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SPONDYLARTHRITE ANKYLOSANTE
Par le Professeur DIALLO Saïdou – Agrégé de Rhumatologie
Chef du service de rhumatologie CHU Le Dantec
Directeur du DES de rhumatologie UCAD
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GENERALITES
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Définition :
La spondylarthrite ankylosante (SPA), est un rhumatisme inflammatoire chronique qui atteint
tout l’appareil, en particulier le pelvis et le rachis (pelvispondylite rhumatismale : de Sèze,
1954) et d’évoluer volontiers vers l’ankylose (Bywaters, 1967). Chef de file des
spondylarthropathies (SpA), rhumatismes séronégatifs au facteur rhumatoïde et liés à l’Ag
HLA-B27.
Intérêt :
- Epidémiologique : second rhumatisme inflammatoire en Occident, rare en Afrique
noire, mais incidence en croissance en raison d’une meilleure connaissance.
- Diagnostique :
o Altération de la qualité de vie, liée notamment aux coxites
o Mortalité liée aux atteintes systémiques,
o Nécessité pour améliorer le pronostic, de la précocité diagnostique (apanage
des formes vues en Occident grâce au recours à l’IRM). Alors qu’en Afrique
noire, la majorité des formes rencontrées sont tardives : insuffisance du plateau
technique, inaccessibilité aux soins, retard à la consultation.
- Thérapeutique : amélioration du pronostic grâce aux traitements innovants : les anti-
TNF.
Rappels :
Pour une meilleure compréhension de la leçon, notamment des signes et les principes du
traitement, un rappel physiopathologique est nécessaire.
Deux facteurs semblent prépondérants dans la physiopathologie de la maladie :
- Le terrain génétique de susceptibilité, représenté par sa liaison à l’Ag HLA B27
dont le rôle est illustré par l’existence de modèles animaux transgénéniques au HLA-
B27. Cependant, il existe d’autres gènes autres que HLA-B27, non liés au CMH. C’est
une maladie polygénique.
- Un facteur déclenchant environnemental, notamment infectieux (mimétisme
moléculaire entre les antigènes bactériens et les antigènes exprimés du soi, exprimés
par le patient), évident au cours des arthrites réactionnelles (AR) dont l’évolution peut
se faire vers la SPA, non démontré, mais supposé (vraisemblable) pour les autres SpA.
Le processus inflammatoire qui en résulte, siège initialement dans l’enthèse (enthésite,
enthésopathie inflammatoire : zone d’insertion dans l’os des ligaments, tendons, aponévroses,
capsules). Le territoire enthésopathique, rend compte de la topographie des signes :
- Au plan locomoteur : IPD des orteils et mains, calcanéus, sacro-iliaque, rachis, paroi
antérieure du thorax.
- Au plan extra-articulaire : orifice de l’aorte (aortite et IAo). On en rapproche l’uvéite,
la MICI, le psoriasis.
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Figure 1. L’enthésite :
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Figure 3. Le disque intervertébral et le péri-rachis fibreux
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SIGNES
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On lui reconnaît une période de début, une période d’état et une évolution.
La période de début :
L’idéal est de faire le diagnostic à ce stade où le traitement a plus de chances d’être efficace.
Signes cliniques :
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La douleur est le maître-symptôme. Elle est remarquable par :
- son mode de début : insidieux, progressif rarement brutal,
- ses circonstances de survenue : en règle spontanées,
- son siège et topographie : lombaire ou lombo-sacrée (inaugurent la maladie dans
50-80%).
o sacro-iliaque : se traduisant par des douleurs fessières. Elles siègent à la partie
supéro-interne de la fesse ; initialement unilatérales, elles deviennent
volontiers bilatérales ou à bascule,
o rachidienne : se traduisant par des douleurs lombaires ou de la charnière doso-
lombaire (lombalgies basses, lombalgies hautes, dorsalgies basses),
- ses irradiations : descendantes à la manière d’une sciatique, à la face postérieure de la
cuisse, rarement au dessous du genou, sans s’accompagner de paresthésies (on parle
de sciatique atypique, tronquée, ce qui doit attirer l’attention),
- son caractère inflammatoire : elles ont une recrudescence nocturne, surtout dans la
seconde moitié de la nuit responsable de réveils nocturnes (RN) dont le nombre est un
élément de surveillance, le matin au réveil où elles s’estompent lorsque le malade se
lève, au dérouillage (DM) dont la durée supérieure à 30 minutes, est également un
élément de surveillance.
- son type : brûlure ou pesanteur,
- son intensité : variable.
Critères de la rachialgie inflammatoire
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pression antérieure sur les ailes iliaques, en décubitus latéral, une hanche
fléchie au maximum, l’autre étant portée en hyperextension.
Signes paracliniques :
2.1.1.2.1. Biologiques :
- Syndrome inflammatoire non spécifique avec accélération de la VS, augmentation
de la CRP, fibrinémie, anémie inflammatoire, hyperleucocytose et thrombocytose. Ce
syndrome inflammatoire peut être peu marqué, voire totalement absent dans 25% des
cas.
- Analyse du liquide articulaire (pas dans cette forme de TDD).
- Signes immunologiques :
o Augmentation polyclonale des globulines, notamment des gammaglobulines.
o Dépôt d’IgA cutanés en immunofluorescence.
o Absence de tout stigmate d’auto-immunité notamment facteur rhumatoïde
(concept initial de polyarthrite séronégative) et auto-anticorps antinucléaires.
o Présence de l’antigène HLA-B27 : dans 90% chez le sujet Caucasien,
moindre liaison chez le Noir Africain : 50% Noir Américain, 45% au Sénégal.
Son intérêt diagnostique est restreint, mais sa présence peut conforter une
suspicion clinique ou radiologique.
2.1.1.2.2. Radiologiques :
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o L’atteinte discovertébrale : elle se traduit par le syndesmophyte : trait fin
osseux vertical implanté sur le bord latéral ou antérieur du coin vertébral,
initialement visible à la charnière dorso-lombaire, sous forme de spicule, de
stalagmite, tend, lorsqu’il évolue, à s’épaissir et à rejoindre l’ébauche d’une
vertèbre contiguë pour constituer un pont intervébral.
La SPA est installée, avec une extension ascendante au rachis dorsal et cervical.
- Le stade dorsal :
Les douleurs sont dorsales, thoraciques inférieures ou thoraco-abdominales. Une cyphose ou
cypho-scoliose apparaît.
o L’ampliation thoracique est diminuée : elle est mesurée au 4ème espace
intercostal à l’aide d’un mètre à ruban. On note la différence entre l’inspiration
et l’expiration forcées : elle est pathologique en deçà de 5 cm.
- Le stade cervical :
Le cou est douloureux, enraidi avec attitue guindée (inflexion antérieure et parfois latérale du
rachis).
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o La distance occiput-mur : elle mesure la flèche de l’occiput au mur, le sujet
étant le dos plaqué au mur, les talons et les fesses étant plaqués contre ce plan.
o La distance menton-sternum ou oreille-acromion, menton-acromion.
- Signes biologiques :
- signes radiologiques :
o La sacro-iliite de stade 2 ou 3:
Ostéosclérose des berges iliaques et sacrées, érosions superficielles
avec pincement de l’interligne.
Ankylose complète de l’articulation.
La classification de Forestier en 4 stades est volontiers utilisée dans la littérature
Française :
Stade 0 : articulations sacro-iliaques d’aspect normal,
Stade 1 : sacro-iliite débutante : flou des berges, pseudo-élargissement
de l’interligne, ostéosclérose débutante, érosions minimes,
Stade 2 : sacro-iliite confirmée : érosions et ostéoclérose marquées,
Stade 3 : ankylose : fusion plus ou moins complète de l’interligne.
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Les ossifications ligamentaires :
Ligament inter-épineux et ligaments jaunes, réalise une image
en « rail de tranmway ».
- La scintigraphie corps entier aux bisphosphonates marqués au technétium 99, bien
que non spécifique, peut contribuer au diagnostic précoce en révélant des foyers
d’hyperfixation au siège d’enthésopathies et/ou d’arthrites périphériques (absentes ou
latentes dans cette forme prise comme TDD).
- La tomodensitométrie ou scanner permet une meilleure analyse en montrant les
mêmes images que la radiographie standard mais l’image est plus précise :
déminéralisation des berges, pincement de l’interligne, sclérose sous-chondrale,
érosions, ankylose.
2.1.3. Evolution :
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o Causes de décès sont représentées par : l’amylose, complications
cardiovasculaires, les complications rachidiennes, digestives et rénales.
Formes cliniques :
Formes symptomatiques :
o Périphériques :
rhizoméliques (hanches, épaules) :
La coxite est remarquable par sa gravité. Parfois inaugurale et
bilatérale, sa précocité l’oppose à celle de la PR. Elle se traduit
par des douleurs inguinales associées à une limitation des
rotations qui peut précéder la constitution d’un flessum source
d’impotence fonctionnelle.
L’atteinte de l’épaule : elle se traduit par une épaule
douloureuse simple, ou gelée, une arthrite gléno-humérale, une
bursite ou atteinte acromio-claviculaire.
Non rhizomélique :
Oligo-arthrite asymétrique des membres inférieurs avec atteinte
par croissance dégressive des genoux, chevilles et MTP parfois
associée à un gonflement de l’orteil réalisant le classique
« aspect en saucisse ». L’atteinte des poignets, MCP et IPP est
en règle rare.
Une polyarthrite est possible ainsi qu’une mono-arthrite
notamment du genou. L’analyse du liquide est de type
inflammatoire.
L’arthrite temporo-maxillaire est rare ; celle de la symphyse
pubienne est asymptomatique ou se traduit par des pubalgies.
- Formes systémiques :
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Elles surviennent volontiers au cours de SPA évoluées. D’autres sont plutôt précoces. La
majorité d’entre elles, évoluent indépendamment des poussées pelvirachidiennes ou
périphériques.
o Signes généraux.
o Atteinte oculaire : uvéite antérieure non granulomateuse, typiquement
unilatérale, de début aigu, révélée par photophobie , un œil rouge douloureux
et larmoyant. Parfois, asymptomatique découverte au stade séquellaire
(synéchies, hypopion, glaucome) sources de baisse de l’acuité visuelle voire
cécité.
C’est une urgence diagnostique et thérapeutique : corticothérapie locale et/ou générale
associée à une dilatation de la pupille.
o Atteinte cardiaque :
Valvulopathies :
L’IAo de découverte fortuite ou lors de complications
mécaniques, thrombo-emboliques, oslériennes.
L’atteinte mitrale et tricuspidienne : rare.
Myocardiopathies : Troubles de la conduction ou du rythme;
Péricardites.
o Atteinte pulmonaire :
Rigidité thoracique que traduit la diminution de l’ampliation
thoracique, avec syndrome restrictif à l’EFR.
Atteinte pleuro-pulmonaire : pneumopathie interstitielle de découverte
fortuite ou à l’origine de dyspnée. La radiographie montre des opacités
linéaires ou étoilées, confluentes formant des cavités surtout apicales
qui font discuter une tuberculose et peuvent se compliquer de greffe
aspergillaire.
o Atteinte rénale :
Amylose AA, latente ou symptomatique, allant de la protéinurie au
syndrome néphrotique.
Glomérulonéphrites endo ou extracapillaires ou extramembranaires.
o Atteinte neurologique :
Compressions médullaires (luxations atloïdpo-axoïdiennes, fractures
rachidiennes, épidurite)
Syndrome de la queue de cheval se traduisant par des paresthésies
lombo-sacrées, des troubles génito-urinaires.
La compression est objectivée par la myélographie ou mieux par le scanner que l’IRM a
supplanté.
o Ostéoporose.
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- Sujet âgé : elle est volontiers oedémateuse ou rhizomélique, pseudo-algodystrophique
ou pseudo-PPR.
Formes secondaires : La SPA peut être secondaire à certaines formes étiologiques des SpA,
dont elle partage des liens pathogéniques, en particulier les AR, le psoriasis et les
entérocolopathies inflammatoires. Dans ce cadre, la SPA peut être inaugurale, concomitante
ou évolutive de l’affection associée.
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Atteinte axiale très voisine de la SPA avec une atteinte cervicale est
plus fréquente dans cette forme psoriasique que dans SPA primitive.
HLA-B27 est retrouvé dans 20% des cas.
- Associations supposées fortuites: SAPHO, Behçet, maladie de Whipple.
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DIAGNOSTIC
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Critères d’Amor
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Critères du Groupe d’Etude Européen des Spondylarthropathies
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Critères ASAS (Assessement of Spondylarthritis International Society) de la
spondylarthrite axiale
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Infectieuses,
Microcristallines.
- Atteinte rachidienne :
o Pathologies inflammatoires : il faut éliminer :
Infection, en particulier Mal de Pott devant forme pseudo-pottique de
SPA.
Une tumeur, en particulier maladie de Kahler et métastases de cancers
ostéophiles.
Cause rhumatismale : sarcoïdose, PR.
o Pathologies mécaniques :
Chez le sujet jeune : la maladie de Scheuermann ou dystrophie
rachidienne de croissance, caractérisée par un aspect feuilleté des
plateaux, des hernies intraspongieuses et des vertèbres trapézoïdales.
Stabilité des images radiologiques dans le temps.
Chez le sujet âge :
La discarthrose érosive pseudopottique avec pincements
discaux et ostéophytose. L’ostéophyte se distingue du
syndesmophyte par une base d’implantation large, triangulaire
et un développement horizontal.
L’hyperostose vertébrale engainante : elle est peu
symptomatique et réalise des ossifications du ligament vertébral
antérieur, plus épaisse, souvent exubérante, pontant le disque
intervertébral sur plusieurs niveaux, prédominant sur le bord
latéral droit du rachis à son étage dorsal. Une modification des
sacro-iliaques est possible. Le scanner précise qu’il s’agit
d’ossifications antérieures de l’interligne, sans élément
inflammatoire de ce dernier.
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PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE
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4.1. Buts :
- Obtenir la rémission,
- Eviter les complications, éventuellement les traiter.
- Se pose aussi la question de savoir, si une prévention est possible.
4.2. Moyens :
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parentérale par voie IV : méthylprednisolone, utilisée essentiellement
pour les bolus, raison de doses allant de 500 mg à 1g administrées à la
seringue électrique par jour, 3 jours de suite,
topiques,
suspensions retard pour les infiltrations (voir plus loin).
Leurs contre-indications,
Les précautions d’usage,
Les complications.
- Les traitements de fond : il s’agit le plus souvent de traitements d’action lente.
o Classiques : deux sont les plus utilisés : le méthotrexate : 10 à 20 mg par
semaine et la salazopyrine : 2 à 3 g par jour,
o Innovants : les anti-TNF-alpha.
- Autres traitements:
o Antibiotiques : cycliques (arthrites réactionnelles),
o Bisphosphonates : ostéoporose.
o Calcium-vitamine D,
o Anti-ulcéreux : pansements gastriques, sucralfate, anti-H2 (cimétidine,
ranitidine), anti-sécrétoires (oméprazole, lanzoprazole)
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- préventifs : ostéotomie vertébrale pour redonner une horizontalité du regard ;
arthrodèse d’une luxation atloïdo-axoïdienne.
- palliatifs : mise en place de prothèses totales, de hanche ou genou.
- Les traitements non pharmacologiques sont instaurés quelle que soit la forme
clinique,
- Devant une forme axiale en poussée :
o Antalgiques,
o AINS : ils constituent la base du traitement et sont prescrits lors des poussées
inflammatoires, puis lorsque la fréquence des poussées le justifie, au long
cours, la posologie étant modulée en fonction de l’importance de la douleur et
en cherchant toujours la posologie minimale efficace. On conserve alors, une
seule prise quotidienne le soir afin de couvrir au mieux la douleur nocturne.
o Le traitement physique doit être instaurée dès le début de l’affection et
adaptée à l’évolution de la maladie avec une place de choix pour la
physiothérapie.
- Devant une forme mixte :
o Les corticoïdes n’ont classiquement pas de place dans le traitement général de
la SPA. Toutefois, ils peuvent être utilisés dans certaines formes :
o Rebelles aux AINS : à faibles doses et d’une manière transitoire,
o Les traitements de fond, sont surtout préconisées dans les formes avec
atteintes périphériques et reposent essentiellement sur la Salazopyrine et le
Méthotrexate.
o Les traitements locaux complémentaires du traitement général peuvent être
utilisés pour les arthrites périphériques et les enthésiopathies.
- Formes systémiques :
o Corticothérapie forte : sous formes de bolus ou de corticothérapie fortes per os
- La SPA est une affection dont la fréquence est en croissance dans nos structures de
santé,
- Elle affecte surtout le sujet jeune de sexe masculin,
- Elle doit être envisagée devant lombalgie inflammatoire non expliquée notamment par
une infection,
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- Son pronostique est actuellement amélioré par les anti-TNF.
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