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Le Sang Amer de La Déchirure
Le Sang Amer de La Déchirure
Catherine Matha
Dans Psychologie clinique et projective 2006/1 (n° 12), pages 155 à 189
Éditions Érès
ISSN 1265-5449
DOI 10.3917/pcp.012.0155
© Érès | Téléchargé le 17/03/2024 sur www.cairn.info (IP: 88.160.12.141)
Catherine Matha1
Mots clés : Scarification – Adolescence – Bisexualité – Masochisme. © Érès | Téléchargé le 17/03/2024 sur www.cairn.info (IP: 88.160.12.141)
« L’héautontimorouménos »
Baudelaire, Les fleurs du mal.
2. Selon une étude américaine (S. Ross, N. Heath, 2002), elles commencent dans 59% des cas vers 12-
13 ans.
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rapport étroit avec la bisexualité : « La marque sur le corps, égale sur tous
les corps, énonce : tu n’auras pas le désir de pouvoir, tu n’auras pas le désir
de soumission. Et cette loi non séparée ne peut trouver pour s’inscrire qu’un
espace non séparé : le corps lui-même » (P. Clastres, 1974, p. 160). Enoncé
qui nous rappelle le sens que porte le recours ritualisé à la circoncision ou à
l’excision : séparer ce qui est confondu.
Nous voyons là combien la scarification, acte à la fois sadique et
masochiste, de pouvoir et de soumission, est support de symbolisation dans
ces sociétés. Elle porte en héritage cette problématique de l’unité et du
séparé, et nous renvoie à la question de la bisexualité et des enjeux
identificatoires.
On peut ainsi se demander dans quelle mesure l’acte de scarification chez
l’adolescent ne traduit pas l’impossible recours à d’autres formes de
symbolisation proposées par notre société, pour sortir de l’indifférenciation
primaire. Par le recours à un scénario teinté d’archaïsme, il tenterait de
réinventer une forme de rituel de passage, au service du travail symbolique,
mais dans une mise en scène intimiste qui signe la dimension paradoxale4.
Le recours au corps dans un scénario sadomasochiste viserait cependant un
objectif intégratif.
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Puis, dans une note ajoutée en 1927, il expliquait que : « Le Moi dérive en
dernier ressort des sensations corporelles, principalement de celles qui ont
leur source dans la surface du corps5. On peut le considérer comme la
projection mentale de la surface du corps, en plus de le considérer comme
représentant de la superficie de l’appareil psychique » (1923, p. 270).
Les travaux de P. Aulagnier (1985)6 témoignent, depuis, de l’importance
du rôle tenu par les fonctions sensorielles sur « l’activité naissante de
représentation ». La pensée s’enracine dans la sensorialité qui offre un socle,
éprouvé corporel qui permet la construction de représentations mentales.
Cette activité naissante de représentation persiste toute la vie et donne un
« fond représentatif » à partir duquel peuvent se développer les sentiments
narcissiques comme « se sentir bien dans sa peau ». Les diverses formes
d’identification corporelle ne sont cependant jamais acquises définitivement
et sont en interdépendance avec nos expériences de vie. Nos expériences
sensorielles s’ancrent dans nos rencontres avec les objets extérieurs, même
si elles relèvent d’une grande subjectivité attachée au plus intime de ce qui
nous constitue.
La peau occupe une place essentielle dans l’organisation psychique.
Surface cutanée de réceptivité, notamment des empreintes de l’objet par
ailleurs source des sensations, elle se présente comme le contenant de la
sensorialité, reliant tous les autres organes des sens. C’est Esther Bick (1968)
qui a, la première, utilisé l’expression de « peau psychique », désignant par
là une structure psychique destinée à contenir les parties de la personnalité
du nourrisson qui tendraient sans elle à se disperser. L’observation
psychanalytique a montré que l’image du corps constituait une sorte de
scène sur laquelle s’inscrivent les scénarios des relations les plus primitives
de l’enfant avec son entourage. Ce que Geneviève Haag nomme les
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ILLUSTRATION CLINIQUE7
À l’appui du recueil des données d’un bilan psychologique effectué avec
un garçon âgé de 16 ans 6 mois qui se scarifie, nous souhaitons mettre à
l’épreuve ces réflexions.
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Des réflexions qui ont précédé concernant les enjeux mobilisés par les
scarifications, peuvent être retenus deux axes de travail pour aborder la
clinique projective ici présentée :
– l’axe des limites dedans/dehors interrogées très directement par le choix
d’un recours en acte effectué sur les lieux du corps. Au Rorschach, la qualité
de l’ancrage dans la réalité, l’utilisation du blanc dans les réponses, ainsi que
la nature des réponses « peau », traduiront la qualité des enveloppes
corporelles. Au TAT, nous serons particulièrement attentifs aux procédés du
discours utilisés et à leur fonction dans les récits proposés.
– celui des enjeux de la bisexualité, à la fois dans le registre narcissique et
le registre objectal où la question des identifications, on l’a vu, est centrale.
Le concept de « passivité » s’offre comme concept éclaireur et
d’articulation entre ces deux axes.
Eléments d’anamnèse
Quand Julien (16 ans 6 mois) est reçu en évaluation psychologique suite à
une consultation médicale, les troubles du comportement avec scarifications
sont mis au premier plan, associés à d’autres conduites addictives
(alcoolisation et prise de toxiques). Julien évoque ces passages à l’acte
comme des moments où il « disjoncte », selon ses propres termes. Il les
associe cependant à un vécu dépressif important, fait de tristesse, d’idées
suicidaires, voire d’envie de tuer culpabilisée. Il confie ne pas parvenir à
pleurer et trouver dans les scarifications le seul moyen de diminuer ses
tensions internes. Les disputes avec sa mère, qu’il décrit comme impulsive,
sont fréquentes. C’est souvent à la suite d’altercations avec elle qu’il
éprouve la nécessité de se scarifier. Il se décrit beaucoup plus proche de son
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Elle semble en fait avoir peu d’estime pour ses capacités maternelles et
chercher dans son activité professionnelle très investie une source
compensatoire de valorisation narcissique.
Le père fait quant à lui référence à une histoire paternelle conflictuelle, où
il vivait sous la terreur d’un père violent et alcoolique. Les deux parents ont
été suivis antérieurement chacun pour dépression.
Pendant la passation, Julien se montre désireux de bien faire, mais exprime
la difficulté à s’approprier pour lui-même cette démarche évaluative, peu
convaincu de son utilité.
Les limites dedans/dehors
Rorschach
Au Rorschach, la qualité du facteur formel, les banalités, le TRI et le
contenu des réponses forment avec les réponses « peau » des éléments
d’information essentiels sur la qualité du narcissisme et de la représentation
de soi, fortement intriquée à la qualité de la relation à l’objet primaire.
Dans le protocole de Julien, si la production du nombre de réponses est
moyenne, la réactivité fantasmatique au matériel s’exprime à travers la
palette relativement large des déterminants utilisés, illustrant une certaine
vitalité du fonctionnement psychique. Le recours au déterminant purement
formel est peu important (52%) et de médiocre qualité (39%) quand il n’est
pas porté par un mouvement pulsionnel. L’élargissement de ce facteur
(F%él.= 92%) montre un travail de liaison de meilleure qualité
(F+%él.=53%), mais certaines planches réveillent des charges
fantasmatiques difficiles à canaliser (pl. I et pl. pastel). L’ancrage dans la
réalité est fragile.
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Pl. I : « Alors là, ça c’est un monstre. Les oreilles, les yeux, la bouche avec le fond
de la gorge, ressemble à un lapin, un lapin monstre. Sinon, la petite tâche c’est le
nez ». Enquête : « Citrouille d’Halloween. La truffe du lapin, sourire macabre ».
On note ici l’immédiateté de la réponse « monstre » et la centration sur le
« sourire macabre », qui lui confère une intentionnalité mortifère. Les
associations condensent ici : des éléments de l’intériorité (« la bouche avec le
fond de la gorge ») qui peut être représentative d’angoisses primaires de
dévoration orale, mais aussi d’une interrogation sexuelle à l’endroit de
l’image maternelle, évoquant une représentation vaginale déplacée vers le
haut ; et des éléments phalliques (« les oreilles », « le nez », « la truffe »).
Représentation bisexuée non sans résonance avec l’angoisse de castration, le
Ddbl étant interprété comme un nez ou une truffe.
À la planche IX, aux fortes sollicitations régressives, après un temps de
sidération important, l’expression d’un vécu d’impuissance et le passage par
la motricité, Julien propose une figure défensive sympathique du monde
infantile (« Mickey »), porteuse d’attributs phalliques. L’étayage de l’enquête
ouvre sur l’expression d’une hostilité, cependant préservée d’anonymat
(« Quelqu’un »).
Pl. IX : « Oh là là !!! C’est plus dur ! Je ne saurais pas du tout quoi dire ! (il tourne
la feuille) C’est Mickey, les deux yeux, les bras, les grandes oreilles. Oui, c’est
Mickey ». Enquête : « C’est Mickey. Quelqu’un qui n’a pas l’air content…Il a ses
bras comme ça (montre) ».
Planche X, on retrouve la valorisation des attributs sexuels phalliques de
valence narcissique liés à l’image féminine :
Pl. X : « Oh là !! Ça j’ai jamais vu…+++ 20”Ça pourrait être…ah oui, une femme.
Un grand manteau rouge, une écharpe, une tête de poisson. C’est ça, mi-femme, mi-
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Pl. 3BM 7” : « Alors là, ça pourrait, c’est très simple. Quelqu’un qui aurait pas mal
bu, écrasé sur ce banc qui reste comme ça, sans bouger parce qu’il a trop bu ».
Le scénario, restrictif, met en scène un personnage anonyme et non sexué
dans une posture signifiante d’affect (« écrasé ») qui renvoie à l’attaque de
l’enveloppe narcissique, à une représentation narcissique de soi dans un
registre de défaillance, voire de déchéance. Il n’y a pas de représentation de
relation de perte : l’autre est ici balayé de la scène interne. C’est une scène
d’avidité orale insatiable, ressentie en termes de blessure narcissique par un
retournement pulsionnel qui contraint à la passivité.
Cette planche est-elle l’illustration de l’insuffisance du lien à la mère
symbiotique, comme semble en attester le Rorschach et la pl. 13B ? Est-elle
l’illustration d’une attente insatiable à l’endroit du père préœdipien, ce qu’il
nous faut chercher ? Ces deux versants allient-ils leurs effets, favorisant une
relation identificatoire particulière ?
P. Blos (1962) a souligné l’importance de la qualité des éléments
préœdipiens dans la construction psychique du jeune garçon. La figure
paternelle y occupe une place essentielle pour permettre au garçon de sortir
de l’unité symbiotique qu’il partage avec sa mère. Dans le processus de
séparation/individuation, cette figure constitue un arrimage essentiel pour
sortir de la passivité primaire et surmonter le travail de la perte.
L’idéalisation de cette image paternelle sur un mode d’abord dyadique
permet au garçon de consolider son identité générique, sa masculinité, à
travers la concrétude de son pénis.
Le travail d’adolescence doit permettre ensuite la progressive extinction de
ce lien privilégié, ce que F. Pasche (1965) nomme « le sevrage du père ».
Dans ce mouvement, la désidéalisation du père est indispensable, mais
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Pl. 8BM 3” : « Oh là ! » 10” « Alors là, ça pourrait être lui, un enfant, assez jeune,
de mon âge, sûr, responsable de la mort de cet individu qui semble, on ne sait même
pas s’il est mort. Bref, pour une raison ou pour une autre l’a envoyé dans les mains
de ce tortionnaire, pour une histoire d’argent. Les deux tortionnaires ont donné
l’argent pour ce garçon, pour qu’il ramène, pour qu’il subisse un mauvais quart
d’heure, un mauvais traitement. Il a la tête, le regard complice ».
Si l’identification au jeune garçon est immédiate et forte (exclamation,
référence personnelle), la figure paternelle reste anonyme, évoquée sur un
mode un peu péjoratif (« individu ») au service de la mise à distance. La force
de l’agressivité laisse s’exprimer un désir parricide dont le protagoniste
central, qui occupe une position active, porte la responsabilité. L’ouverture
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SUPEA
Service du Pr. Marcelli
Centre Hospitalier Henri Laborit
Boite Postale 587
86021 Poitiers
e-mail : Mathacatherine@aol.com
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Abstract – The bitter blood of the wound. Scarification is a type of acting out
which condenses the problem configuration of the activity/passivity binome in its
double sadistic and masochistic dimension and which orients our thought toward
bisexuality. Through the study of Rorschach and TAT protocols of a 16-year-old
male scarificator, this article proposes to consider the value of this type of act during
adolescence. Our hypothesis is that recourse to scarifications in adolescent boys
might indicate a certain maintenance of infantile bisexuality whose aim is to defuse
castration anxiety and at the same time, to search for a conflictual elaboration by
« putting the feminine to work » through the presentation of a body inscription
which promotes the interiorisation process and symbolization.
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3BM – 7” Alors là, ça pourrait, c’est très simple. Quelqu’un qui aurait pas mal bu,
écrasé sur ce banc, qui reste comme ça, sans bouger parce qu’il a trop bu.
4 – 11” Wahou !! Déjà, derrière, on voit l’image d’une femme nue ou très peu vêtue.
Ça pourrait faire penser à un bordel. La femme fait penser aux années 1930. Le
dessin fait penser à l’univers américain 1930. Et l’histoire : on voit que c’est la
femme qui s’agrippe. Elle voudrait l’empêcher d’aller quelque part et lui, avec son
regard fou, il part pour l’aventure. Il s’en va quoi, voilà, c’est tout.
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6BM – 10” J’ai une idée. Un fonctionnaire qui annonce pendant la première ou la
seconde guerre mondiale que son fils est mort. C’est après la guerre, en fait un
ancien camarade, un ancien ami de fac annonce à sa mère que son fils est mort à la
guerre. Voilà…Il a son chapeau dans les mains « je viens vous annoncer que votre
fils est mort à la guerre honorablement » (très théâtral) Ensuite, la grand mère
regarde, le regard perdu dans le vide par la fenêtre. Oui, c’est tout.
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7BM – 11” On dirait, lui, fait penser au commissaire de police : moustache, âgé, il
a une tête qui a vu pas mal d’horreurs. A côté, ça pourrait être un envoyé, un
politicien, un envoyé de la mafia pour négocier avec le commissaire. Voilà, c’est
tout.
8BM – 3” Oh là ! 10” Alors là, ça pourrait être lui, un enfant, assez jeune, de mon
âge, sûr, responsable de la mort de cet individu qui semble, on ne sait même pas s’il
est mort. Bref, pour une raison ou pour une autre l’a envoyé dans les mains de ce
tortionnaire, pour une histoire d’argent. Les deux tortionnaires ont donné l’argent
pour ce garçon, pour qu’il ramène, pour qu’il subisse un mauvais quart d’heure, un
mauvais traitement. Il a la tête, le regard complice.
11 – 10” C’est quoi ? Ah OK ! Alors il y a une route, un pont gothique, une arche
gothique, une falaise, une immense tour. Il y a des briques qui sont tombées. On
dirait qu’il y a du feu, des formes qui courent, des animaux ou des hommes. Ils ont
l’air pressé, rapide. La forme qui sort dans l’air fait penser à un dragon qui crache
du feu, qui serait poursuivi, en tout cas, très médiéval, le pont gothique, les arches,
c’est très médiéval. Voilà.
12BG – 11” Une barque et un arbre. Apparemment un lac, un ruisseau, non, une
rivière. Le repère amoureux sous cet arbre. Oui, c’est un lieu de rendez-vous, un
repère en tout cas.
13B – 3” On voit un petit enfant assis sous une grande porte, il a l’air triste, pieds
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13MF – 5” Alors, la femme est allongée on ne sait pas qu’elle est morte ou pas, il
détourne, cache son regard, horrible à voir. Sa femme qui est morte. On peut penser
que c’est un tueur. Pas forcément quelqu’un de normal. Il s’est disputé très
violemment. Il a eu une impulsion violente. Peut-être je vais trop vite ? Il se
détourne, il n’ose même pas regarder. Il a eu une pulsion violente. Elle a dû dire
quelque chose, lui a dû réagir violemment, c’est maintenant qu’il se rend compte. Il
ne peut même pas regarder l’acte. Il a honte et peur, peut-être des regrets. S’il l’a
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tuée, ça veut dire qu’il a dû l’aimer. Il doit être quelqu’un pas très stable
psychologiquement. Voilà. La femme est morte, le bras est tombé. C’est sûr elle est
morte. Un autre : ce sont les seins de la femme qui l’ont choqué mais ça m’étonnerait
(il rit) sauf s’il n’est pas très moral, pas au point de détourner le regard (il rit).
19 – Wahou ! 20” Ça fait penser à plusieurs choses. On dirait tout ça c’est une
maison, fenêtre, la cheminée, vent violent et froid dehors. Ou une locomotive, la
cheminée, deux roues au milieu du vent, des nuages. Oui et voilà, une locomotive,
oui. Sinon, je n’ai pas d’histoire à raconter (il rit embarrassé). Voilà.
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