bien. La mitoyenneté est une limite au droit de propriété
parce qu’une personne a un droit sur un tiers. C’est une sorte de copropriété, mais forcée.
Il y a aussi des régimes spéciaux comme l’expropriation, ou certaines règles de droit au logement qui
s’imposent au propriétaire, ou encore des règles de fouilles archéologiques ou sanitaires, etc…

Il y a une limite un peu plus spéciale qu’on retrouve expressément dans le Code civil de 1804 : les
relations de voisinages.

I. Le bornage

Un propriétaire foncier peut obliger son voisin au bornage quand leurs propriétés sont continues. Il
est régi à l’art 646 Cciv.

Le bornage se fait par la délimitation de 2 fonds par « un procès-verbal d’abornement. Il peut être
soit contractuel, soit amiable, soit judiciaire. Le bornage est une opération matérielle qui consiste à
placer des bornes entre les propriétés de manière à formaliser leur emplacement à partir de leurs
lignes divisoires.

II. Le droit de se clore

Le droit de se clore est une émanation d’un autre caractère du droit de propriété qu’est
l’exclusivisme. C’est la possibilité pour un propriétaire d’exclure autrui de sa propriété.
Matériellement, il peut refuser l’accès aux tiers à son terrain. Le droit de se clore est prévu art 663
Cciv, qui dispose que tout proprio dont l’immeuble est situé en ville ou dans un faubourg peut obliger
un voisin à l’édification d’un mur entre leurs fonds respectifs et cela à frais commun.

Le mur sera édifié sur la ligne séparative des fonds et son coût devra se faire à frais commun. Il existe
une hypothèse dans laquelle le propriétaire pourra se défendre du cout du mur, celle où il
abandonne son terrain. En pratique cela arrive si le propriétaire n’a pas les moyens par ex, ou s’en
fiche un peu.

III. Les jours et les vues

Un jour est une ouverture qui laisse passer la lumière pour qu’elle entre dans un bâtiment. La vue est
un regard immédiat sur le fonds d’autrui. Contrairement aux jours qui n’ont pas été règlementés
dans le Cciv, les vues font l’objet d’une législation restrictive et sont envisagées comme une limite à
la propriété foncière.

L’art 680 Cciv précise les distances qui sont données par les articles qui portent sur les vues. il
dispose que la distance se compte depuis le parement extérieur du mur où l’ouverture se fait, et s’il y
a balcon, depuis leurs lignes extérieures, jusqu’à la ligne de séparation des 2 propriétés.

25
L’art 678 Cciv porte sur les vues droites (parallèles au sol), on ne peut avoir une vue sur le fonds
d’autrui s’il n’y a au minimum 19 décimètres. Il y a une exception dans le cas où il y a une servitude
entre le parement et la ligne séparative des fonds.
L’art 679 Cciv porte sur les vues obliques. Dans ce cas, il faut une distance de 6 décimètres.

IV. Les actes de tolérance entre voisins 

Ces actes visent l’hypothèse où un propriétaire est troublé dans l’exercice de son droit de propriété
mais va devoir juridiquement tolérer ce trouble. Les actes dits de tolérance sont des actes accomplis
par une personne, pour son profit, sur la propriété d’autrui, mais de façon non contraire au droit de
propriété. Autrement dit, c’est une atteinte admise juridiquement sur le droit de propriété d’autrui. il
touche ainsi l’absolutisme du droit de propriété.

Le droit admet 2 degrés dans la tolérance :


- Ce qui est toléré entre voisins
- Ce qui est tolérable

a. Le toléré : un acte utile permis par un voisin

Le proprio qui tolère en empiètement sur son fonds n’est pas nécessairement un proprio négligeant.
Cela renvoie au cas où le proprio recherche socialement une bonne entente avec son voisinage. Il
tolère donc tacitement ou explicitement son empiètement, l’autorisation est donc soit expresse soit
tacite. Par exemple, une permission expresse peut être le fait pour le propriétaire peut autoriser son
voisin à puiser de l’eau sur son fonds. Pour un acte tacite, on imagine que le bon père de famille, prit
en situation terrienne, peut admettre de la part de son voisin.
Le fondement de la permission est de l’ordre des « sentiments familiaux, amicaux », au nom de la
courtoisie, de l’altruisme même. Il revient donc au juge du fond de rechercher le contenu de la
permission tacite.

b. Le tolérable : un acte subi par un voisin

L’acte de tolérance est admis par le droit parce qu’il reste dans la mesure du tolérable pour autrui.
L’acte tolérable est donc celui qui n’est pas véritablement permis ou autorisé même tacitement pour
un propriétaire, mais s’impose au propriétaire qui doit le supporter, car l’acte est considéré comme
peu gênant, peu agressif, et ne cause pas ou presque pas préjudice au propriétaire.
Par exemple, le ramassage annuel de quelques olives ou de bois morts sur le terrain d’autrui sont des
actes de tolérance qui causent peut de préjudice au propriétaire, et doivent donc être tolérés.

c. Le régime : un acte contrôlé car dangereux

Ces 2 types d’actes peuvent devenir préjudiciables pour les propriétaires qui l’a subi, parce que ces
actes augmentent en fréquence, en intensité par exemple. Il y a alors un danger juridique qui peut
être mis en exergue pour le propriétaire qu’est l’usucapion. L’usucapion est un mode d’acquisition de
la propriété par la possession. L’acte de tolérance peut se transformer en possession, qui se
transformera en propriété.

Le droit a essayé de maintenir un équilibre entre les actes de tolérance et la protection du


propriétaire de deux manières :

- Le droit va d’abord protéger le tolérant contre les troubles générés par le toléré : art 2262
Cciv, les actes de pure faculté et ceux de simple tolérance ne peuvent fonder ni possession ni
26
prescription. Ainsi, il n’y a pas de prescription acquisitive par la possession, et pas de
prescription acquisitive d’une servitude.

- La protection du toléré : par un acte de tolérance, le toléré n’a aucun droit réel. Si le
propriétaire veut faire cesser l’acte de tolérance, il peut le faire. Le droit protège donc le
toléré vis-à-vis des tiers qui voudraient faire cesser ou qui viendraient à contester l’acte de
tolérance exercé par le toléré. Ici, le toléré va pouvoir intenter contre les tiers une action
possessoire destinée à faire reconnaitre devant les juges l’acte de tolérance.

Chapitre 2. L’exclusivisme
Section 1. Définition

L’exclusivisme signifie qu’un propriétaire jouit d’un véritable monopole sur sa chose (CEDH, 29 avril
1999). Ainsi, le propriétaire a le droit d’interdire sa propriété à autrui. Juridiquement, on protège cet
exclusivisme par le pénal (vol, contrefaçon), ou en civil (action en revendication du droit de
propriété, action en restitution)

Section 2. Illustrations

I. L’empiètement sur le terrain d’autrui

On appelle empiètement le simple débordement d’un ouvrage depuis le fonds d’une personne
donnée jusque sur le fonds appartenant à l’un de ses voisins. S’il y a empiètement, il y a une
expropriation de la partie du terrain qui est empiétée.

Doit-on donner au propriétaire la possibilité juridique d’évincer le tiers de sa propriété ?


La qualification juridique repose-t-elle sur une question d’importance ? de degrés ?
La cause de l’empiètement intervient-elle dans le régime ?

Quelle que soit la cause, l’expropriation est par principe prohibée parce qu’elle porte atteinte à
l’exclusivité du droit de propriété. Ce régime de l’empiètement a quasiment été entièrement
façonnée par la JP :
- Il importe peu que l’empiètement se réalise à la surface, en superficie ou dans le tréfonds du
fonds d’autrui.
- La bonne ou la mauvaise foi du constructeur n’a aucune importance (Civ, 3 ère, 11 juillet 1969)
- Peu importe qu’il y ait faute ou non du tiers, la cause de l’empiètement (Civ, 3 ème, 10
novembre 1992)
- Peu importe que le propriétaire établisse ou non l’existence d’un préjudice
- Peu importe que l’empiètement soit minime ou grand (Civ, 3 ème, 20 mars 2002)

Dès lors qu’il y a donc atteinte à l’exclusivisme du droit de propriété par un empiètement, alors le
propriétaire pourra faire valoir son droit. Tout cela se fonde sur l’art 545 Cciv.

Le propriétaire aura simplement à prouver l’assiette de sa propriété (son titre de propriété), et la


matérialité du débordement de l’ouvrage. En défense, celui qui empiète peut invoquer 3 arguments :
- Le consentement du voisin
27
- L’usucapion : prescription acquisitive immobilière, si celui qui empiète réunit les conditions
de la prescription acquisitive, alors il peut l’invoquer et acquérir la propriété.
- La proportionnalité : on balance le droit de propriété face à l’art 8 CEDH, droit de domicile. La
Cour de cassation, jusqu’à récemment à toujours refuser de faire céder le droit de propriété.
Dans une décision Civ, 3ème, 15 décembre 2006, la Cour de cassation a refusé de transmettre
une QPC sous prétexte que « la propriété n’est pas susceptible de dégénérer en abus »

Civ, 3ème, 19 décembre 2019 : la CA a ordonné la destruction d’une maison et le pourvoi a contesté en
disant qu’il fallait faire un contrôle de proportionnalité au regard de l’art 8 CEDH. Elle casse et annule
les dispositions de l’arrêt en reprochant que le contrôle de proportionnalité n’a pas été fait.

II. La construction sur le terrain d’autrui

Ici, le régime est présent art 555 Cciv. La construction sur le terrain d’autrui c’est lorsque le
constructeur, ou le planteur n’est pas le propriétaire de l’immeuble d’assiette. Il construit son
ouvrage en dehors de tout contrat ou toute décision judiciaire. Il y a un grand principe qui permet au
propriétaire d’obtenir l’acquisition instantanée de l’ouvrage : le principe de l’accession

a. Le principe de l’accession

L’accession est un mode originaire d’acquisition de la propriété, dont l’idée est retranscrite art 546
Cciv : « la propriété d’une chose soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qu’elle
produit et sur tout ce qu’elle unit naturel (…) ».
Autrement dit, le propriétaire du principal devient par l’effet de la loi propriétaire des biens qui s’y
adjoignent ou qui y sont joints. Cette disposition est cependant supplétive de volonté. Le propriétaire
du fonds n’aura pas besoin de manifester une quelconque volonté pour faire intervenir le principe de
l’accession. Cette idée a été déduite par la doctrine de l’alinéa 3 de l’art 555 Cciv que ce principe n’a
pas besoin d’être invoquée pour faire effet. La JP a confirmé la position doctrinale en estimant que
« sauf convention contraire, l’accession joue de plein droit et l’acquisition de la propriété des
constructions n’est pas subordonnée à l’action du propriétaire du sol ou à celle des créanciers de la
construction (Civ, 1ère, 27 mars 2002)

b. Le régime

Une fois que l’accession a opéré de manière automatique, il y a celui qui a construit qui s’est donc
appauvri, et le propriétaire qui s’est enrichi. Pour gérer ces relations, les législateurs a distingué deux
types de construction.

1. Dans l’hypothèse d’ouvrages nouveaux

Art 555 Cciv. Dans ce cas, il faut gérer l’enrichissement de l’un et l’appauvrissement de l’autre.

Si la construction est réalisée avec les matériaux du propriétaire du fonds, alors le législateur a posé
une présomption d’appartenance au propriétaire du fonds. Cette présomption est posée art 553Cciv.
Quand les constructions/plantations ont été faites par un tiers avec des matériaux/plans lui
appartenant, alors l’art 555 Cciv distingue selon que le constructeur était de bonne ou de mauvaise
foi. La bonne foi est définie art 550 Cciv lorsque le constructeur ignore qu’il ne construit pas sur sa
propriété, et a contrario mauvaise foi quand il sait qu’il ne construit pas sur sa propriété. L’idée
générale est de dire que le constructeur de bonne foi mérite davantage de protection que le
constructeur de mauvaise foi.

28
S’il est de bonne foi, le proprio de l’immeuble devra conserver l’ouvrage construit, et ne pourra pas
exiger du constructeur qu’il détruise cet ouvrage à ses propres frais. Le propriétaire pourra soit
conserver l’ouvrage, soit le détruire mais à ses frais.
L’art 555 Cciv prévoit donc que le proprio de l’immeuble d’assiette devra rembourser le constructeur
de la plus faible des 2 sommes entre soit la plus-value apportée par l’ouvrage au fonds, soit une
indemnité à hauteur du cout de d’ouvrage des matériaux et de la main d’œuvre.

Si le constructeur est de mauvaise foi, alors le propriétaire du fonds aura le choix entre soit :
- Imposer au constructeur de détruire son ouvrage à ses propres frais
- Conserver l’ouvrage et verser une indemnité qui correspond à la + faible des 2 sommes entre
la plus-value apportée par l’ouvrage du fonds, soit le cout des matériaux et main d’œuvre.
Il peut faire le choix de lui-même, ou les juges peuvent le faire à sa place (Civ, 3 ème, 17 juillet 1996)

Pour le constructeur, il peut toujours invoquer la proportionnalité. Par exemple, Civ, 3 ème, 17 mai
2018, action en destruction la Cour de cassation fait prioriser le droit de propriété, mais effectue
quand même un contrôle de proportionnalité.

2. Dans l’hypothèse d’impenses

Les impenses sont des réparations faites hors contrat sur un bien appartenant à autrui. Leur régime
échappe à l’art 554 et suivants Cciv, et se retrouve dans la JP.
La JP n’a pas fait la distinction entre la bonne ou mauvaise foi du constructeur, mais définie le régime
des impenses en fonction de leur nature. Il faut donc d’abord qualifier l’impenses.

Il y a 3 types d’impenses :
- Les impenses nécessaires : travaux que le propriétaire du bien aurait lui-même certainement
exposé (travaux de sauvegarde de la valeur du bien). Les dépenses générées par le
constructeur ouvrent un droit à remboursement intégrale du réparateur.
- Les impenses utiles : travaux qui augmentent objectivement la valeur du bien (ex : isolation,
ravalement de façade, chauffage). Le propriétaire du bien concerné doit remboursement au
réparateur dans la même mesure que s’il conserve un ouvrage nouveau (soit plus-value, soit
main d’œuvre et matériaux)
- Les impenses somptuaires : exposées à raison de la seule fantaisie du constructeur
(changement de peinture, travail de restauration dans un but purement décoratif). Le
propriétaire ne devra aucun remboursement envisageable.

III. La reproduction de l’image du bien d’autrui

Autrui peut-il à sa guise reproduire l’image d’un bien qui ne lui appartient pas ? Le propriétaire a le
droit de s’opposer à la reproduction de l’image de ce bien, au nom de l’exclusivisme du droit de
propriété ?

Le 1er arrêt rendu sur la question est appelé « Café Gondré » du 10 mars 1999 (Civ, 1ère). Le café
Gondré est un immeuble qui commercialise des cartes postales ; un établissement concurrent
commercialise d’autres cartes postales reproduisant le Café Gondré. Le propriétaire du café intente
une action pour interdire la vente de ces cartes postales. Les juges du fond ont estimé que l’image
d’un bien n’étant pas spécialement protégé par la loi, photographier un bâtiment public historique
sans l’accord du propriétaire ne constitue en aucun cas une atteinte au droit de propriété. La Cour de
cassation casse et annule l’arrêt d’appel au vise de l’art 544 Cciv, aux motifs que « l’exploitation du
bien sous la forme de photographie porte atteinte au droit de jouissance du propriétaire. ». On en
conclu 2 choses. La Ccass place la reproduction de l’image d’un bien dans le giron du droit de
29
propriété. Ensuite, le touriste qui voudrait photographier l’immeuble et tous ceux qui ne veulent pas
faire d’exploitation commerciale de l’image ? Donc, la solution est maladroite.

4 ans plus tard, la 2ème Civ de la Ccas est venu totalement contredire le 1 er arrêt. Elle considère que la
motivation de l’arrêt Café Gondré avance comme un motif erroné le droit à l’image serait un attribut
du droit de propriété. Donc les reproductions pour cartes postales ne doivent pas être rangés sous
l’art 544 Cciv (Civ, 2ème, 5 juin 2003).

Enfin, l’arrêt « Hotêl de Girancourt » avec la même espèce que l’arrêt « Café Gondré », en assemblée
plénière, le 7 mai 2004, nous dit 2 choses. Dans un 1 e temps, la Cour de cassation confirme l’arrêt de
2003, donc le propriétaire d’une chose ne dispose pas d’un droit exclusif sur l’image de celle-ci.
Ensuite, « le propriétaire peut toutefois s’opposer à l’utilisation de cette image quand elle lui cause
un trouble anormal ». La Cour de cassation change même de domaine en passant du droit des biens
au droit de la responsabilité civile, en empruntant une notion de « trouble anormal » au concept de
trouble anormal du voisinage. C’est aujourd’hui le fondement retenu quand il y a une reproduction
d’image d’un bien par un tiers.

Chapitre 3. La perpétuité
La perpétuité du droit de propriété signifie que ce droit ne s’éteint pas par le non-usage si le
propriétaire ne jouit pas de son bien ou ne l’utilise pas, il reste quand même propriétaire. Cela est
une exception car en vertu de l’art 2824 Cciv, les actions réelles ou mobilières se prescrits en 5 ans.
Le droit de propriété est imprescriptible. Juridiquement cela signifie que l’action en revendication des
meubles et des immeubles échappent à la prescription extinctive
Civ, 3ème, 5 juin 2002 : la propriété ne se perdant pas par le non-usage, l’action en revendication n’est
pas susceptible de prescription extinctive.

Il y a seulement 2 hypothèses qui peuvent faire échec à l’imprescriptibilité du droit de propriété : la


disparition de la chose et la disparition du droit.

- La disparition de la chose : parce qu’elle est détruite, ce qui donne lieu à une indemnisation
du propriétaire
- La disparition du droit sur la chose : par l’usucapion.

30

Vous aimerez peut-être aussi