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Les sociétés cotées font la promotion du management pour la valeur (value based
management) en déployant un système de contrôle et de pilotage dont la finalité est
d’identifier tous les vecteurs de création de richesse, et en remplaçant les indicateurs
comptables (résultat net, BPA) par des indicateurs sophistiqués tels que l’EVA, le CFROI ou
la MVA. Le débat actuel porte sur les destinataires de cette création de valeur, en opposant les
actionnaires (shareholders) à toutes les autres parties prenantes de l’entreprise (stakeholders),
c’est-à-dire les salariés, créanciers, clients et fournisseurs. Nous réconcilierons ces deux
approches avec le tableau de bord prospectif, qui conditionne la valeur actionnariale aux
performances des autres acteurs.
Retenir la création de valeur comme critère d’évaluation des performances des entreprises
implique la définition de mesures et l’identification des variables d’action. Nous avons vu au
cours du chapitre précédent différentes mesures (EVA, CFROI, TSR, MVA…), dont la
finalité est de comparer la performance d’un projet à son coût. Après avoir mesuré la création
de valeur, il faut identifier les variables d’action susceptibles de l’influencer favorablement.
L’analyse des déterminants de la performance économique requiert en amont une
compréhension de la stratégie de l’entreprise et notamment de sa capacité à conserver un
avantage concurrentiel.
1. L’analyse stratégique
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des produits de substitution, le pouvoir de négociation des consommateurs ou des clients, et le
pouvoir de négociation des fournisseurs (voir figure 4.1).
L’entreprise est donc sous la menace de nombreux éléments imprévisibles qui peuvent
redistribuer complètement les cartes d’un secteur industriel. Le potentiel de croissance
représente une variable clé dans l’intensité concurrentielle, tout comme la capacité à imposer
des barrières à l’entrée, la maîtrise d’un savoir-faire, un accès privilégié aux réseaux de
distribution ou encore un leadership technologique.
D’après Porter, l’entreprise dispose de différents leviers décisionnels pour s’engager dans la
concurrence (gamme de produits, marchés cibles, commercialisation, ventes, distribution,
fabrication, main-d’œuvre, achats, recherche et développement, finance et contrôle de
gestion), mais ses engagements stratégiques doivent s’étendre sur le long terme pour
permettre une création de valeur importante.
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2. Les déterminants de la performance économique
Après cet audit stratégique, l’entreprise va identifier les moteurs de la création de valeur. Ces
moteurs sont synthétisés graphiquement dans l’arbre de la valeur suivant (voir figure 2),
inspiré du modèle SVA (Shareholder Value Analysis) de Rappaport (1998).
L’arbre de la valeur, fondé sur le modèle de l’EVA, donne les variables sur lesquelles
l’entreprise peut agir pour améliorer sa création de richesse :
où ROIC (Return On Invested Capital) est le taux de rentabilité des capitaux investis, CMPC,
le coût moyen pondéré du capital ajusté, et CI, le montant des capitaux investis. Pour
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améliorer la performance économique, les variables d’action portent sur chaque composante
de la formule ci-dessus.
Le taux de rentabilité des capitaux investis est décomposé comme le produit de la marge
opérationnelle par le taux de rotation des capitaux investis :
Pour un niveau de résultat opérationnel donné, plus le coût moyen pondéré du capital est
faible et plus l’EVA est élevée. D’après la formule du CMPC, les dirigeants ont trois
variables d’actions :
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La réduction du coût des capitaux propres (kCP).
La réduction du coût de la dette (kD).
Une combinaison optimale des fonds propres (CP) et des dettes (D) dans la
structurefinancière pour minimiser le coût du capital.
Le coût des ressources dépend du risque perçu par les bailleurs de fonds sur leur
investissement. Plus le risque est faible et plus le rendement requis par les actionnaires et
créanciers est faible. Le niveau des taux d’intérêt, variable exogène aux décisions des
dirigeants, est influencé par la qualité de crédit de l’entreprise. Une entreprise avec un bon
rating s’endette à moindre coût et donc crée de la valeur pour ses actionnaires. La politique
d’endettement est difficile à optimiser car elle a trait à la fois au désendettement pour réduire
le risque financier et à l’endettement pour valoriser la firme du fait de l’avantage fiscal lié à la
déductibilité des intérêts. Les facteurs qui pèsent sur la stratégie financière sont multiples, et
le niveau de l’endettement semble dépendre plus des opportunités de croissance que de
quelconques avantages fiscaux qui sont rapidement contrebalancés par l’accroissement du
risque de faillite.
Enfin, la lisibilité de l’entreprise est favorisée par une politique de dividendes en croissance
régulière. Les entreprises ne doivent pas hésiter à reverser des liquidités à leurs actionnaires
par des rachats d’actions si elles ne disposent pas de projets d’investissement suffisamment
rentables.
Fonder une politique de création de la valeur uniquement sur des indicateurs financiers
comme l’EVA ou la MVA peut se révéler dangereux pour la pérennité de l’entreprise.
D’une part, ces indicateurs sont parfois complexes à utiliser au quotidien, compte tenu
de la difficulté des retraitements et des calculs, notamment dans l’évaluation du coût
des fonds propres.
D’autre part, les dirigeants peuvent être amenés à favoriser le court terme et manipuler
les indicateurs pour les rendre plus séduisants. Par exemple, une réduction immédiate
des investissements en recherche et développement améliore mécaniquement l’EVA à
court terme, avec un risque significatif d’une compétitivité moindre à l’avenir. Pour
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réduire ce risque, il convient d’adopter une politique de pilotage par la valeur qui
dépasse le simple concept de performance financière, comme la mise en place d’un
tableau de bord prospectif ou balancedscorecard.
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Figue 3 : Le tableau de bord prospectif de Kaplan et Norton (1996)
2. Les indicateurs
Pour chacun des axes, les auteurs préconisent des indicateurs qui serviront de variables
d’actions pour les dirigeants ou toute autre catégorie de personnel en charge du pilotage du
tableau de bord prospectif.
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Pour la perspective clients, les indicateurs sont la satisfaction des clients, la
fidélisationde la clientèle, les parts de marché, la rentabilité par segment et
l’acquisition de nouveaux clients. Il existe un lien de causalité entre cet axe et le
financier puisque la satisfaction des clients est un élément déterminant de la
performance financière.
Ces préconisations des auteurs pour mesurer la performance serviront de guide à l’entreprise
pour définir des mesures adaptées et analyser les relations de causalité qui structurent le
balancedscorecard. Lorsqu’un objectif n’est pas atteint, il est indispensable de cerner
l’articulation entre chaque indicateur pour pouvoir déceler l’origine du problème et agir sur
les variables pertinentes. Dans le tableau de bord prospectif, la performance financière est le
résultat des actions menées aux autres niveaux.
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III. Les schémas de rémunération
Le pilotage par la valeur doit s’accompagner d’un système d’incitation qui lie la rémunération
des différents acteurs aux performances réalisées. Le salaire voit sa part variable augmenter
significativement dans le but de rapprocher les objectifs des dirigeants de ceux des
actionnaires. D’après les promoteurs de l’EVA, le schéma de rémunération doit être incitatif
et déployé dans toute l’organisation. Le bonus variable est un pourcentage de la variation de
l’EVA d’une année sur l’autre :
La mise en place d’un tel schéma de rémunération est complétée par une banque de bonus qui
vise à lisser dans le temps les performances de l’équipe dirigeante. Seule une fraction du
bonus est versée chaque année, dans le but de conserver et de reporter une réserve de
cash qui viendra compenser, le cas échéant, les pertes éventuelles. Les dirigeants sont
récompensés et pénalisés suivant la qualité des performances, et encouragés à poursuivre des
stratégies de long terme.