Vous êtes sur la page 1sur 1

§ 3 - La < société > à < mission >

117. Le concept d'entreprise à < mission > d'inspiration américaine (V. Flexive Purpose Corporation) a été
introduit dans notre droit des < sociétés > par la loi no 2019-489 du 22 mai 2019 (E. COHEN,
La < société > a < mission >, la loi PACTE, enjeux pratiques de l'entreprise réinventée, 2019, éd.
Hermann). Le décret no 2020-1 du 2 janvier 2020 relatif aux < sociétés > à < mission > qui en complète les
dispositions est d'application immédiate (sur lequel V. X. DELPECH, D. actu. 14 janv. 2020). Initialement,
l'intitulé qui avait été adopté était même celui de : « < société > à objet social étendu », l'intention
demeurant de protéger les dirigeants d'une < société > qui souhaitent favoriser des objectifs écologiques ou
humanitaires dans la réalisation de l'objet social sans s'abstraire de tout contrôle, mais en bridant les
critiques des associés spéculateurs peu sensibles à un intérêt transcendant comme certains fonds de
pension. La < société > assouplit ainsi le corset de la spécialité légale, sans s'y soustraire. Pourtant, le
clivage avec des groupements désintéressés s'estompe. Or, paradoxalement, seuls certains types de
groupements sont aptes à adopter ce statut, les < sociétés > commerciales, les mutuelles et les unions
à < mission >, à l'exclusion des < sociétés > civiles et des groupements d'intérêt économique
(E. COHEN, op. cit., p. 81).
118. L'article L. 210-10 inséré du code de commerce dispose qu'une < société > peut faire publiquement
état de la qualité de < société > à < mission > lorsque les conditions suivantes sont respectées :
1o Ses statuts précisent une raison d'être, au sens de l'article 1835 du code civil ;
2o Ses statuts précisent un ou plusieurs objectifs sociaux et environnementaux que la < société > se donne
pour < mission > de poursuivre dans le cadre de son activité ;
3o Ses statuts précisent les modalités du suivi de l'exécution de la < mission > (…). Ces modalités prévoient
qu'un comité de < mission >, distinct des organes sociaux prévus par le présent livre et devant comporter au
moins un salarié, est chargé exclusivement de ce suivi et présente annuellement un rapport joint au rapport
de gestion (…) à l'assemblée chargée de l'approbation des comptes de la < société >. Ce comité procède à
toute vérification qu'il juge opportune et se fait communiquer tout document nécessaire au suivi de
l'exécution de la < mission > ;
4o L'exécution des objets sociaux (sic) et environnementaux (…) fait l'objet d'une vérification par un
organisme tiers indépendant, selon des modalités et une publicité définies par décret en Conseil d'État.
Cette vérification donne lieu à un avis joint au rapport mentionné au 3o ;
5o La < société > déclare sa qualité de < société > à < mission > au greffier du tribunal de commerce, qui la
publie, sous réserve de la conformité de ses statuts aux conditions mentionnées (…), au registre du
commerce et des < sociétés >, dans des conditions fixées par les articles R. 123-53, 12o, et R. 123-222, 1o,
du code de commerce.
119. Ainsi, des termes employés par le législateur se manifeste une intégration plus nette de valeurs
supérieures à la seule finalité spéculative de l'article 1832 du code civil par une meilleure symbiose avec
l'objet social (B. DONDERO, Vers la society-association, BJS 2012. 1 ; B. FLEURY, B-corp à la
française, l'intérêt social enfin réconcilié, BJS 2017. 647 ; A. COURET et B. DONDERO, op. cit., no 129
s. ; M. COZIAN, A. VIANDIER et Fl. DEBOISSY, op. cit., no 86 s. ; Ph. MERLE et
A. FAUCHON, op. cit., no 70). En effet, le 2o de l'article L. 210-10 du code de commerce impose que les
statuts d'une < société > à < mission > « précisent un ou plusieurs objectifs, sociaux et environnementaux
que la < société > se donne pour < mission > de poursuivre dans le cadre de son activité ». C'est un degré
supplémentaire qui est donc franchi et qui élargit la spécialité légale de la < société > (V. supra, no 118) et
par conséquent les pouvoirs des dirigeants, tout en limitant la mise en cause de leur responsabilité au cas
d'opération non directement spéculative, mais en lien avec l'activité réellement exercée par un objet social
aménagé. D'où, initialement, l'intitulé d'objet social élargi qui avait été suggéré et qui transparaît par
inadvertance au 4e de l'article L. 210-10 à propos de l'exécution des « objets sociaux ». En contrepartie de
cette extension des pouvoirs des dirigeants par rapport aux actionnaires ou associés, un double contrôle est
impérativement institué à l'article L. 210-10, 3o et 4o, du code de commerce, avec la mise en place d'un
comité de < mission > ou pour les < sociétés > qui emploient moins de cinquante salariés, un simple

« référent » (C. com., art. L. 210-12 ) distinct des organes sociaux classiques ; renforcée par l'exigence
d'une vérification par un organisme indépendant. Ce qui conduit à une organisation complexe que ne
compensent pas nécessairement les avantages à attendre de la qualité « claironnée »
de < société > à < mission > (A. COURET et B. DONDERO, op. cit., no 133). Ce paradoxe se prolonge
avec les dispositions minutieuses du décret no 2020-1 du 2 janvier 2020 s'agissant de la qualité et

Vous aimerez peut-être aussi