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Notre Octave évoque Gavrinis dans son roman en partie autobiographique Sébastien
Roch (1890), rédigé peu de temps après son séjour au château de Kérisper en 1887-1888, près
d'Auray. À propos du golfe du Morbihan « cette petite mer intérieure », il écrit : « une
multitude d'îles la parsèment ; celles-ci cultivées comme l'îIe aux Moines ; celles-là sauvages
comme Gavrinis, où les temples druidiques érigent leurs blocs de granit barbare ».
Si Apollinaire n'a connu Gavrinis que par « des représentations figurées », on peut
imaginer aisément que Mirbeau a pu visiter le célèbre cairn. Le site préhistorique, dont les
gravures ont été découvertes en 1832 et rendues célèbres en 1835 par Prosper Mérimée en sa
qualité d'inspecteur des Monuments historiques, est très proche de Kérisper. Et on sait, par sa
correspondance, que Mirbeau a navigué dans le golfe, sur le bateau d'un pêcheur du coin, en
particulier avec son ami Paul Hervieu, venu lui rendre visite.
Au sujet des gravures de Gavrinis, Apollinaire y voit du « bertillonnage », renvoyant à
Alphonse Bertillon (1853-1914), célèbre criminologue français, qui intègre, dans son système
de mesures anthropométriques des délinquants, les empruntes digitales, rappelant au poète les
gravures des blocs de pierre verticaux du cairn.
Mirbeau, quant à lui, évoque des « temples druidiques », sacrifiant à la « celtomanie »
de son époque. Or, les Celtes et leurs druides ne sont arrivés en Armorique qu'au premier
millénaire avant J.-C, alors que le cairn de Gavrinis a été érigé en 4000 avant J.-C...
Anachronisme mirbellien de 3000 ans, comme dans Astérix !
Mais qu'importe ! Si Apollinaire n'a pas débarqué à Gavrinis, Mirbeau, lui, en voisin, a
pu y mettre le pied...
Jean-Paul KERVADEC
Sources :