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INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES :

de la théorie à la pratique

A.J. SCHEEN (1)

RÉSUMÉ : La pharmacothérapie s’enrichit régulièrement de DRUG INTERACTIONS : FROM THEORY TO PRACTICE


nouvelles molécules et les objectifs thérapeutiques, à la fois SUMMARY : Pharmacotherapy becomes increasingly complex
curatifs et préventifs, sont de plus en plus stricts. Ceci amène à and therapeutic targets are more and more ambitious for both
une polymédication qui, elle-même, expose le patient à un care and prevention. Therefore, polypharmacy is frequent,
risque d’interactions médicamenteuses. Celles-ci sont très sou- which exposes the patient to a high risk of drug-drug interac-
vent méconnues alors qu’il est admis qu’elles sont responsables tions. These are often underestimated although they are res-
de nombreuses manifestations indésirables, dont certaines peu- ponsible for many adverse events that may be serious and even
vent être graves et parfois létales. Nous ferons d’abord un bref fatal. In the present paper, we will first briefly recall the main
rappel des principales précautions d’emploi quant à l’utilisa- cautions in the use of medications as well as the most common
tion des médicaments et des circonstances à risque d’interac- conditions favouring the occurrence of harmful drug interac-
tions et de manifestations indésirables potentiellement tions. Then, we will analyze the various mechanisms leading to
dangereuses. Ensuite, nous analyserons les différents méca- drug interactions, emphasizing especially those involving cyto-
nismes conduisant aux interactions médicamenteuses, en insis- chrome P450 enzymatic system and P-glycoprotein. Finally, we
tant plus spécifiquement sur ceux impliquant le système will illustrate these theoretical considerations with some
enzymatique du cytochrome P450 et la P-glycoprotéine. Enfin, examples of drug interactions, among the most dangerous and
nous illustrerons notre propos par quelques exemples concrets the most frequent in clinical practice.
de classes pharmacologiques exposant à des interactions médi- KEYWORDS : Adverse effects – Cytochrome P450 - Drug–Drug
camenteuses, potentiellement dangereuses, auxquelles sont sus- interactions – Pharmacotherapy
ceptibles d’être confrontés patients et médecins en pratique
quotidienne. interaction médicamenteuse, il convient de bien
MOTS-CLÉS : Médicaments – Cytochrome P450 - Effets indési- distinguer la molécule à l’origine de l’interac-
rables – Interactions médicamenteuses – Pharmacothérapie tion (c’est-à-dire modifiant la concentration et
l’action de l’autre médicament) et la molécule
I N T RO D U C T I O N dont la concentration altérée suite à l’interaction
Les études de médecine et la formation conti- aboutit finalement à la manifestation désirée ou
nuée doivent favoriser l’apprentissage au raison- indésirable (en cas de médicament à index théra-
nement thérapeutique, de la décision à la peutique étroit : voir plus loin). Il est important
prescription (1). La prescription d’un médica- de signaler que les conséquences de ces interac-
ment est un acte quotidien pour le médecin pra- tions ne se manifestent pas seulement lors de
ticien. Néanmoins, celui-ci ne mesure pas l’ajout d’un agent pharmacologique supplémen-
toujours les retombées de ce geste, sans doute un taire, mais aussi lors de l’arrêt d’un traitement
peu trop souvent banalisé (2). Généralement, le médicamenteux, ou encore lors d’un simple
médecin envisage les effets positifs escomptés changement de posologie. Heureusement, beau-
de sa prescription. Par contre, il lui arrive d’oc- coup de ces interactions médicamenteuses n’ont
culter ses éventuels aspects négatifs. Pour les que des effets anodins, mais certaines peuvent
réduire au minimum, le praticien devra prendre avoir des conséquences cliniques graves, poten-
en considération les précautions d’emploi tiellement mortelles (5). Il est estimé qu’environ
usuelles du médicament prescrit, notamment en 3 % des hospitalisations chez les personnes de
présence de certaines situations à risque (insuf- plus de 50 ans résultent d’une problématique
fisance rénale et/ou hépatique, polymédication), d’interactions médicamenteuses (6). Ceci est
et ne pas oublier de considérer le risque éventuel particulièrement vrai chez le sujet âgé et le
d’interactions médicamenteuses. Cette dernière constat est d’autant plus désolant que nombre de
problématique concerne aussi bien le médecin ces accidents sont potentiellement évitables à
prescripteur que le pharmacien dispensateur (3, condition d’être attentif à la problématique (7).
4). Ainsi, les patients âgés admis pour hypoglycé-
mies sévères sont 6 fois plus nombreux après
On parle d’interaction médicamenteuse
association de co-trimoxazole à un traitement
lorsque l’administration simultanée de deux ou
par glibenclamide, ceux hospitalisés en urgence
plusieurs médicaments conduit à potentialiser
pour intoxication digitalique sont 12 fois plus
ou minimiser les effets désirés ou indésirables
nombreux après co-prescription de clarithromy-
d’au moins un de ces médicaments. Dans toute
cine et de digoxine et ceux admis avec un dia-
gnostic d’hyperkaliémie sont 20 fois plus
(1) Professeur ordinaire, Université de Liège, Chef de nombreux après l’adjonction d’un diurétique
Service, Service de Diabétologie, Nutrition et Maladies d’épargne potassique à un traitement par inhibi-
métaboliques et Unité de Pharmacologie clinique,
Département de Médecine, CHU Sart Tilman, Liège.
teur de l’enzyme de conversion (7). La problé-

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matique des interactions médicamenteuses peut nous mentionnerons, à titre d’exemple, quelques
donc être considérée comme une épidémie cas concrets parmi les classes pharmacologiques
méconnue, souvent silencieuse, mais parfois les plus prescrites en Belgique, notamment en
dramatique; avec le vieillissement de la popula- médecine générale.
tion et les progrès de la pharmacothérapie, utili-
sée non seulement pour guérir mais aussi pour
prévenir des maladies, il s’agit là d’un nouveau DE L A P R E S C R I P T I O N À L’ I N T E R AC T I O N
défi émergeant de santé publique (8).
L’effet, thérapeutique ou toxique, d’un médi-
Les conséquences quelquefois gravissimes
cament chez un patient est déterminé par trois
des interactions médicamenteuses sont égale-
variables : l’action intrinsèque de la molécule
ment importantes pour l’industrie pharmaceu-
sur son site cible («effet du médicament sur l’or-
tique puisqu’elles peuvent aboutir au retrait ou à
ganisme»), la concentration de la molécule,
une stricte limitation d’utilisation pour certains
résultat des caractéristiques pharmacocinétiques
agents impliqués, alors que les molécules sont à
(«effet de l’organisme sur le médicament»), et
peine commercialisées (mibéfradil, un antago-
une certaine variabilité biologique dépendant à
niste calcique) ou déjà sur le marché depuis par-
la fois de facteurs internes et externes (figure 1)
fois plusieurs années : citons quelques exemples
(9). L’interférence liée à un autre médicament
récents comme l’arrêt de commercialisation de
apparaît dans cette troisième composante, mais
la terfénadine et de l’astémizole (deux anti-his-
peut évidemment influencer les deux premières,
taminiques H1 responsables de torsade de
notamment les paramètres pharmacocinétiques.
pointe), de la cérivastatine (rhabdomyolyse) ou
la sévère restriction de prescription du cisapride Les précautions d’emploi, les circonstances
(également pour cause de torsade de pointe), aggravant le risque et les interactions potentiel-
médicaments où les accidents sont survenus, lement dangereuses concernent essentiellement
dans l’immense majorité des cas, à la suite d’in- les médicaments qui ont un index thérapeutique
teractions médicamenteuses. étroit (10). Pour ces molécules, le rapport entre
Cet article a pour but, dans une première par- la concentration toxique et la concentration thé-
tie, de rappeler brièvement les précautions rapeutique est proche de 1. Dès lors, toute
d’emploi les plus habituelles, les principales cir- circonstance susceptible d’accroître significati-
constances à risque et les différents mécanismes vement les concentrations plasmatiques, par
d’interaction médicamenteuse, en insistant plus exemple en déplaçant la molécule de ses sites de
spécifiquement sur ceux impliquant le système liaison aux protéines plasmatiques, en entravant
enzymatique du cytochrome P450 et la P-glyco- la métabolisation hépatique du médicament ou
protéine. Dans une seconde partie, plus pratique, encore en réduisant son élimination rénale, peut

Figure 1 : Trois principales composantes contribuant à l’effet final (thérapeutique ou toxique) d’un médicament. Les interactions médicamenteuses
contribuent à la variabilité biologique, mais interfèrent également avec l’action du médicament et avec sa pharmacocinétique.

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INTÉRACTIONS MÉDICAMENTEUSES

entraîner des manifestations indésirables, par- SITUATIONS À RISQUE


fois graves.
Les médecins semblent moins regardants
vis-à-vis de la problématique des interactions
PRÉCAUTIONS D’EMPLOI médicamenteuses, soit par méconnaissance
théorique, soit par manque de compétence pra-
Les précautions d’emploi des médicaments tique. Pourtant, il existe manifestement des cir-
peuvent concerner soit des circonstances physio- constances de prescription au cours desquelles
logiques, soit des conditions pathologiques. Les les risques d’interactions augmentent. La poly-
premières intéressent certaines tranches particu- médication est la situation à risque la plus évi-
lières de la vie, comme l’enfance, la grossesse, dente : le risque d’interactions croît, en effet, de
l’allaitement, ou encore le grand âge. Les manière quasi exponentielle avec le nombre de
secondes comprennent des états pathologiques substances consommées (10). Cette polymédica-
capables d’interférer avec la sécurité d’emploi tion peut résulter d’une prescription justifiée,
du médicament comme l’insuffisance rénale ou mais aussi parfois abusive, de médicaments par
hépatique. Dans ces derniers cas, il convient, le médecin. Elle est également souvent entrete-
selon les circonstances, soit de ne pas prescrire nue par le patient qui n’hésite pas à recourir,
le médicament (en cas de contre-indication dans nombre de cas, à une automédication, par-
absolue), soit de l’utiliser avec précaution (en fois à l’insu de son médecin traitant et même de
cas de contre-indication relative). Pour ce faire, son pharmacien habituel.
il sera généralement nécessaire d’ajuster la dose Les sujets âgés combinent souvent plusieurs
en conséquence (Tableau I). Cette approche a conditions exposant à des complications graves
particulièrement bien été validée en cas d’insuf- secondaires à des interactions médicamenteuses
fisance rénale pour les médicaments éliminés (11). D’abord, la polypathologie, fréquente chez
par filtration glomérulaire. La posologie journa- le sujet âgé, motive la prescription conjointe de
lière pourra alors aisément être réduite en fonc- plusieurs médicaments. Ensuite, l’insuffisance
tion de la diminution de la clairance de la rénale, patente ou latente, est habituelle, ce qui
créatinine évaluée par la formule de Gault-Croc- conduit à ralentir l’élimination de nombreux
kroft. C’est le cas pour la pénicilline et ses déri- principes actifs ou de métabolites. Enfin, le
vés, la cimétidine, les héparines,… Pour les patient âgé est plus fragile, doté de mécanismes
médicaments avec un index thérapeutique étroit, de compensation moins performants (perte
il sera prudent, si possible, de recourir à un d’homéostasie). Ainsi, une manifestation indési-
monitoring thérapeutique. Ce dernier permettra rable médicamenteuse peut l’exposer à des acci-
dents parfois sévères, comme, par exemple, les
d’ajuster plus précisément la posologie de façon
chutes liées à l’hypotension orthostatique favori-
à maintenir les concentrations plasmatiques du
sée par la prise de diurétiques ou d’autres anti-
médicament dans les zones thérapeutiques et
hypertenseurs ou encore par la prescription de
non toxiques. C’est le cas pour la digoxine, la
psychotropes divers.
cyclosporine, les aminoglycosides, … Il est heu-
reux de constater que, dans la majorité des cas, L’insuffisance rénale et l’insuffisance hépa-
ces précautions d’emploi sont respectées dans la tique, affections susceptibles de modifier les
pratique clinique quotidienne et les ajustements paramètres pharmacocinétiques, augmentent les
posologiques correctement effectués si néces- risques d’effets indésirables liés à des interac-
saire (10). tions médicamenteuses. La prescription de
médicaments dans des situations à risque doit
TABLEAU I : PRINCIPALES PRÉCAUTIONS D’EMPLOI DES MÉDICAMENTS, être particulièrement réfléchie, limitant le
EN PARTICULIER CHEZ LE SUJET ÂGÉ.
nombre de molécules aux seules vraiment indis-
pensables et évitant, si possible, celles à risque
1) Choix judicieux des médicaments
d’effets indésirables par interactions. Elle doit,
- évitement de l’automédication en tout cas, s’accompagner d’une plus grande
- limitation de la polymédication vigilance collective. La capacité de gérer les
- attention aux erreurs de prise
- attention aux interactions médicamenteuses conséquences cliniques d’éventuelles interac-
tions médicamenteuses dépend, en effet, du
2) Ajustements de la posologie
patient, de son entourage et des soignants.
- en fonction du poids corporel
- en cas d’insuffisance rénale Toutes les situations à risque précitées sont
- en cas d’insuffisance hépatique théoriquement facilement identifiables et une
- en fonction du monitoring thérapeutique attention particulière peut minimiser le risque
- en fonction d’éventuelles interactions connues d’interactions médicamenteuses. De plus, la

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problématique peut facilement être étudiée dans giques dont le tramadol, le dextromethorphan et
des essais cliniques d’interactions sur un nombre les triptans; addition des effets de nombreux
limité de sujets. Il n’en va pas de même lorsque médicaments agissant sur la conduction car-
l’interaction médicamenteuse est facilitée par diaque (bêta-bloquants, digitaliques, vérapamil,
une prédisposition génétique, liée par exemple certains anti-arythmiques, …), avec bradycardie
au polymorphisme du CYP2D6 (caractérisant excessive et risque de bloc auriculo-ventriculaire
les sujets «métaboliseurs lents», 7 % environ de ou encore allongement de l’espace QT respon-
la population caucasienne). En l’absence de sable de torsade de pointe, surtout en présence
génotypage ou de phénotypage, le risque devient d’une hypokaliémie; augmentation du risque
imprévisible et son étude dans des essais cli- hémorragique en cas de prise conjointe d’un
niques ne pourra se faire que sur des sujets judi- thrombolytique, d’un anticoagulant et/ou d’un
cieusement sélectionnés d’un point de vue antiagrégant plaquettaire; antagonisme d’action
pharmacogénétique (12). des antihypertenseurs et des anti-inflammatoires
non stéroïdiens (AINS) sur la pression artérielle;
INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES risque d’hypotension sur vasodilatation exces-
sive NO-dépendante lors de l’association d’in-
Les interactions médicamenteuses peuvent
hibiteurs de la phosphodiestérase de type V
résulter d’une interférence pharmacodynamique
(sildénafil, …) et de dérivés nitrés; etc …
(compétition pour un même récepteur ou un
même transporteur, par exemple) ou d’une inter- Les interactions pharmacocinétiques peuvent
férence pharmacocinétique résultant d’une per- concerner toutes les étapes du devenir du médi-
turbation du devenir du médicament, quelle que cament dans l’organisme (Fig. 1) :
soit l’étape concernée (4, 5) (Tableau II). 1) l’absorption digestive (biodisponibilité
Les interactions pharmacodynamiques sont orale) : précipitation (chélation) dans le tube
relativement prévisibles en fonction des digestif ou influence potentielle des médica-
connaissances des principaux effets des médica- ments modifiant le pH gastro-intestinal;
ments concernés. Elles concernent souvent des 2) la distribution : déplacement des sites de
médicaments ayant des propriétés pharmacody- liaison à l’albumine, phénomène souvent com-
namiques ou des effets indésirables communs, pensé par d’autres mécanismes et dont les réper-
complémentaires ou antagonistes vis-à-vis d’un cussions cliniques, longtemps surestimées, sont
même système physiologique. Citons les finalement assez minimes; 3) le transport cellu-
quelques exemples suivants : risque de crise laire : impliquant les glycoprotéines P qui jouent
adrénergique lors de la prescription simultanée le rôle de pompes dans les membranes cellu-
d’antidépresseurs tricycliques (inhibiteurs de la laires pour expulser les médicaments vers l’exté-
recapture neuronale de la noradrénaline) et des rieur de la cellule;
antidépresseurs inhibiteurs de la monoamine 4) le métabolisme hépatique : soit par inhibi-
oxydase (bloquant la dégradation du neurotrans- tion, soit par induction enzymatique, notamment
metteur); addition des manifestations indési- sur les cytochromes P450;
rables atropiniques des antidépresseurs
tricycliques (imipramine et dérivés) et des anti- 5) l’excrétion rénale : par une interférence
spasmodiques urinaires anticholinergiques; avec la filtration glomérulaire, la réabsorption
risque de syndrome sérotoninergique avec la tubulaire et, surtout, la sécrétion tubulaire
prise concomitante d’un bloqueur sélectif de la active.
recapture de la sérotonine et de certains antal- Dans certains groupes pharmacothérapeu-
tiques, la plupart des molécules commercialisées
TABLEAU II : PRINCIPALES INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES exposent à des effets indésirables suite à des
interactions médicamenteuses. Parmi les
1) Pharmacodynamiques groupes à risque, citons les antiarythmiques, les
anticoagulants, les antiépileptiques, les antiré-
a. Agonisme : actions différentes synergiques
b. Antagonisme : actions différentes neutralisantes troviraux, les antidépresseurs, les immunodé-
presseurs, les anti-inflammatoires non
2) Pharmacocinétiques
stéroïdiens, les antifongiques azolés, les hypoli-
a. Absorption digestive : chélation, pH pidémiants, les dérivés de l’ergot de seigle et les
b. Distribution : liaison aux protéines plasmatiques
triptans,… Il convient cependant de ne pas
c. Transport cellulaire : P-glycoprotéine
d. Métabolisme : induction ou inhibition des oublier qu’à l’intérieur d’un groupe thérapeu-
enzymes hépatiques CYP450 tique, il peut exister une hétérogénéité, certaines
e. Excrétion urinaire : filtration glomérulaire, substances pouvant exposer à un risque particu-
absorption ou sécrétion tubulaire
lier de manifestations indésirables par interac-

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INTÉRACTIONS MÉDICAMENTEUSES

tions plus que d’autres. Ainsi, parmi les macro- teurs plus ou moins spécifiques (Tableau IV).
lides, le risque d’interactions est surtout impor- Les manifestations indésirables liées à des inter-
tant pour l’érythromycine et la téléthromycine actions médicamenteuses par induction enzyma-
alors qu’il est beaucoup plus faible pour la spi- tique sont susceptibles de survenir plusieurs
ramycine ou l’azithromycine. semaines après la modification du traitement, le
temps que l’induction enzymatique développe
son plein effet. A l’inverse, à l’arrêt du traite-
R Ô L E D E S C Y TO C H RO M E S P450 ET DE LA
P - G LY C O P ROT É I N E
ment, l’induction enzymatique peut persister
plusieurs semaines également. Ce délai implique
Les interactions médicamenteuses sont de que les conséquences cliniques des interactions
plus en plus et de mieux en mieux étudiées, à la médicamenteuses par induction enzymatique
fois in vitro et in vivo, depuis la découverte de surviennent parfois à distance de la modification
deux systèmes jouant un rôle important dans le du traitement, ce qui rend leur détection plus dif-
métabolisme et le transport de nombreux médi- ficile. Le phénomène d’induction enzymatique
caments, les cytochromes P450 et la P-glycopro- peut conduire à une diminution de l’efficacité
téine. Les enzymes du CYP450 peuvent être d’autres médicaments coadministrés avec l’in-
inhibés ou induits tandis que le système de trans- ducteur enzymatique (ou à un risque de surdo-
port de la P-glycoprotéine peut être inhibé et ce, sage suite à l’arrêt du traitement de l’inducteur).
par de nombreux médicaments couramment uti- Il est prudent de ne pas associer un médicament
lisés en pratique clinique sensible à l’effet inducteur enzymatique si les
conséquences cliniques d’une perte d’efficacité
CYTOCHROMES P450 sont potentiellement importantes et qu’il n’y a
Les interactions les mieux connues concer- pas de moyen pratique d’évaluer, prévoir et sur-
nent les médicaments métabolisés par le système veiller l’efficacité du médicament. La prescrip-
enzymatique des cytochromes P-450 et les tion d’un inducteur enzymatique peut également
médicaments qui induisent ou inhibent ce sys- augmenter le risque d’effets indésirables de cer-
tème (Tableau III) (13, 14). Comme déjà men- tains médicaments lorsque le métabolisme de
tionné, le danger concerne surtout les ceux-ci aboutit à la formation d’un métabolite
médicaments avec un coefficient thérapeutique responsable d’une toxicité particulière (par
bas (rapport entre la concentration toxique et la exemple, augmentation de l’hépatotoxicité de
concentration thérapeutique). C'est le cas, par l’isoniazide avec un inducteur enzymatique
exemple, de la warfarine, de la théophylline ou comme la rifampicine). Néanmoins, la survenue
de la ciclosporine. Les problèmes d'induction ou de manifestations indésirables en raison d’inter-
d'inhibition concernent particulièrement le CYP actions médicamenteuses s’explique plus fré-
3A4, isoforme qui métabolise le plus grand
nombre de médicaments. D’autres cytochromes TABLEAU IV : MÉDICAMENTS INHIBITEURS DES PRINCIPALES
ISOFORMES DU SYSTÈME ENZYMATIQUE DES CYTOCHROMES P450
P450 peuvent cependant également être impli- IMPLIQUÉS DANS LES INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES. UNE MÊME
qués, en particulier les CYP2D6, CYP2C9 et MOLÉCULE PEUT INTERAGIR AVEC PLUSIEURS ISOFORMES.
CYP2C8, pour lesquels on connaît des inhibi-
TABLEAU III : EXEMPLES D’INDUCTEURS ET D’INHIBITEURS ENZYMA- Isoforme Inhibiteurs
TIQUES CYP450
CYP3A4 amiodarone diltiazem, vérapamil
érythro-, clarithro-, téléthromycine
antifongiques azolés
Inducteurs enzymatiques Inhibiteurs enzymatiques certains antirétroviraux (indinavir,
- millepertuis - jus de pamplemousse nelfinavir, ritonavir, ...)
- antiépileptiques - antifongiques azolés cimétidine
- carbamazépine - fluconazone CYP2D6 fluoxétine, paroxétine, sertraline
- phénobarbital - itraconazole quinidine, hydroxyquinidine, quinine
- phénytoïne - kétoconazole ritonavir
certains neuroleptiques (halopéridol)
- antibactériens - antibactériens terbinafine
- rifampicine, - macrolides
- rifabutine (érythromycine, CYP2C8 gemfibrozil
clarythromycine)
CYP2C9 fluconazole
- antirétroviraux - antirétroviaux
fluoxétine, fluvoxamine
- efavirenz, névirapine - indinavir,
ritonavir
nelfinavir, ritonavir
- cimétidine CYP1A2 cimétidine
- amiodarone, vérapamil, diltiazem fluoroquinolones (ciprofloxacine)
- fluoxétine, paroxétine, fluvoxamine fluvoxamine

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quemment par la co-prescription d’un médica- Pour certains médicaments avec un index théra-
ment inhibiteur enzymatique, médicament sus- peutique étroit, cet accroissement des concentra-
ceptible de bloquer le métabolisme d’un autre tions peut conduire à des effets toxiques. Parmi
médicament, augmentant par là sa concentration les principaux médicaments inhibiteurs de la P-
plasmatique jusqu’à atteindre des taux toxiques. glycoprotéine, citons des anti-arythmiques
C’est ce mécanisme qui a été responsable du (amiodarone, quinidine, verapamil), des antibio-
retrait du marché des médicaments mentionnés tiques (érythromycine, clarithromycine), des
dans l’introduction, suite à des manifestations antidépresseurs (paroxétine, sertraline), des
indésirables graves, secondaires à des interac- inhibiteurs de la pompe à protons (omépra-
tions médicamenteuses. zole,…), des agents anticancéreux, la cyclospo-
Les interactions impliquant le système cyto- rine, le ritonavir, etc …
chrome P450 peuvent être observées en cas de
prescription de médicaments qui conduisent à : EXEMPLES D ’ I N T E R AC T I O N S
- une inhibition de l'activité du CYP : macro- MÉDICAMENTEUSES
lides (érythromycine), antifongiques azolés Mémoriser la liste d’interactions médicamen-
(kétoconazole, fluconazole), cimétidine (anti- teuses, même réduites aux seules interférences
H2), ... : il en résulte une augmentation de la cliniquement significatives, est quasi impos-
concentration des médicaments qui sont méta- sible. Il convient plutôt, en cas de doute, de
bolisés par ce CYP 3A4, aboutissant à certains consulter un ouvrage de référence. A cet égard,
effets toxiques : allongement de l'espace QT la revue Prescrire a publié, en 2005, un volumi-
conduisant à des torsades de pointe avec certains neux numéro spécial, très didactique, reprenant
anti-histaminiques H1 (terfénadine, ...), le cisa- les interactions les plus fréquemment rencon-
pride, etc, trées avec les médicaments utilisés pour le trai-
- une augmentation de l'activité du CYP (plus tement des pathologies les plus communes (4).
rarement) : certains anti-épileptiques (phénobar- La liste des interactions médicamenteuses peut
bital, carbamazépine), rifampicine : il en résulte également être consultées sur des sites internet,
une diminution de la concentration des médica- dont un des meilleurs est sans doute celui du
ments qui sont métabolisés par cette voie, abou- British National Formulary (www.bnf.org).
tissant à la perte de l'effet thérapeutique Comme rappelé précédemment, le clinicien doit
recherché : perte de l'effet contraceptif des oes- surtout bien connaître les médicaments qu’il a
troprogestatifs, etc. l’habitude d’utiliser et avoir l’esprit en alerte en
cas de prescription de médicaments à indice thé-
P-GLYCOPROTÉINE rapeutique étroit ou dans certaines circonstances
La glycoprotéine de perméabilité (P-glyco- à risques rappelées dans la première partie. Un
protéine) est une protéine responsable de l’ef- répertoire exhaustif serait fastidieux et impos-
flux de médicaments en dehors des cellules. sible dans le cadre de cet article, et une sélection
Contrairement aux cytotochromes P450 impli- limitée est toujours hasardeuse car empreinte
qués dans le métabolisme hépatique des médica- d’une subjectivité inéluctable. Nous donnerons
ments, la P-glycoprotéine participe à donc juste quelques exemples illustratifs suscep-
l’absorption, la distribution et l’élimination des tibles d’être rencontrés couramment en pratique
médicaments (15). En effet, elle est présente clinique, notamment en médecine générale
dans des organes impliqués dans l’absorption (Tableau V). Nous ferons délibérément l’im-
(intestin) et l’excrétion (rein) des substances passe sur certaines grandes classes de médica-
pharmacologiques. De plus, on la trouve aussi ments connues pour leur risque d’interactions
au niveau des barrières «sang-tissus», comme le médicamenteuses, comme les antimitotiques ou
placenta et la barrière hémato-encéphalique, ce les antirétroviraux, situations à la fois complexes
qui peut donc influencer la distribution des et en constante mutation qui ressortent plutôt du
médicaments. Il existe un nombre important de domaine du spécialiste.
substances se comportant comme substrats de
cette P-glycoprotéine et des inhibiteurs spéci- ANTIDIABÉTIQUES ORAUX
fiques ont été identifiés parmi les médicaments Les agents hypoglycémiants oraux sont sujets
couramment utilisés en clinique (15). La co- à diverses interactions médicamenteuses (16).
administration d’un inhibiteur et d’un substrat Longtemps on a cru que le risque le plus impor-
de la P-glycoprotéine va provoquer une augmen- tant pouvait résulter du déplacement des sulfa-
tation de la concentration de ce dernier, d’abord mides de leur site de liaison aux protéines
dans le sang, ensuite dans certains organes nor- plasmatiques (par exemple, par des anti-inflam-
malement protégés par la barrière sang-tissu.

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INTÉRACTIONS MÉDICAMENTEUSES

TABLEAU V : QUELQUES EXEMPLES PRATIQUES D’INTERACTIONS MÉDI- répaglinide-gemfibrozil, fibrate non commer-
CAMENTEUSES PHARMACODYNAMIQUES ET PHARMACOCINÉTIQUES cialisé en Belgique) (16). Un autre mécanisme,
CONDUISANT À DES COMPLICATIONS POTENTIELLEMENT GRAVES
non pharmacocinétique mais plutôt pharmaco-
dynamique, pouvant favoriser les hypogly-
Médicament à risque Médicament interactif Complication cémies est la coadministration d’un insulinosé-
Sulfamides Bêta-bloquant non sélectif Hypoglycémie crétagogue (ou de l’insuline) avec un inhibiteur
Metformine Provoquant insuffisance Acidose lactique du système rénine-angiotensine (qui peut aug-
rénale menter la sensibilité à l’insuline) ou, surtout, un
Statine (a) Gemfibrozil Rhabdomyolyse bêta-bloquant, situation assez fréquente en cli-
nique puisque nombre de patients diabétiques
IEC ou ARA Diurétiques d’épargne K+ Hyperkaliémie
sont hypertendus ou coronariens (16). Le bêta-
Digoxine Amiodarone, Intoxication
clarithromycine digitalique
bloquant inhibe, en effet, partiellement la glyco-
génolyse hépatique, voie biochimique sollicitée
Bêta-bloquant Vérapamil, Bloc de conduction
antiarythmiques en cas de baisse de la glycémie pour augmenter
Nitrés Sildénafil, … Hypotension,
la production de glucose par le foie; de plus, le
syncope bêta-bloquant peut masquer certains signes
Anti-vitamine K Amiodarone, Hémorragie d’alarme de l’hypoglycémie comme les palpita-
cimétidine, … (c) tions et les tremblements et donc retarder le
Anti-vitamine K AINS, aspirine Hémorragie «resucrage». Le risque est moins marqué avec
Anti-vitamine K Anti-épileptiques Thrombose les bêta-bloquants dits cardiosélectifs (sélectifs
inducteurs (d) pour les récepteurs bêta-1 adrénergiques) qu’il
Anti-histaminiques Antimycotiques azolés (c) Torsade de pointe convient de privilégier chez ce type de patients
H1 (b) plutôt que de les priver d’une protection par
Cisapride Antimycotiques azolés (c) Torsade de pointe bêta-bloquant lorsque celle-ci s’avère néces-
Théophylline Antimycotiques azolés (c) Intoxication saire.
(convulsions, …)
La metformine est considérée actuellement
Oestroprogestatif Rifampicine, Grossesse
comme le premier choix médicamenteux après
antiépileptiques (d) non désirée
échec des mesures hygiéno-diététiques dans le
Dérivés de l’ergot Triptan, Ergotisme
clarithromycine (c) (hypertension,
traitement du diabète de type 2. Ce médicament
angor) présente plusieurs avantages dont ceux de ne pas
Tramadol SSRI, IMAO, triptan Syndrome induire d’hypoglycémie et de ne pas être sujet à
sérotoninergique des interactions médicamenteuses (16). Par
SSRI IMAO, tramadol, triptan Syndrome contre, son utilisation est formellement contre-
sérotoninergique indiquée en cas d’insuffisance rénale. En effet,
Tricycliques, IMAO Syndrome dans cette circonstance, le médicament risque de
venlafaxine adrénergique s’accumuler pour atteindre des concentrations
Tricycliques Antispasmodiques Syndrome plasmatiques capables de bloquer la gluconéoge-
anticholinergiques atropinique nèse, ce qui entrave la métabolisation de l’acide
(a) La cérisvastatine été retirée du marché pour ce problème lactique et peut conduire à une acidose lactique,
(b) La terfénadine et l’astémizole ont été retirés du marché pour ce pro-
potentiellement mortelle. Pour les mêmes rai-
blème
(c) Ou autres médicaments inhibiteurs du CYP3A4 (voir tableaux III et IV) sons, il conviendra d’être prudent dans l’utilisa-
(d) Ou autres médicaments inducteurs du CYP450 (voir tableau III) tion de ce médicament chez des patients exposés
à un risque d’hypoxie capable de stimuler la gly-
matoires non stéroïdiens), mais il semble que ce colyse anaérobie, et donc la production d’acide
risque ait été surestimé. Par contre, des interac- lactique, comme les patients avec décompensa-
tions au niveau de leur métabolisme peuvent sur- tion cardiaque (qui peut d’ailleurs aussi s’ac-
venir et, en cas d’inhibition de celui-ci, le risque compagner d’une insuffisance pré-rénale), avec
le plus redouté est celui d’induire des hypogly- insuffisance respiratoire,… Tous les médica-
cémies. Cette complication concerne surtout les ments susceptibles d’aggraver une insuffisance
agents insulinosécrétagogues (sulfonylurées, rénale doivent être utilisés avec prudence chez
répaglinide) et beaucoup moins les insulinosen- les sujets traités par metformine : c’est le cas des
sibilisateurs (glitazones, metformine). Les sulfa- anti-inflammatoires non stéroïdiens, de la cyclo-
mides hypoglycémiants sont surtout métabolisés sporine,…
par le CYP2C9 et le répaglinide par le CYP2C8,
HYPOLIPIDÉMIANTS
mais les interactions cliniquement significatives
décrites jusqu’à présent sont, à vrai dire, assez Les statines sont devenues un pilier de la pré-
rares (à l’exception de l’interaction majeure vention cardio-vasculaire et, à ce titre, très lar-

Rev Med Liege 2006; 61 : 5-6 : 471-482 477


A.J. SCHEEN

gement prescrites. Cette classe pharmacologique dans une étude américaine, 8% des admissions à
présente une hétérogénéité en ce qui concerne le l’hôpital avec hyperkaliémie sévère s’expli-
métabolisme des différentes molécules qui la quaient par la combinaison IEC-spironolactone,
composent : la simvastatine est celle qui est la association qui augmente le risque d’un facteur
plus dépendante du CYP3A4, l’atorvastatine est 20 environ (7).
également partiellement métabolisée par le
CYP3A4, la fluvastatine est plutôt métabolisée ANTIARYTHMIQUES
via le CYP2C9 tandis que le métabolisme de la L’amiodarone est utilisée comme antiaryth-
paravastatine se fait de façon largement indé- mique et, dans une moindre mesure, comme
pendante du système CYP450. Cela semble être anti-angoreux. Ses effets indésirables les mieux
également le cas pour la rosuvastatine (17). Les documentés concernent les perturbations de la
accidents ayant amené au retrait de la cérivasta- fonction thyroïdienne (hypo- ou hyperthyroïdie).
tine (suite à des cas de rhabdomyolyse fatale sur- Il est moins connu des médecins que l’amioda-
venus essentiellement lors de l’utilisation de rone est un puissant inhibiteur du CYP3A4 et de
fortes doses en combinaison avec le gemfibrozil, la P-glycoprotéine (4). Dès lors, l’amiodarone
un fibrate inhibiteur du CYP2C8) a réactivé l’in- inhibe le métabolisme des anticoagulants cou-
térêt pour l’étude des interactions pharmacoci- mariniques (antivitamine K), de la digoxine, de
nétiques avec les molécules de cette classe la simvastatine, médicaments fréquemment
pharmacologique (17). Dans des situations où prescrits chez des patients avec une pathologie
existent une polymédication recourant à des cardiaque, mais aussi de la cyclosporine, de la
molécules susceptibles d’induire des interac- phénytoïne, …, autres médicaments à indice thé-
tions médicamenteuses (patient greffé, patient rapeutique étroit. Par ailleurs, l’amiodarone a
avec SIDA sous trithérapie, etc …), il est préfé- une très longue demi-vie. Ainsi, la stabilisation
rable de privilégier la pravastatine dont l’utilisa- des concentrations plasmatiques de l’amioda-
tion est plus sûre dans ces conditions. Si la rone se fait sur plusieurs semaines-mois de telle
prescription d’un fibrate est envisagée en asso- sorte les concentrations plasmatiques des médi-
ciation avec une statine pour traiter une hyperli- caments associés peuvent évoluer lentement et
pidémie mixte réfractaire, il convient de donner tardivement après l’introduction (conduisant à
la préférence au fénofibrate qui présente un une augmentation des taux) ou l’arrêt (amenant
moindre risque d’interaction et de rhabdomyo- une diminution des concentrations des autres
lyse et d’éviter le gemfibrozil. médicaments impliqués) de l’amiodarone.
La digoxine, même si elle est moins utilisée
INHIBITEURS DU SYSTÈME RÉNINE-ANGIOTENSINE
dans la décompensation cardiaque, reste utile
Les inhibiteurs du système rénine-angioten- dans certains cas, notamment en présence d’une
sine, que ce soient les inhibiteurs de l’enzyme de fibrillation auriculaire. Elle est exposée à de
conversion (IEC), ou les antagonistes sélectifs nombreuses interactions, notamment par les
des récepteurs AT1 de l’angiotensine (ARA) médicaments inhibiteurs de la P-glycoprotéine
,sont des médicaments efficaces et, en général, (4, 15). Ainsi, par exemple, les taux de digoxi-
bien tolérés. Ils occupent une place de plus en némie augmentent lors de la prescription simul-
plus importante en thérapeutique puisqu’ils sont tanée d’amiodarone ou de quinidine, deux
utilisés dans le traitement de l’hypertension arté- médicaments également utilisés dans les
rielle, de la décompensation cardiaque, de la troubles du rythme cardiaque et susceptibles
coronaropathie (en post-infarctus) et de la d’accentuer les troubles de la conduction auri-
néphropathie diabétique. Plusieurs de ces indi- culo-ventriculaire induits par la digoxine.
cations potentielles requièrent également l’utili-
ANTIMYCOTIQUES
sation de diurétiques. La spironolactone, un
diurétique d’épargne potassique connu de Les dérivés azolés oraux sont largement uti-
longue date, a été recommandée plus récemment lisés en dermatologie et en médecine générale
dans la décompensation cardiaque réfractaire pour le traitement de différentes lésions myco-
pour son mécanisme positif d’inhibition des tiques, en particulier les onychomycoses. Ces
effets de l’aldostérone sur la fibrose cardiaque. médicaments (kétoconazole, itraconazole, fluco-
Il convient de rappeler l’importance d’un moni- nazole) sont de puissants inhibiteurs du
toring attentif de la kaliémie chez les sujets rece- CYP3A4 et, à ce titre, ont été impliqués dans de
vant à la fois un IEC ou un ARA et un diurétique nombreux cas d’interactions médicamenteuses
d’épargne potassique comme la spironolactone (4). Les mieux étudiées ont concerné celles
de façon à dépister rapidement toute hyperkalié- impliquant la terfénadine, un antihistaminique
mie, ce tueur silencieux (18). Rappelons que H1 capable d’allonger l’espace QT et d’induire

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INTÉRACTIONS MÉDICAMENTEUSES

des torsades de pointe (finalement retiré du mar- mentées ou diminuées par des médicaments
ché et remplacé par son métabolite actif, la fexo- inhibant ou induisant le CYP3A4, ce qui peut
fénadine). nécessiter des ajustements posologiques lors de
La terbinafine, autre antimycotique non azolé l’introduction ou du retrait de ces médicaments
mais dérivé allylamine, présente l’avantage de (Tableau III). Au besoin, le monitoring théra-
ne pas inhiber le CYP3A4. Il a cependant été peutique pourra s’avérer utile pour maintenir les
montré que cette molécule inhibe fortement le concentrations dans la marge des taux thérapeu-
CYP2D6, enzyme qui intervient dans la métabo- tiques non toxiques. Il est cependant rarement
lisation de plusieurs dizaines de molécules, dont justifié de déséquilibrer un traitement antiépi-
certaines sont potentiellement arythmogènes, leptique efficace en introduisant un médicament
comme les tricycliques, certains bêta-bloquants à risque d’interaction; un tel médicament peut,
et le donézépil. le plus souvent, être remplacé par un autre médi-
cament de la même classe thérapeutique, mais à
D’une façon générale, le médecin est invité à moindre risque d’interaction médicamenteuse.
vérifier la liste des médicaments associés avant D’autre part, les antiépileptiques inducteurs
l’introduction d’un traitement oral antimyco- enzymatiques peuvent diminuer les concentra-
tique, souvent considéré à tort comme un traite- tions plasmatiques d’autres médicaments méta-
ment mineur. bolisés par le CYP450 (Tableau III). Rappelons
que le phénomène d’induction enzymatique est
ANTIBIOTIQUES caractérisé par une grande inertie puisqu’il met
La rifampicine est connue comme un puissant 2 à 3 semaines à s’installer lors de l’instauration
inducteur enzymatique. Rappelons qu’une aug- du traitement et autant de temps pour disparaître
mentation du risque d’hépatotoxicité a été obser- à l’arrêt de la médication. On sera particulière-
vée en cas d’association de la rifampicine avec ment attentif aux médicaments à index thérapeu-
l’isoniazide, traitement classique de la tubercu- tique étroit, comme les anticoagulants
lose. Cet effet est lié à une accélération de la for- coumariniques, les contraceptifs oraux, la ciclo-
mation de métabolites toxiques de l’isoniazide. sporine,…
Une classe d’antibiotiques très courante en
médecine générale est celle des macrolides. ANTIDOULEURS
L’érythromycine, la clarithromycine et la télé- Le paracétamol est l’antalgique de premier
thromycine sont des inhibiteurs du CYP3A4, choix pour les douleurs légères à modérées. Il
l’isoforme impliquée dans le métabolisme du n’expose pas à des interactions médicamen-
plus grand nombre de médicaments. Il convien- teuses. Il a été suggéré qu’un traitement au long
dra donc d’être vigilant lors de la prescription de cours par paracétamol pourrait accroître l’INR
cette classe d’antibiotique qui garde cependant chez des patients traités par anticoagulants indi-
un place de choix incontestable dans le traite- rects anti-vitamine K, mais, si cet effet existe, il
ment des pneumopathies atypiques. Dans cette semble très minime (4). A l’inverse , la prescrip-
classe pharmacologique, l’azithromycine a une tion d’anti-inflammatoires non stéroïdiens
potentialité d’interférence beaucoup plus faible (AINS), y compris l’aspirine, est contre-indi-
(4). Rappelons que les bêta-lactamines (dérivés quée chez les patients recevant ce type de traite-
de la pénicilline, céphalosporines) sont dépour- ment en raison d’un risque exagéré
vues de ce risque d’interactions médicamen- d’hémorragies. Le retentissement potentiel des
teuses. AINS sur la fonction rénale, déjà mentionné, ne
doit jamais être négligé au risque d’exposer le
ANTIÉPILEPTIQUES
patient à une incidence accrue de manifestations
Les patients traités par antiépileptiques sont indésirables liées à des médicaments éliminés
exposés à un risque élevé d’interactions avec de par le rein (lithium, digoxine, metformine,
très nombreux médicaments (4). Les consé- méthotrexate,…). L’opiacé antalgique faible de
quences cliniques de ces interactions sont par- premier choix est la codéine, pro-drogue méta-
fois graves. Les patients ont intérêt à être bien bolisée en morphine par le CYP2D6 dont on
informés de ces risques potentiels. Parmi les connaît le polymorphisme génétique; cette parti-
antiepileptiques classiques, seul l’acide val- cularité peut expliquer une variabilité impor-
proïque échappe à cette problématique. Par tante dans les effets thérapeutiques et toxiques
contre, le phénobarbital, la phénytoïne et la car- de ce médicament. Le tramadol est également un
bamazépine sont à la fois des substrats et des opiacé faible dont l’utilisation est devenue rela-
inducteurs du CYP3A4. D’une part, leurs tivement large pour le traitement des douleurs
concentrations plasmatiques peuvent être aug- réfractaires aux antalgiques de première ligne.

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A.J. SCHEEN

Cet antalgique a un effet sérotoninergique et de près de 30 % des médicaments utilisés. La


expose au risque de syndrome sérotoninergique, prescription d’une dose usuelle de fluoxétine
notamment en cas d’association avec un antidé- transforme 66 % (avec 20 mg/jour) à 95 % (avec
presseur de la famille des tricycliques, des inhi- 40 mg/jour) des sujets avec un phénotype nor-
biteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine mal de métaboliseurs rapides en sujets avec un
(SSRI) (voir ci-dessous) et des inhibiteurs de la phénotype de métaboliseurs lents. Il en résulte
monoamine oxydase (IMAO) ou encore lors que la prescription de 20 mg/jour de fluoxétine
d’une combinaison avec un antimigraineux de la peut augmenter d’un facteur 4 les concentrations
classe des triptans (4). Enfin, la plupart des opia- de médicaments métabolisés par le CYP2D6. Le
cés plus puissants (dextrométhorphan, métha- problème est d’autant plus difficile à cerner en
done, oxycodone, fentanyl, …) sont métabolisés pratique que la fluoxétine et son métabolite actif
par le CYP3A4. En cas d’association avec un la norfluoxétine ont une demi-vie très longue
des médicaments inhibiteurs du CYP3A4 pouvant aller jusqu’à plusieurs semaines. Par
(Tableau IV), le métabolisme de ces opiacés ailleurs, la fluoxétine (comme la paroxétine et la
diminue avec un risque d’accumulation et fluvoxamine) est capable également d’inhiber
d’augmentation des effets indésirables dose- d’autres isoformes du CYP450, ce qui accroît
dépendants, notamment neuropsychiques. encore le risque d’interactions médicamen-
teuses. Tous les SSRI ne sont pas équivalents à
ANTIDÉPRESSEURS cet égard, puisque pour le citalopram, le escita-
lopram et la sertraline, il existe une large sépara-
Les psychotropes, en général, et les antidé-
tion entre leur capacité à bloquer la recapture de
presseurs, en particulier, sont l’objet de nom-
la sérotonine et leur effet inhibiteur sur les
breuses interactions médicamenteuses (19). La
enzymes du cytochrome P450, ce qui rend le
plus connue, parce que particulièrement redou-
risque d’interactions médicamenteuses nette-
table, est celle résultant de l’association d’un tri-
ment moins important (9). Notons cependant
cyclique (inhibiteur de la recapture de la
que la sertraline (comme la paroxétine) est un
noradrénaline) et d’un IMAO (inhibiteur de
inhibiteur de la P-glycoprotéine, autre source
l’enzyme inactivant la noradrénaline), respon-
potentielle d’interactions médicamenteuses
sable d’une crise adrénergique. Compte tenu de
comme décrit précédemment (15).
la longue demi-vie de ces antidépresseurs, une
fenêtre thérapeutique de quelques semaines est Le risque majeur d’interactions médicamen-
conseillée lors d’une modification thérapeutique teuses avec les SSRI, lié à leur mode d’action,
avec passage d’une classe pharmacologique à est le syndrome sérotoninergique. Cette compli-
l’autre. Par ailleurs, les antidépresseurs imipra- cation grave peut être facilitée par l’administra-
miniques (tricycliques) peuvent provoquer des tion simultanée d’autres médicaments comme
manifestations indésirables par action sur divers les IMAO ou, plus couramment utilisé, le trama-
récepteurs adrénergiques (hypotension orthosta- dol et les triptans, comme déjà mentionné plus
tique), cholinergiques muscariniques (effets haut (4).
atropiniques classiques, comme sécheresse de
bouche, troubles de l’accommodation, constipa-
tion, troubles mictionnels, avec in fine, en cas de SOLUTIONS POUR UNE PRÉVENTION

syndrome atropinique, une confusion et des Les interactions médicamenteuses peuvent


troubles mnésiques) et histaminergiques (séda- survenir dans des situations cliniques très
tion). Ces effets secondaires peuvent être aggra- diverses. Le plus souvent, le praticien est
vés suite à la prescription d’autres médicaments confronté au cas d’un traitement médicamen-
susceptibles d’exercer aussi de tels effets, teux déjà installé, auquel il envisage d’ajouter un
comme certains antihypertenseurs, des antispas- autre médicament. Parfois, il est amené à retirer
modiques anticholinergiques ou des anti-hista- un médicament d’une association jusque-là bien
miniques H1, respectivement. supportée, retrait qui peut modifier la concentra-
Les SSRI sont les antidépresseurs les plus tion du ou des médicaments restants. Enfin, le
prescrits en médecine générale. Ils ont été large- médecin peut aussi prescrire deux médicaments
ment adoptés notamment en raison de leur pro- susceptibles d’interagir lorsqu’ils sont adminis-
fil de tolérance et de sécurité beaucoup plus trés en même temps. Avant d’associer deux
favorable que celui observé avec les antidépres- médicaments, il faut réfléchir aux risques encou-
seurs tricycliques. Il existe cependant un risque rus par le patient. Les interactions médicamen-
d’interactions médicamenteuses avec les SSRI teuses peuvent également conduire à des effets
(9). Ainsi, la fluoxétine est capable d’inhiber le très disparates. Les plus fréquents, et les plus
CYP2D6, enzyme impliqué dans le métabolisme préoccupants, concernent la survenue de mani-

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INTÉRACTIONS MÉDICAMENTEUSES

festations indésirables, mais il peut également compte alors qu’il apparaît de plus en plus
s’agir d’une perte de l’efficacité thérapeutique. qu’elle pourrait jouer un rôle déterminant pour
Pour prévenir les conséquences néfastes des expliquer la survenue d’interactions médica-
interactions médicamenteuses, il vaut mieux menteuses, rares mais graves, et donc aussi pour
éviter les associations connues pour être à les prévenir (12). Les médecins qui observent
risques, organiser la surveillance et la gestion des manifestations indésirables inattendues doi-
des conséquences cliniques, se méfier de cer- vent toujours évoquer la possibilité d’une inter-
tains patients particulièrement exposés (du fait action médicamenteuse et, si tel est le cas, le
de leur âge, d’une polymédication déjà présente signaler au centre belge de pharmacovigilance.
ou d’une co-morbidité interférant avec la phar- Cette démarche est la seule capable d’identifier
macocinétique des médicaments). Les patients des interactions rares favorisées par un terrain
qui prennent des médicaments à risque d’inter- génétique particulier ou encore par le cumul de
actions doivent être prévenus et avertis précisé- plusieurs médicaments, situations difficiles,
ment de ces risques, car leur vigilance (ou celle voire impossibles, à évaluer dans les études cli-
de leur entourage) est la première garantie de niques lors du développement de médicaments.
prévention de conséquences graves.

Il est illusoire que le médecin ou le pharma- CONCLUSION


cien connaissent la majorité des, sinon toutes Lors de toute prescription par un médecin ou
les interactions médicamenteuses, même si on de toute dispensation par un pharmacien, il faut
s’en tient à celles réputées être cliniquement interroger le patient sur ses traitements en cours
significatives. Au vu de cette complexité, il n’est ou interrompus récemment, qu’ils aient été pres-
pas étonnant que des systèmes de prescription crits sur ordonnance (éventuellement par un
ou de délivrance de médicaments couplés à une autre confrère), ou conseillés en pharmacie, ou
assistance informatique capable de déclencher encore consommés en automédication, sans
des alertes en cas d’interactions potentielles oublier certains compléments alimentaires et la
aient été développés. Plusieurs études, essentiel- phytothérapie. L’intérêt bien pensé des patients
lement réalisées en milieu hospitalier, ont déjà est que la prescription et la dispensation de
démontré qu’ils sont capables de réduire le médicaments à risque de manifestations indési-
risque de co-prescriptions dangereuses. Hélas, rables par interactions médicamenteuses, ou
les systèmes disponibles sont largement impar- plus généralement dans des situations à risque,
faits et pêchent par un défaut de sensibilité et de soient limitées au strict nécessaire (c’est-à-dire
spécificité (20). Si le système est trop sévère, le là où les bénéfices attendus dépassent largement
nombre d’alertes sera excessif, ce qui très rapi- les dangers prévisibles) et qu’elles s’accompa-
dement aboutira à un laisser-aller du praticien gnent, en tous cas, d’une grande vigilance col-
(21). Si le système se limite à la détection des lective. Cette règle élémentaire permettra de
interactions très dangereuses, l’outil sera sans minimiser le risque d’interactions médicamen-
doute mieux accepté, mais passera à côté de teuses, phénomène complexe mais trop souvent
nombre d’interactions potentielles. Un compro- éludé, à la source de conséquences cliniques
mis réaliste n’est pas facile à trouver et dépendra parfois graves.
des objectifs fixés et des qualités des utilisa-
teurs. L’avenir pourrait se trouver dans des sys-
tèmes experts actifs modulables, comportant BIBLIOGRAPHIE
différents niveaux d’alerte, conçus pour les 1. Scheen AJ.— Comment je traite... De la pharmacologie
médecins praticiens de terrain (21). Quoi qu’il spéciale à la thérapeutique médicale : plaidoyer pour un
en soit, tout système expert a ses limites et il enseignement privilégiant l’apprentissage au raisonne-
ment thérapeutique, de la décision à la prescription. Rev
apparaît évident que celles-ci sont nombreuses Med Liège, 2000, 55, 811-816.
dans le domaine des interactions médicamen-
2. Scheen AJ, Parada A, Giet D.— Conseils pour une
teuses. La principale est sans doute que le sys- meilleure prescription médicamenteuse. Rev Med Liège,
tème expert doit être sans cesse alimenté et mis 2006, 61, 488-493.
à jour alors que les informations disponibles
3. Costentin J.— Pharmacothérapie pratique à l’officine :
sont le plus souvent très succinctes et fragmen- l’essentiel. Collection Pharma, Elsevier, Paris, 2004,
taires. A titre d’exemple, signalons que les inter- 237 p.
actions étudiées expérimentalement concernent 4. Rédaction La Revue prescrire.— Interactions médica-
le plus souvent deux médicaments alors qu’une menteuses. Comprendre et décider. Revue Prescrire,
majorité de patients âgés prennent au moins 5 2005, 25, 1-97.
médicaments différents. Enfin, la pharmacogé- 5. Scheen A, Luyckx A.— Médicaments et maladies iatro-
nétique n’est, actuellement, aucunement prise en gènes. Rev Med Liège, 1979, 34, 61-69.

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Prof. A.J. Scheen, Département de Médecine, CHU
Sart Tilman, 4000 Liège , Belgique
email : andre.scheen@chu.ulg.ac.be

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