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6.

Un gène mutant n’est pas toujours exprimé exactement de la même façon

Les proportions monohybrides mendéliennes, telles que 3 : 1(ou 1 : 2 : 1 quand l’hétérozygote est
intermédiaire) ne sont pas toujours observés, même lorsqu’un caractère est déterminé par l’action
d’un allèle récessif unique. Des proportions régulières de ce genre indiquent que les organismes de
même génotype manifestent également le même phénotype. Bien que les phénotypes d’organismes
ayant un génotype particulier soient souvent similaires, ceci n’est pas toujours le cas (en particulier
dans les populations naturelles où ni les croisements, ni les conditions liées à l’environnement ne
sont maîtrisées par l’expérimentateur). Une variation dans l’expression phénotypique d’un
génotype particulier peut avoir lieu car d’autres gènes modifient le phénotype ou bien parce que
les processus biologiques qui produisent le phénotype sont sensibles aux conditions de
l'environnement.

Les types d'expression variable des gènes sont généralement regroupés en deux catégories :

• L'expressivité variable se réfère à des gènes qui sont exprimés à différents degrés dans différents
organismes. Par exemple, les maladies génétiques héréditaires chez les êtres humains sont souvent
variables d'une personne à l'autre dans leur expression. Un patient peut être très malade, alors qu'un
autre ayant la même maladie est atteint de façon moins sévère. L'expressivité variable signifie que
le même gène mutant peut provoquer une forme sévère de la maladie chez un individu donné, mais
une forme moins aiguë chez un autre. Les différents degrés d'expression forment souvent une série
continue allant de l'expression maximale à l'absence quasi-totale d'expression des caractéristiques
phénotypiques attendues.

• La pénétrance fait référence à la proportion d'organismes dont le phénotype correspond au


génotype pour un caractère donné. Un génotype qui est toujours exprimé a une pénétrance de 100
%. Une pénétrance de moins de 100 % (pénétrance incomplète) constitue un cas extrême
d'expressivité variable, dans lequel, chez certains individus, le génotype n'est pas exprimé à un
degré détectable. Par exemple, une personne ayant une prédisposition génétique au cancer du
poumon peut ne pas développer la maladie s'il ou elle ne fume pas de tabac. L'absence d'expression

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d'un gène peut être due à des conditions liées à l'environnement, comme dans l'exemple du non-
fumeur ou aux effets d'autres gènes.

6.1 L'épistasie peut affecter les proportions observées des phénotypes.

Il est démontré que les produits de plusieurs gènes peuvent être nécessaires à la réalisation de toutes
les étapes d'une voie biochimique. Dans les croisements génétiques où deux mutations qui affectent
des étapes différentes d'une seule voie ségrègent, les proportions classiques 9 : 3 : 3 : 1 des F2 issus
de croisements dihybrides ne sont pas observées. L'interaction de deux mutations récessives dans
deux gènes différents affectant la coloration des pois constitue un exemple de ce phénomène. Les
plantes de génotype CC et Cc possèdent des fleurs pourpres, ce qui correspond à l'expression
normale, ou sauvage, du caractère, tandis que les plantes homozygotes cc ont des fleurs blanches.
Pour un autre gène, les plantes de génotype PP et Pp ont des fleurs sauvages pourpres, tandis que
les plantes homozygotes pp ont des fleurs blanches. Les généticiens utilisent souvent un tiret pour
indiquer un allèle dont l'identité n'est pas spécifiée; par exemple, le symbole C- signifie que dans
ce génotype on sait qu'un allèle est C et l'autre allèle (non spécifié), indiqué par le tiret, peut être C
ou c. Le symbole C- est donc une abréviation signifiant "CC ou Cc". En utilisant ce genre de
symboles, on peut dire que les génotypes C- et P- ont des fleurs sauvages pourpres, tandis que les
génotypes cc et pp ont des fleurs blanches. Les plantes homozygotes récessives cc ou pp ont des
fleurs blanches indépendamment du génotype de l'autre gène.

La figure 1.11 montre un croisement entre des plantes de génotype CC pp et des plantes de
génotype cc PP. Les deux plantes ont des fleurs blanches car elles sont homozygotes soit pour cc
soit pour pp. Bien que les deux plantes parentales aient des fleurs blanches, le phénotype de couleur
de la fleur des plantes de la génération F1 est pourpre car le génotype des descendants F] est Cc Pp
et donc hétérozygote pour les deux allèles récessifs. L'autofécondation des plantes F1 a pour résultat
les génotypes des descendants F2 donnés dans la matrice de Punnett. Étant donné que seuls les
descendants possédant au moins un allèle C(C-) et au moins un allèle P (P-) ont des fleurs pourpres
et que tous les autres ont des fleurs blanches, les proportions entre les fleurs pourpres et blanches
dans la génération F2 sont 9 : 7.

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Figure 1.11

Le rapport 9 : 7 de fleurs pourpres : blanches est une forme modifiée des proportions 9 : 3 : 3 : 1,
dans lesquelles la classe «9» inclut les fleurs pourpres et les classes « 3 : 3 : 1 » ont toutes des fleurs
blanches. Ceci est un exemple d'épistasie, un terme faisant référence à tout type d'interaction entre
gènes qui entraîne une modification des proportions 9 : 3 : 3 : 1 de la génération F2 dihybride en
d'autres types de proportions. De façon plus générale, ce phénomène indique qu'un gène masque
l'expression de l'autre.

Pour un caractère déterminé par l'interaction de deux gênes, ayant chacun un allèle dominant, il
n'existe qu'un nombre limité de possibilités de modification des proportions dihybrides 9 : 3 : 3 :
1. Il existe neuf proportions de dihybrides possibles lorsque les deux gènes manifestent une
dominance complète. Des exemples sont connus pour chacune des proportions dérivées.
Cependant, les proportions les plus fréquemment rencontrées sont 9 : 7, 12 : 3 : 1, 13 : 3, 9 : 4 : 3
et 9 : 6 : 1. Les types d'épistasie qui aboutissent à ces proportions sont illustrés dans les exemples
suivants, qui sont empruntés à une variété d'organismes.

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9 : 7 Ceci est le rapport observé quand, pour deux gènes différents, une mutation homozygote
récessive dans l'un ou l'autre des deux gènes aboutit au même phénotype mutant. Ce rapport est
illustré par la ségrégation des fleurs pourpres et blanches dans l’exemple précédent (voir la figure
1.11). Les génotypes C- pour le gène C et P- pour le gène P ont des fleurs pourpres; tous les autres
génotypes ont des fleurs blanches.
12 : 3 : 1 Les proportions dérivées dihybrides du type 12 : 3 : 1 sont obtenues lorsque la présence
d'un allèle dominant d'un gène masque le génotype d'un autre gène. Par exemple, si le génotype A-
rend les génotypes B- et bb impossibles à distinguer, alors les proportions des descendants
dihybrides sont 12 : 3 : 1, car les génotypes A- B- et A- bb sont exprimés comme un même
phénotype.

Dans une étude génétique de la couleur de la gousse des graines d'avoine, une variété possédant
des gousses blanches a été croisée avec une variété à gousses noires. Les graines hybrides F1
obtenues ont des gousses noires. Parmi les 560 descendants de la génération F2 obtenue par
autofécondation de la F1, les phénotypes de graines suivants ont été observés dans les effectifs
indiqués :

418 (gousses noires] 106 [gousses grises] 36 (gousses blanches]

Les proportions observées des phénotypes sont 11,6 : 2,9 : 1, soit très proches de 12 : 3 : 1. Ces
résultats peuvent s'expliquer par une hypothèse génétique dans laquelle le phénotype gousse noire
résulte de la présence d'un allèle dominant (disons, A) et le phénotype gousse grise résulte d'un
autre allèle dominant (disons, B), dont l'effet est apparent uniquement chez les homozygotes aa.
Sur la base de cette hypothèse, les variétés pures d'origine devaient avoir les génotypes aa bb
(blanche) et AA BB (noire). La F1 a le génotype Aa Bb (noire). Si la paire d'allèles A, a et la paire
d'allèles B, b ségrègent indépendamment, alors on s'attend à ce que la génération F2 ait la
composition de génotypes suivante :
9/16 A-B- [gousse noire]
3/16 A-bb [gousse noire]
3/16 aa B- [gousse grise]
1/16 aa bb [gousse blanche]

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Ce type d'épistasie rend compte des proportions 12 : 3:1.

13 : 3 Ce type d'épistasie est illustré par la différence entre les poulets de la race White Leghorn
(génotype CC II) et les poulets de la race White Wyandotte (génotype cc ii). L'allèle C est
responsable de la coloration des plumes, mais chez les poulets White Leghorns, l'allèle I est un
inhibiteur dominant de la coloration des plumes. La génération F1d'un croisement dihybride entre
ces races de poulets a le génotype Cc Ii, qui aboutit à des plumes de couleur blanche, à cause des
effets inhibiteurs de l'allèle I. Dans la génération F2, seul le génotype C- ii a des plumes colorées.
De ce fait, il y a un rapport 13:3 de plumes blanches : colorées.

9 : 4 : 3 Ces proportions (souvent notées 9 : 3 : 4) sont observées chez les descendants d'un
croisement dihybride quand la présence d'un allèle récessif d'un gène à l'état homozygote masque
l'expression du génotype d'un autre gène. Par exemple, si le génotype aa manifeste le même
phénotype que le génotype soit B - ou bb, alors on obtient les proportions 9 : 4 : 3.

Chez la souris, la couleur grisâtre du pelage appelée agouti est produite par la présence d'une bande
horizontale de pigment jaune, juste en dessous de l'extrémité de chaque poil. Le profil agouti est
dû à la présence d'un allèle dominant A. Chez les animaux aa la couleur du pelage est noire. Un
second allèle dominant, C, est nécessaire à la formation de tous les types de pigments des poils et
les animaux cc sont albinos (pelage blanc). Dans un croisement AA CC (agouti) x aa cc (albinos),
les descendants F1 sont Aa Cc et agouti. Des croisements entre les mâles et les femelles F1
produisent des descendants F2 dans les proportions suivantes :
9/16 A- C - [agouti]
3/16 A- cc [albinos]
3/16 Aa C- [noir]
1/16 aa cc [albinos]
Les proportions des descendants du croisement dihybride sont donc 9 agouti : 4 albinos : 3 noir.

9 : 6 : 1 Ces proportions sont observées dans la F2 d'un croisement dihybride si l'état homozygote
pour un allèle récessif de n'importe lequel des deux gènes impliqués aboutit au même phénotype,
mais le phénotype du double-homozygote est distinct. Par exemple, la couleur rouge du pelage

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chez les porcs Duroc-Jersey nécessite la présence de deux allèles dominants R et S. Les porcs de
génotype R- ss et rr S- ont des poils de couleur sable et les porcs rr ss sont blancs. Les proportions
du dihybride F2 sont donc
9/16 R-S- [rouge]
3/16 R-ss [sable]
3/16 rrS- [sable]
1/16 rr ss [blanc]
Les proportions 9 : 6 : 1 résultent du fait que les deux récessifs simples ont le même phénotype.

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