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Résumé de la fiche
Les nausées et les vomissements sont le résultat de la mise en jeu d’un réflexe complexe dont le centre effecteur (centre du
vomissement) situé dans la formation réticulée reçoit des afférences des organes viscéraux (nerf vague (X) et nerf
glossopharyngien (IX)), du système vestibulaire, du système nerveux central (cortex, thalamus, hypothalamus) et de la trigger-
zone chémoréceptrice située dans l’area postrema du côté sanguin de la barrière hémato-encéphalique.
Les neurotransmetteurs excitateur agissent sur des récepteurs cholinergiques (muscariniques), de la dopamine (D2), de
l’histamine (H1), de la sérotonine (5HT3) et/ou de la substance P (NK1).
Les médicaments utiles en clinique pour traiter les nausées et vomissements sont les antagonistes plus ou moins sélectifs
de ces récepteurs. On distingue ainsi :
Les médicaments utilisés sont choisis en fonction de l’intensité et de la cause des symptômes, de leur profil
pharmacologique et de leur tolérance :
des symptômes moteurs (syndrome extrapyramidal avec les antagonistes dopaminergiques à action centrale),
des effets anticholinergiques et une somnolence (antagonistes dopaminergiques, antagonistes H1 et muscariniques),
des céphalées (antagonistes 5HT3),
une fatigue et une asthénie (antagoniste NK1).
Item(s) ECN
271 : Vomissements du nourrisson, de l'enfant et de l'adulte
Rappel physiopathologique
La nausée est une sensation désagréable d’avoir envie de vomir, souvent accompagnée de symptômes du système nerveux
sympathique et parasympathique (pâleur, sueurs froides, sialorrhée, dilatation pupillaire, tachycardie, éventuellement
hypotension). Le vomissement est l’expulsion avec force par la bouche du contenu de l’estomac, du duodénum et du jéjunum.
La nausée et le vomissement sont les résultats d’un réflexe complexe dont le centre effecteur, ou « centre du vomissement »,
est situé dans la partie dorsolatérale de la formation réticulée du mésencéphale. La stimulation des noyaux moteurs efférents
(noyau ambigu, les groupes ventraux et dorsaux de la respiration, noyau moteur du nerf vague) induit une contraction
simultanée du diaphragme et des muscles abdominaux, une contraction rétrograde du petit intestin, de l’estomac et de
l’œsophage et une relaxation du corps et du fundus gastrique ainsi que de l’œsophage thoracique.
Le centre du vomissement est activé par des afférences venant des organes viscéraux (tube digestif, péritoine, cœur), du
système vestibulaire (acétylcholine, histamine), du cortex frontal ou limbique (GABA, histamine, acétylcholine), et par la
trigger-zone chémoréceptrice (figure 1). Les stimuli excitateurs provenant du tube digestif, mécaniques ou chimiques, sont
véhiculés par le nerf vague et les voies sympathiques vers le noyau du tractus solitaire et vers l’area postrema dans lequel se
trouve la trigger-zone chémoréceptrice. Cette zone est située sur le plancher du quatrième ventricule, du côté sanguin de la
barrière hémato-encéphalique, si bien qu’elle est sensible aux substances émétogènes véhiculées par le sang. Elle est
stimulée par l’activation des récepteurs de la sérotonine (5HT3) et de la dopamine (D2). Le noyau du tractus solitaire est
stimulé par les mêmes récepteurs et par des récepteurs muscariniques (M1), de l’histamine (H1) ou de la substance P
(neurokinine 1, NK1).
Afférences Récepteurs
Centre du vomissement (noyau du tractus solitaire) H1, muscarinique, 5HT2, µ
Trigger-zone chémoréceptrice D2, 5HT3
Appareil vestibulaire et labyrinthique H1, muscarinique, 5HT1A
Cortex et système limbique Histamine, GABA, muscarinique
Tractus gastro-intestinal D2, 5HT3, 5HT4
Médicaments existants
L’utilisation et le choix d’un médicament antiémétique dépendent :
On distingue :
les médicaments ayant comme indication principale les nausées et vomissement (antagonistes dopaminergiques
périphériques, anticholinergiques et antihistaminiques, antagonistes 5HT3 et antagonistes NK1)
les médicaments utilisés dans des situations particulières (corticoïdes dans les chimiothérapies ou les hypertensions
intracrâniennes, anxiolytiques, érythromycine ou cipraside dans les gastroparésies, neuroleptiques centraux dans les
nausées d’origine neurologique ou les hoquets rebelles).
On peut classer les antiémétiques selon leur site d’action ou leurs propriétés pharmacodynamiques. Pour chaque principe
actif, il existe souvent différentes voies d’administration, particulièrement utiles du fait des difficultés d’absorption par voie
orale (tableau 2).
Tableau 2 : principaux médicaments utilisés dans les nausées et les vomissements
Chimiothérapies
D2 périphériques et Haloperidol PO, IV Radiothérapie
centraux (effet
central fort)
Antihistaminiques et Histaminiques Diphénydramine PO Prévention du mal des
antimuscariniques H1périphériques et transports
Diphénydrate PO
centraux
Causes vestibulaires
Méclozine PO
Prévention du mal des
Scopolamine Transdermiques
Muscariniques M1 transports
périphériques et
centraux
Antagonistes 5HT3 périphériques Granisétron PO, IV, rectal Chimiothérapies
sérotoninergiques et centraux
Odansétron PO, IV
Palonosétron IV
Antagoniste des NK1 Aprépitant PO, IV Chimiothérapie
neurokinines émétisante, contenant
du cisplatine, en
association avec un
corticostéroïde et un
anti-5HT3
Corticostéroïdes Inhibition des Dexaméthasone PO Chimiothérapies
prostaglandines
Hypertension
intracrânienne
En fonction de leur capacité à franchir la barrière hémato-encéphalique ils ont une action périphérique et/ou une action
centrale. Certains ont une sélectivité importante pour un récepteur, d’autres sont peu sélectifs et vont agir sur plusieurs
systèmes de neurotransmetteurs (tableau 3). Les « sétrons » sont par exemple des antagonistes sélectifs des récepteurs
5HT3. A l’inverse, la métopimazine, un neuroleptique de la famille des phénotiazines, a une action antagoniste des récepteurs
D2 mais aussi antihistaminique, anticholinergique et antagoniste 5HT2.
Le mécanisme d’action des antiémétiques dépend donc de leur site d’action et du système de neurotransmetteur sur lequel
ils agissent (tableau 4) :
Sur le noyau du tractus solitaire : effet inhibiteur des antagonistes 5HT3, H1, muscariniques, D2 et NK1 qui passent la
barrière hémato-encéphalique,
Sur la CTZ : effet inhibiteur des antagonistes 5HT3 et D2, y compris pour les médicaments ne passant pas la barrière
hémato-encéphalique puisque l’area postrema est en dehors de la barrière,
Sur le cortex cérébral : benzodiazépines par leurs effets sur les récepteurs du GABA,
Sur le tractus digestif : effet prokinétique des antagonistes des récepteurs D2, diminution du tonus vagal et des secrétions
gastriques par les antagonistes muscariniques, effets antiémétique et prokinétique des agonistes 5HT4, bloc du tonus
vagal par les antagonistes 5HT3.
Anticholinergique-
muscarinique
Antihistaminique
Prokinétiques Antidopamine D2 Métoclopramide,
dompéridone
Antisécréteurs Anticholinergique
Scopolamine
Bloc vagal 5HT3 Anti 5HT3
Sétrons
La scopolamine est utilisée en patch cutané également dans la prévention du mal des transports. Ses effets
anticholinergiques peuvent être utiles pour traiter l’hypersalivation ou les hypersecrétions bronchiques dans des maladies
neurologiques ou en soins palliatifs.
Antagonistes dopaminergiques
La dompéridone a une efficacité modérée dans toutes les formes de nausées notamment d’origine périphérique.
Puisqu’elle ne passe pas la barrière hématoencéphalique, elle est le seul antagoniste D2 qui peut être utilisé dans la
maladie de Parkinson, notamment pour contrer les effets indésirables périphériques des médicaments dopaminergiques
(nausées).
Les autres antagonistes D2 sont utilisés dans les nausées d’origine centrale. Les neuroleptiques à fort passage dans le
SNC (phénotiazines ou butyrophérones) peuvent également être utiles dans les hoquets rebelles et bien sûr dans leurs
indications psychiatriques (schizophrénie) ou neurologiques (mouvements anormaux de la chorée de Huntington,
syndrome de Gilles de la Tourette).
Antagonistes 5HT3
Ils ont été montrés plus efficaces que les neuroleptiques, notamment dans les nausées aigues et retardées des
chimiothérapies et dans les nausées post-opératoires.
Antagoniste NK1
L’aprépitant est utilisés en prévention des nausées aigues et surtout retardées des chimiothérapies émétisantes en
association avec les corticoïdes et un antagoniste 5HT3.
Autres antiémétiques
Les corticoïdes sont utilisés pour traiter les nausées induites par les chimiothérapies ou en post-opératoire. Ils sont
également utiles dans les nausées secondaires à l’hypertension intracrânienne.
Les antihistaminiques agissent en bloquant les récepteurs H1 au niveau vestibulaire, dans la CTZ, et au niveau central.
Les antimuscariniques agissent au niveau des récepteurs cholinergiques en périphérie (estomac, nerf vague, vestibule) et en
central (CTZ et centre du vomissement).
Antagonistes dopaminergiques
Ils ont tous des effets périphériques prokinétiques au niveau de l’estomac en bloquant le frein dopaminergique.
Ils agissent également au niveau de la CTZ et, pour les neuroleptiques qui passent la barrière hémato-encéphalique, au niveau
du noyau du tractus solitaire.
Antagonistes 5HT3
Ils agissent en périphérie en bloquant le tonus du nerf vague et au niveau central (CTZ et centre du vomissement).
Antagoniste NK1
L’aprépitant agit en bloquant les récepteurs de la substance P neurokinine 1 au niveau du centre du vomissement.
Autres antiémétiques
Le mode d’action des corticoïdes dans la prévention des nausées reste mal connu.
Il existe peu de données sur les paramètres pharmacocinétiques des antihistaminiques antiémétiques.
La scopolamine en dispositif transdermique a une libération plus importante du principe actif lors des 24 premières heures
puis a une cinétique en plateau stable jusqu’à 72h. Après retrait du patch, la décroissance de la concentration plasmatique est
lente (1/3 de la concentration précédente après 24h).
Antagonistes dopaminergiques
La dompéridone est métabolisée par le foie (CYP3A4 essentiellement) avec un fort effet de premier passage hépatique. Elle
est éliminée par le rein. Sa demi-vie est de 7-9h mais augmente jusqu’à 20h en cas d’insuffisance rénale sévère. La
dompéridone peut passer dans le SNC à fortes doses ou en cas de rupture de la barrière.
Les autres antagonistes à faible effet central (alizapride, métoclopramide et métopimazine) ont une demi-vie de 3-6h et sont
éliminés par voie rénale avec un faible métabolisme hépatique.
Antagonistes 5HT3
Les sétrons ne posent pas de problème pharmacocinétique particulier. Ils sont métabolisés par le foie et éliminés par voie
hépatique (ondansétron, granisétron) ou rénale (tropisétron). Leur demi-vie d’élimination est de 6-8h.
Antagoniste NK1
Une insuffisance rénale peut entraîner un surdosage en dompéridone par diminution de son élimination.
Insuffisance hépatique
Les antagonistes 5HT3 sont à utiliser avec précaution dans l’insuffisance hépatique sévère.
Personnes âgées
La tolérance des personnes âgées aux antagonistes dopaminergiques, scopolamine ou antihistaminiques peut être moins
bonne du fait de leur action centrale. Les personnes âgées seront notamment plus sensibles aux effets sédatifs et aux effets
anticholinergiques (troubles de mémoire, hypotension, risque de rétention urinaire).
Maladie de parkinson
La plupart des antiémétiques à action centrale, antagonistes D2 mais aussi antihistaminiques et antagonistes 5HT3, peuvent
avoir des effets extrapyramidaux. Seule la dompéridone peut être utilisée dans cette maladie.
Du fait de leurs propriétés anticholinergiques, les antagonistes dopaminergiques, les antihistaminiques et les
antimuscariniques sont contre indiqués en cas de rétention urinaire ou de glaucome à angle fermé.
Précautions d’emploi
Tous les antiémétiques peuvent entraîner une somnolence et sont donc à utiliser avec précaution lors de la conduite de
véhicules. L’association avec l’alcool majore l’effet de somnolence notamment avec les antagonistes dopaminergiques et les
antihistaminiques.
Les médicaments métabolisés par le CYP3A4 – dompéridone et aprépitant – sont à utiliser avec précaution lors de
l’association avec les médicaments inducteurs enzymatiques (rifampicine, phénytoïne par exemple) qui diminuent leur
concentration et leur efficacité, et avec les médicaments inhibiteurs enzymatiques qui augmentent leur concentration et leur
toxicité (kétoconazole par exemple).
- dompéridone : seule utilisation pour la prévention des nausées et vomissements chez l'adulte et l'enfant
- métoclopramide :
chez l'enfant : prévention des nausées et vomissements post-opératoires ou induits par la chimiothérapie
chez l'adulte : idem + radiothérapie et traitement des nausées et vomissements
Effets indésirables
Effets sédatifs
Tous les antiémétiques ont des effets sédatifs majorés par l’association avec l’alcool ou les autres psychotropes. Cependant,
ces effets sont surtout présents avec les antihistaminiques et les antagonistes dopaminergiques à effet central fort.
Effets anticholinergiques
Les antihistaminiques, antimuscariniques et antagonistes dopaminergiques ont tous des effets anticholinergiques (sauf la
dompéridone) : sècheresse de la bouche, constipation, rétention urinaire, troubles de l’accomodation et de la convergence,
plus rarement hypotension.
Chez le sujet âgé ils peuvent accentuer ou provoquer des troubles de mémoire.
Effets antidopaminergiques
Les antagonistes dopaminergiques à action centrale peuvent être responsables de syndromes extrapyramidaux (rigidité,
akinésie). C’est le cas pour ceux ayant un effet central fort (halopéridol et chlorpromazine) mais aussi ceux à effet central
faible surtout chez le sujet âgé ou lors de prises au long court. Avec ces médicaments, il existe également un risque de
dyskinésies aigues (dystonie bucco-faciale par exemple) ou de dyskinésies tardives, limitant leur utilisation à certaines
indications chez l'adulte et surtout chez l'enfant (prévention des nausées et vomissements post-opératoires ou induits par la
chimiothérapie).
Seule la dompéridone est théoriquement dépourvue de ces effets bien qu’ils aient été décrit lors de prise de fortes doses ou
lors de rupture de barrière hémato-encéphalique.
Des troubles moteurs extrapyramidaux ont également été décrits avec les antihistaminiques et les antagonistes 5HT3. Leurs
mécanismes d’apparition restent mal compris.
Effets cardiaques
Des allongements de l'intervalle QT ont été observés chez les patients prenant de la dompréidone conduisant depuis février
2014 à la restriction d'utilisation aux seules indications de nausées et vomissements (auparavant pour gastroparésie, reflux
gastro-oesophagien, mais aussi en utillisation de stimulant de la lactation).
Effets endocriniens
les antagonistes D2 augmentent la secrétion de prolactine hypophysaire et peuvent être responsable de galactorrhée,
gynécomastie, aménorrhée.
Antagonistes 5HT3
Les céphalées sont le principal effet indésirable des anti-5HT3 (effet sérotoninergique). Les autres effets indésirables sont la
constipation, les réactions anaphylactiques pour les formes injectables et les syndromes extrapyramidaux.
Antagoniste NK1
Le principal effet indésirable des antagonistes NK1 est la fatigue, l’asthénie. Des hoquets ont également été décris.
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