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Syphilis laryngée

Introduction
Destinée à disparaître grâce à la pénicilline, plusieurs phénomènes ont entraîné une recrudescence des cas de syphilis dans le monde,
essentiellement l’apparition du VIH qui augmente le risque d’infection par la syphilis.
Les modifications du statut immunologique induites par le VIH sont multiples : diminution de la période de latence, sévérité des manifestations
cliniques, accélération du passage à la neuro-syphilis, négativation des réactions sérologiques, insuffisance, voire inefficacité du traitement
standard initial.
Les localisations laryngées de la syphilis restent rares et très polymorphes, elles représentent surtout un diagnostic d’élimination
des laryngites granulomateuses.
La syphilis est une maladie infectieuse due à Treponema pallidum, sexuellement transmissible (MST) et contagieuse. Il s’agit d’un spirochète
non cultivable, dont le taux de multiplication est très lent (33 heures pour la syphilis primaire à plusieurs jours pour la tertiaire). Elle fait partie
des quatre MST à déclaration obligatoire.
Modes de contamination
La transmission sexuelle est la plus fréquente. Elle suppose le contact intime de deux muqueuses dont l’une est infectée.
La transmission materno-fœtale se fait durant la grossesse par passage trans-placentaire du tréponème à partir du 4 e mois de la grossesse.
L’éventualité d’une contamination du nourrisson lors de l’accouchement à partir d’un chancre génital maternel est possible.
Syphilis primaire
Le chancre apparaît après 3 semaines environ d’incubation silencieuse au point d’inoculation du tréponème. Il est contagieux car il fourmille de
tréponèmes. Indolore, il est induré et disparaît au début de la roséole.
La réaction ganglionnaire inflammatoire, contemporaine du chancre, est modeste en cas de chancre génital et très intense pour une
localisation buccale.
Syphilis secondaire
Elle est marquée spontanément par plusieurs éruptions cutanéo-muqueuses entrecoupées de phases asymptomatiques de quelques mois, ceci
sur une durée de 2 ans en moyenne.
La roséole syphilitique est caractérisée par des macules érythémateuses du tronc pouvant passer inaperçues, elle dure de 7 à 10 jours.
Les syphilides papuleuses secondaires siègent aussi bien sur le visage que sur le tronc et les membres, très polymorphes leur diagnostic est
difficile. Des signes plus généraux peuvent être associés : fièvre, céphalées, syndrome méningé, poly-arthralgies, douleurs osseuses lancinantes
(ostéocopes), altération de l’état général.
Syphilis tertiaire
Elle est marquée par des complications cutanées (gommes), nerveuses (tabès, paralysie générale…), cardiaques (insuffisance aortique,
anévrisme aortique…), aujourd’hui exceptionnelles et accessibles au traitement pénicilliné. Ces manifestations sont secondaires à un infiltrat
lympho-plasmocytaire de siège péri-vasculaire, caractérisées par la persistance de lésions d’âge et de structures différents (zones
hyperplasiques, lytiques, scléreuses).
C’est ici que peuvent être évoqués les diagnostics différentiels d’autres affections granulomateuses (tuberculose, mycose, maladie de Besnier-
Boeck-Schaumann, certains lymphomes, …).

Étude clinique
L’atteinte laryngée peut s’observer à n’importe quel stade de l’histoire naturelle de la syphilis, cependant, la phase secondaire constitue la
période privilégiée des lésions laryngées.
Syphilis primaire
Le chancre laryngé, peu symptomatique et de courte durée, est également rarement retrouvé du fait de l’inaccessibilité laryngée au contact
primaire. Le plus souvent le chancre est indolore, il s’agit d’une ulcération unique de 5 à 15 mm de diamètre, siégeant généralement au niveau
de l’épiglotte. C’est l’adénopathie sous-digastrique associée au chancre, inflammatoire et constante, qui fait réaliser une fibroscopie et
découvrir le chancre. L’évolution est en général rapide et la cicatrisation ne laisse aucune séquelle.
Syphilis secondaire
Elle est marquée spontanément par plusieurs éruptions cutanéo-muqueuses entrecoupées de phases asymptomatiques de quelques semaines
ou mois, ceci sur une durée de 2 ans en moyenne.
La localisation laryngée est quasi constante lorsqu’elle s’associe à des plaques au niveau oro-bucco-pharyngé. La symptomatologie se résume
essentiellement à une dysphagie et une dysphonie à bascule. L’examen peut retrouver une hyperhémie laryngée pouvant s’accompagner
d’une éruption maculopapulaire habituellement confinée à l’épiglotte, au niveau de son bord libre, de sa face laryngée, et du repli
aryépiglottique. Ces plaques muqueuses à type de larges plaques érosives en coup d’ongle sont souvent surinfectées. Toutes ces lésions
secondaires sont hautement contagieuses. La disparition de ces lésions peut être longue, et elles peuvent récidiver au cours de différentes
floraisons.
Lorsque ces lésions sont asymptomatiques elles peuvent passer inaperçues, les formes symptomatiques peuvent entraîner des troubles
fonctionnels majeurs.
Syphilis tertiaire
À ce stade peuvent coexister des lésions d’âges différents. Quatre types de lésions élémentaires ont été décrites : l’infiltration, la gomme,
l’ulcère gommeux et l’hyperplasie, qui peuvent se mêler expliquant le polymorphisme de la syphilis tertiaire.
Périchondrite et chondrite laryngée peuvent apparaître à la suite des ulcérations. L’épiglotte est, encore une fois, le plus souvent le siège
de ces atteintes, mais l’évolution peut se faire vers une sténose glotto-sous-glottique. Les autres complications infectieuses de la syphilis
tertiaire (phlegmon péri-laryngé, abcès source de suppuration interminable) peuvent être à l’origine d’un état dyspnéique aigu.

Diagnostic positif
La syphilis reste, malgré sa recrudescence associée au sida, une pathologie rare et sa localisation laryngée demeure exceptionnelle.
Les diagnostics différentiels sont essentiellement une ulcération laryngée ou une laryngite chronique résistante aux thérapeutiques classiques.
C’est un ensemble d’éléments qui oriente le diagnostic de syphilis laryngée devant une lésion peu spécifique : la localisation préférentielle des
lésions aux niveaux épiglottique et cordal, le caractère récidivant de ces lésions, l’atteinte constante des autres zones muqueuses, l’association
d’adénopathies soit au stade primaire par un ganglion unique, soit à l’étape secondaire par de multiples ganglions touchant toutes les aires
cervicales. L’examen anatomopathologique, sans recherche de germe, orienterait vers une affection granulomateuse chronique.
Diagnostic biologique
Tous les efforts pour cultiver le Treponema pallidum sont restés vains.
Le diagnostic de syphilis ne peut donc se faire que par la mise en évidence du tréponème lui-même au microscope à fond noir ou,
indirectement, par la mise en évidence de la réponse spécifique anticorps.
Le diagnostic sérologique:
Le TPHA est la recherche dans le sérum du malade des anticorps dirigés contre les tréponèmes pathogènes. La réaction est donc spécifique des
tréponématoses. Après un traitement bien conduit, le TPHA ne se négative, et encore inconstamment, que si celui-ci a été institué dans
l’année qui suit le chancre d’inoculation. Au-delà de ce délai, le TPHA reste positif.
Le VDRL recherche dans le sérum des malades des anticorps anti-cardiolipidiques. L’antigène cardiolipidique utilisé comme cible est présent
dans tous les tréponèmes pathogènes mais aussi dans de nombreuses cellules animales ou végétales. Le VDRL n’est donc pas une réaction
spécifique des tréponématoses, elle s’observe au cours des maladies dysimmunitaires, notamment au cours du lupus et du syndrome des
anticorps anti-phospholipides.
On considère que le traitement est efficace quand le titre de VDRL, 3 mois après le traitement est divisé par 4, et 6 mois après le traitement est
divisé par 16.
Le fluorescent treponemal antibody (FTA) recherche dans le sérum du malade des anticorps dirigés contre le tréponème pâle, entier, tué.
Le FTA est donc au même titre que le TPHA, une réaction spécifique des tréponématoses et pas seulement de la syphilis. Ce test n’est pas
utilisé en dépistage courant.
Diagnostic différentiel
Classiquement, les diagnostics évoqués sont la tuberculose laryngée, la sarcoïdose laryngée, les mycoses (actinomycoses, blastomycoses,
histoplasmoses), la lèpre, l’amylose, le granulome de Wegener.
Le diagnostic est posé sur des éléments anamnestiques, sur l’association d’adénopathies, de lésions cutanées et muqueuses associées, et sur
les tests sérologiques.

Thérapeutique
Comme pour toute maladie infectieuse, le but du traitement est l’éradication de l’agent pathogène responsable, le seul critère formel de
guérison étant l’absence de rechute.
Compte tenu du temps de division du tréponème très long, les schémas thérapeutiques doivent
assurer un taux tréponémicide pendant 10 jours pour la syphilis primaire et secondaire, et jusqu’à 30 jours pour la tertiaire.
Seules les formes retards de la pénicilline en traitement minute ou les traitements longs par des cyclines permettent d’obtenir de tels taux
pendant une durée suffisante.
La réaction de Jarisch-Herxheimer, consistant en une aggravation des manifestations cliniques est indépendante de la dose. Elle est bénigne et
peut être prévenue en partie par l’administration conjointe de prednisone (0,5 mg/kg/j) la veille et les 3 premiers jours du traitement.
Le dépistage et traitement des partenaires sexuels est indispensable pour briser la chaîne de contamination.
Le traitement de la syphilis primaire ou secondaire, en l’absence d’allergie à la pénicilline est une injection intramusculaire unique de 2,4 MUI
benzathine pénicilline G (Extencillinet). Ce traitement est efficace dans près de 100 % des cas. La réaction d’Herxheimer peut être prévenue
pour la syphilis secondaire.
En cas d’allergie, des cures de cyclines sont instaurées (tétracycline ou doxycycline).
Pour la syphilis tertiaire, trois injections intramusculaires de 2,4 millions de pénicilline G sont recommandées à 1 semaine d’intervalle.
Rappelons enfin que contracter une syphilis témoigne d’une activité sexuelle à haut risque. La recherche d’une MST concomitante est justifiée,
incluant la recherche d’une primo-infection au VIH.

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