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Entre iatreion et domicile du patient.

Spatialiser la
pratique médicale dans l’Athènes classique
Hélène Castelli
Dans Dialogues d'histoire ancienne 2023/Supplément27 (S 27), pages 191 à 215
Éditions Presses universitaires de Franche-Comté
ISSN 0755-7256
DOI 10.3917/dha.hs27.0191
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Dialogues d’ histoire ancienne, supplément 27, 2023, 191‑215 – CC-BY

Entre iatreion et domicile du patient. Spatialiser la pratique


médicale dans l’Athènes classique

Hélène Castelli
ORCID : 0000-0002-6987-6997
Membre associé au laboratoire ANHIMA, UMR 8210, France
Helene.castelli@univ-paris1.fr
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Introduction
Comment déterminer les lieux de la pratique médicale à Athènes à la période
classique ? L’intérêt d’une telle enquête est double. D’abord, elle contribue à faire sortir
la médecine ancienne de la dimension « hors-sol » où elle peut sembler évoluer. En
effet, dans l’historiographie hippocratique, l’intérêt porté aux concepts médicaux et
aux systèmes de pensée des médecins a tellement pris le pas sur la pratique, les gestes,
la quotidienneté du soin pratiqué sans prétention, que l’on peut avoir l’impression
que la médecine grecque est abstraite, nébuleuse et conceptuelle. En effet, les lieux
concrets dans lesquels s’exerçaient la médecine ont très peu intéressé. Les travaux sur
le cabinet médical sont rares. Dans un article qui lui est consacré, Cécile Nissen dégage
une définition exacte du terme iatreion, à savoir « l’endroit où le médecin pratique son
art », tout en en précisant le fonctionnement1. Pour autant, elle ne s’intéresse pas à la
localisation des cabinets médicaux. Hors d’Athènes, des recherches ont pu concerner
la localisation des domiciles de malades, où les auteurs des traités intitulés Épidémies
indiquent avoir visité leurs patients (à Thasos pendant quatre ans, sur la côte thrace puis
en Thessalie)2. Les remarques des auteurs de ces traités sont également utilisées par les
archéologues qui tentent de comprendre l’organisation urbaine de Thasos à la période
classique3. L’effort est toujours fait en ce sens, jamais dans l’objectif de situer la pratique
médicale dans les lieux précis où elle se déroule. L’auteur d’Épidémies I évoque ainsi
1
Nissen 2010.
2
Robert 1975 ; Jouanna 2014.
3
Par exemple Grandjean 2011.

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son cabinet en début de traité, pour autant personne n’a jamais formulé d’hypothèse
de localisation.
Le second intérêt de cette enquête est d’essayer de situer les activités liées au soin
à l’échelle de la cité. Les circulations des médecins à l’échelle de monde méditerranéen
sont connues : Hérodote évoquait déjà Démocédès de Crotone4, les auteurs des
Épidémies évoquent les cités de Grèce du Nord où ils séjournent. Natacha Massar, dans
son ouvrage sur les médecins de l’époque hellénistique, étudie les médecins itinérants,
plus nombreux encore à cette époque, et explique que les praticiens évoluaient dans
toute une région durant leur carrière, conformément aux réseaux d’échanges entre les
poleis5. Pour les médecins hellénistiques, concourir à des postes de médecins publics
et être recruté dans une autre cité que la sienne générait prestige social, renommée et
revenus importants6. Si ces mobilités de médecins, couplées à celles d’autres travailleurs
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détenant une expertise, ont fait l’objet de recherches, les circulations et l’implantation
des médecins à l’échelle de la cité n’ont pas fait l’objet de travaux spécifiques. L’enquête
se heurte à ces difficultés, auxquelles il faut ajouter le peu de traces archéologiques
que laisse un cabinet médical à la période classique : sans doute aucune, puisque tout
le matériel part avec le médecin, tandis que l’on retrouve des tessons de poterie, des
morceaux de métal ou des pesons pour d’autres artisanats7. En outre, l’activité de
guérison n’est pas l’apanage des médecins grecs. Elle est aussi pratiquée ailleurs, selon
d’autres modalités : dans l’oikos d’abord, où les maîtresses de maison dispensent les
soins quotidiens aux serviteurs8 ; dans des sanctuaires spécialisés ensuite, notamment
ceux d’Asclépios et Amphiaraos. La localisation et la matérialité de ces lieux sacrés ont
été étudiées9 : les sanctuaires ont laissé des vestiges, des stèles gravées, et nous avons des
témoignages précis qui nous décrivent les lieux et leur fonctionnement10.

4
Hérodote, III, 131-138.
5
Massar 2005, p. 285.
6
Massar 2005, p. 286-287.
7
Pour des exemples athéniens de résidus laissés par les ateliers, voir Sanidas 2013 : p. 42-60 pour
les forges aux résidus de bronze, p. 69-102 pour les ateliers de céramiques dans lesquels on retrouve des
fragments de vases et les outils nécessaires, p. 103-105 pour des ateliers textiles, notamment identifiables
aux pesons et aux résidus de tissus.
8
Xénophon, Économique, VII, 37.
9
Par exemple Sineux 2016.
10
Comme celui de Pausanias, II, 27, 3.

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Consciente de l’intérêt mais aussi des difficultés posées par cette entreprise,
j’ai l’occasion d’examiner, pour l’Athènes classique, comment les pratiques de soin
s’inscrivent dans l’espace. Dans les deux premières parties, j’examinerai les sources
d’époque classique concernant les lieux de la pratique médicale dans le monde grec :
d’abord le cabinet médical (I), puis les domiciles des particuliers que le médecin
visite (II). Enfin, j’essaierai de dégager quels éléments peuvent nous permettre d’inscrire
le soin dans l’espace spécifiquement athénien (III).

I- Le iatreion : la vitrine des marchands de guérison


Le local professionnel du médecin grec est le iatreion, ou iètreion chez les auteurs
qui utilisent le dialecte ionien, comme les hippocratiques. Si le terme est souvent
traduit par « officine », il serait plus approprié de le traduire par « cabinet médical11 ».
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Comme l’indique son étymologie, dérivée du verbe iaomai, « soigner » ou « guérir »,
c’est le lieu où des professionnels soignent et parfois guérissent des malades12. Les
médecins auteurs du Corpus hippocratique évoquent ce lieu, et ce principalement dans
deux traités. Le premier est le Kat’iètreion évoqué plus haut, titre traduit par Littré De
l’officine du médecin13. Daté de la fin du ve ou du début du ive siècle avant notre ère14,
rapproché des traités chirurgicaux Des fractures et Des articulations depuis l’Antiquité15,
il aborde sous forme de directives les règles de l’examen et du soin médical dans leur
dimension technique, puis dispense des conseils sur la confection des bandages. Le traité
a été abondamment commenté par Galien16. L’autre traité utile à la connaissance du
iatreion est le Peri iètrou, ou Du médecin17. Ce texte, sans doute plus tardif, est peut-être
11
Nissen 2010, p. 117 écarte les traductions suivantes : « hôpital » est anachronique car les premiers
établissements de ce type apparaîssent dans les dernières décennies du ive siècle de notre ère ; « officine »
renvoie uniquement à l’activité de pharmacie ; « dispensaire » implique des soins délivrés gratuitement
(contra Jouanna 2017, p. 125, pour qui, au contraire, « officine » est une traduction plus appropriée).
12
Le suffixe -eion désignant les lieux où s’exercent les métiers. Sur l’étymologie du terme, voir Van Brock
1961, p. 65.
13
Littré III, p. 272-337.
14
Craik 2015, p. 223. Selon Littré III, p. 268-270, ce texte laconique serait en fait le canevas d’un traité
qu’Hippocrate aurait projeté d’écrire sur le cabinet médical, ou bien le sommaire de ce traité perdu, rédigé
par un disciple. Craik 2015, p. 222 évoque aussi cette possibilité ou celle de la trame préliminaire d’un long
traité chirurgical.
15
Craik 2015, p. 221.
16
Galien, Commentaire à l’Officine du médecin d’Hippocrate, I (Kühn XVIIIb, 630).
17
Littré IX, p. 204-221.

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daté de l’époque hellénistique18. Il reprend les mêmes thématiques et donne des conseils
similaires en matière d’aménagement du local, de disposition des instruments et des
bandages. Les préceptes moraux qui y sont aussi développés rappellent ceux d’écrits
plus anciens, comme le Serment. Cette proximité en fait un ouvrage éclairant en ce qui
concerne la pratique médicale d’époque classique et les Hippocratisants s’accordent
sur le fait que les injonctions données étaient également valables à la période qui nous
intéresse19. Deux autres traités hippocratiques mentionnent un iatreion sans le décrire :
Épidémies I (1, 1, l. 25) et De l’usage des liquides (1, 1 Joly).
Pour l’époque classique, nous trouvons des mentions de cabinets médicaux chez
des auteurs non médecins : Platon, Eschine ou Xénophon évoquent de tels lieux20. De
même, on en retrouve dans des inscriptions concernant l’exercice des médecins publics,
par lesquelles nous savons que l’activité qui s’y pratiquait était rémunérée : mais ces
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attestations sont plus tardives, les trois inscriptions étant datées du iie siècle avant notre
ère, concernant Délos et Cos21.
Nous disposons également d’une représentation de cabinet médical sur le petit
aryballe à figures rouges dit du « peintre de la Clinique » si l’on se réfère à l’artiste
ou « Peytel » du nom de son donateur, conservé au musée du Louvre et restaurée en
201022 : l’espace de soin et la salle d’attente sont identifiables sur ce petit vase à huile ou
parfum daté de 480-470 avant notre ère et d’origine attique. Selon Véronique Dasen :
Cette scène exceptionnelle a probablement été réalisée sur demande pour agrémenter une
pharmacie. Les médicaments sont peut-être évoqués par l’aryballe lui-même qui pouvait
contenir une huile aux qualités thérapeutiques23.
Le iatreion avait deux fonctions principales pour le médecin : dispenser des
soins et former des apprentis. Reprenons ces différentes fonctions une par une, sans
parler uniquement d’Athènes mais de plusieurs cités pour lesquels nous disposons
d’informations sur les cabinets médicaux de la période classique.

18
Jouanna 2017, p. 567-568 ; Craik 2015, p. 165.
19
Nissen 2010, p. 123.
20
Platon, Lois, I, 646c et 6, 720c ; Eschine, Contre Timarque, 124 ; également Xénophon, Helléniques,
II, 1, 3.
21
Nissen 2010, p. 119-120.
22
Voir plus bas la restitution de son décor p. 199 et une de ses faces p. 195
23
Dasen 2011, p. 10.

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1- Dispenser des soins


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Figure 1 : Aryballe du Peintre de la Clinique conservée au Louvre (inv. CA 1989-CA 2183). Hauteur : 8,8 cm ; diamètre : 8,6 cm.
Crédits/source : 2011 RMN-Grand Palais (musée du Louvre)/Stéphane Maréchalle. Permalien : https://collections.louvre.fr/
ark:/53355/cl010250724.

La pose de bandages et de dispositifs permettant le soin des fractures devait


être l’activité principale pratiquée au iatreion, vue l’importance proportionnelle des

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passages concernés par ce thème dans De l’officine du médecin24. Sur l’aryballe du peintre
de la Clinique, deux des patients de la salle d’attente arborent d’ailleurs un bandage
cruciforme mis en valeur par un rehaut blanc25, l’un au mollet, l’autre au bras. Le vase
montre le médecin s’apprêtant à pratiquer une saignée sur un patient qui lui tend le bras.
En effet, les incisions thérapeutiques, abondamment évoquées dans les traités comme
l’un des gestes les plus pratiqués par les médecins, pouvaient être réalisées au iatreion.
En outre, dans les Helléniques, Xénophon indique un cas d’affection oculaire traité dans
le cabinet médical de Chios26. Le traité hippocratique Du médecin évoque également
les yeux affaiblis des patients, qu’une clarté trop intense pourrait affecter encore
davantage27. On y soignait donc les pathologies oculaires. Enfin, dans les Lois, Platon
évoque le fait que certains vont au iatreion pour boire des potions (pharmakoposia)28.
En bref, en l’absence d’hôpital à l’époque classique, le iatreion faisait figure de lieu
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ressource où devaient pouvoir être traitées à peu près toutes les affections sans gravité, à
conditions que le patient soit en mesure de s’y rendre ou de s’y faire transporter29.
Afin de permettre aux soignants de travailler de manière optimale, le cabinet
médical était méthodiquement agencé. Au iie siècle de notre ère, Galien indique que les
iatreia étaient « de grandes maisons, ayant de grandes portes, recevant pleinement la
lumière30 ». À la période classique, le local est certainement assez vaste. En effet, si l’on
synthétise les renseignements donnés par les Hippocratiques, il doit comprendre au
moins trois espaces : un premier dévolu au soin, un autre réservé à l’attente des patients
et un dernier consacré au stockage de tout le matériel et de toutes les préparations
nécessaires. On peut penser que le cabinet médical occupait une partie d’un plus grand
ensemble immobilier, la maison du médecin. Hippocrate écrit ainsi :

24
Dans le traité De l’officine du médecin qui comprend vingt-cinq parties, les parties 7 à 25 sont
consacrées aux bandages et dispositifs de réduction des luxations et fractures.
25
Visible en 1906 (voir Pottier 1906, p. 152) mais plus aujourd’hui : Dasen 2016, p. 12.
26
Xénophon, Helléniques, II, 1, 3.
27
Hippocrate, Du médecin, II, invite à éviter au cabinet πάντως μὲν οὖν τοιαύτην τὴν αὐγὴν μάλιστα
φευκτέον, δι’ἣν ξυμβαίνει τοὺς ὀφθαλμοὺς νοσέειν, « Par-dessus tout, il faut fuir cette clarté par laquelle il
arrive aux yeux de devenir malades » (Littré IX, p. 207) […] πᾶσα δ’ἱκανὴ πρόφασις ἀσθενέοντας ὀφθαλμοὺς
ἐπιταράξαι, « Et toute cause suffit pour troubler des yeux faibles » (Littré IX, p. 209).
28
Platon, Les lois, I, 646c.
29
Nissen 2010, p. 125.
30
Galien, Commentaire à l’Officine du médecin d’Hippocrate, I, 8 (Kühn XVIIIb, 678).

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Δεῖ δὲ πρῶτον μὲν τόπον ἔχειν οἰκεῖον, ἔσται δὲ τοῦτο ἐὰν μήτε πνεῦμα ἐς αὐτὸν παραγινόμενον
ἐνοχλῇ μήθ’ἥλιος ἢ αὐγὴ λυπέῃ31
D’abord il faut avoir un lieu commode ; et il y aura commodité si le vent n’y pénètre ni ne
gêne, si le soleil ou l’éclat du jour ne causent du malaise32

Le lieu choisi par le médecin pour abriter son cabinet devait donc être
oikeion. Littré traduit ce terme par « commode ». Cet adjectif signifie littéralement
« domestique », « de la maison », « familier »33. Le seul espace composant le
iatreion dont parlent les auteurs de traités médicaux est la pièce qui sert à l’examen et
aux opérations, puisque c’est dans cette pièce qu’ils vont pouvoir exercer leur savoir-
faire. Cet espace, peut-être une pièce séparée, est décrit dans De l’officine du médecin : il
requérait suffisamment de place pour que tiennent ensemble, au minimum, le médecin,
son patient sur la table d’opération ou sur un siège, un ou deux assistants, un ou
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plusieurs apprentis éventuels. D’autre part, les instruments devaient être présents dans
cet espace, placés « de manière à ne pas gêner l’opérateur, et à être saisis sans difficulté,
à la portée de la main qui opère34». Sur l’aryballe de la Clinique, le peintre a pris soin
de faire figurer des ventouses accrochées au mur en arrière-plan : leur valeur est aussi
figurative que symbolique35. Le médecin tient un scalpel et un bassin métallique a été
disposé au sol. Concernant encore l’espace opératoire, les hippocratiques insistent sur
la lumière nécessaire, qui doit être à la fois naturelle et artificielle, mais dans tous les cas
parfaitement contrôlée, le médecin étant attentif à son orientation, de face ou de côté.
La partie opérée devait être éclairée par la lumière la plus vive possible, de face :
Αὐγέης μὲν οὖν δύο εἴδεα, τὸ μὲν κοινὸν, τὸ δὲ τεχνητόν. Τὸ μὲν οὖν κοινὸν οὐκ ἐφ’ἡμῖν· τὸ δὲ
τεχνητὸν, καὶ ἐφ’ἡμῖν. Ὧν ἑκατέρου δισσαὶ χρήσιες, ἢ πρὸς αὐγὴν, ἢ ὑπ’αὐγήν. Ὑπ’αὐγὴν μὲν
οὖν ὀλίγη τε ἡ χρῆσις, καταφανής τε ἡ μετριότης. Τὰ δὲ πρὸς αὐγὴν ἐκ τῶν παρεουσέων, ἐκ
τῶν ξυμφερουσέων αὐγέων, πρὸς τὴν λαμπροτάτην τρέπειν τὸ χειριζόμενον· πλὴν ὁκόσα λαθεῖν
δεῖ, ἢ ὁρῇν αἰσχρόν· οὕτω δὲ τὸ μὲν χειριζόμενον ἐναντίον τῇ αὐγῇ, τὸν δὲ χειρίζοντα, ἐναντίον

31
Hippocrate, Du médecin, II, l. 4-6.
32
Littré IX, p. 207.
33
Chantraine 2009, p. 754.
34
Παρὰ τὸ ἐργαζόμενον δὲ τοῦ σώματος. Hippocrate, De l’officine du médecin, V, l. 1-3.
35
Sur les images, la ventouse constitue un attribut du médecin depuis le ve siècle avant notre ère. On
en aperçoit également deux sur une stèle funéraire originaire d’Asie mineure et datée d’environ 500 avant
notre ère qui représente un médecin et son patient (Bâle, Antikenmuseum, inv. n° BS 236, à voir dans
Dasen 2011, p. 8). Massar 2015, p. 20, explique que le choix de cet objet par les imagiers est peut-être lié
à sa forme aisément reconnaissable et son caractère moins menançant que d’autres instruments médicaux,
comme le scalpel.

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τῷ χειριζομένῳ, πλὴν ὥστε μὴ ἐπισκοτάζειν· οὕτω γὰρ ἂν ὁ μὲν δρῶν ὁρῴη, τὸ δὲ χειριζόμενον
οὐχ ὁρῷτο36.
De la lumière, il y a deux espèces : la lumière commune, la lumière artificielle. La lumière
commune n’est pas à notre disposition ; la lumière artificielle est à notre disposition. On
se sert de chacune de deux façons, ou en face, ou de côté. De côté, l’usage en est restreint,
et le degré d’obliquité se détermine sans difficulté. Quant à la lumière de face, il faut
tourner, vers la plus vive des lumières présentes, si elle est la plus utile pour le cas actuel, la
partie sur laquelle on opère ; mais, quand il s’agit d’une partie qu’il faut cacher ou que la
décence ne permet pas de montrer, elle doit être placée en face de la lumière, l’opérateur
doit se mettre en face de l’opéré, sans cependant se faire ombre à lui-même ; de cette façon,
l’opérateur verra, et la partie opérée ne sera pas vue37.

Il ressort de ce passage un souci de bonne visibilité de l’opérateur, nécessaire


pour des médecins aussi attentifs à tous les indices disponibles lors de l’examen de leurs
patients mais permettant aussi une vision optimale du champ opératoire38. Le praticien
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joue sur les deux types de lumière mais aussi sur la direction de celles-ci, de face ou
oblique. Si de la lumière naturelle pénètre par une porte ou une fenêtre, cela implique
que la table ou le siège où se place le patient soit relativement mobile, afin de s’adapter à
la luminosité changeante durant la journée : nous conservons en tête la phrase de Galien
sur les grandes ouvertures39. On déduit également que le travail en iatreion s’effectuait
de jour. Mais l’évocation de la lumière artificielle renvoie au fait que cet espace devait
être équipé de torches ou de lampes à huiles efficaces40. Rien n’est indiqué dans les textes
sur les éventuelles urgences qui pouvaient survenir de nuit mais on peut les imaginer.
En outre, la préoccupation de ce qui concerne la pudeur des patients est frappante. Le
passage laisse entendre que dans le cas de certaines opérations des parties génitales ou
anales, le médecin doit penser le placement de chacun de telle manière qu’il soit le seul
à voir l’organe opéré. La partie doit se dérober à la vue d’éventuels assistants, disciples
ou proches du patient mais également à ce dernier lui-même afin de préserver sa pudeur.
Un véritable souci du confort du patient se fait jour et nous renseigne sur le fait que
l’espace opératoire au sein du iatreion était certainement une pièce à part ou au moins
séparée de la salle d’attente par des tentures.

36
Hippocrate, De l’officine du médecin, III.
37
Littré III, p. 279-281.
38
Damas 2012, p. 24.
39
Voir note 29.
40
Des torches selon Jouanna 2017, p. 126 ; des torches ou des lampes à huile selon Damas 2012, p. 26,
qui invite à prendre en compte le dégagement de chaleur de ces dispositifs.

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Un passage du traité Du médecin apporte des précisions supplémentaires à


propos de l’éclairage : une trop grande luminosité, comme le plein éclat du jour,
est certes optimale pour l’opérateur, mais peut causer un malaise de l’opéré41. Deux
éléments peuvent être déduits de cette remarque. D’abord, le passage est à mettre en
relation avec l’extrait des Helléniques de Xénophon précédemment évoqué : les iatreia
étaient les lieux où les médecins soignaient les pathologies oculaires. Dans ces cas, une
lumière excessive reçue de face pouvait causer de la gêne et « fatiguer une vue affaiblie »,
comme le mentionne l’auteur du traité42. En outre, il est possible que cette remarque
vienne sanctionner des pratiques de soin existantes en extérieur, à l’air libre, sous un
portique ou dans la cour du iatreion, que l’auteur du traité juge moins professionnelles.
Ainsi, le iatreion est un espace pensé pour optimiser et faciliter le geste guérisseur
du praticien, rendre son apprentissage possible, tout en gardant à l’esprit le bien-être du
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patient, d’autant plus capital dans un contexte où l’anesthésie n’existe pas. Les traités
ne décrivent ni l’arrière-boutique, ni la salle d’attente. Pour une représentation de cette
dernière, nous ne disposons que de l’aryballe de la Clinique :

Figure 2 : Restitution du décor de l’aryballe Peytel.


Crédits/source : G. S. da Fonseca, début du xxe siècle.

En plus du médecin et son patient, le vase présente cinq autres hommes. Si


l’on exclut le nain, leur barbe, leur bâton et leur himation renvoient à l’accoutrement
41
Hippocrate, Du médecin, II, l. 10-11.
42
Hippocrate, Du médecin, II, l. 10-11.

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traditionnel des citoyens. La scène est exclusivement masculine43. Plus largement, il


est à noter qu’aucune mention de femme visitant un iatreion n’a été recensée, ni dans
le Corpus hippocratique (toutes les femmes sont soignées chez des particuliers) ni
d’autres textes. Cette absence des femmes fait du iatreion un lieu masculin, où le « club
d’hommes44 » qu’est la cité peut se réunir dans l’entre-soi. D’ailleurs, l’aryballe joue
sur une confusion entre espace médical et lieu de rencontre/drague entre hommes : le
nain porte sur son dos l’un des cadeaux les plus précisés de l’homoérotisme masculin, le
lièvre45 ; tandis qu’un autre homme sent une fleur de manière rêveuse, comportement
qui peut surprendre de la part d’une personne souffrante. Dans la céramique attique
et dans la poésie, ce motif évoque l’échange amoureux46. Cette ambiance particulière
est accentuée par la présence des deux Éros volants sur l’épaule de l’aryballe, qui
s’apprêtent à couronner le médecin47. On remarque l’expression souriante de l’homme
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qui pourtant s’apprête à subir une saignée. Notons également que cet homme s’est
complètement déshabillé et porte son manteau replié sur son épaule, façon de s’exhiber
pendant le soin. La manœuvre avait peut-être pour but de ne pas tacher son vêtement,
mais on ne peut s’empêcher de penser à la coupe de Sosias, sur laquelle figurait aussi une
certaine exhibition (non nécessaire au soin) des parties intimes de Patrocle, au moment
où Achille soignait son bras48.
Une autre attestation du iatreion comme lieu de rencontre entre hommes
se trouve dans le Contre Timarque. L’orateur Eschine, au moment de dresser une
biographie dudit Timarque, indique :

43
Dasen 2011, p. 10 fait le même constat.
44
Marrou 1965, p. 63.
45
Comme cadeau dans le cadre homoérotique, voir Reshetnikova 2019. Pour Samama 2003, il est
destiné à payer le médecin en nature. Il y aurait un jeu sur ce présent. Pour Véronique Dasen, il pourrait
être un des assistants du médecin, qui récupère un paiement en nature pour le médecin : Dasen, King 2008,
p. 101 ; Dasen 2011, p. 10 affirme que cela pourrait être un patient qui paye en nature. Il est infibulé, ce qui
montre son statut d’homme libre.
46
Kéi 2022, p. 266-278 montre que la céramique attique à figures rouges intègre la fleur aux
représentations des relations pédérastiques : c’est généralement l’éraste qui tend une fleur à l’éromène dans
une dialectique de don/contre-don amoureux.
47
Dasen 2011, p. 10 : « Sur l’épaule du vase, deux Erotes volants tiennent des couronnes végétales qui
pourraient évoquer les succès du médecin » et 2016, p. 12.
48
Kylix à figures rouges originiare de Vulci (Étrurie) et datée d’environ 500 avant notre ère. Référence :
musée d’État, Berlin, inv. F2278.

DHA, supplément 27, 2023 – CC-BY


Entre iatreion et domicile du patient. Spatialiser la pratique médicale dans l’Athènes classique 201

Οὗτος γὰρ πάντων μὲν πρῶτον, ἐπειδὴ ἀπηλλάγη ἐκ παίδων, ἐκάθητο ἐν Πειραιεῖ ἐπὶ
τοῦ Εὐθυδίκου ἰατρείου, προφάσει μὲν τῆς τέχνης μαθητής, τῇ δ’ἀληθείᾳ πωλεῖν αὑτὸν
προῃρημένος, ὡς αὐτὸ τοὖργον ἔδειξεν. Ὅσοι μὲν οὖν τῶν ἐμπόρων ἢ τῶν ἄλλων ξένων ἢ τῶν
πολιτῶν τῶν ἡμετέρων κατ’ἐκείνους τοὺς χρόνους ἐχρήσαντο τῷ σώματι Τιμάρχου, ἑκὼν καὶ
τούτους ὑπερϐήσομαι, ἵνα μή τις εἴπῃ ὡς ἄρα λίαν ἅπαντ’ἀκριϐολογοῦμαι49·
Timarque, au sortir de l’enfance, commença par s’établir au Pirée dans la maison de santé
d’Euthydique, sous prétexte d’étudier la médecine ; en réalité, il avait l’intention de se
vendre, comme les faits l’ont prouvé par la suite. À cette époque, en grand nombre, des
marchands, des étrangers, même des citoyens d’Athènes ont obtenu ses faveurs50.

Dans ce passage, afin de servir son argumentation sur la jeunesse dépravée


de Timarque, alors apprenti médecin dans un cabinet du Pirée, Eschine introduit
volontairement une confusion entre les patients du iatreion et les hommes de statut
divers – étrangers de passage au Pirée et citoyens – clients ou amants du jeune homme51.
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Nick Fisher souligne qu’Eschine n’a cependant aucun nom de client à fournir52.
Il est remarquable que ni ces aspects, ni même la dimension de sociabilité de
leur cabinet, ne soient jamais abordés par les auteurs du Corpus hippocratique. Quand
ils évoquent leur lieu de travail, c’est, comme nous l’avons dit, pour en exposer les
caractéristiques techniques : aménagement, lumière, matériel. Si la dimension sociale
du lieu ne leur échappe certainement pas, ils ne l’évoquent jamais, comme si elle n’avait
pas sa place dans leurs traités. C’est d’ailleurs le cas : leurs écrits ont pour objectif
d’affirmer leur posture professionnelle, tout en étant techniques, à une époque où
leur profession se constitue et où il leur faut encore acquérir une légitimité qu’aucun
diplôme ni prestige ne leur confère encore.
De ces deux documents, nous pouvons tirer une autre représentation : le iatreion,
présenté par les médecins comme un lieu de savoir et de savoir-faire, est aussi un lieu
de rencontre non mixte entre hommes de tous âges et de tous statuts sociaux. Pour
affermir son accusation, Eschine enfonce le clou, au passage 123-12453, en évoquant
volontairement dans le même passage un iatreion et un porneion et en expliquant

49
Eschine, Contre Timarque, 40.
50
Martin, de Budé 1973, p. 33.
51
La réalité de ces accusations est impossible à prouver : Fisher 2001, p. 169 indique qu’aucun témoignage
n’est produit à ce propos.
52
Fisher 2001, p. 169. Fisher indique qu’Euthydicos, également évoqué par Démosthène, était
certainement un citoyen athénien.
53
Voir le passage cité p. 205.

DHA, supplément 27, 2023 – CC-BY


202 Hélène Castelli

que les échoppes/ergastèria sont interchangeables. Le glissement qui s’opère n’a rien
d’innocent : à en croire l’auteur, seul un changement d’activité au sein de l’échoppe
différencierait un cabinet médical d’une maison de passe. Même le personnel est le
même : qu’il soit apprenti médecin ou prostitué, c’est toujours Timarque qui officie.
L’aryballe de la Clinique constitue peut-être, de manière humoristique, une critique de
la posture des médecins qui érigent le iatreion en lieu de savoir médical par excellence.
Le vase présente plutôt un lieu de séduction où les hommes patientent avec langueur
pour se faire examiner et soigner par un jeune médecin au profil avantageux. Dès
lors, comment relier ces représentations à d’éventuelles pratiques effectives ? On peut
penser que les salles d’attente des iatreia centraux, à proximité de l’agora, pouvaient
aussi remplir cette fonction de sociabilité entre hommes, partagée avec celle d’autres
commerces (tels que les barbiers et les boutiques54). Le nombre plus restreint de
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personnes, l’homogénéité masculine du groupe, la dimension plus confidentielle de ces
lieux pouvaient favoriser l’émergence de rapports de séduction.

2- Former des apprentis


Outre les soins, le iatreion était également le lieu par excellence de la formation
des apprentis, comme le cas des brèves études de Timarque nous l’avait fait pressentir.
Les apprentis du médecin s’exerçaient principalement au iatreion, tandis que leur
maître, lui, alternait présence sur place et tournées chez d’autres patients. Nous tirons
ces informations de deux passages tirés du traité Du médecin :
Τὰ τοίνυν ἐν ἰητρείῳ θεραπευόμενα σχεδὸν μανθανόντων ἐστίν55
Or, ce qui se traite dans l’officine est à peu près du ressort de l’étudiant56.

Τὰ μὲν οὖν κατ’ἰητρεῖον ἀναγκαῖα ὄργανα, καὶ περὶ ἃ δεῖ τεχνικὸν εἶναι τὸν μανθάνοντα,
ταῦτ’ἐστίν57
Tels sont les instruments nécessaires dans l’officine et au maniement desquels l’élève doit
être exercé58.

54
Voir l’article de L. Fauchier dans ce volume, p. 167-190.
55
Hippocrate, Du médecin, II, l. 3-4.
56
Littré IX, p. 207.
57
Hippocrate, Du médecin, IX, l. 1-2.
58
Littré IX, p. 215 et 216.

DHA, supplément 27, 2023 – CC-BY


Entre iatreion et domicile du patient. Spatialiser la pratique médicale dans l’Athènes classique 203

Si le cabinet est le lieu privilégié de la formation pratique des apprentis, c’est parce
que les patients qui y viennent souffrent d’affections considérées comme relativement
bénignes telles que celles que nous avons précédemment recensées : ophtalmies, luxations
et fractures. Certains viennent ingérer un médicament ou faire faire une saignée. Dans
tous les cas, les patients sont valides puisqu’ils ont pu se rendre au cabinet. Aucun n’est
en danger de mort. Les jeunes peuvent ainsi se « faire la main » sur eux, sans trop
risquer l’erreur médicale grave. Il n’est pas possible de savoir si les apprentis pouvaient
exercer seuls quand le médecin s’absentait, ou s’ils ne pouvaient s’entraîner que sous sa
supervision. Une autre question se pose concernant les apprentis : habitaient-ils dans
le iatreion, dans le logement du médecin propriétaire des lieux ? Eschine explique par
plusieurs allusions que Timarque n’exerçait pas seulement dans le cabinet d’Euthydicos
mais vivait également avec le médecin, qui connaissait la réalité de ses activités : cela
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revient à accuser ce dernier d’être un souteneur59. Sans rentrer dans le débat propre
à ce procès, cela nous apprend qu’il est considéré comme normal et banal que le
médecin vive sur son lieu de travail. Dans d’autres secteurs économiques, nous savons
qu’habitations et ateliers étaient liés : Démosthène avait ainsi hérité d’une maison avec
esclaves travaillant dans l’atelier attenant60. D’ailleurs, les recherches archéologiques
ont établi que la plupart des échoppes étaient en fait une partie d’une oikia61. Le
59
Fisher 2001, p. 169. Eschine, Contre Timarque, 40, écrit : ἐκάθητο ἐν Πειραιεῖ ἐπὶ τοῦ Εὐθυδίκου ἰατρείου,
« s’établit au Pirée dans le iatreion d’Euthydique ». Le verbe κάθημαι peut signifier « demeurer ». Cet
élément est renforcé plus bas, quand Eschine reproche à Timarque d’avoir quitté le iatreion pour aller
vivre chez un certain Misgolas : Contre Timarque, 41 : Οὗτος αἰσθόμενος ὧν ἕνεκα τὰς διατριβὰς ἐποιεῖτο
Τίμαρχος οὑτοσὶ ἐπὶ τοῦ ἰατρείου, ἀργύριόν τι προαναλώσας ἀνέστησεν αὐτὸν καὶ ἔσχε παρ’ἑαυτῷ, εὔσαρκον
ὄντα καὶ νέον καὶ βδελυρὸν καὶ ἐπιτήδειον πρὸς τὸ πρᾶγμα ὃ προῃρεῖτο ἐκεῖνος μὲν πράττειν, οὗτος δὲ πάσχειν,
« Misgolas, comprenant bien pour quelles raisons notre Timarque séjournait dans la maison de santé, l’en
fit sortir en y mettant la somme nécessaire et prit chez lui cet adolescent bien en chair, d’âge tendre, plein de
vice, apte, en un mot, à se prêter aux mœurs que l’autre se proposait de pratiquer avec lui ». On peut enfin
lire plus loin (passage 42) : Καὶ οὐκ ᾐσχύνθη ὁ μιαρὸς οὗτος ἐκλιπὼν μὲν τὴν πατρῴαν οἰκίαν, διαιτώμενος δὲ
παρὰ Μισγόλᾳ, « Cet infâme n’eut pas honte d’abandonner sa maison pour aller habiter chez Misgolas ».
60
Démosthène, Contre Aphobos, I, 24 : « Tout le monde reconnait que ces ouvriers faisaient partie de la
succession, qu’ils étaient chez nous et qu’ils rapportaient à mon père, comme je l’ai dit, douze mines par
an » (trad. Gernet 1954, p. 39).
61
Camp 1986, p. 148 ; voir aussi l’article de Tsakirgis 2005 ; Esposito, Sanidas 2012, p. 18 : « Artisanat
et habitat sont très souvent liés », ce qui remet en question le concept de quartier « artisanal » ou
« spécialisé » ; enfin Sanidas 2013, p. 113-116, pour une synthèse sur le lien entre l’atelier et l’espace
domestique. Notons également une inscription de la seconde moitié du ive siècle avant notre ère : un bail
du Pirée (IG II2 2496) qui met en location un ensemble constitué par un atelier, une habitation attenante
et un petit local.

DHA, supplément 27, 2023 – CC-BY


204 Hélène Castelli

Contre Timarque suggère également que certains de ces apprentis pouvaient également
demeurer sur place, mais était-ce le cas si leur relation était purement professionnelle ?
Nous avons dégagé les différentes fonctions du iatreion. Ce lieu n’était cependant
pas le seul où s’exerçait l’art médical : les médecins se déplaçaient régulièrement chez
leurs patients.

II- SOS Iatroi. Médecins grecs à domicile


À Athènes comme ailleurs, quand le médecin n’était pas à son cabinet, il était en
tournée chez ses patients. Certaines maladies ou incapacités empêchaient les patients
de se rendre au iatreion.

1- Dans quels cas le médecin se déplace-t-il ?


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Les traités Épidémies I et Épidémies III forment un seul et même ouvrage62,
attribué à l’Hippocrate historique dans l’Antiquité, et sont datés d’environ 410 avant
notre ère63. L’auteur est un médecin qui a exercé à Thasos, sur la côte thrace et en
Thessalie. Ils présentent quarante-deux « fiches de malades » et évoquent les noms
de vingt-six autres individus souffrants. Dans les fiches de malades, dont le réalisme
et la précision ont été soulignés par les commentateurs depuis l’Antiquité, il décline
de manière systématique des éléments d’identité de la personne souffrante, la cité et
parfois l’adresse64 où il l’a visitée (jamais le iatreion). Il décrit ensuite l’évolution de ses
symptômes et les éventuels traitements reçus jour après jour.
Au début du traité, l’auteur décrit la situation sanitaire d’un automne passé à
Thasos. Il expose les maladies qui sévirent en masse à ce moment-là : des causus/kausoi
non mortels65 ainsi que des gonflements aux oreilles, non mortels eux aussi66. Après avoir
exposé ces deux maladies qu’il présente comme bénignes puisque n’ayant occasionné la
mort de personne, le médecin rédacteur indique :
62
Jouanna 2016, p. XXV fait ce rapprochement d’une commune présence du « je » et de l’identité d’un
vocabulaire spécifique.
63
Jouanna 2014, p. 40 ; Jouanna 2016, p. CXXII-CXXV.
64
Voir Robert 1975.
65
Il s’agit de maladies accompagnées d’une forte fièvre. Hippocrate, Épidémies I, 1, 5 Jouanna.
66
Il s’agit d’oreillons. Voir Jouanna 2016, note 6 p. 121 et note 9, p. 125-126. Eparmata de para ta
wta : Hippocrate, Épidémies I, 1, 6 Jouanna. Il est précisé que la plupart de ces malades restaient debout et
n’avaient pas de fièvre. Surtout chez des adolescents et jeunes hommes qui fréquentaient la palestre et le
gymnase.

DHA, supplément 27, 2023 – CC-BY


Entre iatreion et domicile du patient. Spatialiser la pratique médicale dans l’Athènes classique 205

Τὰ δ’ἄλλα, ὅσα κατ’ἰητρεῖον, ἀνόσως διῆγον67


Quant à toutes les autres maladies qui relèvent de l’officine du médecin, les habitants
passèrent la période sans en être atteints68.

Il semble que les maladies bénignes qu’il vient d’évoquer entrent donc dans la
catégorie des maux traités au iatreion. Il ne donne aucun exemple ni nom précis, il ne
présente pas de fiche de malade car il opère une synthèse de ce qu’il a vu en cabinet.
En effet, les personnes atteintes de fièvre légère ou d’une oreille gonflée ont très
certainement pu se rendre au iatreion. Il expose ensuite la maladie plus grave qui a
frappé la population à partir de l’été : la phtisie, affection qui se manifeste par une fièvre
le plus souvent mortelle qui a, dit-il, fait s’aliter celles et ceux qui en souffraient69.
Plus loin, il réalise une première série de fiches de malades pour exposer des cas
précis de gens atteints70. Le cas de ladite « Femme de Philinos » est présenté de la
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manière suivante :
Ἐν Θάσῳ Φιλίνου γυναῖκα, θυγατέρα τεκοῦσαν, κατὰ φύσιν καθάρσιος γενομένης, καὶ τἄλλα
κούφως διάγουσαν, τεσσαρεσκαιδεκαταίην ἐοῦσαν μετὰ τὸν τόκον, πῦρ ἔλαϐε μετὰ ῥίγεος71
À Thasos, la femme de Philinos, après avoir accouché d’une fille, alors que l’évacuation
(lochiale) s’était produite conformément à la nature et qu’elle avait supporté tout le reste
aisément, quand elle arriva au quatorzième jour après l’accouchement, fut prise d’une
fièvre ardente avec frisson72.

La maladie dure ensuite 20 jours et trouve une issue fatale puisque la femme
décède. Le médecin décrit son état au début, puis aux jours 6 (délire), 7 (soif ), 8 (frisson,
fièvre, insomnie), 9 (convulsions), 10, 11 (sommeil mais délire, urines anormales), 14
(retour du délire), 17 (perte de la voix) et 20 (mort). On peut raisonnablement penser
que ces jours correspondent aux visites du médecin. D’ailleurs, au 11e jour, concernant
l’aspect des urines, il note :

67
Hippocrate, Épidémies I, 1, 8.
68
Jouanna 2016, p. 3.
69
Hippocrate, Épidémies I, 2, 1 Jouanna. Symptômes décrits en 3 : fièvres avec frissons (puretoi), sueurs,
refroidissement des extrémités, ventre troublé.
70
Hippocrate, Épidémies I, 27, 1 Jouanna.
71
Hippocrate, Épidémies I, 27, 4 Jouanna.
72
Jouanna 2016, p. 45.

DHA, supplément 27, 2023 – CC-BY


206 Hélène Castelli

τοιαῦτα οὔρει, οἷα κἀγὼ εἶδον73


Telles étaient les urines qu’elle émettait, que moi-même j’ai vu74.

Cette allusion renforce l’hypothèse. D’autres extraits de traités hippocratiques


évoquent de manière claire le déplacement chez des particuliers75. La visite à domicile
est donc destinée à des patients alités, non en état de se déplacer. Elle est sans doute
plus chère. Si les femmes ne se déplacent pas au iatreion76, elle les concerne aussi de
manière plus systématique. Le médecin est sans doute accompagné d’un apprenti ou
d’un secrétaire, qui prend des notes pendant les examens, notes qu’il reprendra lors de
l’écriture du traité.

2- S’aliter chez autrui


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En outre, les patients n’étaient pas forcément alités chez eux mais ils pouvaient
séjourner, le temps de leur maladie ou de leur incapacité, chez un tiers. Dans Épidémies I,
nous trouvons par exemple les extraits suivants qui renvoient à cette pratique :
Οἷον Ἡρακλείδῃ, ὃς κατέκειτο παρὰ Ἀριστοκύδει· καίτοι τουτῳ καὶ ἐκ ῥινῶν ᾑμοῤῥάγησε, καὶ
ἡ κοιλίη ἐπεταράχθη, καὶ τὰ κατὰ κύστιν ἐκαθήρατο, ἐκρίθη εἰκοσταῖος77
Comme chez Héracleidès, qui était couché chez Aristocydès ; effectivement pour ce
malade, il y eut à la fois hémorragie par le nez, dérangement du ventre et purgation par la
vessie ; il fut jugé le vingtième jour78

Οἷον Βίωνι, τῷ παρὰ Σιληνὸν κατακειμένῳ79


Comme pour Bion, le malade alité chez Silènos80

73
Hippocrate, Épidémies I, 27, 4 Jouanna.
74
Jouanna 2016, p. 47.
75
Hippocrate, Épidémies VI, 8, 30 : « Le lendemain j’allais dans sa maison » (Littré V, 354, 13) ;
Épidémies IV, 25 : « Le mari de la femme en couches, celui qui habitait près du gardien du grenier à blé,
l’ictérique, que je visitai au septième jour, mourut le huitième » (Littré V, 166, 5) ; Épidémies V, 53 : « Elle
en était au quatrième jour quand je la visitai » (trad. J. Jouanna, 2000, p. 24-25) ; Prorrhétique, II, 1 (Littré
IX, 6, 7).
76
Aucune source ne l’atteste en tout cas.
77
Hippocrate, Épidémies I, 15, 1.
78
Jouanna 2016, p. 22.
79
Hippocrate, Épidémies I, 15, 2.
80
Jouanna 2016, p. 22.

DHA, supplément 27, 2023 – CC-BY


Entre iatreion et domicile du patient. Spatialiser la pratique médicale dans l’Athènes classique 207

Φανοκρίτῳ, ὃς κατέκειτο παρὰ Γνάθωνι τῷ γναφεῖ81


Comme Phanocrite qui était couché chez Gnathon, le foulon82

Pourquoi s’aliter chez autrui ? On peut penser que l’hôpital n’existant pas,
s’installer chez un tiers est parfois le seul moyen pour certains d’être nourris, toilettés
et soignés, tout en demeurant « en observation » sous le regard de quelqu’un
qui convoque le médecin quand la maladie semble s’aggraver ou que de nouveaux
symptômes apparaissent.
Le Contre Conon de Démosthène nous livre une autre possibilité. Le locuteur,
victime d’une agression, témoigne ainsi :
Συνέϐη τοίνυν, ὦ ἄνδρες δικασταί, καὶ Εὐξίθεον τουτονὶ τὸν Χολλῄδην, ὄνθ’ἡμῖν συγγενῆ, καὶ
Μειδίαν μετὰ τούτου ἀπὸ δείπνου ποθὲν ἀπιόντας περιτυχεῖν πλησίον ὄντι μοι τῆς οἰκίας ἤδη,
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καὶ εἴς τε τὸ βαλανεῖον φερομένῳ παρακολουθῆσαι, καὶ ἰατρὸν ἄγουσιν παραγενέσθαι. οὕτω
δ’εἶχον ἀσθενῶς ὥστε, ἵνα μὴ μακρὰν φεροίμην οἴκαδ’ἐκ τοῦ βαλανείου, ἐδόκει τοῖς παροῦσιν
ὡς τὸν Μειδίαν ἐκείνην τὴν ἑσπέραν κομίσαι, καὶ ἐποίησαν οὕτω. λάϐ’οὖν καὶ τὰς τούτων
μαρτυρίας, ἵν’εἰδῆθ’ὅτι πολλοὶ συνίσασιν ὡς ὑπὸ τούτων ὑϐρίσθην83.
Par hasard, juges, Euxithéos que voici, du dème de Cholléides, un parent à nous, revenait
d’un banquet avec Midias : ils me rencontrèrent quand j’étais déjà près de chez moi, ils
m’accompagnèrent pendant qu’on me portait au bain, et ils étaient là quand on amena le
médecin. J’étais tellement faible qu’au sortir du bain les assistants jugèrent prudent de ne
pas me porter aussi loin que chez moi, mais de me faire coucher, ce soir-là, chez Midias :
ainsi fut fait. Prends leurs témoignages : vous allez voir que beaucoup de gens ont pu
constater les violences que j’avais subies84.

Dans ce passage85, le plaignant vient d’être tabassé dans la rue et il est récupéré
par des parents qui jugent plus prudent, vu son état, de le déposer plus près, chez un
certain Midias, où le médecin viendra l’examiner.

3- Des visites qui suscitent la méfiance ?


Les visites médicales au domicile pouvaient poser des problèmes moraux :
en effet, il s’agissait d’un inconnu qui pénétrait le domicile alors que le maître ou la

81
Hippocrate, Épidémies I, 21, 3.
82
Jouanna 2016, p. 32.
83
Démosthène, Contre Conon, 10.
84
Gernet 1959, p. 105-106.
85
Merci à Nicolas Siron qui me l’a indiqué.

DHA, supplément 27, 2023 – CC-BY


208 Hélène Castelli

maîtresse des lieux étaient en situation de vulnérabilité. Les consultations à domicile


pouvaient donc générer une certaine méfiance, dont témoigne par exemple les fables
d’Ésope. Plusieurs mettent en scène des médecins effectuant des visites à domicile86,
mais celle qui témoigne le plus de la méfiance légitime envers ceux-ci, tout en la tournant
en dérision, est la fable 87 :
Γυνὴ πρεσϐῦτις τοὺς ὀφθαλμοὺς νοσοῦσα ἰατρὸν ἐπὶ μισθῷ παρεκάλεσεν. ὁ δὲ εἰσιών, ὁπότε
αὐτὴν ἔχρισε, διετέλει ἐκείνης συμμυούσης καθ’ἓν ἕκαστον τῶν σκευῶν ὑφαιρούμενος. ἐπεὶ
δὲ πάντα ἐκφορήσας κἀκείνην ἐθεράπευσεν, ἀπῄτει τὸν ὡμολογημένον μισθόν· μὴ βουλομένης
δ’αὐτῆς ἀποδοῦναι ἤγαγεν αὐτὴν ἐπὶ τοὺς ἄρχοντας. ἡ δὲ ἔλεγε τὸν μὲν μισθὸν ὑποσχέσθαι,
ἐὰν θεραπεύσῃ αὐτῆς τὰς κόρας, νῦν δὲ χεῖρον διατεθῆναι ἐκ τῆς ἰάσεως ἢ πρότερον· « τότε μὲν
γὰρ ἔϐλεπον », ἔφη, « πάντα τὰ ἐπὶ τῆς οἰκίας μου σκεύη, νῦν δ’οὐδὲν ἰδεῖν δύναμαι. » οὕτως
οἱ πονηροὶ τῶν ἀνθρώπων διὰ πλεονεξίαν λανθάνουσι καθ’ἑαυτῶν τὸν ἔλεγχον ἐπισπώμενοι87.
Une vieille femme, qui avait les yeux malades, fit appeler, moyennant salaire, un médecin.
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Il vint chez elle, et à chaque onction qu’il lui faisait, il ne manquait pas, tandis qu’elle
avait les yeux fermés, de lui dérober ses meubles pièce à pièce. Quand il eut tout emporté,
la cure aussi étant terminée, il réclama le salaire convenu. La vieille se refusant à payer, il
la traduisit devant les magistrats. Elle déclara qu’elle avait bien promis le salaire, s’il lui
guérissait la vue ; mais que son état, après la cure du médecin, était pire qu’auparavant.
« Car, dit-elle, je voyais alors tous les meubles qui étaient dans ma maison ; à présent au
contraire je ne puis plus rien voir. » C’est ainsi que les malhonnêtes gens ne songent pas
que leur cupidité fournit contre eux la pièce à conviction88.

C’est certainement en partie pour lutter contre cette mauvaise réputation et se


légitimer comme des professionnels dotés d’une éthique irréprochable que le Serment
hippocratique a été établi et diffusé89. Il y est indiqué :
Ἐς οἰκίας δὲ ὁκόσας ἂν ἐσίω, ἐσελεύσομαι ἐπ’ὠφελείῃ καμνόντων, ἐκτὸς ἐὼν πάσης ἀδικίης
ἑκουσίης καὶ φθορίης, τῆς τε ἄλλης καὶ ἀφροδισίων ἔργων ἐπί τε γυναικείων σωμάτων καὶ
ἀνδρῴων, ἐλευθέρων τε καὶ δούλων90
Dans toutes les maisons où je dois entrer, je pénétrerai pour l’utilité des malades, me
tenant à l’écart de toute injustice volontaire, de tout acte corrupteur en général, et en
particulier des relations sexuelles avec les femmes ou les hommes, libres ou esclaves91.

86
Par exemple, les fables 133 et 249.
87
Ésope, Fables, 87.
88
Chambry 2018, p. 41.
89
Le Serment pourrait dater de la fin du ve-début du ive siècle avant notre ère pour Craik 2015, p. 149
et pour Jouanna 2018, p. XXXIX.
90
Hippocrate, Serment, VI.
91
Jouanna 2018, p. 4.

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Entre iatreion et domicile du patient. Spatialiser la pratique médicale dans l’Athènes classique 209

Après ce panorama qui nous a permis d’apercevoir les principaux lieux de


la pratique médicale à Athènes comme ailleurs, nous pouvons à présent poursuivre
l’enquête pour établir si les pratiques de soin des iatroi d’Athènes sont repérables dans
l’espace.

III- Peut-on localiser les cabinets médicaux dans l’Athènes classique ?


Peut-on localiser des iatreia à Athènes ? Dans les textes, on recense une seule
attestation d’un cabinet médical ayant existé et sa localisation : celui d’Euthydicos,
au Pirée, connu grâce à Eschine, dans le Contre Timarque. Dans le passage 40, c’est
la mention d’un médecin athénien du ive siècle qui retient particulièrement notre
attention, vue sa rareté. Ce professionnel n’apparaît cependant pas seulement sous la
plume d’Eschine. Un autre témoignage de son existence se trouvait quelques années
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auparavant chez Démosthène : dans le Contre Bœotos, 33, il évoque aussi le médecin
Euthydicos, qui aurait été mêlé à des litiges entre citoyens. Les dates de rédaction de
ces discours (généralement quelques mois avant la tenue du procès) seraient 350-349
pour le Contre Bœotos92 et 346 pour le Contre Timarque93. On peut ainsi en déduire que
ce cabinet était actif dans ces années 350 avant notre ère. Ajoutons que Démosthène
évoque un autre médecin du Pirée dans le Contre Apatourios, un certain Eryxias94.
Dans un autre passage du Contre Timarque, Eschine procédait à une comparaison
entre les différents type d’ergastèria :
Οὐ γὰρ τὰ οἰκήματα οὐδ’αἱ οἰκήσεις τὰς ἐπωνυμίας τοῖς ἐνοικήσασι παρέχουσιν, ἀλλ’οἱ
ἐνοικήσαντες τὰς τῶν ἰδίων ἐπιτηδευμάτων ἐπωνυμίας τοῖς τόποις παρασκευάζουσιν. Ὅπου
μὲν γὰρ πολλοὶ μισθωσάμενοι μίαν οἴκησιν διελόμενοι ἔχουσι, συνοικίαν καλοῦμεν, ὅπου δ’εἷς
ἐνοικεῖ, οἰκίαν. Ἐὰν δ’εἰς ἓν δήπου τούτων τῶν ἐπὶ ταῖς ὁδοῖς ἐργαστηρίων ἰατρὸς εἰσοικίσηται,
ἰατρεῖον καλεῖται· ἐὰν δ’ὁ μὲν ἐξοικίσηται, εἰς δὲ τὸ αὐτὸ τοῦτο ἐργαστήριον χαλκεὺς
εἰσοικίσηται, χαλκεῖον ἐκλήθη, ἐὰν δὲ κναφεύς, κναφεῖον, ἐὰν δὲ τέκτων, τεκτονεῖον· ἐὰν δὲ
πορνοϐοσκὸς καὶ πόρναι, ἀπὸ τῆς ἐργασίας εὐθὺς ἐκλήθη πορνεῖον95.
En effet, ce ne sont pas les habitations ni les lieux de séjour qui donnent leur nom à ceux
qui y résident, mais bien plutôt ces derniers qui imposent aux locaux les dénominations
attachées à ce qu’ils y font. Ainsi, nous appelons maison de rapport l’habitation que se
partagent plusieurs locataires différents, et maison tout court celle que se partage une
seule famille. Ou bien, qu’un médecin vienne s’établir dans une de ces échoppes qui

92
Gernet 1957, p. 14-15.
93
Martin, de Budé 1973, p. 16.
94
Démosthène, Contre Apatourios, 18. Pour Fisher 2001, p. 169, ce serait un métèque.
95
Eschine, Contre Timarque, 123-124.

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210 Hélène Castelli

bordent nos rues, celle-ci prend le nom de cabinet médical. Et si, dans ce même endroit,
le médecin étant parti, s’établit un forgeron, le local s’appelle alors forge, ou atelier de
foulon si c’est un foulon qui l’occupe ou atelier de charpentier si c’est un charpentier ;
enfin, quand des prostituées viennent s’installer avec leur patron, la maison prend aussitôt
le nom de mauvais lieu96.

D’après l’accusateur, les locaux abritant différentes échoppes donnant sur rue
– ergastèria – n’ont pas en eux-mêmes une vocation prédéterminée, qui leur vaudrait
d’avoir été conçus de telle ou telle manière d’un point de vue architectural. Au
contraire, ils sont polyvalents et les activités menées en leur sein sont interchangeables :
un forgeron, un foulon ou un tenancier de porneion (« bordel ») peuvent récupérer
l’échoppe dans laquelle exerçait un médecin, et inversement.
Le cabinet médical a des points communs avec la forge et le fouloir. D’abord,
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la dimension artisanale et technique de l’activité qui s’y pratique. Les médecins ne
refusent d’ailleurs pas cette dimension de leur métier, puisqu’ils se qualifient eux-mêmes
régulièrement de cheirotechnai et développent de manière très précise la dimension
technique de leur pratique, leur savoir-faire, où leur main entraînée est l’instrument le
plus déterminant. Ensuite, le travail en équipe, au sein de laquelle existe une hiérarchie.
Le médecin travaille avec des auxiliaires et des apprentis, groupe dont fait d’ailleurs
partie Timarque au début. Ces éléments se retrouvent à leur manière dans le porneion
ou « bordel », peu surprenant au Pirée puisqu’il se retrouve fréquemment dans les
ports97. Comme au iatreion, on y pratique une activité impliquant le corps, un travail
en équipe (Eschine utilise bien un pluriel : pornai), soumis à une hiérarchie (Eschine
évoque le patron des prostituées, le pornoboskos). Le porneion est finalement l’échoppe
dont le iatreion est le plus proche car en plus de ces points, il implique l’accueil de
clients.
Outre le caractère théorique de la démonstration d’Eschine sur le fait que ce
sont les activités qu’on pratique qui permettent de nommer une échoppe, mettre en
relation ce passage avec la jeunesse piréenne présumée de Timarque, qu’il évoquait
précédemment, renvoie au paysage urbain effectif constitué par les échoppes du Pirée
au ive siècle, que nous connaissons par d’autres sources. Nous savons ainsi que s’y
trouvaient à cette époque l’atelier de boucliers de Pasion98, celui appartenant à l’orateur

96
Martin, de Budé 1973, p. 61.
97
Étienne 2004, p. 111.
98
Démosthène, Pour Phormion, 4.

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Entre iatreion et domicile du patient. Spatialiser la pratique médicale dans l’Athènes classique 211

Lysias et son frère Polémarque99, les ateliers d’armurerie et d’ébénisterie du père de


Démosthène100, et un porneion101.
L’archéologie ne nous apporte pas davantage de renseignements et ne nous
permet pas de localiser précisément ces différents établissements au Pirée. Aucun
bâtiment de la période classique ne correspond avec certitude à l’une d’entre elles102, et
pour cause, si rien ne permettait dès le ive siècle, architecturalement, de les distinguer.
Nous savons que le plan urbain du Pirée suivait des principes de régularité avec des
rues de huit ou quinze mètres qui constituaient un damier, pensées par le philosophe-
urbaniste Hippodamos de Milet, comme à Thourioi. Nous connaissons seulement
la direction de quelques rues, le revêtement au sol et la présence de canalisations
d’argiles103.
On peut tout de même formuler des hypothèses concernant la localisation des
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iatreia du Pirée. Selon Robert Garland, les porneia devaient s’étendre à la périphérie du
centre urbain, à l’image de l’Asty, où plusieurs de ces établissements ont été découverts
à proximité de la porte du Dipylon104. Certains cabinets médicaux pouvaient également
se trouver dans ces quartiers périphériques, tandis que d’autres devaient être plus
centraux. On peut raisonnablement envisager plusieurs emplacements dans les quartiers
situés autour de l’agora du Pirée. Du côté de l’Emporion, ils bénéficiaient alors de leur
localisation sur un axe intensément fréquenté. Du côté de la colline de Mounichie,
l’implantation leur garantissait une clientèle aisée105.
Concernant l’Asty, on peut appliquer le même principe et imaginer que les
cabinets médicaux devaient se trouver dans des rues plutôt fréquentées, mêlées à des
échoppes en tous genres. Confirmant les dires de Lysias selon qui les boutiques les plus

99
Lysias, Contre Ératosthène, 17-20.
100
Démosthène, Contre Aphobos, I, 24.
101
Isée évoque une sunoikia qui était la propriété d’Euktémon de Kephisia, un de ses clients qui reconnaît
devant les juges en avoir fait un porneion : Isée, Succession de Philoctémon, 19.
102
Étienne 2004, p. 111.
103
Étienne 2004, p. 100-102 et 111. Garland 1987, p. 143 indique qu’on n’a retrouvé aucune sunoikia au
Pirée mais qu’elles devaient exister.
104
Garland 1987, p. 143. Il indique p. 145 que des fountain houses ont été installées au Pirée à la fin du ve
siècle (après 430).
105
Garland 1987, p. 142.

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212 Hélène Castelli

fréquentées sont celles qui sont le plus près de l’agora106, l’archéologie a ainsi établi la
présence d’ateliers dans un vaste espace situé au sud-ouest, tout à l’est et au nord-est
de celle-ci107. Il est très possible que des cabinets médicaux se trouvaient également à
proximité, profitant de la fréquentation des rues qui constituaient des axes de circulation
pour les citoyens et les métèques. En outre, une douzaine de maisons ont été fouillées dans
le quartier de l’agora d’Athènes108, considéré comme peu désirable par les classes les plus
aisées. Ce sont des maisons modestes bâties sur des modèles divergents (contrairement
à Olynthe ou au Pirée109) mais toutes constituées de petites pièces donnant sur une
cour centrale. Plusieurs iatreia étaient certainement intégrées à de telles maisons. Ces
iatreia devaient être plus exigus que les importants locaux lumineux, dotés de grandes
ouvertures, décrits ultérieurement par Galien. Barbara Tsakirgis, partant des fouilles
archéologiques de trois maisons/ateliers proches de l’agora, décrit des édifices qui ne
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comprennent aucune ou une seule fenêtre pour des raisons de sécurité. L’éclairage
devait donc y être surtout artificiel. Les quartiers riches abritaient certainement les
médecins les plus chers et prestigieux, dans des maisons plus luxueuses. On peut penser
que des iatreia de prestige et de confort variables quadrillaient la ville.

Conclusion
Au terme de l’enquête, plusieurs éléments se font jour. D’abord, dès la période
classique, les lieux de la pratique médicale font l’objet de discours et d’images, émanant
des principaux intéressés, les médecins, mais aussi du public. Celui-ci fait preuve
d’une certaine agency et ne se soumet pas à l’ordre médical que les auteurs des traités
hippocratiques appelleraient de leurs vœux : l’usage du iatreion peut être détourné en
lieu de sociabilité, voire de rencontres masculines. La possession du iatreion ne semble
pas être porteuse d’un prestige particulier : elle semble faire partie de la pratique
normale de la médecine, couplée avec les visites à domicile. Ces dernières ont lieu chez
les patients ou chez des tiers chez qui ils résident le temps de la maladie. Elles sont
destinées à des patients atteints de lourdes pathologies, la plupart étant en fait des
mourants, même si certains réchappent. Les visites sont régulières, accompagnées de
prise de notes tournées prioritairement vers de l’observation.
106
Lysias, Pour l’invalide, 20.
107
Camp 1986, p. 135-139, évoque des ateliers de poterie, des forges, des ateliers de sculpture, des
tavernes, des cordonniers et des fabriques de chaussures.
108
Tsakirgis 2005, p. 67.
109
Tsakirgis 2005, p. 69.

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Entre iatreion et domicile du patient. Spatialiser la pratique médicale dans l’Athènes classique 213

À Athènes, il faut pour le moment faire le deuil de données précises, à part dans
le cas d’un établissement du Pirée. Les iatreia étaient certainement à la fois partout
et nulle part, à l’image des médecins de l’époque classique, occupés à légitimer et à
consolider leur corps professionnel, soucieux d’être à la fois invisibles car banals et
omniprésents car indispensables. L’activité médicale ne laisse pas de trace après son
passage et il y avait peut-être un important turn-over, d’où nos difficultés à la localiser
précisément. Les axes les plus fréquentés étaient sans doute les lieux les plus prisés pour
installer un cabinet, mais la réputation du praticien jouait aussi dans la constitution
d’un commerce prospère.

Bibliographie
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