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KOUBY Emma Mercredi, 14h, DRT411EM07

Emma.kouby@etu.univ-amu.fr Contrôle de l’administration

Licence 2, Marseille

Séance 1 : la légalité administrative

• CE, Assemblée, 3 juillet 1996, Koné

Question 1 : à quelle catégorie de normes constitutionnelles le Conseil d’Etat se réfère-t-il ? La création de telles normes
par le juge administratif vous semble-t-elle contestable ?

Dans cet arrêt d’assemblée du 3 juillet 1996, le Conseil d’Etat se réfère à la catégorie constitutionnelle des principes
fondamentaux reconnus par les lois de la République. La création de telles normes par le juge administratif n’est pas
contestable. En effet, ce type de normes constitutionnelles est évoqué dans le Préambule de la Constitution de 1946
où le Conseil Constitutionnel va reconnaître valeur constitutionnelle à ces dernières. De plus, la compétence de création
de telles normes relève principalement du Conseil Constitutionnel mais la compétence n’est pas exclue pour le Conseil
d’Etat qui peut également le faire. En effet, le Conseil d’Etat a dégagé un principe fondamental reconnu par les lois de
la République – celui de la liberté d’association dans une décision du 11 juillet 1956 – Amicale des Annamites de Paris.
Ainsi, il a pu réitérer la création d’un principe dans l’arrêt d’espèce relatif à l’extradition d’un malien sur demande de la
France notamment le principe selon lequel une extradition ne peut pas être demandée dans un but politique.

Question 2 : existe-t-il, dans la jurisprudence administrative, une hiérarchie entre les normes constitutionnelles et
internationales ? Cet arrêt l’illustre-t-il ?

Dans un Etat de droit, il existe une hiérarchie des normes mise en place par Kelsen dont les normes supérieures
s’imposent aux normes de rang inférieur. A la tête de cette hiérarchie, se trouve les normes constitutionnelles qui
viennent s’imposer aux normes internationales tels que les traités ou les conventions internationales. En effet, selon le
préambule de la Constitution de 1946 repris par celui de 1958 proclame que la France « se conforme aux règles du
droit international public ». Ainsi, l’on peut affirmer que l’autorité de la Constitution l’emporte sur les traités. Le
principe selon lequel il existe une hiérarchie entre les normes constitutionnelles et les normes internationales va être
repris dans de nombreux arrêts qui constituent la jurisprudence administrative. En effet, la solution va d’abord être
reprise dans un arrêt du Conseil d’Etat en date du 30 mai 1932 – Dame Kirkwood. Cela va se poursuivre dans un arrêt
du Conseil d’Etat du 30 octobre 1998 – Sarran – où ce dernier va affirmer que si l’article 55 de la Constitution confère
aux engagements internationaux une suprématie sur les lois, cette dernière ne s’applique pas dans l’ordre interne aux
dispositions de nature conventionnelle. Cela veut ainsi dire qu’au sein des normes de référence du juge administratif,
la Constitution prime les normes internationales. De plus, dans un arrêt en date du 3 décembre 2001 – Syndicat national
de l’industrie pharmaceutique – le Conseil d’Etat va alors affirmer que le principe de primauté du droit communautaire
ne saurait conduire à remettre en cause dans l’ordre interne la suprématie de la Constitution. Enfin, l’arrêt du Conseil
d’Etat du 3 juillet 1996 – Koné – s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence administrative antérieure puisque ce
dernier va nettement affirmer la suprématie de la Constitution sur les traités internationaux. En effet, dans l’arrêt, le
Conseil d’Etat affirme que les « stipulations doivent être interprétées conformément au principe fondamental reconnu par les lois de la
République ». Cela revient ainsi à dire que puisque les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République
sont mentionnés dans le Préambule de la Constitution de 1946 auquel renvoie celui de 1958, les stipulations de la
norme internationale, à savoir en l’espèce celles de l’article 44 de l’accord de coopération franco-malien, doivent être
conformes à la Constitution. Ainsi, les stipulations relatives à l’extradition d’une personne demandé par un Etat parti
à l’accord en cause, doivent être interprétées conformément au principe constitutionnel, qui est celui qui prohibe les
extraditions demandées dans un but politique.

• CE, 11 décembre 2019, Commune de Locronan

Question 1 : le Conseil d’Etat contrôle-t-il la constitutionnalité de l’article 222 de la loi du 23 novembre 2008 ?

En l’espèce, le Conseil d’Etat contrôle la constitutionnalité de l’article 222 de la loi du 23 novembre 2008. En effet,
devant le Conseil d’Etat, une question prioritaire de constitutionnalité est posée par la Commune de Locronan suite
au retrait par le maire de la commune de l’arrêté de non-opposition à la déclaration préalable de travaux délivrée à la
société Orange sur les installations de téléphonie mobile.

Pour pouvoir poser une question prioritaire de constitutionnalité, il faut que trois conditions soit remplies. En effet, il
faut que la « disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure », « qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution
» et que « la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ». Il revient donc à la juridiction administrative et notamment
au Conseil d’Etat d’examiner si les conditions de recevabilité d’une question sont remplies. En effet, le Conseil d’Etat
va notamment apprécier si le caractère sérieux de la question est rempli et si ce dernier décide que ce critère n’est pas
rempli, alors il ne transmet pas la question au Conseil Constitutionnel – juridiction qui a la compétence pour trancher
ce type de question. Si le Conseil d’Etat refuse de transmettre la question, alors le Conseil d’Etat affirme indirectement
que la loi est conforme à la Constitution. Ainsi, par le biais de ce mécanisme, même si le Conseil d’Etat n’a pas la
compétence pour contrôler la constitutionnalité d’une loi, il a acquis un minimum de pouvoir sur le contrôle opéré par
le Conseil Constitutionnel ce qui l’autorise ainsi à en contrôler la constitutionnalité quand il en ai saisi. En effet, c’est
ce que le Conseil d’Etat va faire dans l’affaire en cause puisqu’il décide « qu’il n’y a pas lieu, par suite, de renvoyer au Conseil
Constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ». Ainsi, après avoir examiné les conditions de recevabilité
d’une QPC, le Conseil d’Etat en a conclu que « la question de conformité des dispositions aux droits et libertés garantis par la
Constitution, qui n’est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ». Il en a donc conclu que le caractère sérieux de la QPC
posée par la commune de Locronan selon laquelle les dispositions portent atteinte au principe d’égalité devant la loi
n’était pas réuni.

Question 2 : le principe de légalité des actes administratifs peut-il être invoqué au soutien d’une question prioritaire de
constitutionnalité ?
D’abord, une question prioritaire de constitutionnalité peut se définir comme le « droit reconnu à toute personne qui est partie
à un procès ou une instance de soutenir qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit » -
définition donnée par le Conseil Constitutionnel. De plus, lorsque l’on parle du « principe de légalité des actes
administratifs », cela exprime le fait que l’administration doit respecter les règles en vigueur. Autrement dit, les actes
pris par les autorités administratives doivent être conformes aux normes hiérarchiquement supérieures. Ainsi, dire que
le principe de légalité des actes administratifs peut être invoqué au soutien d’une QPC est contradictoire. En effet, le
premier principe porte sur la conformité d’un acte par rapport à un autre tandis que le deuxième porte sur le non-
respect d’un droit contenu dans un acte déjà édicté. Autrement dit, cela reviendrai à dire qu’il y a eu une atteinte à un
droit parce que l’acte qui contenu ce droit ou cette liberté n’était pas conforme à la Constitution. En effet c’est ce que
va dire le Conseil d’Etat dans son arrêt puisqu’il va affirmer que « la seule invocation par la Commune de Locronan du
principe de légalité des actes administratifs ne permet pas de caractériser une atteinte à un droit ou à une liberté au sens
de l’article 61-1 de la Constitution ».

• CE, Assemblée, 12 juillet 2013, Fédération nationale pêche en France

Question 1 : la Charte de l’environnement fait-elle partie des sources de la légalité administrative ?

Dans un Etat de droit, il existe une hiérarchie des normes. Au sommet de cette dernière se trouve la norme suprême
qu’est la Constitution. Au sens large, on parle du bloc de constitutionnalité. En effet, celui-ci est composé de différents
textes constitutionnels ayant la même valeur que la Constitution. Parmi ces textes l’on retrouve notamment la Charte
de l’environnement de 2004 qui a été ajouté au préambule de la Constitution par la loi constitutionnelle du 1er mars
2005 à laquelle valeur constitutionnelle a été reconnue à la Charte.

Puisque parmi les sources de la légalité administrative, on retrouve la Constitution et puisque la Charte de
l’environnement fait partie du bloc de constitutionnalité, cette dernière fait donc partie des sources de la légalité
administrative. En effet, c’est ce que va reconnaître le Conseil d’Etat dans cet arrêt puisqu’il va affirmer que les «
dernières dispositions contenues à l’article 3 de la Charte de l’environnement comme l’ensemble des droits et devoirs définis dans la Charte,
et à l’instar de toutes celles qui procèdent du Préambule de la Constitution, ont valeur constitutionnelle ». Ainsi, puisque c’est une
norme constitutionnelle, elle doit s’imposer aussi bien au législateur qu’à l’administration ; affirmation posée par le
Conseil Constitutionnel dans une décision du 10 juin 1998 n°98-401DC – Réduction du temps de travail. Enfin, c’est
ce que va confirmer le Conseil d’Etat dans cet arrêt en énonçant « qu’elles s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités
administratives » et qu’ainsi, « il incombe au législateur de déterminer, dans le respect des principes énoncés à l’article 3 de la Charte de
l’environnement, les modalités de mise en œuvre des dispositions de cet article ».

Question 2 : le Conseil d’Etat a-t-il accepté de contrôler la constitutionnalité du décret attaqué ?

En droit administratif, il existe un principe selon lequel le juge administratif n’est pas compétent pour contrôler la
constitutionnalité d’un acte administratif dès lors qu’une loi s’intercale entre l’acte attaqué et la Constitution : c’est le
principe de la théorie de la loi-écran. Si un requérant sollicite le juge pour un contrôle de constitutionnalité d’un acte
et qu’une loi s’intercale entre les deux, le juge devra refuser de la contrôler puisque cela reviendrait nécessairement à
contrôler la constitutionnalité de la loi – compétence qui relève ainsi du Conseil Constitutionnel. En l’espèce, il s’agit
de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 qui précise qu’il « incombe au législateur de déterminer, dans le respect des principes
énoncés à l’article 3 de la Charte de l’environnement, les modalités de la mise en œuvre des dispositions de cet article ». Autrement dit, la
loi autorise le législateur à édicter un acte qui fixerait les modalités de mise en œuvre des dispositions. En l’espèce « le
pouvoir réglementaire s’est borné à mettre en œuvre les dispositions de l’article L.921-1 du Code rural et de la pêche maritime ». Le pouvoir
réglementaire a alors adopté un décret pour mettre en œuvre ses dispositions dont les articles 7 et 9 de ce dernier sont
contestés.

Le Conseil d’Etat va ainsi rappeler que « la conformité au principe énoncé par l’article 3 de la Charte de l’environnement ne peut pas
être contesté devant le juge administratif en dehors de la procédure prévue à l’article 61-1 de la Constitution » mais il va venir affirmer
successivement à ce principe « qu’il appartient à celui-ci de vérifier si les mesures prises pour l’application de la loi, n’ont pas elles-
mêmes méconnu ce principe ». Ainsi, le Conseil d’Etat explique que s’il est saisi pour contrôler la conformité de la loi, il ne
peut pas le faire en dehors de la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité puisque cela reviendrai à
contrôler la constitutionnalité de la loi – compétence dont il ne dispose pas – mais qu’il peut toutefois contrôler si les
mesures qui ont été prises sont conformes à ce qu’a énoncé la loi.

Ainsi, le Conseil d’Etat accepte de contrôler la constitutionnalité du décret attaqué puisqu’aucune loi ne fait écran à ce
que le décret attaqué soit examiné par le Conseil d’Etat. En effet, la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 dispose
expressément qu’il faut que ce soit le législateur qui édicte un acte pour la mise en œuvre des dispositions. C’est ce que
le législateur a donc fait et c’est ce que va affirmer le Conseil d‘Etat en énonçant que « les dispositions contestée du décret
attaqué participent de la mise en œuvre de l’article 3 de la Charte de l’environnement ». Le Conseil d’Etat déclare ainsi que « il ne
ressort pas des pièces du dossier qu’en adoptant les mesures contestées du décret attaqué, le pouvoir réglementaire aurai méconnu les exigences
qui découlent de l'article 3 de la Charte de l’environnement ».

• CE, Assemblée, 17 février 1950, Dame Lamotte

Question 1 : quel principe le Conseil d’Etat a-t-il dégagé dans cet arrêt ? A quelle catégorie de normes jurisprudentielles
se rattache-t-il ?

Dans son arrêt d’Assemblée du 17 février 1950, le Conseil d’Etat va dégager un nouveau principe général du droit qui
est celui du droit au recours en excès de pouvoir en l’absence de diapositives législatives expressément contraires. En
effet, le Conseil d’Etat par l’article 29 de la loi du 19 février 1942 permet à tout administré de pouvoir exercer un
recours quant à la régularité de la concession et que ce dernier « n’exclut pas le recours pour excès de pouvoir devant le Conseil
d’Etat contre l’acte de concession, recours qui est ouvert même sans texte contre tout acte administratif ». Le Conseil d’Etat a décidé de
dégager ce nouveau principe en réaction à l’article 4 alinéa 2 de la loi du 23 mai 1943 qui énonçait que « l’octroi de la
concession ne peut faire l’objet d’aucun recours administratif ou judiciaire ». Cela avait pour but de contourner la loi et ainsi
permettre à un administré de former un recours devant le Conseil d’Etat indépendamment qu’il soit administratif ou
judiciaire.

Question 2 : le Conseil d’Etat a-t-il fait primer ce principe sur l’article 4 al.2 de l’acte dit loi du 23 mai 1943 ?

Selon l’article 4 alinéa 2 de l’acte dit loi du 23 mai 1943, « l’octroi de la concession ne peut faire l’objet d’aucun recours administratif
ou judiciaire ». Puisque le préfet de l’Ain a pris un arrêté par lequel il concède au tiers les terres de la dame Lamotte, cette
dernière a alors formé une réclamation devant le conseil de préfecture qui a alors annulé l’arrêté pris par le préfet de
l’Ain. Si l’on s’en tient à la loi du 23 mai 1943, aucun recours n’était possible pour la dame Lamotte devant le juge
administratif. C’est ainsi que le « ministre soutient que le conseil de préfecture aurait dû rejeter cette réclamation comme non-recevable
en vertu de l’article 4 de la loi du 23 mai 1943 ». Il réclame donc l’annulation de cet arrêté en soutenant que le recours n’était
pas possible au moment où la dame Lamotte a déposé le sien.
Toutefois, le Conseil d’Etat va consacrer un principe général du droit selon lequel tout acte peut faire l’objet d’un
recours pour excès de pouvoir « même sans texte contre tout acte administratif ». Il va justifier ce nouveau principe
par le fait que la loi du 23 mai 1943 « n’exclut pas le recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat contre
l’acte de concession ».

Ainsi, le Conseil d’Etat dans son arrêt, va faire primer le principe de droit au recours pour excès de pouvoir puisqu’il
va dans un premier temps considérer que « le ministre de l’Agriculture est fondé à demander l’annulation de l’arrêté »
puis dans un second temps considérer que le recours formé par la dame Lamotte concernant l’annulation de l’arrêté
pris par le préfet de l’Ain est « entaché de détournement de pouvoir ».

• CE, 11 mai 2016, Football Club de Nantes

Question 1 : le Conseil d’Etat accepte-t-il de contrôler la constitutionnalité de la sanction disciplinaire infligée à M.A ?
Le Conseil d’Etat refuse de contrôler la constitutionnalité de la sanction disciplinaire infligée à M.A. En effet, il refuse
de le faire car il sait qu’il se heurterait à un excès de pouvoir du fait que cette compétence appartient au Conseil
Constitutionnel. Dès lors qu’une loi vient faire écran à ce que le juge contrôle la constitutionnalité d’un acte
administratif, le contrôle de constitutionnalité ne peut être effectué que par le Conseil Constitutionnel. En l’espèce, il
s’agit d’u côté d’un règlement disciplinaire et de l’autre des lois du jeu. Autrement dit, le Conseil d’Etat a le pouvoir de
contrôler la constitutionnalité du règlement disciplinaire conformément à la Constitution mais ne peut pas contrôler la
constitutionnalité des lois du jeu. M.A souhaite contester la légalité de la sanction devant le Conseil d’Etat car il
considère que celle-ci n’est pas, selon lui, conforme à la Constitution, or l’acte qui énonce la sanction sont les lois du
jeu. En effet, celles-ci prévoient que « le joueur ayant reçu trois avertissements à l’occasion de trois matchs différents dans une période
inférieure ou égale à trois mois est sanctionné d’un match ferme de suspension après enregistrement par la Commission de discipline ». Ainsi,
le Conseil d’Etat se borne seulement à se prononcer sur le principe de personnalité des peines et sur le caractère
automatique de celles-ci – principe résultant de l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789
et non à opérer un contrôle de constitutionnalité de la sanction infligée au plaignant.

Question 2 : cette sanction constitue-t-elle une sanction automatique contraire à l’article 8 de la Déclaration des droits
de l’homme et du citoyen ?

En l’espèce, la sanction ne constitue pas une sanction automatique contraire à l’article 8 de la Déclaration des droits de
l’homme et du citoyen. En effet, Monsieur A a été sanctionné d’un match de suspension après trois avertissements sur
la base d’un barème des sanctions de référence pour comportement antisportif. Ce dernier « énonce des sanctions de
référence ». Ainsi l’on peut considérer ce mode de sanction comme une sanction automatique, contraire à l’article 8 de
la DDHC de 1789. Toutefois, le principe d’individualisation des peines s’applique dès lors que « la sanction administrative
ayant le caractère d’une punition ne peut être appliquée que si l’autorité compétence la prononce en tenant compte des circonstances propres à
chaque espèce ». Même si le barème prévoit au départ des sanctions de référence, « l’instance disciplinaire tient compte de
circonstances atténuantes et le cas échéant, diminue ou augmente les sanctions de référence ». Ainsi, la Cour administrative d’appel de
Nantes a elle-même considéré que la sanction infligée à Monsieur A n’était pas automatique et qu’elle respectait bien
le principe d’individualisation des peines puisque l’arbitre de la rencontre a sanctionné ce dernier « en fonction de la
nature du comportement antisportif » de Monsieur A. Enfin, la Commission fédérale de discipline de première instance
ainsi que la Commission supérieure d’appel se sont prononcées « après avoir entendu les observations du joueur et du club et
après avoir pris en compte les circonstances particulières de l’espèce ».

• CE, assemblée, 16 décembre 2020, Fédération CFDT Finances

Question 1 : une ordonnance de l’article 38 de la Constitution constitue-t-elle un acte susceptible de recours devant le
Conseil d’Etat ?

L’article 38 de la Constitution dispose que « le Gouvernement peut, demander au Parlement l’autorisation de prendre par
ordonnances, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ». Une loi d’habilitation va fixer le délai dans lequel les
ordonnances pourront être modifiées par le Gouvernement. L’ordonnance de l’article 38 de la Constitution a une
double valeur, en effet, elle peut avoir une valeur réglementaire et avoir aussi une valeur législative. Ainsi, on peut donc
dire que « les ordonnances prises en vertu de l’article 38 de la Constitution conservent le caractère d’actes administratifs, aussi longtemps
qu’elles n’ont pas fait l’objet d’une ratification par le Parlement ». Autrement dit, tant qu’elles n’ont pas été ratifiées, elles ont
une valeur réglementaire. De plus, même si le délai d’habilitation est expiré, la juridiction administrative qui est saisie,
par voie d’action, d’un recours pour excès de pouvoir, peut annuler cette ordonnance. Toutefois, cela est possible à
deux conditions : d’une part que cela ne porte pas sur « la méconnaissance des droits et libertés garantis par la
Constitution ou les engagements internationaux de la France » et « que l’intérêt d’une bonne administration de la justice
» le justifie. Enfin, le recours pour excès de pouvoir qui tend à l’annulation de l’acte en cause devient sans objet si la
ratification par le Parlement a eu lieu.

Question 2 : le Conseil d’Etat peut-il contrôler la constitutionnalité d’une telle ordonnance ?

D’une part, le Conseil d’Etat peut contrôler la constitutionnalité d’une telle ordonnance. En effet, dès lors qu’elle n’a
pas été ratifiée, celle-ci a valeur réglementaire et cela relève de sa compétence. Toutefois, les ordonnances qui relèvent
du domaine législatif et dès lors que le délai d’habilitation est expiré, doivent être contestées sur le fondement de l’article
61-1 de la Constitution qui prévoit la question prioritaire de constitutionnalité. La conformité de ces ordonnances aux
droits et libertés que la Constitution garantit sont soumis au même principe. Il y a cependant une condition : en effet,
il faut que les trois conditions auxquelles la question prioritaire de constitutionnalité est soumis soient remplies. L’arrêt
précise également « qu’à défaut de précisions quand à la source du principe invoqué, il appartient au juge d’opérer son
contrôle au regard de la norme de référence la plus conforme à l’argumentation dont il est saisi et à la forme de sa
présentation ». Ainsi, dès lors que le juge ne dispose pas de précisions sur la norme de référence sur laquelle s’appuie
la question posée par le requérant, ce dernier doit alors user de son pouvoir d’appréciation souverain pour déterminer
laquelle devra être retenue pour opérer son contrôle. Enfin, le juge peut opérer un contrôle de constitutionnalité si les
ordonnances de l’article 38 de la Constitution ne respecte pas « les règles de compétence, de forme et de procédure qui
leur sont applicables » ainsi que « les règles et principes de valeur constitutionnelle et les engagements internationaux
de la France ».

CAS PRATIQUE

Le 20 juillet 2020, une loi d’habilitation a été adoptée autorisant ainsi le gouvernement à édicter une ordonnance dans
le but de contrôler la commercialisation de nouveaux produits cosmétiques et thérapeutiques. Suite à cette loi
d’habilitation, une ordonnance édictée par le gouvernement est adoptée en Conseil des ministres puis signée par le
président de la République le 14 décembre 2021. Cette ordonnance vient alors modifier l’article L513-10-5 du Code de
la santé publique pour ainsi interdire la vente de ce produit. Cette décision fait suite à la dangerosité du produit et à sa
composition jugée néfaste par les membres du gouvernement.

Suite à l’ordonnance prise par le gouvernement concernant l’interdiction de vente de ces produits, le ministre de la
santé décide à son tour d’adopter un arrêté ministériel interdisant lui aussi la vente de ces derniers. Ainsi, les
représentants de la marque décide d’attaquer dans un premier temps l’ordonnance édictée par le gouvernement le 12
janvier 2022.

Ainsi, il convient de se poser la question suivante : devant quelle juridiction, les requérants pourront attaquer l’ordonnance adoptée par le
Gouvernement le 14 décembre 2021 ?

Selon la Constitution et notamment l’article 34 de celle-ci, seul le pouvoir législatif peut intervenir dans le domaine de
la loi pour édicter des actes qui relèvent de ses compétences. Toutefois, la Constitution permet au Gouvernement dans
un domaine qui ne relève pas de sa compétence. En effet, c’est ce que prévoit l’article 38 de la Constitution qui dispose
que « le Gouvernement peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances,
pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ». En effet, ce sont des lois d’habilitation qui
autorise le Gouvernement, pendant un temps limité, à édicter des ordonnances sur une question précise. Toutefois, il
convient de préciser que cette habilitation doit faire l’objet d’une procédure spécifique. En effet, c’est ce que prévoit
l’alinéa 2 de l’article 38 de la Constitution qui dispose que « les ordonnances sont prises en conseil des ministres après avis du
Conseil d'État ». Cependant, ce même alinéa précise que « elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si
le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement ». C’est ce que vient rappeler le Conseil d’Etat dans un arrêt
du 16 décembre 2020 – Fédération CFDT Finances.

De plus, dans ce même arrêt, le Conseil d’Etat nous rappelle que deux juridictions sont compétentes dès lors qu’une
ordonnance n’a pas été ratifiée. En effet, la compétence pour connaître de la contestation d’une ordonnance varie en
fonction du délai fixé par la loi d’habilitation du Parlement. Deux cas de figure se présente devant le juge :

➢ Si le délai d’habilitation n’a pas encore expiré, alors la juridiction compétente sera le Conseil d’Etat
➢ Si le délai d’habilitation est échu, alors la juridiction compétence sera le Conseil Constitutionnel qui pourra
être saisi par le biais d’une question prioritaire de constitutionnalité

De plus, dès lors que l’acte n’a pas été ratifié par le Parlement, il n’a que valeur réglementaire. Puisque c’est un acte
réglementaire, cela veut dire qu’il sera susceptible de faire l’objet d’un recours devant la juridiction administrative
notamment devant le Conseil d’Etat. Mais la question qui se pose est de savoir de quel type de recours parle-t-on ? En
effet, en droit français, il existe différents types de recours possible. En l’espèce, il s’agirait de s’intéresser au recours
pour excès de pouvoir. Ce type de recours peut être formé devant la juridiction administrative par voie d’action qui
consiste donc à demander l’annulation ou la réformation d’un acte administratif unilatéral ou d’un contrat.

Toutefois, il ne suffit pas qu’il existe un droit au recours pour excès de pouvoir pour pouvoir en bénéficier, encore
faut-il remplir les conditions de recevabilité de ce dernier. En effet, pour qu’un recours soit recevable, il est nécessaire
que le requérant remplisse trois conditions : d’abord, la capacité et l’intérêt à agir, qu’il démontre la nature
administrative de l’acte et qu’il respecte le délai imparti pour former un recours.

I- Les conditions de recevabilité d’un recours pour excès de pouvoir

A) La capacité et l’intérêt à agir


S’agissant de la capacité d’agir, dès lors que le requérant décide de former un pourvoi en cassation, il est nécessaire que
celui-ci dispose de la personnalité juridique qui lui permette d’ester en justice. Cette capacité à agir est notamment régie
par les règles du Code civil.

S’agissant de l’intérêt à agir, elle existe dans tous les contentieux et il existe même un adage qui celui de « pas d’intérêt,
pas d’action ». Ainsi, il peut s’agir d’un intérêt qui est attaché directement à la personne du requérant notamment une
atteinte portée à la situation matérielle : cela peut être une atteinte à une situation financière ou une décision remettant
en cause des ressources ou une atteinte morale. De plus, il est nécessaire que le requérant prouve que l’intérêt est
légitime et directement lésé par la décision attaquée : c’est ce qui résulte ainsi d’un arrêt du Conseil d’Etat du 13
décembre 2006 – Commune d’Issy les Moulineaux. De plus, dans un arrêt du 27 février 1985 – SA Grands Travaux et
Constructions immobilières – le Conseil d’Etat précise que le juge doit interpréter de façon large le caractère certain
de l’intérêt lésé. Mais l’intérêt invoqué ne donne pas qualité à agir dès lors qu’il est trop général selon un arrêt du
Conseil d’Etat du 23 novembre 1988 – Dumont.

L’intérêt pour lequel on agit doit répondre de certains critères : il doit être certain, légitime, réel, personnel et direct.
Mais qu’entend-on par cela ?
- Le caractère certain de l’intérêt : il faut donc que l’intérêt soit né et actuel et non purement éventuel au
moment du dépôt du recours pour excès de pouvoir étant précisé que ce critère est apprécié par le juge de
façon souveraine

- Le caractère légitime de l’intérêt : en effet, le recours ne sera pas accepté dès lors que le requérant défend une
situation acquise de façon illégale ou en contournant les règles juridiques en vigueur. Il faut donc que le
requérant défende une situation qui soit conforme à l’ordre public comme le prévoit l’article 6 du Code civil
qui dispose que « on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes
mœurs ».

- Le caractère réel de l’intérêt : il faut que le requérant démontre que la décision qu’il attaque a eu des
conséquences dommageables pour lui.

- Le caractère personnel et direct de l’intérêt : un recours pour excès de pouvoir doit être formé par la personne
qui est directement impactée par la décision attaquée c’est-à-dire la personne a qui l’acte réglementaire pourrait
être appliqué.

Enfin, il faut préciser que l’intérêt à agir d’un requérant s’apprécie au regard de l’objet des dispositions qu’il attaque et
non du contenu de ces dispositions : c’est ce que va affirmer le Conseil d’Etat dans un arrêt du 30 juillet 2014 – La
Cimade.

B) La nature de l’acte

Le recours pour excès de pouvoir doit être formé contre un acte administratif. Ainsi, cela veut dire qu’il n’est pas
possible de former un recours contre des actes émanant d’autorités législatives. Toutefois, en droit administratif, il
n’était pas possible de former un recours pour excès de pouvoir avant que le Conseil d’Etat en dégage un principe
général de droit à proprement parlé dans un célèbre arrêt rendu par le Conseil d’Etat en assemblé le 17 février 1950 –
arrêt Dame Lamotte. En effet, dans cet arrêt, le Conseil d’Etat dégagé un nouveau principe général de droit tel que le
« droit au recours pour excès de pouvoir en l’absence de diapositives législatives expressément contraires ». Dans cet arrêt, le Conseil
d’Etat va avoir dire qu’il est possible de faire un recours même en l’absence de texte contre tout acte administratif.

C) Le délai pour agir

En droit français, il existe un délai durant lequel une partie qui souhaite former un recours pour excès de pouvoir
devant le juge administratif peut le faire. En effet, c’est ce que prévoit l’article R.421-1 du Code de la justice
administrative selon lequel « la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois
à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ». Cette existence de délai est imposée dans un but de
respecter la sécurité des relations juridiques.

II- Les conditions de recevabilité d’une question prioritaire de constitutionalité

La question prioritaire de constitutionnalité est évoquée par l’article 61-1 de la Constitution qui énonce que « lorsque,
à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte
aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi
du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». De plus, il faut que trois
conditions soient réunies et ces dernières se trouvent énoncées à l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958.
Ce dernier dispose que « la juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de
constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies :

- 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites
- 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel,
sauf changement des circonstances

- 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux

En l’espèce, le 20 juillet 2021, une loi d’habilitation a ainsi autorisé le gouvernement à prendre une ordonnance qui lui
permettait de contrôler la production et la mise sur le marché de nouvelles substances cosmétiques. Pour ainsi pouvoir
le faire, il a fallu que le gouvernement adopte une ordonnance en Conseil des ministres puis signée le 14 décembre
2021 par le président de la République. Toutefois, si l’on suit la procédure telle qu’énoncée par l’article 38 de la
Constitution, pour qu’une ordonnance acquière valeur législative, il faut qu’une loi d’habilitation autorise le
gouvernement à prendre des ordonnances dans des domaines qui relèvent en principe de la loi. Ensuite, il faut que le
Conseil d’Etat donne son avis après que l’ordonnance ait été prise en Conseil des ministres. En l’espèce, certes
l’ordonnance a été adoptée en Conseil de ministres mais le Conseil d’Etat n’a jamais rendu d’avis s’agissant de cette
dernière. Il n’y a eu que la signature du président de la République le 14 décembre 2021 après l’adoption en Conseil de
ministres conformément aux pouvoirs qui lui sont conférés par la Constitution. Enfin, si on s’intéresse à la fin de la
procédure, il est nécessaire que l’ordonnance soit déposée devant le Parlement pour qu’elle entre en vigueur sinon elle
devient caduque. En effet, en l’espèce, il n’y a pas eu de dépôt devant le Parlement pour ainsi attester de la véracité de
l’ordonnance. C’est ainsi que l’on peut dire que l’ordonnance qui a été édictée par le gouvernement le 14 décembre
2021 n’a pas acquis valeur législative et n’est resté qu’au stade d’un acte administratif. Enfin, le délai fixé par la loi
d’habilitation rendant caduque l’ordonnance n’est nullement mentionné.

Puisque c’est un acte administratif, il est possible pour les requérants d’attaquer l’acte par un recours pour excès de
pouvoir. Ainsi, les personnes qui décident d’attaquer l’ordonnance prise par le gouvernement sont des personnes
physiques puisqu’il s’agit des représentants de la marque Ghennom Beauty et ainsi se trouvent dotés de la personnalité
juridique ce qui leur permet d’ester en justice. Ils décident d’attaquer l’ordonnance puisque cette dernière interdit la
vente des produits de la marque en raison d’une molécule de Bloroquine qui serait, selon des études, plus ou moins
néfaste pour la santé et l’environnement – ordonnance qui serait édictée en application du principe de précaution.

Les requérants décident de déposer un recours pour excès de pouvoir puisque le fait d’interdire la vente de leur produits
leur fait perdre un chiffre d’affaire considérable puisque la vente de ces produits étaient très rentables. Il est ainsi
légitime de penser que dès lors que leur produits ne se vendent plus, les représentants de la marque disposent d’un
manque à gagner considérable à la fin du mois ce qui aura des conséquences énormes sur leur commerce. En effet, on
peut en déduire que les bénéficies que percevait cette entreprise servaient peut-être à payer des crédits ainsi contractés
pour payer les fournisseurs – fournisseurs qui approvisionnés leur production. Ces produits étaient peut-être l’un des
produits phares de leur marque ce qui entretenait leur réputation auprès des autres marques. De plus, les bénéfices
obtenus permettaient à la marque d’augmenter les salaires des employés ou d’embaucher d’avantage de personnel ou
encore d’étendre leur raison de distribution en France ou à l’étranger. Enfin, les représentants de la marque décident
d’attaquer l’ordonnance le 12 janvier 2022 soit un peu plus d’un mois après la signature de l’ordonnance le 14 décembre
2021 par le président de la République.

Ainsi, au regard des faits qui sont exposés, la juridiction qui sera compétente pour connaître du litige dépendra si le
délai d’habilitation fixé par la loi d’habilitation sera échu ou non. Si ce n’est pas le cas, les requérants pourront former
un recours pour excès de pouvoir et le Conseil d’Etat sera ainsi la juridiction compétente puisque l’ordonnance attaquée
n’a pas acquis valeur législative et n’est resté qu’au stade d’un acte réglementaire dont la légalité peut être contestée
devant le juge administratif. Au contraire, si le délai est échu, alors les requérants devront soulever une question
prioritaire de constitutionnalité devant le Conseil Constitutionnel.

Question 2

L’arrêté ministériel prévoyant la saisie et la destruction des produits néfastes, les représentants de la marque décident
de saisir le juge administratif pour méconnaissance de la liberté de commerce et d’industrie et du droit de propriété.

Ainsi, au regard des faits, il convient de se demander si les représentants de la marque Ghennom Beauty peuvent invoquer la méconnaissance
non seulement de la liberté de commerce et de l’industrie mais aussi du droit de propriété pour contester l’arrêté ministériel.
Le principe de la liberté du commerce et de l’industrie a été institué par l’article 7 de la loi des 2 et 17 mars 1791 dite «
décret d’Allarde ». Il a ensuite été réaffirmé et confirmé dans plusieurs lois telles que la loi des 14 et 17 juin 1971 dite
« le Chapelier » supprimant les corporations d’une part et par la loi du 27 décembre 1973 dite « loi Royer » qui dispose
que « la liberté et la volonté d’entreprendre sont les fondements des activités commerciales et artisanales » d’autre parte.

Ainsi, il s’agit d’un principe fondamental de notre droit puisqu’il s’agit d’une liberté publique au sens de l’article 34 de
la Constitution. Dans une décision du 16 janvier 1982, le Conseil Constitutionnel reconnaît la valeur constitutionnelle
de ce principe en y ajoutant qu’il s’agit d’une « règle à valeur constitutionnelle, précisément l’un des attributs de la
liberté reconnue à tout homme par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ».

Il est nécessaire de préciser que lorsque l’on parle de liberté de commerce et de l’industrie, il faut toutefois comprendre
que cela se décompose en réalité en trois libertés publiques. Il s’agit de :

1. La liberté d’entreprendre : il s’agit du droit reconnu à toute personne de se livrer à l’activité commerciale
de son choix tel que l’énonce le décret d’Allarde.

Cette liberté est ainsi qualifiée par l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 comme
étant « la liberté qui consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ».

2. La liberté d’exploiter : il s’agit de la liberté qui confère à un entrepreneur le droit de gérer ses affaires comme
il l’entend (choisir ses fournisseurs, ses clients, choisir telle ou telle méthode de distribution, d’exporter ou
non)

3. La liberté de la concurrence : il s’agit de la liberté selon laquelle tout entrepreneur a le droit d’utiliser tous
les moyens loyaux pour attirer à lui la clientèle

S’agissant du droit de propriété, le Conseil Constitutionnel a reconnu le 16 janvier 1982 le caractère éminent du droit
de propriété sur le fondement de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui dispose
que « le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté,
la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression ». Il va donc affirmer la pleine valeur constitutionnelle du droit de propriété.
Ainsi, dès lors qu’il n’y a qu’une atteinte à ce droit de propriété et non une privation de ce dernier, il n’est pas possible
d’en exiger son respect. La première décision du Conseil constitutionnel relative à la protection du droit de propriété
est intervenue le 5 janvier 1982 - Loi d’orientation sociale et la plus récente est intervenue le 7 janvier 1988 -
Mutualisation de la Caisse nationale de crédit agricole.

Dans plusieurs décisions consécutives, le Conseil d’Etat consacre le principe de liberté du commerce et de l’industrie
comme un principe général de droit applicable même en l’absence de texte. Cela a été le cas dans un arrêt pris en
assemblée par le Conseil d’Etat le 22 juin 1951 – Daudignac et dans un arrêt du Conseil d’Etat pris en assemblée le 13
mai 1983 – Société René Moline. De plus, dans l’arrêt Daudignac, le Conseil d’Etat rappelle aux autorités
administratives que toute restriction à la liberté de commerce et de l’industrie devait être justifiée par un caractère
sérieux et impératif. De plus, le Conseil d’Etat a pu affirmer dans un arrêt du 28 octobre 1960 pris en section – Martial
de Laboulaye – que la liberté de commerce et de l’industrie figurait parmi les libertés publiques.

Il est important de rappeler que les principes généraux de droit ont une valeur supérieure à tous les actes administratifs
unilatéraux c’est-à-dire qu’ils ont une valeur supra-décrétale mais ont une valeur infra-législative puisqu’ils ne
s’imposent pas sur les lois que votent le Parlement. Par ailleurs, selon un arrêt du du 25 novembre 1994 – Ministère
d’Etat, Ministère de l’intérieur et de l’Aménagement du territoire : fermeture d’une boucherie-charcuterie – le Conseil
d’Etat affirme que la liberté de commerce et de l’industrie peut être limitée pour des raisons de santé publique.

Enfin, selon l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, « la propriété étant un droit inviolable
et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une
juste et préalable indemnité ». C’est ainsi que l’alinéa 2 de l’article 66 vient garantir le respect de ce droit de propriété
puisqu’il dispose que « l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues
par la loi ».

En l’espèce, un arrêté ministériel d’interdiction a été édicté dans le but de saisir et de détruire l’ensemble des produits
de la marque contenant de la Bloroquine. Les représentants de la marque sont des personnes physiques qui disposent
de droits et de libertés individuelles que l’administration ainsi que les autres citoyens doivent respecter. En effet, les
représentants de la marque exerce une activité commerciale telle que la commercialisation de produits cosmétiques et
thérapeutiques. Ces produits ont été conçus par la marque selon leurs exigences et leurs critères, en utilisant les
matériaux et les composants de leur choix.

De plus, l’arrêté adopté a pour but la destruction de l’ensemble des produits puisque ces derniers auraient non
seulement des effets sur l’environnement ce qui justifierait le caractère sérieux et impératif de l’interdiction. Le ministre
pourrait arguait que puisque la molécule peut avoir des effets sur la santé publique, il y a lieu de détruire l’ensemble des
produits. Cependant, ces deux motifs démontrent qu’il y a une nécessité publique à adopter cet arrêté. Enfin, aucune
contrepartie n’a été proposée aux représentants de la marque après avoir ordonné la destruction de leurs produits, qui,
il était nécessaire de le rappeler, étaient l’une de leur vente les plus rentables.

Ainsi, au regard des faits d’espèce, les représentants de la marque n’ont pas la possibilité de soulever la méconnaissance
de la liberté de commerce et de l’industrie mais aussi du droit de propriété puisque d’une part, un impératif de santé
publique a été démontré au travers d’études scientifique et d’autre part, la préservation de l’environnement rempli un
objectif de nécessité publique. Cependant, puisque le droit de propriété est une liberté individuelle, les représentants
de la marque devront saisir le juge judiciaire pour trancher cette question et non le juge administratif.

Question 3

Le préfet des Bouches du Rhône décide d’édicter un arrêté préfectoral autorisant à titre exceptionnel et non-
commercial l’usage de la molécule jugée néfaste. Ainsi, face à cet arrêté, une association de riverain décide de former
un recours pour excès de pouvoir en arguant la méconnaissance du principe de précaution énoncé par la Charte de
l’environnement.

Ainsi, au regard des faits, se pose la question de savoir si des associations peuvent former un recours pour excès de pouvoir contre cet arrêté
préfectoral au motif qu’il méconnaîtrait le principe de précaution présent dans la Charte de l’environnement.

En droit français, il existe des normes constitutionnelles qui contiennent des droits et libertés octroyés aux citoyens
notamment dans la Constitution où l’on retrouve des droits et libertés fondamentaux. Lorsque l’on parle de
Constitution, cela regroupe plusieurs textes constitutionnels notamment à travers ce que l’on appelle « le bloc de
constitutionnalité. Ce dernier contient en autre la Charte de l’environnement de 2004. Cette dernière a acquis valeur
constitutionnelle par la loi constitutionnelle du 1 er mars 2005. De plus, le Conseil Constitutionnel a admis sans
hésitation dès sa décision du 28 avril 2005 que la Charte de l’environnement avait le statut de disposition
constitutionnelle. Par ailleurs, par son arrêt Commune d’Annecy du 3 octobre 2008, le Conseil d’Etat a précisé que
tous les droits inscrits dans la Charte de l’environnement avait une valeur juridique contraignante. De plus, ce même
arrêt précise que puisque le bloc de constitutionnalité fait partie intégrante de la légalité administrative, dès lors qu’un
acte est adopté sur le fondement de cette source, le juge peut contrôler la légalité des actes administratifs ainsi adoptés.

Ainsi, parmi les principe que l’on retrouve dans la Charte, se trouve le principe de précaution introduit en droit français
à l’article L.110-1 du Code de l’environnement par la loi du 2 février 1995 – appelée « loi Barnier ». Cet article dispose
que « le principe de précaution, selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne
doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à
l'environnement à un coût économiquement acceptable ». Selon l’article 5 de la Charte de l’environnement, « lorsque la réalisation
d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement,
les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en oeuvre de
procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».

Par ailleurs, à la lecture de l’article 5 de la Charte de l’environnement, trois critères cumulatifs se dégage pour mettre
en œuvre le principe de précaution par les autorités publiques compétentes :

- Il faut qu’il y ait l’existence d’un risque de dommage pour l’environnement


- Il faut qu’il y ait une incertitude des connaissances scientifiques sur la réalité de ce risque
- Il faut que les atteintes soient potentiellement graves et irréversibles pour l’environnement

En effet, c’est ce va confirmer le Conseil d’Etat dans une décision du 12 avril 2013 (n°342409) puisque ce dernier va
dire que le principe de précaution a un camps large puisqu’il doit jouer tant en cas de risque de dommage grave et
irréversible pour l’environnement que de risque d’atteinte à l’environnement susceptible de nuire de manière grave à
la santé. Il faut ainsi préciser que les risques sanitaires indépendants de facteurs environnementaux ne sont pas visés
au sens de l’article 5 de la Charte.

(Peut-être dire que cela vient d’une proposition de loi et citer le nom) Si les trois conditions sont réunies, alors « il
appartiendrait alors aux autorités publiques compétentes, non pas de renoncer, par précaution, aux décisions ou projets
en cause, mais de mettre en œuvre des procédures d'évaluation des risques et d'adopter des mesures provisoires et
proportionnées pour empêcher que le risque se concrétise ». Cela veut ainsi dire qu’il est nécessaire que des procédures
d’évaluation des risques et des recherches scientifiques en amont de la décision soient réalisées.

Dès lors qu’une décision administrative a été adoptée et que cette dernière méconnait un principe à valeur
constitutionnelle, il n’est possible de la contester que par la voie de la question prioritaire de constitutionnalité et non
par la voie du recours pour excès de pouvoir car cela reviendrai à contrôler la conformité de l’acte adopté et non les
droits et libertés qui ont été méconnus. En effet, c’est ce que va dire le Conseil d’Etat dans un arrêt du 12 juillet 2013
– Fédération nationale pêche en France – où le Conseil d’Etat va rappeler que la conformité d’un principe énoncé par
un article de la Charte de l’environnement ne peut être contestée devant la juge administratif en dehors de la procédure
prévue à l’article 61-1 de la Constitution.

Cet article 61-1 de la Constitution dispose que « lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu
qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de
cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». C’est ce dernier qui
prévoit la possibilité de soulever une question prioritaire de constitutionnalité devant le juge administratif dès lors qu’il
y a eu atteinte aux droits et libertés que la Constitution. Enfin, l’article 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958
prévoit les conditions que doit remplies la question prioritaire de constitutionnalité pour qu’elle soit examinée par le
Conseil Constitutionnel. Ce dernier dispose que « La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de
la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions
suivantes sont remplies :

- 1°La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites

- 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel,
sauf changement des circonstances

- 3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux

En l’espèce, le principe de précaution est un principe qui se trouve dans la Charte de l’environnement – texte qui a
acquis valeur constitutionnelle. Ainsi, la méconnaissance de ce principe doit être contestée par la voie d’exception
c’est-à-dire par la voie de la question prioritaire de constitutionnalité et non par la voie d’un recours pour excès de
pouvoir.

Une ordonnance a d’abord été édictée car selon des études, la molécule de Bloroquine serait dangereuse et aurait des
effets néfastes aussi bien sur l’environnement que sur la santé. Toutefois, le préfet des Bouches-du-Rhône décide
d’édicter un arrêté autorisant à titre expérimental et non-commercial l’usage de cette molécule. Cependant, si
auparavant, une ordonnance avait été édictée s’agissant de l’interdiction de la commercialisation des produits puis un
arrêté prévoyant la destruction de l’ensemble des produits de la marque, c’est que cette molécule présentait des risques
importants et incontestables. L’adoption de cet arrêté n’a fait qu’aggraver la prise de risques d’autant que cela n’était
qu’à titre expérimental et non commercial ce qui démontre bien qu’il n’y avait pas d’enjeux pour le laboratoire à l’avenir.

Ainsi, l’on peut constater sue cela n’aurait que des effets négatifs puisque le laboratoire en utilisant cette molécule n’a
aucune connaissance de la réaction des produits entre eux ni sur le niveau de dangerosité que cela pourrait causer sur
l’environnement. De plus, si des études ont été réalisées au préalable et qu’il a fallu à la suite de ces dernières édicter
une ordonnance ainsi qu’un décret, c’est que cela témoignait des atteintes potentiellement graves et irréversibles que
pourrait engendrer l’utilisation de cette molécule.

Par ailleurs, même si cela n’a que pour but d’être utilisé pour des expériences et être non commercialisé, cela peut avoir
de graves conséquences pour les riverains et la population avoisinant le laboratoire. En effet, il peut arriver que la
molécule, lors de l’évacuation des produits ou substances liquides utilisées par le laboratoire, se retrouve dans l’eau que
consomme les riverains. Il est également possible que les chimistes du laboratoire décident finalement de
commercialiser des médicaments ou des produits contenant cette molécule au grand public sans le signaler aux
distributeurs au risque que les riverains contractent des maladies après en avoir achetés.

Enfin, il aurait été préférable que des recherches et des études scientifiques soient réalisées pour ainsi rechercher
davantage le caractère dangereux de cette molécule pour ainsi démontrer au préfet que même s’il autorisait l’utilisation
de la molécule à titre expérimental et non-commercial, cela aurait de graves conséquences pour les riverains. Le préfet
n’aurai pas du céder sous la contrainte du laboratoire HIU qui ne souhaitait que l’usage de cette molécule.
Ainsi, au regard des faits, face aux risques que fait prendre le préfet des Bouches-du-Rhône pour les riverains, il est
légitime que les associations de riverain soulève la méconnaissance du principe de précaution présent dans la Charte
de l’environnement par voie d’exception c’est-à-dire par la voie d’une question prioritaire de constitutionnalité puisqu’il
apparaît que le caractère sérieux de cette question est incontestable. Ainsi, puisque les conditions pour soulever une
question prioritaire de constitutionnalité sont réunies, le juge administratif pourra, dès lors, transmettre la question au
Conseil Constitutionnel pour trancher cette dernière.

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