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UE 111  INTRodUcTIoN

aU dRoIT

Année 2013-2014

Ce fascicule comprend :
La série 4
Le devoir 6 à envoyer à la correction

Le droit de La responsabiLité
Le droit des entreprises en difficuLté

En collaboration avec
le Centre National
d’Enseignement à Distance Marielle MARTIN
Institut de Lyon

W1111-F4/4
Introduction au droit • Série 4

L’auteur :
Marielle MARTIN : Docteur en droit privé et sciences criminelles, maître de conférences au Cnam.

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2
UE 111 • Introduction au droit

••• OBJECTIFS •••

Cette quatrième et dernière série du cours d’Introduction au droit s’intéresse à la


manière dont peuvent être juridiquement traitées certaines difficultés rencon-
trées notamment par les entreprises. Ces difficultés sont, d’une part, celles liées
à l’engagement de la responsabilité que l’on peut avoir et, d’autre part, les dif-
ficultés financières qui peuvent surgir dans le cadre de l’activité.
En ce qui concerne, tout d’abord, la responsabilité dont on est susceptible
de répondre, nous distinguerons la responsabilité civile et la responsabilité
pénale (Partie 1).
Au plan civil, la victime de tout préjudice causé par un fait dommageable doit
pouvoir obtenir réparation (essentiellement sous forme de dommages-intérêts) en
engageant la responsabilité civile du responsable du fait dommageable. Ainsi,
pour être mise en œuvre, la responsabilité civile suppose la réunion de trois condi-
tions générales : un préjudice, un fait dommageable et un lien de causalité
entre le fait dommageable et le préjudice. Cependant cette responsabilité est
contractuelle lorsque le fait dommageable consiste en l’inexécution de ses
obligations contractuelles par un cocontractant (cf. série  3), tandis que cette
responsabilité est délictuelle ou quasi délictuelle dans toutes les autres hypo-
thèses de faits dommageables (accidents, mais aussi dol dans la formation d’un
contrat, etc.).
Au plan pénal, c’est la violation de la loi pénale qui entraîne la responsabi-
lité pénale de l’auteur de l’infraction ; lequel doit alors rendre des comptes à
la Nation par le biais des peines qu’il encourt (amendes, peines privatives de
liberté, etc.).
Tout fait dommageable qui, au plan civil, prend sa source en dehors de l’inexécution
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d’un contrat, est un (quasi-)délit civil. Les délits civils sont donc en nombre indé-
terminé. À l’inverse, au plan pénal, les délits pénaux, comme toutes les infractions
dont ils ne sont que l’une des catégories, sont expressément et limitativement
énumérés par la loi.
Il convient de savoir si un comportement donné relève de la responsabilité civile
ou de la responsabilité pénale : tout délit civil ne constitue pas un délit pénal (vio-
lation d’un texte non sanctionné pénalement) ; réciproquement, tout délit pénal ne
cause pas à autrui un dommage et ne constitue donc pas un délit civil (vagabon-
dage, etc.). Mais il arrive que, pour un même événement, l’on soit tenu à la fois de
sa responsabilité civile et de sa responsabilité pénale : certains actes sont des
délits civils et des délits pénaux (coups et blessures involontaires, etc.).
Nous sommes tous confrontés à nos diverses responsabilités, que ce soit en qualité
de simple particulier ou d’intervenant (entreprise, etc.) du monde des affaires. La
responsabilité contractuelle ayant déjà été traitée dans le cadre de la série 3,
nous consacrerons la présente étude à la responsabilité civile délictuelle ou
quasi délictuelle et à la responsabilité pénale.
En ce qui concerne, ensuite, le traitement juridique des difficultés financières
susceptibles de surgir dans le cadre de l’activité d’une entreprise, nous distin-
guerons les modes de prévention de ces difficultés et le traitement judiciaire
de ces difficultés (Partie 2).

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UE 111 • Introduction au droit

Table des matières

Partie 1. Le droit de la responsabilité 7

Titre 1. L’entreprise et la responsabilité délictuelle.............. 7


Chapitre 1. Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité......................7
Section 1. Les faits générateurs de la responsabilité civile....................................7
Section 2. Le dommage.......................................................................................14
Section 3. Le lien de causalité..............................................................................14
Chapitre 2. Les causes d’exonération...................................................................15
Section 1. Les causes d’exonération légales.......................................................15
Section 2. La nullité des causes d’exonération conventionnelles........................17
Chapitre 3. L’action en responsabilité...................................................................17
Section 1. L’action................................................................................................17
Section 2. La réparation du dommage.................................................................18

Titre 2. L’entreprise et la responsabilité pénale...................... 19


Chapitre 1. L’infraction : fait générateur de responsabilité pénale....................19
Section 1. La principale classification des infractions pénales............................19
Section 2. Les éléments constitutifs de toute infraction pénale...........................20
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Chapitre 2. Les personnes tenues pour pénalement responsables...................22


Section 1. Les personnes physiques et les personnes morales..........................23
Section 2. La responsabilité pénale des personnes selon le degré de leur
implication...........................................................................................23
Chapitre 3. La mise en œuvre de la responsabilité pénale.................................25
Section 1. La procédure pénale............................................................................25
Section 2. Les peines encourues.........................................................................27
Section 3. Les causes de limitation de responsabilité pénale..............................32

Partie 2. Le droit des entreprises en difficulté 35

Titre 1. La prévention des difficultés des entreprises........... 35


Chapitre 1. Les mesures destinées à anticiper les difficultés............................35
Section 1. La détection des difficultés par l’information comptable
et financière.........................................................................................36
Section 2. Le rôle de l’alerte.................................................................................38

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Introduction au droit • Série 4

Chapitre 2. Les mesures destinées à éviter l’amplification des difficultés.......40


Section 1. Le mandataire ad hoc..........................................................................40
Section 2. La conciliation.....................................................................................41

Titre 2. Le traitement judiciaire des difficultés


des entreprises......................................................................... 44
Chapitre 1. La sauvegarde.....................................................................................45
Section 1. L’ouverture de la procédure.................................................................45
Section 2. Le déroulement de la procédure pendant la période d’observation...47
Section 3. L’issue de la procédure.......................................................................50
Chapitre 2. Le redressement judiciaire.................................................................51
Section 1. L’ouverture de la procédure.................................................................52
Section 2. Le déroulement de la procédure pendant la période d’observation...53
Section 3. L’issue de la procédure.......................................................................55
Chapitre 3. La liquidation judiciaire.......................................................................56
Section 1. L’ouverture de la procédure.................................................................56
Section 2. Le déroulement de la procédure.........................................................57
Section 3. L’issue de la procédure.......................................................................59

Lexique 63
Exercices autocorrigés 67
Annexes 71

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Index 77
Devoir 6 79

6
1

partie
Le droit de la responsabilité

Les domaines respectifs de la responsabilité contractuelle, de la responsabilité civile délictuelle


et de la responsabilité pénale ayant été délimités ci-avant dans l’exposé des objectifs de la pré-
sente série de cours, et la responsabilité contractuelle ayant été étudiée dans la série 3, nous
voyons ici de quelle façon sont engagées la responsabilité civile délictuelle (Titre 1) et la respon-
sabilité pénale (Titre 2) ; notamment par les entreprises.

Titre 1. L’entreprise et la responsabilité


délictuelle

Retrouvez des compléments sur ce thème sur le site Internet de l’Intec www.cnamintec.fr,
rubrique « Ressources pédagogiques ».

La responsabilité civile délictuelle prend sa source dans un fait quelconque (fait domma-
geable) qui, au plan civil et en dehors de l’inexécution d’un contrat entre cocontractants, a
causé (lien de causalité) un dommage (préjudice) à autrui. Pour être précis, il y a responsa-
bilité civile délictuelle lorsqu’il y a délit civil (l’auteur du dommage a intentionnellement causé
un préjudice à autrui) et il y a responsabilité civile quasi délictuelle lorsqu’il y a quasi-délit
civil (l’auteur du dommage n’a pas agi dans le dessein de nuire, mais le préjudice a été causé
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par sa négligence ou son imprudence). À cette nuance près, la responsabilité civile délictuelle
et la responsabilité civile quasi délictuelle obéissent aux mêmes règles.
Nous envisagerons successivement les conditions de mise en œuvre de la responsabilité civile
(quasi) délictuelle (Chapitre 1), les causes d’exonération de cette responsabilité (Chapitre 2) et
quelques considérations relatives à l’action en responsabilité (Chapitre 3).

Chapitre 1. Les conditions de mise en œuvre


de la responsabilité
L’engagement de la responsabilité civile (quasi) délictuelle suppose la réunion de trois condi-
tions : un fait générateur de responsabilité (acte constitutif d’un délit ou d’un quasi-délit), un
dommage et un lien de causalité entre le fait générateur et le dommage. Le premier élément
est propre à chacun des cas de responsabilité, les deux autres sont communs à tous les cas
spécifiques.

Section 1. Les faits générateurs de la responsabilité civile

Il existe plusieurs sortes de faits générateurs et, par conséquent, plusieurs régimes de respon-
sabilité civile (quasi) délictuelle : les régimes de responsabilité du fait personnel, les régimes
de responsabilité du fait des choses et les régimes de responsabilité du fait d’autrui.

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Introduction au droit • Série 4

I. La responsabilité du fait personnel : art. 1382 et 1383 C. civil


La faute personnelle (fait personnel) est la commission ou l’abstention causant à autrui un
dommage. Elle ne se présume pas et devra être prouvée par la victime pour donner lieu à
réparation (responsabilité pour faute prouvée).
Art. 1382 C. civ. :
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la
faute duquel il est arrivé, à le réparer. »

Art. 1383 C. civ. :
« Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais
encore par sa négligence ou par son imprudence. »

Comment la faute peut-elle être définie et à qui doit-elle être imputée ?

A. Définition de la faute
La faute peut être commise en connaissance de cause : art. 1382 C. civ. (délit civil), lorsque
l’auteur du dommage a eu la volonté ou la conscience de causer celui-ci. Il n’est pas nécessaire
que l’auteur du dommage ait eu l’intention de nuire à autrui, il suffit qu’il ait envisagé le dommage
comme une conséquence normale de son acte. Il faut donc scruter l’intention de l’auteur du
dommage. Cette recherche de l’intention se fait in concreto, c’est-à-dire qu’il est nécessaire de
rechercher quelle a été la volonté de l’auteur du dommage.
À l’inverse, la faute d’imprudence ou de négligence : art. 1383 C. civ. (quasi-délit civil), est
appréciée in abstracto. Cette faute consiste à ne pas avoir prévu que d’un certain acte ou d’une
certaine omission pouvait résulter un dommage ou, l’ayant prévu, à avoir passé outre. Dans ce
cas, le comportement de l’auteur du dommage est analysé par rapport à une personne idéale, le
bon père de famille des Romains, l’homme raisonnable des Anglais, l’homme d’intelligence et de
diligence moyennes. Ainsi, pour analyser la faute d’imprudence ou de négligence d’un ingénieur
ou d’un ouvrier, on ne se réfère pas au comportement du très bon ou très mauvais ingénieur ou
ouvrier, mais à celui de l’ingénieur ou de l’ouvrier moyen.

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La faute peut résulter de la violation d’un texte législatif ou réglementaire (non-assistance à per-
sonne en péril, violation de la loi réprimant les fraudes dans la vente des marchandises, etc.). La
faute peut même résulter de l’exercice d’un droit. Il y a abus de droit, dès lors qu’un droit est
exercé non pas dans l’intérêt de son titulaire, mais dans le but de nuire à autrui. L’exercice d’un
droit par pure malveillance ou dans une intention déloyale est générateur d’un délit civil. La juris-
prudence est abondante : exécution de fouilles sur ses terres en vue de tarir une source utilisée
par les voisins ; emploi malveillant d’appareils troublant les émissions radiophoniques ; planta-
tions ou constructions abusives supprimant l’éclairage du voisin ; résiliation malveillante d’un
contrat de travail à durée indéterminée ; exercice du droit de grève dans un but de pure mali-
gnité ; exercice d’actions en justice ou de voies de recours révélant une mauvaise foi certaine ou
une erreur grossière équivalant au dol ; concurrence déloyale, etc.

B. Imputabilité de la faute
Une faute n’est reprochable que si elle émane d’une volonté consciente. Ainsi en principe, l’indi-
vidu privé de raison lors du dommage est irresponsable. Par exemple, l’enfant qui n’a pas atteint
l’âge de raison.
Mais, depuis la loi du 3 janvier 1968, les personnes privées de raison par l’effet d’une maladie
mentale ou physique, temporairement ou définitivement, soumises à un régime particulier de
protection ou non, sont responsables dans les termes du droit commun.
De même, sont responsables les personnes dont l’inconscience a été provoquée par leur propre
faute (alcoolisme, etc.).

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UE 111 • Introduction au droit

D’ailleurs, la responsabilité de l’aliéné et l’irresponsabilité de l’enfant n’excluent pas la responsa-


bilité de leurs gardiens : établissement hospitalier ou parents.
Enfin, bien que les personnes morales soient des êtres abstraits dépourvus de volonté propre, il
est de jurisprudence constante qu’elles sont responsables sur leur patrimoine des fautes com-
mises par leurs représentants légaux, qu’il s’agisse de personnes morales de droit privé (socié-
tés commerciales, associations, etc.) ou de personnes morales de droit public (État, collectivités,
établissements publics, etc.).

II. La responsabilité du fait des choses


Lorsqu’une chose est intervenue dans la réalisation du dommage et afin de permettre à la
victime d’obtenir plus facilement réparation de ce dommage, le législateur a édicté dans certains
cas des présomptions de faute.
On recense ainsi un régime général et des régimes spéciaux de responsabilité du fait des
choses.

A. Le régime général de la responsabilité du fait des choses


(art. 1384 al. 1er C. civ.)
Art. 1384 al. 1er C. civ. :
« On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait,
mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des
choses que l’on a sous sa garde. »

Il s’agit de la responsabilité du dommage causé par le fait des choses que l’on a sous sa
garde. La victime n’a pas à prouver la faute de l’auteur du dommage, sa faute est présumée
parce qu’il en était le gardien.
Au xixe siècle, la révolution industrielle avait provoqué une multiplication des accidents dus au
machinisme moderne. Aussi, à la fin du siècle, la jurisprudence avait admis l’existence de cette
présomption de faute pour les choses dangereuses soumises à la nécessité d’une garde, mais
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non pas pour les choses actionnées par la main de l’homme, auquel cas il fallait recourir à l’ar-
ticle 1382 C. civ., c’est-à-dire à la preuve de la faute personnelle. Un arrêt de la Cour de cassa-
tion, chambres réunies, du 13 février 1930 applique cette présomption à toutes les choses
quelles qu’elles soient.
Deux conditions sont requises : la garde et le fait de la chose.

1. La garde
Lorsque le propriétaire de la chose est connu, il est présumé gardien de la chose à moins
qu’il ne prouve que la garde a été transmise par lui à un autre ou a été usurpée par un tiers.
La responsabilité incombera à celui qui avait l’usage (utilisation), la direction (maîtrise) et le
contrôle (surveillance) de la chose à condition qu’il exerce cette garde à titre indépendant, c’est-
à-dire sans recevoir d’instruction ou d’ordres. En outre, s’agissant des choses dangereuses, la
jurisprudence tend à subordonner le transfert de la garde (d’un propriétaire à un emprunteur,
etc.) à une information suffisante donnée à l’utilisateur de la chose.
Ainsi, par exemple, seront responsables : le propriétaire gardien ; le détenteur (locataire,
emprunteur, dépositaire, etc.) ; le possesseur de bonne ou de mauvaise foi.
Au contraire, ne sera pas responsable le préposé (salarié, etc.) du propriétaire ou du détenteur
(sauf cas du préposé infidèle).
À noter, par ailleurs, que le manque de discernement n’est pas incompatible avec la qualité de
gardien. Un très jeune enfant ou une personne dont les facultés mentales sont altérées peuvent
donc être gardiens au sens de l’article 1384 al. 1er du Code civil.

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Introduction au droit • Série 4

Le repérage du gardien s’avère parfois difficile, spécialement lorsque plusieurs personnes ont
agi sur la seule chose, objet du dommage. Or, en pareil cas, notre système juridique n’admet pas
l’hypothèse d’une garde collective !
Ce n’est qu’à titre d’exception que la jurisprudence a pu retenir une garde collégiale mais seule-
ment pour des personnes exerçant en même temps, au moment de la survenance du préjudice,
une garde individuelle identique sur des choses identiques : fusils ayant servi à tirer une salve à
l’occasion d’un mariage (Cass. civ. 2e, 15 déc. 1980) ; allumettes et bouts de cigarettes jetés par
un groupe de mineurs et ayant entraîné un incendie (Cass. civ. 2e, 14 juin 1984).
De plus, en principe, un gardien-victime ne peut se retourner contre les co-gardiens sur le fon-
dement de l’article 1384 al. 1er du Code civil.

2. Le fait de la chose
Cela concerne toute chose qui n’est pas visée par un régime spécial de responsabilité du fait des
choses. Par ailleurs, peu importe la manière dont la chose a causé le dommage. Un contact
matériel avec la chose n’est pas nécessaire (caillou projeté par une automobile dans une vitrine ;
survenance inopinée d’un bruit ayant surpris le gardien de la chose et ipso facto provoqué une
fausse manœuvre ; etc.). Le dommage provoqué par la chose peut donc avoir été provoqué par
contact, par émanation de gaz, par émission de radiations, par trépidation, par projections, par
transmission d’un courant électrique, etc. Toutefois, lorsque le dommage est né d’un contact
avec la chose, la présomption ne jouera pas si la chose n’a qu’un rôle purement passif, c’est-à-
dire lorsque la chose n’a fait que subir une action étrangère laquelle a été la véritable cause du
dommage (véhicule en stationnement régulier projeté sur des passants par un autre).

Remarques
• La présomption ne s’applique pas au cas où le dommage est causé par la communication d’un
incendie qui a pris naissance dans un bien meuble ou immeuble sous la garde du défendeur.
• La présomption ne dispense pas la victime de toute preuve, elle devra démontrer l’interven-
tion de la chose dans la réalisation du dommage.

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B. Les régimes spéciaux de la responsabilité du fait des choses
Conformément au programme officiel régissant l’UE d’Introduction au droit, nous n’étu-
dions ici que la responsabilité du fait des produits défectueux dont le régime résulte de la loi
n° 98-389 du 19 mai 1998 qui a transposé en droit interne, avec retard, la directive européenne
du 25 juillet 1985 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux et qui a inséré dans
le Code civil les articles 1386-1 à 1386-18 (Titre IV Bis du Livre III du Code civil). Pour une plus
grande conformité à la directive, cette transposition a été modifiée notamment par la loi n° 2004-
1343 du 9 décembre 2004 et par la loi n° 2006-406 du 5 avril 2006.
Cette législation institue une présomption de responsabilité du producteur du produit dont
le défaut cause un dommage.
Le producteur, au sens de la loi, est le fabricant du produit fini ou de l’une de ses compo-
santes, ainsi que le distributeur qui se présente comme producteur ou l’importateur.
Art. 1386-6 C. civ. :
« Est producteur, lorsqu’il agit à titre professionnel, le fabricant d’un produit fini, le produc-
teur d’une matière première, le fabricant d’une partie composante.
Est assimilée à un producteur pour l’application du présent titre toute personne agissant
à titre professionnel :
1° Qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou
un autre signe distinctif ;
2° Qui importe un produit dans la Communauté européenne en vue d’une vente, d’une
location, avec ou sans promesse de vente, ou de toute autre forme de distribution… »

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UE 111 • Introduction au droit

Depuis la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004, la responsabilité d’un autre protagoniste, le


fournisseur professionnel (vendeur, etc.) ne peut plus être recherchée sur le même plan que
celle du producteur à proprement parler. En effet, la victime ne peut plus assigner indifférem-
ment le producteur ou le fournisseur : elle ne peut engager la responsabilité du fournisseur
que si le producteur lui est inconnu. Dans ce cas, le fournisseur qui indemnise la victime
dispose d’un recours contre le producteur. Toutefois, depuis la loi n° 2006-406 du 5 avril
2006, le fournisseur peut s’exonérer de sa responsabilité en désignant son propre fournis-
seur ou le producteur dans les trois mois à dater de la notification de la demande que lui a
adressée la victime.
Art. 1386-7 C. civ. :
« Si le producteur ne peut être identifié, le vendeur, le loueur, à l’exception du crédit-bail-
leur ou du loueur assimilable au crédit-bailleur, ou tout autre fournisseur professionnel, est
responsable du défaut de sécurité du produit, dans les mêmes conditions que le produc-
teur, à moins qu’il ne désigne son propre fournisseur ou le producteur, dans un délai de
trois mois à compter de la date à laquelle la demande de la victime lui a été notifiée.
Le recours du fournisseur contre le producteur obéit aux mêmes règles que la demande
émanant de la victime directe du défaut. Toutefois, il doit agir dans l’année suivant la date
de sa citation en justice. »

L’article 1386-3 du Code civil définit ce qu’il faut entendre par produit pour l’application de ces
dispositions :
« Est un produit tout bien meuble, même s’il est incorporé dans un immeuble, y compris
les produits du sol, de l’élevage, de la chasse et de la pêche. L’électricité est considérée
comme un produit. »

Le défaut du produit à l’origine du dommage doit être une anomalie intrinsèque portant atteinte
à la sécurité (à ne pas confondre avec les éventuelles insuffisances du produit au regard de
l’usage auquel il est destiné).
Art. 1386-4 al. 1er C. civ. :
« Un produit est défectueux au sens du présent titre lorsqu’il n’offre pas la sécurité à
laquelle on peut légitimement s’attendre. »
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La législation dont il s’agit s’applique si le dommage causé par le produit défectueux est une
atteinte à la personne ou à un bien autre que le produit défectueux lui-même. Toutefois, dans le
cas d’une atteinte à un bien, depuis la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004, la réparation n’est
due que si le dommage est supérieur à un certain montant. Le décret n° 2005-113 du 11 février
2005 a fixé ce montant à 500 euros.
Art. 1386-2 C. civ. :
« Les dispositions du présent titre s’appliquent à la réparation du dommage qui résulte
d’une atteinte à la personne.
Elles s’appliquent également à la réparation du dommage supérieur à un montant déter-
miné par décret, qui résulte d’une atteinte à un bien autre que le produit défectueux
lui-même. »

La responsabilité du fait des produits défectueux ne peut être engagée qu’à partir de la mise
en circulation du produit ; or (art. 1386-5 al. 1er C. civ.) :
« 
Un produit est mis en circulation lorsque le producteur s’en est dessaisi
volontairement. »

La loi du 19 mai 1998 se singularise en ce qu’elle permet à la victime du dommage causé par
un produit défectueux, d’une part, de se retourner au plan extra-contractuel contre le pro-
ducteur, qu’elle soit ou non liée avec lui par un contrat (art. 1386-1 C. civ.) et, d’autre part, de
préférer invoquer, le cas échéant, les autres régimes de responsabilité civile qui pourraient
recevoir application (art. 1386-18 C. civ.). Pareille option dilue la stricte distinction entre la res-
ponsabilité contractuelle et la responsabilité délictuelle et va à l’encontre du principe du non-
cumul de ces deux responsabilités !

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Introduction au droit • Série 4

À noter également que, sur le fondement de la loi de 1998, la responsabilité du producteur du


fait des produits défectueux est éteinte dix ans après la mise en circulation du produit
(art. 1386-16 C. civ.) et que la victime doit agir en justice dans un délai de trois ans à comp-
ter de la date à laquelle elle a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut
et de l’identité du producteur (art. 1386-17 C. civ.).

Remarque
Le législateur a élaboré d’autres régimes spéciaux de la responsabilité du fait des choses mais
qui n’entrent pas dans le programme d’étude de notre UE : la responsabilité du fait des ani-
maux (art. 1385 C. civ.) ; la responsabilité du fait des bâtiments (art. 1386 C. civ.) ; la responsa-
bilité du fait des véhicules terrestres à moteur (loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à
l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des
procédures d’indemnisation).

III. La responsabilité du fait d’autrui


Le législateur énonce expressément quatre cas de responsabilité civile délictuelle du fait d’au-
trui : la responsabilité des père et mère du fait de leur enfant mineur posée par l’article 1384 al. 4
du Code civil (responsabilité que, conformément au programme officiel de cette UE, nous n’étu-
dierons pas) ; la responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis ; la responsabilité des
maîtres et commettants du fait de leurs domestiques et préposés ; la responsabilité des institu-
teurs du fait de leurs élèves.

A. La responsabilité des artisans (art. 1384 al. 6 C. civ.)


Les artisans sont présumés responsables des dommages causés par leurs apprentis pen-
dant le temps qu’ils sont sous leur surveillance. Dans cet article, le législateur de 1804 enten-
dait assimiler l’artisan aux père et mère qui ont mal surveillé leur enfant. Aussi, lorsque l’apprenti
est logé et nourri chez son maître, ce dernier est responsable des dommages commis par l’ap-
prenti même en dehors des temps de travail et d’étude.

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B. La responsabilité des maîtres et commettants
(art. 1384 al. 5 C. civ.)
Le Code civil édicte une présomption de faute, défaut de direction ou de surveillance (ou encore
faute de choix) à l’encontre des maîtres et commettants pour les dommages causés par
leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés. Cette
responsabilité suppose la réunion de 3 conditions : un lien de préposition, une faute du pré-
posé, une faute commise dans l’exercice des fonctions du préposé.

1. Un lien de préposition
Ce lien suppose un lien de subordination caractérisé par le pouvoir du commettant de don-
ner des ordres et instructions au préposé sur la manière de remplir ses fonctions. Mais ce
lien de subordination ne suffit pas pour définir les notions de commettant et de préposé, il faut
encore que celui qui commande ne soit pas lui-même subordonné, qu’il n’exerce pas son
pouvoir de commandement par délégation d’une autorité supérieure tel un contremaître, l’ingé-
nieur ou le chef de chantier. Généralement, le lien de préposition dérive d’un contrat de travail,
mais cela n’est pas nécessaire, il suffit que l’autorité et la subordination existent en fait (femme
d’un commerçant assistant son mari dans l’exploitation d’un fonds de commerce, voisin don-
nant bénévolement son aide pour un travail, etc.).

2. Une faute du préposé


Le commettant n’est responsable que lorsque son préposé pourrait l’être lui-même (y compris
pour une faute non intentionnelle).

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UE 111 • Introduction au droit

3. Une faute commise dans l’exercice des fonctions du préposé


Le commettant n’est pas responsable des actes délictueux commis par son préposé en dehors
de ses fonctions, n’ayant aucun rapport avec elles (meurtre, blessures causées par une rixe hors
des lieux de travail, un jour de congé). Mais la jurisprudence peut rendre responsable le commet-
tant d’actes commis en violation de ses ordres ou n’ayant aucun rapport avec sa fonction dès
lors que l’acte a été accompli dans le temps et le lieu de travail (rixe entre un contremaître et un
ouvrier) ou lorsque la fonction a fourni au préposé l’instrument (véhicule utilisé pour le compte
personnel du préposé) ou l’occasion du dommage (employé de banque fabriquant des faux
titres avec des titres de rebut ou spéculant avec les titres des clients).

C. La responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves


(art. 1384 al. 6 C. civ.)
Le Code civil déclarait les instituteurs responsables du dommage causé par leurs élèves pen-
dant le temps qu’ils étaient sous leur surveillance. Mais des lois de 1899 et 1937 suppriment tant
à l’égard des instituteurs privés que des instituteurs publics la présomption de faute de
l’art. 1384 al. 6 (la faute doit être prouvée) et substitue la responsabilité de l’État à celle de l’ins-
tituteur et, plus généralement, du personnel des établissements d’enseignement.

Remarques
L’article 1384 alinéa premier du Code civil est traditionnellement cité comme la source du
régime général de responsabilité civile délictuelle du fait des choses. Il dispose pourtant éga-
lement que :
« On est responsable… du dommage… causé par le fait des personnes dont on doit
répondre. »

Longtemps, cette formule a été considérée comme une annonce des divers régimes de res-
ponsabilité civile délictuelle du fait d’autrui ; limitativement visés ensuite aux alinéas 4, 5 et 6
du même article :
« Le père et la mère, en tant qu’ils exercent l’autorité parentale, sont solidairement respon-
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sables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux. » (Art. 1384 al. 4
C. civ.)
« Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés
dans les fonctions auxquelles ils les ont employés. » (Art. 1384 al. 5 C. civ.)
« Les instituteurs et les artisans, du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant
le temps qu’ils sont sous leur surveillance. » (Art. 1384 al. 6 C. civ.)

Or, certaines décisions de justice ont inauguré de nouvelles applications de l’article 1384 du


Code civil en interprétant la rédaction de l’alinéa premier comme instituant un régime géné-
ral de responsabilité civile délictuelle du fait d’autrui dont les alinéas 4, 5 et 6 ne sont que
des illustrations, par définition non exhaustives. (ex. : Cass. ass. plén., 29 mars 1991 ;
Association des centres éducatifs du Limousin c/ Cts Blieck : responsabilité d’une association
du fait du handicapé dont elle devait s’occuper ; Cass. 2e civ., 22 mai 1995 ; UAP et a. c/
Rendeygues et  a. : responsabilité d’un club sportif du fait de ses membres ; TGI Cusset,
29 février 1996 ; Alves c/ Royer et a. : responsabilité d’une association de chasse du fait de
ses adhérents ; Cass. crim., 10 octobre 1996 ; Association « Le foyer Saint-Joseph » et Cass.
crim., 26 mars 1997 ; Le Foyer Notre-Dame des Flots : responsabilité d’établissements du fait
du mineur dont ils ont la garde ; Cass. Crim., 28 mars 2000 ; Cie Abeille assurances : respon-
sabilité du tuteur du fait d’un mineur ; Cass. 2e civ., 12 décembre 2002 ; Axa Assurances Iard
c/ Yvon : responsabilité d’une association de majorettes du fait de ses membres).
Dans certains cas exceptionnels, le législateur édicte une responsabilité sans faute prou-
vée ni présumée, mais simplement fondée sur le risque (« responsabilité » de l’employeur en
cas d’accidents de travail ; responsabilité des exploitants d’aéronefs ; responsabilité des
constructeurs et exploitants de téléphériques ; responsabilité des exploitants d’installations et

201111TDPA0413 13
Introduction au droit • Série 4

de navires nucléaires, etc.). Les fondements de la responsabilité (quasi)délictuelle sont


donc divers puisque cette responsabilité peut, selon les cas, reposer sur une faute (res-
ponsabilité du fait personnel, etc.), la solidarité (responsabilité des père et mère, etc.), une
garantie (responsabilité du fait des produits défectueux, etc.) un risque (responsabilité de
l’employeur en cas d’accidents du travail, etc.), etc. Il s’ensuit que la responsabilité (quasi)
délictuelle remplit plusieurs fonctions : la punition de la faute, la réparation du préjudice,
la prévention du dommage.
Outre le fait générateur, le dommage est une autre des trois conditions requises pour la mise en
œuvre de la responsabilité civile.

Section 2. Le dommage

Un dommage doit résulter de tout fait générateur de responsabilité civile. Pour être réparable, ce
dommage doit présenter certains caractères. Il peut revêtir différents aspects.

I. Les caractères du dommage réparable


Le dommage doit être certain et direct.
Ainsi, un préjudice purement éventuel ne peut donner lieu à indemnité, car il est possible qu’il ne
se réalise pas. Mais un dommage futur qui surviendra certainement et qui est d’ores et déjà
évaluable ouvre droit à réparation. De même, la perte d’une chance, car la jurisprudence moderne
estime qu’une espérance de gain a en soi une valeur (perte d’une chance par la faute d’un trans-
porteur, un cheval n’ayant pas pu prendre le départ d’une course faute d’être amené à temps et
en bon état ; perte de la chance de pouvoir se présenter à un examen, etc.).
Le dommage doit aussi être direct. Pour qu’il y ait lieu à réparation, il faut que le dommage soit
la conséquence prévisible et immédiate de la faute. Prenons l’exemple classique imaginé par
Pothier au xviiie siècle. Une vache malade avait contaminé le troupeau d’un pré voisin, toutes les
bêtes étaient mortes. Le propriétaire du troupeau ruiné, se pend, sa fille fiancée voit ses fian-
çailles rompues et sombre en pleine misère. Quel dommage devra réparer le propriétaire de la

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vache malade ? Le dommage direct, c’est-à-dire la valeur du troupeau. Il n’est pas responsable
des conséquences médiates de sa faute.

II. Les types de dommages


Le dommage peut être matériel et/ou moral.
Le dommage est matériel lorsqu’il constitue une atteinte à la personne physique ou une atteinte
au patrimoine (privation ou détérioration d’un bien corporel ; perte d’une clientèle ; diminution de
la capacité de travail…).
Le dommage est moral lorsqu’il consiste en une atteinte à l’honneur de la personne ; dans les
douleurs physiques et morales provoquées chez la victime par l’accident (pretium doloris) ; dans
le chagrin causé à ses proches par la mort ou les souffrances de la victime.
Le lien de causalité entre le fait générateur et le dommage est le troisième et dernier élément
permettant la mise en œuvre de la responsabilité civile.

Section 3. Le lien de causalité

Le dommage doit être la conséquence du fait générateur, il doit y avoir un rapport de cause
à effet entre la faute et le dommage. Or, il est bien rare qu’un dommage n’ait qu’une seule
cause : laquelle ou lesquelles retenir ? La doctrine est divisée. Les uns tiennent pour la théo-
rie de l’équivalence des conditions : toutes les causes qui ont contribué à la réalisation du

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UE 111 • Introduction au droit

dommage doivent être retenues sans distinction. Les autres, la majorité, tiennent pour la théorie
de la causalité adéquate : il faut distinguer entre les causes principales (dites génériques) et les
causes secondaires. Il ne faudra retenir que les premières qui ont provoqué le dommage et sans
lesquelles il ne se serait pas produit, et faire abstraction des autres.
La jurisprudence est incertaine ; toutefois, il semble qu’en matière de responsabilité du fait per-
sonnel, elle se fonde sur la théorie de l’équivalence des conditions, car les données du litige sont
généralement simples. Au contraire, en matière de responsabilité du fait des choses ou du fait
d’autrui où les données des procès sont généralement plus complexes, elle paraît se montrer
plus favorable à la thèse de la causalité adéquate.
Lorsque la victime a pu réunir la preuve des trois conditions de mise en œuvre de la responsabi-
lité civile, le responsable peut tenter de s’exonérer de sa responsabilité.

Chapitre 2. Les causes d’exonération


Seules des causes d’exonération légales peuvent être invoquées, à l’exclusion des causes
d’exonération conventionnelles.

Section 1. Les causes d’exonération légales

Quelles sont ces causes d’exonération et comment s’appliquent-elles selon les régimes de
responsabilité ?

I. Inventaire des causes d’exonération


Les causes d’exonération de responsabilité civile prévues par la loi sont essentiellement le cas
de force majeure, le fait d’un tiers, le fait de la victime.

A. Le cas de force majeure


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C’est un événement imprévisible et insurmontable (ouragan, tremblement de terre, tempête,


guerre, etc.), un événement irrésistible et soudain.
C’est aussi un événement extérieur à la personne du débiteur ou de l’auteur du délit. Il ne
doit pas avoir été déclenché ou aggravé par un acte de ce dernier. En matière de responsabilité
du fait des choses, la jurisprudence exige même que l’événement ait été extérieur à la chose : le
gardien ne sera pas exonéré, si le dommage prend sa source dans un vice de la chose (rupture
d’un frein, éclatement d’un pneu, etc.).

B. Le fait d’un tiers


Pour être exonératoire, il doit présenter les mêmes caractères que la force majeure. Ce
tiers ne doit pas être un représentant légal ou conventionnel du débiteur ou de l’auteur du délit,
ni une personne dont il assume la responsabilité de ses actes (préposé, par exemple). Ce fait
d’un tiers peut n’être que partiellement exonératoire, s’il n’est pas la cause exclusive du
dommage.

C. Le fait de la victime
C’est un acte de la victime, fautif ou non qui est la cause exclusive ou partielle du dommage ;
d’où une exonération simplement partielle le cas échéant. En principe, ce fait doit aussi revêtir
les caractères de la force majeure.

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Introduction au droit • Série 4

Remarques
L’absence de faute, d’une part, et le rôle passif de la chose, d’autre part, peuvent parfois aussi
être considérés comme des causes exonératoires de responsabilité civile.
• L’absence de faute est-elle exonératoire de responsabilité ? En d’autres termes, peut-on
s’exonérer en prouvant que l’on n’a commis aucune faute, que le dommage a été provoqué
sans aucune intervention de sa part, que l’on a pris toutes les précautions qu’aurait pris un
bon père de famille ? Le problème ne se pose pas lorsque la victime a dû déjà démontrer la
faute de l’auteur du dommage (responsabilité du fait personnel). La question ne fait pas
davantage de difficulté lorsque la jurisprudence a posé une présomption irréfragable de res-
ponsabilité (ex. : régime général de responsabilité du fait des choses). Quant au régime
général de responsabilité civile du fait d’autrui, issu de l’interprétation jurisprudentielle de
l’article 1384 al.  1er du Code civil, il semble également que seule la preuve d’une cause
étrangère (force majeure) soit exonératoire. La preuve d’une absence de faute n’est donc pas
exonératoire. En réalité, pendant longtemps, l’absence de faute n’a été un moyen de défense
supplémentaire que pour les père et mère et les artisans. Mais, dorénavant, les père et mère
ne pourront plus invoquer leur absence de faute car la Cour de cassation a instauré une
responsabilité de plein droit à leur encontre et seule la preuve de la force majeure ou de la
faute de la victime pourra les exonérer de leur responsabilité du fait des dommages causés
par leurs enfants mineurs habitant avec eux (Cass. 2e  civ., 19 février 1997, Bertrand
c/ Domingues et a.). L’absence de faute ne s’appliquerait donc plus qu’aux artisans.
• Le rôle passif de la chose est-il exonératoire de responsabilité ? Une partie de la doc-
trine s’appuyant sur certains arrêts estime que le gardien d’une chose peut s’exonérer en
démontrant que la chose n’a joué qu’un rôle purement passif et a seulement subi une action
étrangère génératrice du dommage. Une chose aurait un rôle passif lorsqu’au moment de
l’accident, elle était placée et utilisée dans des conditions normales.

II. Application des causes d’exonération


Nous nous en tenons à l’application des causes d’exonération selon les régimes de responsabi-
lité étudiés dans notre programme.

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RESPONSABILITÉ (QUASI) DÉLICTUELLE
Responsabilité Responsabilité du fait des choses
du fait personnel Choses régime général Produits défectueux
1382-83 C. civ. 1384 al. 1er C. civ. 1386-1 à 1386-18 C. civ.
Force majeure X(1) X X
Fait d’un tiers X X
Fait de la victime X X X
Absence de faute
Rôle passif de la chose X
(1) Jouera très rarement dans la mesure où la victime aura dû prouver la faute.

RESPONSABILITÉ (QUASI) DÉLICTUELLE


Responsabilité du fait d’autrui
Artisans Commettants Instituteurs Régime général
1384 al. 6 C. civ. 1384 al. 5 C. civ. 1384 al. 6 C. civ. 1384 al. 1er C. civ.
Force majeure X X X X
Fait d’un tiers X X X X
Fait de la victime X X X X
Absence de faute X

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UE 111 • Introduction au droit

Section 2. La nullité des causes d’exonération


conventionnelles

Contrairement à la solution admise pour la responsabilité contractuelle, en matière de responsabilité


délictuelle, ces clauses sont nulles comme contraires à l’ordre public. La raison en est évidente : il
ne serait guère souhaitable ni opportun de permettre à l’auteur d’un délit de s’exonérer de sa faute
volontaire ou de sa faute d’imprudence. Est donc nulle, toute clause visant à s’exonérer de sa faute
personnelle. Par exception, la loi du 19 mai 1998, relative à la responsabilité du fait des produits
défectueux, dispose que les clauses exonérant de cette responsabilité peuvent être valables mais
seulement si elles sont stipulées entre professionnels, pour les dommages causés aux biens qui ne
sont pas utilisés par la victime principalement pour son usage ou sa consommation privée.
L’auteur du dommage peut-il objecter le consentement de la victime du dommage ? La jurispru-
dence répond généralement par la négative. En principe, l’acceptation des risques par la victime
ne l’empêche pas de demander réparation du dommage.
Quant à la responsabilité du fait des choses et du fait d’autrui  : le législateur par les articles  1384 et
suivants du Code civil n’a établi que des présomptions de faute pour faciliter l’action en répara-
tion de la victime. Il semble donc que celle-ci puisse valablement renoncer à s’en prévaloir, étant
bien entendu que même dans une telle hypothèse, elle conserve le droit de prouver la faute
personnelle de l’auteur du dommage en arguant des articles 1382 et 1383 du Code civil.

Chapitre 3. L’action en responsabilité


Rappelons que la responsabilité contractuelle ne permet de réparer que les fautes commises
dans l’exécution du contrat. Tout autre préjudice causé par quelque faute que ce soit sera réparé
sur le plan civil par une action en responsabilité délictuelle quand bien même la faute serait sur-
venue à l’occasion d’un contrat, soit lors de la conclusion du contrat (ex. : dol) soit après l’exé-
cution et l’expiration du contrat (concurrence déloyale, par exemple). On dit qu’il n’y a pas
« cumul des responsabilités », c’est-à-dire que la victime n’a pas d’option entre l’un ou l’autre
type de responsabilités (comme on l’a vu, ce principe fondamental connaît toutefois une atté-
nuation avec la loi du 19 mai 1998 précitée).
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En revanche, la victime d’un délit peut opter, le cas échéant, entre l’un ou l’autre régime du Code
permettant la réparation du dommage. Par exemple, une personne a été renversée par un
cycliste de 14 ans. La victime pourra notamment invoquer l’article 1383 (voire 1382) ou l’ar-
ticle 1384 al. 1er du Code civil : son choix sera fonction de la facilité de prouver la faute, de la
solvabilité de l’éventuel responsable, des causes d’exonération que l’on peut lui opposer.
Quelles sont les principales caractéristiques de l’action en responsabilité civile (quasi)délictuelle
et comment le dommage est-il réparé ?

Section 1. L’action
Quelles sont les juridictions compétentes, les personnes pouvant agir et la prescription de l’action ?

I. Compétence
Il convient d’appliquer les règles procédurales de droit commun (revoir la série 1). Cependant, à
noter qu’en matière de responsabilité délictuelle :
• l’action en réparation des dommages causés par un véhicule quelconque (même de l’Adminis-
tration) est de la compétence exclusive des tribunaux de grande instance et d’instance ;
• lorsque le délit civil est en même temps un délit pénal, le tribunal compétent pour statuer sur
l’action publique peut statuer sur l’action civile s’il en a été requis par la victime.

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Introduction au droit • Série 4

II. Personnes pouvant agir


Ce sont la victime, ses représentants légaux, ses héritiers plus généralement ses ayants cause
universels ou à titre universel, des créanciers par la voie de l’action oblique (sauf pour la répara-
tion d’un dommage moral ou d’une atteinte à l’intégrité corporelle).
S’appliqueront donc, généralement, les règles de droit commun relatives à la transmission des
obligations. Toutefois, il convient de signaler que les proches d’un défunt, victime d’un délit,
parents, alliés, amis, fiancés, concubins peuvent parfois obtenir réparation du dommage qu’ils
subissent personnellement. En effet, ils n’agissent pas en tant qu’ayant cause de la victime, mais
en leur nom propre.

III. Prescription de l’action


Prescription décennale de principe (art. 2226 C. civ. modifié par la loi n° 2008-561 du 17 juin
2008) :
« L’action en responsabilité née à raison d’un événement ayant entraîné un dommage
corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se
prescrit par dix  ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou
aggravé.
Toutefois, en cas de préjudice causé par des tortures ou des actes de barbarie, ou par des
violences ou des agressions sexuelles commises contre un mineur, l’action en responsa-
bilité civile est prescrite par vingt ans ; »

sauf dispositions législatives particulières. Ainsi, par exemple, on a signalé supra les délais
spécifiques prévus par la loi du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits
défectueux. Bien entendu, il doit être tenu compte des éventuelles causes d’interruption ou de
suspension de l’action.

Section 2. La réparation du dommage

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Quels sont le montant et le mode de réparation ?

I. Montant de la réparation
Le montant de la réparation doit en principe être égal au montant du préjudice subi.

II. Mode de réparation


En cas de détérioration ou destruction d’une chose : dommages-intérêts égaux aux frais de
remise en état, augmentés d’une indemnité correspondant au trouble de jouissance et plafonnés
à la valeur de remplacement d’une chose équivalente.
En cas d’atteinte à l’intégrité physique : capital ou rente révisables s’il survient un préjudice nou-
veau ou une aggravation du préjudice.
Une personne peut voir sa responsabilité civile engagée. Elle peut aussi devoir répondre de ses
actes au plan pénal.

18
UE 111 • Introduction au droit

Titre 2. L’entreprise
et la responsabilité pénale

Retrouvez des compléments sur ce thème sur le site Internet de l’Intec www.cnamintec.fr,
rubrique « Ressources pédagogiques ».

Quiconque outrepasse la « loi » pénale commet une infraction, engage de ce fait sa responsabi-
lité pénale et encourt les peines corrélatives. Devoir rendre compte de sa responsabilité pénale
envers la Nation n’est pas anodin. C’est pourquoi le droit pénal encadre très précisément la
qualification d’infraction qui est le fait générateur de la responsabilité pénale (Chapitre 1), la
détermination des personnes tenues pour pénalement responsables (Chapitre 2) et la mise en
œuvre de la responsabilité pénale (Chapitre 3).

Chapitre 1. L’infraction : fait générateur


de responsabilité pénale
Il existe plusieurs sortes d’infractions pénales mais, pour être constituée, toute infraction doit
réunir trois éléments.

Section 1. La principale classification des infractions pénales

Aux termes de l’article 111-1 du Code pénal :


« Les infractions pénales sont classées, suivant leur gravité, en crimes, délits et
contraventions. »

Le critère retenu dans cette classification est donc celui de la gravité de l’infraction commise.
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I. Les contraventions
Les contraventions sont les infractions les moins graves. Elles sont elles-mêmes classées en
cinq classes (catégories).

Exemples
• Art. R. 623-2 C. pénal :
« Les bruits ou tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité d’autrui sont punis
de l’amende prévue pour les contraventions de la 3e classe… »

• Art. R. 632-1 C. pénal :


« Hors le cas prévu par l’article R. 635-8, est puni de l’amende prévue pour les contraven-
tions de la 2e classe le fait de déposer, d’abandonner, de jeter ou de déverser, en un lieu
public ou privé, à l’exception des emplacements désignés à cet effet par l’autorité admi-
nistrative compétente, des ordures, déchets, déjections, matériaux, liquides insalubres ou
tout autre objet, de quelque nature qu’il soit, y compris en urinant sur la voie publique, si
ces faits ne sont pas accomplis par la personne ayant la jouissance du lieu ou avec son
autorisation… »

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Introduction au droit • Série 4

II. Les délits


Les délits pénaux revêtent une gravité plus grande que celle des contraventions.

Exemples
Délit de vol (art. 311-1 C. pénal), délit d’escroquerie (art. 313-1 C.  pénal), délit d’abus de
confiance (art. 314-1 C. pénal), etc.

III. Les crimes


Les crimes sont les infractions les plus graves.

Exemples
Meurtre (art. 221-1 C. pénal), viol (art. 222-23 C. pénal), etc.

Remarque
Les infractions pénales peuvent être classées à partir d’autres critères.
• Infractions de commission et infractions d’omission : selon que l’infraction consiste à faire ce
qui est interdit (voler, etc.) ou à ne pas faire ce qui devrait l’être (non-assistance à personne
en danger, etc.).
• Infractions instantanées et infractions continues : selon que l’infraction est commise en une
seule unité de temps (vol, etc.) ou sur une certaine période (séquestration, etc.).
• Etc.

Section 2. Les éléments constitutifs de toute infraction pénale

Chaque infraction a sa propre « identité » (ex. : le vol ne correspond pas au comportement de

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l’abus de confiance), mais pour qu’il y ait infraction, quelle qu’elle soit, trois éléments consti-
tutifs généraux doivent être réunis : l’élément légal, l’élément matériel et l’élément moral
de l’infraction.

I. L’élément légal
D’après la règle de légalité des infractions et des peines, nul ne peut être poursuivi du chef
d’une infraction et puni d’une peine qui ne sont pas expressément prévues par la « loi ».
La branche du droit pénal appartient au droit public (cf. série 1), c’est à la collectivité dans son
ensemble qu’il est porté atteinte lorsqu’une personne est victime d’une infraction. Être
reconnu coupable d’une infraction pénale est à ce point infamant, que les juges compé-
tents (juridictions répressives) pour se prononcer sur l’action publique (action en justice
exercée au plan pénal) ne peuvent librement interpréter les textes en vigueur ou mener des
raisonnements par analogie ; contrairement aux matières relevant d’autres branches du droit
(droit civil, etc.). Le juge pénal est strictement tenu de vérifier si le comportement dont il
doit connaître fait ou non l’objet d’une « loi » pénale. Dans l’affirmative, il y a lieu de
condamner (dans la limite des peines légalement indiquées). Dans le cas contraire, il n’y a
pas infraction pénale.
Les contraventions sont, en réalité, créées par les règlements (décrets, arrêtés ministériels,
préfectoraux, municipaux).

20
UE 111 • Introduction au droit

Les crimes et délits sont créés par la loi stricto sensu ou par les ordonnances du
Gouvernement (on sait, en effet, que ces ordonnances ont force de loi).
Art. 111-2 C. pénal :
« La loi détermine les crimes et délits et fixe les peines applicables à leurs auteurs.
Le règlement détermine les contraventions et fixe, dans les limites et selon les distinctions
établies par la loi, les peines applicables aux contrevenants. »

Art. 111-3 C. pénal :
« Nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas défi-
nis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le
règlement.
Nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas prévue par la loi, si l’infraction est un crime
ou un délit, ou par le règlement, si l’infraction est une contravention. »

Art. 111-4 C. pénal :
« La loi pénale est d’interprétation stricte. »

Exemples
• L’article R.  623-2 du Code pénal est l’élément légal de la contravention de tapages
nocturnes.
• L’article 311-1 du Code pénal est l’élément légal du délit de vol.
• L’article 313-1 du Code pénal est l’élément légal du délit d’escroquerie.
• L’article 314-1 du Code pénal est l’élément légal du délit d’abus de confiance.
• L’article L. 242-6 du Code de commerce est l’élément légal, entre autres, du délit d’abus de
biens sociaux dans les sociétés anonymes (une loi, même non pénale, peut donc être source
de droit pénal).
• L’article 222-23 du Code pénal est l’élément légal du crime de viol.

II. L’élément matériel


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C’est le comportement (commission ou omission) par lequel se manifeste l’infraction. Chaque


infraction a son propre élément légal, elle a aussi, ce qui permet de la distinguer, son propre
élément matériel décrit par la « loi ». On ne peut conclure, dans une affaire donnée, à la qualifica-
tion d’une infraction que si toutes les composantes de son élément matériel sont accomplies.

EXEMPLES
• La contravention prévue par l’article R. 623-2 du Code pénal se manifeste par des « bruits
ou tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité d’autrui ».
Un bruit qui ne serait pas nocturne ou qui ne troublerait pas la tranquillité d’autrui ne consti-
tuerait pas ladite contravention.
• Le délit de vol mentionné à l’article 311-1 du Code pénal est constitué par :
« La soustraction frauduleuse de la chose d’autrui. »

L’élément matériel du vol consiste donc à s’emparer du bien de quelqu’un d’autre, sans en
avoir été mis en possession par cette personne. À cet égard, le vol ne doit pas être confondu
avec l’escroquerie ou encore l’abus de confiance dont l’élément matériel est fort différent.
• Le délit d’escroquerie mentionné à l’article 313-1 du Code pénal consiste en :
« Le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une
qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne
physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à
remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir
un acte opérant obligation ou décharge. »

201111TDPA0413 21
Introduction au droit • Série 4

L’élément matériel de l’escroquerie consiste donc à tromper (par un faux nom, des
manœuvres,…) une personne afin que celle-ci fournisse à l’escroc un bien ou un service.
• Le délit d’abus de confiance mentionné à l’article 314-1 du Code pénal consiste en :
« Le fait par une personne de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, des valeurs ou
un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a acceptés à charge de les rendre, de
les représenter ou d’en faire un usage déterminé. »

L’élément matériel de l’abus de confiance apparaît dans le cadre de l’exécution d’un contrat
(dépôt, travail,…) correctement formé, alors même qu’il vient à l’idée de celui qui détient de
manière provisoire (dépositaire, salarié,…) un bien quelconque (corporel ou non) appartenant
à son cocontractant (déposant, employeur,…), de détourner le bien en question. L’auteur du
détournement de bien abuse ainsi de la confiance qui lui avait été accordée par son
cocontractant devenu victime.
• Le délit de faux en écriture prévu par les articles 441-1 et suivants du Code pénal est consti-
tué par :
« Une altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par
quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée
qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant
des conséquences juridiques. »

Ne constituerait pas un tel faux en écriture l’altération d’un écrit qui ne serait pas susceptible
de porter préjudice…

III. L’élément moral


C’est l’aspect psychologique de l’infraction. Il doit y avoir une intention coupable : l’infrac-
tion est perpétrée sciemment, de mauvaise foi, en connaissance de cause, etc.

Exemple
Le délit de faux en écriture prévu par les articles 441-1 et suivants du Code pénal est constitué

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par « une altération frauduleuse de la vérité… ».

Remarque
Par exception, l’élément moral est absent dans certaines infractions dites non intention-
nelles qui se réalisent sans intention coupable (coups et blessures involontaires, etc.). En ce
sens, la loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non inten-
tionnels énonce qu’il peut y avoir délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence
ou de négligence.
Par conséquent, une infraction n’est punissable que si, au moment des faits, elle est caractéri-
sée par un élément légal, ainsi que par l’élément matériel et l’élément moral correspondants.
Mais qui encourt les sanctions pénales ?

Chapitre 2. Les personnes tenues


pour pénalement responsables
Notre droit connaît les personnes physiques et les personnes morales, les unes et les autres
peuvent être pénalement responsables, et ce, à différents titres.

22
UE 111 • Introduction au droit

Section 1. Les personnes physiques et les personnes morales

Si la responsabilité pénale des personnes physiques a toujours été envisagée, ce n’est qu’avec
l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal, le 1er mars 1994, que la responsabilité pénale des
personnes morales a fait son apparition.

I. Les personnes physiques


Évidemment, les personnes physiques, c’est-à-dire les personnes humaines, sont potentielle-
ment pénalement responsables (sur la notion de personnalité juridique, revoir la série 2).

II. Les personnes morales


Le nouveau Code pénal, entré en vigueur le 1er mars 1994, institue la responsabilité pénale des
personnes morales.
Toutes les personnes morales (sociétés civiles ou commerciales, GIE, associations, collectivi-
tés territoriales, etc.), sauf l’État, peuvent être tenues pour pénalement responsables.
Cependant, le nouveau Code pénal de 1994 disposait que cette responsabilité pénale des
personnes morales n’était pas encourue pour toutes les infractions mais seulement pour
celles dont la loi le prévoyait expressément. Or, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant
adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (dite loi « Perben II ») a procédé à
une extension de la responsabilité pénale des personnes morales : depuis le 31 décembre
2005, toutes les infractions sont susceptibles d’entraîner la responsabilité pénale des per-
sonnes morales.
À noter que, de par leur nature juridique, les personnes morales ne sont responsables que
des infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants, et que la
responsabilité pénale des personnes morales n’empêche pas la mise en jeu de la respon-
sabilité pénale des personnes physiques réellement impliquées.
Art. 121-2 C. pénal :
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« Les personnes morales, à l’exclusion de l’État, sont responsables pénalement, selon les
distinctions des articles 121-4 à 121-7 des infractions commises, pour leur compte, par
leurs organes ou représentants.
Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénale-
ment que des infractions commises dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet
de conventions de délégation de service public.
La responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes phy-
siques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du qua-
trième alinéa de l’article 121-3. »

Que l’on soit personne physique ou personne morale, il y a diverses façons de prendre part à une
infraction et donc d’engager sa responsabilité pénale.

Section 2. La responsabilité pénale des personnes


selon le degré de leur implication

Il convient de distinguer les notions d’action, de coaction, de complicité et de tentative.

201111TDPA0413 23
Introduction au droit • Série 4

I. Notions d’action et de coaction


L’auteur d’une infraction est la personne qui commet personnellement l’élément matériel et
l’élément moral constitutifs de cette infraction.
Le coauteur d’une infraction est toute personne qui participe à la consommation (pleine réa-
lisation) de l’infraction, de la même manière que l’auteur (l’infraction est commise par plu-
sieurs auteurs).
Par extension, le Code pénal considère comme auteur toute personne qui a tenté une infraction
(voir infra).
Auteur et coauteur d’une infraction encourent pleinement les peines prévues pour sa sanction.

II. Notion de complicité


Au regard de la loi pénale (élément légal), est complice la personne qui, en connaissance de
cause, facilite la réalisation d’un crime ou d’un délit.
L’acte de complicité est donc empreint d’intention coupable (élément moral).
L’acte de complicité (élément matériel) doit être accessoire à une infraction principale
(crime ou délit) qu’il favorise : le complice contribue à ce que l’auteur accomplisse cette infrac-
tion principale.
L’acte de complicité est antérieur ou concomitant à la consommation de l’infraction.
Concrètement, l’acte de complicité peut consister en une assistance (conduire un véhicule,
etc.), une fourniture de moyens (armes, etc.) ou un comportement visant à provoquer l’infrac-
tion (par des promesses, des instructions, etc.).
En principe, le complice encourt les mêmes peines que l’auteur de l’infraction principale.
Toutefois, les juges, usant du pouvoir de modulation qui leur est laissé, condamnent souvent le
complice à une peine inférieure à celle de l’auteur.
Art. 121-7 C. pénal :
« Est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assis-

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tance, en a facilité la préparation ou la consommation.
Est également complice la personne qui, par don, promesse, menace, ordre, abus d’auto-
rité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la
commettre. »

Art. 121-6 C. pénal :
« Sera puni comme auteur le complice de l’infraction, au sens de l’article 121-7. »

Remarques
• La loi ne mentionne pas en termes généraux la complicité de contravention. Cette complicité
doit pourtant être punissable si l’élément légal de telle ou telle contravention le prévoit.
• La complicité ne doit pas être confondue avec le délit pénal de recel qui est une infraction à
part entière, ne contribuant pas à la réalisation d’une autre infraction, et qui est ainsi définie
par l’article 321-1 du Code pénal :
« Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire
office d’intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d’un
crime ou d’un délit.
Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout
moyen, du produit d’un crime ou d’un délit.
Le recel est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende. »

24
UE 111 • Introduction au droit

III. Notion de tentative


Il y a tentative lorsqu’il y a commencement d’exécution d’une infraction et que celle-ci n’est
pas entièrement consommée car son auteur en a été empêché autrement que par sa propre
volonté. Il n’y a donc pas tentative si le comportement répréhensible s’arrête aux seuls actes
préparatoires de l’infraction (établissement d’un plan pour commettre un vol, etc.) sans aller
jusqu’au commencement d’exécution proprement dit (pénétration par effraction dans les lieux,
etc.), si l’intention coupable n’existe pas ou si l’auteur se désiste volontairement en cours d’exé-
cution (repentir, etc.).
Art. 121-5 C. pénal :
« La tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution,
elle n’a été suspendue ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépen-
dantes de la volonté de son auteur. »

Il ne peut y avoir tentative que pour les crimes ou, si la loi le prévoit expressément, pour
les délits.
La tentative est en principe punie des mêmes peines que l’infraction consommée. Les
juges peuvent néanmoins moduler les sanctions.
L’infraction étant qualifiée, les protagonistes étant repérés, comment la responsabilité pénale
est-elle mise en œuvre ?

Chapitre 3. La mise en œuvre


de la responsabilité pénale
La responsabilité pénale est engagée par voie de justice selon les règles de la procédure pénale
et se traduit par la condamnation des intervenants à l’infraction à des peines bien définies ; étant
entendu que cette responsabilité peut être limitée par le jeu de certains facteurs.

Section 1. La procédure pénale


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Les règles procédurales énoncées dans la série 1 du présent cours peuvent être ici rappelées et
précisées.

I. Les juridictions compétentes


Les juridictions de jugement compétentes sont les juridictions répressives telles qu’elles sont
instituées en l’état actuel du droit interne français.

A. En matière de contraventions
Pour toutes les contraventions, du point de vue de la compétence d’attribution au premier degré,
est compétent le tribunal de police (pour les contraventions de la cinquième classe ; à savoir
les contraventions les plus graves) ou la JDP (juridiction de proximité, pour les quatre premières
classes de contraventions) du lieu où la contravention a été commise, du lieu de sa consta-
tation ou du lieu de la résidence du prévenu (compétence territoriale).
Devant la cour d’appel (Chambre des appels correctionnels) territorialement compétente,
il peut être interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de police ou par la JDP.
Devant la Cour de cassation (Chambre criminelle), il peut être formé pourvoi contre les déci-
sions rendues par les juridictions pénales du fond.

201111TDPA0413 25
Introduction au droit • Série 4

B. En matière de délits
Au premier degré, est compétent le tribunal correctionnel (compétence d’attribution) du lieu
où le délit a été commis, du lieu de la résidence du prévenu ou du lieu de son arrestation
(compétence territoriale).
Devant la cour d’appel (Chambre des appels correctionnels) territorialement compétente,
il peut être interjeté appel du jugement rendu par le tribunal correctionnel.
Devant la Cour de cassation (Chambre criminelle), il peut être formé pourvoi contre les déci-
sions rendues par les juridictions pénales du fond.

C. En matière de crimes
La juridiction qui, au cours d’un procès, rend la première décision en matière de crimes, est la
cour d’assises (compétence d’attribution) du lieu où le crime a été commis, du lieu de la
résidence de l’accusé ou du lieu de son arrestation (compétence territoriale).
La loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les
droits des victimes a opéré une importante réforme en instituant, entre autres, une sorte
d’appel en matière criminelle contre les arrêts de condamnation (mais pas contre les arrêts
d’acquittement) prononcés par les cours d’assises. Il s’agit d’un « appel circulaire » dit aussi
« tournant » car les arrêts de condamnation rendus par les cours d’assises statuant en
premier ressort peuvent désormais faire l’objet d’un appel devant une autre cour d’assises
et désignée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation.
Devant la Cour de cassation (Chambre criminelle), il peut être formé pourvoi contre les déci-
sions rendues par les cours d’assises.

Remarques
• Des étapes procédurales peuvent précéder la saisine des juridictions répressives de juge-
ment. Ainsi, un juge d’instruction (à la fois juge et enquêteur) intervient parfois en matière
de contraventions et de délits et obligatoirement en matière de crimes, avant que ne se
prononcent les juridictions compétentes. Le juge d’instruction décide notamment de la

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poursuite (ordonnance de mise en examen) ou non (ordonnance de non-lieu) de la pro-
cédure pénale. À noter qu’il peut être fait appel, devant la chambre de l’instruction, des
ordonnances ou décisions rendues dans le cadre de l’instruction.
• Il existe des juridictions pénales spécialisées : Cour de justice de la République (compé-
tente pour statuer en matière de crimes et de délits commis par les membres du Gouvernement
dans l’exercice de leurs fonctions) ; juridictions pour enfants…
• Il convient de mentionner également l’existence d’instances pénales internationales. Ainsi, la
France a-t-elle signé le 18 juillet 1998 le traité relatif à la Cour pénale internationale (juridic-
tion permanente et indépendante, reliée au système des Nations unies, ayant compétence à
l’égard des crimes les plus graves qui touchent à l’ensemble de la communauté internatio-
nale) ; ce qui a donné lieu, le 8 juillet 1999, au vote de la loi constitutionnelle n° 99-568 insé-
rant au titre VI de la Constitution française un article 53-2 afin que le traité précité ne soit pas
contradictoire avec ladite Constitution : « La République peut reconnaître la juridiction de la
Cour pénale internationale dans les conditions prévues par le traité signé le 18 juillet 1998 »
(art. 53-2 Constitution du 4 octobre 1958).

II. Les personnes pouvant agir


Qui exerce l’action en justice au plan pénal ?

26
UE 111 • Introduction au droit

A. L’exercice de l’action en justice


par la victime directe de l’infraction
Dans certains cas, la victime directe (ou ses ayants droit) de l’infraction peut prendre l’initiative d’exer-
cer l’action publique (action en justice au plan pénal) devant la juridiction pénale compétente.
Cependant, le plus souvent, l’infraction cause au plan civil un dommage à la victime. Celle-ci peut
alors, soit exercer l’action civile devant la juridiction non répressive compétente (l’action publique
étant exercée séparément devant la juridiction pénale compétente), soit exercer l’action civile devant
la juridiction pénale qui statue sur l’action publique (la victime se porte partie civile) (revoir la série 1).

B. L’exercice de l’action en justice par le ministère public


Puisque l’action publique tend à faire sanctionner le non-respect d’une loi pénale, cette action
est mise en œuvre par les magistrats du ministère public (Parquet) ou certains fonctionnaires
dont le rôle est de veiller à ce qu’il ne soit pas porté atteinte à la collectivité.
Par conséquent, l’initiative de l’action publique appartient au ministère public, que la victime
directe agisse ou non au plan pénal.

III. Les délais pour agir


L’action publique doit être exercée dans des délais assez courts, au-delà desquels il y a
prescription.

A. En matière de contraventions
Le délai de prescription de l’action publique est de 1 an.

B. En matière de délits
Le délai de prescription de l’action publique est de 3 ans.
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C. En matière de crimes
Le délai de prescription de l’action publique est de 10 ans.
Par exception, par exemple, l’action publique relative aux crimes contre l’humanité est imprescriptible.

Remarques
• Les délais de prescription de l’action publique courent à dater de la réalisation de l’infraction
(cas des infractions instantanées) ou à dater du moment où l’infraction prend fin ou est
constatée (cas des infractions continues).
• L’exercice des voies de recours obéit, en matière pénale, à des délais particuliers (ex. : délai
de 5 jours francs pour former un pourvoi en cassation…).
• Si l’infraction cause à la victime un préjudice au plan civil et que l’action publique est pres-
crite, il est toujours possible pour la victime d’exercer l’action civile devant la juridiction non
répressive compétente tant que cette action civile n’est pas prescrite.

Section 2. Les peines encourues

Pour chaque catégorie d’infractions, la loi indique une échelle des peines ; lesquelles peuvent
être modulées.

201111TDPA0413 27
Introduction au droit • Série 4

I. L’échelle des peines prévues par la loi


La loi distingue les peines encourues par les personnes physiques de celles encourues par les
personnes morales.

A. Les peines applicables aux personnes physiques


1. Les peines contraventionnelles
Les peines principales sont l’amende (dont un montant maximum est indiqué pour chaque
classe de contraventions) ou des peines privatives ou restrictives de droits (ex. : suspension,
pour une durée limitée, du permis de conduire ; confiscation d’un objet…).
Pour certaines contraventions, des peines complémentaires peuvent être expressément prévues
(ex. : le règlement qui réprime une contravention de la cinquième classe peut également prévoir,
à titre de peine complémentaire, la peine de travail d’intérêt général pour une durée de vingt à
cent vingt heures, etc.).

2. Les peines correctionnelles


Ces peines sont l’amende (dont le montant maximum encouru est indiqué dans l’élément légal
de chaque délit), l’emprisonnement (dont la durée maximale encourue est indiquée dans l’élé-
ment légal de chaque délit, sans que cette durée excède 10 ans), le jour-amende, le travail
d’intérêt général, des peines privatives ou restrictives de droits et des peines complémentaires.

3. Les peines criminelles


Il s’agit essentiellement de la réclusion criminelle (dont la durée maximale encourue, qui peut
être la perpétuité, est indiquée dans l’élément légal de chaque crime). Cette peine privative de
liberté n’est pas exclusive d’une peine d’amende ou de peines complémentaires.

Remarques
• Dans le but de contribuer au désencombrement des tribunaux tout en apportant une nouvelle
réponse répressive à certaines infractions, le législateur a adopté la loi n° 99-515 du 23 juin

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1999 renforçant l’efficacité de la procédure pénale. Ce texte institue notamment la composition
pénale. Il s’agit d’une procédure intermédiaire entre le classement sans suite et le jugement
traditionnel, par la faculté offerte au procureur de la République, tant que l’action publique n’a
pas été mise en mouvement, de proposer à une personne majeure qui reconnaît avoir commis
des contraventions ou délits limitativement visés, de se plier à des mesures précises (amende
de composition, travail non rémunéré au profit d’une collectivité, etc.). Lorsque l’auteur des
faits donne son accord aux mesures proposées, le procureur de la République saisit le pré-
sident du tribunal qui valide ou non la composition. Dans l’affirmative, les mesures décidées
doivent être mises en œuvre et l’exécution de la composition pénale par l’auteur des faits éteint
l’action publique. En cas d’échec de la composition pénale (refus par l’intéressé des mesures
proposées, non-validation de ces mesures par le président du tribunal, non-exécution des
mesures acceptées et validées), le parquet décide des poursuites à engager.
• Institué par la loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005, le placement sous surveillance élec-
tronique mobile peut être ordonné à l’encontre d’une personne majeure condamnée à une
peine privative de liberté d’une durée au moins égale à sept ans (ou d’une durée au moins
égale à cinq ans, lorsque la personne a été condamnée pour un crime ou un délit commis
une nouvelle fois en état de récidive légale) et dont l’expertise médicale a constaté la dange-
rosité. Cette mesure est prononcée lorsqu’elle apparaît indispensable pour prévenir la réci-
dive à compter du jour où la privation de liberté prend fin. Le placement sous surveillance
électronique mobile, qui doit être accepté par le condamné, emporte pour celui-ci l’obliga-
tion de porter pour une durée de deux ans, renouvelable une fois en matière délictuelle et
deux fois en matière criminelle, un émetteur permettant à tout moment de déterminer à dis-
tance sa localisation sur l’ensemble du territoire national.

28
UE 111 • Introduction au droit

B. Peines applicables aux personnes morales


1. Les peines contraventionnelles
Ce sont l’amende (dont le taux maximum encouru est égal au quintuple de celui prévu pour les
personnes physiques par le règlement qui réprime la contravention), des peines privatives ou
restrictives de droits (confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infrac-
tion ou de la chose qui en est le produit, etc.) et des peines complémentaires (interdiction, pour
une certaine durée, d’émettre des chèques…).

2. Les peines correctionnelles et criminelles


Ce sont l’amende (dont le taux maximum est, là encore, égal au quintuple de celui prévu pour les
personnes physiques par la loi qui réprime le délit ou le crime en question) et, dans les cas pré-
vus par la loi, diverses autres peines (interdiction de faire appel public à l’épargne, fermeture d’un
établissement de la personne morale ayant servi à commettre l’infraction, confiscation de la
chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction, interdiction d’exercer une ou plu-
sieurs activités professionnelles ou sociales, dissolution de la personne morale, etc.).

II. La modulation des peines


La loi indique donc, pour chaque infraction, les peines maximales encourues.

Exemple
Art. 313-1 al. 2 C. pénal :
« L’escroquerie est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende. »

Il s’ensuit que les peines prononcées par les juges peuvent être inférieures à ces peines maxi-
males (mais ne peuvent leur être supérieures !).
Cependant, dans leurs décisions, les juges doivent prendre en considération l’influence de divers
facteurs dont certains alourdissent les peines tandis que d’autres les allègent.
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A. Les facteurs d’augmentation des peines


Il s’agit de la récidive et de ce que le Code pénal regroupe sous l’intitulé de « circonstances
entraînant l’aggravation des peines ».

1. La récidive
Est récidiviste la personne qui, après avoir été déjà condamnée définitivement au plan
pénal, commet à nouveau une infraction (selon les cas : la même infraction ou une autre, dans
un délai limité ou non).
Lorsque la loi le prévoit, la récidive entraîne une augmentation des peines encourues.

Exemples

• Art. 132-10 C. pénal :
« Lorsqu’une personne physique, déjà condamnée définitivement pour un délit, commet,
dans le délai de cinq ans à compter de l’expiration ou de la prescription de la précédente
peine, soit le même délit, soit un délit qui lui est assimilé au regard des règles de la réci-
dive, le maximum des peines d’emprisonnement et d’amende encourues est doublé. »

201111TDPA0413 29
Introduction au droit • Série 4

• Art. 132-14 C. pénal :
« Lorsqu’une personne morale, déjà condamnée définitivement pour un délit, engage sa res-
ponsabilité pénale, dans un délai de cinq ans à compter de l’expiration ou de la prescription
de la précédente peine, soit par le même délit, soit par un délit qui lui est assimilé au regard
des règles de la récidive, le taux maximum de l’amende applicable est égal à dix fois celui qui
est prévu par la loi qui réprime ce délit en ce qui concerne les personnes physiques. »

2. Les circonstances entraînant l’aggravation des peines


Ces circonstances sont définies aux articles 132-71 à 132-80 du Code pénal.

a. La bande organisée
La bande organisée est tout groupement formé ou toute entente établie en vue de la prépa-
ration, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d’une ou plusieurs infractions.

b. Le guet-apens
Il consiste dans le fait d’attendre un certain temps une ou plusieurs personnes dans un lieu
déterminé pour commettre à leur encontre une ou plusieurs infractions.

c. La préméditation
C’est le dessein, formé avant l’action, de commettre un crime ou un délit déterminé.

d. L’effraction
L’effraction consiste dans le forcement, la dégradation ou la destruction de tout dispositif de
fermeture ou de toute espèce de clôture (est assimilé à l’effraction, l’usage de fausses clefs,
de clefs indûment obtenues ou de tout instrument frauduleusement employé pour actionner un
dispositif de fermeture sans le forcer ni le dégrader).

e. L’escalade
C’est le fait de s’introduire dans un lieu quelconque, soit par-dessus un élément de clôture,

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soit par toute ouverture non destinée à servir d’entrée.

f. L’usage d’armes ou instruments assimilés


Est une arme tout objet conçu pour tuer ou blesser. Est assimilé à une arme tout objet
destiné à tuer, blesser ou menacer.

g. Les atteintes racistes, antisémites ou xénophobes


Les peines encourues pour un crime ou un délit sont aggravées lorsque l’infraction est
commise à raison de l’appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la
victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (l’infraction doit être
précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature
portant atteinte à l’honneur ou à la considération de la victime ou d’un groupe de personnes dont
fait partie la victime à raison de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou sup-
posée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée).

h. Les atteintes à raison de l’orientation ou identité sexuelle


Dans les cas prévus par la loi, les peines encourues pour un crime ou un délit sont aggra-
vées lorsque l’infraction est commise à raison de l’orientation ou identité sexuelle, vraie ou
supposée, de la victime.

30
UE 111 • Introduction au droit

i. L’utilisation d’un moyen de cryptologie


Dans les cas prévus par la loi, les peines encourues pour un crime ou un délit sont aggra-
vées lorsque l’infraction est préparée, commise ou facilitée par l’utilisation d’un moyen de
cryptologie au sens de la législation pour la confiance dans l’économie numérique.

j. La proche parenté
Dans les cas prévus par la loi ou le règlement, les peines encourues pour un crime, un délit
ou une contravention sont aggravées lorsque l’infraction est commise par le conjoint, le
concubin ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ; mais aussi par
l’ancien conjoint, l’ancien concubin ou l’ancien partenaire lié à la victime par un pacte civil
de solidarité.

B. Les facteurs de diminution des peines


Les peines ou leur exécution peuvent être allégées, voire supprimées.

1. Le sursis
Le juge décide de la suspension de l’exécution d’une peine lorsqu’il prononce celle-ci avec
sursis. Le sursis peut être révoqué si son bénéficiaire commet de nouvelles infractions.

2. La dispense de peine
En matière de contraventions (sauf exceptions) ou de délits, la juridiction qui a déclaré cou-
pable un prévenu peut le dispenser de sa peine lorsqu’il apparaît que le reclassement du
coupable est acquis, que le dommage causé est réparé et que le trouble résultant de l’in-
fraction a cessé.

3. La prescription de la peine
Il y a prescription d’une peine, c’est-à-dire que cette peine ne peut plus être appliquée, quand
elle n’est pas exécutée au-delà d’un certain délai à dater de la condamnation définitive.
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Ce délai est de 3 ans en matière de contraventions, de 5 ans en matière de délits et de


20 ans en matière de crimes.

4. La grâce
La grâce peut être accordée par le président de la République. Elle emporte dispense d’exé-
cuter tout ou partie d’une peine.

5. L’amnistie
L’amnistie résulte d’une loi. Elle efface des condamnations et entraîne la remise des peines
qui ont été prononcées.

6. La réhabilitation
La réhabilitation emporte disparition de la condamnation pénale et de ses conséquences.
Elle est acquise soit de plein droit (lorsque, à certaines conditions, la personne condamnée n’a
pas commis de nouvelles infractions pendant un temps minimum), soit par décision de
justice.

7. Le paiement volontaire des amendes


Un décret du 2 septembre 2005, pris en application de la loi Perben II du 9 mars 2004, a aug-
menté le montant de la réduction de l’amende due en cas de paiement volontaire dans le

201111TDPA0413 31
Introduction au droit • Série 4

délai d’un mois à dater de la signification de la condamnation. Toutefois, sont exclues de


cette diminution : les amendes prononcées pour crimes, les amendes de composition, les
amendes douanières ou fiscales, certaines amendes forfaitaires et les amendes civiles.
Les peines encourues peuvent donc parfois être allégées. Mais il arrive que la responsabilité
pénale elle-même soit écartée.

Section 3. Les causes de limitation de responsabilité pénale

Ces causes emportant limitation ou exonération de responsabilité pénale sont liées à la per-
sonne de l’auteur de l’infraction ou au contexte de l’action.

I. Les causes liées à la personne de l’auteur

A. Les troubles psychiques ou neuropsychiques


N’est pas responsable pénalement la personne qui est atteinte, au moment des faits, d’un
trouble psychique ou neuropsychique annihilant son discernement ou le contrôle de ses actes.

B. La minorité
En principe, toute personne âgée de moins de dix-huit ans révolus est présumée pénalement
irresponsable. Cependant, des mesures spéciales peuvent être prises concernant les mineurs
délinquants (assistance, surveillance, etc.) et des condamnations pénales peuvent parfois être
prononcées à leur encontre (mineurs de plus de treize ans…).

II. Les causes liées au contexte de l’action

A. La contrainte

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N’est pas pénalement responsable la personne qui agit sous l’empire d’une force irrésistible (à
laquelle elle ne peut absolument pas résister) et imprévisible (que l’on ne peut absolument pas
prévoir). La contrainte s’apparente à la notion de force majeure du droit civil.

B. L’erreur sur le droit


N’est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru, par une erreur sur le droit
qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement accomplir l’acte : la personne pense
que l’acte qu’elle accomplit n’est pas répréhensible au regard du droit en vigueur.

C. L’ordre de la loi (fait justificatif)


N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par
des dispositions législatives ou réglementaires (ordre de la loi) : il n’y a pas violation de
domicile lorsque la loi prescrit de porter secours à personne en péril, etc.

D. Le commandement de l’autorité légitime (fait justificatif)


N’est pas responsable pénalement la personne qui accomplit un acte commandé par l’autorité
légitime (ordre donné par une autorité publique et compétente), sauf si cet acte est mani-
festement illégal : il n’y a pas violation de domicile par l’huissier qui pratique une saisie en vertu
d’une décision de justice, etc.

32
UE 111 • Introduction au droit

E. La légitime défense
N’est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-
même ou autrui, ou face au commencement d’exécution d’un crime ou d’un délit contre un bien,
accomplit dans le même temps un acte de défense nécessaire proportionné à la gravité de
l’atteinte.

F. L’état de nécessité
N’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent
menaçant elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la
personne ou du bien, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de
la menace : personne qui vole un pain pour ne pas mourir de faim, etc.
L’état de nécessité se distingue d’une part, de la contrainte car la personne qui agit pourrait faire
autrement (demander un pain, etc.) et, d’autre part, de la légitime défense car la personne qui
agit ne riposte pas à une attaque.

Remarque
La législation prévoit, en outre, des cas d’immunité familiale concernant certaines
infractions.
Art. 311-12 C. pénal :
« Ne peut donner lieu à des poursuites pénales le vol commis par une personne :
1° Au préjudice de son ascendant ou de son descendant ;
2° Au préjudice de son conjoint, sauf lorsque les époux sont séparés de corps ou autori-
sés à résider séparément.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque le vol porte sur des
objets ou documents indispensables à la vie quotidienne de la victime, tels que des docu-
ments d’identité, relatifs au titre de séjour ou de résidence d’un étranger, ou des moyens
de paiement. »
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Les entreprises doivent donc assumer leurs responsabilités civile et pénale et doivent égale-
ment, le cas échéant, faire face à leurs difficultés financières selon des règles prévues par le droit
en vigueur.

201111TDPA0413 33
2

partie
Le droit des entreprises
en difficulté

Au fil du temps, dans sa formulation comme dans ses dispositions, le droit s’intéressant aux diffi-
cultés financières des entreprises (difficultés dues, par exemple, à l’augmentation des coûts de
production, à la stagnation ou la diminution des ventes, etc.) a évolué d’un droit de la sanction
(« droit de la faillite ») à un « droit des entreprises en difficultés » qui a pour objectif de maintenir
en activité, autant que faire se peut, l’entreprise qui connaît des difficultés (le « débiteur ») en
conciliant ses intérêts et ceux de ses partenaires (créanciers, etc.) et qui distingue les mesures
de prévention (Titre 1) et, à défaut, le traitement judiciaire des difficultés des entreprises (Titre 2).
Ce droit est inscrit dans le Livre sixième du Code de commerce (art. L. 610-1 s.), dont les modi-
fications les plus récentes résultent essentiellement de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de
sauvegarde des entreprises, de l’ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 portant
réforme du droit des entreprises en difficulté, de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de
régulation bancaire et financière et de l’ordonnance n° 2010-1512 du 9 décembre 2010 portant
adaptation du droit des entreprises en difficulté et des procédures de traitement des situations
de surendettement à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée.
Le droit relatif aux entreprises en difficultés s’articule, entre prévention et traitement judi-
ciaire des difficultés, essentiellement autour de l’état de cessation des paiements de l’en-
treprise ; à savoir : son « impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif
disponible » (art. L. 631-1 al. 1er C. com.).
L’ensemble de ces dispositions s’applique à toute personne physique exerçant une activité
professionnelle indépendante (commerçant, artisan, agriculteur, professionnel libéral) et à
toute personne morale de droit privé commerciale ou non (sociétés, associations, GIE, etc.).
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En premier ressort, la juridiction compétente est soit le tribunal de commerce, pour tout
« débiteur » inscrit au Registre du commerce et des sociétés ou au Répertoire des métiers,
soit le TGI pour tout autre « débiteur ».

Titre 1. La prévention des difficultés


des entreprises
Retrouvez des compléments sur ce thème sur le site Internet de l’Intec www.cnamintec.fr,
rubrique « Ressources pédagogiques ».

Le législateur prévoit divers moyens destinés à anticiper les difficultés financières des entre-
prises (Chapitre 1) et à éviter qu’elles ne s’amplifient (Chapitre 2). Selon les cas, les juges, par
les décisions qu’ils prennent, n’interviennent pas ou interviennent peu dans ces procédures.

Chapitre 1. Les mesures destinées à anticiper


les difficultés
Plus tôt l’on a connaissance des éventuelles difficultés financières de l’entreprise, mieux on peut
tenter de les juguler. Cette prise de conscience des difficultés est favorisée d’une part, par la
maîtrise de l’information comptable et financière et, d’autre part, par l’alerte que donnent
certains protagonistes au chef de l’entreprise concernée.

201111TDPA0413 35
Introduction au droit • Série 4

Section 1. La détection des difficultés par l’information


comptable et financière

Aucun document procurant des informations sur la situation de l’entreprise ne doit être
négligé, y compris, lorsqu’ils existent, les documents de gestion et les documents de ges-
tion prévisionnelle. Ainsi, par exemple, dans le cadre des dispositions communes aux diverses
sociétés commerciales, s’agissant des comptes sociaux, le législateur exige notamment
que les dirigeants (selon les cas, conseil d’administration ou directoire de société anonyme,
gérant de SARL, etc.) établissent par écrit, à la clôture de chaque exercice, un rapport de
gestion qui « expose la situation de la société durant l’exercice écoulé, son évolution prévisible,
les événements importants survenus entre la date de la clôture de l’exercice et la date à laquelle
il est établi, ses activités en matière de recherche et de développement » (art. L. 232-1 II C. com.).
Autre exemple : dans les sociétés commerciales qui, à la clôture d’un exercice social,
comptent au moins 300 salariés ou dont le montant net du chiffre d’affaires est au moins
égal à 18 000 000 €, les dirigeants sont aussi tenus d’établir une situation de l’actif réali-
sable et disponible et du passif exigible, un compte de résultat prévisionnel, ainsi qu’un
tableau de financement et un plan de financement prévisionnel (art. L. 232-2 et R. 232-2
C. com.).
Quoi qu’il en soit, la nouvelle législation insiste sur l’importance de respecter les obliga-
tions en matière de tenue et d’exploitation des comptes annuels. Elle encourage même les
entreprises à recourir à l’analyse de tous leurs documents que peuvent leur fournir les
Groupements de prévention agréés.

I. Le respect des obligations concernant les comptes annuels


On sait que les entreprises ont l’obligation légale de tenir et de déposer leurs comptes
annuels dans des délais précis (sur les comptes annuels, revoir la série 3 du présent cours).

Exemple

Document de travail réservé aux élèves de l’Intec – Toute reproduction sans autorisation est interdite
Art. L. 232-23 C. com. (dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012) :
« I – Toute société par actions est tenue de déposer, au greffe du tribunal, pour être
annexés au registre du commerce et des sociétés, dans le mois suivant l’approbation des
comptes annuels par l’assemblée générale des actionnaires ou dans les deux mois sui-
vant cette approbation lorsque ce dépôt est effectué par voie électronique :
1° Les comptes annuels, le rapport de gestion, le rapport des commissaires aux comptes
sur les comptes annuels, éventuellement complété de leurs observations sur les modifica-
tions apportées par l’assemblée aux comptes annuels qui ont été soumis à cette dernière
ainsi que, le cas échéant, les comptes consolidés, le rapport sur la gestion du groupe, le
rapport des commissaires aux comptes sur les comptes consolidés et le rapport du
conseil de surveillance ;
2° La proposition d’affectation du résultat soumise à l’assemblée et la résolution d’affec-
tation votée. […] »

Or, à la veille de l’entrée en vigueur de la loi précitée du 26 juillet 2005 qui a réformé le droit
des entreprises en difficulté, les statistiques conduisaient à un double constat : nombreuses
étaient les entreprises qui ne déposaient pas ou déposaient tardivement leurs comptes et
ce sont ces mêmes entreprises qui, souvent, ont dû déposer leur bilan (le dépôt de bilan
est la formalité qui consiste, pour un débiteur en cessation des paiements, à saisir le tri-
bunal compétent en vue de l’ouverture d’une procédure judiciaire de traitement de ses
difficultés financières ; procédure qui aboutit parfois à la liquidation de l’entreprise : sur le
traitement judiciaire des difficultés des entreprises, voir chapitre suivant).

36
UE 111 • Introduction au droit

En ce sens :
« Dans une ville comme Paris, presque la moitié des débiteurs ne déposent pas leurs
comptes spontanément, même après une ou deux relances. De nombreuses raisons
peuvent expliquer le non-dépôt des comptes mais les statistiques sont édifiantes : 90 %
des SARL et 70 % des SA qui déposent leur bilan ont arrêté de produire leurs comptes
sociaux pour les deux années qui ont précédé leur dépôt de bilan. Il y a donc une corréla-
tion étroite entre les difficultés de l’entreprise et le non-dépôt des comptes. »

(Extrait des propos tenus par Albert Reins, Président de chambre honoraire du tribunal de com-
merce de Paris et Président de la commission Traitement des difficultés des entreprises de la
conférence des juges consulaires de France, lors d’une table ronde reproduite dans le Cahier de
droit de l’entreprise n° 1, de janvier-février 2006, p. 14).
Afin de sensibiliser les entreprises à l’outil précieux que constituent les comptes annuels
pour la détection des difficultés financières, la loi du 26 juillet 2005 prévoit notamment que,
en cas de carence de la part de ces entreprises, le Président du tribunal peut leur enjoindre
sous astreinte de produire les comptes sociaux (art. L. 611-2 II C. com.) :
« Lorsque les dirigeants d’une société commerciale ne procèdent pas au dépôt des
comptes annuels dans les délais prévus par les textes applicables, le président du tribunal
peut leur adresser une injonction de le faire à bref délai sous astreinte. »

D’ailleurs, pour renforcer l’information que reçoit à ce sujet le Président du tribunal, la loi n° 2012-
387 du 22 mars 2012 a créé l’article L. 232-24 du Code de commerce ainsi rédigé :
« Le greffier, lorsqu’il constate l’inexécution du dépôt prévu au I des articles L. 232-21 à
L. 232-23 informe le Président du tribunal de commerce pour qu’il puisse faire application
du II de l’article L. 611-2. »

Il demeure que, si cette mesure contraint davantage à la tenue et au dépôt de ces comptes, elle
ne rend pas leur compréhension plus aisée par les chefs d’entreprise. C’est la raison pour
laquelle la loi incite ces derniers à s’entourer de l’aide des groupements de prévention agréés.

II. L’incitation à adhérer à un groupement de prévention agréé


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Outre des avantages fiscaux liés à l’adhésion à un groupement de prévention agréé et qui
excèdent le cadre de ce cours, le législateur insiste sur l’intérêt informationnel qu’ont les
entreprises à adhérer à un tel groupement.
En effet, ce groupement, qui peut prendre la forme de toute personne morale de droit privé
et qui, lorsqu’il répond aux exigences du législateur (art. D. 611-1 s. C. com.), est agréé par
arrêté du représentant de l’État dans la région (l’agrément, après examen de la demande
déposée par le groupement, est accordé par le préfet de la région dans laquelle le groupement
a son siège), a pour mission de fournir à ses adhérents, de façon confidentielle, une analyse
des informations économiques, comptables et financières que ceux-ci s’engagent à lui
transmettre. Mieux, lorsque le groupement relève des indices de difficultés, il en informe le
chef d’entreprise et peut lui proposer l’intervention d’un expert (art. L. 611-1 C. com.).
Il convient cependant de souligner d’une part, que l’adhésion à un groupement de prévention
agréé est une faculté et non une obligation et, d’autre part, que l’adhérent n’est pas obligé
de suivre les avis formulés par le groupement.
Qu’elle adhère ou non à un groupement de prévention agréé, l’entreprise peut et parfois doit être
alertée par d’autres protagonistes des difficultés qu’elle connaît.

201111TDPA0413 37
Introduction au droit • Série 4

Section 2. Le rôle de l’alerte

La loi organise la diffusion des informations financières de l’entreprise afin de permettre


aux personnes qui ont accès à ces informations et qui décèlent des éléments inquiétants
(art. L. 611-2 C.  com. : « difficultés de nature à compromettre la continuité de l’exploita-
tion », telles qu’une diminution importante des commandes, des investissements conséquents
à effectuer pour une mise aux normes en vertu d’une loi nouvelle, etc.) de donner l’alerte au
chef d’entreprise en lui demandant des explications ; ce qui est censé conduire celui-ci à
prendre les mesures appropriées. Outre l’éventuelle contribution du groupement de prévention
agréé vu ci-avant, selon les cas, l’alerte doit être donnée (ceci est une obligation) par le
commissaire aux comptes s’il exerce ses fonctions dans le cadre de l’entreprise en diffi-
cultés prévisibles, tandis que cette alerte peut être donnée (ceci est un droit) par d’autres
personnes qui sont les associés de l’entreprise sociétaire, les représentants du personnel
et le président du tribunal compétent.

I. Le commissaire aux comptes a l’obligation


de donner l’alerte
Lorsqu’un commissaire aux comptes exerce ses fonctions dans le cadre d’une entreprise au
sein de laquelle il décèle des « faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation », il
est tenu de donner l’alerte.

A. La présence du commissaire aux comptes


La loi oblige à désigner un ou plusieurs commissaires aux comptes dans toute société
commerciale par actions (société anonyme, société en commandite par actions, etc.). Ainsi, à
propos des sociétés anonymes, l’article L. 225-218 du Code de commerce dispose :
« Le contrôle est exercé, dans chaque société, par un ou plusieurs commissaires aux
comptes. »

Dans les autres sociétés (sociétés civiles, sociétés commerciales de personnes telles que les

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sociétés en nom collectif), il y a obligation de désigner un commissaire aux comptes si, à la
clôture de l’exercice social, au moins deux des critères suivants sont atteints : le total du
bilan s’élève à 1 550 000 €, le montant hors taxes du chiffre d’affaires s’élève à 3 100 000 €,
le nombre moyen de salariés s’établit à 50 (ex. : pour les SNC, ces règles figurent aux articles
L. 221-9 et R. 221-5 du Code de commerce).
L’obligation de désigner un commissaire aux comptes repose sur d’autres critères dans
d’autres groupements. Ainsi, un ou plusieurs commissaires aux comptes doivent être désignés
dans un GIE (groupement d’intérêt économique) qui compte 100 salariés ou plus à la clôture
d’un exercice (art. L. 251-12 C. com.).
Cela étant, les entreprises qui n’atteignent pas les seuils susvisés peuvent toujours choisir
de désigner un commissaire aux comptes.

B. L’alerte par le commissaire aux comptes


Sous peine d’engager sa responsabilité civile pour faute professionnelle, le commissaire
aux comptes (CAC) qui « relève, à l’occasion de l’exercice de sa mission, des faits de nature
à compromettre la continuité de l’exploitation » (art. L. 234-1 C. com. auquel il est également
fait référence à l’article L. 234-2 du même Code), doit donner l’alerte. La loi décrit de façon
très précise cette procédure d’alerte, notamment d’une part, pour les sociétés anonymes
et, d’autre part, pour les autres sociétés.

38
UE 111 • Introduction au droit

1. Dans les sociétés anonymes


La procédure d’alerte est décrite par l’article L. 234-1 du Code de commerce :
• Le CAC informe des faits susvisés le président du conseil d’administration ou, selon la forme
de SA, du directoire.
• À défaut de réponse sous 15 jours ou si celle-ci ne permet pas d’être assuré de la continuité
de l’exploitation, le CAC invite, par un écrit (dont une copie est transmise au président du tri-
bunal de commerce), le président du conseil d’administration à faire délibérer le conseil d’ad-
ministration (ou, si tels sont les organes dirigeants de la SA, le directoire à faire délibérer le
conseil de surveillance) sur les faits relevés. Le CAC doit être convoqué à la séance de délibé-
ration et cette délibération est communiquée au président du tribunal de commerce ainsi qu’au
comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel.
• En cas d’inobservation de ces dispositions ou si le CAC constate qu’en dépit des décisions
prises la continuité de l’exploitation demeure compromise, une assemblée générale des
actionnaires doit être convoquée à laquelle est présenté un rapport spécial établi par le CAC ;
rapport également communiqué au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du
personnel.
• Si, à l’issue de la réunion de l’assemblée générale, le CAC constate que les décisions prises
ne permettent pas d’assurer la continuité de l’exploitation, il informe de ses démarches le pré-
sident du tribunal de commerce et lui en communique les résultats.
À noter que, dans un délai de six mois à compter du déclenchement de la procédure d’alerte,
le CAC peut en reprendre le cours au point où il avait estimé pouvoir y mettre un terme,
lorsque, en dépit des éléments ayant motivé son appréciation, la continuité de l’exploitation
demeure compromise et que l’urgence commande l’adoption de mesures immédiates.

2. Dans les autres sociétés que les sociétés anonymes


« Dans les autres sociétés que les sociétés anonymes », la procédure d’alerte est décrite par
l’article L. 234-2 du Code de commerce :
• Le CAC demande au « dirigeant » (gérant, etc.) des explications sur les faits de nature à com-
promettre la continuité de l’exploitation. Le « dirigeant » est tenu de lui répondre sous 15 jours
et cette réponse est communiquée au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du per-
sonnel. Le CAC en informe aussi le président du tribunal de commerce.
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• En cas d’inobservation de ces dispositions ou s’il constate qu’en dépit des décisions prises la
continuité de l’exploitation demeure compromise, le CAC établit un rapport spécial et invite par
un écrit (dont la copie est envoyée au président du tribunal de commerce) le « dirigeant » à
faire délibérer sur les faits relevés une assemblée générale qui doit être convoquée à cette fin.
• Si, à l’issue de la réunion de l’assemblée générale, le CAC constate que les décisions prises
ne permettent pas d’assurer la continuité de l’exploitation, il informe de ses démarches le pré-
sident du tribunal de commerce et lui en communique les résultats.
Comme dans les sociétés anonymes, le CAC peut reprendre le cours d’une procédure d’alerte
qu’il avait crue pouvoir interrompre.
Indépendamment de la démarche du CAC, d’autres personnes peuvent donner l’alerte.

II. D’autres personnes ont le droit de donner l’alerte


Ont la possibilité, et non l’obligation, de donner l’alerte : les associés, les représentants du per-
sonnel et le président du tribunal compétent.

A. Les associés
Les associés de certaines sociétés et notamment les actionnaires des sociétés anonymes
peuvent, selon des conditions précisées par la loi, donner l’alerte aux dirigeants sur tout
fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation.

201111TDPA0413 39
Introduction au droit • Série 4

Ainsi, l’article L. 225-232 du Code de commerce dispose :


« Un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital social […] peuvent,
deux fois par exercice, poser par écrit des questions au président du conseil d’adminis-
tration ou au directoire sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploita-
tion. La réponse est communiquée au commissaire aux comptes. »

B. Les représentants du personnel


En particulier dans les sociétés commerciales, le comité d’entreprise ou, à défaut, les
délégués du personnel institués dans lesdites sociétés peuvent demander aux dirigeants
des explications sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation.
Selon les cas, le président du conseil d’administration, le directoire ou les gérants commu-
niquent aux CAC les demandes d’explication formées par le comité d’entreprise ou les délégués
du personnel, les rapports adressés soit au conseil d’administration soit au conseil de surveil-
lance, ainsi que les réponses faites par ces organes (art. L. 234-3 C. com.).

C. Le président du tribunal
Aux termes de l’article L. 611-2 I du Code de commerce, lorsqu’il résulte de tout acte, docu-
ment ou procédure qu’une société commerciale, un GIE, ou une entreprise individuelle,
commerciale ou artisanale connaît des difficultés de nature à compromettre la continuité
de l’exploitation, ses dirigeants peuvent être convoqués par le président du tribunal de
commerce pour que soient envisagées les mesures propres à redresser la situation.
À l’issue de cet entretien ou si les dirigeants ne se sont pas rendus à sa convocation, le
président du tribunal peut obtenir communication, auprès de divers protagonistes (CAC,
membres et représentants du personnel, administrations publiques, organismes de sécurité et
de prévoyance sociales, services chargés de la centralisation des risques bancaires et des inci-
dents de paiement), de renseignements de nature à lui donner une exacte information sur
la situation économique et financière du débiteur.
Au-delà de toutes ces mesures pouvant anticiper les difficultés financières d’une entreprise, le
législateur a imaginé des mesures destinées à éviter l’amplification de ces difficultés.

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Chapitre 2. Les mesures destinées à éviter
l’amplification des difficultés
Sans être forcément en état de cessation des paiements, le débiteur peut demander à être
aidé dans l’appréciation de sa situation par la désignation en justice d’un mandataire
ad  hoc.  Le débiteur peut également solliciter l’ouverture en justice d’une procédure de
conciliation afin de conclure avec ses cocontractants un accord amiable susceptible de
mettre fin à ses difficultés.

Section 1. Le mandataire ad hoc

En droit, la nomination ad hoc (à savoir, pour telle mission particulière) est une modalité assez
répandue. Ainsi, par exemple, un juge ou un administrateur peuvent être nommés ad hoc.
En ce qui concerne la prévention des difficultés financières des entreprises, le législateur prévoit
que le débiteur puisse demander à être aidé par la désignation en justice d’un mandataire ad hoc
(art. L. 611-3 C. com.) :
« Le président du tribunal peut, à la demande d’un débiteur, désigner un mandataire
ad hoc dont il détermine la mission. »

Précisons de quelle façon le mandataire ad hoc est désigné (art. R. 611-18 C. com.) et quelle est
sa mission.

40
UE 111 • Introduction au droit

I. La désignation du mandataire ad hoc


La demande de désignation d’un mandataire ad hoc est à l’initiative du débiteur : lui seul
peut formuler cette demande et uniquement s’il le souhaite. Le débiteur a d’ailleurs la
faculté de proposer le nom du mandataire ad hoc.
Cette demande doit être présentée par écrit au président du tribunal compétent (tribunal de
commerce ou TGI), par le représentant légal de la personne morale (gérant, etc.) ou le débiteur
personne physique, et être déposée au greffe. Elle doit exposer les raisons qui la motivent.
Dès réception de la demande, le président du tribunal fait convoquer, par le greffier, le débi-
teur pour recueillir ses observations.
Si la nomination du mandataire ad hoc n’intervient pas dans le délai d’un mois à compter
de cet entretien, la demande est réputée non admise.
Au contraire, lorsque le juge décide de cette nomination dans le délai requis, il rend une ordon-
nance qui désigne le mandataire ad hoc, définit l’objet ainsi que la durée de sa mission et fixe
les conditions de sa rémunération par le débiteur. Cette ordonnance est notifiée au deman-
deur (le débiteur) ainsi qu’au mandataire. Ce dernier doit faire connaître sans délai au pré-
sident du tribunal son acceptation ou son refus. En cas d’acceptation, il lui adresse une
attestation sur l’honneur selon laquelle il dit ne pas tomber sous le coup des interdictions
posées par la loi pour l’exercice de la mission de mandataire ad hoc (en vertu de l’article L. 611-
13 du Code de commerce, la mission de mandataire ad hoc ne peut être exercée par une personne
ayant, au cours des 24 mois précédents, perçu, à quelque titre que ce soit, directement ou non, une
rémunération ou un paiement de la part du débiteur, de tout créancier de celui-ci ou d’une personne
qui en détient le contrôle ou est contrôlée par lui ; sauf s’il s’agit d’une rémunération perçue, par
exemple, au titre d’un précédent mandat ad hoc. En outre, la mission de mandataire ad hoc ne peut
être confiée à un juge consulaire en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de 5 ans).

II. La mission du mandataire ad hoc


La mission du mandataire ad hoc peut être assez large, mais elle doit demeurer confidentielle.
Cette mission est assez large car elle consiste à aider et conseiller l’entrepreneur, tout en ne
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se substituant pas à lui (le mandataire ad hoc n’a pas le pouvoir de gérer l’entreprise, ni même
de collaborer avec l’entrepreneur).
Cette mission est confidentielle car, si le mandataire ad hoc peut s’entretenir avec quelques
créanciers pour mieux suggérer au débiteur la voie à suivre, voire même servir de média-
teur ou préparer une conciliation, cette démarche ne fait pas l’objet d’une publicité auprès
des tiers. Le mandataire ad hoc ne rend compte de sa mission qu’au juge qui l’a nommé.
À noter que, lorsque le débiteur en fait la demande, le président du tribunal met fin sans
délai à la mission du mandataire ad hoc (art. R. 611-21 C. com.).
Lorsque les difficultés sont davantage avérées mais n’apparaissent pas insurmontables, le débi-
teur peut demander en justice l’ouverture d’une procédure de conciliation.

Section 2. La conciliation
Quel est l’objectif de la conciliation et quelle est la procédure de conciliation ?

I. L’objectif de la conciliation
La conciliation peut être demandée par tout débiteur, personne morale de droit privé ou
personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante (sauf le cas des agri-
culteurs qui sont soumis à une procédure spécifique décrite dans le Code rural), qui éprouve une
difficulté juridique (litige avec un cocontractant, un concurrent, etc.), économique (problèmes

201111TDPA0413 41
Introduction au droit • Série 4

de stockage, de transport des marchandises, etc.) ou financière (défaillance d’un débiteur, etc.),
avérée ou prévisible, et même se trouvant déjà en cessation des paiements, pourvu que
cette cessation des paiements ne remonte pas à plus de 45 jours (art. L. 611-4 C. com.).
Par l’intermédiaire d’un conciliateur judiciaire (conciliateur désigné par le président du tribunal
compétent), la conciliation tend à favoriser la conclusion entre le débiteur et ses principaux
créanciers ainsi que, le cas échéant, ses cocontractants habituels, d’un accord amiable
destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise. Plus généralement, la conciliation peut
donner lieu à la formulation de toute proposition se rapportant à la sauvegarde de l’entre-
prise, à la poursuite de l’activité économique et au maintien de l’emploi (art. L. 611-7 C. com.).

II. La procédure de conciliation


Comment cette procédure s’ouvre-t-elle, comment se déroule-t-elle et comment prend-elle fin ?

A. L’ouverture de la procédure
Seul le débiteur peut demander l’ouverture d’une procédure de conciliation en déposant
une requête auprès du président du tribunal compétent. Par cette requête, le débiteur
expose sa situation économique, sociale et financière, ses besoins de financement ainsi
que, éventuellement, les moyens d’y faire face (la requête est appuyée de divers docu-
ments et informations : l’état des créances et des dettes accompagné d’un échéancier et de la
liste des principaux créanciers ; l’état actif et passif des sûretés ; s’ils ont été établis, les comptes
annuels, le tableau de financement, la situation de l’actif réalisable et disponible et du passif
exigible des trois derniers exercices ; la date de cessation des paiements si elle a été constatée ;
l’ordre professionnel ou l’autorité dont relève le débiteur s’il exerce une profession libérale sou-
mise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé…). Le débiteur peut
proposer au président du tribunal que celui-ci désigne un conciliateur dont il lui indique
l’identité et l’adresse.
Afin de compléter son appréciation de la situation du débiteur, le président du tribunal peut
se faire communiquer tous renseignements utiles par différentes sources (CAC, administra-

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tions publiques, etc.).
Soit le président du tribunal ne fait pas droit à la demande de désignation d’un conciliateur
et le débiteur peut interjeter appel de cette décision de refus dans les 10 jours de sa notification,
soit le président du tribunal désigne un conciliateur et cette décision (non susceptible de
recours) ouvre la procédure de conciliation.
Le président du tribunal désigne le conciliateur pour une période n’excédant pas 4 mois
mais qu’il a la possibilité, par décision motivée, de proroger d’un mois au plus à la demande de
ce dernier. Le président du tribunal détermine également les conditions de la rémunération du
conciliateur par le débiteur.
La décision ouvrant la procédure de conciliation est communiquée au ministère public. Lorsque
le débiteur relève d’un ordre professionnel ou d’une autorité, la décision est également commu-
niquée à cet ordre ou à cette autorité.
Le débiteur peut récuser le conciliateur choisi par le président du tribunal (notamment s’il
existe une défiance entre le conciliateur et le débiteur). La demande de récusation, qui doit être
motivée, est alors formée au greffe du tribunal dans les 15 jours de la notification de la décision
désignant le conciliateur. La demande de récusation est ensuite notifiée au conciliateur qui soit
acquiesce à la récusation (en ce cas, il est remplacé par le juge sans délai) soit s’y oppose (en
ce cas, le juge prend la décision de remplacer ou non le conciliateur).
En tout état de cause, les interdictions vues ci-avant empêchant le mandataire ad hoc d’exer-
cer sa mission s’appliquent aussi au conciliateur (art. L. 611-13 C. com. : ne peut être conci-
liateur quiconque a perçu, au cours des 24 mois précédents, une rémunération de la part du
débiteur, etc.).

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UE 111 • Introduction au droit

B. Le déroulement de la procédure
Dans le but d’atteindre l’objectif qui lui est assigné (sur cet objectif, voir I ci-avant), le conciliateur
peut obtenir du débiteur et du président du tribunal tous les renseignements qui lui sont utiles.
Durant la procédure de conciliation, le débiteur n’est pas dessaisi de la gestion de son entre-
prise et les éventuelles poursuites dont il peut faire l’objet par ses créanciers ne sont pas
automatiquement stoppées.
Cependant, le conciliateur peut demander à certains organismes (administrations finan-
cières, organismes de Sécurité sociale, etc.) d’accepter de consentir des remises de dettes
au débiteur. Par ailleurs, si, au cours de la procédure de conciliation, le débiteur est pour-
suivi par un créancier, le juge qui a ouvert cette procédure peut, à la demande du débiteur
et après avoir été éclairé par le conciliateur, reporter ou échelonner, dans la limite de deux
années, les sommes dues par le débiteur.
Le conciliateur ne s’adresse pas forcément à tous les créanciers du débiteur mais aux
principaux d’entre eux et la procédure de conciliation est confidentielle en ce qu’elle ne
fait pas l’objet d’une publicité à l’égard des tiers.
En revanche, le conciliateur doit rendre compte, au président du tribunal, de l’état d’avan-
cement de sa mission.

C. L’issue de la procédure
La procédure prend fin soit en l’absence d’accord entre le débiteur et ses principaux créanciers,
soit par la conclusion d’un accord entre eux.

1. Un accord de conciliation n’est pas trouvé


Même en l’absence d’un accord de conciliation, à l’expiration de la période de conciliation, la mis-
sion du conciliateur et la procédure prennent en principe fin de plein droit (automatiquement).
En outre, si, au cours de sa mission, le conciliateur constate l’impossibilité de parvenir à un
accord, il présente sans délai un rapport au président du tribunal qui met alors fin à la mis-
sion et à la procédure de conciliation. Cette décision du juge est notifiée au débiteur.
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2. Un accord de conciliation est conclu


Lorsque la procédure de conciliation aboutit à un accord entre le débiteur et ses princi-
paux créanciers (ex. : le débiteur s’engage à réduire ses frais généraux, les créanciers consentent
des délais de paiement, etc.), la loi donne le choix aux parties entre deux modalités qui
mettent fin à la procédure : la constatation de l’accord par le président du tribunal ou
l’homologation de l’accord par le tribunal (et non par le seul président du tribunal).

a. La constatation de l’accord par le président du tribunal


À la requête conjointe des parties et au vu d’une déclaration certifiée du débiteur attestant
qu’il ne se trouvait pas en cessation des paiements lors de la conclusion de l’accord ou attestant
que cet accord met fin à la cessation des paiements, le président du tribunal s’en tient au
constat de cet accord (il ne porte pas d’appréciation sur cet accord) et lui donne force exécu-
toire (le constat effectué par le juge rend l’exécution de l’accord obligatoire).
Cette décision du juge est confidentielle (elle n’est pas soumise à publicité) et n’est pas
susceptible de recours.

b. L’homologation de l’accord par le tribunal


À la demande du débiteur (et non à la requête conjointe des parties), le tribunal (et non le seul
président du tribunal) homologue l’accord obtenu si trois conditions sont réunies : le débi-
teur n’est pas en cessation des paiements ou l’accord conclu y met fin ; les termes de l’accord
sont de nature à assurer la pérennité de l’activité de l’entreprise ; l’accord ne porte pas atteinte
aux intérêts des créanciers non signataires.

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Introduction au droit • Série 4

L’homologation de l’accord par le tribunal n’est pas une simple constatation, mais sup-
pose de sa part une appréciation de la situation. D’ailleurs, le tribunal statue sur l’homolo-
gation après avoir entendu ou appelé : le débiteur ; les créanciers parties à l’accord ; les
représentants du personnel (du comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel) ; le
conciliateur ; le ministère public ; le cas échéant, l’ordre professionnel ou l’autorité compétente
dont relève le débiteur qui exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou régle-
mentaire ou dont le titre est protégé ; toute autre personne dont l’audition lui paraît utile.
Le jugement rejetant l’homologation ne fait pas l’objet d’une publication mais il est sus-
ceptible d’appel. Quant au jugement d’homologation, il est déposé au greffe du tribunal où
tout intéressé peut en prendre connaissance et il fait l’objet d’une mesure de publicité (à la
diligence du greffier, dans les 8 jours de la date du jugement d’homologation, un avis de ce juge-
ment est adressé pour insertion au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales et le
même avis est publié dans un journal d’annonces légales du lieu où le débiteur a son siège ou
l’exercice de son activité). Le jugement d’homologation est susceptible de tierce-opposition
dans les 10 jours à compter de cette publicité.
Lorsque le débiteur est soumis au contrôle légal des comptes, l’accord homologué est
transmis à son commissaire aux comptes.
L’homologation, qui n’est donc pas une procédure confidentielle, emporte essentiellement
deux effets :
• L’interruption, pendant la durée d’exécution de l’accord homologué, de toute action en
justice et de toute poursuite individuelle sur les biens du débiteur, dans le but d’obtenir
le paiement des créances qui font l’objet de l’accord.
• En cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation
judiciaire subséquente (sur ces procédures, V. chapitre suivant), la priorité donnée aux per-
sonnes, ayant fait de nouveaux apports de trésorerie au débiteur dans le cadre de l’ac-
cord de conciliation, d’être payées pour le montant de ces apports, avant toutes créances
nées antérieurement à l’ouverture de la conciliation : il s’agit du « privilège de l’argent
frais ». Toutefois, ce privilège ne s’applique pas aux apports consentis par les actionnaires et
associés du débiteur qui ont contribué à une augmentation de capital.
Il est à noter que, sur saisine de l’une des parties à l’accord homologué, si le tribunal
constate l’inexécution des engagements résultant de cet accord, le tribunal en prononce

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la résolution.
Finalement, les juges ont bel et bien un rôle à jouer dans la mise en œuvre de la plupart des
mesures que l’on vient de voir dans ce chapitre. Cependant, ces mesures restent d’essence
préventive. L’aspect curatif des mesures et le rôle des juges sont davantage marqués dans les
procédures destinées au traitement judiciaire des difficultés des entreprises.

Titre 2. Le traitement judiciaire


des difficultés des entreprises

Retrouvez des compléments sur ce thème sur le site Internet de l’Intec www.cnamintec.fr,
rubrique « Ressources pédagogiques ».

Trois procédures à la fois judiciaires (mises en œuvre par voie de justice) et collectives (elles
s’appliquent en principe à tous les créanciers du débiteur en difficulté, et pas seulement à cer-
tains d’entre eux) ont été instituées par le législateur afin de traiter les difficultés financières
rencontrées par le débiteur : la procédure de sauvegarde peut être ouverte sur demande
du débiteur qui, sans être en état de cessation des paiements, justifie de difficultés qu’il
n’est pas en mesure de surmonter (Chapitre 1) ; la procédure de redressement judiciaire
est ouverte à tout débiteur qui est en cessation des paiements (Chapitre 2) ; la procédure

44
UE 111 • Introduction au droit

de liquidation judiciaire est ouverte à tout débiteur en cessation des paiements et dont le
redressement est manifestement impossible (Chapitre 3). Chacune de ces procédures fait
l’objet de règles légales abondantes et très précises. Conformément au programme officiel de
notre UE, nous décrivons ici les principales dispositions.
Rappelons auparavant que la cessation des paiements, qui est le critère fondamental de choix
entre l’une des trois procédures étudiées, est l’impossibilité dans laquelle se trouve le débi-
teur de faire face à son passif exigible (dettes échues) à l’aide de son actif disponible.

Chapitre 1. La sauvegarde
Appliquée à une entreprise qui n’est pas encore en cessation des paiements mais qui
connaît des difficultés qu’elle n’est pas en mesure de surmonter seule, la procédure de
sauvegarde a pour finalité la réorganisation de cette entreprise afin de permettre la pour-
suite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif.
De quelle façon la procédure de sauvegarde s’ouvre-t-elle ? Comment se déroule-t-elle ? Quelle
en est l’issue ?
Nous raisonnons ici sur la procédure de sauvegarde de droit commun, étant entendu que nous
consacrerons ensuite quelques développements à la « procédure de sauvegarde accélérée »
plus récemment créée par la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et
financière.

Section 1. L’ouverture de la procédure

Sur saisine du débiteur, le tribunal compétent peut décider de rendre son jugement d’ou-
verture de la procédure de sauvegarde ; jugement par lequel, notamment, il nomme les
organes de cette procédure.

I. La saisine et la prise de décision du tribunal


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Comment s’effectue la saisine du tribunal et comment celui-ci prend-il sa décision ?

A. La saisine du tribunal
Seul le débiteur, qui doit être dans la situation décrite ci-avant, est habilité à effectuer la
saisine du tribunal. Comme nous l’avons déjà dit en introduction de la Partie 2 de la présente
série de ce cours, ce débiteur est toute personne physique exerçant une activité profes-
sionnelle indépendante (commerçant, artisan, agriculteur, professionnel libéral) ou toute per-
sonne morale de droit privé commerciale ou non (sociétés, associations, etc.). Le tribunal
compétent est le tribunal de commerce si le débiteur est commerçant (personne physique
ou morale) ou artisan ; dans les autres cas, le TGI est compétent.

B. La prise de décision par le tribunal


Afin de se faire une opinion sur l’opportunité d’ouvrir une procédure de sauvegarde, le
tribunal se procure et analyse de nombreuses informations.
Ainsi, il cherche à entendre le débiteur, les représentants du personnel (les représentants du
comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel), toute personne dont l’audition lui
paraît utile ; de même que, si le débiteur exerce une profession libérale, l’ordre professionnel ou
l’autorité compétente dont relève ce débiteur.

201111TDPA0413 45
Introduction au droit • Série 4

Le tribunal a aussi la possibilité de commettre un juge pour recueillir tous renseignements sur la
situation financière, économique et sociale de l’entreprise. Ce juge peut se faire assister de tout
expert de son choix.
Si le débiteur bénéficie ou a bénéficié d’un mandat ad hoc ou d’une procédure de conciliation dans
les 18 mois qui précèdent, l’ouverture de la procédure de sauvegarde doit être examinée en présence
du ministère public et le tribunal peut obtenir communication des pièces et actes relatifs au mandat
ad hoc ou à la conciliation (sur le mandat ad hoc et la conciliation, revoir chapitre précédent).
Le tribunal doit également s’assurer que le débiteur ne fait pas déjà l’objet d’une procédure de
sauvegarde ou d’une procédure de redressement ou d’une procédure de liquidation en cours.
S’il estime que cela est justifié, le tribunal prend alors la décision d’ouvrir la procédure de sauvegarde.

II. Le prononcé du jugement d’ouverture


Le jugement par lequel le tribunal ouvre la procédure de sauvegarde se prononce essentielle-
ment sur la période d’observation qui s’ensuit et la nomination des organes de la procédure.

A. L’ouverture d’une période d’observation


Le jugement qui ouvre la procédure de sauvegarde ouvre, par la même occasion, une
période d’observation d’une durée maximale de 6 mois. Cependant, le tribunal pourra
renouveler une fois cette période ou il pourra la prolonger pour une période maximale de
6 mois. À noter également que, lorsqu’il s’agit d’une exploitation agricole, le tribunal pourra
proroger la durée de la période d’observation en fonction de l’année culturale en cours et
des usages spécifiques aux productions de l’exploitation.
Sur la situation de l’entreprise pendant la période d’observation, V. infra : le déroulement de la
procédure.

B. La désignation des organes de la procédure

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Le tribunal désigne ou veille à la désignation des principaux organes qui interviennent dans le
cadre de la procédure de sauvegarde.

1. Le juge-commissaire
Dans le jugement d’ouverture, le tribunal désigne un juge-commissaire (le tribunal peut
même en désigner plusieurs).
Art. L. 621-9 al. 1er C. com. :
« Le juge-commissaire est chargé de veiller au déroulement rapide de la procédure et à la
protection des intérêts en présence. »

2. Les mandataires de justice


Dans le jugement d’ouverture, le tribunal désigne en principe deux mandataires de justice
qui sont l’administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire (le tribunal peut même dési-
gner plusieurs administrateurs judiciaires ou plusieurs mandataires judiciaires). Le débiteur peut
proposer un administrateur à la désignation du tribunal. De même, le ministère public peut pro-
poser un administrateur et/ou un mandataire judiciaire.

a. L’administrateur judiciaire
L’administration de l’entreprise est en principe assurée par son dirigeant. Mais l’adminis-
trateur judiciaire est chargé par le tribunal de surveiller le débiteur dans sa gestion ou de
l’assister pour tous les actes de gestion ou certains d’entre eux.

46
UE 111 • Introduction au droit

b. Le mandataire judiciaire
Le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans
l’intérêt collectif des créanciers.

3. Les professionnels devant procéder à l’évaluation des biens du débiteur


Le débiteur doit en principe réaliser l’inventaire et l’estimation de la valeur des biens de
l’entreprise, avec certification par un commissaire aux comptes ou attestation d’un expert-
comptable. Ce n’est que si le débiteur le demande, que le tribunal doit désigner un com-
missaire-priseur judiciaire, un huissier, un notaire, ou un courtier en marchandises
assermenté aux fins de réaliser l’inventaire.

4. Les experts
Dans le jugement d’ouverture, le tribunal a la possibilité de nommer un ou plusieurs experts
(expert-comptable, auditeur, etc.) en vue d’une mission qu’il détermine.

5. Le représentant des salariés


Le tribunal invite le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel à désigner
un représentant parmi les salariés de l’entreprise. En l’absence de comité d’entreprise et
de délégués du personnel, les salariés élisent leur représentant.
Lorsqu’aucun représentant des salariés ne peut être désigné ou élu, un procès-verbal de
carence est établi par le chef d’entreprise.

Remarques
• Aucun parent ou allié, jusqu’au 4e degré inclusivement, du chef d’entreprise ou des diri-
geants, s’il s’agit d’une personne morale, ne peut être désigné à l’une des fonctions décrites
ci-avant et qui sont prévues à l’article L. 621-4 du Code de commerce ; sauf si cette dispo-
sition empêche la désignation d’un représentant des salariés.
• Le tribunal n’est pas tenu de désigner un administrateur judiciaire lorsque la procédure est
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ouverte au bénéfice d’une personne dont le nombre de salariés est inférieur à 20 à la date de
la demande d’ouverture de la procédure et dont le chiffre d’affaires hors taxes est inférieur à
3 000 000 € à la date de clôture du dernier exercice comptable.
• Afin d’assister le mandataire judiciaire, le juge-commissaire désigne 1 à 5 créanciers contrô-
leurs parmi les créanciers qui lui en font la demande. Lorsqu’il désigne plusieurs contrôleurs,
le juge-commissaire veille à ce qu’au moins l’un d’entre eux soit choisi parmi les créanciers
titulaires de sûretés et qu’un autre soit choisi parmi les créanciers chirographaires.

Comment la procédure de sauvegarde se déroule-t-elle pendant la période d’observation ?

Section 2. Le déroulement de la procédure


pendant la période d’observation

La période d’observation est destinée à ce que l’entreprise continue de fonctionner tout en


préparant un plan de sauvegarde.

I. La poursuite de l’activité de l’entreprise


Durant la période d’observation, l’entreprise poursuit ses activités mais avec quelques
aménagements pour en assurer la préservation (limitation des recours des créanciers, etc.).
Précisément, les principales particularités sont relatives à la détermination du patrimoine du
débiteur, à la gestion de l’entreprise et au sort des créanciers.

201111TDPA0413 47
Introduction au droit • Série 4

A. La détermination du patrimoine du débiteur


Dès l’ouverture de la procédure, un inventaire et une estimation des biens du débiteur sont
effectués. Le débiteur remet à l’administrateur et au mandataire judiciaire, entre autres : la liste
de ses créanciers, du montant de ses dettes (en précisant notamment les sûretés éventuellement
accordées) et des principaux contrats en cours d’exécution. En outre, afin de déterminer de façon
exhaustive la consistance des biens du débiteur, si celui-ci est marié, son conjoint doit, confor-
mément au régime matrimonial applicable, dresser la liste de ses biens personnels.

B. La gestion de l’entreprise
Comme il a été mentionné précédemment, le débiteur n’est pas dessaisi de la gestion de l’en-
treprise mais, si un administrateur judiciaire a été désigné par le tribunal, cet administrateur
assiste le débiteur et surveille les actes de gestion de ce dernier. Lorsqu’un administrateur
judiciaire a été nommé, il est même le seul à avoir la faculté d’exiger l’exécution des contrats en
cours (d’exécution) en fournissant la prestation promise au cocontractant par le débiteur.

C. Le sort des créanciers


En principe, sont interdits le paiement de toute créance née antérieurement au jugement
d’ouverture et, sauf autorisation du juge-commissaire, l’octroi de nouvelles sûretés hypo-
thécaires, etc. Tandis que, en principe, les créances nées régulièrement après le jugement
d’ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d’observa-
tion, ou en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur, pour son activité profession-
nelle, pendant cette période, sont payées à leur échéance ou, à défaut, sont payées par
privilège selon un ordre établi par la loi.
Le jugement d’ouverture interrompt également ou interdit toute action en justice de la part
des créanciers dont la créance n’est pas ainsi privilégiée et tendant notamment à la
condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent, à la résolution d’un contrat
pour défaut de paiement d’une somme d’argent, etc. En revanche, par exemple, peuvent être
revendiqués, s’ils se retrouvent en nature au moment de l’ouverture de la procédure, les biens non
encore intégralement payés et vendus au débiteur avec une clause de réserve de propriété.

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Sous peine de forclusion (déchéance de la faculté d’agir, de faire valoir ses droits), tout créan-
cier dont la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture de la procédure de
sauvegarde (à l’exception des salariés) doit effectuer, dans le délai de 2 mois à compter de
la publication de ce jugement au Bodacc, la déclaration de ses créances (il signale ses
créances) auprès du mandataire judiciaire. Ce dernier doit d’ailleurs, dans les 15 jours à comp-
ter du jugement d’ouverture, avertir les créanciers titulaires d’une sûreté publiée (hypothèque,
etc.) de l’obligation qu’ils ont, malgré leur titre, de déclarer leurs créances ; et le délai de décla-
ration (2 mois) court à l’égard de ceux-ci à compter de la notification de cet avertissement. La
déclaration porte le montant de la créance due au jour du jugement d’ouverture avec indication
des sommes à échoir et de la date de leurs échéances. Elle précise la nature de la garantie dont
la créance est éventuellement assortie.
Le mandataire judiciaire vérifie toutes les créances et notamment celles dont sont titulaires les
salariés en vertu de leurs contrats de travail. Les créances résultant d’un contrat de travail sont
garanties, en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde, notamment : par un privilège
établi par le Code du travail (selon l’article L. 3253-2 C. trav., pour les 60 derniers jours de travail
ou d’apprentissage, ces créances doivent être payées, nonobstant l’existence de toute autre
créance privilégiée, jusqu’à concurrence d’un plafond mensuel qui ne peut être inférieur à deux fois
le plafond retenu pour le calcul des cotisations de Sécurité sociale) et par des privilèges généraux
établis par le Code civil (entre autres, pour les 6 derniers mois de salaires, privilège venant en 4e
rang après les frais de justice, etc. posé par l’article 2331 C. civ. sur les meubles du débiteur, et
privilège venant en 2e rang posé par l’article 2375 C. civ. sur les immeubles du débiteur).
Pendant que l’entreprise fonctionne en étant ainsi encadrée, un plan de sauvegarde doit être
préparé.

48
UE 111 • Introduction au droit

II. La préparation du plan de sauvegarde


Un bilan économique, social et éventuellement environnemental doit être élaboré, au vu
duquel l’administrateur propose un plan de sauvegarde.

A. Le bilan économique, social et environnemental


L’administrateur, avec le concours du débiteur et l’assistance éventuelle d’un ou plusieurs
experts, est chargé de dresser dans un rapport le bilan économique (situation comptable,
organisation interne, etc.) et social (effectifs, qualification, etc.) de l’entreprise.
Si l’entreprise exploite des installations classées dangereuses au sens du Code de l’envi-
ronnement (chimie, etc.), l’administrateur doit compléter le bilan économique et social par
un bilan environnemental (niveau de protection, etc.).
L’administrateur reçoit du juge-commissaire tous renseignements et documents utiles à
l’accomplissement de sa mission et de celle des experts. Il consulte et entend toute per-
sonne susceptible de l’informer et, de son côté, il informe les différents organes de la pro-
cédure de l’avancement de ses travaux.
Au final, le bilan en question doit préciser l’origine, l’importance et la nature des difficultés
de l’entreprise.

B. Le projet de plan de sauvegarde


En s’appuyant sur le bilan précité et en concertation avec les acteurs de l’entreprise, l’adminis-
trateur conçoit une proposition de plan de sauvegarde qu’il soumet éventuellement à l’appré-
ciation de comités de créanciers.

1. La conception du plan de sauvegarde


Le projet de plan détermine les perspectives de redressement de l’entreprise en fonction des pos-
sibilités et des modalités d’activités, de l’état du marché et des moyens de financement disponibles.
Il définit les modalités de règlement du passif et les garanties éventuelles que le chef d’en-
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treprise doit souscrire pour en assurer l’exécution.


Le projet expose aussi et justifie le niveau et les perspectives d’emploi ainsi que les conditions
sociales envisagées pour la poursuite d’activité. Lorsque le projet prévoit des licenciements pour
motif économique, il rappelle les mesures déjà intervenues et définit les actions à entreprendre en
vue de faciliter le reclassement et l’indemnisation des salariés dont l’emploi est menacé.
Le cas échéant, le projet analyse les offres d’acquisition présentées par des tiers et portant sur
une ou plusieurs activités de l’entreprise ; de même qu’il indique la ou les activités dont sont
proposés l’arrêt ou l’adjonction.
Lorsque le projet de plan prévoit une modification du capital, l’assemblée des associés est
convoquée pour délibération. Les engagements pris lors de cette assemblée sont subordonnés
dans leur exécution à l’acceptation du plan par le tribunal.
L’administrateur recueille les réponses aux propositions faites aux créanciers pour le règle-
ment des dettes et propose à certains organismes (administrations financières, organismes
de Sécurité sociale, etc.) de consentir des remises de dettes au débiteur.
Les organes de la procédure sont informés et consultés sur le projet de plan de sauvegarde.

2. Les comités de créanciers


Deux « comités de créanciers » sont constitués lorsque les comptes du débiteur ont été certifiés
par un CAC ou établis par un expert-comptable et lorsque le nombre de salariés est supérieur à 150
ou le chiffre d’affaires supérieur à 20 000 000 €. Cela étant, à la demande du débiteur ou de l’admi-
nistrateur, le juge-commissaire peut autoriser la constitution de ces comités en deçà de ces seuils.

201111TDPA0413 49
Introduction au droit • Série 4

Dans ces conditions, dans les 30 jours à compter du jugement d’ouverture de la procédure,
l’administrateur judiciaire réunit dans un comité les établissements de crédit et il réunit
dans l’autre comité les principaux fournisseurs de biens ou de services (lorsque les créances
d’un fournisseur de biens ou de services représentent plus de 3 % du total des créances des
fournisseurs, ce fournisseur est membre de droit du comité des principaux fournisseurs).
Le débiteur présente à ces comités, dans un délai de 2 mois à partir de leur constitution, des
propositions en vue d’élaborer le projet de plan de sauvegarde. Lorsque le projet de plan a
été adopté par les comités, le tribunal arrêtera le plan conformément au projet adopté mais
en s’assurant que les intérêts de tous les créanciers sont suffisamment protégés.
Avant la fin de la période d’observation, le projet de plan est soumis au tribunal.

Section 3. L’issue de la procédure


Si le plan de sauvegarde paraît opportun, il est arrêté par un jugement dont on doit veiller
à l’exécution.

I. Le jugement arrêtant le plan de sauvegarde


Après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur et les organes de la procédure, le tribu-
nal statue au vu du rapport de l’administrateur (bilan économique et social et projet de plan
de sauvegarde), après avoir recueilli l’avis du ministère public.
Lorsqu’il existe une possibilité sérieuse pour l’entreprise d’être sauvegardée, le tribunal
rend un jugement qui arrête le plan ; lequel, pour l’essentiel :
• met fin à la période d’observation ;
• désigne les personnes tenues de l’exécuter (le tribunal peut charger l’administrateur d’ef-
fectuer les actes nécessaires à la mise en œuvre du plan qu’il détermine et le mandataire judi-
ciaire demeure en fonction pendant le temps nécessaire à la vérification et à l’établissement
définitif de l’état des créances) ;
• fixe la durée du plan qui ne peut excéder 10 ans (lorsque le débiteur est un agriculteur, cette
durée ne peut excéder 15 ans) ;
• nomme, pour la durée du plan, l’administrateur ou le mandataire judiciaire en qualité de

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commissaire chargé de veiller à l’exécution du plan (le tribunal peut d’ailleurs nommer plu-
sieurs commissaires) ;
• mentionne les engagements qui ont été souscrits et qui sont nécessaires à la sauve-
garde de l’entreprise. Ces engagements portent sur : l’avenir de l’activité, les modalités du
maintien et du financement de l’entreprise, du règlement du passif né antérieurement au juge-
ment d’ouverture, les garanties fournies pour en assurer l’exécution ;
• expose et justifie le niveau et les perspectives d’emploi ainsi que les conditions sociales
envisagées pour la poursuite d’activité ;
• comporte, s’il y a lieu, l’arrêt, l’adjonction ou la cession d’une ou de plusieurs activités ;
• peut, sur la demande du ministère public, subordonner l’adoption du plan au remplace-
ment d’un ou de plusieurs dirigeants de l’entreprise (sauf lorsque le débiteur exerce une
activité professionnelle libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire) ;
• le cas échéant, mentionne les modifications des statuts nécessaires à la réorganisation
de l’entreprise ;
• le cas échéant, décide que les biens que le tribunal estime indispensables à la continua-
tion de l’entreprise ne pourront être aliénés sans l’autorisation de celui-ci, pour une
durée qu’il fixe et qui ne peut excéder celle du plan.

II. L’exécution du plan de sauvegarde


Sauf impossibilité d’exécuter le plan ou modifications du plan décidées en cours d’exécu-
tion par le tribunal (à la demande du débiteur et sur le rapport du commissaire à l’exécution du
plan, ainsi qu’après avoir recueilli l’avis du ministère public et avoir entendu notamment le

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UE 111 • Introduction au droit

débiteur, le commissaire à l’exécution du plan, les contrôleurs et les représentants du personnel),


le plan doit être exécuté comme convenu.
Le rôle du commissaire à l’exécution du plan est crucial : ce dernier poursuit les actions en
justice qui ont pu être introduites avant le jugement qui a arrêté le plan et auxquelles l’adminis-
trateur ou le mandataire judiciaire est partie ; il est habilité à engager des actions dans l’intérêt
collectif des créanciers ; il peut se faire communiquer tous les documents et informations utiles
à sa mission ; il rend compte au président du tribunal et au ministère public du défaut d’exécu-
tion du plan (il en informe également les représentants du personnel).
Saisi par un créancier ou par le commissaire à l’exécution du plan ou par le ministère public ou
en se saisissant d’office, le tribunal qui a arrêté le plan et qui constate que le débiteur n’exé-
cute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan peut, après avis du ministère
public, décider la résolution du plan. Ceci met fin aux opérations et emporte déchéance de
tout délai de paiement accordé.
De la même manière, lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au
cours de l’exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce plan décide, après avis du ministère
public, sa résolution et prononce la liquidation judiciaire.
Par contre, quand il est établi que les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le
tribunal ont été tenus, celui-ci, à la requête du commissaire à l’exécution du plan, du débi-
teur ou de tout intéressé, constate que l’exécution du plan est achevée.

Remarques
• La procédure de sauvegarde peut s’interrompre dès la période d’observation : lorsque
les difficultés qui ont justifié l’ouverture de la procédure ont disparu, le tribunal y met fin à la
demande du débiteur ; à tout moment de cette période, le tribunal (à la demande du débi-
teur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, d’un contrôleur, du ministère public ou
d’office) peut ordonner la cessation partielle de l’activité ou, si les conditions sont réunies,
prononcer le redressement ou la liquidation judiciaire.
• Plus récemment, le législateur a institué une procédure de sauvegarde accélérée : la sauve-
garde financière accélérée (SFA). Il s’agit d’une procédure de sauvegarde à part entière, à
laquelle s’appliquent la plupart des règles de la procédure de sauvegarde de droit commun
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mais aussi des règles spécifiques. Parmi celles-ci : le débiteur qui demande l’ouverture de la
SFA doit être engagé dans une procédure de conciliation d’où résulte un projet de plan visant à
assurer la pérennité de l’entreprise ; l’attention est portée sur l’accord des créanciers financiers
dans cet accord réussi de conciliation ; les différentes étapes de la procédure de sauvegarde
sont menées à un rythme plus rapide (ex. : le tribunal arrête le plan de sauvegarde dans le délai
d’un mois, pouvant être prorogé d’un mois au plus, à compter du jugement d’ouverture).

Lorsque la procédure de sauvegarde ne peut être ouverte au bénéfice d’une entreprise


parce que celle-ci est déjà en cessation des paiements, il y a lieu, si tout redressement
n’est pas manifestement impossible, de soumettre cette entreprise à la procédure de
redressement judiciaire.

Chapitre 2. Le redressement judiciaire


Appliquée à une entreprise qui est en cessation des paiements (dans l’impossibilité de faire
face à son passif exigible à l’aide de son actif disponible) mais dont le redressement ne paraît
pas impossible, la procédure de redressement judiciaire est organisée selon les mêmes
étapes que celles de la procédure de sauvegarde que l’on vient de voir mais qui, nous
l’avons souligné, s’applique à une entreprise qui n’est pas encore en cessation des paie-
ments. Les deux procédures poursuivent le même objectif ; à savoir, selon l’article L. 631-1
al. 2 du Code de commerce relatif au redressement judiciaire :
« La poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. »

201111TDPA0413 51
Introduction au droit • Série 4

De la même manière que le législateur renvoie souvent à la procédure de sauvegarde pour


décrire la procédure de redressement judiciaire, nous suivons ici un cheminement identique à
celui adopté pour exposer la sauvegarde dans le précédent chapitre, mais en mettant l’accent
sur les particularités que présente la procédure de redressement judiciaire quant à son ouver-
ture, quant à son déroulement et quant à son issue.

Section 1. L’ouverture de la procédure


Le tribunal compétent étant saisi, il peut décider de rendre son jugement d’ouverture de la procé-
dure de redressement judiciaire ; jugement qui se prononce sur diverses questions essentielles.

I. La saisine et la prise de décision du tribunal


Comment s’effectue la saisine du tribunal et comment celui-ci prend-il sa décision ?

A. La saisine du tribunal
Pourvu que le débiteur soit en cessation des paiements, celui-ci (comme pour la sauvegarde)
peut être toute personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante
(commerçant, artisan, agriculteur, professionnel libéral) ou toute personne morale de droit
privé commerciale ou non (sociétés, associations, etc.) ; le tribunal compétent étant le tribu-
nal de commerce (si le débiteur est commerçant, personne physique ou morale, ou artisan)
ou le TGI (dans les autres cas).
L’ouverture de la procédure de redressement judiciaire doit être demandée par le débiteur
au plus tard dans les 45 jours qui suivent la cessation des paiements ; s’il n’a pas, dans ce
délai, demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation (sur la conciliation, revoir supra).
En cas d’échec de la procédure de conciliation et lorsque le débiteur est en cessation des
paiements, le tribunal se saisit d’office afin de statuer sur l’ouverture d’une procédure de
redressement judiciaire. Lorsqu’il n’y a pas de procédure de conciliation en cours, le tribu-
nal peut également, aux fins d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, être
saisi sur requête du ministère public ou sur assignation d’un créancier (le 7 décembre 2012,
le Conseil constitutionnel, saisi d’une QPC, a déclaré inconstitutionnelle la possibilité jusque-là

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également offerte au tribunal de « se saisir d’office » à l’article L. 631-5 du Code de commerce).
À noter que les représentants du personnel peuvent communiquer au président du tribunal
ou au ministère public tout fait révélant la cessation des paiements du débiteur.

Remarque
La procédure de redressement judiciaire est également applicable à l’un des débiteurs ci-
avant, dans le délai d’un an après la cessation de son activité professionnelle, si tout ou partie
de son passif provient de cette dernière. Par ailleurs, si le débiteur est décédé en cessation des
paiements, le tribunal peut se saisir d’office ou être saisi dans le délai d’un an à compter de la
date du décès (sur l’assignation d’un créancier ou sur requête du ministère public) ou, sans
condition de délai, par tout héritier du débiteur.

B. La prise de décision par le tribunal


Afin de se faire une opinion sur l’opportunité d’ouvrir une procédure de redressement judi-
ciaire, le tribunal se procure et analyse de nombreuses informations de la même manière
qu’il procède lorsqu’il s’interroge sur le bien-fondé de l’ouverture d’une procédure de sau-
vegarde (voir supra).
Le tribunal doit aussi s’assurer que le débiteur ne fait pas déjà l’objet d’une procédure de
redressement judiciaire ou d’une procédure de liquidation judiciaire en cours.
S’il estime que cela est justifié, le tribunal prend la décision d’ouvrir la procédure de redres-
sement judiciaire.

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UE 111 • Introduction au droit

II. Le prononcé du jugement d’ouverture


Le jugement par lequel le tribunal ouvre la procédure de redressement judiciaire se pro-
nonce essentiellement sur la date de cessation des paiements, l’ouverture d’une période
d’observation et la désignation des organes de la procédure.

A. La fixation de la date de cessation des paiements


Dans le jugement qui ouvre la procédure de redressement judiciaire, le tribunal fixe la date de
cessation des paiements du débiteur (à défaut de détermination de cette date, la cessation
des paiements est réputée être intervenue à la date du jugement qui la constate).
La date de cessation des paiements peut être reportée une ou plusieurs fois, sans pouvoir être
antérieure de plus de 18 mois à la date du jugement constatant la cessation des paiements.

B. L’ouverture d’une période d’observation


Le jugement qui ouvre la procédure de redressement judiciaire ouvre une période d’obser-
vation, selon les mêmes règles que celles qui président à l’ouverture d’une période d’ob-
servation dans le cadre de la procédure de sauvegarde (voir supra).

C. La désignation des organes de la procédure


Là encore, le jugement qui ouvre la procédure de redressement judiciaire désigne les
organes de cette procédure (juge-commissaire, mandataires de justice, etc.) selon les mêmes
règles que celles qui président à la désignation des organes dans le cadre de la procédure
de sauvegarde (voir supra).
Comment la procédure de redressement judiciaire se déroule-t-elle pendant la période
d’observation ?

Section 2. Le déroulement de la procédure


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pendant la période d’observation

La période d’observation est destinée à ce que l’entreprise continue de fonctionner tout en


préparant un plan de redressement judiciaire.

I. La poursuite de l’activité de l’entreprise


Durant la période d’observation, l’entreprise poursuit ses activités mais selon des disposi-
tions légales censées en assurer la préservation. Ces dispositions tiennent surtout à la déter-
mination du patrimoine du débiteur, à la gestion de l’entreprise et au sort des créanciers.

A. La détermination du patrimoine du débiteur


Les règles applicables (inventaire et estimation des biens du débiteur, etc.) dans le cadre de
la procédure de sauvegarde (voir supra) sont applicables dans le cadre de la procédure de
redressement judiciaire.
On notera cependant le principe de l’incessibilité des parts sociales détenues par les dirigeants
de droit ou de fait, rémunérés ou non, représentant leurs droits sociaux dans la société (le débi-
teur) qui a fait l’objet du jugement d’ouverture.

201111TDPA0413 53
Introduction au droit • Série 4

B. La gestion de l’entreprise
Les règles vues supra dans le cadre de la procédure de sauvegarde sont à transposer
dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire (le débiteur n’est pas dessaisi de
la gestion de l’entreprise mais il peut être assisté d’un administrateur judiciaire, etc.).

C. Le sort des créanciers


Que les créances soient ou non salariales, les règles vues supra (garanties des créances
salariales, suspension provisoire des poursuites de la part des autres créanciers, etc.) dans le
cadre de la procédure de sauvegarde sont applicables dans le cadre de la procédure de
redressement judiciaire.
Toutefois, une disposition est remarquable : la nullité de certains actes qui ont été passés par
le débiteur pendant la « période suspecte » (période qui s’étend de la première heure du jour
fixé pour la cessation des paiements jusqu’au jour du prononcé du jugement d’ouverture de
la procédure de redressement judiciaire). En effet, on craint que, par ces actes, des biens aient
été utilisés par le débiteur au détriment de l’entreprise et de ses créanciers. Le législateur prévoit
des nullités de plein droit et des nullités facultatives respectivement à l’article L. 632-1 I et à
l’article L. 632-2 al. 1er du Code de commerce.
Art. L. 632-1 I C. com. :
« Sont nuls, lorsqu’ils sont intervenus depuis la date de cessation des paiements […]  :
Tous les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou immobilière ; […] Tout
paiement, quel qu’en ait été le mode, pour dettes non échues au jour du paiement ; […]. »

Art. L. 632-2 al. 1er C. com. :


« Les paiements pour dettes échues effectués après la date de cessation des paiements
et les actes à titre onéreux accomplis après cette même date peuvent être annulés si ceux
qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des paiements). »

On le sait, lorsqu’elle est prononcée, la nullité anéantit l’acte et entraîne la remise des choses en
l’état antérieur. L’action en nullité ici visée est exercée par l’administrateur, le mandataire judi-
ciaire, le commissaire à l’exécution du plan, le liquidateur ou le ministère public.

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Remarque
Art. L. 632-1 II C. com. :
« Le tribunal peut, en outre, annuler les actes à titre gratuit visés au 1° du I [actes à titre
gratuit translatifs de propriété mobilière ou immobilière] faits dans les six mois précédant
la date de cessation des paiements. »

II. La préparation du plan de redressement


Comme dans le cadre de la sauvegarde, un bilan économique, social et éventuellement
environnemental doit être élaboré ; bilan au vu duquel l’administrateur propose un plan de
redressement.

A. Le bilan économique, social et environnemental


Ce bilan est élaboré dans les mêmes conditions que dans le cadre de la procédure de sau-
vegarde vue supra.

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UE 111 • Introduction au droit

b. Le projet de plan de redressement


En s’appuyant sur le bilan précité et en concertation avec les acteurs de l’entreprise, l’adminis-
trateur conçoit une proposition de plan de redressement qu’il soumet éventuellement à l’ap-
préciation de comités de créanciers.

1. La conception du plan de redressement


Le projet de plan détermine les perspectives de redressement de l’entreprise en fonction des
atouts et des handicaps de celle-ci et en fonction de facteurs exogènes (état du marché, de la
concurrence, de l’évolution du droit en vigueur, etc.).
Il doit être tenu compte des offres qui ont pu être soumises par des tiers, dès l’ouverture
de la procédure, et tendant au maintien de l’activité de l’entreprise par une cession totale
ou partielle de cette dernière.
Bien entendu, l’éventualité de licenciements pour motif économique doit être appréciée
avec circonspection (à noter que, lorsque de tels licenciements présentent un caractère urgent,
inévitable et indispensable déjà pendant la période d’observation, l’administrateur peut être
autorisé dès ce moment par le juge-commissaire à procéder à ces licenciements).

2. Les comités de créanciers


Les deux comités de créanciers qui peuvent être constitués dans le cadre de la procédure
de sauvegarde vue supra peuvent, de la même façon, être constitués dans le cadre de la
procédure de redressement judiciaire.
Avant la fin de la période d’observation, le projet de plan de redressement est soumis au
tribunal.

Section 3. L’issue de la procédure

Si le plan de redressement est convaincant, il est arrêté par un jugement dont l’exécution
est surveillée.
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I. Le jugement arrêtant le plan de redressement


La procédure (auditions, etc.) selon laquelle le tribunal arrête le plan de redressement, ainsi
que les effets de ce plan (fin de la période d’observation, etc.), les mentions (fixation de la
durée du plan pour un maximum de 10 ans, nomination du commissaire à l’exécution du plan,
etc.) et les engagements qu’il contient (modalités de financement de l’entreprise, etc.) sont
analogues à ce qui a été vu supra dans le cadre de la procédure de sauvegarde. Le plan
précise notamment les licenciements qui doivent intervenir dans le délai d’1 mois après le
jugement.
Mais au lieu d’arrêter le plan de continuation, le tribunal peut préférer arrêter un plan de
cession. En effet, au vu du rapport de l’administrateur, le tribunal peut ordonner la cession
totale ou partielle de l’entreprise si le débiteur est dans l’impossibilité d’en assurer lui-
même le redressement.

II. L’exécution du plan de redressement


Le plan de redressement judiciaire doit s’exécuter selon les mêmes modalités (rôle du
commissaire à l’exécution du plan, etc.) que celles vues supra pour l’exécution du plan de
sauvegarde.

201111TDPA0413 55
Introduction au droit • Série 4

De la même manière, le tribunal qui a arrêté le plan et qui constate que le débiteur n’exécute
pas ses engagements peut décider la résolution du plan. En revanche, quand il est établi que
les engagements ont été tenus, le tribunal constate que l’exécution du plan est achevée.

Remarque
La procédure de redressement judiciaire peut s’interrompre dès la période d’observa-
tion : s’il apparaît, au cours de cette période, que le débiteur dispose des sommes suffisantes
pour désintéresser les créanciers et acquitter les frais et les dettes afférents à la procédure, le
tribunal peut mettre fin à celle-ci ; à tout moment de cette période, le tribunal (à la demande du
débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, d’un contrôleur, du ministère public ou
d’office) peut ordonner la cessation partielle de l’activité ou, si les conditions sont réunies,
prononcer la liquidation judiciaire.
Précisément, la procédure de liquidation judiciaire est la procédure applicable à une entre-
prise en cessation des paiements mais dont le redressement est manifestement impossible.

Chapitre 3. La liquidation judiciaire


Appliquée à une entreprise qui est en cessation des paiements (dans l’impossibilité de faire
face à son passif exigible à l’aide de son actif disponible) ET dont le redressement est mani-
festement impossible, la procédure de liquidation judiciaire a pour objectif de mettre fin à
l’activité de l’entreprise ou de réaliser le patrimoine du débiteur par une cession globale ou
séparée de ses droits ou de ses biens (art. L. 640-1 C. com.). Il s’agit donc de mettre fin à
l’activité de l’entreprise, en essayant de réaliser l’actif (vendre les actifs de l’entreprise) afin
d’apurer le passif (régler les dettes).
Nous conservons une démarche chronologique pour présenter les phases d’ouverture, de
déroulement et de clôture de cette procédure.

Section 1. L’ouverture de la procédure

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Le tribunal compétent étant saisi, il décide de rendre son jugement d’ouverture de la pro-
cédure de liquidation judiciaire s’il estime que toutes les conditions sont réunies pour cela.
Des mentions propres à cette procédure caractérisent ce jugement.

I. La saisine et la prise de décision du tribunal


Comment s’effectue la saisine du tribunal et comment celui-ci prend-il sa décision ?

A. La saisine du tribunal
En ce qui concerne le profil du débiteur, le tribunal compétent, les personnes pouvant effec-
tuer la saisine, les délais d’action, etc. les règles en vigueur sont les mêmes que celles vues
supra pour la saisine du tribunal dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire.
Il est à noter que, les conditions étant remplies d’une mise en liquidation judiciaire, le tribunal
peut être saisi soit au cours d’une autre procédure (conciliation ou sauvegarde ou redressement
judiciaire), soit ab initio (sans l’ouverture préalable d’une autre procédure).

B. La prise de décision par le tribunal


Afin de se faire une opinion sur l’opportunité d’ouvrir une procédure de liquidation judi-
ciaire, le tribunal se procure et analyse de nombreuses informations de la même manière

56
UE 111 • Introduction au droit

qu’il procède lorsqu’il s’interroge sur le bien-fondé de l’ouverture d’une procédure de


redressement judiciaire (voir supra).
Le tribunal doit aussi s’assurer que le débiteur n’est pas déjà soumis à une procédure de
liquidation judiciaire non encore clôturée.
S’il estime que cela est justifié, le tribunal prend la décision d’ouvrir la procédure de liqui-
dation judiciaire.

II. Le prononcé du jugement d’ouverture


Le jugement par lequel le tribunal ouvre la procédure de liquidation judiciaire se prononce
essentiellement sur la date de cessation des paiements et sur la désignation des organes
de la procédure dont, en particulier, le liquidateur.

A. La fixation de la date de cessation des paiements


La fixation de la date de la cessation des paiements par le jugement qui ouvre la procédure de
liquidation judiciaire s’effectue selon les mêmes règles que celles qui régissent la procédure
de redressement judiciaire vue supra.

B. La désignation des organes de la procédure


Dans le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire, le tribunal désigne le juge-commissaire
(chargé de veiller au déroulement rapide de la procédure et à la protection des intérêts en pré-
sence) et, en qualité de liquidateur, un mandataire judiciaire (lorsque la liquidation judiciaire est
prononcée au cours de la période d’observation d’une procédure de sauvegarde ou de redresse-
ment judiciaire, le tribunal nomme en principe le mandataire judiciaire en qualité de liquidateur).
Par ailleurs, le cas échéant, des créanciers contrôleurs et un représentant des salariés sont
désignés dans les mêmes conditions que lors d’une procédure de redressement judiciaire.
Le liquidateur est le personnage clef de la procédure de liquidation judiciaire : il est chargé
des opérations de liquidation (aucun parent ou allié jusqu’au 4e degré inclusivement du chef
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d’entreprise ou des dirigeants, s’il s’agit d’une personne morale, ne peut être nommé liquidateur).
Comment la procédure de liquidation judiciaire se déroule-t-elle ?

Section 2. Le déroulement de la procédure

Les principaux aspects de la mission du liquidateur devant être précisés ; la procédure de


liquidation judiciaire s’articule autour de la réalisation de l’actif et de l’apurement du passif du
débiteur par ce liquidateur.

I. Les modalités d’exercice de la mission du liquidateur


Le liquidateur est en principe investi des pouvoirs et devoirs de gérer l’entreprise en liquida-
tion, tout en procédant aux opérations de liquidation.
Ainsi, le liquidateur établit, dans le mois de sa désignation, un rapport sur la situation du
débiteur ; sauf si le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire au cours d’une période d’obser-
vation. Il peut introduire ou poursuivre les actions qui relèvent de la compétence du man-
dataire judiciaire.
Les créanciers déclarent leurs créances au liquidateur, lequel les vérifie.
À partir de la date du jugement de liquidation judiciaire, il y a dessaisissement pour le
débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens. Les droits et actions du débi-
teur concernant son patrimoine sont exercés, pendant toute la durée de la liquidation

201111TDPA0413 57
Introduction au droit • Série 4

judiciaire, par le liquidateur. Cependant, le débiteur accomplit les actes et exerce les droits et
actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur : droits et actions propres au
débiteur ou attachés à sa personne comme, par exemple, la défense à une action exercée contre
lui par le liquidateur.
Le liquidateur doit procéder aux licenciements en application de la décision prononçant la
liquidation judiciaire.
Toute somme reçue par le liquidateur dans l’exercice de ses fonctions doit immédiatement
être versée en compte de dépôt à la Caisse des dépôts et consignations. En cas de retard,
le liquidateur doit, pour les sommes qu’il n’a pas versées, un intérêt dont le taux est égal au taux
de l’intérêt légal majoré de 5 points.
Le liquidateur tient informé, au moins tous les 3 mois, le juge-commissaire, le débiteur et
le ministère public du déroulement des opérations.
Pour toute négligence dans l’exercice de sa mission (vente, avant l’expiration du délai de
revendication, de marchandises couvertes par une clause de réserve de propriété ; faute dans
l’établissement de l’état des créances…), le liquidateur est susceptible d’engager sa respon-
sabilité civile (à l’égard des créanciers, etc.).
C’est dans ces conditions que le liquidateur procède à la réalisation de l’actif et à l’apurement du
passif du débiteur en liquidation judiciaire.

II. La réalisation de l’actif


Un commissaire-priseur judiciaire ou un huissier ou un notaire ou un courtier en marchan-
dises assermenté est désigné par le tribunal afin de réaliser l’inventaire et la prisée (éva-
luation) des actifs du débiteur. Selon les circonstances, la réalisation (vente) de l’actif de
l’entreprise en liquidation judiciaire s’effectue soit par la cession de tout ou partie de l’entre-
prise soit par la cession des actifs du débiteur.

A. La cession de l’entreprise

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Lorsqu’elle est possible (au moins un repreneur fait une offre de rachat sérieuse), la ces-
sion de l’entreprise a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles d’exploitation
autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d’apurer le passif. Elle peut
être totale ou partielle. Dans ce dernier cas, elle porte sur un ensemble d’éléments d’ex-
ploitation qui forment une ou plusieurs branches complètes et autonomes d’activités.
Lorsque le tribunal estime que la cession totale ou partielle de l’entreprise est envisa-
geable, il autorise la poursuite de l’activité et fixe le délai dans lequel les offres de reprise
doivent parvenir au liquidateur ; lequel d’une part, informe de ces offres le débiteur, le repré-
sentant des salariés et les contrôleurs et, d’autre part, dépose ces offres au greffe. Toute offre
doit être écrite et comporter des informations précises : désignation des biens, droits et
contrats inclus dans l’offre ; prix offert ; prévisions de financement ; perspectives d’emploi ; date
de réalisation de la cession, etc. (art. L. 642-2 C. com.).
Sauf dérogations (art. L. 642-3 al. 1er C. com.) :
« Ni le débiteur, au titre de l’un quelconque de ses patrimoines, ni les dirigeants de droit
ou de fait de la personne morale en liquidation judiciaire, ni les parents ou alliés jusqu’au
deuxième degré inclusivement de ces dirigeants ou du débiteur personne physique, ni les
personnes ayant ou ayant eu la qualité de contrôleur au cours de la procédure ne sont
admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre. »

Après audition des intéressés (liquidateur, représentants du personnel, contrôleurs, etc.), le tri-
bunal retient la meilleure offre et arrête un ou plusieurs plans de cession. Le jugement se
prononce sur les éventuels licenciements pour motif économique qui doivent intervenir.

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UE 111 • Introduction au droit

Par le jugement qui arrête le plan de cession, le tribunal peut autoriser la conclusion d’un
contrat de location-gérance au profit de la personne qui a présenté l’offre d’acquisition permet-
tant dans les meilleures conditions d’assurer le plus durablement possible l’emploi et le paiement
des créanciers. Cette phase de location-gérance (sur la location-gérance, revoir la série 3 du
présent cours) précède alors la cession à proprement dite de l’entreprise ; laquelle doit être
effectivement cédée au locataire-gérant dans les 2 ans du jugement qui arrête le plan.
Dans tous les cas, le cessionnaire doit rendre compte au liquidateur de l’application des
dispositions prévues par le plan de cession.

B. La cession des actifs du débiteur


Tous les biens du débiteur qui ne font pas l’objet d’une cession même partielle de l’entre-
prise doivent être vendus séparément.
Les ventes d’immeubles ont lieu suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière.
Le juge-commissaire ordonne la vente aux enchères publiques ou autorise la vente de gré à gré
des autres biens du débiteur.
La réalisation de l’actif est consacrée à l’apurement du passif.

III. L’apurement du passif


L’apurement du passif de l’entreprise en liquidation judiciaire consiste, autant que pos-
sible, à régler les dettes de l’entreprise ; c’est-à-dire à payer ses créanciers.
Le jugement qui prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les dettes non échues.
Toutefois, si le tribunal autorise la poursuite de l’activité au motif que la cession totale ou
partielle de l’entreprise est envisageable, les créances non échues sont exigibles à la date
du jugement prononçant la cession.
Les créanciers doivent être désintéressés selon un ordre (qui tient compte de la nature des
créances, etc.) prévu par le législateur.
Mais il se peut que toutes les créances ne puissent être recouvrées.
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Section 3. L’issue de la procédure

Si un plan de cession a été arrêté et s’il n’est pas respecté, le tribunal en prononce la réso-
lution. Dans tous les cas, le tribunal, pour divers motifs, doit prononcer la clôture de la
procédure de liquidation judiciaire.

I. L’éventuelle résolution du plan de cession


Lorsqu’un plan de cession a été arrêté, si le cessionnaire n’exécute pas ses engagements, le
tribunal peut, à la demande du ministère public d’une part, du liquidateur, d’un créancier, de
tout intéressé ou d’office, après avoir recueilli l’avis du ministère public, d’autre part, prononcer
la résolution du plan sans préjudice de dommages-intérêts. Le tribunal peut prononcer la
résolution ou la résiliation des actes passés en exécution du plan résolu et le prix payé par le
cessionnaire reste acquis.
De même, si le locataire-gérant n’exécute pas son obligation d’acquérir dans les condi-
tions et délais fixés par le plan, le tribunal, d’office, ou à la demande du liquidateur ou du
ministère public, ordonne la résiliation du contrat de location-gérance et la résolution du
plan sans préjudice de tous dommages et intérêts.
Nonobstant cette hypothèse, la clôture des opérations de liquidation judiciaire doit intervenir
dans un délai maximal.

201111TDPA0413 59
Introduction au droit • Série 4

II. La clôture de la procédure


Dans le jugement qui a ouvert la liquidation judiciaire, le tribunal a fixé le délai au terme
duquel la clôture de la procédure doit être examinée. Si la clôture ne peut être prononcée
au terme de ce délai, le tribunal peut proroger le terme par une décision motivée. Par ail-
leurs, en cas de plan de cession, le tribunal ne prononce la clôture de la procédure qu’après
avoir constaté le respect de ses obligations par le cessionnaire.
Cela étant, à tout moment, aux fins de prononcer la clôture de la liquidation judiciaire, le
tribunal peut être saisi par le liquidateur, le débiteur ou le ministère public. Il peut aussi se saisir
d’office. À l’expiration d’un délai de 2 ans à compter du jugement de liquidation judiciaire,
tout créancier peut également saisir le tribunal.
Selon les raisons qui motivent sa décision, le tribunal rend :
• un jugement de clôture pour extinction du passif : s’il n’existe plus de passif exigible ou si
le liquidateur dispose de sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers ;
• un jugement de clôture pour insuffisance d’actif : si la poursuite des opérations de liquida-
tion judiciaire est rendue impossible en raison de l’insuffisance de l’actif.
Le jugement de clôture de la liquidation judiciaire met fin aux fonctions du liquidateur (dont
la responsabilité peut cependant être recherchée).

Remarques
• À certaines conditions, il est appliqué la procédure de liquidation judiciaire simplifiée :
pour la vérification et l’admission des créances, la vente des actifs du débiteur, la limitation
à 1 an du délai à dater de l’ouverture de la procédure pour le prononcé par le tribunal de la
clôture de la liquidation, etc.
• Des sanctions peuvent être prononcées à l’encontre des dirigeants des entreprises
ayant fait l’objet de l’une des procédures vues dans le présent chapitre de cours. Ainsi,
les dirigeants qui, par des fautes de gestion, ont contribué à l’insuffisance d’actif de l’entreprise
peuvent être condamnés à supporter personnellement tout ou partie des dettes de l’entreprise
(action en comblement du passif). Le tribunal peut aussi prononcer la faillite personnelle qui
emporte pour un certain temps interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler une entre-

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prise. Des sanctions pénales peuvent également être prononcées contre le dirigeant qui a
intentionnellement contribué aux difficultés d’une entreprise faisant l’objet d’une procédure de
redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire (délit de banqueroute, etc.).

60
UE 111 • Introduction au droit

Conclusion de la série

À l’issue de cette série, au travers du titre 1 de sa première partie, vous connaissez mieux
les domaines d’application respectifs de la responsabilité civile contractuelle (étudiée en
série  3) et de la responsabilité civile délictuelle ou quasi délictuelle. En effet, bien que
nécessitant les mêmes conditions générales de mise en œuvre (un préjudice, un fait
générateur et un lien de causalité entre ce fait et le préjudice), ces deux sortes de
responsabilité civile ne doivent pas être confondues et ne se cumulent pas.
Outre le domaine d’application de la responsabilité civile (quasi)délictuelle qui couvre
la réparation des dommages causés par tout fait autre que l’inexécution d’un contrat
par un cocontractant, vous avez également appris quels sont les différents régimes de
responsabilité civile (quasi)délictuelle susceptibles d’être invoqués selon la nature du
fait dommageable (régimes de responsabilité du fait personnel, régimes de
responsabilité du fait des choses, régimes de responsabilité du fait d’autrui) ainsi que
les causes exonératoires de cette responsabilité.
Pour une vision complète du droit de la responsabilité, le titre 2 de la première partie de
cette série 4 a été consacré à la responsabilité pénale ; laquelle peut d’ailleurs parfois
être engagée pour un fait donnant également lieu à responsabilité civile.
Vous savez maintenant qu’il ne peut y avoir responsabilité pénale sans infraction. Vous
avez donc été initié(e) aux conditions d’existence (élément légal, élément matériel et
élément moral) et aux diverses catégories d’infractions (contraventions, délits,
crimes). Cette étude a été notamment complétée par l’exposé des principales règles
concernant les personnes pouvant être tenues pour pénalement responsables et leur
degré d’implication (notions d’action, de complicité, de tentative), l’action publique,
les peines encourues et les causes de limitation de responsabilité pénale.
Par ailleurs, dans cet enseignement supérieur très axé sur le droit des affaires, comme
on ne saurait ignorer le sort juridiquement réservé aux entreprises en difficultés, vous
possédez désormais par le biais de la seconde partie de cette série les clefs utiles au
traitement de ces difficultés. Vous avez bien à l’esprit l’arsenal conçu par le législateur
soit pour prévenir les difficultés (utilisation de l’information comptable et financière,
alerte, rôle du mandataire ad hoc et de la conciliation), soit pour les traiter judiciairement
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lorsqu’elles sont avérées (procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de


liquidation judiciaire).
Vous parvenez au terme de cette quatrième et dernière série de cours de l’UE 111
d’« Introduction au droit » où tout a été fait pour que votre tour d’horizon du droit en
vigueur vous soit utile et agréable.

201111TDPA0413 61
UE 111 • Introduction au droit

Lexique
Pêle-mêle des concepts et expressions clefs du vocabulaire juridique dans l’ordre de leur
apparition dans le cours. La liste est à compléter par vos soins ! (Toutes les définitions
données dans le cours doivent être connues).
Délit civil : en dehors d’une inexécution contractuelle, tout fait causant intentionnellement un
préjudice à autrui et de nature à engager la responsabilité civile délictuelle de son auteur.
Quasi-délit  civil : en dehors d’une inexécution contractuelle, tout fait causant sans intention
malveillante un préjudice à autrui et de nature à engager la responsabilité civile quasi délictuelle
de son auteur.
Responsabilité civile délictuelle ou quasi délictuelle du fait personnel : régime de responsa-
bilité civile délictuelle ou quasi délictuelle de l’auteur du dommage reposant sur la faute person-
nelle (intentionnelle ou non) qu’il a commise et que l’on doit prouver.
Responsabilité civile délictuelle du fait des choses : responsabilité civile délictuelle que l’on
encourt pour les dommages causés par les choses que l’on a sous sa garde.
Garde d’une chose : la garde d’une chose suppose d’exercer à titre indépendant sur cette
chose, les pouvoirs d’usage, de contrôle et de direction.
Produit défectueux : au sens de l’article 1386-3 du Code civil, est un produit défectueux tout
bien meuble (même incorporé dans un immeuble), y compris les produits du sol, de l’élevage, de
la chasse, de la pêche et l’électricité, qui comporte une anomalie intrinsèque portant atteinte à
la sécurité.
Responsabilité civile délictuelle du fait d’autrui : responsabilité civile délictuelle que l’on
encourt pour les dommages causés par les personnes dont on doit répondre (ex. : responsabilité
des commettants du fait de leurs préposés pour les dommages que ces derniers causent dans
l’exercice de leurs fonctions).
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Lien de préposition : situation dans laquelle le préposé se trouve placé sous l’autorité et le
commandement de son commettant.
Responsabilité pénale : responsabilité encourue pour avoir enfreint la loi pénale, c’est-à-dire
pour avoir commis une infraction.
Contraventions : infractions pénales les moins graves, punies de peines contraventionnelles.
Délits pénaux : infractions pénales plus graves que les contraventions, punies de peines
correctionnelles.
Crimes : infractions pénales les plus graves, punies de peines criminelles.
Infractions de commission : infractions consistant à faire ce qui est pénalement interdit (voler,
tuer…).
Infractions d’omission : infractions consistant à ne pas faire ce qui aurait dû l’être (non-assis-
tance à personne en danger, etc.).
Infractions instantanées : infractions commises en une seule unité de temps (vol, etc.).
Infractions continues : infractions dont l’accomplissement nécessite une certaine période
(séquestration, etc.).
Élément légal d’une infraction : texte de loi (ou assimilé) en vertu duquel une infraction est
officiellement répertoriée. Selon le principe pénal de légalité des infractions et des peines, il
n’existe pas d’infraction ni de peines corollaires si aucun texte de loi (ou assimilé) ne le prévoit.

201111TDPA0413 63
Introduction au droit • Série 4

Élément matériel d’une infraction : comportement (commission, omission) par lequel se mani-
feste concrètement l’infraction.
Élément moral d’une infraction : composante psychologique de l’infraction, intention coupable
animant celui qui commet une infraction (par exception, certaines infractions sont non-intention-
nelles : coups et blessures involontaires, etc.).
Auteur d’une infraction : personne qui commet directement tous les éléments constitutifs de
l’infraction.
Coauteur d’une infraction : personne qui commet l’infraction au même titre que l’auteur (l’in-
fraction est commise par plusieurs auteurs).
Complice : personne qui, en connaissance de cause, favorise la perpétration d’une infraction.
Tentative : commencement d’exécution d’une infraction, celle-ci n’étant pas entièrement
consommée car son auteur est empêché d’agir par des facteurs indépendants de sa volonté.
Infraction consommée : infraction entièrement accomplie.
Action publique : action en justice au plan pénal.
Constitution de partie civile : fait pour la victime directe d’une infraction d’exercer l’action civile
pouvant naître de cette infraction, devant la juridiction pénale compétente qui statue sur l’action
publique.
Peines : sanctions encourues au plan pénal (amende, emprisonnement, etc.).
Récidive : fait, pour une personne déjà condamnée définitivement au plan pénal, de commettre
à nouveau une infraction.
Bande organisée : groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée
par un ou plusieurs faits matériels, d’une ou plusieurs infractions.
Guet-apens : fait d’attendre un certain temps une ou plusieurs personnes dans un lieu déter-
miné pour commettre à leur encontre une ou plusieurs infractions.
Préméditation : dessein, formé avant l’action, de commettre un crime ou un délit déterminé.

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Effraction : acte illégal de forcement, dégradation ou destruction de tout dispositif de fermeture
ou de toute espèce de clôture.
Escalade : au plan pénal, fait consistant à s’introduire illégalement dans un lieu quelconque, soit
par-dessus un élément de clôture, soit par toute ouverture non destinée à servir d’entrée.
Arme : tout objet conçu pour tuer ou blesser. Est assimilé à une arme, tout objet destiné à tuer,
blesser ou menacer.
Sursis : suspension de l’exécution d’une peine pouvant être prononcée par le juge pénal.
Dispense de peine : mesure par laquelle, à certaines conditions, une juridiction pénale peut
dispenser le prévenu coupable d’une infraction d’exécuter sa peine.
Prescription de la peine : fait pour une peine de ne plus devoir être appliquée, quand elle n’est
pas exécutée au-delà d’un certain délai à dater de la condamnation définitive.
Grâce : décision pouvant être prise par le président de la République, emportant dispense
d’exécuter tout ou partie d’une peine.
Amnistie : effacement, par une loi, de certaines condamnations et des peines y afférentes.
Réhabilitation : disparition d’une condamnation pénale et de ses conséquences, soit de plein
droit soit par décision de justice.
Contrainte : force irrésistible et imprévisible contraignant à commettre une infraction.
Erreur sur le droit : fait de commettre une infraction en pensant sincèrement que l’on n’agit pas
contrairement à la loi.

64
UE 111 • Introduction au droit

Ordre de la loi : fait justificatif d’accomplissement d’une infraction en ce que l’on agit conformé-
ment aux exigences d’une loi.
Commandement de l’autorité légitime : fait justificatif d’accomplissement d’une infraction en
ce que l’on agit sur ordre donné par une autorité publique compétente (sauf si cet acte est mani-
festement illégal).
Légitime défense : devant une atteinte injustifiée envers soi-même ou autrui, ou face au com-
mencement d’exécution d’un crime ou d’un délit contre un bien, accomplissement dans le même
temps d’un acte de défense nécessaire proportionné à la gravité de l’atteinte.
État de nécessité : face à un danger actuel ou imminent menaçant soi-même, autrui ou un bien,
accomplissement d’un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, pourvu qu’il
n’y ait pas disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace.
Immunité : cause de non responsabilité pénale en raison, notamment, de proches liens fami-
liaux entre la victime et l’auteur de l’infraction.
Cessation des paiements : impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible.
Groupement de prévention agréé : personne morale de droit privé agréée par le préfet de
région dans laquelle elle a son siège et qui a pour mission de fournir à ses adhérents, de façon
confidentielle, une analyse des informations économiques, comptables et financières que ceux-
ci s’engagent à lui transmettre. Lorsque le groupement relève des indices de difficultés, il doit en
informer le chef d’entreprise et peut lui proposer l’intervention d’un expert.
Alerte : dans le cadre de la prévention des difficultés des entreprises, démarche devant ou pou-
vant être accomplie par certaines personnes afin de signaler les difficultés qui sont de nature à
compromettre la continuité de l’exploitation.
Mandataire ad hoc : dans le cadre de la prévention des difficultés des entreprises, mandataire
désigné par le président du tribunal compétent afin d’aider et conseiller l’entrepreneur, sans se
substituer à lui.
Conciliation judiciaire : dans le cadre du traitement des difficultés des entreprises, procédure
qui tend à favoriser, par l’entremise d’un conciliateur judiciaire, la conclusion entre le débiteur et
ses principaux créanciers ainsi que, le cas échéant, ses cocontractants habituels, d’un accord
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amiable destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise.


Procédures collectives : dans le cadre du traitement des difficultés des entreprises, procé-
dures (sauvegarde ou redressement judiciaire ou liquidation judiciaire) qui s’appliquent à tous les
créanciers du débiteur en difficulté.
Sauvegarde : appliquée à une entreprise qui n’est pas encore en cessation des paiements mais
qui connaît des difficultés susceptibles d’y conduire et qu’elle ne peut surmonter seule, la pro-
cédure de sauvegarde a pour finalité la réorganisation de cette entreprise afin de permettre la
poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif.
Période d’observation : période qui débute au jugement d’ouverture d’une procédure de sau-
vegarde ou de redressement judiciaire et pendant laquelle la gestion de l’entreprise est aména-
gée par voie de justice, tandis que des bilans sur la situation de l’entreprise et des projets sur
son sort sont élaborés.
Juge-commissaire : désigné en justice, le juge-commissaire est l’un des organes des procé-
dures collectives. Il est chargé de veiller au déroulement rapide des procédures et à la protection
des intérêts en présence.
Administrateur judiciaire : mandataire de justice chargé de surveiller le débiteur dans sa ges-
tion ou de l’assister pour tous les actes de gestion ou certains d’entre eux.
Mandataire judiciaire : mandataire de justice qui a qualité pour agir au nom et dans l’intérêt
collectif des créanciers.
Contrôleurs : créanciers chargés d’assister le mandataire judiciaire.

201111TDPA0413 65
Introduction au droit • Série 4

Déclaration de créances : dans le cadre d’une procédure collective, signalement officiel de


leurs créances que font les créanciers du débiteur auprès des organes de la procédure (manda-
taire judiciaire, etc.).
Comités de créanciers : dans le cadre de procédures collectives, comités réunissant, l’un les
établissements de crédit et l’autre, les principaux fournisseurs de biens ou de services du débi-
teur. Ces comités ont vocation à se prononcer sur les projets de plan de sauvegarde, de redres-
sement, etc.
Commissaire à l’exécution du plan : nommé en justice, le commissaire à l’exécution du plan
est chargé de veiller à la bonne exécution du plan de sauvegarde, de redressement, etc.
Redressement judiciaire : appliquée à une entreprise qui est en cessation des paiements mais
dont le redressement ne paraît pas impossible, la procédure de redressement judiciaire a pour
objectif la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du
passif.
Période suspecte : période qui s’étend de la première heure du jour fixé pour la cessation des
paiements jusqu’au jour du prononcé du jugement ouvrant la procédure de redressement judi-
ciaire, etc.. Certains actes qui ont été passés par le débiteur pendant cette période sont nuls.
Liquidation judiciaire : appliquée à une entreprise qui est en cessation des paiements et dont
le redressement est manifestement impossible, la procédure de liquidation judiciaire a pour
objectif de mettre fin à l’activité de l’entreprise ou de réaliser le patrimoine du débiteur par une
cession globale ou séparée de ses biens ou de ses droits.
Liquidateur : mandataire judiciaire chargé des opérations de liquidation judiciaire.
Réalisation de l’actif : vente des actifs de l’entreprise.
Prisée : évaluation des biens.
Apurement du passif : règlement des dettes.

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66
UE 111 • Introduction au droit

Exercices autocorrigés

Ne pas envoyer à la correction

Test de vocabulaire et de compréhension


Afin de tester votre bonne compréhension du cours, déterminez, pour chacune de ces QCM
(questions à choix multiple), la (ou les) réponse(s) juste(s) parmi celles proposées. Les solutions
sont données à la suite des questions.

Questions
1. Dans quel(s) cas l’action en responsabilité civile (quasi)délictuelle peut-elle être engagée ?
a.  Pour demander réparation, au plan civil, d’un dommage causé par tout fait autre que
l’inexécution d’un contrat par un cocontractant.
b.  Pour demander que des sanctions pénales soient prises à l’encontre de l’auteur
d’un dommage.
c. Pour demander qu’un cocontractant défaillant exécute ses obligations contractuelles.
2. Parmi les recours cités, quel(s) est (sont) celui (ceux) fondé(s) sur la responsabilité civile (quasi)
délictuelle ?
a. L’action en responsabilité pour abus du droit de propriété.
b. L’action en responsabilité pour inconvénients anormaux du voisinage.
c. L’action en responsabilité pour concurrence déloyale.
3. Sur quoi repose la responsabilité d’un commettant du fait de son préposé ?
a. Sur la faute du commettant prouvée par la victime.
b. Sur une présomption légale simple.
c. Sur une présomption légale irréfragable.
4. Qui peut être tenu pour pénalement responsable ?
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a. Les personnes physiques.


b. Toutes les personnes morales.
c. Toutes les personnes morales, sauf l’État.
5. Qu’est-ce qu’une infraction consommée ?
a. Une infraction tentée.
b. Une infraction prescrite.
c. Une infraction entièrement accomplie.
6. Pour quelle catégorie d’infractions les peines correctionnelles sont-elles encourues ?
a. Les contraventions.
b. Les délits.
c. Les crimes.
7. Dans le cadre de la prévention des difficultés des entreprises, parmi les propositions citées,
quelle(s) est (sont) celle(s) dite(s) confidentielle(s) ?
a. La mission du mandataire ad hoc.
b. La constatation judiciaire de l’accord de conciliation.
c. L’homologation judiciaire de l’accord de conciliation.
8. Quelle(s) est (sont) la (les) procédure(s) qui s’applique(nt) à une entreprise en cessation des
paiements ?
a. La sauvegarde.
b. Le redressement judiciaire.
c. La liquidation judiciaire.

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Introduction au droit • Série 4

9. Dans le cadre d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, quel est l’organe
chargé de surveiller ou d’assister le débiteur dans sa gestion ?
a. Le juge-commissaire.
b. L’administrateur judiciaire.
c. Le mandataire judiciaire.
10. Parmi les plans cités, quel(s) est (sont) celui (ceux) qui doit (doivent) être arrêté(s) par décision
de justice ?
a. Le plan de sauvegarde.
b. Le plan de redressement.
c. Le plan de cession.

Réponses
1. a ; 2. a b c ; 3. c ; 4. a c ; 5. c ; 6. b ; 7. a b ; 8. b c ; 9. b ; 10. a b c.

Exercice : Cas pratiques

Énoncé
1. M. Delalune a, sans aucune intention malicieuse, négligé de réparer le système d’arrosage de
son jardin, ce qui a provoqué une inondation du terrain de son voisin M. Potager, lequel a, de ce
fait, perdu la quasi-totalité de sa récolte de carottes.
M. Potager peut-il obtenir réparation, au plan civil, auprès de M. Delalune ?
2. Afin de se faire construire une maison, Mme Snobi s’est adressée à un architecte, M. Enplan,
qu’elle a choisi uniquement parce qu’elle était persuadée, à tort, qu’il avait été l’architecte d’une
célèbre famille d’industriels (les Envue). M. Enplan ignore la confusion faite à son sujet par
Mme Snobi. Celle-ci, lui ayant versé des acomptes, apprend dans la presse l’identité du véri-
table architecte de la famille Envue et reproche à M. Enplan d’avoir commis une infraction en
acceptant les acomptes, alors qu’il n’est pas celui qu’elle croyait.
M. Enplan a-t-il commis une infraction ?

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3. M. Deconfit est un commerçant qui tient une épicerie fine mais qui, ayant constaté sa cessa-
tion des paiements, a effectué la saisine du tribunal de commerce compétent ; lequel a rendu
aujourd’hui son jugement d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire. Dans sa déci-
sion, le tribunal a considéré que la date de cessation des paiements remonte à quinze jours. À
sa grande surprise, M. Deconfit qui, la semaine dernière, a fait donation de boîtes de foie gras à
des amis pour leur repas de mariage qui doit avoir lieu dans un mois, apprend que cette donation
serait nulle en raison de la procédure de redressement judiciaire.
M. Deconfit, qui ne voit pas où est le rapport, pense que ladite donation est bien valable. A-t-il
raison ?

Corrigé

1. À propos du conflit Delalune-Potager


La récolte de carottes de M.  Potager est compromise à cause d’une négligence d’un voisin,
M. Delalune.
Sur quelle base légale M. Potager peut-il exercer son recours au plan civil ?
En matière civile, il existe deux sortes de responsabilités. La responsabilité contractuelle, encou-
rue lorsqu’un contrat est mal exécuté, et la responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle dans
tous les autres cas.

68
UE 111 • Introduction au droit

Qu’elle soit contractuelle ou non, la responsabilité civile exige pour sa mise en œuvre, la réunion
de trois conditions : un préjudice, un fait générateur et un lien de causalité entre le fait générateur
et le préjudice.
En l’espèce, aucun contrat n’est en cause entre les protagonistes, ce qui écarte toute responsa-
bilité contractuelle.
Mais M. Potager subit un préjudice : la perte de sa récolte de carottes, due (lien de causalité) à
une négligence de son voisin, M. Delalune, lequel n’a pas réparé les défaillances de son système
d’arrosage (fait générateur). Il y a donc lieu de retenir la responsabilité civile délictuelle ou quasi
délictuelle de M. Delalune.
Reste à savoir quel est avec précision le régime de responsabilité à invoquer (fait personnel, fait
des choses, fait d’autrui…).
Aux termes de l’article 1382 du Code civil : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui
un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. »
L’article 1383 du Code civil poursuit : « Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non
seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »
Cette disposition vise bien la situation de M. Delalune qui n’était animé d’aucune intention mali-
cieuse. Il convient, par conséquent, d’engager sa responsabilité civile quasi délictuelle. En effet,
par son fait personnel, M. Delalune est l’auteur de troubles anormaux de voisinage vis-à-vis de
M. Potager.
À noter que le dommage est intervenu du fait d’une chose (système d’arrosage). Il serait égale-
ment possible d’invoquer la responsabilité civile de M.  Delalune sur la base de l’article 1384
al. 1er du Code civil.

2. À propos de M. Enplan
Dans le dessein de se faire construire une maison, Mme Snobi s’est adressée à un architecte,
M. Enplan, qu’elle a choisi uniquement parce qu’elle était persuadée, à tort, qu’il avait été l’archi-
tecte d’une célèbre famille d’industriels (les Envue). M. Enplan ignore la confusion faite à son
sujet par Mme Snobi. Mais cette dernière, apprenant dans la presse l’identité du véritable archi-
tecte de la famille Envue, reproche à M. Enplan d’avoir commis une infraction en acceptant les
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acomptes qu’elle lui avait versés, alors qu’il n’était pas celui qu’elle croyait.
À quelles conditions une infraction est-elle constituée ?
Toute infraction pénale doit, pour être constituée, réunir trois éléments : l’élément légal, l’élément
matériel et l’élément moral.
L’élément légal est la source légale ou réglementaire qui institue l’infraction. En effet, d’après la
règle de légalité des infractions et des peines, nul ne peut être poursuivi du chef d’une infraction
et puni d’une peine qui ne sont pas expressément prévues par la loi. Chaque infraction a son
propre élément légal.
L’élément matériel est le comportement (commission ou omission) par lequel se manifeste l’in-
fraction. Chaque infraction se caractérise par un élément matériel qui lui est propre.
L’élément moral désigne l’aspect psychologique de l’infraction. C’est l’intention coupable
(volonté frauduleuse, mauvaise foi, etc.) avec laquelle l’auteur de l’infraction agit. Sauf excep-
tions (coups et blessures involontaires, etc.), l’élément moral est exigé dans toute infraction.
En l’espèce, en acceptant les acomptes que lui a versés Mme Snobi, M. Enplan ignore la confu-
sion faite à son sujet par cette dernière. Il n’a donc pas d’intention malicieuse. Faute d’élément
moral dans l’attitude de M. Enplan, celui-ci ne commet aucune infraction et n’est pas pénale-
ment punissable, contrairement à ce que pense Mme Snobi.
Remarquons que Mme Snobi pourrait peut-être, mais au plan civil, demander la nullité du contrat
qui la lie avec M. Enplan en invoquant une erreur déterminante dans son consentement (erreur
sur la personne du cocontractant).

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Introduction au droit • Série 4

3. À propos de M. Deconfit


Le tribunal de commerce vient, ce jour, de rendre son jugement d’ouverture d’une procédure de
redressement judiciaire concernant M. Deconfit, commerçant qui tient une épicerie fine. Selon le
tribunal, la cessation des paiements date de quinze jours. Or, en application de cette procédure,
une donation de boîtes de foie gras, faite la semaine dernière par M. Deconfit à des amis pour
leur repas de mariage qui doit avoir lieu dans un mois, serait nulle.
Dans quelle mesure les actes accomplis par le débiteur durant la période suspecte sont-ils
nuls ?
La période suspecte s’étend de la première heure du jour fixé pour la cessation des paiements
jusqu’au jour du prononcé du jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.
Le législateur prévoit que sont nuls certains actes qui ont été passés par le débiteur pendant
cette période. Ainsi, par exemple, sont nulles de plein droit les donations intervenues depuis la
date de cessation des paiements : « Sont nuls, lorsqu’ils sont intervenus depuis la date de ces-
sation des paiements […]  : Tous les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou
immobilière… » (art. L. 632-1 I C. com.)
En vertu de la nullité, les choses doivent être remises dans l’état antérieur à l’acte.
En l’espèce, l’entreprise de M. Deconfit est en redressement judiciaire depuis aujourd’hui. La
période suspecte remonte à quinze jours, c’est-à-dire depuis la date de cessation des paie-
ments. La donation des boîtes de foie gras effectuée la semaine dernière par M. Deconfit est
donc un acte passé pendant la période suspecte. Il s’agit d’un acte à titre gratuit translatif de
propriété mobilière qui est donc nul de plein droit. Les amis de M.  Deconfit devront donc lui
rendre les boîtes en question (d’autant plus facilement qu’ils ne les ont pas consommées car
elles étaient destinées à leur repas de mariage qui n’a pas encore eu lieu !).

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70
UE 111 • Introduction au droit

Annexes
• Sur le droit de la responsabilité :
Annexe 1 : Sur la responsabilité civile des associations sportives du fait de leurs membres
(responsabilité civile du fait d’autrui) : Cass. ass. plén., 29 juin 2007, Sté La Sauvegarde
c/  Marcos ; JCP édition Entreprise et affaires, n° 40 du 4 octobre 2007, 2 198 p. 21, note
Christophe RADÉ.
• Sur le droit des entreprises en difficulté :
Annexe 2 : Marielle MARTIN, « La sauvegarde financière accélérée : nouvelle « procédure col-
lective » », Revue Française de Comptabilité, n° 441, mars 2011, p. 9.
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72
Annexe 1
Introduction au droit • Série 4

Document de travail réservé aux élèves de l’Intec – Toute reproduction sans autorisation est interdite
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Annexe 2
Introduction au droit • Série 4

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Index
Action publique 27 Infraction instantanée 20
Administrateur judiciaire 46 Juge-commissaire 46
Alerte 38 Légitime défense 33
Amnistie 31 Lien de causalité 14
Arme 30 Liquidation judiciaire 56
Auteur 24 Mandataire ad hoc 40
Bande organisée 30 Mandataire de justice 46
Causes d’exonération 15 Mandataire judiciaire 47
Cessation des paiements 35 Ordre de la loi (fait justificatif) 32
Coauteur 24 Paiement volontaire des amendes 31
Comité de créanciers 49 Peine 28
Commandement de l’autorité légitime (fait Période suspecte 54
justificatif) 32 Placement sous surveillance électronique
Complice 24 mobile 28
Composition pénale 28 Préméditation 30, 31
Conciliation 41 Prescription de la peine 31
Contrainte 32 Producteur 10
Contraventions 19 Produit 11
Cour pénale internationale 26 Rapport de gestion 36
Crime 20 Recel 24
Délit pénal 20 Récidive 29
Dispense de peine 31 Redressement judiciaire 51
Dommage 14 Régime général de la responsabilité du fait
Effraction 30 des choses 9
Élément légal 20 Régime spécial de la responsabilité du fait
Élément matériel 21 des choses 10
Élément moral 22 Réhabilitation 31
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Erreur sur le droit 32 Responsabilité des artisans 12


Escalade 30 Responsabilité des instituteurs du fait de
État de nécessité 33 leurs élèves 13
Fait de la chose 10 Responsabilité des maîtres et commettants 12
Force majeure 15 Responsabilité du fait d’autrui 12
Garde 9 Responsabilité du fait des choses 9
Grâce 31 Responsabilité du fait personnel 8
Groupement de prévention agréé 37 Sauvegarde 45
Immunité familiale 33 Sursis 31
Infraction 19 Tentative 25
Infraction continue 20 Troubles psychiques ou neuro-
Infraction de commission 20 psychiques 32
Infraction d’omission 20

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Devoir 6
Introduction au droit
Année 2013-2014

À envoyer à la correction
Auteur : Marielle MARTIN

Nota Bene
Ce devoir est conçu pour être traité au seul moyen de la série 4 à laquelle il se rapporte. Les notions
traitées antérieurement sont évidemment supposées acquises.

Exercice 1 : Étude de situation pratique (5 points)

La SARL « Pasinaive » est immatriculée au RCS depuis quinze ans et, spécialisée dans la fabrication
d’ustensiles de cuisine, elle a vu son chiffre d’affaires et ses bénéfices progresser constamment jusqu’à
ces deux dernières années durant lesquelles ses clients les plus fidèles (grands restaurants,…) ont cessé
de s’approvisionner auprès d’elle et se sont tournés vers l’une de ses concurrentes : la SA « C’Juteux ».
Ne trouvant d’abord aucune raison pour expliquer cette situation, la SARL « Pasinaive » vient de décou-
vrir le rôle qu’a joué à cet égard M. Jenprofite, l’un de ses salariés depuis cinq ans.
En effet, il est maintenant avéré que ce dernier, chargé de la comptabilité de la SARL, s’est mis, voilà un
peu plus de deux ans, à utiliser les informations qu’il savait confidentielles sur la clientèle de celle-ci, pour
les vendre en secret à la SA « C’Juteux » ; laquelle a alors disposé de renseignements lui permettant de
faciliter la prospection des clients concernés.
La SARL « Pasinaive » compte assigner en justice M. Jenprofite auquel elle reproche d’avoir ainsi com-
mis le délit pénal d’abus de confiance.
Cependant, M. Jenprofite pense qu’il n’a pas commis ce délit.
A-t-il raison ?
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Exercice 2 : Commentaire de document (12 points)

Répondre aux six questions posées à la suite des extraits de la décision de justice ci-après
reproduite :

Cass. 2e civ., 7 février 2013


LA COUR […] ;
Vu l’article 1384 alinéa 5 du Code civil ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a été nommé mandataire non-salarié de la société les assurances
mutuelles Le Conservateur (l’assureur) à compter du 17 juin 1991 ; que le mandat de M. X… a été révoqué
le 15 mars 2004 à la suite d’une réclamation, l’assureur ayant été informé qu’il avait reçu et encaissé un
chèque après l’avoir falsifié ; que Mme Y…, exposant avoir souscrit le 16 juillet 1997, par l’entremise de
M. X…, un contrat d’assurance sur la vie intitulé AREP et avoir versé à ce dernier par chèque à l’ordre du
Conservateur la somme de 200 100 francs qu’il avait détournée, a assigné l’assureur en réparation de son
préjudice ;
Attendu que, pour débouter Mme Y… de sa demande, l’arrêt énonce que le mandat de M. X… prévoyait que
l’acceptation ou le rejet des propositions dépendaient exclusivement de l’appréciation du mandant et que
tout encaissement au comptant devait être réalisé obligatoirement par chèque ou virement à l’ordre de
l’assureur ; que celui-ci soutient que Mme Y… ne pouvait légitimement croire, dans les conditions où elle a
souscrit la proposition d’assurance, à l’étendue des pouvoirs de M. X… sans en vérifier les limites exactes ; •••/•••

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Introduction au droit • Devoir 6

•••/••• que l’assureur fait observer à juste titre que le formulaire de souscription du contrat AREP dont se prévaut
Mme Y…, qui constitue le seul document probant qu’elle produit, mentionne qu’elle reconnaît avoir reçu les
statuts et une note d’information qu’elle n’a pu produire, ainsi que l’avertissement, mis en évidence dans un
paragraphe de l’imprimé, sur fond bleuté « Responsabilité de la société et du souscripteur » immédiatement
avant les signatures, que la proposition n’est pas le contrat définitif, l’assureur s’engageant à faire parvenir
celui-ci au souscripteur dans le délai de deux mois maximum, le souscripteur s’engageant de son côté à le
prévenir à son siège social s’il n’a rien reçu au-delà de ce délai ; qu’il est constant que Mme Y… qui se
présente dans ses conclusions comme retraitée des services fiscaux de la Lozère, ce dont on déduit que le
formalisme contractuel rappelé dans le formulaire de souscription de la proposition de contrat signé le
16 juillet 1997 ne pouvait excéder ses capacités de compréhension des étapes et garanties de la procédure
de souscription à ce contrat d’assurance vie, ne s’est jamais préoccupée ou étonnée de l’absence de retour,
dans les deux mois, du contrat d’assurance après acceptation de la proposition, alors que la somme versée
comptant par chèque avait été encaissée ; qu’elle n’a pas davantage prévenu la société à son siège social
qu’elle n’avait rien reçu à l’expiration de ce délai, ce qui ne pouvait que susciter l’interrogation d’un épar-
gnant même profane qui, de surcroît, s’était engagé en souscrivant à la proposition d’assurance de prévenir
l’assureur s’il ne recevait pas dans les deux mois le contrat ; que l’assureur oppose donc à juste titre à
Mme Y… qu’elle ne peut prétendre avoir cru légitimement à l’étendue des pouvoirs de M. X… et que les
circonstances l’autorisaient à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs mais qu’elle a agi avec une
légèreté anormale et coupable, malgré les précautions prises par la société d’assurances pour rappeler le
respect de la procédure lors de la souscription du contrat dans les énonciations et avertissements du for-
mulaire de proposition ; que […] par ailleurs […] lorsque Mme Y… a été entendue dans le cadre de l’infor-
mation pénale ouverte contre M. X…, elle a déclaré le 28 septembre 2004 que celui-ci lui avait fait plusieurs
versements « en liquide », qu’elle avait retiré en 2001 les intérêts de 15 000 francs, en décembre 2001
4 500 francs et en avril 2002 760 euros, ce qui ne pouvait correspondre même pour un profane à un mode
de gestion normal d’un contrat d’assurance vie régulièrement souscrit, et que lorsqu’elle avait saisi le tribu-
nal de son action elle était restée taisante sur ces versements en espèce qui n’ont été révélés à l’assureur
que lorsqu’il a eu communication de la procédure pénale ; que la responsabilité de l’assureur, en sa qualité
de mandant de M.  X…, tirée de l’application du Code des assurances, ne peut donc être retenue en
l’espèce ;
Qu’en statuant par de tels motifs, impropres à établir qu’à la date de la conclusion du contrat et de la remise
des fonds, Mme Y… ne pouvait légitimement croire que M. X… n’agissait pas à l’occasion de ses fonctions
de mandataire de l’assureur, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 14 juin 2011, entre les parties, par la cour

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d’appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier ; […].

Pour information
Extraits de l’article L. 511-1 du Code des assurances :
« I. – L’intermédiation en assurance ou en réassurance est l’activité qui consiste à présenter, propo-
ser ou aider à conclure des contrats d’assurance ou de réassurance ou à réaliser d’autres travaux
préparatoires à leur conclusion. […].
[…]
III. – Pour cette activité d’intermédiation, l’employeur ou mandant est civilement responsable, dans
les termes de l’article 1384 du Code civil, du dommage causé par la faute, l’imprudence ou la négli-
gence de ses employés ou mandataires agissant en cette qualité, lesquels sont considérés, pour
l’application du présent article, comme des préposés, nonobstant toute convention contraire.
[…]. »

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TRAVAIL À FAIRE
1. Par quelle opération et en quelle qualité M. X…, l’assureur et Mme Y… se sont-ils retrouvés liés le
16 juillet 1997 ?
2. Quelle est la cause du préjudice dont Mme Y… affirme être la victime ?
3. À qui Mme Y… a-t-elle demandé réparation de son préjudice et sur quel fondement ?
4. Le régime de responsabilité invoqué par Mme Y… est-il applicable en matière d’intermédiation en
assurance ?
5. Par quels arguments l’assureur tente-t-il en l’espèce d’échapper à cette responsabilité ?
6. À qui et pour quel motif la Cour de cassation donne-t-elle raison dans l’arrêt étudié rendu le 7 février
2013 ?

Exercice 3 : Question de cours (3 points)

Outre le traitement judiciaire des difficultés des entreprises, quel est l’autre aspect du droit des entre-
prises en difficulté ?
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